PROMESSES
Lorsqu’on commence la lecture de la Première Épître aux Corinthiens, le premier thème qui se dégage est l’opposition vigoureuse que Paul développe entre la sagesse « de ce monde » et la sagesse de la croix. Ensuite, en poursuivant la lecture, la « connaissance » selon les standards de l’époque est elle aussi questionnée (8.2 ; 13.2).
Dans cet article nous définirons tout d’abord la différence entre ces deux termes, avant de les replacer dans le contexte de l’époque. Puis nous relèverons les contrastes entre la sagesse selon l’homme et selon Dieu, minutieusement exposés par Paul dans les deux premiers chapitres. Nous nous interrogerons ensuite sur l’application de ces contrastes à notre environnement du 21e siècle, en soulignant comment établir des points de contact avec nos contemporains tout en évitant la porosité entre les idées ambiantes et les nôtres.
Définition
Dans la Première lettre aux Corinthiens, l’apôtre s’intéresse à la sagesse (sophia) et à la connaissance (gnosis). Paul devait combattre à la fois l’attrait que gardaient les Grecs pour la rhétorique[note]Ensemble de procédés constituant l’art du bien-dire, de l’éloquence (Larousse). [/note] et la dialectique[note]Suite de raisonnements rigoureux destinés à emporter l’adhésion de l’interlocuteur (Larousse). [/note] , et la fascination de « spirituels » pour une forme primitive de gnosticisme [note]Cette doctrine se définit comme une connaissance conduisant au salut par une révélation, réservée aux seuls initiés, des mystères du monde divin et des êtres célestes, des secrets de leur propre origine et des moyens de la rejoindre (Larousse). Ce mouvement, qui s’est propagé dans l’empire romain au cours des 2e et 3e siècles, prône le détachement de l’âme des entraves du corps afin de la ramener à l’état de pureté initiale, et établit des distinctions entre les privilégiés qui accèdent à cette connaissance et le reste des mortels. [/note]. Paul introduit une distinction entre ces deux notions lorsqu’il écrit : « À l’un est donnée par l’Esprit une parole de sagesse ; à un autre une parole de connaissance » (12.8).
Du point de vue linguistique, F. Godet voit dans la terminaison des deux mots en grec une nuance différente : pour la sagesse, le « ia » évoque la possession calme, pour la connaissance le « sis » la recherche en cours. Henri Blocher souligne que la connaissance a généralement un objet, et voit dans les deux termes une différence « d’aspect et d’ampleur. La connaissance est rapport direct avec l’objet connu […] la sagesse, elle, intègre et totalise la connaissance de Dieu et de son œuvre, envisagée dans son ensemble (1 Cor 2.6ss) […] le sage en a les principes comme vivant en lui-même (« Nous avons la pensée de Christ » 2.16) ; ils lui servent alors de guide dans le gouvernement de sa vie ».[note]Henri Blocher, « Sagesse et connaissance », La Bible au scanner, Fac-Réflexion, n° 46-47, p. 32-33. [/note] .
Nous nous focaliserons plus sur la sagesse que sur la connaissance dans cet article étant donné son caractère plus englobant et la longueur du traitement que Paul lui réserve dans cette Première lettre aux Corinthiens.
Contexte de l’époque
Une lecture, même rapide des textes de sagesse de l’A.T. nous présente la sagesse sous un jour positif bien différent du propos de Paul en 1 Cor 1 : c’est donc une « sagesse » bien humaine, du monde, qu’il évoque dans ces lignes. Le monde gréco-romain du 1er siècle vit sous l’influence de différentes écoles de pensées de la philosophie grecque, elles-mêmes fortement influencées par les philosophes de l’antiquité tels que Socrate, Platon et Aristote. Si ces écoles varient dans leur conception du monde, elles s’accordent pour placer l’homme au centre, comme « mesure de toute chose », suivant l’expression du sophiste Protagoras (490-420 av. J.-C.). La plupart insistent sur la maîtrise de l’art du discours et de la dialectique.
Sagesse selon l’homme et selon Dieu
Le long développement des chapitres 1 et 2 oppose successivement la sagesse « de ce siècle » à la croix (1.18-25), à ceux qui sont appelés au salut (1.26-31), à la prédication (2.1-5), et enfin à la véritable sagesse (2.6-16).
La croix et la sagesse humaine (1.18-25)
Les objectifs de l’une et de l’autre ne peuvent être plus différents : là où la sagesse humaine propose aux hommes de tendre vers le monde parfait des idées (Platon), ou le bonheur (épicuriens), ou le détachement de la souffrance (cyniques) ou enfin la réconciliation avec leur destin (stoïciens), la croix est une puissance (plus qu’une sagesse) qui sauve. D’emblée, Paul pose cet enjeu majeur au verset 18, afin de détourner les Corinthiens de leur fascination pour la virtuosité et la perspicacité humaines pour les amener à l’essentiel : être sauvé ou périr. Les versets 19 et 20 démontrent que les instances détentrices de la sagesse sont disqualifiées : leur prétendu savoir est pure absurdité s’il ne leur permet pas d’entrer en relation avec le Dieu de l’univers, qui les a créés et les fait vivre. Déjà en Ésaïe 29, cité ici, les prétendus prophètes que l’on prenait pour des sages étaient incapables de discerner l’action de l’Éternel.
La popularité de leur message est également opposée : là où la sagesse antique est plébiscitée, l’idée que le salut du monde soit réalisé par un homme crucifié est la plus ridicule et rebutante qui soit. Cependant, Dieu a choisi dans sa souveraineté non d’être connu par la sagesse humaine, mais de se révéler par le message de la croix, qui renverse toutes les normes et va à l’encontre des attentes courantes. Ce qui est faible selon les critères humains – la croix – libère la puissance divine pour ceux qui « sont appelés ».
Ceux qui sont appelés au salut et la sagesse humaine (1.26-31)
L’accès à la sagesse divine ou humaine est également radicalement différent : universel pour l’une, élitiste pour l’autre. L’objectif de Dieu, en appelant « les choses basses et méprisées du monde, celles qui ne sont rien », est de faire obstacle à tout orgueil humain. Si la connaissance de Dieu était réservée à ceux qui avaient le plus de sagacité, ils pourraient se vanter d’être supérieurs aux autres d’une part, et auraient un statut de « prêtres » d’autre part, dans le sens que l’on viendrait à eux pour le salut. L’intention de Dieu, en choisissant les plus humbles, est un renversement de valeurs : couvrir de honte (1.27) ceux qui se prétendent sages et puissants, et anéantir[note]Le verbe kartageo, traduit ici par anéantir, signifie « annuler », « rendre sans effets », « anéantir » (terme aussi employé en Rom 6.6 et Héb 2.14).[/note] en définitive le prestige lié au fait d’appartenir à une élite.
Elles diffèrent en termes de fierté et de contenu : au sein d’une société gréco-romaine modelée par les notions d’honneur et de honte, Paul présente Jésus comme unique sagesse, et seule source de fierté possible, en s’appuyant sur la citation de Jérémie 9.22-23. Il détaille le caractère sotériologique[note]En lien avec le salut[/note] de cette sagesse que nous avons « à partir de lui » : justice (pour être en règle avec Dieu), sainteté (ici dans le sens que Dieu nous considère comme saints), et rédemption [note]Terme utilisé pour la libération des esclaves.[/note].
La prédication et la sagesse humaine (2.1-5)
Elles diffèrent également par leur forme, en raison de leur contenu : si Paul voulait persuader ses auditeurs, ainsi qu’on le voit à plusieurs reprises dans le livre des Actes[note]Act 18.4,13 ; 19.8,26 ; 26.28 ; 28.23.[/note] , il ne voulait pas convaincre les Corinthiens d’une manière qui serait allée à l’encontre du message qu’il annonçait. Le cœur de sa prédication, Jésus-Christ « crucifié en faiblesse » (2 Cor 13.4, version Darby), exclut les procédés rhétoriques qui fascinaient les foules dans le monde gréco-romain. Le chemin de la puissance passe précisément par la faiblesse et l’inspiration de l’Esprit.
La véritable sagesse (2.6-16)
Elle n’est pas sagesse de ce temps, elle est mystérieuse : la vision du monde des personnes non-chrétiennes est limitée à l’ère actuelle (1.20 ; 3.18), dont Satan est le dieu (2 Cor 4.4). Si les chrétiens peuvent vivre « conformément à la sagesse dans le temps présent » (Tite 2.12), cette sagesse, préparée « avant tous les temps » est un mystère pour nos contemporains et les « chefs de ce temps » en particulier.
Le cœur de la véritable sagesse réside en Dieu lui-même, dans son projet et sa profondeur : Dieu avait préparé quelque chose de surprenant[note]Comme le rappelle la citation d’És 64.3.[/note] , révélé à ceux qui l’aiment par l’entremise de l’Esprit.
Seul l’Esprit de Dieu, en effet, peut sonder et communiquer la profondeur de la sagesse divine. Celui-ci a une triple fonction : nous révéler la véritable sagesse (2.10,12), nous aider à la communiquer (2.13) et l’appliquer dans nos appréciations de situations ou de personnes (2.15).
L’affirmation finale (2.16) peut paraître arrogante : mais le contexte de la citation d’Ésaïe 40 montre que les plans insondables de Dieu sont inaccessibles aux humains, et que si « nous avons la pensée de Christ », c’est par la grâce seule de Dieu.
Et aujourd’hui ?
La sagesse du 21e siècle présente des traits similaires avec la sagesse grecque, même si certaines caractéristiques secondaires diffèrent. Les contrastes relevés précédemment subsistent donc. Que faire ? Nous préserver de la pensée ambiante ?
L’Écriture trace un chemin étroit permettant d’établir des points de contact entre les deux sagesses afin d’amorcer la discussion avec nos contemporains, sans adopter, peut-être à notre insu, l’idéologie ambiante.
L’apôtre Paul dialogue en Actes 17 avec des philosophes épicuriens et stoïciens et, peu après, dans son discours à l’Aréopage, mentionnera l’autel au dieu inconnu érigé à Athènes [note]L’épisode est d’ailleurs instructif sur l’utilité et les limites de ces « points de contact » : S’ils permettent à Paul de prêcher l’Evangile en étant compris et entendu, ils ne suscitent pas la foi et n’amènent pas à un changement profond d’attitude et de pensée : Seul l’Esprit de Dieu peut opérer cela.[/note]. Pour établir des points de contact, Paul connaissait donc la sagesse de son temps.
Il en connaît aussi le pouvoir de séduction pour nous inciter « à ne pas nous conformer au monde actuel, mais d’être transformés par le renouvellement de l’intelligence » (Rom 12.2, S21) et fustige Démas qui l’a abandonné par amour pour le monde présent (2 Tim 4.10).
« Dans le monde mais hors du monde », en laissant notre esprit être renouvelé par l’Esprit de Dieu pour connaître, communiquer et appliquer dans nos vies sa sagesse : tel est notre défi. Dietrich Bonhoeffer le résume parfaitement dans une lettre à sa fiancée : « Il faut que Dieu nous donne chaque jour la foi ; je ne parle pas de la foi qui fuit le monde, mais de la foi qui tient bon dans le monde […] Je crains que les chrétiens qui n’osent avoir qu’un pied sur la terre n’aient aussi qu’un pied au ciel. »
- Edité par Argaud Christophe
Couper momentanément le son d’un discours télévisé permet de se concentrer sur le langage non-verbal de l’orateur. Ce langage muet a en effet autant d’impact sur l’auditeur que le langage audible.
Couper momentanément le son d’un discours télévisé permet de se concentrer sur le langage non-verbal de l’orateur. Ce langage muet a en effet autant d’impact sur l’auditeur que le langage audible. Couper « le son théologique » de la lettre de Paul (juste le temps d’un article) nous permettra de nous concentrer sur son auteur, son attitude, sa relation avec ses lecteurs, sa pédagogie, ses émotions.
La communication de Paul est un message en soi !
Une communication fondée sur une relation bien établie
Les croyants de Corinthe connaissent bien celui qui leur adresse cette lettre. C’est celui qui leur a apporté l’évangile et a séjourné chez eux 18 mois (Act 18.1-17). La plupart d’entre eux gardent le souvenir d’un homme sans prétention, assez humble pour exercer un travail manuel, qui s’effaçait pour faire ressortir uniquement la sagesse et la puissance de Dieu (2.1-5). Il leur a écrit (5.9), puis a envoyé Timothée (4.17) pour prendre des nouvelles d’eux. À leur tour, ils lui ont écrit pour lui poser des questions.
Cette lettre s’inscrit ainsi dans une relation personnelle bien établie. Paul peut leur rappeler son autorité d’apôtre sans être accusé d’ingérence autoritaire ou méprisante. Il agit comme un père envers ses enfants bien-aimés (4.14-15) : il les aime, donc il veut le meilleur pour eux.
C’est donc tout naturellement que Paul s’identifie souvent à ses destinataires : il emploie le « nous » une cinquantaine de fois.
Une communication fondée dans la bienveillance
La bienveillance apparaît sous au moins trois formes :
L’amour : Il agit comme un père envers ses enfants bien-aimés (4.14-15). Mais il les appelle aussi « frères », pour ne pas se mettre au-dessus d’eux.
La reconnaissance : Il loue Dieu continuellement pour ce qu’il fait en leur faveur (1.4) et continuera de faire (1.8) jusqu’à les rendre irréprochables. Les Corinthiens ne sont pas « son projet » mais celui de Dieu ; et Dieu est fidèle. Son but n’est pas moins que les amener à « la communion de son Fils » (1.9).
La confiance : savoir que Dieu agit, remplit Paul de confiance, sans l’empêcher de constater les erreurs de ses « enfants bien-aimés ». Il garde ainsi une haute appréciation de leur appel et de leur potentiel (1.5-7).
Paul a entendu des nouvelles attristantes et inquiétantes : des divisions apparaîtraient dans l’église (11.18). Sa bienveillance ne l’amène pas au déni mais à la prudence : « Je le crois en partie ». Il prend soin de citer discrètement sa source (1.11) : pas de dénonciation anonyme !
Une communication fondée sur le respect et l’exemplarité
Paul exprime plusieurs fois son respect envers ses interlocuteurs et leurs capacités :
« En lui vous avez été comblés de toutes les richesses qui concernent la parole et la connaissance. » (1.5)
« Nous savons que nous avons tous la connaissance. » (8.1)
« Je parle comme à des hommes intelligents ; jugez vous-mêmes de ce que je dis. » (10.15 ; cf. 11.13 ; 14.20)
Paul a utilisé le même mot mais de façon ironique (« vous êtes sages/intelligents en Christ », 4.10). Ainsi il rejette l’intelligence qui prétend se justifier elle-même, mais il fait appel à l’intelligence des Corinthiens pour comprendre et juger son argumentation. Il donne des critères de décision (8.9-13) mais respecte leur liberté de décider au cas par cas (10.27).
En contrepartie Paul veille à être crédible en maintenant une exemplarité sans faille, toujours conscient de la grâce de Dieu envers lui (10.8-10).
Une communication fondée sur une pédagogie participative
Paul ne donne pas un cours magistral. Il prend à témoin ses interlocuteurs, s’appuie sur leurs acquis, les fait réfléchir. La lettre est ainsi parsemée de presqu’une centaine de questions, pour que les réponses viennent d’eux et non pas de lui. Certaines sont particulièrement fortes (10.22).
Une expression revient une dizaine de fois : « ne savez-vous pas que… ? » Il fait appel à leur savoir « spirituel » (3.16 ; 6.2-19) ; mais aussi à leur savoir très terre-à-terre concernant les propriétés du levain (5.6) ou le règlement des compétitions sportives (9.24).
Une communication ancrée dans la réalité
Paul n’est pas dans la théorie abstraite. Il traite de situations réelles, répond à des questions précises. Il cite des noms (1.12), mentionne des cas probablement identifiables (5.1), fait allusion au contexte religieux (10.19-20), parle de shopping (10.25-26) et de vie sociale (10.27-28). Il décrit en détail leur manière de prendre le repas du Seigneur. Il montre ainsi aux Corinthiens qu’il les a écoutés et compris mais aussi qu’il est bien au courant de leur vie d’église ; il leur répond d’une façon spirituelle mais pertinente par rapport à leurs préoccupations. Quand il leur parle de l’idolâtrie, il leur fait « visualiser » deux tables qu’ils connaissent bien : celle du repas du Seigneur et celle du repas des idoles-démons : l’incompatibilité de ces deux situations opposées devient évidente. Il utilise des exemples de la vie courante : planter-arroser, construire une maison, participer à une compétition sportive, etc.
Une argumentation fondée sur les Écritures
Sur la question des viandes sacrifiées aux idoles, Paul aurait pu répondre par quelques versets bien choisis de l’A.T. sur les images taillées ou les idoles, et rappeler l’injonction du « concile de Jérusalem » (Act 15.20,29). En ajoutant quelques mots d’avertissement, il aurait apporté une réponse simple et catégorique. Pourquoi prend-il la peine d’écrire trois chapitres entiers sur ce point, pour finalement ne pas répondre clairement par OUI ou par NON ? Voici quelques éléments de réponse possibles.
On pose une question à Paul ; il répond de façon personnelle et personnalisée.
La question est posée dans un certain contexte ; sa réponse tient compte de ce contexte.
Il reconnaît la difficulté des problèmes posés, comprend les arguments des uns et des autres même s’il ne partage pas leurs conclusions.
Il tient à développer les différents enjeux sous-jacents de la question de ces viandes provenant de sacrifices à des idoles : l’impact sur les frères, l’arbitrage entre liberté individuelle et la responsabilité collective, l’incohérence d’une double loyauté affichée même si non réelle, et surtout le manque de respect outrageant envers le Seigneur. Ainsi la réponse n’est pas un avis « ex cathedra » de Paul mais une démonstration argumentée et convaincante.
Il se réfère à l’A.T. mais pas en citant un commandement. Il rappelle deux épisodes tragiques de l’histoire du peuple israélite (Ex 32 et Nom 25). Ce peuple recevait de Dieu un aliment et un breuvage spirituels. Il a voulu aussi s’asseoir pour manger et pour boire autre chose. La suite : il s’est levé pour se divertir (dans l’immoralité sexuelle) et est tombé dans l’idolâtrie. Cela a provoqué l’indignation de Dieu et entraîné un terrible châtiment. Paul ne se contente pas de réaffirmer un commandement ; il décrit les conséquences d’une désobéissance sur ce point. Des personnes intelligentes comme les Corinthiens ne peuvent que souscrire à la conclusion : « fuyez l’idolâtrie ».
Pour l’immoralité, Paul ne dit pas que c’est interdit. Il rappelle que « votre corps est le temple du Saint-Esprit » (6.19). De même pour la question des procès entre chrétiens, il met en avant le fait que les saints jugeront le monde (6.2). Aux corinthiens d’en tirer les conclusions.
Ainsi Paul cite les Écritures mais sans être légaliste, il fait réfléchir mais sans tomber dans une philosophie dénuée de fondement solide. Il ne donne pas une réponse sèche et autoritaire : il mobilise les capacités intellectuelles et spirituelles de ses frères. Ils vont le suivre dans ses conclusions par conviction personnelle et pas seulement par soumission.
Une communication qui utilise l’émotionnel… sans en abuser
Paul est apôtre et théologien, mais il a un cœur de père, il est animé par un fort sentiment de la grandeur de Dieu. On le sent tour à tour passionné (6.19-20), enthousiaste (15.51), ému (10.20-22), affectionné (4.14), triste (3.1) indigné (5.1-5).
Paul est ainsi transparent dans ses émotions mais il reste dans une démarche spirituelle. Il veut convaincre et pas séduire ou manipuler.
Sa description de l’amour (13.1-7) est très touchante. Mais sa priorité n’est pas d’éviter à tout prix les « émotions négatives » : la priorité est une juste appréciation de la réalité et de la vérité. C’est parfois un moment difficile mais indispensable pour progresser. Si nécessaire, il « appelle un chat un chat » (3.1-3 ; 6.9-11) et il pousse à une douloureuse prise de conscience : la honte (au sens de confusion momentanée ; 6.5 ; 15.34) qui permet de sortir d’une impasse[note]NB : Cela est bien différent de la honte imposée par un tiers, qui enferme une personne dans le mépris, lui dénie toute valeur (11.22). [/note].
Conclusion
Fermeté et clarté, mais avec amour, respect et empathie : ces mots évoquent quelques aspects de la communication de Paul dans cette lettre.
Cette attitude provient avant tout des motivations profondes du communicant : amour pour Dieu, amour pour les destinataires, humilité. Mais elle se perfectionne avec l’expérience. Un message est pertinent et recevable seulement s’il est émis par une personne crédible et bienveillante, avec une vraie ouverture et de cœur et d’esprit envers les destinataires.
Cette attitude est particulièrement nécessaire en cas de décalage générationnel, culturel ou spirituel : communiquer avec des gens différents demande toujours de la bienveillance, de l’humilité, une écoute attentive, une capacité à percevoir le contexte de l’autre. La méthode interactive a un énorme avantage : le destinataire participe à l’élaboration du message, il se l’approprie plus facilement.
« Nous en parlons, non avec des discours qu’enseigne la sagesse humaine, mais avec ceux qu’enseigne l’Esprit, employant un langage spirituel pour les choses spirituelles. » (2.13)
- Edité par Lacombe Jean
Corinthe au 1er siècle
La situation géographique de Corinthe
Corinthe est une ville située sur l’étroit isthme de terre qui sépare le Péloponnèse et l’Hellade, approximativement au centre de la Grèce actuelle. Deux ports en dépendaient : Cenchrée (Rom 16.1), à 6 km à l’est, sur le golfe d’Égine et Lechaion, à 3 km au nord, sur le golfe de Corinthe.
Corinthe était une ville très active, un centre commercial majeur, favorisé par sa situation géographique. Afin d’éviter un long contournement du Péloponnèse, les bateaux étaient transportés entre les deux golfes.
Corinthe était aussi renommée pour ses arts et ses techniques : plus industrieuse que sa voisine Athènes, elle ne comportait pas d’université de renom mais les habitants y partageaient néanmoins le goût des joutes verbales et des questions philosophiques.
La situation historique de Corinthe
Dans sa période grecque, Corinthe fut une ville florissante, la cité-mère de plusieurs colonies importantes, dont Syracuse. Elle fut l’alliée de Sparte contre Athènes pendant les guerres du Péloponnèse. À la suite d’un soulèvement, elle fut brûlée en –146 par les Romains.
Après un siècle, s’ouvrit la période romaine lorsque la cité fut rebâtie par Jules César en –44. Elle devint rapidement la cité grecque la plus prospère et la plus puissante, capitale de la province romaine de l’Achaïe, gouvernée par un proconsul ; avec environ 100 000 habitants, elle faisait partie des cinq plus grandes villes de l’Empire et, comme colonie romaine, elle disposait de liaisons fréquentes avec Rome[note]D’où la longue liste de noms de Romains 16 (lettre écrite depuis Corinthe).[/note] .
La situation morale de Corinthe
Corinthe était réputée dans l’Antiquité pour être :
Un haut lieu de l’immoralité : Le temple d’Aphrodite (la déesse de l’amour et de la fertilité, liée à l’Astarté ou Astaroth des Phéniciens), situé à 600 m au sommet de la colline dominant la ville, était dédié à un culte comportant des orgies impures et de la prostitution sacrée ; on dit que mille prêtresses y officiaient. La ville, comme beaucoup de ports, était réputée pour sa vie dissolue : les visiteurs y venaient comme dans une ville de plaisirs, où les tarifs étaient élevés. Tout cela s’inscrivait dans le contexte général de la Grèce antique : l’homosexualité y était fréquente et l’infidélité conjugale était considérée comme normale.
Un haut lieu des loisirs : tous les deux ans, la ville était le siège des Jeux Isthmiques, les seconds en importance après les Jeux Olympiques.
Des parallèles sont faciles à tracer entre notre contexte culturel et celui des Corinthiens : développement économique, richesses, échanges faciles, sports et loisirs, licence morale…
L’actualité de cette Épître n’en est que plus grande.
L’enjeu de la contextualisation
Bien d’autres détails culturels pourraient être ajoutés : historiens et théologiens ont creusé et recreusé le contexte de l’Épître pour essayer d’expliquer les passages les plus délicats. Certainement, il est très utile de connaître l’arrière-plan des destinataires pour comprendre la lettre[note]En particulier sur les sujets concernant l’esclavage, la relation patron-client, la place des femmes, les coutumes idolâtres, etc. Pour une approche compétente, voir le commentaire d’un spécialiste, Ben Witherington III, Conflict and Community in Corinth: A Socio-Rhetorical Commentary on 1 and 2 Corinthians, Eerdmans, 1995.[/note] et de nouvelles découvertes apportent régulièrement des lumières sur telle portion jusque-là obscure.
Toutefois, il serait dommage de relativiser à outrance les enseignements de l’Épître en se retranchant derrière les spécificités de la situation des Corinthiens. Paul souligne d’entrée que la portée de sa lettre va au-delà de cette église locale pour concerner « tous ceux qui invoquent en quelque lieu que ce soit le nom de notre Seigneur Jésus-Christ, leur Seigneur et le nôtre » (1.2). Au cours de l’Épître, il répétera sous diverses formes qu’il leur donne le même enseignement qu’aux autres églises locales (4.17 ; 7.17 ; 11.16 ; 14.33 ; 16.1).
Comme toutes les Épîtres du N.T., 1 Corinthiens nous présente donc des vérités générales « en situation », dans un contexte particulier. Il faudra garder l’équilibre entre la relativisation du message liée à la contextualisation et le maintien de son universalité.
Naturellement, plus nous trouverons dans d’autres Épîtres des échos d’un enseignement donné ici, plus son universalité sera évidente. Et si, sur tel texte délicat, nous n’avons pas toutes les précisions que nous souhaiterions, peut-être est-ce une indication pour être prudent afin de laisser suffisamment de flexibilité aux adaptations propres à chaque contexte, à chaque époque, à chaque lieu.
L’apôtre Paul et l’église de Corinthe
La fondation de l’église
C’est au cours de son second voyage missionnaire que Paul a fondé l’église de Corinthe (Act 18.1-18 ; cf. 4.14-15). Il est resté dix-huit mois (de fin 50 à début 52), œuvrant d’abord comme fabricant de tentes pour subvenir à ses besoins avant de travailler à plein temps pour évangéliser et enseigner. Après son départ, Apollos y a développé un ministère fécond (cf. 3.6).
La situation de l’église
Au travers des Actes et des deux lettres qui nous sont conservées, il est possible de donner quelques caractéristiques de l’église au moment où Paul lui écrit :
Elle est grande : « un peuple nombreux » (Act 18.10).
Elle est jeune : quand Paul rédige 1 Corinthiens, vraisemblablement mi-54, cela fait tout au plus 4 ans que les plus anciens se sont convertis.
Elle est mixte : comme ailleurs, s’y côtoient des chrétiens d’origine juive et d’autres — majoritaires — d’origine païenne ; quelques chrétiens riches ainsi que beaucoup de pauvres et d’esclaves (cf. 1.26).
Elle est immature : Paul leur reproche d’être restés des enfants (14.20 ; 3.1) et d’être encore charnels (3.2-3).
Elle est orgueilleuse, fière de ses dons et de sa liberté (4.18 ; 5.2).
Elle est divisée entre factions rivales (11.18-19 ; 1.10-13).
Lettres et visites : les relations ultérieures
Après son départ, Paul a continué à entretenir des liens avec l’église de Corinthe, alimentés par des visites et des lettres. Le tableau ci-dessous tente de résumer les interactions complexes entre eux :
Date | Nature | Référence | |
visite | 50-52 | 1ère visite de Paul : fondation de l’église par Paul | Actes 18.1-21 52 |
lettre | 52 | Lettre de Paul aux Corinthiens : « 0 » Corinthiens | Je vous ai écrit dans la lettre… (1 Cor 5.9) |
lettre | 53 | Lettre des Corinthiens à Paul | Pour ce qui est des choses au sujet desquelles voum’avez écrit… (1 Cor 7.1) |
visite | 54 | Visite de Timothée | Je vous ai envoyé Timothée… (1 Cor 4.17) |
lettre | 54 | Lettre de Paul aux Corinthiens : 1 Corinthiens | |
visite | 54/55 | 2e visite de Paul, rapide : conflit | Cette 3° fois je suis prêt à aller auprès de vous… (2 Cor 12.14) |
lettre | 55 | Lettre « sévère » : « 1,5 » Corinthiens | Je vous ai écrit dans une grande affliction (2 Cor 2.4) |
visite | 55/6 | Visite de Tite | Dieu nous a consolés par la venue de Tite (2 Cor 7.6) |
lettre | 56 | Lettre de Paul aux Corinthiens : 2 Corinthiens | |
visite | 56/57 | 3e visite de Paul : finalisation de la collecte | Je vais à Jérusalem, étant occupé au service des saints ; car la Macédoine et l’Achaïe ont trouvé bon de subvenir, par une contribution, aux besoins des pauvres d’entre les saints qui sont à Jérusalem (Rom 15.25-26) |
Au total, cinq lettres ont été échangées, auxquelles s’ajoutent trois séjours de Paul et deux visites de ses associés. Lorsque Paul écrit sa Première Épître, il a déjà écrit une lettre aux Corinthiens et en a reçu une de leur part. De plus, il vient de leur envoyer Timothée pour essayer de régler certains points. Dieu n’a pas permis que ces deux lettres soient conservées, ce qui rend plus difficile la compréhension de certains points précis de l’Épître. En particulier, il semble que, à plusieurs reprises, Paul cite des extraits de la lettre des Corinthiens pour réfuter une partie de leur argumentation. [note]Les commentateurs ne s’accordent pas sur le nombre et l’étendue des citations. Parmi les plus sûres, citons : « Il est bon pour l’homme de ne pas toucher de femme » (7.1b), « Tout m’est permis » (6.12) ou « Nous avons tous la connaissance » (8.1b). [/note]
La structure de la lettre
La double occasion de la lettre
Paul a deux raisons pour écrire sa lettre :
Il a reçu des visites de chrétiens de Corinthe : les « gens de Chloé » sont venus avec des nouvelles alarmantes (1.11), qui corroboraient celles colportées par la rumeur publique (5.1 ; 11.18). D’autres frères de Corinthe sont également venus vers Paul (16.17). L’apôtre veut donc répondre à ces nouvelles inquiétantes (ch. 1 à 6).
Paul a aussi reçu une lettre de la part des Corinthiens et répond à leurs questions : « Pour ce qui concerne les choses au sujet desquelles vous m’avez écrit… » (7.1) La même expression « pour ce qui concerne » se retrouve litt. en 7.1,25 ; 8.1,4 ; 12.1 ; 16.1,12. Les ch. 7 à 16 sont consacrés à ces réponses.
Ainsi l’Épître se divise très simplement en deux grandes parties :
Introduction et action de grâces | 1.1-9 | |
A. Les problèmes à régler dans l’église à Corinthe | 1.10-6.20 | |
1. Le problème des divisions dans l’église | immoralité intellectuelle | 1.10-4.21 |
2. Le problème de l’inceste | immoralité sexuelle | 5.1-13 |
3. Le problème des procès entre frères | immoralité relationnelle | 6.1-11 |
4. Le problème du laxisme moral | immoralité corporelle | 6.12-20 |
B. Les questions posées par l’église à Corinthe | 7.1-16.18 | |
1. Les questions sur le mariage et le célibat | désordre moral | 7.1-40 |
2. La question sur la liberté chrétienne | désordre comportemental | 8.1-11.1 |
3. Les questions (implicites) sur l’ordre dans l’église | désordre liturgique | 11.2-34 |
4. La question sur les manifestations spirituelles | désordre charismatique | 12.1-14.40 |
5. La question (non formulée) de la résurrection | désordre doctrinal | 15.1-58 16.1-18 |
6. Les questions sur les prochaines visites à Corinthe désordre relationnel | désordre relationnel | 16,1-18 |
Conclusion et salutations | 16.19-24 |
Notons que Paul commence par le sujet des divisions dans l’église et il y consacre plus de 80 versets. Si nous avions dû écrire à une assemblée où plusieurs niaient la résurrection, où un cas d’inceste avéré était toléré, où les fidèles se faisaient des procès, où le repas du Seigneur était bafoué, etc., aurions-nous commencé par ce thème ? Sans doute pas ! C’est dire à quel point pour Paul ce problème était important. Nous considérons parfois avec légèreté les divisions dans l’église et déguisons des questions de personnes derrière des prétextes doctrinaux ; sachons, comme l’apôtre, les aborder de front. Le plan de l’Épître nous enseigne !
Le thème général de la lettre
1 Corinthiens est une Épître riche de sujets très variés ; elle se résume mal dans une formule lapidaire et l’on peine à y discerner un thème fédérateur unique. Les nouvelles reçues étaient diverses et les questions également ; aussi Paul est-il conduit à traiter de nombreux thèmes.
Néanmoins deux grandes lignes parcourent toute l’Épître et unifient les deux grandes parties :
Les conflits internes : ils se marquent par les divisions (1-4), les procès (6), les comportements lors du repas du Seigneur (11), les opinions sur les dons spirituels (12) et les carences de leadership (16), etc.
Les compromis culturels : les Corinthiens avaient beaucoup de peine à rompre avec leur arrière-plan, tant moral qu’intellectuel, que ce soit par rapport à la sagesse (1), à l’immoralité (6), au mariage (7), aux repas dans les temples (10), à la conduite des femmes (11), à la résurrection (15), etc.
Une lettre de sujets « chauds »
Une lettre actuelle
1 Corinthiens est une lettre de contestation… et une lettre contestée ! Nous y trouvons nombre de questions « chaudes », au 1er siècle comme au 21e ! Il est frappant que cette Épître, qui commence par une critique virulente de Paul contre les divisions, traite des sujets qui ont été le plus fréquemment la cause de divisions au cours de l’histoire de l’Église. Qu’il suffise de citer : la cène, le baptême de l’Esprit, le parler en langues, le rôle des femmes dans l’Église, l’excommunication, le don de prophétie, les relations sexuelles, le divorce, le célibat, etc.
Pour les traiter, Paul s’adresse à notre être entier : à l’intelligence (10.15), à la conscience (8.12) et au cœur (14.1).
1 Corinthiens est aussi l’Épître des « demi-versets ». Nous y trouvons des expressions qu’il est facile de sortir de leur contexte pour confirmer des idées a priori :
– « Celui qui ne se marie pas fait mieux » (7.38, Darby) pour imposer le célibat ;
– « Tout m’est permis » (6.12) pour justifier tout comportement ;
– « Je désire que vous parliez tous en langues » (14.5) pour faire de ce don le plus recherché et le plus universel ;
– « Tous revivront en Christ » (15.22) pour prouver l’universalisme, etc.
Il est ainsi possible de faire dire à Paul le contraire de sa pensée ! Bien souvent, les divisions dans l’Église sur les thèmes de notre lettre ont été le fait de groupes qui se sont focalisés sur un aspect de la vérité en l’érigeant en absolu au détriment d’une vision équilibrée de l’ensemble de la vérité chrétienne. En remettant ces « demi-versets » dans leur contexte, nous saisissons au contraire ce que l’Esprit veut nous communiquer.
L’étude de 1 Corinthiens nécessite donc une exégèse soigneuse basée sur une herméneutique solide. Et si des conclusions différentes des nôtres sur des points secondaires sont tirées par des chrétiens rigoureux, attachés à l’inerrance et à la toute-suffisance de l’Écriture, écoutons-les et gardons-nous de nous diviser sur ces sujets.
Une lettre christologique
Toutes les questions traitées dans 1 Corinthiens ne sont pas toutes réglées ni solubles simplement. Ne nous laissons cependant pas envahir par elles. Car, par-dessus tout, la lettre est centrée sur une personne : Jésus-Christ, crucifié (2.2) au début et ressuscité (15.20) à la fin. Il est présent à chaque page : il n’est pas divisé (1.13) ; il est notre pâque (5.7) et nous encourage à vivre dans la pureté car il nous a acheté à grand prix (6.20). Il est celui qui est mort pour mon frère (8.11), nous prenons la cène en mémoire de lui (11.24) et il est présent dans chaque membre de son corps (12.12,27).
Et Paul de conclure « christologiquement » : « Maranatha ! [Notre Seigneur, viens !] Que la grâce du Seigneur Jésus soit avec vous !
- Edité par Prohin Joël
« Je vous ai enseigné avant tout, comme je l’avais aussi reçu, que Christ est mort pour nos péchés, selon les Écritures ; il a été enseveli, et il est ressuscité le troisième jour, selon les Écritures » (15.3-4).
Si l’on devait retenir un seul texte de cette longue lettre aux Corinthiens, ce serait peut-être celui-ci puisque, par l’expression « avant tout », Paul lui-même le met bien en évidence. Jésus-Christ, mort et ressuscité selon les annonces faites dans l’A.T., est le cœur de l’évangile.
Dans les quatorze chapitres qui précèdent ce verset, l’apôtre a abordé de nombreux sujets. Plusieurs seront détaillés à travers ce numéro : la discipline ecclésiastique, le mariage et le célibat, le repas du Seigneur, le parler en langues. Tous ces thèmes sont importants à leur place — mais seulement à leur place, qui n’est pas la place centrale.
La place centrale revient « avant tout » à Jésus-Christ. Nos prédications, nos études bibliques, nos lectures personnelles, nos pensées doivent « avant tout » commencer par lui, être centrées sur lui, nous ramener à lui — et alors tout le reste prendra sa vraie place.
- Edité par Prohin Joël
« Le jour du sabbat, Jésus entra d’abord dans la synagogue, et il enseigna. Ils étaient frappés de sa doctrine ; car il enseignait comme ayant autorité, et non pas comme les scribes. […] Il commande avec autorité même aux esprits impurs, et ils lui obéissent ! » (Marc 1.21-22,27)
Dans la synagogue de Capernaüm, Jésus montre deux facettes de son autorité :
– Tout d’abord, l’autorité de sa prédication ne laisse personne indifférent. Faute d’autorité personnelle, les scribes se référaient à leurs prédécesseurs et renforçaient les prescriptions de la loi par leurs « commandements d’hommes » (Marc 7.7). Le Seigneur, lui, dit souverainement : « Mais moi je vous dis… » (Mat 5.22). Son autorité s’impose d’elle-même à tous.
– Immédiatement après, l’autorité de Jésus apparaît de façon encore plus impressionnante quand il chasse un esprit impur hors d’un démoniaque présent dans l’enceinte même de la synagogue.
La mission de Jésus consiste à libérer l’homme des chaînes qui l’entravent : chaîne physique de la maladie et de la souffrance, chaîne de l’emprise de Satan, chaîne de l’incompréhension de la vraie pensée de Dieu exprimée à travers sa parole. Les deux premières chaînes sont bien visibles, la dernière l’est beaucoup moins : c’est une chaîne « religieuse » !
Par ces exemples, le Seigneur nous montre ce qu’est la véritable autorité. Elle n’est pas synonyme de répression, de paralysie, de contrainte. Au contraire, l’autorité selon Dieu doit permettre à ceux dont on a la charge de se débarrasser de leurs chaînes pour vivre en liberté devant Dieu. Père ou mère, responsable dans une entreprise, ancien dans une église, etc., nous pouvons détenir une part d’autorité ; exerçons-la à l’image du Maître, pour libérer.
- Edité par Prohin Joël
Définition de l’abus
Le terme « abus » vient du latin abusus qui signifie « mauvais usage ». Il désigne le mauvais emploi, l’emploi excessif de quelque chose. Dans le domaine social, cette notion rejoint celle de l’injustice.
L’abus spirituel a été défini ainsi : « C’est le mauvais traitement infligé à une personne ayant besoin d’aide, d’encouragement et de soutien — traitement qui, au contraire, contribuera à affaiblir ou détruire sa vie spirituelle.[note]David Johnson, Jeff Van Vonderen, Le pouvoir subtil de l’abus spirituel, Emeth Éditions, 1998.[/note] »
C’est intéressant, mais cette définition est trop centrée sur l’expérience de l’individu abusé. Certaines personnes sont des hypersensibles qui sont trop facilement blessées ! Le sentiment d’être maltraité ne légitime pas forcément la qualification d’abus.
Je dirais donc qu’un abus est avant tout un péché commis sur autrui, notamment par un responsable d’Église. C’est l’Écriture qui doit définir ce qu’est ce péché, qu’il soit intentionnel ou pas, et c’est par ce biais que doit être évalué l’abuseur.
L’abus spirituel, au-delà de sa laideur intrinsèque, démotive et déresponsabilise ceux et celles qui en sont victimes. Bien souvent, cette perte de zèle s’accompagne d’une vraie tristesse, d’une dévalorisation de soi.
Le cadre spirituel général dans une Église
Le cadre suivant présente les éléments d’un code de conduite susceptible d’éviter une situation d’abus spirituel.
L’autorité est en Dieu seul
Dieu œuvre à tout réunir sous un seul chef, le Christ (Éph 1.9-10), qui est le chef suprême de l’Église (Éph 1.22 ; Col 1.18).
Ainsi, toute autorité humaine n’est que délégation et ceux qui la reçoivent en rendront compte à Dieu. Une telle délégation présuppose un cadre, des tâches spécifiques et des limites (cf. Mat 28.18-20 ; Héb 13.17). Prétendre posséder une autorité « de la part du Seigneur » pour parler à d’autres en dehors de ce cadre peut être une forme d’abus spirituel.
Le responsable a une obligation de moyens
La manière dont un responsable se comporte est plus importante que le résultat de son service. Il a une exigence de moyens mais pas de résultat — il ne doit pas changer sa manière de faire (douceur, enseignement) pour tenter d’obtenir un meilleur résultat (en utilisant, par exemple, la manipulation ou la menace).
Des comportements dénoncés ou encouragés dans l’Écriture forment un socle utile pour comprendre ce que peut être l’abus spirituel :
Jésus dénonce l’hypocrisie des religieux : ils préfèrent leurs propres traditions à l’autorité de l’Écriture (Mat 15.1-9) ; ils disent mais ne font pas, exigent beaucoup des autres, cherchent à être admirés, exigent d’être appelés par leur titre, profitent financièrement des gens vulnérables, ne savent pas distinguer le secondaire de l’essentiel, notamment « le droit, la miséricorde et la fidélité », et sont incapables de reconnaître leur corruption intérieure (Mat 23).
Paul demande au serviteur de Dieu de ne pas avoir de querelles, et de montrer de la bienveillance envers tous, y compris les adversaires qu’il doit reprendre avec douceur ; il compte sur l’œuvre de Dieu qui est toujours à l’origine de toute repentance authentique (2 Tim 2.24-26).
Pierre exhorte les anciens à s’occuper de l’Église de bon cœur, sans aigreur, sans chercher à profiter de cette charge, sans menacer ou dominer, sans revendiquer leur statut, mais en étant surtout un exemple pour ceux que Dieu lui confie, en manifestant un esprit humble qui attend du Seigneur l’ultime approbation de son travail (1 Pi 5.1-5).
Pierre, Jean, Jude et Paul mettent aussi l’accent sur la protection de l’Église face aux loups et aux diviseurs (1 Jean 4.1 ; 2 Cor 11.14 ; Tite 1.10 ; 3.10-11 ; Jude 1.4,18 ; cf. Apoc 2.18).
1 Corinthiens 13 met en avant la prévalence de l’amour dans l’exercice des dons spirituels. Pierre fait de même (1 Pi 4.7-11). Aucun talent (enseignement, exhortation, conseil, etc.) n’a de valeur en l’absence d’amour.
L’exercice du ministère sans bienveillance ni paix est une forme d’abus spirituel.
Les chrétiens ont une exigence de soumission réciproque
Le N.T. contient aussi beaucoup d’exhortations sur la qualité relationnelle qui doit régner dans l’église :
• Toute l’Église doit vivre sous le principe d’une soumission mutuelle (Éph 5.21). Dans un certain sens, nous sommes chacun à la fois en position de leadership et en position de suiveur, y compris les pasteurs.
• Matthieu 18.15-20 place chaque disciple devant l’obligation d’être le gardien de son frère, quitte à demander l’arbitrage de la communauté. Et s’il n’écoute pas, d’être entouré de gens qui pourront arbitrer lorsqu’un avis adverse est exprimé. Galates 6.1-5 exhorte chacun à exercer de la douceur lorsqu’un frère défaille.
• Les relations dans l’église doivent être empreintes de douceur et viser l’unité (Phil 2 ; Col 3-4 ; Éph 4-6, etc.)
L’ambiance et la santé d’une église dépendent de la contribution de tous, et non de la seule expression du leadership de ses responsables.
Les chrétiens ont un devoir de respect envers les responsables
La Bible enseigne le principe du respect des responsables : « Obéissez à vos conducteurs et soyez-leur soumis. Car ils veillent au bien de vos âmes, dont ils devront rendre compte. Faites-en sorte qu’ils puissent le faire avec joie et non en gémissant, ce qui ne serait pas à votre avantage » (Héb 13.17 version Segond 21). Le choix de respecter et de suivre les responsables est propre au disciple (personne ne lui impose cette attitude).
Cette attitude est reprise dans plusieurs passages du N.T. (1 Thes 5.12-13 ; 2 Thes 3.14 ; 1 Cor 16.16 ; 1 Pi 5.5). Un comportement d’opposition et de rejet, de non-remise en cause de soi, est une forme d’abus spirituel inverse, envers les responsables.
En résumé, il y a bien dans les Églises des hommes et des femmes censés conduire les assemblées. Ceux-ci doivent s’acquitter de cette tâche avec bienveillance, conscients qu’ils ne font que servir ceux que Christ a rachetés. Ils devront rendre compte de leur service (Héb 13.17). Les membres des Églises doivent encourager ce service, tout en restant attentifs à ne pas se laisser entraîner par des attitudes ou des comportements coupables de responsables abusifs. Ensemble, l’Église porte la responsabilité de l’édification mutuelle, portée par l’Esprit Saint (cf. 1 Cor 12.7 ; 1 Pi 4.10-11).
Synthèse sur les abus spirituels
La pastorale de notre union d’Églises a conclu qu’il y a abus spirituel lorsqu’une personne (notamment un responsable) agit contrairement aux principes bibliques évoqués (particulièrement si c’est répétitif), notamment par un comportement :
• sans maturité spirituelle (c’est-à-dire sans un esprit de paix, de conciliation, de douceur, de patience et de vérité, etc.) ;
• ou sans exemplarité minimale (elle est empêtrée dans les comportements qu’elle dénonce) ;
• en exerçant une pression psychologique inacceptable (que ce soit par menaces, harcèlements, ton de la voix, contexte inapproprié, etc.) ;
• sur un groupe ou sur une personne (rencontre individuelle ou de groupe) ;
• en détruisant l’autonomie humaine, psychologique et spirituelle d’une personne ou d’un groupe (sans faciliter une prise de conscience de l’intéressé ou une discussion collective) ;
• en sorte que les décisions ou orientations d’une personne ou d’un groupe sont verrouillées (sans discussion ni avancements possibles en dehors des directives de l’abuseur) ;
• et ne viennent pas du cœur de l’individu ou du groupe concerné.
Il n’y a pas abus spirituel, lorsqu’une personne (même un responsable) rappelle les vérités morales ou théologiques de la Bible :
• avec respect et douceur ;
• jusqu’à demander la repentance et le changement ;
• même si cela aboutit à une discipline d’Église (cf. Mat 18) ;
• en restant toujours ouvert à être repris par d’autres (et notamment par d’autres responsables).
Le service du responsable doit donc s’exercer :
1. par l’exemple,
2. avec amour et douceur,
3. dans l’humilité,
4. en étant fidèle à la Bible,
5. en évitant les conflits,
6. en protégeant l’Église des « loups »,
7. en comptant sur Dieu.
Le comportement d’un chrétien doit être bienveillant, viser l’unité et l’encouragement réciproque. Il doit faciliter le ministère des responsables par une attitude constructive et respectueuse.
Pour prévenir les abus spirituels, il est nécessaire de créer une culture d’Église spirituellement équilibrée :
• Une ambiance de grâce : prédication, conseil, dialogue doivent exprimer que Christ est le seul héros de la Bible, et que le pécheur trouve un secours réel auprès de lui. Que personne n’est exempt de la difficulté du péché, et des luttes qu’elle génère.
• Une recherche sincère de sainteté : l’Église doit également être un groupe où l’on est encouragé à dépasser la médiocrité ambiante.
• Un environnement de transparence pour partager avec simplicité ses fardeaux ou ses manquements au sein de petits groupes qui se respectent suffisamment pour maintenir la confidentialité.
• Une culture d’encouragement réciproque : apprendre à donner et à recevoir des conseils. Apprendre à juger de l’intérêt d’en donner ou non, ou d’écouter ou non tel conseil !
- Edité par Varak Florent
C’était une journée difficile à l’église[note]À proprement parler, le texte de 1 Samuel 2 ne concerne pas l’Église. Toutefois, l’AT contient des exemples qui peuvent être utiles à l’Église d’aujourd’hui. (NDLR)[/note] . Ce qui était censé être une expérience de culte bénie et enrichissante ressemblait plutôt à un coup de poing dans l’estomac.
Que s’était-il passé ? Ceux qui étaient en position d’autorité s’étaient comportés en tyrans égoïstes.
Ils ressemblaient en fait aux fils du sacrificateur Éli, décrits comme « des hommes pervers » (ou : vauriens), qui « ne connaissaient pas l’Éternel » (1 Sam 2.12 )[note]Version Segond[/note]. Les versets 13 à 17 montrent comment ils abusaient sans scrupule de leur rôle de prêtre. Quand un adorateur allait offrir un sacrifice, ils envoyaient leurs serviteurs prendre les meilleurs morceaux pour leur consommation personnelle. Pourtant ces prêtres ne manquaient pas de nourriture : la poitrine et la jambe droite de l’animal leur étaient déjà réservées (Lév 7.28-36). Si quelqu’un avait l’audace de rappeler à leurs serviteurs que l’Éternel devait être honoré en premier, les fils d’Éli menaçaient d’employer la force (v. 16). En résumé, « ces jeunes gens se rendaient coupables d’un très grand péché devant l’Éternel, parce qu’ils traitaient avec mépris les offrandes faites à l’Éternel » (v. 17).
Oui, c’était une journée difficile à l’église. En fait, les responsables n’avaient aucun respect pour la gloire de Dieu et pour le bien du peuple. Ils étaient uniquement préoccupés d’eux-mêmes. Cette tendance à l’abus d’autorité et à la recherche de l’intérêt personnel est progressive et subtile. Par conséquent, il s’avère utile de relever quelques caractéristiques des pasteurs tyranniques afin de les identifier.
1. Ils s’approprient la gloire due à Dieu
Certains pasteurs semblent beaucoup plus impressionnés par eux-mêmes et par leur intelligence que par la sagesse de Dieu. Observons comment ils utilisent la Parole de Dieu. Est-ce qu’ils la prêchent, ou bien en font-ils juste une « perche à selfie » pour eux-mêmes ? Si glorifier Dieu est le but de toute la vie, c’est certainement encore davantage le but de tout ministère. Dans leur service, certains font pourtant preuve d’un zèle comparable à celui des constructeurs de la tour de Babel, en travaillant dur pour se faire un nom ; ils perdent ainsi de vue l’essentiel. La gloire revient à Jésus, et non à nous-mêmes. Souvenons-nous : « Il faut que lui croisse, et que moi je diminue » (Jean 3 .30). Ce n’est pas l’inverse.
2. Ils utilisent le ministère pour se servir eux-mêmes, et non pas Dieu et les autres
Les fils d’Éli considéraient le peuple comme étant à leur service et non comme des personnes qu’ils devaient servir. De même, dès qu’un pasteur commence à estimer que les gens et le ministère sont à son service au lieu de penser qu’il est, lui, au service des membres de son église, il est en danger. On oublie parfois que le mot « ministère » signifie « service ». Toute notre vie doit être un service. Paul dit que ceux qui dirigent doivent se considérer comme des serviteurs. Jésus demande à tous ceux qui le suivent d’être des serviteurs (en particulier à ceux qui sont à la tête et qui peuvent être tentés de se laisser servir. Après tout, c’est ainsi qu’il a vécu et qu’il s’en est allé (Marc 10.43-45). Les pasteurs veillent à ne pas s’estimer supérieurs au troupeau et à ne pas s’en tenir à distance. Ils sont au service de Dieu et des siens.
3. Ils n’hésitent pas imposer leurs méthodes
D’où venait cette idée de se promener fourchette en main pour se servir dans animaux offerts en sacrifice par les gens du peuple ? Certainement pas de la Bible. Moïse n’a jamais recommandé ou permis une chose pareille. Mais il est possible qu’ils aient réussi à impressionner les gens avec une explication de leur invention ou bien seulement avec un ton ou un style autoritaire pour justifier leur « innovation » liturgique. Le seul problème avec cette façon d’innover, c’est qu’elle ne correspond pas toujours à ce que Dieu demande. Cela vaut aussi pour notre époque : nous sommes souvent rapides pour inventer quelque chose qui nous arrange, beaucoup plus lents à nous remettre en question. Il est plus facile et rapide de se lancer dans quelque chose qui ressemble à une bonne idée, plutôt que de se demander si la Parole de Dieu encourage ou non ce que nous initions. Les occidentaux du XXIe siècle ont tendance à faire une belle place à l’innovation dans la mesure où elle augmente leur influence. Mais si une telle innovation nous détournait de ce que nous sommes censés être et faire ? L’innovation n’est pas toujours mauvaise, mais elle n’est pas nécessairement positive non plus. Par conséquent, nous devrions être prudents envers l’innovation. Il se peut que la recherche de nouveauté mette nos églises — et nous-mêmes — en difficulté. Restons proches de la révélation biblique.
4. Ils exercent une autorité oppressante
À qui ces hommes rendaient-ils compte ? Éli fermait les yeux sur la situation. Le peuple ne pouvait pas faire grand-chose. Il en résultait que la domination tyrannique de ces hommes s’était imposée au peuple avec une autorité oppressante. Malheureusement, ce type de situation se produit encore aujourd’hui dans des églises. Plutôt que de voir leur autorité fondée sur la Parole et restreinte à cette seule Parole, certains pasteurs pensent qu’ils sont investis d’une autorité personnelle et universelle ; ils n’ont pas de comptes à rendre, pas de conseils à entendre. Ce type de leadership est à l’opposé de ce que la Parole enseigne, il s’arroge une autorité absolue, parfois même sur les aspects les plus intimes de la vie des gens, là où le pasteur n’a pas à s’ingérer. Souvent, un tel pasteur utilisera certains versets de la Parole pour reprendre ses fidèles, sans pour autant s’y soumettre lui-même. Cette hypocrisie exaspère les croyants ; la vie d’église devient un fardeau, elle n’apporte plus de joie. Ce type d’intimidation n’a rien de commun avec le modèle de roi serviteur que Jésus montrait par son exemple (Marc 10).
5. Ils montrent peu de respect pour le sérieux du ministère
Les fils d’Éli couchaient avec des femmes dans le temple et volaient des portions des sacrifices : manifestement ils avaient perdu conscience de l’honneur dû à Dieu dans leur ministère. Le ministère concerne en effet deux des buts les plus importants au monde : la gloire de Dieu et le bien spirituel des personnes. Si nous perdons cela de vue, alors le ministère perd son sens et sa valeur. Tout ce qu’un pasteur accomplit doit être jugé à l’aune de la gloire que cela apporte, ou non, à Dieu. En outre, nous devons nous rappeler que ce que les gens font de la Parole de Dieu a des conséquences éternelles. Nous pouvons soit les aider, soit les entraver. Notre impact dépend de ce que nous prêchons, mais aussi de notre façon de vivre et de diriger l’église. Le ministère n’est donc jamais à prendre à la légère.
6. Ils oublient l’œuvre du Seigneur
Au fond, le vrai problème des fils d’Éli, c’était qu’ils avaient perdu conscience de la valeur des sacrifices et de la sainteté de Dieu ; ils ne s’en souciaient même pas.
Si un pasteur perd de vue qu’il est un grand pécheur et que Jésus est un grand Sauveur, il est dans une impasse. Le pasteur-intimidateur a oublié la Parole de Dieu et la valeur de Dieu. Il n’est pas étonnant qu’il ait peu de considération pour le peuple de Dieu.
Qu’il ne soit jamais dit de nous que nous avons ignoré l’œuvre du Seigneur et que nous avons méprisé le sang de l’alliance. C’est à cause de nous qu’il a dû y avoir la croix et le sang du Calvaire. L’Agneau de Dieu a été mis à mort pour nous. Que Dieu nous préserve de nous sentir à l’aise, de minimiser, de relativiser ou d’obscurcir la grandeur de la gloire de la croix de la croix. Par la grâce de Dieu et pour le bien de son Église, que les pasteurs n’oublient jamais l’œuvre de la croix.
- Edité par Raymopnd Erik
Paul s’est beaucoup investi pour l’église de Corinthe. Mais, en son absence, certaines personnes cherchent à le discréditer dans l’esprit des Corinthiens. Leur but est de se présenter comme des personnes plus dignes de tenir le rôle d’apôtre. Elles lui adressent de nombreuses critiques :
• il ne tient pas ses engagements (2 Cor 1.15-17) ;• il n’a pas la carrure d’un chef (2 Cor 10.1) ;
• il marche selon la chair (2 Cor 10.2) ;
• il n’est pas un bon orateur, il n’a pas de prestance (2 Cor 10.10 ; 1.6) ;
• il les plonge dans la tristesse (2 Cor 2.5) ;•
il prêche pour son propre intérêt (2 Cor 4.5) ;
• il est cupide et rusé (2 Cor 7.2), charnel (2 Cor 10.2) ;
• il agit en « franc-tireur », sans recommandation ou mandat (2 Cor 3.1 ; 12.11).
Tout cela sape sa crédibilité et son autorité d’apôtre. Bien malgré lui, il se sent obligé de se défendre. Mais son but n’est pas de défendre son honneur et son statut, mais de défendre son ministère et de protéger les Corinthiens des prédateurs qui les menacent. Il défend son autorité spirituelle.
Étudions ce chapitre selon la formule « verset par verset » pour relever les caractéristiques de l’autorité de Paul.
v. | Texte | Commentaire |
1 | Moi Paul, je vous prie, par la douceur et la bonté de Christ – moi, humble d’apparence quand je suis au milieu de vous, et plein de hardiesse à votre égard quand je suis éloigné | L’autorité exhorte avec bienveillance et bonté, avec humilité. Paul aurait pu chercher à s’imposer, mais il préfère que ce soit le choix des Corinthiens. |
2 | Je vous prie, lorsque je serai présent, de ne pas me forcer à recourir avec assurance à cette hardiesse, dont je me propose d’user contre quelques-uns qui nous regardent comme marchant selon la chair. | Paul pourrait faire preuve de hardiesse et assurance, et il le fera si nécessaire, pour le bien des personnes qui sont des dangers. Mais il préfèrerait ne pas y être contraint. |
3 | Si nous marchons dans la chair, nous ne combattons pas selon la chair. | L’autorité ne fait pas intervenir la chair (capacités et motivations naturelles seules). |
4 | Car les armes avec lesquelles nous combattons ne sont pas charnelles ; mais elles sont puissantes, par la vertu de Dieu, pour renverser des forteresses. | Elle utilise des armes puissantes par Dieu (4-5). Quelle différence avec l’autorité des hommes sans Dieu ! |
5 | Nous renversons les raisonnements et toute hauteur qui s’élève contre la connaissance de Dieu, et nous amenons toute pensée captive à l’obéissance de Christ. | Elle conduit à la soumission à Christ (et pas à Paul, ou à un autre leader). Ce sont les fausses idées et les faux raisonnements qui empêchent de s’approcher de Dieu. Peut-être aussi de reconnaître l’autorité voulue par Dieu. |
6 | Nous sommes prêts aussi à punir toute désobéissance, lorsque votre obéissance sera complète. | La désobéissance et la contestation envers la volonté de Dieu auront des conséquences. L’autorité peut punir. |
7 | Vous regardez à l’apparence ! Si quelqu’un se persuade qu’il est de Christ, qu’il se dise bien en lui-même que, comme il est de Christ, nous aussi nous sommes de Christ. | L’autorité ne vient pas de la prestance naturelle, apparente. Il faut examiner les choses spirituellement, voir si cette autorité vient de Dieu. |
8-9 | Et même si je me glorifiais un peu trop de l’autorité que le Seigneur nous a donnée pour votre édification et non pour votre destruction, je ne saurais en avoir honte, afin que je ne paraisse pas vouloir vous intimider par mes lettres. | C’est le Seigneur qui donne l’autorité ; cette autorité construit et ne détruit pas ; elle est saine, juste, donc pas de raison d’avoir honte de l’exercer, à distance ou de près. Elle peut être exercée par des personnes d’apparence peu impressionnante. |
10 | Car, dit-on, ses lettres sont sévères et fortes ; mais, présent en personne, il est faible, et sa parole est méprisable. | L’autorité ne dépend pas d’une capacité à impressionner par une présence physique imposante ou par un style d’écriture dominateur. |
11 | Que celui qui parle de la sorte considère que tels nous sommes en paroles dans nos lettres, étant absents, tels aussi nous sommes dans nos actes, étant présents. | Jusqu’à présent, Paul avait été doux au milieu des Corinthiens ; mais pour leur bien, il pourra user de sévérité. |
12 | Nous n’osons pas nous égaler ou nous comparer à quelques-uns de ceux qui se recommandent eux-mêmes. Mais, en se mesurant à leur propre mesure et en se comparant à eux-mêmes, ils manquent d’intelligence. | Paul ne désire pas se justifier, se comparer, il fait appel à leur intelligence pour que ceux qui bravent son autorité réfléchissent. |
13 | Pour nous, nous ne voulons pas nous glorifier outre mesure, mais seulement dans la limite du champ d’action que Dieu nous a assigné en nous amenant jusqu’à vous. | L’autorité est déléguée par Dieu, dans un domaine limité (ce n’est pas une prise de contrôle total motivée par une fierté déplacée). Il est important, pour ceux à qui Dieu a donné une autorité, qu’ils connaissent bien le « champ d’action ». |
14 | Nous ne dépassons point nos limites, comme si nous n’étions pas venus jusqu’à vous ; car c’est bien jusqu’à vous que nous sommes arrivés avec l’Évangile de Christ. | Paul n’est pas intervenu « hors limites », dans un champ qu’il ne connaissait pas. Il intervient là où il a lui-même apporté l’Évangile. |
15 | Nous ne nous glorifions pas des travaux d’autrui qui sont hors de nos limites. Mais nous avons l’espérance, si votre foi augmente, de devenir encore plus grands parmi vous, dans notre propre domaine, | L’autorité n’essaie pas de trouver un champ d’action en « récupérant » le travail d’un autre. |
16 | en évangélisant les contrées situées au-delà de chez vous, au lieu de nous glorifier de ce qui a déjà été fait dans le domaine des autres. | Si Paul combat pour que son autorité soit reconnue, c’est pour le bien des Corinthiens et pour que l’Évangile soit répandu ailleurs aussi. |
17 | Que celui qui se glorifie se glorifie dans le Seigneur. | D’ailleurs il ne se réjouit que de l’approbation du Seigneur. Quand Dieu a donné une autorité, la chair risque de s’enorgueillir. L’antidote est là. |
18 | Car ce n’est pas celui qui se recommande lui-même qui est approuvé, c’est celui que le Seigneur recommande. | Notre service n’est pas validé – reconnu par notre propre recommandation ; mais par la recommandation du Seigneur. |
Conclusion
Paul n’est pas intéressé par le pouvoir ou la domination. Il ne cherche pas la reconnaissance ou l’admiration (2 Cor 12.15). Il veut servir, enseigner et faire grandir ses enfants spirituels. Son secret, c’est qu’il se considère à la fois :
• Comme un apôtre, investi d’une mission, mais appelé par grâce et non pour ses mérites (1 Tim 1.12-14) ou capacités (2 Cor 3.5) ;
• Comme un serviteur (esclave) de Jésus-Christ (Phil 1.1), serviteur (diacre) de l’Évangile (Col 1.23) et des saints (Rom 15.25).
Questions pour aller plus loin
a. Comment peut-on définir en quelques mots l’autorité de Paul ?
b. Comment peut-on agir avec autorité et humilité en même temps ?
c. L’autorité et l’humilité ont-elles un fondement commun ?
- Edité par Regard Jean
Parler de soumission oblige à mentionner que ce concept peut être compris de manières très variées et être sujet à polémique.
De plus, son interprétation, surtout dans le cadre du couple, a des conséquences pratiques importantes, pouvant se traduire par des relations malsaines, parfois même dangereusement violentes. Parler de soumission oblige à mentionner que ce concept peut être compris de manières très variées et être sujet à polémique. De plus, son interprétation, surtout dans le cadre du couple, a des conséquences pratiques importantes, pouvant se traduire par des relations malsaines, parfois même dangereusement violentes.
Nous allons toutefois tenter d’aborder ce sujet, en essayant de comprendre le modèle biblique de soumission (en général et dans le couple), en cherchant ce qu’il induit (pour l’épouse et pour le mari), et en mentionnant quelques risques d’une incompréhension de ce concept[note]Cet article émane d’une femme mariée à un homme chrétien et craignant Dieu. Pour l’écrire, je me suis inspirée en partie de plusieurs lectures ainsi que de ma vie de couple, depuis 26 ans, même si cet article ne se veut pas un témoignage.[/note] .
La soumission pour tous !
Étymologiquement, « se soumettre » signifie se mettre au-dessous. Suivant les cas, ce sera plus ou moins volontaire. La soumission n’est donc pas une sujétion, une subordination, une oppression, une obéissance servile. Et, comme le dit John Stott, « nous devons tout faire pour purifier [ce terme] de ces connotations [négatives] pour retrouver son sens spécifiquement biblique.[note]John Stott, Éphésiens, Vers une nouvelle société, Éditions Grâce et Vérité, 2010, p. 221.[/note] »
Dans la Parole de Dieu, il n’est jamais demandé de soumettre quelqu’un. La soumission est un choix librement décidé (pour nous chrétiens, devant Dieu). Être soumis revêt le sens de respecter, craindre (dans le sens biblique du terme), reconnaître la position d’autorité (de Dieu ou de quelqu’un), tenir l’avis de l’autre pour important.
Rappelons-nous que, pour Dieu, une différence de position n’équivaut pas à une différence de valeur (Gal 3.27-29). La personne qui se soumet à une autre n’a donc pas moins de valeur que cette dernière aux yeux de Dieu. Et par là, la soumission n’est pas l’acceptation d’un rôle inférieur.
Tous les êtres humains sont appelés à se soumettre : un enfant se soumet à ses parents, un employé à son chef, tous les habitants d’un pays aux lois en vigueur dans ce pays. Il en est de même dans la famille de Dieu. Chaque chrétien, homme ou femme, est appelé à se soumettre à Christ (1 Cor 11.3).
Il y a également une soumission réciproque à vivre entre chrétiens : « Étant soumis les uns aux autres dans la crainte de Christ » (Éph 5.21[note]Version Darby[/note]). Elle se vit dans l’humilité réciproque : « Que, dans l’humilité, l’un estime l’autre supérieur à lui-même, chacun ne regardant pas à ce qui est à lui, mais chacun aussi à ce qui est aux autres » (Phil 2.3). La notion même de soumission n’est pas infâmante : même Jésus, en tant que Fils de Dieu, s’est soumis à son Père, alors qu’il était Dieu lui-même (Phil 2.5-8).
Soumission et autorité
Tous ceux qui détiennent une autorité la détiennent de Dieu, qu’ils en aient conscience ou non (Rom 13.1). Cette autorité devrait toujours s’exercer dans l’intérêt de ceux pour lesquels elle a été donnée, et non de manière égoïste — qu’il s’agisse d’un mari, d’un père ou d’une mère, d’un chef dans le travail, etc.
L’autorité n’a donc rien à voir avec l’autoritarisme, la tyrannie, l’oppression, ni même la domination (Luc 22.26-27).
La soumission dans le couple
« Femmes, que chacune soit soumise à son mari, comme au Seigneur ; car le mari est le chef de la femme, comme Christ est le chef de l’Église qui est son corps, et dont il est le Sauveur. Or, de même que l’Église est soumise à Christ, les femmes aussi doivent l’être à leur mari en toutes choses » (Éph 5.22-24).
Même en cherchant des objections, on ne peut guère échapper à ce verset. Pourquoi est-il difficile à admettre ? Voici quelques raisons : l’influence du monde environnant, les différences de caractère (de la femme et de l’homme), les différences de modèles parentaux, les différences de contextes sociaux et culturels, et, bien sûr, notre esprit naturel d’indépendance.
Remarquons que le verset précédent exhorte à la soumission mutuelle [note]« La soumission est un devoir chrétien universel. Dans l’Église chrétienne, y compris dans chaque foyer chrétien, la soumission devrait être mutuelle. » (John Stott, op. cit., p. 230)[/note] (v. 21). Et si la soumission de la femme est clairement dite, celle de l’homme est contenue dans l’amour qu’il doit porter à sa femme. En effet, dans les versets suivants (v. 25, 28, 29), Paul présente le modèle d’un mari qui aime sa femme, non pas d’un amour égoïste, pour défendre ses propres intérêts, mais d’un amour qui se donne (dont le modèle est Christ lui-même, qui aimé l’Église jusqu’à donner sa vie pour elle). Ainsi, la soumission au sens où Dieu l’entend est certainement un élément clé d’une relation saine, marquée par l’amour, la confiance et le respect.
Le rôle de chacun
Le rôle du mari vis-à-vis de sa femme consiste donc à chercher son bien-être, à répondre à ses besoins, à la valoriser, à l’encourager dans tous les domaines de sa vie, à l’aider à développer sa personnalité, à l’accompagner pour qu’elle progresse, à lui faire confiance, à lui déléguer, à la protéger quand elle en a besoin, à la rassurer quand elle s’inquiète… pour la voir finalement « sans tache ni ride » !
Et pour une épouse, se soumettre à son mari consiste à reconnaître l’ordre établi par Dieu : à voir son mari comme grand à ses yeux (comme l’assemblée voit Christ !), à reconnaître sa place de chef (pas dans le sens de dominateur, mais plutôt dans le sens de détenteur d’une responsabilité supplémentaire), à valoriser ses projets, à ne pas se concentrer sur ses défauts, etc.
Et dans la réalité ?
Le modèle est très beau et nous devons y tendre mais nous sommes des êtres imparfaits (le mariage, c’est l’union de deux pécheurs !). Et le mariage va justement nous aider dans notre chemin de sanctification, et l’un et l’autre, dans le but de progresser ensemble.
Ce modèle est à vivre en fonction de nos caractères. Une femme très dynamique qui a un mari plus nonchalant va peut-être prendre plus de décisions dans le quotidien, mais elle peut très bien lui reconnaître son rôle de chef. À l’inverse, un mari avec un caractère de leader devra faire attention de ne pas écraser sa femme, mais devra, au contraire, la valoriser, l’encourager, la responsabiliser.
C’est aussi un modèle à vivre d’abord en couple et devant Dieu, avant de le vivre devant les autres : attention à ne pas vouloir donner une image qui ne correspond pas à la réalité (cela s’appelle de l’hypocrisie).
Attention aux risques réels de mauvaise compréhension de la notion de soumission. Une soumission trop importante pourra se marquer par de la docilité et conduire à un effacement de la personnalité. La femme peut aussi vivre « dans l’ombre » de son mari, avec comme conséquence un gâchis de ses propres dons. À l’inverse, en refusant de se soumettre, l’épouse manque une occasion de montrer une image de Christ et de l’Église ; elle risque de décrédibiliser son mari, devant ses enfants, devant les membres de l’église (en particulier si son mari y a une place d’autorité).
Enfin, vivre la soumission réciproque au sein du couple nous aidera à la vivre dans les autres cercles de notre vie (par ex. le travail).
Et pratiquement ?
Pour une épouse, se soumettre, est-ce ne jamais contredire son mari ? — ou bien lui dire avec honnêteté et délicatesse, quand elle pense qu’il se trompe ? Lui laisser prendre toutes les décisions importantes, sans lui donner son avis ? — ou bien prendre les décisions à deux, et lui laisser décider en dernier recours, si on n’arrive pas à se mettre d’accord ? Ne pas donner son avis sur des sujets spirituels ? ¬— ou bien échanger librement avec son mari sur tous les sujets, mais sans forcément imposer son point de vue ?
Et quand mon mari ne m’aime pas « comme Christ » ?
Parce qu’il n’est pas chrétien : Même si mon mari est incrédule, il détient toujours une autorité lui venant de Dieu. La règle « il faut obéir à Dieu plutôt qu’aux hommes » ne doit pas s’appliquer à tous les détails de la vie quotidienne. Je me dois de prendre en compte son avis. Bien sûr, c’est beaucoup moins facile que de se soumettre à un mari, partageant la même foi, et donc se soumettant lui-même à Dieu, mais c’est peut-être ainsi que je le « gagnerai » (1 Pi 3.1-2 ; 1 Cor 7.16).
Parce qu’il vit encore centré sur lui ou n’a pas envie de tenir ce rôle de chef : Certes, cette situation est difficile…, Mais si mon mari se sent respecté, reconnu comme chef de famille, valorisé, si je m’efface parfois devant lui (même si ce n’est pas dans ma nature), est-ce que l’Esprit ne va pas agir aussi en lui pour le changer et lui donner de prendre sa vraie place ?
Parce qu’il fait preuve d’autoritarisme, voire qu’il est violent : Je chercherai peut-être à le « gagner » sans le provoquer, en partageant ma situation à des amis fidèles, en consultant un conseiller conjugal. Mais si la situation devient intenable, que je suis en danger, je devrai peut-être fuir pour me protéger et protéger mes enfants — et je ne suivrai pas des chrétiens qui utiliseraient ce verset « ce que Dieu a uni, que l’homme ne le sépare pas » pour m’inciter à rester coûte que coûte, au risque d’une atteinte à mon intégrité physique ou psychologique.
Conclusion
« Si les hommes et les femmes sont égaux en dignité, pourquoi l’homme est-il le chef ? Et pourquoi les femmes sont-elles appelées à la soumission ? La réponse à cette question est une autre question : Pourquoi est-ce Jésus, le Fils, qui s’est soumis et a servi ? Pourquoi a-t-il abandonné son autorité au Père ? Nous n’en savons rien, mais nous savons que c’était un signe de sa grandeur et non de sa faiblesse. Les femmes sont appelées à suivre Jésus sur ce point. Mais n’oubliez pas qu’exercer son autorité correctement est aussi difficile que de s’en dépouiller.[note]Timothy Keller et Kathy Keller, Le mariage, Éditions CLE, 2014, p. 244.[/note] »
- Edité par Prohin Anne
Texte tiré du livre : Vivre l’éthique de Dieu. L’amour et la justice au quotidien, Daniel Arnold, La Maison de la Bible, 2020, p.132-133, 138-139.
L’apôtre Paul exhorte les chrétiens à se soumettre les uns aux autres : « Soumettez-vous les uns aux autres dans la crainte du Christ » (Éph 5.21 ).
Par cette phrase, Paul n’abolit pas toute structure hiérarchique, mais signifie que chacun est appelé à la soumission dans des domaines particuliers : les femmes à leur mari, les enfants à leurs parents et les esclaves à leur maître (Éph 5.22-6.9). Paul attire aussi l’attention sur les responsabilités des chefs (le mari, les parents, le maître). Chacun — chef et subalterne — doit être soumis à Dieu dans la fonction qu’il occupe.
Paul indique clairement que les structures sociales ne sont pas abolies, mais qu’elles doivent être régénérées à la lumière du Christ. L’apôtre s’oppose simultanément à la négation et à l’abus de pouvoir. Dans la famille, le mari et les parents doivent exercer leur mandat d’autorité dans l’amour, le respect et l’écoute.
Le mari
Le mari est appelé par Dieu à être le chef du foyer. Son mandat doit s’inspirer de l’amour du Christ qui s’est donné pour son Église (Éph 5.25). Cela signifie que l’amour du mari pour son épouse doit aller jusqu’au don de sa vie. Paul dit que « les maris doivent aimer leur femme comme leur propre corps ; celui qui aime sa femme s’aime lui-même » (Éph 5.28). Un tel amour exclut toute brutalité, toute moquerie, toute remarque désobligeante. Celui qui aime sa femme lui fait confiance, et n’hésite pas à lui dévoiler le montant de son salaire. Mieux encore, il lui donne accès à la totalité de ses gains, car la gestion financière se fait en parfaite harmonie, aucun conjoint ne cherchant à tirer la couverture à lui, mais au contraire, chacun étant prêt à se découvrir pour couvrir l’autre.
Être chef du foyer signifie donner le bon exemple sur le plan moral et spirituel. Le mari n’abandonne pas « les choses de l’Église » à sa femme sous prétexte qu’il est trop occupé par sa profession, mais il sera le premier à veiller au développement spirituel de tous les membres de sa famille. Il doit donner l’exemple d’une vie de prière et de consécration à Dieu. Il lira et méditera la Bible pour trouver les forces et l’inspiration nécessaires pour mener une vie droite. Son comportement devrait donner à chacun l’envie de se plonger dans les Saintes Ecritures. Le mari doit être le modèle dans le domaine de la droiture, du contrôle de soi, de la vérité, de la générosité.
Lors d’un différend avec sa femme, si les torts sont partagés, le mari devrait être le premier à demander pardon. Il n’attendra pas que son épouse fasse cette démarche (bien qu’elle puisse le faire), mais il doit, en tant que chef du foyer, montrer l’exemple de la réconciliation en demandant le pardon pour ses fautes et en accordant le pardon à tout pécheur repentant.
Les parents
Les parents doivent guider leurs enfants dans le droit chemin. Ils forment tous deux, à parts égales, l’autorité de l’unité familiale. Ils n’abuseront pas de leur situation de force pour humilier leurs enfants. Leur rôle consiste à instruire, éduquer, élever, punir si nécessaire, mais sans excès, toujours en rapport avec le péché commis. Un verre de lait renversé par mégarde sur le tapis d’Orient ne sera pas puni, même si les dégâts sont grands. Par contre, le mensonge, la parole inutilement blessante, le mépris par rapport à un aîné, la cruauté envers les plus petits doivent être réprimandés. La paresse sera sanctionnée, mais pas les échecs scolaires, car l’éthique chrétienne n’est pas utilitariste. Le mal n’est pas défini en fonction de la réussite, mais par rapport à la loi de Dieu.
Le rôle formateur des parents se manifeste en premier par l’exemple de leur vie. Le père et la mère laisseront une trace indélébile chez leurs enfants s’ils se respectent l’un l’autre et se parlent avec tendresse, s’ils prient quotidiennement et font confiance à Dieu pour leurs besoins quotidiens, s’ils traitent leurs enfants avec amour et fermeté et témoignent l’amour du Christ à leurs voisins.
La soumission sera le mieux enseignée si les parents ont une crainte respectueuse de Dieu, si la mère est soumise au père et si les parents honorent les autorités ecclésiastiques et politiques. N’oublions jamais que les enfants apprennent en premier par imitation. Aux parents de leur laisser le bon modèle !
- Edité par Arnold Daniel
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