PROMESSES

Ce poème a été écrit suite à un échec définitif à l’examen du permis de conduire. L’auteur du poème téléphone à son épouse qui lui demande : «  Alors, comment s’est passé cet examen  ?  » Il lui répondra simplement : « Ma grâce te suffit » (12.9). C’est le verset qui lui est venu en tête alors qu’il devait accepter de renoncer à conduire. Le soir même, il composa le poème ci-dessous. Il transforma ainsi cet échec personnel, qui eut des répercussions sur sa vie et son ministère, en puissante leçon spirituelle. Frédy Gfeller (1926-2021) a été un prédicateur prolifique et un auteur d’ouvrages évangéliques. Ainsi, il se rendait souvent à pied pour prêcher dans les églises avoisinantes à son village.

« Ma grâce te suffit ». Oh ! parole admirable !
Elle suffit à tout, jusqu’au bout du chemin.
Salut pour le pécheur, pardon pour le coupable,
Elle a suffi pour hier et suffira demain.

« Ma grâce te suffit ». Dans ma faiblesse extrême
J’éprouve de mon Dieu le tout-puissant secours.
Oui, sa grâce suffit ; dans la souffrance même,
Je suis environné des soins de son amour.

« Ma grâce te suffit ». Au terme du voyage,
J’en pourrai savourer les effets bienheureux ;
Conduit par mon Sauveur au céleste rivage,
J’en verrai resplendir les rayons glorieux.

Dans le séjour béni de la maison du Père,
Je goûterai sans fin de l’amour l’heureux fruit
Et je me souviendrai du jour où, sur la terre,
Il m’avait répondu : « Ma grâce te suffit ».


Paul avait fondé l’église de Corinthe et avait passé deux ans et demi environ dans cette église. Malheureusement, après son départ, des leaders de l’extérieur et probablement certains de l’intérieur, avaient commencé à attaquer Paul et surtout son enseignement. Paul est l’un des hommes appelés par Dieu pour fonder l’Église. C’est un apôtre, ministère spécial et spécifique.

Je ne crois pas qu’il y ait encore d’apôtres aujourd’hui. Non seulement Paul est apôtre, mais il est l’apôtre des non-Juifs. Dieu lui avait révélé son message et celui de l’Évangile. Il avait confié à Paul le ministère d’annoncer ces vérités à travers l’Empire romain. Il avait aussi confié à Paul la responsabilité d’écrire ces vérités. Rejeter Paul et rejeter l’Évangile reviennent à la même chose !

1. L’endurance (patience) (v. 4-7)

La plus grande démonstration de la puissance de Dieu dans la vie de ses serviteurs n’est pas l’absence de souffrance ou la présence de miracles. Mais c’est la patience, c’est l’endurance dans les peines, les souffrances et les persécutions. Le Seigneur lui-même a souffert. Dieu enrichit la vie des personnes qui bénéficient du ministère de ceux qui sont éprouvés. Quand nous souffrons, cela nous humilie et nous rend dépendant de Dieu.
Le but de Paul, ici, n’est pas le renouvellement des sentiments des Corinthiens à son égard mais un engagement renouvelé de leur part envers l’Évangile qu’il leur prêche. La patience de Paul dans la souffrance démontre que sa vie et son ministère travaillent ensemble avec Dieu afin de répondre à l’appel de Dieu. Ainsi lui-même n’a pas reçu la grâce en vain (v. 1) et il souhaite que ce soit également le cas des Corinthiens.

Les versets 4 et 5 présentent trois groupes de trois aspects négatifs :

Les versets 6 et 7 présentent trois groupes de trois aspects positifs :

Paul a travaillé jusqu’à l’épuisement, il a subi des émeutes, des lapidations, il a été battu, etc. Mais également, il a soumis son corps à la pureté, il a fait preuve de bonté, d’amour, de patience, etc. « Connaissance » a ici le sens de sagesse ; Paul savait mettre en pratique, dans sa vie, ce qu’il avait appris de la sagesse de Dieu. Nous sommes souvent plus préoccupés par ce que nous savons de façon intellectuelle, mais le but de Paul est de nous faire réfléchir à la manière dont nous appliquons ce savoir dans notre vie. Remarquez qu’en plein milieu de ces aspects positifs, il y a « par l’Esprit saint ». Paul nous démontre que, contrairement aux philosophes grecs stoïciens, les bonnes choses dans sa vie ne sont pas le résultat de ses efforts personnels, mais plutôt du travail du Saint-Esprit en lui.

2. Paradoxes (v. 8-10)

Dans les versets 8 à 10, Paul présente neuf façons dont il est dénigré par des personnes mal informées qui le jugent.

Et encore une fois, nous avons neuf paradoxes par groupes de trois. Cela ressemble beaucoup à ce qu’on trouvait dans la littérature grecque de l’époque.

Le prédicateur fidèle de l’Évangile connaît la gloire et le déshonneur, il est à la fois aimé et méprisé.
Certaines personnes vont lui faire une bonne réputation, d’autres une mauvaise. Cette réputation paradoxale de Paul existait au sein même de l’église de Corinthe [note] Certains appréciaient Paul et se réclamaient de lui (1 Cor 1.12 ; 3.4), d’autres le rejetaient (2 Cor 2.1-2)[/note] .
Certains le voyaient comme un inconnu, mais il était bien connu auprès de l’élite juive (Act 26.4,5). Il a frôlé la mort à plusieurs reprises, la menace de la mort planait constamment sur lui. Condamné à plusieurs reprises, mis en prison mais maintenu en vie par la grâce de Dieu.

Attristé certainement par le rejet de l’Évangile de la grâce par une partie des Corinthiens, attristé par les menaces des faux enseignants, par les âmes perdues, par les croyants immatures, mais animé d’une joie profonde en Dieu que l’on découvre en particulier dans sa lettre aux Philippiens. Pauvre quant aux biens matériels, mais enrichi par ceux qui ont accepté le message de l’Évangile. N’ayant rien sur cette terre, mais un héritage éternel au ciel.

3. Réconciliation (v. 11-13)

Paul démontre son caractère et son leadership en ce que, même s’il n’a rien fait de mal, il prend l’initiative pour la réconciliation.
Paul nomme rarement ses lecteurs par leur nom.
Ici, il en appelle à leur cœur en s’exclamant : « Ô Corinthiens ! » (Darby). Paul leur parle ici avec ses tripes. Il déverse toutes ses émotions.
Remarquez l’honnêteté de Paul : « sa bouche est ouverte. » Il ne cache rien qui leur serait utile pour leur développement et leur croissance, même si cela pourrait les déranger. Savez-vous que parfois nous avons besoin d’être dérangés, qu’on nous dise les choses en vérité ? Un berger doit parfois dire des choses peu agréables à ses brebis. Le berger a besoin de courage et de sagesse. La brebis doit apprendre à écouter et à accepter !
Remarquez également l’affection de Paul. Il dit : « notre cœur est élargi ». Vous n’y êtes pas à l’étroit. Vous êtes là, dans mon cœur. Je vous aime. L’attitude des Corinthiens avait profondément blessé Paul, mais il n’est pas devenu amer. Il les aime toujours et ne cherche pas la vengeance et cherche encore leur bien. Quelle attitude !

4. Conclusion

La profonde souffrance de Paul ici est une preuve même de la pureté de ses motivations et de son amour envers ses enfants spirituels. Voulez-vous servir le Seigneur ? Il faut être prêt à souffrir. Si vous n’êtes pas prêt à cela, vous n’êtes pas prêt à servir.
Voulez-vous être un leader ? L’attitude que vous allez démontrer dans la souffrance vous donnera l’autorité spirituelle nécessaire pour faire l’œuvre de Dieu.
Il y a tellement de choses dans ce passage qui nous parlent parce que nous ne sommes pas comme Paul : naturellement, nous sommes en lutte avec la vengeance, nous désirons éviter la souffrance. Nous avons des difficultés à pardonner, à aimer ceux qui nous font mal. Nous avons besoin de changer.
Si Paul a pu démontrer de telles qualités de caractère, c’est parce que sa vie était influencée et dirigée par le Saint-Esprit (v. 6). Paul a laissé libre cours au Saint-Esprit pour changer sa vie.


Introduction de Silvain Combe

Les chrétiens peuvent se sentir impuissants face aux épreuves de la vie, parfois extrêmes (guerre, famine…).
Même si l’on croit que Dieu peut faire des miracles, on craint parfois de les lui demander et l’on se laisse facilement aller à baisser les bras. Pourtant, Dieu semble parfois « attendre » nos prières pour changer le cours des choses : « L’Éternel voit avec indignation qu’il n’y a plus de droiture. Il constate qu’il n’y a personne, il est consterné en voyant qu’il n’y a personne pour intercéder » (És 59.15-16 ; S21).

Avec une foi vivante et un enthousiasme rafraîchissant, Frère André nous rappelle dans ce livre que nos prières peuvent « déplacer des montagnes ». Elles peuvent « amener Dieu à changer d’avis sur ce qu’il permet à Satan de faire » (p. 150). Ce « changement de plan » n’est donc pas une véritable atteinte ou un défi à la volonté de Dieu. Si certaines expressions de cet homme de foi nous semblent aller un peu loin dans ce livre, sa fraîcheur et ses rappels concrets sont néanmoins inspirants.
Il encourage les chrétiens à faire confiance à Dieu, et pas seulement en théorie !

Extraits choisis

Le danger du fatalisme (p. 1-13)

L’attitude du fataliste semble refléter une foi en apparence remarquable : « je refuse de remettre en question la volonté de Dieu », dira-t-il avec une pieuse humilité. Mais cela suppose-t-il que pour lui tout ce qui se passe dans le monde, la guerre, la famine, l’oppression, l’effondrement de la famille et de la société, l’exploitation des faibles et des innocents, la dégradation de ce qui est pur, est bien ? « Si Dieu le permet c’est qu’il doit avoir une bonne raison », avancera-t-il, « et je ne puis espérer comprendre les raisons de Dieu avec ma petite cervelle, alors j’accepte par la foi ce qu’il fait et je loue le Seigneur en tout temps ». Et l’on répondra, admiratif : « Quelle foi ! »
Ce genre de foi n’a toutefois aucune puissance, car elle ne repose pas sur de bonnes bases. Appelez-la comme vous le voulez — karma, destin, sort, kismet — c’est toujours la même réalité plus ou moins déguisée : nous ne pouvons modifier ce que Dieu a écrit, et notre devoir consiste simplement à nous laisser porter par le mouvement du programme défini par Dieu. Cela semble rendre la vie simple, n’est-ce pas ? Oui, et c’est précisément là que réside une partie de son attrait. Les fatalistes peuvent être détendus puisqu’ils ne sont plus responsables. Ils n’ont plus besoin d’obéir à Dieu ni de résister au mal.

La puissance de la prière (p. 16-17)

Malheureusement, ils ne comprennent pas que, avant que ce soit trop tard, le courant qui semble leur procurer un parcours agréable et sûr est en réalité en train de les aspirer toujours plus rapidement vers un tourbillon mortel – et l’anéantissement. C’est une des stratégies les plus fondamentales de Satan tout au long de l’histoire. Il continue de l’employer parce qu’elle a bien réussi, depuis longtemps. Mais nous ne devons pas lui permettre de réussir ! Nous avons le pouvoir de lui résister et de le vaincre, et Dieu a placé entre nos mains l’arme qui peut nous le permettre. Cette arme, c’est la prière.
Rien ne rend Satan plus craintif qu’un chrétien qui comprend la puissance de la prière : parce qu’il sait que Dieu ne refuse rien à ses amis. À mesure que nous connaissons mieux le Seigneur, que nous commençons à comprendre tout ce qu’il est, et réaliser tout ce qu’il a, nous ne sommes plus des victimes sans recours, ballotées par les tempêtes et les vagues que Satan suscite. Nous sommes, au contraire, capables de faire ce qui est impossible à Satan et à ses démons. Jésus nous dit :« Si vous avez la foi, si vous ne doutez pas… si vous dites à cette colline : “Soulève-toi de là et jette-toi dans la mer”, cela se fera. Si vous priez avec foi, tout ce que vous demanderez, vous l’obtiendrez » (Mat 21.21,22).
Il n’est donc pas étonnant que Satan cherche si ardemment à empêcher les chrétiens de s’engager dans une prière sérieuse ! Il n’a aucun pouvoir, aucune puissance qui puisse se comparer à celle-là. Voilà pourquoi je suis si préoccupé par le fatalisme chrétien. Il ne s’agit pas d’une simple interprétation doctrinale inoffensive, une variante mineure de la théologie chrétienne que nous pourrions tolérer.
Le fatalisme est une maladie paralysante qui a envahi le Corps de Christ ; les conséquences sont désastreuses : il infecte ses victimes avec une sorte d’apathie qui annihile leur volonté de résister au mal, tout en sapant leur détermination d’accomplir la tâche que Christ leur a confiée.

Ne pas craindre de faire des erreurs en priant (p. 77)

Abraham a trébuché, menti, trompé – mais quand Dieu écrivit sa biographie dans la lettre aux Romains, il déclara : « Abraham eut confiance en Dieu » (Romains 4.3). Nous pourrions dire : « Mais il a menti, il a trompé les autres ! » Ce n’est pas ainsi que Dieu le voyait. Il dit : « Abraham eut confiance en Dieu », un point c’est tout. Tout le reste n’était qu’accessoire. Abraham était innocenté, et non parfait. Il y a une grande différence entre les deux.
Nous sommes ainsi quand nous nous tenons devant Dieu en prière, justifiés mais non parfaits.
C’est une merveilleuse position.

Nous n’avons pas besoin d’avoir peur d’aller trop loin avec Dieu. Même si nous le faisons, il ne nous en tiendra pas rigueur.
Sa grâce est plus grande que nos erreurs.
Dieu sait que nous n’attendrons pas d’avoir toutes les données avant de prier, parce que nous ne pourrons jamais savoir tout ce qui concerne ses plans. Ce qui est de notre ressort, c’est de chercher avec ferveur à le connaître, d’étudier les indices circonstanciels, d’écouter les directives du Saint Esprit, de tenir compte de ce que nous connaissons de son caractère, de tirer de tout cela des conclusions raisonnables et de prier en conséquence. Dans la mesure où nous le faisons, Dieu nous apprendra à commettre toujours moins d’erreurs, et nos prières deviendront de plus en plus efficaces. Il se peut que nous l’entendions et le comprenions souvent imparfaitement, mais il continue à faire en nous l’œuvre qu’il a promise : nous perfectionner à mesure que nous nous rapprochons de lui.

Tout cela peut nous paraître plus complexe que les révélations miraculeuses de l’époque de l’Ancien Testament, mais c’est aussi beaucoup plus instructif.
Dieu nous apprend, de manière pratique, souvent par nos tâtonnements, comment mettre en œuvre la connaissance qu’il nous a accordée.

Il ne peut donc y avoir de péché dans le fait de demander à Dieu tout ce que nous croyons susceptible d’accomplir sa volonté et ses desseins.
Peu importe si notre insécurité est causée par la conscience de nos limites. Nous n’avons nul besoin de connaître toute l’étendue de ses plans pour en conclure qu’ils peuvent changer. Dieu est toujours heureux d’entendre notre prière, même quand notre compréhension est des plus limitées, comme ce fut le cas quand Abraham intercéda pour Sodome et Gomorrhe.

« Si vous demandez quelque chose en mon nom, je le ferai », dit Jésus (Jean 14.14). Je crois que ces Paroles constituent la réponse ultime à toutes nos interrogations sur le moment et la manière dont nous pouvons demander à Dieu de changer ses plans. Il ne s’agit pas d’agir inconsidérément, comme des ignorants. Mais s’il nous arrive de le faire, Dieu nous pardonnera et utilisera nos erreurs pour nous rendre plus sages la prochaine fois.
Les seules personnes qui ne commettent jamais d’erreurs sont celles qui ne demandent et ne font jamais rien pour Dieu. S’il est une chose dont il faut s’inquiéter, en voilà une ! [note]Plus loin dans le livre, Frère André encourage à la prière ciblée (pas vague et générale). Il invite également à ne pas se satisfaire stoïquement du silence de Dieu à la suite de certaines prières. Il faut se sentir libre de demander « Pourquoi ? » à Dieu, comme David le fait dans le Psaume 22.2. (NDLR)[/note]

La prière nous rapproche de Dieu (p. 83)

Certains de mes souvenirs les plus chers de Corrie ten Boom sont les nombreux moments que nous avons passés ensemble en prière. Corrie était un intercesseur passionné ; l’urgence et l’enthousiasme qui se dégageaient d’elle étaient très communicatifs.
Il était impossible de prier avec elle sans être comme transformé par cette expérience.

« Seigneur, disait-elle, Seigneur, il faut que tu fasses quelque chose ! Il n’y a pas de temps à perdre ! »
Puis elle continuait en précisant au Seigneur sans détour ce qu’elle voulait qu’il fasse. Elle s’adressait à lui comme à moi, son ami de longue date. Elle pleurait, elle riait, elle argumentait avec force, mais elle restait toujours elle-même, totalement honnête.
Elle ne cachait rien à Dieu, et il semblait ne rien lui cacher.

Bien des fois, dans ces temps de prière intenses, elle citait à Dieu sa propre Parole pour lui rappeler ses promesses. Elle aurait pu faire un redoutable avocat au barreau ! Dans les moments où elle s’enflammait plus particulièrement, elle s’emparait de sa Bible, la feuilletait rapidement pour trouver le texte exact pour appuyer sa plaidoirie. Alors elle levait sa Bible en l’air, pointait sur le verset et proclamait, triomphante : « Voilà, Seigneur ! Tu peux le lire toi-même ! » Combien j’aimais cela. Et, j’en suis certain, Dieu aussi. Il est heureux quand nous le connaissons assez bien pour lui parler de cette façon. Je ne connais personne dont les prières aient eu plus d’effet sur Dieu que celles de Corrie. Elle ne se laissait pas détourner par une fausse piété, par légalisme ou par le besoin d’être quelqu’un d’autre qu’elle-même. Et après tout, comme elle se plaisait bien souvent à le rappeler à Dieu, elle ne lui demandait rien qu’il n’ait déjà promis. Elle n’hésitait donc jamais à lui dire ce qu’il devait faire et à le remercier quand il exauçait sa prière. « Je savais bien que tu le ferais ! » s’exclamait-elle avec le sourire. « Je le savais ! »

Et c’est vrai, elle savait ce que Dieu accomplirait pour elle car elle connaissait Dieu. Elle comprenait sa volonté et s’attendait à ce qu’il respectât sa Parole. Elle n’aurait pas une seule fois imaginé le contraire. Quelle foi ! Si seulement le Seigneur avait d’autres amis comme Corrie, notre pauvre monde ne serait pas dans l’état où il est aujourd’hui.

D’après vous, les prières de Corrie étaient-elles blasphématoires ? Présomptueuses ? Certains oseraient l’affirmer, sans doute, mais pas moi, car son approche était fidèle aux Écritures. Jésus a dit : « Demandez-moi quoi que ce soit… » et Corrie le crut sur parole. Ses prières étaient toujours fondées sur sa profonde compréhension de la volonté de Dieu. Et Dieu l’exauçait. Comment aurait-il pu faire autrement ?
Pour répondre à la question « Comment pouvons-nous prier pour amener Dieu à « changer d’avis » ? » je commencerais par rappeler que nous ne prions pas avec le désir de le faire « changer d’avis », ou de lui dire ce qu’il doit faire ; notre désir est de mieux le connaître comme Ami et Père. Les occasions pour l’amener à modifier ses plans ne sont qu’une des conséquences de cette relation.

 

 


Comme le fait Christopher Hitchens dans son livre Dieu n’est pas grand, les Croisades sont souvent utilisées comme argument par les détracteurs du christianisme pour contredire le message d’amour et de paix de l’Évangile. Quelle attitude les chrétiens du XXI e siècle devraient-ils adopter par rapport aux Croisades ?

Revenir sur des événements vieux de près d’un millénaire nécessite un certain nombre de précautions pour éviter trop de raccourcis et d’anachronismes. Il faut bien avouer que malgré la quantité importante de livres écrits ces dernières années sur les Croisades, nous ne sommes généralement pas en mesure d’aligner plus de quelques phrases sur le sujet en dehors de l’évocation de quelques noms comme Godefroy de Bouillon ou Richard Cœur de Lion ou encore l’image de chevaliers à croix rouge sur fond blanc chargeant sur leur destrier. Quelques éléments de contexte sont donc nécessaires avant de revenir à notre époque.

Les Croisades dans leur contexte

Les Croisades sont une série d’expéditions militaires au Moyen-Orient principalement dirigées vers la Palestine appelée « Terre sainte » qui ont eu lieu entre 1096 et 1291 dans le but de reconquérir la ville de Jérusalem alors aux mains des musulmans. Le terme « croisade », qui est postérieur à l’époque médiévale, vient de l’habitude qu’avaient ceux qui partirent de se faire coudre une croix sur leurs vêtements — d’où le nom de croisés qui leur fut donné. Le terme de croisades au sens large désigne également des expéditions de même type menée au nom de l’Église contre des personnes considérées comme hérétiques autres que les musulmans, par exemple, les Cathares, les Vaudois ou les Hussites.
Les Croisades ont commencé à la suite d’un appel prononcé par le Pape Urbain II au concile de Clermont en novembre 1095 relayé un peu partout dans tout l’Occident chrétien. Celui-ci fut suivi par une onde d’adhésion impressionnante mobilisant des dizaines de milliers d’hommes, femmes et enfants (voire centaines de milliers sur l’ensemble des Croisades) autant dans les milieux nobles (chevaliers, mais aussi des rois et des empereurs) que populaires. Les grands intellectuels chrétiens comme Bernard de Clairvaux (1090-1153) adhèrent et supportent les Croisades.
Comment comprendre un tel enthousiasme ?
La diversité des profils engagés et l’ampleur du phénomène excluent des réponses trop caricaturales qui souligneraient uniquement l’appât du gain, la recherche de gloire ou un fanatisme guerrier et religieux. Il faut sans doute rechercher des éléments de réponse dans le contexte d’une époque pleine de changements dans le cœur de l’Europe médiévale. Voici six éléments à considérer :
1. L’Islam apparu au VII e siècle avait conquis comme un éclair plus de la moitié du monde chrétien, dont Jérusalem en 636. Les musulmans avaient respecté la ville qui était pour eux également une ville sainte et avaient laissé se poursuivre les pèlerinages chrétiens dont l’origine remontait à l’époque de Constantin le Grand. Cependant au XI e siècle font leur apparition les Turcs Seldjoukides nouvellement convertis à l’Islam. Ceux-ci battent les Byzantins à Manzikert en 1071 ouvrant la voie à la conquête de toute l’Asie mineure jusqu’alors chrétienne et enlèvent Jérusalem et la Palestine aux musulmans fatimides en 1078 avec un impact important sur les pèlerinages chrétiens. Alexis I er Comnène, empereur byzantin, lance un appel à Urbain II pour venir en aide aux chrétiens d’Orient. Dans ce contexte, la première croisade peut être comprise comme une réponse défensive à l’expansion de l’Islam et à la protection des chrétiens d’Orient. Les souffrances endurées par les pèlerins chrétiens ont d’ailleurs été longuement évoquées par le pape pour justifier son appel dans les différents témoignages de son discours qui nous sont parvenus.
2. Après des siècles de désintégration politique et économique qui avaient vu s’effondrer l’empire carolingien, l’Occident rentre dans une nouvelle ère de prospérité et d’unité. Les terribles Normands et les Hongrois se sont convertis au christianisme. Les bateaux vénitiens et génois dominent progressivement la mer Méditerranée. L’Occident se sent désormais assez fort pour passer à l’offensive. En Espagne et dans les îles méditerranéennes, la reconquête sur l’Islam a déjà commencé dès le début du XI e siècle. Ce n’est d’ailleurs pas un hasard si le pape souhaite confier le leadership de la Croisade aux barons expérimentés d’Occitanie comme Raymond de Saint-Gilles. Ainsi les Croisades peuvent être perçues comme des guerres de reconquête.
3. Le XI e siècle est par ailleurs celui de la réforme grégorienne de l’Église qui voit s’agrandir considérablement la puissance des papes. Les papes vont prétendre non seulement à un pouvoir spirituel sur toute l’Église, ce qui précipitera la séparation avec l’Église orthodoxe d’Orient en 1054, mais également à un pouvoir politique. On aurait dû s’attendre à ce que les Croisades soient lancées par des chefs politiques et non par le pape. Or, au moment de la première croisade, le roi de France et l’empereur du Saint Empire romain germanique sont excommuniés. Les Croisades peuvent être ainsi vues comme un programme ambitieux de papes puissants comme Urbain II ou Innocent III visant à assurer leur domination politique en fédérant autour d’eux les puissances séculières et peut-être, au moins pendant la première période des Croisades, de tenter une réconciliation avec l’Église d’Orient.
4. On peut s’étonner que l’Église prenne l’initiative d’une guerre même défensive. Mais la position théologique sur le sujet avait depuis longtemps déjà glissé d’une position pacifique des chrétiens à une formulation par Augustin d’une guerre juste à laquelle les chrétiens pourraient participer.
Cette évolution s’est produite dans un contexte de rapprochement aux IV e et V e siècles entre le pouvoir politique et religieux au moment où les frontières de l’Empire Romain commençaient à céder. En intégrant dans la chrétienté des peuples de culture où la gloire masculine est quasi exclusivement liée à la force physique, l’Église a eu fort à faire pour essayer de canaliser cette violence en faisant naître des compromis que l’homme de notre siècle a du mal à appréhender. Il est intéressant de noter la forte proportion de contingents d’origine « viking » dans la croisade des chevaliers. Même avant les Croisades, l’Église se militarise avec la création des chevaliers de Saint-Pierre dès 1053. Puis viendra la reconnaissance des ordres de moines-chevaliers comme les Hospitaliers (1113), les Templiers (1118), ou les chevaliers teutoniques (1190) dédiés à la défense de la Terre sainte. Il faut noter cependant que le même concile de Clermont qui voit prêcher la première croisade encouragera dans le même temps le mouvement dit de la « Paix de Dieu » en invitant tous les chrétiens à observer entre eux une paix perpétuelle. En réorientant l’énergie belliqueuse vers l’hérétique, les Croisades peuvent être perçues comme un mal nécessaire pour établir la paix dans le monde.
5. Dans les esprits du Moyen-Âge, le Royaume de Dieu est assimilé théologiquement à l’emprise territoriale des États chrétiens. On comprend ainsi que l’appel à la libération des lieux où le Christ a marché, où il est mort et ressuscité et où il reviendra bientôt, trouve un écho dans le cœur de très nombreux croyants. Plus qu’une simple possibilité d’accès, la libération puis la défense de Jérusalem et du tombeau du Christ sont accueillies comme une grande œuvre de piété. L’image des croisés faisant procession pieds nus devant les murailles de Jérusalem tels Josué devant Jéricho montre l’assimilation de la reconquête de la Terre sainte à la conquête de la Terre promise. Ici, le musulman, souvent caricaturé et très mal connu, est rarement perçu comme une âme à gagner, mais plutôt comme un agent de l’Antichrist. On notera quelques exceptions notables comme François d’Assise qui s’est joint à la cinquième croisade sans combattre, mais avec le projet de présenter l’Évangile au sultan Malik-al-Kamil. Le sultan ne se convertit pas, mais il offre à François des richesses (qu’il refuse) et le fait escorter jusqu’au camp chrétien. De manière plus générale, c’est l’urgence eschatologique de la libération des lieux saints qui prédomine. Les Croisades peuvent être vues dans cette perspective comme le résultat de l’attente prophétique de l’accomplissement à Jérusalem du monde nouveau.
6. Enfin, les croisés étaient animés par l’espoir du salut dans un contexte où le message promulgué par l’Église était source d’incertitude. L’appel aux Croisades s’est assorti d’une promesse d’une indulgence plénière, une des premières de l’histoire, à ceux qui entreprenaient de libérer la terre où le Sauveur était né. Celle-ci garantissait que tous ceux qui mourraient en chemin, que ce soit par terre ou par mer, ou en combattant les païens, auraient la rémission immédiate de leurs péchés. Ainsi des foules se sont mises en marche en dépit de ce que la raison aurait pu juger comme inconscient ou suicidaire, mais dans l’espérance salutaire du « quoi qu’il arrive ». Des hommes et des femmes ont tout quitté par la foi, des seigneurs se sont ruinés par la foi aux dépens bien souvent de leur liberté et de leur vie. Les Croisades peuvent ainsi être comprises comme un acte de pèlerinage pénitentiel répondant à l’angoisse des peines éternelles des croyants du cœur du Moyen Âge.

Le bilan des Croisades

Si se replonger dans ces éléments de contexte permet de mieux comprendre ce qui a poussé tant d’hommes et de femmes à partir aux Croisades en évitant quelques anachronismes, il n’en demeure pas moins que le recul sur ces événements dresse un bilan catastrophique.
Un échec militaire tout d’abord. Mis à part les succès de la première croisade avec la prise d’Antioche et de Jérusalem qui permettra la naissance des fragiles États latins d’Orient, les divisions incessantes des chefs croisés et l’épuisement rapide du flux du renouvellement des forces humaines rendront les sacrifices des Croisades totalement futiles avec la prise de Saint-Jean-d’Acre par les Mamelouks en 1291. On pourrait dire « tout ça pour ça ? ». Et ce « tout ça » est un terrible gâchis humain. Les imposants convois de croisés, souvent composés également de femmes et d’enfants, s’aventurent dans d’immenses contrées sans eau et sous un soleil de plomb. Fatigués par les longs trajets à pied et mal équipés, ils deviennent des proies faciles qui se font régulièrement tailler en pièces. Les principes de la soi-disant guerre juste sont piétinés par les pires élans du cœur humain quand les populaces indisciplinées massacrent les Juifs sur le chemin de la croisade, quand les guerriers sanguinaires usent des pires tortures ou quand la prise de Jérusalem se transforme en bain de sang. Cette violence mêlée d’un honteux intérêt financier se retourne même contre les chrétiens entre eux comme dans le cas hallucinant de la quatrième croisade qui se termine par le pillage de Constantinople, ville la plus riche de l’époque, fragilisant de manière durable ce tampon historique avec l’Islam. Le fossé entre chrétiens occidentaux et d’orient s’en est trouvé plus profondément creusé.
Les Croisades n’ont répondu ainsi à aucun de leurs objectifs.

Quelles ont été les conséquences durables des Croisades sur les relations des chrétiens avec le monde musulman ?

Si nous devons sans doute résister à la tentation d’attribuer l’extrémisme islamique actuel aux Croisades, cela ne veut pas dire que les Croisades n’occupent pas une place importante dans la conscience de notre entourage musulman. Comme le commente Kevin De Young en 2015, il n’en a pas toujours été ainsi : « Le terme désignant les Croisades, harb-al-salib, n’a été introduit dans la langue arabe qu’au milieu du XIX e siècle, et la première histoire arabe des Croisades n’a été écrite qu’en 1899. Les Croisades ayant échoué, elles n’avaient tout simplement pas beaucoup d’importance pour les musulmans. Mais la mémoire de ces événements a commencé à changer lorsque les nations européennes ont colonisé les nations musulmanes et y ont apporté leurs écoles et leurs manuels scolaires qui saluaient les vaillants croisés et les chevaliers héroïques qui avaient tenté d’apporter le christianisme et la civilisation au Moyen-Orient. Comme le sport, comme la guerre, comme la vie — quand vous gagnez, vous ne vous souciez pas de qui perd ; mais quand vous perdez, il importe beaucoup de savoir qui vous bat. » C’est bien souvent la réappropriation de la mémoire des événements anciens stimulés par un ressenti contemporain qui fait obstacle à la défense de la foi chrétienne. Ainsi, le positionnement des chrétiens du XXI e siècle par rapport aux Croisades a son importance puisqu’il traduit l’attitude actuelle des chrétiens envers leurs contemporains musulmans, juifs ou athées.

Quelle attitude adopter face aux Croisades ?

Dans le contexte tellement différent de notre monde moderne qui exalte l’individualisme démocratique, la liberté religieuse et la séparation du séculier et du spirituel, quelle attitude adopter ?
Aujourd’hui, nous ne partageons pas bon nombre des hypothèses des chrétiens du Moyen Âge. Nous pouvons comprendre le contexte socio-religieux, la logique des enchaînements, la part de bonnes intentions, mais même conscients de se retrouver de l’autre côté de la chronologie de l’histoire, comment approuver de telles dérives si étrangères à l’Évangile ? Les erreurs doctrinales sont évidentes : nous ne pouvons pas accomplir des actes de pénitence salvateurs ; le Christ n’avance pas son œuvre par la force. Le contexte géopolitique contemporain relance souvent les tentations de débats et réflexion sur la question de la guerre juste, mais nous n’oublions pas que notre principal combat est d’ordre spirituel. Notre Seigneur a triomphé de l’ennemi non pas en prenant la vie, mais en donnant la sienne. Condamner les Croisades me paraît ainsi justifié. Peut-être est-ce insuffisamment respectueux des intentions défensives légitimes et du cœur sincère des chrétiens médiévaux ; peut-être faut-il condamner uniquement les exactions commises aux détours des Croisades pour respecter l’histoire sans anachronisme, mais nos contemporains ne voient souvent pas les nuances.
Une attitude protestante aurait aussi tendance à se défausser en s’associant plutôt aux victimes qu’aux agresseurs « catholiques », mais là aussi gare aux anachronismes — même s’il est vrai que les éléments qui se mettent en place dans l’Église au moment des Croisades sont en germe ce qui provoquera les mouvements de la Réforme.
Le problème apologétique demeure néanmoins présent pour nos contemporains qui ne font pas facilement de distinction.
Au final, comme dans tout conflit, dans tout malentendu, il me semble que l’attitude la meilleure reste sans doute la demande de pardon même si entre humains les torts sont souvent partagés.
Le pardon coûte parce qu’il ne fonctionne pas en comptant les points de justice entre chaque partie, mais accepte volontairement de couvrir ce qui n’est pas juste. Mais quel beau moyen pour faire tomber le mur des Croisades construit dans le cœur des humains comme obstacle à la foi chrétienne !


Bibliographie

• Thomas F Madden, Les Croisades, Evergreen, 2008.
• René Grousset, L’épopée des Croisades, Tempus Perrin, 2017.
• Amin Maalouf, Les croisades vues par les Arabes, J’ai lu, 1999.
• Neal Blough, Guerre et Paix ; La foi chrétienne et les défis du monde contemporain.
• Christian History Magazine, “The Crusades”, n° 40.

 


Un chrétien doit-il être pacifiste en toute circonstance ? Devrait-il « tendre l’autre joue » même si son agresseur le met physiquement en danger ? Il nous semble difficile d’imaginer Jésus dire cela à une femme qui se ferait battre par son conjoint… Dans cet extrait de son ouvrage Vivre l’éthique de Dieu, Daniel Arnold nous propose un survol de la question de l’usage de la légitime défense pour le chrétien.

Extrait

La légitime défense consiste à prendre des mesures adéquates pour empêcher un agresseur de tuer ou de blesser une personne. Contrairement à une décision de justice qui peut être prise à tête reposée, une action défensive doit souvent se prendre dans le feu de l’action. La personne agressée doit rapidement user de son bon sens pour évaluer la gravité de la situation. S’il est manifeste qu’un intrus ne veut que dérober des biens matériels, il est illégitime de l’abattre. Mais si le voleur porte une arme, ses intentions sont moins manifestes.
Dans l’Exode, on fait une différence entre un voleur abattu de nuit ou de jour : « Si le voleur est surpris dérobant avec effraction, et qu’il soit frappé et meure, on ne sera point coupable de meurtre envers lui, mais si le soleil est levé, on sera coupable de meurtre envers lui » (Ex 22.2-3).
De nuit, un voleur peut difficilement être distingué d’un criminel. On ne peut pas le voir comme il faut et mesurer ses coups.
De jour, l’acte de l’intrus est plus manifeste. La loi ne doit pas être appliquée à la lettre, mais selon le principe qu’elle souligne. Par exemple, de nos jours, il suffirait de tourner un interrupteur pour éclairer une pièce en pleine nuit. L’intention du visiteur se verrait mieux, mais on pourrait hésiter à tourner le commutateur, car l’agresseur alerté pourrait réagir dangereusement. Tout est une affaire de jugement et d’intention. Dans tous les cas, il est manifeste qu’un droit à la défense existe, mais qu’il faut en user avec modération.
Quand Jésus dit qu’il ne faut pas résister au méchant (Mat 5.39), il ne pense pas au meurtrier, mais à une personne qui veut humilier son prochain ou le déposséder d’un bien. Les exemples que Jésus cite sont très explicites. Le premier agresseur donne une gifle pour humilier (il frappe du revers de la main sur la joue droite), le second veut traîner un homme en justice pour lui ravir un objet de valeur (un manteau), le troisième impose une tâche difficile et ingrate (Mat 5.39-41).
Lorsque Jésus est arrêté au jardin de Gethsémané, il demande à Pierre de rengainer son épée : « Remets ton épée à sa place ; car tous ceux qui prendront l’épée périront par l’épée », puis il rajoute : « Penses-tu que je ne puisse pas invoquer mon Père qui me donnerait à l’instant plus de douze légions d’anges ? » (Mat 26.52-53). Jésus fait comprendre à son disciple que la défense par les armes n’est pas utile dans cette situation. En effet, Jésus ne va pas être mis tout de suite à mort, mais il va simplement être arrêté pour être jugé. Or, il ne faut pas que les adversaires de Jésus puissent l’accuser d’avoir résisté par les armes aux autorités judiciaires. (Un maître devrait pouvoir contrôler ses disciples.) Jésus guérit donc l’homme que Pierre a blessé (Luc 22.51). Ainsi, aucune accusation ne pourra être portée ni contre lui ni contre Pierre. Jésus témoigne aussi de sa compassion pour le serviteur du souverain sacrificateur, injustement blessé.
Quelques heures plus tôt, Jésus avait dit à ses disciples une parole parfois mal comprise : « Que celui qui a une bourse la prenne et que celui qui a un sac le prenne également, que celui qui n’a point d’épée vende son vêtement et achète une épée » (Luc 22.36). Par là, il ne voulait certainement pas dire qu’il fallait combattre les ennemis par les armes, puisqu’il rejette fermement les deux épées que les disciples lui présentent : « Ils dirent : Seigneur, voici deux épées. Et il leur dit : Cela suffit » (Luc 22.38).
Jésus leur annonçait simplement un temps nouveau fait de tribulations.

Conclusion de la rédaction de Promesses

On pourrait objecter que nous cherchons ici à minimiser les paroles de Jésus. En effet, en face d’une persécution violente, de nombreux chrétiens ont suivi Jésus jusqu’à la mort, sans se défendre. Le sujet délicat du martyr n’est pas abordé dans cet article.
Il démontre seulement que de manière générale, la légitime défense est permise pour le chrétien.
Replacées dans leur contexte biblique, les paroles de Jésus s’éclairent. Il ne désire pas que son disciple se laisse tuer ou maltraiter par plaisir. Seulement, dans certaines circonstances précisément établies dans le texte, le « lâcher-prise » sera un témoignage plus « frappant » pour l’agresseur et les potentiels témoins. Dans de telles situations, le défi lancé par Jésus reste donc de taille pour le chrétien.


« Mettez pour chaussures à vos pieds le zèle que donne l’évangile de paix. » (Éphésiens 6.15)

Quand vous achetez une voiture neuve, une fois que vous êtes décidé sur le modèle, vous regardez quelles sont les options que le garagiste va vous vendre. Imaginez qu’il vous demande si vous désirez avoir l’option « volant » dans ce superbe véhicule.
– L’option volant ? Mais qu’entendez-vous par l’option volant ?
– Oh, beaucoup de gens achètent ce modèle uniquement pour la renommée que leur donne ce véhicule. Le conduire est devenu quelque chose d’optionnel, et c’est pour ça que nous proposons maintenant le volant en option.

Mais si vous êtes choqué par ce dialogue délirant, qu’on puisse considérer le volant comme une option dans une voiture, pourquoi les chrétiens de ce siècle font si peu de cas de l’évangile de paix ? Il n’est pas optionnel, il n’est pas un luxe, il n’est pas un idéal inatteignable. La bonne nouvelle de la paix devrait être le volant d’un christianisme aujourd’hui en errance !

Il est intéressant qu’au milieu d’une description fort guerrière de la foi, Paul prenne le soin de parler des sandales du zèle pour l’annonce d’un évangile de paix. L’apôtre connaît le danger qu’il y a à utiliser des métaphores guerrières quand on parle de la foi.
Les religions ne sont-elles pas un des principaux vecteurs de guerres dans ce monde ? Mais, parce que son ministère dépend avant toute chose de Jésus-Christ, le Prince de la Paix, Paul veut à tout prix rappeler aux chrétiens d’Éphèse que le but du combat de la foi est d’être témoins de la paix. C’est un paradoxe, comme souvent quand on s’approche de Jésus-Christ.

Voyez l’homme Jésus

Jésus est un modèle de douceur qui a inspiré les artistes bien au-delà de la sphère chrétienne.
L’homme Jésus a marqué l’histoire par la paix qu’il portait en lui et qu’il diffusait autour de lui. Il n’était pas seulement porteur d’un message de paix mais aussi d’une pratique de la paix. Beaucoup de gens peuvent vous écrire des centaines de pages sur la paix mais ne la vivent pas. Jésus était porteur de paix jusque dans ses moindres gestes. Il a poussé la non-violence jusqu’à se laisser crucifier. L’injustice de l’humanité est criante quand le Christ est silencieux sur la croix. Y a-t-il une expérience de non-violence plus extrême que celle qui consiste à se laisser livrer ? Certains craignent la perversité quelque peu masochiste d’une souffrance dans laquelle on peut se complaire. Mais si Jésus a laissé faire, c’est en conscience, persuadé que c’était la volonté de Dieu.
Il a même vérifié cela dans sa prière : « Si c’est bien ta volonté, qu’il en soit ainsi. » Il fallait en être sûr pour pouvoir vivre tous ces instants jusqu’au bout.

Face à la violence radicale de l’injustice à son paroxysme, Jésus oppose la puissance de la non-violence.

Mais il ne faudrait pas s’y tromper : la paix qui rayonne de cet homme n’est pas un pacifisme béat, un angélisme, un dolorisme où on se laisse avoir en étant persuadé qu’on est supérieur aux autres parce qu’on prend plus sur soi.

Jésus, Prince de paix, est l’homme le plus violent qui ait jamais existé contre les démons, contre Satan, contre les servitudes et les jougs qui font plier l’échine à des gens qui devraient marcher en étant vraiment debout, contre l’hypocrisie et le mensonge. Jésus est d’une violence terrible contre tout ce qui abîme l’humain.

Quelle puissance ! Voilà un homme en guerre permanente contre la déshumanisation de l’homme. Cela nous fascine, car nous n’avons pas sa capacité à tenir en même temps deux sentiments aussi extrêmes que la non-violence totale à l’égard des personnes et la violence radicale contre les ténèbres. Nous arrivons tout à fait à éprouver ces sentiments l’un après l’autre, dans des temps bien séparés et successifs. Mais les vivre en même temps nous est tout à fait impossible. En tout cas impossible à nos volontés et nos cœurs d’humains.
Soit nous sommes complètement au calme et paisibles, soit nous sommes complètement en colère et au combat, mais nous n’arrivons pas par nous-mêmes à vivre les deux de façon simultanée.
Jésus, lui, le pouvait. Non pas par lui-même en tant qu’homme, mais parce qu’il avait accepté de laisser l’Esprit de Dieu agir en lui.

Le vrai combat

Par la puissance de Dieu en nous, nous pouvons être porteurs de cette double présence au monde, tout en douceur et tout en lutte. Mais cela ne peut être que l’œuvre du Seigneur dans nos vies étroites.
Nos cœurs doivent être dilatés par la présence de Dieu en nous pour pouvoir vivre ces choses.
Au milieu d’un discours guerrier sur les armes de la foi, Paul rappelle que nous ne nous battons pas contre les humains mais contre les puissances spirituelles. Et il rappelle que ce qui nous fait avancer dans l’existence, ce sont les sandales du zèle à annoncer une bonne nouvelle de paix. C’est aussi peu optionnel dans une vie chrétienne que le volant dans une voiture, — sauf à ne pas utiliser sa voiture et à ne s’en servir que pour l’image qu’elle nous donne. Notre foi est bien un outil pour une présence au monde. Une voiture qui ne roule pas ne sert à rien. Ou en tout cas son usage est détourné par rapport à sa destinée. Un chrétien qui ne s’engage pas pour la paix puissante telle que Jésus l’a vécue, est un chrétien qui est détourné de sa destinée.

Oui, il y a une guerre, une guerre sainte contre le mal. Mais celui-ci n’a rien à voir avec le pétrole, les peuples arabes, russes, chinois, nord-coréens, etc. Cela concerne avant tout la lutte contre l’esprit de Mammon, celui qui est le vrai dieu du monde.
Contre la puissance spirituelle et pas contre les médiocres pantins instrumentalisés par cette puissance, quels que soient leurs noms.
Au nom de l’évangile de paix — et le mot paix en hébreu, shalom, veut aussi dire prospérité matérielle — au nom de l’évangile de la vraie prospérité paisible, soyez zélés et marchez ! Marchez avec courage dans le juste combat qui n’est pas contre les personnes mais contre l’ennemi de nos âmes. Ne vous trompez pas de bataille.
Le Prince de la paix vous appelle à intercéder et à bénir autour de vous. Ne rentrez pas dans les logiques de ruptures, de séparation et de cloisonnement de la société, car vous donneriez des points au prince des ténèbres, quand le Prince de paix vous appelle à marcher vers les autres, à mettre les bonnes sandales pour rejoindre le prochain, rejoindre le frère, rejoindre le voisin, rejoindre l’ennemi pour le bénir au sein même de son camp.
La plus grande urgence est donc de recevoir de l’Esprit de Dieu la douceur bienfaisante qui était sur Jésus-Christ, car c’est l’arme la plus puissante qui existe.


Un chrétien peut-il être soldat au XXI e siècle ? Peut-il tuer s’il en reçoit l’ordre ? La guerre peut-elle être juste ? Des chrétiens sérieux, convaincus de l’inspiration de l’Écriture, répondent différemment à ces questions. Cet article propose humblement quelques pistes bibliques, qui respectent des convictions et des avis différents, avant une proposition de synthèse qui ne se veut ni dogmatique ni définitive.

Dans l’Ancien Testament

• Dieu se révèle à Abraham et fait alliance avec lui, lui promettant une terre, une descendance et une bénédiction universelle (Gen 12). En Genèse 15.7, 13-20, Dieu annonce qu’Israël sera longtemps un peuple d’émigrés qui sera maltraité pendant 400 ans. Ils ne pourront prendre possession de la terre promise avant « car c’est alors seulement que la déchéance morale des Amoréens aura atteint son comble » (15.15). Du coup, la guerre de conquête de Canaan (XVI e s. av. J.-C.) sera aussi un jugement militaire sur les Cananéens [note]L’archéologie a démontré la cruauté des Cananéens qui, entre autres sévices, brûlaient vifs des enfants jusqu’à 5 ans pour satisfaire leurs divinités. [/note] . Dieu utilise la force armée pour donner à Israël un territoire, et pour juger en même temps un peuple méchant et immoral. Dieu juge parfois les nations par la guerre [note]Voir, dans ce même numéro, l’article sur la guerre de conquête de Canaan. Les livres historiques (Juges, 1 & 2 Rois par ex.) rapportent de nombreux exemples de guerres punitives et de guerres libératrices… [/note] .
• Les « 10 commandements » de la loi de Moïse prohibent de commettre un meurtre, c’est-à-dire d’ôter la vie d’un innocent, par envie, par méchanceté, ou par intérêt personnel. Le mot utilisé pour « tuer », notamment en temps de guerre, est un autre mot. La loi distingue donc le meurtre de l’action de tuer, soit dans l’exercice de la justice, soit dans le contexte d’une guerre.
• Plusieurs passages de la Torah régulent la manière de mener la guerre, notamment Deutéronome 20. Il fallait proposer à la ville assiégée de se rendre avant la bataille (Deut 20.10), protéger les arbres fruitiers (20.19), etc. La loi posait un cadre à la guerre, comme si celle-ci était un mal possible, qui permettait parfois d’empêcher d’autres maux, pires encore, mais en les encadrant. On imagine ce que serait l’Europe si le nazisme avait triomphé, et on peut comprendre que certaines guerres soient utiles, voire nécessaires, pour préserver l’intégrité morale ou humaine d’une civilisation. On note par ailleurs que les combattants pouvaient être relevés de leur appel en fonction de leurs situations personnelles  : mariage récent, plantation récente, etc.
• Lorsque Dieu emploie les Assyriens pour juger le royaume d’Israël, puis Nebucadnetsar, le dictateur de Babylone, pour juger le royaume de Juda, ils sont rendus responsables de leurs actes atroces (cf. Jér 51.20-24). Un Dieu souverain emploie des nations païennes, conduisant la brutalité « naturelle » des rois de l’époque, pour accomplir son plan de jugement. Mais ces hommes qui accomplissent son plan ne sont en aucun cas dédouanés de leurs responsabilités personnelles puisqu’ils agissent selon leur propre cœur.

Dans le Nouveau Testament

Le N.T. présente des données quelque peu surprenantes. Israël est sous tutelle romaine, après avoir été sous la gouvernance des Grecs.
• Tous les centeniers [note] Un centenier (ou centurion) était un officier de l’armée romaine commandant une centaine de soldats.[/note] mentionnés dans le N.T. sont présentés de façon favorable — c’est-à-dire qu’ils ne sont jamais présentés comme étant des hommes mauvais ou méchants, mais comme des personnes qui, par contraste même avec le peuple d’Israël, ont un cœur, une spiritualité, et une recherche de Dieu. C’est d’autant plus surprenant à nos yeux qu’ils étaient les officiers d’une armée occupante !
Jésus relève la foi du centenier de Capernaüm (Mat 8.5-13). Celui qui a été chargé de surveiller la crucifixion a confessé la divinité de Jésus (Mat 27.54). Corneille (Act 10) et Sergius Paulus [note]Il était proconsul et comme tel il pouvait ordonner l’exécution des criminels ou déployer des troupes en guerre.[/note] (Act 13.7,12) sont devenus chrétiens.
• Aucune des longues listes de péchés que nous trouvons dans le N.T. ne mentionne le fait d’être soldat ; à aucun moment, les apôtres dans leurs lettres ne demandent aux soldats de démissionner de leurs fonctions.
• À l’époque du N.T., l’armée jouait à la fois un rôle militaire (de conquérant) et un rôle de police (de maintien de l’ordre). Quand Paul évoque le « magistrat […] qui porte l’épée, étant serviteur de Dieu pour exercer la vengeance et punir celui qui fait le mal », il enjoint : « Il est donc nécessaire d’être soumis, non seulement par crainte de la punition, mais encore par motif de conscience » (Rom 13.4-5). Dieu demande donc à l’armée d’instaurer un ordre, certes imparfait, mais préférable au chaos de l’anarchie et du non-droit.
• En même temps, le N.T. insiste sur le fait qu’un disciple de Christ va se caractériser par une certaine douceur : il aime son ennemi, prie pour ceux qui le maltraitent et qui le persécutent.
L’attitude générale du chrétien doit le faire connaître comme un homme doux, généreux, bienveillant, qui ne répond pas « au quart de tour », loin d’un esprit haineux, revanchard et belliqueux (cf. Mt 5.1-12, 5.38-45, Rom 12.17-21, Mt 7.12, 1 Pi 2.11-25).
• Lorsque Jean-Baptiste voit des soldats venir à lui pour lui demander ce qu’ils doivent faire, il leur répond : « Ne commettez ni extorsion ni fraude envers personne, et contentez-vous de votre solde. » (Luc 3.14) Jean-Baptiste ne dit pas à ces soldats de démissionner ou de déposer les armes, mais il modère et limite leur activité pour que cette activité se fasse selon une certaine éthique. Ça veut dire qu’un soldat chrétien va devoir réfléchir aux ordres qu’il reçoit. Cela me semble être l’un des éléments importants à prendre en compte dans la réponse à la question initiale.

Un essai de synthèse

Comment concilier ces données qui semblent parfois un petit peu en contradiction les unes avec les autres ?
L’histoire nous apprend que les chrétiens les ont comprises différemment :
• La première position est le pacifisme. Elle a marqué le mouvement mennonite qui a maintenu pendant des siècles une position fermement pacifique où un chrétien ne prendrait les armes en aucune circonstance [note]En francophonie, Egbert Egberts défend cette approche dans son livre, On n’apprendra plus la guerre, Vers un pacifisme chrétien, aux éditions Oasis. [/note] .
Un pacifiste dira « Je préfère aller en prison que de porter une arme et de porter la main sur un être humain créé à l’image de Dieu. [note]Certains pays offrent le statut d’objecteur de conscience. [/note] »
C’est aussi la position la plus fréquente des chrétiens dans les pays musulmans où la guerre prend souvent une connotation religieuse ; ils ont décidé pour la plupart, étant donné que la violence entraîne un cycle infernal de violence, de ne pas prendre les armes. Les guerres de religion européennes ont conduit les anabaptistes aux mêmes conclusions.
• La deuxième position est inverse. Ces chrétiens disent que s’enrôler est un appel personnel légitime. Ils participent à l’armée de leur pays et, lorsque l’ordre de mener bataille est donné, ils font leur travail, c’est-à-dire qu’ils tuent les soldats d’un pays adverse sans aucun problème de conscience. Ils estiment que Dieu forge l’histoire de nations souverainement et providentiellement par le biais de l’État et de l’armée. Un droit s’établit ainsi, certes imparfait, même mauvais dans un certain sens, mais préférable au chaos qui vient d’un monde livré au règne du plus fort [note]Les exactions terribles commises et attestées dans certains pays (mutilations des femmes, enrôlement d’enfants soldats, etc.) après le départ de l’armée conquérante d’un pays démocratique ayant établi un certain ordre social serait une justification de cette approche. [/note] . Je remarque que cette position s’exprime souvent dans le contexte de pays où les chrétiens ont confiance dans leur gouvernement qui est plus ou moins stable et démocratique.
• Une variante de la position précédente propose d’évaluer la moralité d’une guerre pour décider d’une participation [note]Augustin, puis Thomas d’Aquin, ont été les premiers théologiens à se pencher sur [/note]. Une guerre défensive serait considérée comme juste, ou encore une guerre visant la libération d’un peuple de l’oppression d’un gouvernement injuste. Le problème de cette perspective est qu’elle aurait soutenu les militaires de Jérusalem, quand Dieu qualifiait d’injuste cette posture et qu’il demandait par son prophète Jérémie de se rendre aux Babyloniens !
En l’absence d’un prophète authentique, il est difficile d’établir ce que serait une guerre juste.
• Une troisième perspective, entre les deux, se limite au soutien logistique. Dans cette perspective le chrétien pourrait manifester son soutien à un État en guerre, mais uniquement dans des positions de non-combattant. Il pourrait s’impliquer en tant que médecin, chauffeur, infirmier ou logisticien, sans accepter une position où il prendrait une arme pour participer aux combats.
• Au II e siècle de notre ère, les pères de l’Église recommandaient aux gens qui se convertissaient de ne pas devenir des soldats, mais on laissait aux soldats qui devenaient chrétiens la possibilité de rester dans leur profession. Là encore, c’était une position de compromis. Souvent les réflexions éthiques ne sont pas toujours très tranchées car on navigue dans un monde déchu où le bien et le mal ne sont pas toujours si clairs.
Avec le temps, j’ai développé une perspective que je qualifierais de « consentante ». Elle « rend à César ce qui est à César » et « à Dieu ce qui est à Dieu ».
Dans mon appel, je vais militer pour le royaume de Dieu, c’est-à-dire proclamer l’Évangile, vivre la vie chrétienne du mieux possible, prier pour la liberté de culte, etc. ; en parallèle, je consens à participer au royaume de ce monde et je consens à un certain nombre d’activités, y compris combattante. Je suis prêt à un certain nombre d’engagements jusqu’aux limites de ma conscience ; Actes 5.29 nous dit que nous devons obéir à Dieu plutôt qu’aux hommes, et à un moment donné, si les ordres qui me sont donnés sont des ordres qui violent ma conscience (par exemple tuer des civils, ou se venger sur eux), je ne le ferai pas ; j’espère avoir le courage à ce moment-là de le refuser, quitte à en subir les conséquences qui pourraient aller jusqu’à une exécution ou un emprisonnement. Voilà comment je verrais les choses :
1. Laissons à Dieu le soin de diriger les présidents et les rois, sachant qu’il jugera et condamnera les dictateurs de ce monde.
2. Prions que Dieu accorde en tout lieu la liberté de prêcher et de croire. Dans notre pays, et dans tous les pays du monde, notamment les pays encore fermés à l’Évangile.
3. Consentons aux décisions prises par nos autorités pour les suivre jusqu’au combat, poursuivant un engagement mesuré et respectueux des populations.
4. Refusons tout acte militaire ou policier outrancier contraire à l’éthique chrétienne (torture, racisme, viol, etc.). Consentons que ce refus de soumission entraîne une condamnation pour insubordination.
5. Participons activement, en tant qu’Église, à tout acte de justice (protection des faibles, opprimés, étrangers, etc.).
6. Accueillons dans l’Église tout croyant, même avec des avis différents, même « ennemi occupant ».
7. Prêchons l’Évangile à tous, pour permettre au plus grand nombre d’accéder à l’éternité de paix que Dieu va instaurer.
Chaque lecteur est encouragé à se positionner personnellement. Restons aussi prudents vis-à-vis de ceux qui ont pris une décision différente de la nôtre, car il n’y a sans doute pas de réponse absolue possible à cette question.


Le diagnostic

« Voici, les jours viennent, dit le Seigneur, l’Éternel, où j’enverrai la famine dans le pays, non pas la disette du pain et la soif de l’eau, mais la faim et la soif d’entendre les paroles de l’Éternel » (Amos 8.11) .

Deux sondages parus ces dernières années montrent que les chrétiens sont en état de famine spirituelle :
• Concernant les protestants français (y compris évangéliques), 13 % lisent la Bible tous les jours ou presque, 6 % au moins une fois par semaine et 81 % moins souvent, dont 29 % jamais. [note]Sondage IFOP pour l’Alliance biblique française et le quotidien La Croix, effectué en France mi-2022.[/note]
• Concernant les Suisses se définissant comme « protestants évangéliques », seuls 38 % déclarent avoir lu la Bible en entier. [note]Sondage Link pour Christianisme aujourd’hui, effectué en Suisse mi-2020.[/note]

Naturellement, les chiffres sont beaucoup plus bas si l’on considère la population totale. Le constat est sans appel : la lecture de la Bible n’est pas une priorité, même parmi ceux qui se disent chrétiens ! Et pourtant la « faim » spirituelle existe bel et bien et on cherche à la satisfaire par d’autres sources… qui ne rassasient pas !

La situation n’est pas sans analogie avec celle du temps du prophète Amos. Ce dernier critique la cupidité de ses contemporains qui oublient Dieu, oppressent les pauvres et négligent les jours de repos pour commercer davantage (Amos 8.4-6). En conséquence, Dieu envoie une famine spirituelle qui touche d’abord les jeunes (Amos 8.13).
Sans noircir exagérément le tableau, on peut constater que, dans nos églises, la lecture biblique personnelle tend à se raréfier, le culte familial à disparaître et le temps dévolu en église à la prédication biblique à se réduire au profit de la louange. Si cela ne va pas forcément jusqu’à la famine, assurément un constat partagé de dénutrition s’impose !

Le remède

« Jésus répondit : Il est écrit : L’homme ne vivra pas de pain seulement, mais de toute parole qui sort de la bouche de Dieu » (Matthieu 4.4).

La réponse de Jésus à la première tentation du diable au désert est bien connue ; elle est devenue un chant familier… Mais qu’en est-il de sa mise en pratique ? Nous prenons soin de nous nourrir physiquement chaque jour, mais pas toujours spirituellement. Les humains, dans leur grande majorité [note]Même s’il reste hélas 828 millions de personnes sur Terre à souffrir de la faim en 2021, soit environ 10 % des humains (source : Programme Alimentaire Mondial des Nations-Unies).[/note] , mangent tous les jours, mais le soutien de la vie physique n’est pas suffisant : le Seigneur insiste sur l’importance de la Parole de Dieu pour vraiment vivre ! Lui-même disait : « Ma nourriture est de faire la volonté de celui qui m’a envoyé, et d’accomplir son œuvre » (Jean 4.34).
La citation qu’il fait du Deutéronome rappelle qu’Israël au désert n’a pas souffert de la faim physique : la manne venait quotidiennement le rassasier. En revanche, il a oublié la parole de l’Éternel et une génération est morte (mais pas de faim !) dans le désert.
Manger quotidiennement – lire quotidiennement la Bible : deux activités qui devraient être naturelles, routinières. Chacun a ses habitudes alimentaires : certains privilégient un copieux petit-déjeuner alors que d’autres préfèrent se caler au dîner. Des croyants aiment ouvrir leur Bible dès le réveil alors que d’autres, plus « du soir », savourent la tranquillité des dernières heures du jour.
Et si l’on n’a pas faim ? Il nous arrive de ne pas avoir d’appétit au moment de nous mettre à table : allons-nous sauter le repas ? Peut-être, mais pas plusieurs fois de suite ! Nous allons nous forcer, ou bien choisir un plat que nous aimons particulièrement.
De même, nous pouvons reconnecter avec la Parole par un effort assumé ou en revenant vers un de nos textes favoris.
Et si l’on rate un jour ? Ce n’est pas un drame ! Une règle inflexible nous obligeant à lire au moins un chapitre de l’Écriture sans manquer un jour ne serait pas dans l’esprit de la liberté de la nouvelle alliance. Une chrétienne recommandait : « Deux jours [note]Sous-entendu sans ouvrir la Bible.[/note] mais pas trois ! » Il ne faut pas que les excuses deviennent une habitude…
Et si l’on n’aime pas tel texte ? Jésus précise : « toute parole » (cf. 2 Tim 3.16). On dit qu’il faut goûter sept fois un aliment avant de l’apprécier vraiment. Notre première lecture du Lévitique ne nous enthousiasmera pas forcément, mais au fur et à mesure que nous saisirons la trame générale de l’Écriture, la progression de la révélation, les correspondances entre les livres, nous en viendrons à apprécier même ceux que nous trouvions a priori quelque peu indigestes !
Ne nous leurrons pas : un combat est en jeu ! Notre sujet relie les deux thèmes de ce numéro : pour vaincre la famine, une guerre se joue. La faim de Jésus au désert était bien réelle, mais sa priorité fut de se conformer à la Parole de son Dieu et il a vaincu le diable. Alfred Kuen a écrit : « Lire la Bible, c’est contrecarrer le plan des forces hostiles à Dieu. Celles-ci ne demeureront pas inactives : elles chercheront par tous les moyens à déranger notre lecture ou à l’empêcher. Notre lecture de la Bible est donc, en premier lieu, une lutte spirituelle. »

La motivation

« Désirez, comme des enfants nouveau-nés, le lait spirituel et pur, afin que par lui vous croissiez pour le salut, si vous avez goûté que le Seigneur est bon » (1 Pierre 2.2-3).

Si la motivation est absente, la régularité le sera bientôt ! Pourquoi ouvrons-nous notre Bible ? Par obéissance ? pourquoi pas. Par devoir ? sans doute quelquefois. Par peur ? j’espère que non… Avant tout, ouvrons-la pour une rencontre personnelle avec son auteur, Dieu lui-même, et avec celui qui est le centre de la révélation écrite, la Parole vivante, Jésus-Christ. Ouvrons-la pour mieux le connaître et ainsi davantage l’aimer et le servir avec plus de zèle. Nos expériences passées avec le Seigneur (ses délivrances, sa protection, ses bienfaits si nombreux dont le Psaume 34 que cite l’apôtre se fait l’écho) renforcent l’envie de nous approcher de lui  : puisque [note] C’est ainsi qu’il faut comprendre le « si » du verset 3 et que la Bible du Semeur le traduit. [/note] nous avons expérimenté sa bonté, nous avons d’autant plus envie de l’écouter.
Le lait est ici le symbole d’un aliment complet [note]Dans d’autres textes, il est évoqué avec une connotation négative, comme l’aliment initial dont il faut ensuite se détacher pour avancer vers des nourritures plus solides (1 Cor 3 ; Héb 5). Notons l’intérêt de voir le sens d’un symbole à la lumière de son contexte ![/note] et l’image de Pierre est parlante : qui n’est pas réjoui de voir un bébé téter goulûment, avec un sentiment de plénitude et de satisfaction une fois sa faim apaisée ? La lecture de la Parole est indispensable pour grandir spirituellement : elle est à l’origine de la vie nouvelle en nous (1 Pi 1.23-25) et elle est l’aliment de notre croissance, présente dans toutes les étapes d’un salut qui embrasse bien au-delà de la nouvelle naissance.
Pierre, cependant, n’occulte pas les obstacles. Deux d’entre eux sont à relever :
• les tensions relationnelles (méchanceté, hypocrisie, jalousie, médisance, 1 Pi 2.1) annihileront l’effet positif de la Parole : traitons-les vite pour retrouver la joie de notre lecture ;
• les « convoitises charnelles qui font la guerre à l’âme » (1 Pi 2.11) témoignent une fois de plus de la lutte spirituelle qui est en jeu : si mes pensées et mon emploi du temps sont occupés à satisfaire mes désirs purement terrestres, la lecture de la Bible sera négligée — et les pièges ne manquent pas en la matière, multipliés par les outils électroniques constamment à notre disposition !

La conséquence

« J’ai recueilli tes paroles, et je les ai dévorées ; tes paroles ont fait la joie et l’allégresse de mon cœur » (Jérémie 15.16).

Dans ce texte, selon la meilleure hypothèse, Jérémie fait allusion au livre de la loi découvert sous Josias.
Longtemps oublié, le Deutéronome a été le guide d’action de ce roi pieux et la joie du prophète.
Le verbe « manger » indique une appropriation personnelle du message reçu. Jésus se comparait lui-même au pain de vie et invitait ses disciples à le « manger » symboliquement. Le remède à la dénutrition passe par une meilleure assimilation des aliments, qui réclame régularité des prises, mastication prolongée, choix approprié des mets.
Le parallèle avec notre assimilation de la Parole est facile à faire !
Pour « trouver » les paroles du Seigneur, les occasions ne manquent pas. Si l’on est isolé, comme Jérémie, on peut, par exemple : télécharger la Bible sur son smartphone y compris sous forme d’audiolivre, compléter par des podcasts ou des messages YouTube choisis avec discernement, se fournir dans une librairie chrétienne de livres d’édification, etc.
La Bible se « trouve » aussi en groupe et se comprend mieux à plusieurs : cherchons un groupe de lecture près de chez nous, profitons des messages bibliques de notre église, suivons des formations bibliques en présentiel ou à distance…
Et surtout, quel que soit le moyen, nous pouvons y trouver notre joie, plus encore, notre « allégresse » car la Parole nous vient du Dieu auquel nous appartenons, qui nous aime et qui nous parle ! Quel bonheur d’ouvrir sa lettre d’amour pour nous, de l’y découvrir toujours plus ! Le psalmiste disait : « Je me réjouis de ta parole, comme celui qui trouve un grand butin. » (Ps 119.162) La joie est communicative, dit-on : c’est en montrant un plaisir sincère dans notre lecture personnelle et collective que nous donnerons envie, aux plus jeunes en particulier, de lire la Parole. La famine se sera transformée en festin !

Le problème inverse

« Mettez en pratique la parole, et ne vous bornez pas à l’écouter en vous trompant vous-mêmes par de faux raisonnements » (Jacques 1.22).

Tous les chrétiens ne souffrent pas de famine spirituelle. Certains risquent davantage l’obésité !
On lit beaucoup la Bible (parfois que la Bible !), on assiste à toutes les réunions ou webinaires possibles, on affiche des versets partout… et ce surpoids ne se traduit pas en exercice  ! Il peut y avoir une grande régularité dans le culte personnel, de la connaissance accumulée, un vrai souci d’exactitude doctrinale – et peu de souci du prochain, pas d’appréciation des enjeux du moment, de l’indifférence vis-à-vis des besoins autour de soi. Jacques dénonce ce travers en évoquant de faux raisonnements, qui prennent parfois la forme d’un accent exagéré sur la séparation du monde, la pureté extérieure, la fidélité aux traditions reçues, etc. Le résultat en est aussi une vraie pauvreté spirituelle.
La solution à l’obésité spirituelle ? Se mettre à l’œuvre, s’occuper des plus démunis, recommande Jacques (Jac 1.25,27). « Entrer et sortir » disait un frère âgé à de jeunes croyants : entrer dans le sanctuaire de Dieu pour l’écouter calmement dans sa Parole et sortir pour servir activement. L’Écriture nous est donnée pour nous rendre « accompli et propre à toute bonne œuvre » (2 Tim 3.16-17).
« Il faut manger pour vivre et non vivre pour manger » : appliquons ce proverbe populaire et nourrissons-nous de l’Écriture pour œuvrer ensuite de façon intelligente et diligente pour le Seigneur.


Le désir d’échapper au vieillissement et à la mort existe depuis l’Antiquité. Au Moyen-Âge, les alchimistes européens recherchaient l’élixir de jouvence, la fontaine de jeunesse ou la pierre philosophale qui auraient permis de prolonger indéfiniment la vie.

De nos jours de nouveaux termes apparaissent ; la « médecine régénérative » vise à réparer ou remplacer les cellules ou organes défaillants. Le « transhumanisme » a l’ambition d’enrichir l’être humain avec de nouvelles ressources scientifiques et techniques : il rêve de machines capables de se connecter à un cerveau et de le télécharger pour qu’une personne survive numériquement à son décès.
La Bible répond à ce désir d’immortalité ! Elle affirme en effet que l’existence se poursuit au-delà du décès, pour une durée illimitée. Mais elle nous laisse la responsabilité de choisir entre :
• La « seconde mort » : le bannissement définitif loin de Dieu, une éternité de tourments avec le diable [note] Apoc 20.10-15 [/note] – si l’on refuse le pardon de Dieu.
• La « vie éternelle » : la présence de Dieu, dans un lieu d’une beauté inimaginable, sans deuil ni tristesse [note] Apoc 21.3-7 [/note] – si l’on accepte le pardon et l’autorité de Dieu [note] Jean 3.16 [/note] .

Cette vie éternelle n’est pas définie uniquement par son absence de fin, mais aussi par sa qualité : c’est une relation personnelle avec le Père et avec Jésus-Christ [notre]Jean 17.3 – 5[/note] , qui nous transforme dès maintenant [note]1 Jean 5.13[/note] , pendant notre vie terrestre !


La Bible mentionne quelques hommes qui se sont donné la mort. S’agit-il alors de suicides ? Ce n’est pas le cas de tous. Certains s’ôtent la vie : désespérés, ils veulent mettre un terme à leur existence ; d’autres donnent leur vie : ils acceptent la mort comme un moyen de servir Dieu ou de protéger la vie d’autres personnes.

Dans la première catégorie, on trouve des hommes qui se sont suicidés pour échapper aux conséquences de leurs actes, ou en finir avec leur mal-être, leurs remords stériles. Car les remords ne sont pas une vraie repentance où l’on a pris conscience de la gravité de son péché et où l’on s’humilie sincèrement devant Dieu ; ils n’amènent pas à confesser le péché devant Dieu, ils ne suffisent pas pour recevoir son pardon (Rom 2.4; 2 Pi 3.9). Le remords, c’est la tristesse causée par le résultat de son iniquité, alors qu’elle devrait l’être par l’offense faite à Dieu et par le mal occasionné à autrui. Sans confession, pas de pardon, pas d’espérance : cet accablement ne peut être apaisé, il ne peut que conduire à la mort (2 Cor 7.10).
Dans la seconde catégorie, la mort est acceptée comme un sacrifice permettant de vaincre l’ennemi, d’ouvrir les trésors de la bonté divine à notre prochain. C’est un don de soi, c’est aimer selon Dieu, sans limite (cf. Jean 3.1), en action et en vérité ! (1 Jean 3.18).
Distinguons cinq cas différents.

S’ôter la vie

• Abimélec, fils de Gédéon, a mis à mort ses frères pour prendre le pouvoir (Jug 9.1-6). L’Éternel ne peut oublier cet acte odieux. Ainsi, lors d’un siège, il a le crâne fracassé par un morceau de pierre jeté par une femme. Alors qu’il est en train de mourir, il refuse de saisir cette ultime occasion pour manifester un quelconque regret ou repentir. Non ! ce qui compte à ses yeux c’est de ne pas perdre la face.
Lui, le roi, être battu par une femme… quelle honte ! Il ordonne donc à son porteur d’armes de le transpercer de son épée (Jug 9.54). Cette fin tragique n’a rien de noble ou d’héroïque. Elle ne relève en rien l’image de cet homme violent et imbu de sa personne.
• Achitophel, conseiller d’Absalom, préfère se donner la mort en s’étranglant plutôt que d’affronter les conséquences de sa trahison envers le roi David (1 Sam 17.23). Quand il comprend que son plan rusé pour tuer David ne sera pas suivi par Absalom, il décide de se donner la mort, ne pouvant supporter l’affront d’un désaveu.
• Saül, roi d’Israël, a bien débuté ; mais il s’enferme ensuite dans la désobéissance envers Dieu. Son parcours se termine lamentablement sur la montagne de Guilboa. Rejeté par Dieu à cause de ses péchés et de son obstination, il est acculé par les Philistins en ce dernier combat. Grièvement blessé, il demande à son porteur d’armes de mettre fin à ses jours. Tremblant devant son monarque, ce dernier n’ose pas … ce qui pousse Saül à se jeter lui-même sur son épée (1 Sam 31.4). Le serviteur, par un acte d’imitation ou de désespoir, se suicide de la même manière. Dans cette scène tragique, c’est la peur de tomber entre les mains des ennemis, la peur d’être humilié, battu, torturé et cruellement mis à mort qui l’emporte.
• Zimri, conspirateur et meurtrier de son roi, voyant qu’à son tour il allait être renversé et tué, se retire dans son palais et le brûle sur lui (1 Rois 16.18). C’est ainsi qu’il meurt à cause des péchés qu’il avait commis.
• Judas, disciple de Jésus, troublé et pris de vains remords pour sa trahison, essaie de revenir en arrière. Devant le refus des Juifs, il leur rapporte leur argent et va se pendre (Mat 27.5).

Souhaiter la mort

• L’épouse de Job, accablée par le deuil et le dénuement, pousse son mari à se laisser mourir… voire plus. Job reste ferme. Il ne cède pas à la tentation d’en finir. Et même s’il regrette, dans son chagrin, le jour de sa naissance (Job 3.1), il est consolé par Dieu et béni durant le reste de ses jours.
• Élie, après une éclatante victoire sur l’idolâtrie, en vient à demander la mort parce qu’il se croit à tort isolé face aux menaces sur sa vie (1 Rois 19). L’Éternel le réconforte et lui fait comprendre qu’il n’a pas à décider lui-même du moment de son départ.
• Jonas est repris par l’Éternel pour avoir demandé la mort plutôt que de voir ceux qu’il considérait comme des ennemis être les bénéficiaires de la bonté de Dieu (Jon 4). Son cœur s’irrite de ce que Dieu ne faisait pas de différence, de ce qu’il était également bon envers les méchants et leur faisait grâce s’ils se repentaient. Est-il aussi irrité en constatant que le jugement qu’il a annoncé ne s’est pas produit ? Être déçu de Dieu, par manque d’amour, est un réel danger qui conduit à de telles demandes insensées.

Être proche de la mort

• Paul, apôtre et serviteur de Jésus Christ, a souffert en bien des manières pour le nom de son Maître (Act 9.16). Il en arrive au point de se sentir tout proche de la mort (« désespérer de vivre », 2 Cor 1.8-10). Mais il reçoit les forces au moment opportun, tout au long de sa carrière terrestre ; il peut alors déclarer que le Seigneur s’est tenu à ses côtés et qu’il le délivrera de toutes mauvaises actions (2 Tim 4.17-18).

Donner sa vie

• Samson a connu beaucoup d’écarts et de chutes dans sa vie de serviteur de Dieu ; mais il la termine par ce qui n’est pas un suicide mais bien plutôt un acte héroïque, un sacrifice. L’Éternel lui permet de remporter une dernière victoire donnant sa vie pour la délivrance de son peuple. Dans sa mort volontaire sous les décombres du palais des Philistins, il remporte une grande victoire sur ceux-ci (Jug 16.22-31).
• Jésus, Fils de Dieu et fils de l’homme, le seul parfait en tous points, a donné sa vie pour glorifier son Dieu et satisfaire sa justice, pour nous délivrer de la main de notre ennemi (Héb 2.15), de la puissance des ténèbres (Col 1.13), de la colère à venir (1 Thes 1.10). Il a accepté de mourir pour nous associer à sa mort et à sa résurrection, pour nous ouvrir les immenses richesses de la grâce de Dieu, pour nous donner, par-delà la mort physique, un sûr et éternel avenir avec lui.

Le Seigneur Jésus a donné sa vie (Jean 10.17-18), personne ne lui a prise ! Il s’est livré en sacrifice à Dieu. S’il a accepté de mourir, c’est pour nous sauver. S’il s’est laissé conduire au supplice et n’a en rien esquivé cette mort humiliante et honteuse, alors qu’il avait le pouvoir de le faire (Mat 26.53), c’est par amour pour son Dieu et Père et par amour pour sa créature.

Conclusion : et nous ?

Fils et filles de Dieu, prenons garde à nos voies et à nos pensées… au renouvellement de celles-ci. Ne laissons pas les fruits de notre esprit se gâter et amener la corruption de la mort dans notre vie. Rejetons toute idée qui chérirait la mort physique comme délivrance à l’adversité, à la souffrance et aux soucis. Certes, il peut arriver que, dans des circonstances extrêmes, nous aspirions à quitter notre corps de misère, mais notre espérance doit être plus fondée sur le fait d’être revêtu de la plénitude de la grâce de Dieu que d’être délivré des souffrances de cette terre (2 Cor 5.1-4).
Frères et sœurs en Jésus Christ, nous connaissons le véritable amour en ce que Jésus a laissé sa vie pour nous et que nous devons laisser nos vies pour ceux et celles de la famille de la foi (1 Jean 3.16-17). Si cela doit aller jusqu’au sacrifice de notre vie, que Dieu nous en donne l’acceptation et la force, comme c’est le cas encore aujourd’hui pour plusieurs des nôtres dans les persécutions et guerres ; mais n’acceptons jamais l’idée de provoquer notre mort pour être délivré de nos angoisses et détresses. « Mes temps sont en ta main » (Psaumes 31.15).

Pour aller plus loin : Henri Blocher, Du suicide, Ichtus – https://evangile21.thegospelcoalition.org/article/n-7-novembre-1970-du-suicide/