PROMESSES
« C’est pourquoi aussi, que nous soyons présents ou que nous soyons absents, nous nous appliquons avec ardeur à lui être agréables ; car il faut que nous soyons tous manifestés devant le tribunal du Christ, afin que chacun reçoive les choses accomplies dans le corps, selon ce qu’il aura fait, soit bien soit mal. Connaissant donc combien le Seigneur doit être craint, nous persuadons les hommes, mais nous avons été manifestés à Dieu, et j’espère aussi que nous avons été manifestés dans vos consciences. » (5.9-11 [note] Les citations de cet article sont tirées de la version Darby[/note]).
Christ, le croyant, un tribunal : on peine à associer ces trois mots. On est sauvé par grâce, donc pas de tribunal, n’est-ce pas ? Pourtant si. Non seulement tous les incroyants devront comparaître devant un tribunal, mais aussi les croyants, dit Paul dans ce texte. Essayons de comprendre quel est ce tribunal pour en tirer quelques conséquences.
1. Quel est ce tribunal, qui devra s’y présenter et pourquoi ?
« Tous » auront à comparaître devant le tribunal de Dieu :
• Les incroyants pour être jugés et recevoir ce que mérite ce qu’ils auront fait pendant leur vie sur la terre, devant le grand trône blanc (Apoc 20.11-15).
• Les croyants (les saints), non pas pour être jugés dans le sens d’être condamnés (tout est réglé quant à leur position), mais pour que leur vie soit mise en lumière [note] À dessein, le mot « jugement » n’est pas utilisé en rapport avec ce tribunal en 2 Cor 5, même si d’une certaine façon il y a ce sens[/note] .
D’autres textes[note] Rom 2.16 ; 14.12 ; 1 Cor 4.4-5 ; Mat 10.26 ; Marc 4.21-22 ; Luc 8.16-18 ; 12.1-2.[/note] sur le sujet nous disent que tout sera révélé. Ils affirment trois grands principes en relation avec ce tribunal :
1. L’homme ne peut rien garder secret ; Dieu voit tout
Ce principe très important maintient l’autorité du Dieu qui est lumière. Autrement quelque chose échapperait à son pouvoir et à son jugement.
2. Nous aurons à rendre compte à Dieu
Notre responsabilité personnelle envers Dieu est maintenue. Nos frères et sœurs dans l’Église peuvent nous aider ici-bas mais n’interféreront pas dans l’appréciation que Dieu portera sur nous.
3. Nous n’avons pas à craindre les hommes, mais Dieu
Nous n’avons pas à craindre les machinations secrètes des hommes mais nous pouvons avoir confiance en Dieu. La perspective de ce tribunal maintient notre conscience dans la lumière devant Dieu. Si nous sommes inquiets d’être « manifestés » [note]Le verbe grec phaneroo utilisé par Paul et traduit ici par « manifester » signifie litt. « être révélé dans son vrai caractère, tel que l’on est vraiment »[/note], nous ne sommes pas pleinement dans cette lumière.
Cette manifestation au tribunal de Christ sera un gain immense pour le croyant qui connaîtra comme il aura été connu (cf. 1 Cor 13.12). Il portera le même juste regard que Dieu sur sa vie, depuis sa naissance : les fruits qu’il a portés pour Dieu dès sa conversion, l’usage qu’il a fait des dons reçus, la mesure selon laquelle il aura honoré le Seigneur ou il aura attristé le Saint-Esprit.
Déjà maintenant, en regardant en arrière depuis notre conversion, nous voyons quelle grâce, quelle patience, quel amour Dieu a eu pour nous ! Combien plus alors, libérés de la vieille nature qui nous a poussés à commettre le mal, apprécierons-nous la manière d’agir pleine d’amour de Dieu envers nous !
Alors nous comprendrons les plans de sagesse et de bonté de Dieu pour nous conduire, nous enseigner, nous garder de la tentation, nous relever après une chute. Certaines façons d’agir du Seigneur, qui paraissent aujourd’hui incompréhensibles, n’auront alors plus de secret pour nous et nous les considérerons avec admiration et une profonde adoration.
2. Quand aura-t-il lieu ?
Devant ce tribunal, les croyants arriveront avec leur nouveau corps glorieux (Phil 3.21). Cela aura donc lieu après l’enlèvement des croyants, quand Jésus nous prendra pour être pour toujours avec lui [note]Jean 14.1-3 ; 1 Thes 4.16-17.5[/note].
Nous pouvons aussi penser que ce sera avant d’être présentés au Père (1 Thes 3.13), car nous recevrons nos couronnes à la suite de ce tribunal.
En ce jour, il ne restera plus de trace de la nature pécheresse d’autrefois. Nous serons dans la joie avec notre Seigneur et dans une parfaite paix, résultat de ce que Christ a obtenu pour nous.
Plus encore, nous serons comme le juge, dans un corps semblable à lui, grâce à lui (1 Jean 3.2). Le juge sera celui qui a pris sur lui ma faute.
Les méchants recevront leur punition après le millénium ; les saints, leur récompense avant. Il n’y a pas de groupe intermédiaire.
3. Comment se déroulera-t-il ?
Cela aura-t-il lieu devant tous ou à huis-clos ? La Bible ne le précise pas. Chacun rendra compte pour lui-même sans que personne d’autre s’en mêle. Il paraît difficile de penser que tous écouteront et verront la vie de chacun : nous connaître à fond est une prérogative qui n’appartient qu’à Dieu, notre Créateur [note] Pour le jugement des incroyants, Jésus a annoncé que des hommes de Ninive et la reine de Shéba se lèveront et condamneront les Juifs qui l’ont refusé (Mat 12.41-42). Ce jugement sera donc, au moins partiellement, visible par d’autres[/note].
4. Quelles seront les conséquences ?
À la suite de cette manifestation devant le tribunal de Christ, il y aura pour le croyant :
• Des récompenses
Chacun recevra sa propre récompense, en rapport avec son propre travail pour Christ — bien que tout soit grâce, car c’est ce que l’Esprit aura fait en nous.
Selon notre diligence à obéir à la Parole de Dieu, notre intégrité dans notre service et dans notre vie chrétienne, nous n’aurons pas tous la même récompense. Les couronnes seront différentes et l’autorité que nous confiera le Seigneur aussi (cf. Luc 19.12-27). Nous recevrons en tout cas un « plein salaire » (2 Jean 8).
• Des pertes
Les œuvres de notre vie seront éprouvées par le feu pour constater si elles sont de l’or ou du foin. Dans ce dernier cas, elles seront consumées (1 Cor 3.14 15). Dans nos vies, combien de motifs impurs, d’interprétations bibliques qui nous arrangent, d’œuvres futiles, d’attitudes égoïstes, de désirs de plaire aux hommes plutôt qu’à Dieu ? Il en résultera une perte de récompense. Nous verrons de combien de bénédictions notre infidélité nous a privé. Devant l’accumulation de nos fautes, nous comprendrons davantage la valeur de l’œuvre de Christ.
5. Quelles implications pratiques en tirer aujourd’hui ?
Le verset 11 nous montre un double effet pour notre vie présente :
• Le Seigneur doit être craint : nous savons quel terrible jugement éternel attend celui qui est perdu. Alors cela nous pousse à persuader les hommes en annonçant l’Évangile. Le verbe « convaincre » ou « persuader » implique une conviction profonde, une insistance et une persévérance de notre part.
• Comme notre conduite sera mise en lumière, nous sommes donc encouragés à rechercher le bien des autres et la gloire de Christ.
Telles sont les conséquences que l’apôtre veut que nous tirions du tribunal de Christ — et non la peur d’un jugement. Si, aujourd’hui, nous ne sommes pas à l’aise avec ce tribunal, si nous ne pouvons pas y penser avec tranquillité, c’est soit par manque de compréhension de ce qu’il est, soit parce que quelque chose dans notre vie n’est pas en règle avec Dieu. Si nous avons ouvert tout notre cœur devant Dieu maintenant, nous ne devrions pas être inquiets qu’il soit entièrement dévoilé à ce moment futur.
Si notre cœur se rassure en pensant que telle chose ne sera pas révélée, Dieu nous répète que rien ne restera caché. Il le fait pour notre bénédiction et pour la joie que produit une marche droite devant lui.
Puisque crainte il y a, elle n’est pas liée au moment où nous le rencontrerons, mais elle concerne notre marche ici-bas. Si un chrétien pèche, Dieu va s’occuper de lui — et cela peut aller jusqu’à la maladie ou même le décès (cf. 1 Cor 11.30).
D’une manière générale, le Seigneur ne nous juge pas si nous nous jugeons nous-mêmes (1 Cor 11.31), car Dieu ne prend pas plaisir à nous affliger.
Si je suis pur aujourd’hui dans ma marche devant Dieu — ce qui ne me justifie pas — je n’ai pas à être anxieux d’être plus tard manifesté devant Dieu, parce que je le suis déjà maintenant. Cette perspective a un grand effet pratique sanctifiant : elle nous maintient sous l’œil de Dieu qui voit tout ce que nous faisons.
Alors appliquons-nous aujourd’hui avec ardeur à lui être agréables dans tous nos moments, sans nous laisser influencer par un environnement souvent opposé. Sondons avec ardeur sa volonté et la pensée biblique sur les questions qui agitent notre société. Pensons à sa gloire plus qu’aux pressions que nous subissons. Il en est digne (Apoc 4.10-11) !
- Edité par Thorens Jacques-A
Le passage s’inscrit dans la continuité directe de celui dans lequel Paul présente la gloire supérieure de la nouvelle alliance, au service de laquelle il se présente, comparée à la gloire de l’ancienne alliance, qu’il reproche aux « super-apôtres » de réintroduire sous couvert de l’Évangile, pour leur propre profit.
Au début du chapitre 4, Paul accuse les super-apôtres de ruse, de falsification de la parole de Dieu, d’être des incrédules aveuglés par Satan (4.2-4). En contraste, l’Évangile qu’il proclame le conduit à prendre un rôle de serviteur des autres pour mettre Christ au centre (4.5). Mais il doit alors faire face à l’accusation de faiblesse, de timidité (10.1-2), là où l’éloquence de leurs discours (10.6) est censée refléter la puissance de Christ (13.3).
Et Paul fait de cette faiblesse apparente, un argument en faveur de son ministère :
Elle ôte toute ambiguïté dans l’attribution de la puissance (4.7)
Au vu de sa faiblesse, cette puissance ne peut venir de lui, c’est donc celle de Dieu qui est à l’œuvre. On peut ici lire en creux une critique de Paul à ses adversaires. Il les accuse de jouer sur cette ambiguïté pour s’attribuer ne serait-ce qu’une part de la gloire qui ne revient qu’à Dieu seul.
C’est au travers de cette faiblesse que transparaît le plus visiblement l’image de Jésus (4.8-12)
À la liste des souffrances que Paul évoque, on peut difficilement éviter le rapprochement avec Jésus. Paul le fait d’ailleurs explicitement : il porte dans son corps les souffrances du Seigneur Jésus.
Le Dieu-Roi est devenu un homme pauvre et simple. Venu pour aimer et sauver, il a souffert le rejet, les menaces puis la torture et la mort.
Il ne s’agit pas pour Paul d’ajouter par ses souffrances quoi que ce soit à la valeur expiatoire des souffrances et de la mort de Jésus.
Son œuvre est complète. Mais de son arrestation jusqu’à son dernier souffle, l’agonie de Christ a aussi eu pour but de faire briller d’autant plus fort le message qu’il a continué de communiquer au travers de ses souffrances. Le pardon qu’il prêchait n’a pas d’exemple plus fort que celui qu’il demande depuis la croix pour ses persécuteurs. L’amour filial qu’il recommande n’a pas d’expression plus touchante que celui qu’il témoigne à sa mère avant de mourir. Et c’est dans la recherche du même but que Paul inscrit ses propres souffrances pour la cause de l’Évangile dans la continuité de celles de son Seigneur. À travers elles, il manifeste concrètement à ceux qui le voient, ce que le Seigneur a traversé. Et de la même manière que les souffrances du Seigneur jettent une lumière éblouissante sur son message, celles de Paul mettent en valeur l’Évangile qu’il prêche et qu’il vit jusque dans ces épreuves : afin que la vie de Jésus soit, elle aussi, révélée dans notre corps mortel. Et c’est au travers de cette mort que se transmet cet Évangile concret, cette vie de Jésus, d’où le passage du « nous » au « vous » (4.12) : « Ainsi la mort agit en nous, et la vie agit en vous. »
Paul retourne donc l’accusation de faiblesse en la présentant comme une preuve de son ministère. Là encore, on peut y voir en négatif une critique de ces super-apôtres qui avançaient des miracles et une rhétorique maîtrisée à l’appui de leur prétendu ministère. Le vrai serviteur de l’Évangile est celui dont la vie même reflète celle du Seigneur, au détriment de l’affirmation de sa propre personne.
Et puisque Paul souffre à l’image de Christ, il sera aussi ressuscité à son image (4.13-15)
Ce qui fait de lui un objet de mépris pour certains est pour Paul l’assurance de son avenir éternel avec Dieu et une preuve supplémentaire de son apostolat. Dans le Psaume 116 qu’il cite, l’auteur n’a pas honte de rappeler la faiblesse dans laquelle il s’était retrouvé. Sa confiance en Dieu lui a permis de traverser son épreuve dont le souvenir fait abonder la reconnaissance publique du poète.
De la même manière, l’assurance de Paul (« j’ai cru », 4.13) l’affranchit de toute honte vis-à-vis de ses faiblesses qu’il a exposées librement dans les versets précédents (« j’ai parlé »). Loin d’être un discrédit porté à son ministère, elles sont le canal par lequel Dieu touche les cœurs afin de multiplier la grâce et de faire abonder la reconnaissance à la gloire de Dieu (4.15).
C’est au-delà de sa vie présente que Paul recherche un accomplissement (4.16-18)
Les super-apôtres sont probablement obnubilés par la recherche d’une gloire dans le temps présent et sont en travail constant pour conserver l’attention, l’admiration de leurs contemporains. La gloire de Paul est à venir et certaine, il ne cherche donc pas, à tout prix, une reconnaissance visible de ses contemporains mais plutôt celle invisible de Dieu. Les super-apôtres luttent continuellement pour retenir une gloire qui a tendance à les fuir ; Paul voit patiemment le moment de la sienne se rapprocher de manière inéluctable, tout en voyant son capital augmenter au fil des épreuves qui lui sont imposées…
Mais la souffrance n’est pas l’horizon du croyant
Dans le début du chapitre 5, Paul se permet un petit excursus sur le sujet de la résurrection qu’il vient d’effleurer. Peut-être que ses adversaires, non contents de se focaliser sur la vie présente, nient carrément la vie après la résurrection ? Je n’ai pas trouvé d’affirmation en ce sens. En tout cas, la Première Épître fait assez clairement état de Corinthiens qui la mettaient en doute et versaient soit dans une mortification de leurs membres considérés comme mauvais, soit dans un comportement licencieux puisque, de toute façon, ce qui était fait dans le corps n’avait pas d’importance. Une précision est donc probablement bienvenue pour éviter que l’attitude dans laquelle il s’est présenté vis-à-vis de ses souffrances soit prise pour une forme de mépris du corps. En effet, ce qui n’est pas visible ne signifie pas ce qui est immatériel mais plutôt ce qui n’a pas encore été manifesté. Et cette description du corps ressuscité a aussi l’avantage d’appuyer l’espérance décrite à la fin du chapitre 4 tout en responsabilisant les destinataires par rapport à ce qu’ils font aujourd’hui dans leur corps mortel.
L’apôtre utilise deux images parallèles : celle de la tente et de la maison, de l’édifice ainsi que celle du corps et de l’habit. Ces images permettent de distinguer trois situations :
• La situation présente : il habite une tente, il est habillé de son corps mortel qui est un lieu de gémissements et qui se détruit.
• La situation intermédiaire : la nudité. Après la mort physique, nous nous retrouvons dans la présence de Dieu, dans l’attente de la résurrection. C’est une situation meilleure que celle dans laquelle nous gémissons mais pas aussi enviable que celle dans laquelle nous serons vêtus à nouveau et pour l’éternité.
• La situation finale, celle à laquelle il aspire le plus : il habitera l’édifice que Dieu lui a construit, il sera habillé de son corps éternel dans lequel, tout ce qui est actuellement mortel aura été englouti dans la vie.
Paul désire être revêtu par-dessus son habit actuel plutôt que de voir celui-ci détruit. Cela peut laisser penser que notre corps céleste aura une forme de continuité avec notre corps actuel, puisqu’il engloutira dans la vie tout ce qui est mortel. Ce faisant, Paul donne un certain prix à notre corps actuel. Il reconnaît lui-même qu’il préférerait ne pas traverser la mort, donc subir la perte de celui-ci. Il avertit ainsi les Corinthiens de leur responsabilité vis-à-vis de l’emploi qu’ils en font. Le verset 10 va aussi dans ce sens en prévenant que nous comparaîtrons tous pour rendre compte de ce que nous aurons fait « dans notre corps ».
Mais à côté de cet avertissement, Paul fournit des assurances réconfortantes : c’est Dieu qui le prépare à ce renouvellement par son Esprit qui est, d’une part, le sceau de la promesse et, d’autre part, celui qui renouvelle dès à présent son être intérieur.
Il est donc certain d’aller vers le mieux, ce qui le remplit de confiance.
En conclusion
Alors que retenir de ce passage ?
• Nous pouvons admirer le plan de Dieu qui se révèle dans l’humble condition de ses serviteurs et qui fait briller son message dans les personnes qui souffrent en son nom. Mais s’il leur accorde la grâce de souffrir comme Christ, pour son Évangile, c’est aussi lui qui les renouvelle et leur donne de fixer les yeux par avance sur la gloire à laquelle il les destine. S’il permet que leur corps mortel soit perdu, il leur promet un corps parfait dans sa présence éternelle.
• Nous devons aussi nous laisser interpeller par l’attitude de Paul qui revendique sa faiblesse.Puis-je affirmer comme lui que je porte « les souffrances du Seigneur » dans mon corps pour que sa vie s’y manifeste et soit communiquée ?
Bien sûr, nous ne sommes pas apôtres ni même tous évangélistes. Mais nous sommes tous témoins. Et la question : « Est-ce que ceux qui me voient et m’entendent parler perçoivent Christ ? » nous avons à nous la poser. Mes collègues, mes voisins ont-ils eu l’occasion de voir quelqu’un pour qui leur salut est un réel fardeau ? Ou quelqu’un de commun, accessoirement chrétien, mais qui ne les dérange pas avec ça ? Est-ce que je « pue » la mort ou est-ce que j’embaume la vie, pour reprendre l’image de Paul (2.16) ? Et quand je passe par l’épreuve, est-ce que je la traverse seulement en gémissant sur mon sort (ce qui peut se comprendre) ou est-ce que je demande aussi à Dieu d’en faire une occasion de manifester sa gloire ?
• Est-ce que, à l’inverse, je n’ai pas tendance à rechercher l’approbation de mes semblables plutôt que celle de Dieu ? Mes yeux sont-ils fixés sur la récompense au ciel comme l’étaient ceux de Paul, ou sur ce que je pourrais acquérir déjà aujourd’hui en termes de confort, de carrière, etc.
• Nous vivons pour l’instant dans un corps qui dépérit et peut-être même ce dépérissement se manifeste-t-il plus cruellement pour certains d’entre nous. Mais, même s’il dysfonctionne ou semble destiné à se décomposer, c’est ce corps qui sera renouvelé. Comment cultiver dès aujourd’hui dans ce corps, la relation que je vivrai pour l’éternité avec Dieu quand il l’aura renouvelé ?
- Edité par Richardeau David
La fin justifie-t-elle les moyens ? L’essentiel est-il d’annoncer le message de l’Évangile, même si les méthodes sont discutables, puisque l’enjeu est éternel ?
Peut-on ainsi profiter d’un auditoire captif dans une rame de métro pour l’obliger à entendre, même contre son gré, notre prédication de l’Évangile ?
Quelles limites mettre aux méthodes employées pour annoncer l’Évangile ?
Dans sa seconde Épître aux Corinthiens, l’apôtre Paul, sans doute accusé par ses adversaires, doit défendre, non seulement son ministère apostolique, mais aussi sa manière de témoigner de l’Évangile. Après avoir montré le caractère spécifique de son ministère d’apôtre, il donne quelques repères pour une juste éthique du témoignage chrétien.
Cet article ne cherche pas à entrer dans le détail des controverses opposant Paul et ses détracteurs, mais plutôt à souligner les fondements du ministère de Paul afin de les appliquer à notre propre vie. Nous nous limiterons aux premiers versets du quatrième chapitre.
1. L’encouragement de la grâce (4.1)
Au sein de ses difficultés et malgré les accusations des Corinthiens, Paul se laisse encourager par la grâce de Dieu qui a fait de lui son témoin.
Il sait qu’il ne mérite rien. Il rappelle plusieurs fois dans ses lettres son indignité devant Dieu, lui, l’ancien persécuteur des chrétiens [note] 1 Cor 15.9 ; Gal 1.13 ; Phil 3.6 ; 1 Tim 1.13[/note] .
Paul sait que l’Esprit qui agit en lui (3.18) est aussi à l’œuvre dans le cœur de ses auditeurs. Il est donc doublement encouragé. Malgré son passé et ses limites, Dieu a fait de lui son instrument pour annoncer l’Évangile. De plus, Paul peut avoir confiance dans la puissance du Saint-Esprit pour transformer des vies.
Aujourd’hui encore, Dieu continue de se faire connaître par le témoignage de personnes imparfaites. La mission de faire des disciples, premièrement confiée aux apôtres (Mat 28.18-20), est toujours d’actualité. Dieu accorde le privilège à tous ses enfants d’être des moyens pour que des personnes passent de la mort à la vie.
Tous les enfants de Dieu peuvent aussi se laisser encourager par les mêmes promesses divines, même lorsque le témoignage est difficile. Comme Paul, ils doivent parfois affronter une opposition forte et des accusations injustes. Ils peuvent compter sur la grâce du Dieu qui les envoie et sur l’action puissante de son Esprit pour que le message atteigne son but.
2. L’intégrité du messager (4.2a)
Paul refuse toute « fourberie », tout ce qui cacherait ses véritables intentions. Il se justifiera encore dans la troisième partie de la lettre (12.16), probablement en réponse à de nouvelles accusations.
Dans le livre des Actes, nous voyons Paul changer la manière d’aborder les personnes, selon leur origine – juive (Act 13.16-41) ou païenne (Act 17.22-31). Mais le message reste le même. Paul proclame l’Évangile de Christ.
Paul refuse donc d’utiliser des moyens qui ne font pas honneur au Dieu de vérité. Il refuse de compter sur des procédés purement humains pour accomplir sa mission.
Cette attitude est exemplaire pour le témoignage chrétien. Il est parfois nécessaire d’être prudent (Mat 10.16), en refusant par exemple de se laisser entraîner dans des discussions sans fin sur des sujets annexes et controversés. Comme Paul, il est souvent utile de soigner la manière d’annoncer le message en adaptant notre approche au public.
Nous devons cependant éviter que le témoignage soit trompeur. Si la prudence est nécessaire dans les pays qui interdisent le christianisme, il n’est pas légitime de cacher notre foi dans les autres pays. Organiser un faux sondage dans le but de tromper pour attirer des personnes ne reflète pas le caractère du Dieu de vérité. De même la mise en place d’un soutien scolaire dans le but de manifester l’amour de Christ autour de nous est excellent mais si ce n’est qu’un prétexte pour garnir les rangs de notre assemblée, nous nous écartons des justes motivations du témoin de l’Évangile.
Le témoin de l’Évangile soigne la présentation de son message. Mais il ne peut en aucun cas être un vendeur qui utilise des techniques trompeuses pour « placer son produit ». Paul encourage ainsi un témoignage intègre et invite les enfants de Dieu à examiner premièrement leurs motivations pour des pratiques honnêtes. De plus, il est probable que des personnes piégées une fois seront beaucoup moins réceptives à l’annonce de l’Évangile.
3. L’intégrité du message (4.2b-4)
Paul cherche à « manifester la vérité ». Il est le témoin de celui qui se présente comme « la vérité » (Jean 14.6). Il présente donc l’Évangile de la manière la plus exacte possible, sans ajouts ou omissions pour une meilleure acceptation du message.
L’Évangile est parfois refusé mais ce n’est pas à cause de sa complexité. Paul montre bien la responsabilité des auditeurs lorsqu’il les déclare incrédules, c’est-à-dire qu’ils refusent de faire confiance à Dieu.
Il rappelle aussi l’action du diable qui pousse à refuser la bonne nouvelle du salut. Comme dans la parabole du semeur (Marc 4.14-20), le diable et l’endurcissement des auditeurs sont responsables du refus de l’Évangile. Le message lui-même n’est pas en cause.
Paul manifeste ainsi toute confiance dans la clarté et la simplicité du message de l’Évangile. Il sait que la vérité n’est pas toujours bien accueillie mais il ne cherche pas à adapter le cœur de sa prédication pour éviter de heurter ses auditeurs. Il reste fidèle au sens des Écritures et ne change pas le contenu de l’Évangile. L’Évangile est glorieux, il n’est pas possible de l’améliorer !
Aujourd’hui encore, les questions de jugement, de péché, de justice de Dieu, d’enfer et même de bien et de mal peuvent heurter nos contemporains. Sans aller jusqu’aux excès de l’Évangile de la prospérité, il est possible, en Occident, de prêcher un Évangile du bien-être qui place l’être humain au centre. Paul met donc en garde contre la tentation d’adapter certains éléments de l’Évangile pour le rendre culturellement acceptable.
Jésus a appelé à prendre sa croix (Luc 9.23).
L’Évangile ne vient pas calmer la peur de la mort ou la peur de l’enfer. Il demande de renoncer à sa propre vie pour se laisser transformer par Dieu et renoncer aux désirs naturels contraires à sa volonté (Rom 8.12-14).
L’Évangile est aussi la proclamation de la grâce de Dieu qui commence par une mauvaise nouvelle, mais qui continue par l’amour et la grâce du Dieu qui s’est fait homme. Il annonce la gloire à venir, la victoire de Dieu et la défaite du mal. Ce message doit être fidèlement annoncé ; il est glorieux !
4. Christ au centre (4.5-6)
La fidélité dans la proclamation de l’Évangile revient à annoncer Christ mort et ressuscité. Dans sa première lettre aux Corinthiens, Paul avait déjà rappelé cette vérité fondamentale :
« Nous prêchons Christ crucifié, scandale pour les Juifs et folie pour les païens. » (1 Cor 1.23)« Car je n’ai pas eu la pensée de savoir parmi vous autre chose que Jésus-Christ, et Jésus-Christ crucifié. » (1 Cor 2.2)
Dans sa définition de l’Évangile, Paul rappelle aussi la place centrale de l’incarnation, de la mort et de la résurrection du Fils (1 Cor 15.1-4).
Paul ne cherche pas à se mettre lui-même en avant. Il ne promeut aucune philosophie particulière ni une éthique de vie déconnectée de Jésus. Il rappelle le cœur de l’Évangile, le cœur de la prédication chrétienne et celui qui est annoncé dans toutes les Écritures (Luc 24.27).
Il annonce Jésus comme Messie, oint de Dieu, spécialement choisi pour sa mission de salut. Il prêche Christ Seigneur, maître de la création et qui doit être reconnu comme tel. Christ est enfin celui qui révèle la gloire du Père. Le Dieu qui s’est incarné est la révélation particulière de Dieu donnée aux hommes (Jean 1.14,18).
L’exemple de Paul est précieux pour les témoins de tous les temps. Il rappelle l’essentiel de ce qui doit être transmis et montre que l’attitude du messager doit aussi refléter le message.
Il n’y a pas de témoignage chrétien sans Christ, sans sa mort sur la croix, sans résurrection et sans une juste compréhension du sens de ces éléments. La nécessité d’un sacrifice parfait pour le pardon des péchés et la résurrection qui montre que l’expiation a bien été réalisée et que Christ est vainqueur sont des éléments constitutifs de l’Évangile.
Paul ne décrit pas Jésus comme un simple sauveur : il est le Seigneur, celui qui doit être reconnu comme Maître par tous ceux qui veulent le suivre (Rom 10.9). Le salut est gratuit car Jésus a tout accompli, tout payé. La grâce est une réalité qui conduit à ce que des pécheurs soient déclarés justes. Le salut implique aussi un changement radical de vie : la confiance (foi) totale accordée à Jésus-Christ conduit à désirer lui obéir en tout point.
Paul est donc un modèle dans son enseignement en rappelant le contenu de l’Évangile. Il est également prêt à servir son Maître. Son attitude est donc au service du message puisqu’elle reflète la position de Jésus, seul Maître et Sauveur.
Il rappelle la nécessité d’un message centré sur la personne de Jésus-Christ et d’un comportement en adéquation avec l’enseignement. La vraie lumière, la véritable richesse et la joie authentique et profonde de l’enfant de Dieu proviennent de Jésus-Christ, le Seigneur.
5. Gloire de Christ et humilité du messager (4.6-7)
Alors que le dieu de ce siècle aveugle les pensées des incrédules (v. 4), Christ brille au sein même des ténèbres. La lumière a vaincu les ténèbres. Tout le mérite en revient donc à Dieu et non aux hommes.
Paul utilise ainsi l’image du vase de terre qui porte un trésor pour que l’attention se porte, non sur le messager, mais bien sur le contenu du message, le glorieux Évangile de Jésus-Christ.
Le vase de terre ne doit pas être interprété comme un rejet du corps considéré comme mauvais. Paul cite une image de l’Ancien Testament qui distingue le créateur de la créature [note] És 45.9 ; Jér 18.6. L’image est reprise en Rom 9.20-21[/note] .
Paul nous donne encore un enseignement essentiel concernant le témoignage de l’Évangile. Le témoin est appelé à s’effacer derrière le message. Il est parfois utile de raconter son propre témoignage de conversion, de donner les éléments qui nous ont conduits à reconnaître Jésus comme Sauveur et Seigneur. Il est alors nécessaire que Christ soit au centre, que son œuvre soit magnifiée et que nous ne cherchions pas à raconter une histoire dont nous serions le personnage principal.
Le vase de terre est façonné par le potier. Il n’est pas sans valeur, surtout si le potier est doué. Mais le mérite en revient entièrement au potier. Le vase qui transporte un trésor a une utilité réelle. Mais la vraie richesse réside dans le trésor transporté.
Paul ne nous invite pas à nous dévaloriser. Mais il rappelle la grandeur de Dieu, l’excellence du message de l’Évangile, la puissance du Saint-Esprit qui transforme des vies. Les messagers sont imparfaits, limités. Mais l’Évangile de grâce est glorieux ; c’est pourquoi il doit être mis en valeur.
Le témoin attire donc l’attention sur le véritable trésor. Les chrétiens de tous les temps ont montré des limites, des faiblesses, et ils ont commis des erreurs. Mais Dieu est venu chercher des pécheurs imparfaits et il leur accorde un plein pardon, les reconnaît justes, les appelle ses enfants et les destine à la gloire éternelle dans sa présence. Tout l’honneur revient donc au Dieu éternel et souverain.
Conclusion
Paul souligne donc à la fois la grandeur de l’Évangile et l’attitude humble du messager. Il appelle à rester fidèle à l’Évangile et à faire confiance à la puissance divine et à la beauté de l’Évangile.
Le témoin de l’Évangile est ainsi appelé à l’humilité et à la fidélité. Il est un serviteur qui désire communiquer le plus fidèlement possible le message, dans une attitude humble, droite et confiante.
Paul savait s’adapter à son public, citant les Écritures aux Juifs (Act 13.22) et un poète grec à Athènes (Act 17.28). Mais il insiste particulièrement sur l’attitude du messager et la fidélité à l’Évangile.
Il encourage ainsi à privilégier une attitude de service et un message fidèle en contraste avec des approches qui tiennent davantage du marketing que de l’Évangile. Certaines actions de témoignage ou d’évangélisation cherchent tellement à adapter le contenu de la proclamation que l’on peut se demander si nous considérons encore l’Évangile, tel qu’il a été transmis, comme un trésor… ou s’il ne doit pas être adapté aux attentes de la société pour plaire à l’auditoire.
Ce texte incite non seulement à prier pour que l’Évangile continue d’être reçu et que Christ continue d’être reconnu comme Seigneur dans toutes les nations, mais il conduit aussi le chrétien à demander à Dieu de le transformer afin qu’il devienne un témoin fidèle, dans ses paroles, son attitude, son amour et sa dépendance de Dieu.
- Edité par Charvin Olivier
Très tôt, l’église naissante a dû défendre la supériorité de l’Évangile face à la loi [note]Act 15.10 ; Gal 5.1[/note] . Ceux qui étaient les ministres de l’ancienne alliance (v. 6) s’opposaient violemment à l’apôtre Paul, messager de la nouvelle alliance, de l’Évangile. Les ministres de l’ancienne alliance enseignaient que certains rites, comme la circoncision, l’observance du sabbat, certaines fêtes ou règles alimentaires, etc., étaient nécessaires au salut. Vivant dans la crainte par rapport à ces judaïsants, l’apôtre Pierre a eu besoin d’une révélation spéciale de Dieu pour accepter que l’Évangile soit aussi pour les gens des nations [note]Act 10.9-28 ; 11.1-18[/note] .
Aujourd’hui, comme alors, l’Église doit être vigilante et très claire : les rituels et les cérémonies extérieures ne sont pas des moyens qui permettent d’obtenir le salut ou une meilleure grâce !
Dans cette portion de texte de la Deuxième épître aux Corinthiens (2 Cor 3.6-18), Paul va donner dix raisons pour lesquelles l’Évangile est supérieur à la loi.
1. L’Évangile est plus glorieux que la loi (v. 7-8)
Paul affirme que l’ancienne alliance est un ministère de la mort. La loi est incapable de donner la vie, elle ne sauve personne, elle permet simplement de faire prendre conscience à l’homme de son péché [note]Rom 3.20 ; 7.7 ; Gal 3.10[/note], de lui faire découvrir son besoin d’un Sauveur (Matt 1.21) et de le conduire à Christ (Gal 3.24). Mais en elle-même, elle n’a strictement aucun pouvoir. Si la loi a été glorieuse, l’Évangile est bien plus glorieux encore ! (v. 8-9)
2. L’Évangile vivifie (v. 6)
À l’inverse, l’Esprit donne la vie. À la conversion, le Saint-Esprit non seulement scelle le croyant, mais il lui communique la vie spirituelle de Dieu.
L’esprit mort de l’homme est alors vivifié pour être en communion avec Dieu. L’Évangile est ainsi une bonne nouvelle qui montre à l’homme comment recevoir le pardon de ses péchés et recevoir la vie de Dieu en lui.
Aussitôt la loi donnée par Dieu à Moïse, le peuple désobéit au premier commandement, ce qui a conduit à la mort de 3 000 Israélites (Ex 32.28) alors que, à la suite du don du Saint-Esprit et de la prédication de l’Évangile par Pierre, 3 000 personnes sont nées de nouveau et ont été baptisées (Act 2.41).
3. L’Évangile permet de voir la gloire de Dieu et la refléter (v. 7,12,18
Sous l’ancienne alliance, seul Moïse a pu s’approcher de Dieu [note]Mentionnons, entre autres, les passages suivants : Ex 3.4 ; 19.19 ; 33.21-23[/note] . Seul le grand sacrificateur pouvait entrer une fois l’an dans le lieu très saint [note]Lév 16.2,34 ; Héb 9.25[/note] , symbole de la présence de Dieu.
Sous la nouvelle alliance, nous pouvons désormais tous nous approcher de Dieu (Héb 10.19)et rechercher sa présence en tout temps et en tout lieu ! Et ainsi, nous pouvons, non seulement, voir la gloire de Dieu, mais également la refléter. La gloire de Dieu s’est reflétée sur le visage de Moïse, de manière passagère ; elle peut être reflétée désormais de manière permanente sur le visage du croyant né de nouveau (v. 18).
4. L’Évangile produit la justice (v. 9)
La loi ne pouvait rendre parfait celui qui s’approchait de Dieu (Héb 10.1). Seul Jésus-Christ peut nous rendre justes, car lui, l’homme juste par excellence, nous impute et nous donne sa justice.
Nous sommes ainsi revêtus de la justice de Dieu.
L’Évangile nous montre donc comment l’homme est déclaré juste devant Dieu.
Une fois déclarés justes, nous sommes appelés à démontrer cette justice dans la pratique (1 Jean 3.7).
5. L’Évangile est permanent (v. 11)
L’ancienne alliance était passagère ; lorsqu’elle a accompli son ministère de condamnation, elle ne pouvait rendre parfait celui qui l’observait.
La nouvelle alliance lui est grandement supérieure : elle est permanente, elle ne sera plus ni supplantée, ni dépassée. John MacArthur commente : « Le message de l’Évangile du salut par grâce, par le moyen de la foi, est le dernier mot de Dieu à l’homme. » [note]Les Épitres de Paul, Commentaires sur le Nouveau Testament , Éditions Impact, p. 823 [/note].
6. L’Évangile donne l’espérance (v. 12)
L’ancienne alliance ne procurait aucune espérance quant au pardon des péchés : « car il est impossible que le sang des taureaux et des boucs ôte les péchés. » (Héb 10.4)
En contraste, l’Évangile donne l’espérance : l’espérance d’un avenir glorieux dans la présence de Dieu, l’espérance d’être définitivement débarrassé de la présence du péché, de revêtir des corps glorieux et de vivre dans la sainte cité où il n’y a plus ni cris ni larmes. Notre Dieu est « le Dieu de l’espérance » (Rom 15.13) et « cette espérance, nous la possédons comme une ancre de l’âme, sûre et solide » (Héb 6.19).
7. L’Évangile donne la liberté (v. 12,17)
Fort de cette espérance, Paul use d’une grande liberté dans l’annonce de l’Évangile. Il proclame sans crainte et sans hésitation le message de l’Évangile, quoi qu’il lui en coûte [note]2 Cor 6.4-10 ; 11.23-28[/note].
L’Esprit de Dieu nous donne la liberté car il nous affranchit de l’esclavage de la loi (Rom 7.1-6), de Satan (Héb 2.14-15), de la crainte (Rom 8.15), du péché (Rom 6.2,7,14) et de la mort (Rom 8.2). Mis à part par le Saint-Esprit (1 Pi 1.2), nous avons été placés dans la liberté.
8. L’Évangile est centré sur Christ (v. 14-16,18)
L’Évangile révèle la personne qui peut tout changer, celui qui peut faire tomber le voile des Juifs aveuglés : Jésus-Christ ! Quoique les Écritures parlent de Christ (Luc 24.27), ce voile est maintenu lorsque les Juifs lisent l’Ancien Testament. Alors que les disciples d’Emmaüs cheminent avec Jésus, ils ne reconnaissent pas leur interlocuteur jusqu’à ce que leurs yeux soient ouverts [note]Luc 24.16,31[/note] ! Ce n’est qu’au moment où les Juifs se convertissent à Jésus-Christ que ce ²voile peut être ôté.
Lorsque le Saint-Esprit le convainc de péché, tout homme, qu’il soit juif ou non, peut se repentir et placer sa foi en Jésus-Christ. Par grâce, il reçoit ainsi le pardon de ses péchés et il est scellé du Saint-Esprit. Ce n’est que lorsqu’une telle rencontre avec Jésus-Christ a eu lieu, et grâce au ministère du Saint-Esprit, que nos yeux peuvent alors discerner l’excellence de Jésus-Christ.
9. L’Évangile est clair (v. 14,15)
L’incrédulité rend l’Évangile invisible. La dureté de cœur des Juifs les empêchent de voir en Jésus-Christ le Messie annoncé. « Car Dieu, qui a dit : La lumière brillera du sein des ténèbres ! a fait briller la lumière dans nos cœurs pour faire resplendir la connaissance de la gloire de Dieu sur la face de Christ. » (4.6)
L’Évangile fait tomber les voiles et même des forteresses. Tout s’éclaircit une fois confronté à Christ et à la Parole de Dieu.
10. L’Évangile transforme (v. 18)
Le croyant peut rechercher la présence de Dieu et vivre un face à face. Ce face à face est une nécessité pour tout véritable disciple de Jésus-Christ. L’action du Saint-Esprit dans nos vies, l’action de la Parole de Dieu sur nos cœurs et la contemplation de Dieu transforment ! Rendu possible grâce au sang de Jésus-Christ, qui nous a lavés de nos péchés qui faisaient séparation avec un Dieu saint, ce face à face nous transforme.
L’expression « de gloire en gloire » indique qu’il y a des étapes et que cette transformation est progressive. Le plus beau témoignage à la suite d’une conversion, ce sont des actes qui s’enracinent en Christ. Une vie transformée par la puissance de l’Évangile parle souvent bien plus qu’une bonne prédication.
- Edité par Bourgeois Nathanaël
2 Corinthiens est une Épître paradoxale, car c’est une lettre à la fois bien connue et peu connue. Bien connue, car nous y trouvons nombre de versets familiers à beaucoup de lecteurs. En voici quelques-uns :
• « Notre capacité vient de Dieu. » (3.5)
• « Nous portons ce trésor dans des vases de terre. » (4.7)
• « L’amour de Christ nous presse. » (5.14)
• « Grâces soient rendues à Dieu pour son don merveilleux ! » (9.15)
• « Ma grâce te suffit. » (12.9)
• « Quand je suis faible, c’est alors que je suis fort. » (12.10)
Et nous pourrions allonger la liste — jusqu’au dernier verset, bénédiction souvent prononcée ou chantée en fin de culte : « Que la grâce du Seigneur Jésus-Christ, l’amour de Dieu, et la communion du Saint-Esprit, soient avec vous tous ! » (13.13).
Toutefois, la trame générale de la lettre reste souvent méconnue : Paul y traite d’abord et avant tout le sujet de la contestation de son ministère par les Corinthiens. Tout en poursuivant ce thème principal plutôt sombre, l’apôtre s’interrompt pour faire un développement annexe, ouvre une parenthèse, fait une application.
Cette trame est discernable y compris dans les parties les plus souvent lues.
Voici un exemple :
« C’est pourquoi, ayant ce ministère selon la miséricorde qui nous a été faite, nous ne perdons pas courage. Nous rejetons les choses honteuses qui se font en secret, nous ne nous comportons pas avec ruse, et nous n’altérons point la parole de Dieu. Mais en publiant la vérité, nous nous recommandons à toute conscience d’homme devant Dieu. Si notre Évangile est encore voilé, il est voilé pour ceux qui périssent, pour les incrédules dont le dieu de ce siècle a aveuglé l’intelligence, afin qu’ils ne voient pas briller la splendeur de l’Évangile de la gloire de Christ, qui est l’image de Dieu. Nous ne nous prêchons pas nous-mêmes ; c’est Jésus-Christ le Seigneur que nous prêchons, et nous nous disons vos serviteurs à cause de Jésus. Car Dieu, qui a dit : La lumière brillera du sein des ténèbres ! a fait briller la lumière dans nos cœurs pour faire resplendir la connaissance de la gloire de Dieu sur la face de Christ. » (4.1-6)
Les portions mises en rouge paraissent a priori incongrues et difficiles à interpréter si elles ne sont pas rattachées au thème général de la lettre. En la lisant, il nous faut donc changer de perspective et la voir avant tout comme un plaidoyer de Paul pour son ministère face à ses accusateurs. C’est le seul moyen d’en percevoir la cohérence et de correctement interpréter dans leur contexte nos versets préférés.
La situation de l’église de Corinthe
Les échanges entre Paul et les Corinthiens furent nombreux et complexes, donnant lieu à au moins 5 lettres et 5 visites[note]L’hypothèse d’une première lettre (« 0 » Corinthiens) et d’une troisième (« 1,5 » Corinthiens) est soutenue par de nombreux commentateurs. Cf. Craig Blomberg, 1 Corinthians, NIVAC, p. 22 ; Thomas Schreiner, 1 Corinthiens, MB, p. 38 ; David Garland, 2 Corinthians, NAC, p. 25-27. »[/note]. Le tableau page suivante tente de les résumer.
Les suites de la visite rapide de Paul
Lorsque Paul, depuis la Macédoine, rédige 2 Corinthiens, la situation de l’église s’est éclaircie.
Après lui avoir envoyé sa première lettre, Paul avait dû faire une visite rapide à Corinthe à partir d’Éphèse au cours de laquelle il avait fait face à une forte contestation. Qui s’était opposé à lui ? L’incestueux de 1 Corinthiens 5 ? Un des leaders de l’église ? En tout cas, Paul y fait allusion en affirmant qu’il lui a pardonné (2.5,10).
Après la réception d’une lettre sévère de Paul (7.8) et grâce au ministère de Tite, l’envoyé de l’apôtre, la réaction de l’église a été saine : elle a pris les mesures disciplinaires qui s’imposaient envers l’opposant de Paul : « Cette même tristesse selon Dieu, quel empressement n’a-t-elle pas produit en vous ! Quelle justification, quelle indignation, quelle crainte, quel désir ardent, quel zèle, quelle punition ! Vous avez montré à tous égards que vous étiez purs dans cette affaire. » (7.11)
Les super-apôtres[note]C’est ainsi que les versions NBS, S21, BFC, Semeur, etc., traduisent l’expression « les apôtres par excellence » de la NEG (11.5). [/note]
Malheureusement, un grave problème subsistait : l’église de Corinthe accueillait des enseignants qui contestaient le ministère de Paul. Il n’est pas facile de cerner avec précision qui ils étaient ni ce qu’ils enseignaient. Dans un sens, ce flou nous profite car il donne à la lettre un caractère général et la rend applicable dans une grande variété de situations, ce qui serait sans doute moins le cas si Paul avait été plus spécifique. Quoi qu’il en soit, l’objectif majeur de l’apôtre est de contrer leur influence toxique et d’avertir l’église.
Notons que Paul ne s’adresse jamais à eux, mais à l’église qui les a accueillis. Chaque église est responsable du leadership qu’elle suit et c’est à elle de prendre les mesures nécessaires.
D’où venaient les super-apôtres ?
• Ils étaient, semble-t-il, originaires de Palestine et non de Corinthe. Ils revendiquaient avec fierté leur judaïté : « Sont-ils Hébreux ? Moi aussi. Sont-ils Israélites ? Moi aussi. Sont-ils de la postérité d’Abraham ? Moi aussi. » (11.22)
• Sans doute plusieurs avaient-ils vu le Christ ressuscité et s’en glorifiaient-ils (cf. 5.16).
• Ils disposaient de lettres de recommandation plus ou moins authentiques (cf. 3.1 ; 10.12).
• Leur ministère n’était cependant pas validé par les vrais apôtres : la lettre circulaire rédigée en conclusion du concile de Jérusalem environ 7 ans auparavant précisait : « Ayant appris que quelques hommes partis de chez nous, et auxquels nous n’avions donné aucun ordre, vous ont troublés par leurs discours et ont ébranlé vos âmes… » (Act 15.24). Cette remise en cause ne les avait pas empêchés de sévir à Corinthe.
• Ils prétendaient être à Christ de manière spéciale (cf. 10.7). Peut-être étaient-ils les leaders du « parti de Christ » auquel Paul avait fait allusion en 1 Corinthiens 1.12.
Sous quelles influences étaient les super-apôtres ?
• Des influences juives : ils prônaient un retour vers la loi, méconnaissant le changement introduit par la nouvelle alliance (cf. 3.7-18).
• Des influences grecques : ils accordaient une grande importance à la forme et à la puissance rhétorique et ils méprisaient Paul dont ils jugeaient la présence faible et la parole méprisable (10.10).
• Des influences mystiques : ils se glorifiaient de révélations directes du Seigneur qu’ils auraient reçues (cf. 12.1).
Quelle était la conduite des super-apôtres ?
• Elle était intrusive : ils avaient subrepticement pénétré dans la sphère d’activité de Paul pour la récupérer à leur profit (cf. 10.15).
• Elle était dominatrice : Paul constate : « Si quelqu’un vous asservit, si quelqu’un vous dévore, si quelqu’un s’empare de vous, si quelqu’un est arrogant, si quelqu’un vous frappe au visage, vous le supportez. » (11.20)
• Elle était cupide : dans l’Antiquité, plus un maître faisait payer ses élèves, plus son enseignement était jugé de qualité. Les exigences financières des super-apôtres étaient élevées, face à Paul qui avait annoncé gratuitement l’Évangile (11.7).
Quelle est l’opinion de Paul sur les super-apôtres ?
Le jugement de l’apôtre est très sévère : pour lui, ils sont de faux docteurs qui enseignent un évangile frelaté (cf. 2.17 ; 11.4). Il va même jusqu’à dire que de tels hommes sont « de faux apôtres, des ouvriers trompeurs, déguisés en apôtres de Christ », des ministres de Satan déguisés en ministres de la justice dont la « fin sera selon leurs œuvres » (11.13-15). À la lumière de ce texte, on peut se demander si, pour Paul, ces hommes ont vraiment la vie de Dieu…
La triple occasion de la lettre
En écrivant à l’église de Corinthe, Paul visait un triple but :
• Tout d’abord, il devait régler le problème lié à sa visite rapide et à sa lettre sévère : il devait affirmer qu’il n’avait pas de ressentiment, faire part de sa joie à l’écoute du témoignage de Tite lui rapportant que la situation avait été réglée et défendre son ministère face aux attaques.
• Ensuite, dans le cadre de la préparation de la collecte que Paul voulait ramener à Jérusalem, il devait stimuler les Corinthiens à être généreux, en instaurant une saine émulation entre les églises de Grèce, d’Achaïe et de Macédoine. Il devait également les rassurer sur la bonne gestion de la collecte.
• Enfin, il devait avertir fermement les Corinthiens par rapport aux super-apôtres. Il va ainsi se trouver dans la situation paradoxale d’être obligé de se défendre, sinon il sera accusé de faiblesse. Mais Paul est peu désireux de se mettre en avant, sinon il sera accusé de se vanter. Il est donc sur une crête très étroite et il s’en sort en disant en substance : « Vous voyez, je suis obligé de parler comme un insensé ; vous m’y contraignez parce que je suis obligé de me défendre mais je n’ai pas envie de me mettre en avant. » Grâce à cette astuce rhétorique, Paul met au jour le danger que représentent ces super-apôtres tout en préparant sa venue future, en demandant aux Corinthiens de prendre les mesures nécessaires contre eux.
Cette triple occasion de la lettre permet d’y distinguer trois grandes parties : ch. 1 à 7, 8 et 9 puis 10 à 13 (cf. plan en annexe).
Deux thèmes majeurs de la lettre
La Seconde Épître aux Corinthiens couvre moins de thèmes que la Première. Deux thèmes se détachent néanmoins particulièrement.
Des aspects uniques de Christ
2 Corinthiens présente de façon touchante et parfois unique des aspects de la personne et de l’œuvre de Jésus-Christ :
1. Christ est unique dans son sacrifice :
• Il est la substitution pour nos péchés, comme l’affirme un des textes les plus profonds de toute la Bible : « Celui qui n’a point connu le péché, il l’a fait devenir péché pour nous, afin que nous devenions en lui justice de Dieu. » (5.21)
• En lui, nous trouvons ce que John Stott appelle à juste titre « l’auto-substitution de Dieu [note]John Stott, La croix de Jésus-Christ , EBV, 1988, p. 127-155.[/note] » : « Dieu était en Christ, réconciliant le monde avec lui-même, en n’imputant point aux hommes leurs offenses. » (5.19)
2. Christ est unique dans son abaissement volontaire pour nous :
• Il s’est fait volontairement pauvre : « Vous connaissez la grâce de notre Seigneur Jésus-Christ, qui pour vous s’est fait pauvre, de riche qu’il était, afin que par sa pauvreté vous soyez enrichis. » (8.9)
• Il s’est fait volontairement faible : « Il a été crucifié dans la faiblesse. » (13.4, NBS)
3. Christ est unique, mais il peut être vu dans les siens :
• Les chrétiens sont transformés par la contemplation de sa personne : « Nous tous dont le visage découvert reflète la gloire du Seigneur, nous sommes transformés en la même image, de gloire en gloire, par l’Esprit du Seigneur. » (3.18)
• Les chrétiens, à la suite de Paul, peuvent suivre son exemple : « Moi Paul, je vous prie, par la douceur et la bonté de Christ » … (10.1).
Le ministère chrétien
Le second thème, trame principale de la lettre, est l’apologie du vrai ministère chrétien. Le vrai serviteur de Christ :
• Imite Jésus Christ en acceptant paradoxes et souffrances sans chercher son intérêt personnel : « Moi, très-volontiers je dépenserai et je serai entièrement dépensé pour vos âmes, si même, vous aimant beaucoup plus, je devais être moins aimé. » (12.15, Darby) ;
• Prêche la pure Parole de Dieu — ce qui, aujourd’hui, signifie rester fidèle à la Parole apostolique (cf. 2.17) ;
• Accepte les responsabilités pour combattre quand cela est nécessaire (10.4-6) ;
• Développe un cœur de berger en s’intéressant au collectif comme à l’individuel : « Je suis assiégé chaque jour par les soucis que me donnent toutes les Églises. Qui est faible, que je ne sois faible ? Qui vient à tomber, que je ne brûle ? » (11.28-29) ;
• Est équilibré en tout : humble sans être servile, doux sans être faible, flexible sans être influençable (cf. 4.8-10 ; 6.3-10 ; 10.17).
L’impact de la lettre
Quels furent les effets de la lettre ? Ils sont peu explicites à la lecture du livre des Actes. À tout le moins, la collecte a dû être suffisante pour que Paul la porte à Jérusalem et le climat a dû être suffisamment paisible pour que Paul puisse rédiger l’Épître aux Romains pendant son séjour. Et puis Paul n’a pas jugé nécessaire, semble-t-il, de rédiger un « 3 Corinthiens » !
Au-delà de cet impact historique, 2 Corinthiens aura un impact aujourd’hui si la lecture de cette lettre nous conduit à nous engager hardiment dans le service du Seigneur, en imitant Paul qui lui-même imitait si bien son Maître.
Annexe : un plan pour 2 Corinthiens
Sans rentrer dans tous les détails du plan, il est nécessaire d’indiquer que la première partie des ch. 1 à 7 comporte une grande parenthèse courant de 2.14 à 7.4. En effet, 7.5 semble continuer directement le thème couvert jusqu’en 2.13 :
La défense de la conduite de Paul (1. 11 – 2. 13)
Paul ne trouve pas Tite à Troas et part en Macédoine
2. 12-13 : Or , étant arrivé dans la Troade pour l’Evangile de Christ, et une porte m’y étant ouverte dans le Seigneur, je n’ai point eu de repos dans mon esprit, parce que je n’ai pas trouvé Tite, mon frère ; mais, ayant pris congé d’eux, je suis parti pour la Macédoine.
Parenthèse : La nature du ministère (2. 14 – 7. 4)
La défense de la lettre écrite par Paul (7.5-16)
Paul lutte en Macédoine en attendant Tite qui arrive finalement 7. 5-6 : Car aussi, lorsque nous arrivâmes en Macédoine, notre chair n’eut aucun repos, mais nous fûmes affligés en toute manière : au dehors, des combats ; au-dedans, des craintes.
Mais celui qui console ceux qui sont abaissés, Dieu, nous a consolés par la venue de Tite.
Salutation et bénédiction 1.1-11
Adresse 1.1-2
Bénédiction 1.3-11
A. La défense du ministère 1.11-7.16
1. La défense de la conduite de Paul 1.12-2.13
L’explication du changement des plans de Paul 1.12-2.4
Le pardon du frère offenseur 2.5-11
L’absence de Tite à Troas 2.12-13
2. La nature du ministère 2.14-7.4
La gloire du ministère 2.14-4.6
La fragilité du ministre 4.7-5.10
Le message du ministre 5.11-6.10
L’appel du ministre à l’amour et à la sainteté 6.11-7.4
3. La défense de la lettre écrite par Paul 7.5-16
La rencontre avec Tite en Macédoine 7.5-7
La lettre sévère et la tristesse positive produite 7.8-16
B. La collecte pour les chrétiens de Jérusalem 8.1-9.15
1. La nécessité de la collecte 8.1-15
L’exemple stimulant des Macédoniens 8.1-5
L’exhortation motivée aux Corinthiens 8.6-15
2. La mission de Tite et des deux frères à Corinthe 8.16-9.5
La recommandation de Tite et des deux frères par Paul 8.16-24
L’attente de Paul 9.1-5
3. Les principes de la générosité chrétienne 9.6-15
Le bénéfice pour le donateur 9.6-11
La louange à Dieu par les bénéficiaires 9.12-15
C. L’autorité de Paul face à ses adversaires 10.1-13.10
1. L’autorité de Paul face à ses adversaires .. 10.1-18
Les armes utilisées par Paul 10.1-6
L’attitude cohérente de Paul 10.7-11
L’ampleur du champ d’activité de Paul 10.12-18
2. La supériorité de Paul face à ses adversaires 11.1-12.13
La supériorité de Paul dans sa prédication et sa conduite 11.1-15
La glorification forcée de Paul 11.16-12.13
3. La prochaine visite de Paul 12.14-13.10
Le désintéressement de Paul 12.14-18
Les craintes de Paul sur la situation des Corinthiens lors de sa visite 12.19-21
Les avertissements de Paul sur l’exercice possible de sa discipline apostolique 13.1-10
Exhortations finales, salutations et vœux .. 13.11-13
- Edité par Prohin Joël
En lisant d’une seule traite la deuxième Épître de Paul aux Corinthiens, on a l’impression de lire une lettre d’amour (faites le test !). L’apôtre réaffirme plusieurs fois et avec éloquence sa grande affection pour les Corinthiens, ainsi que ses déceptions : ses émotions fluctuent comme sur des montagnes russes ! Le flot rapide et les propos de la lettre lèvent le voile sur ses sentiments profonds.
L’apôtre s’est mis au diapason du cœur de Dieu, en serviteur exemplaire de son Seigneur. Dans l’Ancien Testament, on trouve souvent le thème de la désobéissance d’Israël, comparé à une prostituée lorsqu’il abandonne Dieu, son premier amour, pour se tourner vers les idoles. C’est un peu le même schéma qui se reproduit ici. L’apôtre Paul rappelle son travail inlassable pour édifier l’église de Corinthe et donne des preuves de son amour envers elle. Il montre aussi la peine qu’il a de les voir se détourner vers de faux apôtres aux doctrines alternatives. Se considérant comme un instrument dans la main de Dieu, il n’hésite pas à hausser le ton pour les ramener à l’unique Évangile.
Qu’à l’occasion de ce numéro sur 2 Corinthiens, nous réalisions de manière concrète, comme Paul, que « l’amour de Christ nous étreint » (5.14, Darby) ! C’est dans ses faiblesses et ses épreuves extrêmes que l’apôtre reflétait le mieux la gloire divine. Que cela nous encourage ! Pleinement conscients de notre nouvelle identité, nous vivrons alors comme des « ambassadeurs pour Christ » (5.15-20).
- Edité par Combe Silvain
En sortant quelques versets de leur contexte, certains font passer Jésus pour un homme violent.
• La preuve, il a utilisé un fouet pour chasser les marchands du temple, diront-ils (Jean 2.15). Pourtant, c’est bien le dos de Jésus qui a reçu de violents coups de fouet et non celui des marchands.
• Et n’a-t-il pas demandé d’acheter deux épées à ses disciples (Luc 22.36) ? C’est vrai, mais ils n’ont pas compris qu’il s’agissait d’une préparation à un combat spirituel. C’est pourquoi il a dû leur donner cette leçon claire : « Alors Jésus lui dit : Remets ton épée à sa place ; car tous ceux qui prendront l’épée périront par l’épée. Penses-tu que je ne puisse pas invoquer mon Père, qui me donnerait à l’instant plus de douze légions d’anges ? » (Mat 26.53).
• Jésus a dit lui-même qu’il n’était pas venu amener la paix mais l’épée (Mat 10.34) ! Certes, mais le contexte immédiat montre que l’épée symbolise ici les divisions au sein des familles, engendrées par la conversion de certains membres et le rejet des autres.
En fait, Jésus est bien le Prince de paix (És 9.5), le seul maître qui puisse faire cette promesse : « Je vous laisse la paix, je vous donne ma paix. » (Jean 14.27)
Un jour cependant, quand la patience de Dieu aura pris fin, Jésus jugera les nations avec « l’épée aiguë » qui sortira de sa bouche (Apoc 19.15).
Mais cela sera « son œuvre étrange, son travail inhabituel. » (És 28.21, S21)
Et enfin, « sous son règne, le juste fleurira, et la paix sera grande tant que la lune éclairera » (Ps 72.7, S21).
- Edité par Combe Silvain
Introduction de Silvain Combe
Les chrétiens peuvent se sentir impuissants face aux épreuves de la vie, parfois extrêmes (guerre, famine…).
Même si l’on croit que Dieu peut faire des miracles, on craint parfois de les lui demander et l’on se laisse facilement aller à baisser les bras. Pourtant, Dieu semble parfois « attendre » nos prières pour changer le cours des choses : « L’Éternel voit avec indignation qu’il n’y a plus de droiture. Il constate qu’il n’y a personne, il est consterné en voyant qu’il n’y a personne pour intercéder » (És 59.15-16 ; S21).
Avec une foi vivante et un enthousiasme rafraîchissant, Frère André nous rappelle dans ce livre que nos prières peuvent « déplacer des montagnes ». Elles peuvent « amener Dieu à changer d’avis sur ce qu’il permet à Satan de faire » (p. 150). Ce « changement de plan » n’est donc pas une véritable atteinte ou un défi à la volonté de Dieu. Si certaines expressions de cet homme de foi nous semblent aller un peu loin dans ce livre, sa fraîcheur et ses rappels concrets sont néanmoins inspirants.
Il encourage les chrétiens à faire confiance à Dieu, et pas seulement en théorie !
Extraits choisis
Le danger du fatalisme (p. 1-13)
L’attitude du fataliste semble refléter une foi en apparence remarquable : « je refuse de remettre en question la volonté de Dieu », dira-t-il avec une pieuse humilité. Mais cela suppose-t-il que pour lui tout ce qui se passe dans le monde, la guerre, la famine, l’oppression, l’effondrement de la famille et de la société, l’exploitation des faibles et des innocents, la dégradation de ce qui est pur, est bien ? « Si Dieu le permet c’est qu’il doit avoir une bonne raison », avancera-t-il, « et je ne puis espérer comprendre les raisons de Dieu avec ma petite cervelle, alors j’accepte par la foi ce qu’il fait et je loue le Seigneur en tout temps ». Et l’on répondra, admiratif : « Quelle foi ! »
Ce genre de foi n’a toutefois aucune puissance, car elle ne repose pas sur de bonnes bases. Appelez-la comme vous le voulez — karma, destin, sort, kismet — c’est toujours la même réalité plus ou moins déguisée : nous ne pouvons modifier ce que Dieu a écrit, et notre devoir consiste simplement à nous laisser porter par le mouvement du programme défini par Dieu. Cela semble rendre la vie simple, n’est-ce pas ? Oui, et c’est précisément là que réside une partie de son attrait. Les fatalistes peuvent être détendus puisqu’ils ne sont plus responsables. Ils n’ont plus besoin d’obéir à Dieu ni de résister au mal.
La puissance de la prière (p. 16-17)
Malheureusement, ils ne comprennent pas que, avant que ce soit trop tard, le courant qui semble leur procurer un parcours agréable et sûr est en réalité en train de les aspirer toujours plus rapidement vers un tourbillon mortel – et l’anéantissement. C’est une des stratégies les plus fondamentales de Satan tout au long de l’histoire. Il continue de l’employer parce qu’elle a bien réussi, depuis longtemps. Mais nous ne devons pas lui permettre de réussir ! Nous avons le pouvoir de lui résister et de le vaincre, et Dieu a placé entre nos mains l’arme qui peut nous le permettre. Cette arme, c’est la prière.
Rien ne rend Satan plus craintif qu’un chrétien qui comprend la puissance de la prière : parce qu’il sait que Dieu ne refuse rien à ses amis. À mesure que nous connaissons mieux le Seigneur, que nous commençons à comprendre tout ce qu’il est, et réaliser tout ce qu’il a, nous ne sommes plus des victimes sans recours, ballotées par les tempêtes et les vagues que Satan suscite. Nous sommes, au contraire, capables de faire ce qui est impossible à Satan et à ses démons. Jésus nous dit :« Si vous avez la foi, si vous ne doutez pas… si vous dites à cette colline : “Soulève-toi de là et jette-toi dans la mer”, cela se fera. Si vous priez avec foi, tout ce que vous demanderez, vous l’obtiendrez » (Mat 21.21,22).
Il n’est donc pas étonnant que Satan cherche si ardemment à empêcher les chrétiens de s’engager dans une prière sérieuse ! Il n’a aucun pouvoir, aucune puissance qui puisse se comparer à celle-là. Voilà pourquoi je suis si préoccupé par le fatalisme chrétien. Il ne s’agit pas d’une simple interprétation doctrinale inoffensive, une variante mineure de la théologie chrétienne que nous pourrions tolérer.
Le fatalisme est une maladie paralysante qui a envahi le Corps de Christ ; les conséquences sont désastreuses : il infecte ses victimes avec une sorte d’apathie qui annihile leur volonté de résister au mal, tout en sapant leur détermination d’accomplir la tâche que Christ leur a confiée.
Ne pas craindre de faire des erreurs en priant (p. 77)
Abraham a trébuché, menti, trompé – mais quand Dieu écrivit sa biographie dans la lettre aux Romains, il déclara : « Abraham eut confiance en Dieu » (Romains 4.3). Nous pourrions dire : « Mais il a menti, il a trompé les autres ! » Ce n’est pas ainsi que Dieu le voyait. Il dit : « Abraham eut confiance en Dieu », un point c’est tout. Tout le reste n’était qu’accessoire. Abraham était innocenté, et non parfait. Il y a une grande différence entre les deux.
Nous sommes ainsi quand nous nous tenons devant Dieu en prière, justifiés mais non parfaits.
C’est une merveilleuse position.
Nous n’avons pas besoin d’avoir peur d’aller trop loin avec Dieu. Même si nous le faisons, il ne nous en tiendra pas rigueur.
Sa grâce est plus grande que nos erreurs.
Dieu sait que nous n’attendrons pas d’avoir toutes les données avant de prier, parce que nous ne pourrons jamais savoir tout ce qui concerne ses plans. Ce qui est de notre ressort, c’est de chercher avec ferveur à le connaître, d’étudier les indices circonstanciels, d’écouter les directives du Saint Esprit, de tenir compte de ce que nous connaissons de son caractère, de tirer de tout cela des conclusions raisonnables et de prier en conséquence. Dans la mesure où nous le faisons, Dieu nous apprendra à commettre toujours moins d’erreurs, et nos prières deviendront de plus en plus efficaces. Il se peut que nous l’entendions et le comprenions souvent imparfaitement, mais il continue à faire en nous l’œuvre qu’il a promise : nous perfectionner à mesure que nous nous rapprochons de lui.
Tout cela peut nous paraître plus complexe que les révélations miraculeuses de l’époque de l’Ancien Testament, mais c’est aussi beaucoup plus instructif.
Dieu nous apprend, de manière pratique, souvent par nos tâtonnements, comment mettre en œuvre la connaissance qu’il nous a accordée.
Il ne peut donc y avoir de péché dans le fait de demander à Dieu tout ce que nous croyons susceptible d’accomplir sa volonté et ses desseins.
Peu importe si notre insécurité est causée par la conscience de nos limites. Nous n’avons nul besoin de connaître toute l’étendue de ses plans pour en conclure qu’ils peuvent changer. Dieu est toujours heureux d’entendre notre prière, même quand notre compréhension est des plus limitées, comme ce fut le cas quand Abraham intercéda pour Sodome et Gomorrhe.
« Si vous demandez quelque chose en mon nom, je le ferai », dit Jésus (Jean 14.14). Je crois que ces Paroles constituent la réponse ultime à toutes nos interrogations sur le moment et la manière dont nous pouvons demander à Dieu de changer ses plans. Il ne s’agit pas d’agir inconsidérément, comme des ignorants. Mais s’il nous arrive de le faire, Dieu nous pardonnera et utilisera nos erreurs pour nous rendre plus sages la prochaine fois.
Les seules personnes qui ne commettent jamais d’erreurs sont celles qui ne demandent et ne font jamais rien pour Dieu. S’il est une chose dont il faut s’inquiéter, en voilà une ! [note]Plus loin dans le livre, Frère André encourage à la prière ciblée (pas vague et générale). Il invite également à ne pas se satisfaire stoïquement du silence de Dieu à la suite de certaines prières. Il faut se sentir libre de demander « Pourquoi ? » à Dieu, comme David le fait dans le Psaume 22.2. (NDLR)[/note]
La prière nous rapproche de Dieu (p. 83)
Certains de mes souvenirs les plus chers de Corrie ten Boom sont les nombreux moments que nous avons passés ensemble en prière. Corrie était un intercesseur passionné ; l’urgence et l’enthousiasme qui se dégageaient d’elle étaient très communicatifs.
Il était impossible de prier avec elle sans être comme transformé par cette expérience.
« Seigneur, disait-elle, Seigneur, il faut que tu fasses quelque chose ! Il n’y a pas de temps à perdre ! »
Puis elle continuait en précisant au Seigneur sans détour ce qu’elle voulait qu’il fasse. Elle s’adressait à lui comme à moi, son ami de longue date. Elle pleurait, elle riait, elle argumentait avec force, mais elle restait toujours elle-même, totalement honnête.
Elle ne cachait rien à Dieu, et il semblait ne rien lui cacher.
Bien des fois, dans ces temps de prière intenses, elle citait à Dieu sa propre Parole pour lui rappeler ses promesses. Elle aurait pu faire un redoutable avocat au barreau ! Dans les moments où elle s’enflammait plus particulièrement, elle s’emparait de sa Bible, la feuilletait rapidement pour trouver le texte exact pour appuyer sa plaidoirie. Alors elle levait sa Bible en l’air, pointait sur le verset et proclamait, triomphante : « Voilà, Seigneur ! Tu peux le lire toi-même ! » Combien j’aimais cela. Et, j’en suis certain, Dieu aussi. Il est heureux quand nous le connaissons assez bien pour lui parler de cette façon. Je ne connais personne dont les prières aient eu plus d’effet sur Dieu que celles de Corrie. Elle ne se laissait pas détourner par une fausse piété, par légalisme ou par le besoin d’être quelqu’un d’autre qu’elle-même. Et après tout, comme elle se plaisait bien souvent à le rappeler à Dieu, elle ne lui demandait rien qu’il n’ait déjà promis. Elle n’hésitait donc jamais à lui dire ce qu’il devait faire et à le remercier quand il exauçait sa prière. « Je savais bien que tu le ferais ! » s’exclamait-elle avec le sourire. « Je le savais ! »
Et c’est vrai, elle savait ce que Dieu accomplirait pour elle car elle connaissait Dieu. Elle comprenait sa volonté et s’attendait à ce qu’il respectât sa Parole. Elle n’aurait pas une seule fois imaginé le contraire. Quelle foi ! Si seulement le Seigneur avait d’autres amis comme Corrie, notre pauvre monde ne serait pas dans l’état où il est aujourd’hui.
D’après vous, les prières de Corrie étaient-elles blasphématoires ? Présomptueuses ? Certains oseraient l’affirmer, sans doute, mais pas moi, car son approche était fidèle aux Écritures. Jésus a dit : « Demandez-moi quoi que ce soit… » et Corrie le crut sur parole. Ses prières étaient toujours fondées sur sa profonde compréhension de la volonté de Dieu. Et Dieu l’exauçait. Comment aurait-il pu faire autrement ?
Pour répondre à la question « Comment pouvons-nous prier pour amener Dieu à « changer d’avis » ? » je commencerais par rappeler que nous ne prions pas avec le désir de le faire « changer d’avis », ou de lui dire ce qu’il doit faire ; notre désir est de mieux le connaître comme Ami et Père. Les occasions pour l’amener à modifier ses plans ne sont qu’une des conséquences de cette relation.
- Edité par André Frère
Comme le fait Christopher Hitchens dans son livre Dieu n’est pas grand, les Croisades sont souvent utilisées comme argument par les détracteurs du christianisme pour contredire le message d’amour et de paix de l’Évangile. Quelle attitude les chrétiens du XXI e siècle devraient-ils adopter par rapport aux Croisades ?
Revenir sur des événements vieux de près d’un millénaire nécessite un certain nombre de précautions pour éviter trop de raccourcis et d’anachronismes. Il faut bien avouer que malgré la quantité importante de livres écrits ces dernières années sur les Croisades, nous ne sommes généralement pas en mesure d’aligner plus de quelques phrases sur le sujet en dehors de l’évocation de quelques noms comme Godefroy de Bouillon ou Richard Cœur de Lion ou encore l’image de chevaliers à croix rouge sur fond blanc chargeant sur leur destrier. Quelques éléments de contexte sont donc nécessaires avant de revenir à notre époque.
Les Croisades dans leur contexte
Les Croisades sont une série d’expéditions militaires au Moyen-Orient principalement dirigées vers la Palestine appelée « Terre sainte » qui ont eu lieu entre 1096 et 1291 dans le but de reconquérir la ville de Jérusalem alors aux mains des musulmans. Le terme « croisade », qui est postérieur à l’époque médiévale, vient de l’habitude qu’avaient ceux qui partirent de se faire coudre une croix sur leurs vêtements — d’où le nom de croisés qui leur fut donné. Le terme de croisades au sens large désigne également des expéditions de même type menée au nom de l’Église contre des personnes considérées comme hérétiques autres que les musulmans, par exemple, les Cathares, les Vaudois ou les Hussites.
Les Croisades ont commencé à la suite d’un appel prononcé par le Pape Urbain II au concile de Clermont en novembre 1095 relayé un peu partout dans tout l’Occident chrétien. Celui-ci fut suivi par une onde d’adhésion impressionnante mobilisant des dizaines de milliers d’hommes, femmes et enfants (voire centaines de milliers sur l’ensemble des Croisades) autant dans les milieux nobles (chevaliers, mais aussi des rois et des empereurs) que populaires. Les grands intellectuels chrétiens comme Bernard de Clairvaux (1090-1153) adhèrent et supportent les Croisades.
Comment comprendre un tel enthousiasme ?
La diversité des profils engagés et l’ampleur du phénomène excluent des réponses trop caricaturales qui souligneraient uniquement l’appât du gain, la recherche de gloire ou un fanatisme guerrier et religieux. Il faut sans doute rechercher des éléments de réponse dans le contexte d’une époque pleine de changements dans le cœur de l’Europe médiévale. Voici six éléments à considérer :
1. L’Islam apparu au VII e siècle avait conquis comme un éclair plus de la moitié du monde chrétien, dont Jérusalem en 636. Les musulmans avaient respecté la ville qui était pour eux également une ville sainte et avaient laissé se poursuivre les pèlerinages chrétiens dont l’origine remontait à l’époque de Constantin le Grand. Cependant au XI e siècle font leur apparition les Turcs Seldjoukides nouvellement convertis à l’Islam. Ceux-ci battent les Byzantins à Manzikert en 1071 ouvrant la voie à la conquête de toute l’Asie mineure jusqu’alors chrétienne et enlèvent Jérusalem et la Palestine aux musulmans fatimides en 1078 avec un impact important sur les pèlerinages chrétiens. Alexis I er Comnène, empereur byzantin, lance un appel à Urbain II pour venir en aide aux chrétiens d’Orient. Dans ce contexte, la première croisade peut être comprise comme une réponse défensive à l’expansion de l’Islam et à la protection des chrétiens d’Orient. Les souffrances endurées par les pèlerins chrétiens ont d’ailleurs été longuement évoquées par le pape pour justifier son appel dans les différents témoignages de son discours qui nous sont parvenus.
2. Après des siècles de désintégration politique et économique qui avaient vu s’effondrer l’empire carolingien, l’Occident rentre dans une nouvelle ère de prospérité et d’unité. Les terribles Normands et les Hongrois se sont convertis au christianisme. Les bateaux vénitiens et génois dominent progressivement la mer Méditerranée. L’Occident se sent désormais assez fort pour passer à l’offensive. En Espagne et dans les îles méditerranéennes, la reconquête sur l’Islam a déjà commencé dès le début du XI e siècle. Ce n’est d’ailleurs pas un hasard si le pape souhaite confier le leadership de la Croisade aux barons expérimentés d’Occitanie comme Raymond de Saint-Gilles. Ainsi les Croisades peuvent être perçues comme des guerres de reconquête.
3. Le XI e siècle est par ailleurs celui de la réforme grégorienne de l’Église qui voit s’agrandir considérablement la puissance des papes. Les papes vont prétendre non seulement à un pouvoir spirituel sur toute l’Église, ce qui précipitera la séparation avec l’Église orthodoxe d’Orient en 1054, mais également à un pouvoir politique. On aurait dû s’attendre à ce que les Croisades soient lancées par des chefs politiques et non par le pape. Or, au moment de la première croisade, le roi de France et l’empereur du Saint Empire romain germanique sont excommuniés. Les Croisades peuvent être ainsi vues comme un programme ambitieux de papes puissants comme Urbain II ou Innocent III visant à assurer leur domination politique en fédérant autour d’eux les puissances séculières et peut-être, au moins pendant la première période des Croisades, de tenter une réconciliation avec l’Église d’Orient.
4. On peut s’étonner que l’Église prenne l’initiative d’une guerre même défensive. Mais la position théologique sur le sujet avait depuis longtemps déjà glissé d’une position pacifique des chrétiens à une formulation par Augustin d’une guerre juste à laquelle les chrétiens pourraient participer.
Cette évolution s’est produite dans un contexte de rapprochement aux IV e et V e siècles entre le pouvoir politique et religieux au moment où les frontières de l’Empire Romain commençaient à céder. En intégrant dans la chrétienté des peuples de culture où la gloire masculine est quasi exclusivement liée à la force physique, l’Église a eu fort à faire pour essayer de canaliser cette violence en faisant naître des compromis que l’homme de notre siècle a du mal à appréhender. Il est intéressant de noter la forte proportion de contingents d’origine « viking » dans la croisade des chevaliers. Même avant les Croisades, l’Église se militarise avec la création des chevaliers de Saint-Pierre dès 1053. Puis viendra la reconnaissance des ordres de moines-chevaliers comme les Hospitaliers (1113), les Templiers (1118), ou les chevaliers teutoniques (1190) dédiés à la défense de la Terre sainte. Il faut noter cependant que le même concile de Clermont qui voit prêcher la première croisade encouragera dans le même temps le mouvement dit de la « Paix de Dieu » en invitant tous les chrétiens à observer entre eux une paix perpétuelle. En réorientant l’énergie belliqueuse vers l’hérétique, les Croisades peuvent être perçues comme un mal nécessaire pour établir la paix dans le monde.
5. Dans les esprits du Moyen-Âge, le Royaume de Dieu est assimilé théologiquement à l’emprise territoriale des États chrétiens. On comprend ainsi que l’appel à la libération des lieux où le Christ a marché, où il est mort et ressuscité et où il reviendra bientôt, trouve un écho dans le cœur de très nombreux croyants. Plus qu’une simple possibilité d’accès, la libération puis la défense de Jérusalem et du tombeau du Christ sont accueillies comme une grande œuvre de piété. L’image des croisés faisant procession pieds nus devant les murailles de Jérusalem tels Josué devant Jéricho montre l’assimilation de la reconquête de la Terre sainte à la conquête de la Terre promise. Ici, le musulman, souvent caricaturé et très mal connu, est rarement perçu comme une âme à gagner, mais plutôt comme un agent de l’Antichrist. On notera quelques exceptions notables comme François d’Assise qui s’est joint à la cinquième croisade sans combattre, mais avec le projet de présenter l’Évangile au sultan Malik-al-Kamil. Le sultan ne se convertit pas, mais il offre à François des richesses (qu’il refuse) et le fait escorter jusqu’au camp chrétien. De manière plus générale, c’est l’urgence eschatologique de la libération des lieux saints qui prédomine. Les Croisades peuvent être vues dans cette perspective comme le résultat de l’attente prophétique de l’accomplissement à Jérusalem du monde nouveau.
6. Enfin, les croisés étaient animés par l’espoir du salut dans un contexte où le message promulgué par l’Église était source d’incertitude. L’appel aux Croisades s’est assorti d’une promesse d’une indulgence plénière, une des premières de l’histoire, à ceux qui entreprenaient de libérer la terre où le Sauveur était né. Celle-ci garantissait que tous ceux qui mourraient en chemin, que ce soit par terre ou par mer, ou en combattant les païens, auraient la rémission immédiate de leurs péchés. Ainsi des foules se sont mises en marche en dépit de ce que la raison aurait pu juger comme inconscient ou suicidaire, mais dans l’espérance salutaire du « quoi qu’il arrive ». Des hommes et des femmes ont tout quitté par la foi, des seigneurs se sont ruinés par la foi aux dépens bien souvent de leur liberté et de leur vie. Les Croisades peuvent ainsi être comprises comme un acte de pèlerinage pénitentiel répondant à l’angoisse des peines éternelles des croyants du cœur du Moyen Âge.
Le bilan des Croisades
Si se replonger dans ces éléments de contexte permet de mieux comprendre ce qui a poussé tant d’hommes et de femmes à partir aux Croisades en évitant quelques anachronismes, il n’en demeure pas moins que le recul sur ces événements dresse un bilan catastrophique.
Un échec militaire tout d’abord. Mis à part les succès de la première croisade avec la prise d’Antioche et de Jérusalem qui permettra la naissance des fragiles États latins d’Orient, les divisions incessantes des chefs croisés et l’épuisement rapide du flux du renouvellement des forces humaines rendront les sacrifices des Croisades totalement futiles avec la prise de Saint-Jean-d’Acre par les Mamelouks en 1291. On pourrait dire « tout ça pour ça ? ». Et ce « tout ça » est un terrible gâchis humain. Les imposants convois de croisés, souvent composés également de femmes et d’enfants, s’aventurent dans d’immenses contrées sans eau et sous un soleil de plomb. Fatigués par les longs trajets à pied et mal équipés, ils deviennent des proies faciles qui se font régulièrement tailler en pièces. Les principes de la soi-disant guerre juste sont piétinés par les pires élans du cœur humain quand les populaces indisciplinées massacrent les Juifs sur le chemin de la croisade, quand les guerriers sanguinaires usent des pires tortures ou quand la prise de Jérusalem se transforme en bain de sang. Cette violence mêlée d’un honteux intérêt financier se retourne même contre les chrétiens entre eux comme dans le cas hallucinant de la quatrième croisade qui se termine par le pillage de Constantinople, ville la plus riche de l’époque, fragilisant de manière durable ce tampon historique avec l’Islam. Le fossé entre chrétiens occidentaux et d’orient s’en est trouvé plus profondément creusé.
Les Croisades n’ont répondu ainsi à aucun de leurs objectifs.
Quelles ont été les conséquences durables des Croisades sur les relations des chrétiens avec le monde musulman ?
Si nous devons sans doute résister à la tentation d’attribuer l’extrémisme islamique actuel aux Croisades, cela ne veut pas dire que les Croisades n’occupent pas une place importante dans la conscience de notre entourage musulman. Comme le commente Kevin De Young en 2015, il n’en a pas toujours été ainsi : « Le terme désignant les Croisades, harb-al-salib, n’a été introduit dans la langue arabe qu’au milieu du XIX e siècle, et la première histoire arabe des Croisades n’a été écrite qu’en 1899. Les Croisades ayant échoué, elles n’avaient tout simplement pas beaucoup d’importance pour les musulmans. Mais la mémoire de ces événements a commencé à changer lorsque les nations européennes ont colonisé les nations musulmanes et y ont apporté leurs écoles et leurs manuels scolaires qui saluaient les vaillants croisés et les chevaliers héroïques qui avaient tenté d’apporter le christianisme et la civilisation au Moyen-Orient. Comme le sport, comme la guerre, comme la vie — quand vous gagnez, vous ne vous souciez pas de qui perd ; mais quand vous perdez, il importe beaucoup de savoir qui vous bat. » C’est bien souvent la réappropriation de la mémoire des événements anciens stimulés par un ressenti contemporain qui fait obstacle à la défense de la foi chrétienne. Ainsi, le positionnement des chrétiens du XXI e siècle par rapport aux Croisades a son importance puisqu’il traduit l’attitude actuelle des chrétiens envers leurs contemporains musulmans, juifs ou athées.
Quelle attitude adopter face aux Croisades ?
Dans le contexte tellement différent de notre monde moderne qui exalte l’individualisme démocratique, la liberté religieuse et la séparation du séculier et du spirituel, quelle attitude adopter ?
Aujourd’hui, nous ne partageons pas bon nombre des hypothèses des chrétiens du Moyen Âge. Nous pouvons comprendre le contexte socio-religieux, la logique des enchaînements, la part de bonnes intentions, mais même conscients de se retrouver de l’autre côté de la chronologie de l’histoire, comment approuver de telles dérives si étrangères à l’Évangile ? Les erreurs doctrinales sont évidentes : nous ne pouvons pas accomplir des actes de pénitence salvateurs ; le Christ n’avance pas son œuvre par la force. Le contexte géopolitique contemporain relance souvent les tentations de débats et réflexion sur la question de la guerre juste, mais nous n’oublions pas que notre principal combat est d’ordre spirituel. Notre Seigneur a triomphé de l’ennemi non pas en prenant la vie, mais en donnant la sienne. Condamner les Croisades me paraît ainsi justifié. Peut-être est-ce insuffisamment respectueux des intentions défensives légitimes et du cœur sincère des chrétiens médiévaux ; peut-être faut-il condamner uniquement les exactions commises aux détours des Croisades pour respecter l’histoire sans anachronisme, mais nos contemporains ne voient souvent pas les nuances.
Une attitude protestante aurait aussi tendance à se défausser en s’associant plutôt aux victimes qu’aux agresseurs « catholiques », mais là aussi gare aux anachronismes — même s’il est vrai que les éléments qui se mettent en place dans l’Église au moment des Croisades sont en germe ce qui provoquera les mouvements de la Réforme.
Le problème apologétique demeure néanmoins présent pour nos contemporains qui ne font pas facilement de distinction.
Au final, comme dans tout conflit, dans tout malentendu, il me semble que l’attitude la meilleure reste sans doute la demande de pardon même si entre humains les torts sont souvent partagés.
Le pardon coûte parce qu’il ne fonctionne pas en comptant les points de justice entre chaque partie, mais accepte volontairement de couvrir ce qui n’est pas juste. Mais quel beau moyen pour faire tomber le mur des Croisades construit dans le cœur des humains comme obstacle à la foi chrétienne !
Bibliographie
• Thomas F Madden, Les Croisades, Evergreen, 2008.
• René Grousset, L’épopée des Croisades, Tempus Perrin, 2017.
• Amin Maalouf, Les croisades vues par les Arabes, J’ai lu, 1999.
• Neal Blough, Guerre et Paix ; La foi chrétienne et les défis du monde contemporain.
• Christian History Magazine, “The Crusades”, n° 40.
- Edité par Lacroix Romaric
Hervé, tu as été confronté à des souffrances terribles, liées à la guerre civile qui dévaste l’est de la RDC. Peux-tu nous dire comment cela est arrivé ?
Depuis de nombreuses années, je m’implique dans le ministère d’EFF international [note]https://eff-international.fr/[/note] , qui vise à former des animateurs fidèles et capables de transmettre les valeurs bibliques de la famille dans les pays de la Francophonie.
J’ai participé à une formation au Nord-Kasaï, une autre région blessée de RDC, avec une sœur de Bunia [note]Chef-lieu de la province de l’Ituri, au nord-est de la RDC, théâtre de combats sanglants depuis 2003.[/note] qui s’occupait d’apporter la Parole de Dieu dans des camps de déplacés dans la région. Elle m’a demandé de venir former des collaborateurs chrétiens et j’y suis allé à cinq reprises, même si le trajet pour s’y rendre est très long et compliqué.
Quelle est la situation dans cette région et quels sont les types de souffrance auxquelles tu as été confronté ?
Depuis plus de 25 ans, des troubles et des guerres civiles ensanglantent cette région. Les rebelles passent de l’Ouganda ou du Rwanda en RDC et on ne sait pas bien qui manipule qui. Plus le pays est déstabilisé, plus les dirigeants et les firmes étrangères peuvent vendre à tout va les matières premières dont il regorge. En suscitant des guerres ethniques fratricides, ils instaurent un climat de peur, conduisant à des déplacements de population vers les villes ; les territoires se vident et la place est libre.
Les haines entre tribus, entre dominants et dominés, remontent à très longtemps et il suffit de mettre un peu d’huile sur le feu pour les attiser.
Le drame est que ce sont des chrétiens — de nom — qui se battent entre eux. Pour que des hommes puissent commettre de telles atrocités, seul un démon peut être derrière. La guerre n’est pas belle, c’est fait pour voler, pour piller, mais là on atteint un degré de perversité et d’abjection indicible. Je ne peux pas raconter ce que j’ai entendu. Ce sont des actes de barbarie dont les femmes et les enfants sont les premières victimes.
Comment sortir de cette spirale de violence ?
Un jour, alors que nous avions travaillé la veille sur le chemin du pardon en abordant le sujet avec une extrême douceur, un vieux monsieur a demandé la parole pour témoigner qu’il avait renoncé à la vengeance : « Mes voisins ont tué toute ma famille, à l’exception d’une seule de mes petites-filles de 6 ans. J’avais préparé un poison pour tuer mes voisins et hier soir, j’ai pris le poison et l’ai donné au pasteur. »
Que dire à des personnes ayant vécu des abominations à répétition ?
Toute parole est une insulte à leur souffrance, à leur cœur déchiré. Alors que puis-je leur apporter ? Les amener dans la présence de Jésus, présent comme il l’a promis (Mat 28.20), les aider à réaliser son regard de compassion sur eux, ses yeux sur eux, sa main sur eux, et les amener à demander au Seigneur une parole, une réponse, quelque chose juste pour eux.
Leur proposer un temps de silence, d’écoute pour eux, d’intercession silencieuse pour nous, et là, le Seigneur leur donne une parole, une réponse, un verset, un signe entre lui et eux. Ça vient de sa part, par son Esprit : c’est un cadeau de sa grâce.
Une femme qui avait atrocement souffert, après un temps de méditation, a reçu du Seigneur ce texte qu’elle nous a partagé : « Parce que je vis, tu vivras. » Bien d’autres ont témoigné de réponses analogues et sont repartis, au moins pour un temps, détendus, souriants, apaisés. Nous avons vu la consolation de l’Éternel agir !
Comment se sentir légitime face à de telles souffrances ?
Lors d’un séjour, comme les troubles reprenaient, les frères qui m’accueillaient m’ont littéralement jeté dans le dernier avion. À l’escale suivante, j’éprouvais le sentiment de les avoir abandonnés : j’allai retrouver mon confort occidental alors que, eux, risquaient des atrocités. Une sœur m’a appelé sur mon portable et m’a consolé : « Tu as fait ta part ; le reste appartient à Dieu. »
Quels textes sont d’un réconfort particulier pour ces chrétiens ?
Nous commençons par raconter l’histoire d’un pasteur déplacé à la suite de massacres et qui doute. Le premier pas est de les aider à trouver qui est Dieu dans la Bible, par exemple les textes où il dit : « Je suis… » Le Dieu qui est bon, qui tient tout dans sa main, qui délivre, qui demande d’attendre.
Aux femmes violées, nous lisons : « Ne rougis pas, car tu ne seras pas déshonorée ; Mais tu oublieras la honte de ta jeunesse. » (És 54.4) Nous les aidons à passer étape après étape, jusqu’à reconnaître la justice de Dieu qui rendra la vengeance. Et nous finissons par les textes sur le pardon.
Une difficulté supplémentaire est liée à la culture, parfois très éloignée de la nôtre. Par exemple, une femme violée est considérée comme adultère et doit payer une amende à sa belle-famille ! C’est l’occasion de citer Jean 8, où Jésus ne condamne pas une femme volontairement adultère : a fortiori une femme qui a involontairement subi un rapport souvent atroce.
« D’autres subirent les moqueries et le fouet, les chaînes et la prison ; ils furent lapidés, sciés, torturés ; ils moururent tués par l’épée ; ils [furent] dénués de tout, persécutés, maltraités. » (Héb 11.36 37) En RDC, nous y sommes en plein !
Ce que nous pouvons apporter, face à cet océan de souffrance, ne m’appartient pas. Je verse ma petite goutte d’huile et je crois dans l’abondement de Dieu.
- Edité par Gibert Hervé
Articles par sujet
abonnez vous ...
Recevez chaque trimestre l’édition imprimée de Promesses, revue de réflexion biblique trimestrielle qui paraît depuis 1967.