PROMESSES
Henri Lüscher et Jean-Pierre Schneider
Notre époque est caractérisée par une grande superficialité et un goût pour la vie facile. Les mass-médias en sont en grande partie responsables. Notre génération, en proie à la philosophie de l’humanisme érigée en religion, en est venue à relativiser toutes les valeurs par rapport à Dieu et à la Bible. Il en résulte une diminution de la qualité de la foi chrétienne biblique prêchée et vécue. Cela se traduit par une dilution du message de l’Evangile, qui perd ainsi une grande partie de son impact et ne produit plus la repentance qui mène à la conversion.
Définition
Le nom grec «pistis» a une double signification: «foi» et «fidélité». De même, l’adjectif «pistos» signifie à la fois «plein de foi» et «fidèle». Mais cette définition n’a qu’une dimension linguistique. Sans les personnes impliquées, ces concepts restent dans le vide. Examinons-les donc en les appliquant aux personnes.
La foi
Il y a celui qui croit, et il y a l’objet de sa foi. Dans toute la Bible, l’objet de la foi est la Personne du Dieu trinitaire et la Parole du même Dieu trinitaire. La Personne et la Parole ne peuvent être dissociées.
Croire en Jésus-Christ n’est pas facultatif. Parlant du Père, Jésus dit: Voici son commandement: que nous croyions au nom de son Fils Jésus-Christ. Pourquoi?
Parce qu’il n’y a sous le soleil aucun autre nom donné parmi les hommes, par lequel nous devions être sauvés (Act 4.12), c’est-à-dire devenir enfants de Dieu. En présentant Jésus comme la lumière du monde, Jean écrit qu’à tous ceux qui l’ont reçue, elle a donné le pouvoir de devenir enfants de Dieu, à ceux qui croient en son nom (Jean 1.12).
La foi au nom de Jésus est d’abord l’acceptation de l’événement historique de l’incarnation de Dieu en son Fils Jésus-Christ, de son oeuvre rédemptrice à la croix et de sa résurrection. Pour pouvoir croire, il faut d’abord connaître les éléments de base de la foi chrétienne tels qu’ils sont révélés dans les Ecritures. La foi se base donc sur ce qu’on connaît à travers la prédication et la lecture personnelle de la Bible. Loin d’être quelque chose de vague, c’est bien précis.
Beaucoup de gens croient qu’il y a un seul Dieu, mais cela ne suffit pas. Les démons le croient aussi, et ils tremblent (Jac 2.19), car ils savent que Dieu est le Juge universel.
Ce qui doit être réglé, c’est le problème du péché qui condamne l’homme, car c’est le péché qui sépare de Dieu. De là l’appel urgent lancé par Jean-Baptiste et répété par Jésus et les apôtres après lui: Repentez-vous et croyez à la bonne nouvelle (Marc 1.15). L’Evangile est la bonne nouvelle du pardon rendu possible par la croix. Ceci est mon sang, dit Jésus, qui est répandu pour beaucoup, pour le pardon des péchés (Mat 26.28). Celui qui nous aime nous a délivrés (ou: déliés) de nos péchés par son sang (Apoc 1.5). Il n’y a pas d’autre évangile qui puisse sauver.
La foi est donc une totale confiance en Jésus-Christ et en l’efficacité de son oeuvre de rédemption. Il est entièrement digne de confiance, car son nom n’est-il pas Fidèle et Véritable (Apoc 19.11)? Chacune de ses paroles est la vérité absolue, car la parole de Jésus n’est rien d’autre que la parole de Dieu (Luc 5.1) C’est pourquoi les paroles que je vous ai dites sont Esprit et vie (Jean 6.63); elles communiquent la vie: Il nous a engendrés… par la parole de vérité (Jac 1.18).
Ce que je crois, le contenu de ma foi, est d’une importance capitale. De ma foi en Jésus-Christ et tout ce qu’il représente dépend mon salut et la qualité de ma vie d’enfant de Dieu. En dehors de la foi en Jésus-Christ, il n’y a pas d’espérance, pas de vie, pas de ciel.
Le prix de la fidélité
Bon et fidèle serviteur…
Fidèle à quoi? Selon les paraboles de Mat 25 et Luc 19: fidèle à faire fructifier ce qu’on a reçu du Seigneur.
Qu’avons-nous tous reçu? – La vérité révélée par la Parole (Jean 17.17). Elle aussi s’attache à une personne: le Christ est la vérité. Il ne peut donc pas y avoir de vérité «relative»; elle est ou elle n’est pas, tout comme Christ est ou il n’est pas.
Il s’agit d’être fidèle à la personne du Christ tout autant qu’à son enseignement et à celui des apôtres qui, par l’Esprit, ont reçu des enseignements complétant ceux de Jésus, qui ne parle que de ce qu’il a entendu du Père et du Fils (Jean 16.13-15).
La première fidélité (celle de base) est celle à sa Parole (tout comme à sa Personne: les deux sont inséparables). Il n’est pas question ici d’opinions personnelles, mais de convictions fondées sur la Parole, qui seule nous fait connaître le Christ. Elle est la base de notre statut d’enfants de Dieu. Cela présuppose, une fois de plus, que nous ayons reçu la connaissance de la vérité (Héb 10.26). La Bible entière nous encourage à continuer à augmenter notre connaissance; mieux nous connaissons la Bible, mieux nous connaissons Dieu, plus notre relation avec le Seigneur est approfondie.
Dès la création, Dieu a séparé la lumière des ténèbres. Christ, la Parole devenue chair, est la lumière du monde. Ayant reçu le Christ, nous sommes la lumière des nations (Act 13.47), une lampe qui brille dans un lieu obscur (2 Pi 1.19), nous qui autrefois étions ténèbres, mais maintenant lumière dans le Seigneur (Eph 5.8).
Lumière et ténèbres sont inconciliables. Vérité et erreur sont inconciliables. Or l’erreur se présente toujours enveloppée d’une partie de vérité, sans quoi elle ne séduirait personne. Satan utilise toujours la même tactique. Quand il veut séduire Jésus, il cite le Ps 91, mais seulement les v. il et 12, arrachés du contexte des v. 9 et 14-15, sans lesquels la promesse citée par le diable reste sans effet. (Le v. 9 peut se traduire: Si tu fais du Très Haut ta résidence; Satan escamote cette condition).
Rester fidèle à la Bible, parole révélée par l’inspiration du St-Esprit, telle qu’elle se comprend primairement, donc sans spiritualiser les miracles et les prophéties qui dépassent notre raison humaine limitée, est aujourd’hui considéré comme puéril, voire imbécile. Le romancier Louis Bromfield écrivait déjà en 1937 d’un de ses héros qu’il était «trop intelligent» pour accepter la doctrine chrétienne…
Témoigner de la vérité absolue de la Parole, au besoin combattre l’erreur (que les apôtres ne se gênaient pas d’appeler fausse doctrine) est très mal ressenti par les incrédules et les fausseurs de la Bible. Il peut parfois être nécessaire de nommer les faux docteurs, comme Paul quand il dut réprouver Pierre en présence de tous (Gal 2.11, 14). Fi à quiconque ose aujourd’hui s’attaquer à l’enseignement d’un personnage en vue tel que Pierre l’était alors! Mais cela peut être une nécessité inévitable afin d’avertir l’Eglise contre de faux enseignements et de fausses pratiques. L’impopularité, voire l’inimitié, sera le prix de la fidélité, que nous devons, avant toute autre loyauté, au Seigneur.
Cette fidélité est une des caractéristiques du fruit de l’Esprit (Gal 5.22). En restant fidèles au seul Seigneur Jésus-Christ et à sa seule parole, nous prenons le risque d’être mis à l’écart par ceux qui préfèrent suivre les grands courants actuels qui sont en train de séduire l’Eglise au détriment d’un enseignement solidement campé sur la seule parole de Dieu.
Il va sans dire que cette fidélité a ses répercussions dans la vie de tous les jours. En tant que lumière du monde, nous sommes exposés aux regards des hommes, afin qu’ils voient nos oeuvres bonnes et glorifient notre Père qui est dans les cieux (Mat 5.16). Cela concerne notre vie familiale et professionnelle autant que notre vie d’Eglise. Les épouses accompliront en toute fidélité leur mission au foyer conjugal (1 Tim 3.11). Les maris aimeront leurs femmes d’un amour égal à celui de Christ pour l’Eglise (!), et ils les honoreront comme cohéritières de la grâce de la vie, afin que rien ne fasse obstacle à leurs prières (Eph 5.25; 1 Pi 3.7). Une vie de prière efficace dépend donc de l’harmonie dans le couple; y aviez-vous pensé ?…
Seul un foyer où les deux conjoints vivant dans le respect mutuel restent attachés au Seigneur et à sa parole pourra encore avoir un impact salutaire sur le nombre grandissant de mariages en naufrage.
Quelle est la qualité de notre foi? Sommes-nous de ceux qui ont une grande assurance dans la foi en Christ Jésus (1 Tim 3.13)?
Quel est le prix que nous sommes prêts à payer pour notre fidélité à Jésus-Christ et à sa parole?
Henri Lüscher et Jean-Pierre Schneider
- Edité par Lüscher-Schneider
A – Les chemins de Dieu
Lecture préalable: 2 Rois 5.1-14
1. Un enfant de Dieu dans l’adversité
Les batailles étaient fréquentes entre Israël et la Syrie, et nombreux les incidents de frontière. C’est ainsi qu’une fillette israélite fut enlevée, déportée, et attribuée comme servante à Madame Naaman, dont le maréchal de mari commandait les troupes de Ben Hadad, roi de Damas. Régulièrement vainqueur sur les champs de bataille, Naaman jouissait d’une grande popularité ainsi que de la faveur de Ben Hadad, qui ne lui ménageait ni honneurs ni richesses.
Mais acclamations du peuple et félicitations du roi ne le déridaient pas, condamné qu’il était à une longue maladie, dégradante et douloureuse. Il était lépreux et aurait volontiers troqué sa glorieuse place contre celle d’un humble soldat, pourvu qu’il fût en bonne santé.
Il n’y avait ni radio ni télé chez les Naaman: alors le soir, à la veillée, on parle, totalement libre des contraintes et prétendues obligations de notre siècle. On ne parle même plus des victoires du maréchal mais de sa maladie incurable, et chacun s’en désole.
Cependant un détail va tout changer et introduire une histoire étonnante: la petite servante hébraïque faisait partie du cercle de famille et partageait ses soucis. C’était une prisonnière bien traitée qui dialoguait avec sa patronne. Or, un jour la fillette lui dit: Oh! si mon Seigneur était auprès du prophète qui est à Samarie, celui-ci le débarrasserait de sa lèpre! (v. 3)
Considérons l’exemple de cette enfant, sa sérénité dans un exil où elle nous paraît plus heureuse que ses maîtres libres. Jugez un peu: elle compatit au malheur des autres et plaide, non pour sa liberté, mais pour la guérison de son maître et… ravisseur. Pour elle, elle a l’Eternel, son prophète et son peuple. Dans les jours mauvais, ce sont des réalités qui subsistent malgré les circonstances, et elles seront à l’origine de la guérison de Naaman et de la paix de toute sa famille. C’est un grand témoignage d’un jeune enfant de Dieu: il y avait encore du bon en Israël.
Le chrétien possède une sérénité semblable, indépendante des circonstances de la vie, parce que sa vraie patrie est céleste et son Dieu fidèle. Aussi passe-t-il ici-bas comme étranger et voyageur, nanti de certains privilèges célestes qui lui permettent de compatir au malheur des incrédules.
2. Bien contre mal
Si puissant fût-il, Naaman n’était pas à l’abri de la lèpre: ses victoires n amélioraient pas son état; il n’y avait pas de compensation. Sa mort inéluctable ne perdrait rien de sa laideur, la victoire dût-elle lui sourire encore. Il était à la fois le général en chef glorieux et le lépreux condamné, les deux extrémités de l’échelle sociale.
Devant Dieu, nos qualités possibles ne compensent pas nos défauts certains et une bonne action ne rachète aucun péché. Une seule transgression rend l’homme coupable devant la loi entière. Il est donc vain de se prévaloir d’une oeuvre, d’un don ou d’un talent qui, à notre avis, pourrait manquer à notre frère (Rom 3.21-24; Phil 2.3).
3. Le chemin du salut
Naaman a décidé de suivre le conseil de la fillette, mais il fera des erreurs de parcours, car il juge selon les valeurs païennes. Aussi l’Eternel corrigera-t-il sa route, et malgré quelques réticences, Naaman modifiera son appréciation des valeurs d’en haut.
C’est ainsi qu’il faut agir pour être sauvé: se convertir au Seigneur Jésus, ce qui conduira toujours à modifier notre échelle de valeurs et à suivre le Seigneur dans un chemin nouveau (Jean 14.6; Act 3.19; Mat 21.29).
Curieusement, pour rencontrer le prophète d’Israël, Naaman consulte.., le roi de Syrie, qui lui donne une lettre de recommandation pour… le roi d’Israël. C’est tellement insolite que le roi d’Israël s’imaginera qu’on attend de lui-même la guérison du général. En réalité Naaman était plus près du prophète qu’il ne le croyait: il aurait pu se rendre chez lui directement, sans lettre de recommandation ni détours.
Les chrétiens savent qu’ils ont libre accès auprès du Seigneur. Pourtant ils peuvent commettre cette erreur qui consiste à chercher, jusque dans les affaires de Dieu, l’appui du monde et de ses puissants. Or, dans le domaine spirituel, seuls les moyens spirituels sont normaux, les autres sont une offense à la gloire de Dieu (Jér 17.5). En Israël, les prophètes oignaient les rois et leurs donnaient des instructions, et non l’inverse (1 Sam 16.13).
Mais dans les affaires du monde elles-mêmes, est-il souhaitable de rechercher l’appui de ses puissants, alors que le Seigneur est capable d’ouvrir ou de fermer n’importe quelle porte (Néh 1.11; 2.2; Apoc 3.8)? A l’inverse, solliciter l’aide du Seigneur «sous réserve de sa volonté» est un excellent moyen de connaître cette dernière pour notre projet (Apoc 3.8; 1 Jean 5.14).
Du reste, comment pourrions-nous la connaître, sa volonté, si au lieu de consulter le Seigneur nous nous adressons aux hommes qui ont le bras long? Quand le chemin convoité n’est pas celui de Dieu, admettons que la tentation existe d’insister et de passer outre (Nom 22.9-12, 18 s.).
Naaman part donc avec sa suite, sa recommandation royale et beaucoup d’or et d’argent. Un vent de corruption serait-il dans l’air? C’est vrai que les gens s’achètent: les indulgences, les situations, les services. Mais dans le domaine de Dieu, rien ne s’achète avec de l’argent ou des influences (Rom 3.24); le général est remis dans le bon chemin par l’émoi du roi d’Israël (Joram), et Elîsée est informé de tout (on ne saurait se cacher de Dieu). Naaman commence à mesurer la sagesse de sa servante et la folie de ses propres combinaisons, mais son apprentissage avec le Seigneur n’est pas terminé. Le nôtre non plus d’ailleurs (Deut 17.18s.).
Il arrive enfin devant la porte du prophète et il attend (v. 9). Il attend peut-être que le prophète l’accueille en ouvrant la porte du carrosse (?); le protocole sans doute. Mais pensez donc, c’est le domestique qui sort, lui lance un laconique message (7 plongeons dans le Jourdain et tu seras guéri) et rentre à la maison sans autres politesses.
Fureur de Naaman: même dans son état désespéré, il n’oublie pas qu’il est un grand personnage. Et puis, cette médecine simpliste est méprisante pour son pays et ses richesses… Comme les puissants et les religieux, il aurait aimé faire quelque chose de difficile pour sa guérison et se parer d’un certain mérite. Mais là n’est pas le chemin de Dieu, et il devra encore apprendre. On ne peut venir à Dieu en conquérant, et le chemin de Naaman serait sans issue si ses serviteurs ne se montraient plus avisés. Ce sont eux qui le reprennent maintenant, et c’est une bénédiction pour Naaman de leur avoir concédé cette liberté de parole. Il les écoutera et sera guéri, totalement.
Le chrétien aussi est tenté de faire quelque chose pour sa propre gloire, pour montrer sa valeur et s’en prévaloir, ne serait-ce que dans son coeur. Se réserverait-il de pouvoir dire un jour: Seigneur! n’est-ce pas en ton nom que j’ai prophétisé, que j’ai chassé des démons, que j’ai fait des miracles? (Mat 7.22).
Remarquons que la foi de Naaman avait ses limites. Certes, il s’attendait à guérir (v. 11), mais il croyait que le prophète comptait sur la valeur de l’eau, et il n’avait pas plus confiance dans le Jourdain que dans le Parpar. Son opinion devait changer.
Ne faut-il pas modifier son opinion de temps à autre et abandonner ses idées anciennes, quitte à s’humilier un peu? (2Ch 7.14).
Enfin, puisque c’est le Jourdain ou rien, Naaman s’y plonge comme prescrit. Sa foi hésitante le lui permet et le pousse ensuite à regarder sa peau malade pour voir si elle est guérie. «Oui, elle est guérie!» Mais s’il n’avait pas eu ce regard sur sa peau après le septième plongeon, tout aurait pu être différent. C’était le regard timide, interrogatif et nécessaire de celui qui ne peut plus compter que sur l’Eternel.
Il suffit que la foi ait Dieu seul pour objet, qu’elle permette de lui obéir, même en hésitant, de regarder ensuite le résultat dans sa vie et de reconnaître alors que Dieu est vrai et grand. On vient (ou on revient) au Seigneur: on sait bien quand c’est lui qui à tout dirigé, et personne ne peut le contester (Job 19.25ss.; Jean 13.17).
4. Le conseil des humbles
Les non puissants, jeunes, étrangers et serviteurs, ont joué un rôle indispensable dans la guérison du général. Les conseils valables sont souvent venus de là. Naaman a pu être sauvé parce qu’il a écouté les humbles et suivi leurs conseils:
– La fillette hébraïque, qui a annoncé la bonne nouvelle d’une guérison possible: si, traitée en ôtage, sans partage quotidien de la vie de famille, elle n’avait rien dit, Naaman aurait été perdu.
– Le domestique du prophète, qui a ordonnancé le remède: le prophète ne s’est même pas montré.
– Les serviteurs du général, qui l’ont raisonné, calmé et encouragé: sans eux, Naaman aurait abandonné.
C’est toujours un grand risque que d’écarter la personne que nous estimons d’un moindre rang, d’un autre milieu que le nôtre, l’étranger, le pauvre, le chômeur, la marginal. A nos yeux myopes, ils sont les faibles du monde; or les conseils touchant à la vie spirituelle ne viennent pas que des savants. Pour nous aider, le Seigneur nous dépêche l’homme de son choix, sans favoritisme. C’est pourquoi les chrétiens ne peuvent mépriser qui que ce soit sans préjudice certain (Ecc 9.14-18).
5. La nouvelle naissance
La guérison physique de Naaman est un exemple imagé de la nouvelle naissance survenant dans l’âme qui se convertit au Seigneur Jésus.
Elisée joue le rôle de l’envoyé de Dieu (Jésus-Christ lui-même), et son domestique celui d’un chrétien qui donne l’indication nécessaire à qui est convaincu d’être perdu, Naaman.
Le Jourdain est un symbole de la mort, mais s’y plonger 7 fois ne parle pas de la mort physique du plongeur. Selon le langage de la Bible, il s’agit de cette autre mort (appelée seconde mort) qui est l’exclusion définitive du royaume de Dieu.
Ressortir vivant du Jourdain parle alors de la résurrection spirituelle immédiate dans une vie nouvelle, et de l’attente d’un corps parfait lors de la résurrection des croyants. Ce n’est pas le cas de la résurrection de Lazare, qui est retourné à son ancienne vie avec le même corps usé; mais c’est le cas de la résurrection du Seigneur Jésus, le premier à revêtir le corps éternel des enfants de Dieu. Par son expérience, Naaman est entré juridiquement dans le peuple de Dieu, et c’est aussi juridiquement qu’est sauvé, corps et âme, quiconque accepte que Jésus soit son Sauveur et son Maître (Jean 3.16).
Henri Larçon
- Edité par Larçon Henri
Rappel de l’introduction
Les réflexions qui paraissent et paraîtront sous ce titre s’inspirent du magistral ouvrage de Frederick Dale Brunner: «A Theology of the Holy Spirit – The Pentecostal Experience and the New Testament Witness » (Une théologie du Saint-Esprit – L’expérience pentecôtiste et le témoignage du NT), Hodder & Stoughton, London 1970, 390 p. A ceux qui savent l’anglais, nous ne pouvons que chaleureusement en recommander la lecture. Ce livre est aussi actuel aujourd’hui qu’au jour de sa publication.
La réception du Saint-Esprit est devenue sujet à controverse depuis l’apparition du pentecôtisme en 1906 à Los Angeles avec son prolongement charismatique dans les années soixante. Il est impératif que l’Eglise soit édifiée, aussi en ce qui concerne ce point primordial, uniquement sur la base de l’Ecriture sainte, l’expérience ne pouvant être un fondement valable, pour deux raisons: elle n’est jamais normative; étant subjective, elle n’est pas nécessairement authentique quant à son origine et ses manifestations.
IV. La manifestation de l’Esprit: la foi chrétienne (suite)
C. Le dynamisme de la foi
Selon l’expression inoubliable de l’apôtre Paul, la foi, qui est l’oeuvre de l’Esprit, s’énergise en amour (Gal 5.6). L’exercice de l’amour chrétien a besoin de l’énergie de l’Esprit, qui est reçue par la foi (Gal 3.5).
Dans le NT, l’action d’amour exercée par le Saint-Esprit est considérée sous deux aspects: négativement en ce qui concerne la chair et positivement quand il s’agit du prochain.
1. La chair
L’énergie qui produit l’amour par la foi est en tension constante avec la chair . La vie en Esprit est une vie en guerre contre la chair. Cette guerre ne cesse pas une fois que l’Esprit a été reçu (Rom 8.13). Mais c’est justement parce que l’Esprit a été reçu que le chrétien mène un combat continuel pour «mettre à mort» ses mauvais penchants. Ce combat constitue d’ailleurs pour le chrétien l’assurance qu’il est conduit par l’Esprit, qu’il est donc enfant de Dieu. C’est la raison pour laquelle Paul juxtapose ces deux choses: Si par l’Esprit vous faites mourir les (mauvaises) actions du corps, vous vivrez, car tous ceux qui sont conduits par l’Esprit de Dieu sont fils de Dieu (Rom 8.13-14).
On peut donc conclure que marcher selon l’Esprit et contre la chair signifie «marcher dans l’amour». Cette marche est la manifestation, la démonstration et l’attestation que l’Esprit est à l’oeuvre, qu’il habite le croyant. L’Esprit ne se manifeste donc pas nécessairement par une extase quelconque, mais bien par un comportement éthique. Ce n’est pas le chrétien qui fait preuve d’expériences spirituelles ostensibles ou qui parle d’une manière inintelligible qui manifeste la vie dans l’Esprit. Car l’amour ne supprime pas la conscience du Moi dans l’extase; il exerce une contrainte sur le Moi, qui peut alors se donner à l’autre. L’amour n’est pas tellement l’explosion d’une grande émotion, mais consiste plutôt à maîtriser ses émotions. L’amour est d’abord caractérisé par la patience; dans les moments décisifs, ce n’est pas tellement la langue qui agit, mais les mains (cf. 1 Jean 3.18, où aimer en parole et avec la langue est mis en contraste avec aimer en action et en vérité).
2. Le prochain
La foi chrétienne se distingue de toutes les religions illuministes par le souci du don au prochain. Le gnosticisme, qui prétend au «savoir par excellence» (généralement par initiation), a pour but l’accumulation de «spiritualité» pour soi-même; pour y parvenir, il faut «faire le vide» en soi afin d’être rempli de substance divine (mouvement vertical). Le but de la foi chrétienne, au contraire, est de se vider de soi-même en vue de se donner au prochain – c’est un mouvement horizontal. C’est à cette différence de direction que prend l’énergie que Paul fait allusion quand il écrit: La connaissance (gnostique, voire charismatique) enorgueillit, mais l’amour édifie (1 Cor 8.1).
Le prochain (que l’on voit) est l’objet de l’authentique spiritualité chrétienne; le spirituel (que l’on ne voit pas) est le centre de toutes les variétés de gnose (connaissance) mystique. Cependant, le gnostique (l’illuminé) est séparé de son prochain aussi par ses expériences spirituelles elles-mêmes. Car chacune de ces expériences le fait accéder à un niveau spirituel supérieur de sorte qu’il considère en état d’infériorité le frère chrétien (et toute autre personne) qui n’a pas fait ces expériences. C’est ainsi que se créent inévitablement des schismes.
3. Pertinence particulière de la première épître de Jean
Cette lettre de Jean doit se comprendre dans le contexte du gnosticisme très répandu de son temps. Jean met en contraste la soi-disant «piété supérieure» des gnostiques avec le seul critère légitime de la foi chrétienne -l’obéissance au commandement de l’amour.
Jean détecte chez les gnostiques une incapacité de fonder leur version de la foi en Jésus en tant qu’homme, parce qu’ils opposent ce qui est humain et naturel à ce qui est spirituel et surnaturel (1 Jean 4.2-3). Par ce fait, ils comprennent mal le côté éthique de la vie chrétienne et donnent la priorité aux «choses spirituelles» (aux expériences supérieures) plutôt qu’aux «choses historiques» telles que le frère et le prochain; la perfection est dans l’amour, et non dans l’exaltation «spirituelle» (1 Jean 4.12). Pour l’apôtre Jean, c’est le manque d’amour et non le manque d’expériences spirituelles qui indique qu’un chrétien n’est pas dans le vrai. Le test de l’authentique spiritualité est donc l’amour et non l’expérience spéciale.
C’est la raison pour laquelle Jean refuse aux gnostiques le droit d’être appelés chrétiens (1 Jean 2.4-6). En fait, centrer sa vie dans le spirituel (donc finalement en soi-même) plutôt que dans le Christ incarné correspond à l’esprit de l’antichrist (1 Jean 4.3).
Par conséquent, la forme de piété gnostique n’est plus, pour Jean aussi bien que pour Paul, une forme valable de la foi chrétienne, malgré sa prétention de l’être à un degré supérieur. La manifestation de la vie chrétienne dans la foi, l’espérance et l’amour se réalise concrètement à l’égard du frère plutôt qu’en démonstration de dons (charismes) de l’Esprit.
D. Le centre de la foi
Les déclarations concernant le Paraclet dans l’évangile de Jean constituent le témoignage le plus concentré sur la doctrine de la manifestation du Saint-Esprit et nous serviront de résumé. Ces affirmations sont toutes centrées sur le Christ auquel l’Esprit rend constamment témoignage.
Nous vous proposons de cataloguer la doctrine du Saint-Esprit et son pendant pentecôtiste de la manière suivante:
1. Jean 14.15-17
(a) Si vous m’aimez, vous garderez mes commandements, et moi, je prierai le Père, et il vous donnera un autre Consolateur (Paraclet) qui soit éternellement avec vous.
Ce texte indique ce qui s’approche le plus d’une condition humaine en vue de recevoir l’Esprit. Ce passage porte-t-il préjudice au principe de «par la foi seule» qu’on trouve partout, et notamment dans l’évangile de Jean (7.37-39), en relation avec le Saint-Esprit? En fait, cette obéissance n’est pas une «oeuvre» en plus de la foi mais, selon l’usage de Jean lui-même, un appel à la foi: Ce qui est l’oeuvre de Dieu, c ‘est que vous croyiez en celui qui l’a envoyé (6.29). Si Jean 14.15 est un appel à l’amour, ce que le contexte suggère (cf. 13.34; 15.12, 17), la doctrine du NT est confirmée.
Par contre, il est intéressant de constater que, jusqu’à ce jour, nous n’avons pas découvert le commandement de l’amour dans les listes pentecôtistes énumérant les conditions pour recevoir l’Esprit. Celles-ci tournent toutes autour de l’abandon absolu à Dieu, de «faire le vide», de l’attente dans la prière; tout cela peut se faire en isolation chez soi, d’une manière égocentrique.
(b) L’Esprit n’est pas donné imparfaitement ou d’une manière incomplète, mais de sorte qu’il soit éternellement avec vous.
Le pentecôtisme nie en général que quand l’Esprit est donné «d’abord», il demeure toujours dans le croyant; pour que cela arrive, il faut, dit-il, une obéissance plus parfaite du croyant, sans quoi l’Esprit ne fait que communiquer le salut. Pourtant, Jésus dit en clair que quand l’Esprit est donné, c’est pour toujours.
(c) L’Esprit de vérité ne peut pas être reçu par le monde parce qu’il ne le voit pas et ne le connaît pas. (Notez qu’aux disciples Jésus dit: vous le connaissez, alors qu’ils ne parlaient pas en langues…) La doctrine pentecôtiste enseigne que l’Esprit n’est pas donné pour de bon jusqu’à ce qu’il soit «vu» par une manifestation spéciale, celle du «parler en langues». Sans cette évidence, le pentecôtiste ne croit pas que l’Esprit ait été donné d’une manière permanente.
Le NT en général n’approuve pas la demande de «voir» une évidence spéciale de la présence divine. Quand les Pharisiens demandent à Jésus un signe, Jésus répond: Une génération mauvaise et adultère recherche un signe (Mat 12.38-39). Le dicton populaire «voir, c’est croire» ne s’applique pas à la foi chrétienne; les paroles de Jésus adressées à Thomas se réfèrent particulièrement aux croyants après lui: Heureux ceux qui n ‘ont pas vu et qui ont cru (Jean 20.29).
(d) Il ne peut y avoir aucun doute que Jésus s’identifie intimement avec le Consolateur, le Saint-Esprit, car il dit à ses disciples: vous le connaissez (l’Esprit), parce qu ‘il demeure près de vous et qu’il sera en vous. Je ne vous laisserai pas orphelins, je viens vers vous. L’Esprit de Jésus (l’Esprit de Dieu, le Saint-Esprit) vient en tant que continuateur et non comme substitut, comme la suite le montre.
2. Jean 14.26
(a) Le Père, dit Jésus, enverra l’Esprit en mon nom. L’identification entre le Fils et l’Esprit est telle qu’avec le nom de Jésus l’Esprit est donné.
Selon le pentecôtisme, la présence totale de l’Esprit n’est pas normalement donnée en réponse à la foi au nom de Jésus, mais à partir de certaines conditions allant au-delà de la simple foi. La coïncidence entre le nom du Fils et la venue de l’Esprit est ainsi ignorée.
(b) L’Esprit, dit Jésus, vous rappellera tout ce que moi je vous ai dit. Le moi (accentué dans le texte grec) fait bien ressortir que l’oeuvre de l’Esprit n’est pas indépendante ou supplémentaire à celle du Christ. Il serait salutaire pour les pentecôtistes de savoir que la démonstration réelle de la puissance de l’Esprit est de rappeler Jésus-Christ aux hommes et de les mettre en relation avec lui, non pas de les entraîner au-delà de Christ. Cela ressort dans la suite du discours de Jésus (Jean 15.1-11), qui se présente comme la vraie source de la vie chrétienne. Ce n’est qu’en s’éloignant de Christ (en ne demeurant pas en lui) que le chrétien devient impuissant: Sans moi vous ne pouvez rien faire. Il est à craindre que la recherche d’une seconde source de puissance au-delà de Jésus éloigne le croyant de la seule source de Jésus, que le Saint-Esprit ne supplante jamais, mais qu’il représente (l’Esprit rendra témoignage de moi, et vous aussi, vous rendrez témoignage de moi).
3. Jean 16.7-11
La mission de l’Esprit, à savoir convaincre le monde de péché, fait partie de l’annonce de l’Evangile centrée en Christ. Par la prédication de l’Eglise, l’Esprit pousse les hommes à croire en Christ en les convainquant d’incrédulité (parce qu ‘ils ne croient pas en moi). L’oeuvre de conviction de l’Esprit n’est pas liée à un manque de rechercher l’Esprit. De même, 1′ Esprit.., vous rappellera ne signifie pas un simple rappel à la puissance nécessaire pour le service, celle-ci dépendant de la réalité du Christ dans la vie des disciples, cette réalité étant le fruit de l’action de l’Esprit.
4. Jean 16.13-14
(a) L’Esprit ne fait pas que rappeler et convaincre; Jésus dit aux disciples: il vous annoncera aussi les choses à venir. L’Eglise ne doit pas oublier cette dimension future de l’activité de l’Esprit. Encore faut-il relever que cette activité n’est pas une mission indépendante de l’Esprit, car ses paroles ne viendront pas de lui-même (de sa propre autorité), mais de ce qu’il aura entendu du Christ. Par les apôtres, l’Esprit a annoncé fidèlement les paroles de Christ aussi en ce qui concerne l’avenir.
(b) Jésus dit du Saint-Esprit: Lui me glorifiera, parce qu’il prendra de ce qui est à moi et vous l’annoncera. C’est là le résumé de toute la mission du Paraclet. La manifestation par excellence du Saint-Esprit est la glorification de Jésus-Christ.
Conclusion
Puisque tout a été donné à Jésus-Christ, tout est donné à ceux à qui Christ se donne: Vous avez tout pleinement en lui (Col 2.10). C’est le témoignage unanime du NT par rapport à la manifestation du Saint-Esprit en Jésus-Christ.
Jean-Pierre Schneider
chargé de la traduction-adaptation par la rédaction de Promesses
- Edité par Schneider Jean-Pierre
Articles par sujet
abonnez vous ...
Recevez chaque trimestre l’édition imprimée de Promesses, revue de réflexion biblique trimestrielle qui paraît depuis 1967.