PROMESSES
Dans la dernière partie de l’Épître (12.14-13.19), les croyants hébreux sont exhortés à poursuivre la paix et la sainteté. Ces deux mots résument toute la vie chrétienne. Après une mise en garde contre le danger de revenir à la condition religieuse ancienne, l’auteur insiste une fois encore sur les privilèges de l’ordre nouveau dans lequel la grâce les a introduits. Il rappelle le thème central de l’Épître : rendre « à Dieu un culte qui lui soit agréable, avec piété et avec crainte » (12.28).
L’auteur encourage d’abord ses lecteurs à persévérer dans une vie sainte (13. 1-6). Il évoque ensuite le sacrifice de Christ et en tire des enseignements pour la vie chrétienne et plus spécialement pour le culte (13.7-19). Enfin, il prononce une bénédiction et conclut par des salutations (13.20-25).
Persévérez dans l’amour, la fidélité et la foi ! (13.1-6)
Trois injonctions brèves introduites par « que » (13.1,4,5, TOB, Darby) présentent la nécessité de poursuivre la paix avec tous et la sanctification personnelle.
L’amour fraternel (13.1-3)
– L’amour fraternel accueille celui qui est dans le besoin. Cet acte d’hospitalité, habituel dans l’Antiquité, peut prendre une dimension qui échappe à l’hôte qui, sans le savoir, loge peut-être des anges (par ex., Genèse 18 et 19). Sans aller jusque-là, la présence de croyants a souvent été en bénédiction pour le foyer qui les recevait. Pour autant, l’hospitalité ne relève pas du principe de réciprocité, aujourd’hui en vogue, appelé le « donnant-donnant ». Elle est motivée par le désir d’honorer Dieu et de partager ce qu’il nous a donné avec le prochain.
– L’amour fraternel montre de la sympathie envers les prisonniers. Peu nourris, maltraités physiquement, ils ne pouvaient survivre sans secours matériel, affectif et spirituel. Les Hébreux sont encouragés à persévérer dans ce service (cf. 10.34).
D’une manière très générale, le Seigneur se préoccupe des besoins des humains et l’auteur de l’Épître rappelle que nous sommes appelés à « aimer Dieu et le prochain », l’un ne pouvant aller sans l’autre. Nous avons une responsabilité particulière envers toute personne en situation de fragilité : les veuves, les orphelins, les prisonniers, les étrangers, les exclus… Un langage que les destinataires de l’Épître, familiers de l’Ancien Testament, comprenaient facilement.
La fidélité dans le mariage (13.4)
Elle n’est pas une option. Dans le monde gréco-romain, la fidélité était considérée comme déraisonnable et injustifiée. Chez les Juifs, le statut de la femme restait fragile, souvent lié à sa capacité à assurer la descendance. L’auteur invite les conjoints à un attachement exclusif qui construit une barrière autour des époux, mais détruit toutes les barrières qui se dresseraient entre eux.
La confiance en Dieu (13.5-6)
Elle se traduit par le contentement. Les richesses sont passagères et Dieu ne peut abandonner les siens (citation du Ps 118.6).
Le sacrifice de Christ (13.7-19)
L’unité interne de ce paragraphe n’est pas évidente au premier abord tant les sujets évoqués semblent disparates : le souvenir des conducteurs, les doctrines étrangères, les rites alimentaires, la foi, la louange, la bienfaisance, l’obéissance. Pourtant, tout ce paragraphe s’ordonne autour d’un point central (voir schéma)1 : le sacrifice de Christ « hors de la porte » (13.12).
A 7 Souvenez-vous de vos conducteurs qui vous ont annoncé la parole de Dieu ; considérez quelle a été la fin de leur vie, et imitez leur foi. B 8 Jésus-Christ est le même hier, aujourd’hui, et éternellement. 9 Ne vous laissez pas entraîner par des doctrines diverses et étrangères ; car il est bon que le cœur soit affermi par la grâce, et non par des aliments qui n’ont servi à rien à ceux qui s’y sont attachés. C 10 Nous avons un autel dont ceux qui font le service au tabernacle n’ont pas le droit de manger. D 11 Les corps des animaux, dont le sang est porté dans le sanctuaire par le souverain sacrificateur pour le péché, sont brûlés hors du camp. E 12 C’est pour cela que JESUS D’ aussi, afin de sanctifier le peuple par son propre sang, a souffert hors de la porte. 13 Sortons donc pour aller à lui, hors du camp, en portant son opprobre. B’ 14 Car nous n’avons point ici-bas de cité permanente, mais nous cherchons celle qui est à venir. C’ 15 Par lui, offrons sans cesse à Dieu un sacrifice de louange, c’est-à-dire le fruit de lèvres qui confessent son nom. 16 Et n’oubliez pas la bienfaisance et la libéralité, car c’est à de tels sacrifices que Dieu prend plaisir. A’ Obéissez à vos conducteurs et ayez pour eux de la déférence, car ils veillent sur vos âmes dont ils devront rendre compte ; qu’il en soit ainsi, afin qu’ils le fassent avec joie, et non en gémissant, ce qui ne vous serait d’aucun avantage. 18 Priez pour nous ; car nous croyons avoir une bonne conscience, voulant en toutes choses bien nous conduire. 19 C’est avec instance que je vous demande de le faire, afin que je vous sois rendu plus tôt. |
L’auteur de l’Épître en tire les conséquences pratiques : participer à ce sacrifice exige du chrétien qu’il sorte du camp (13.13). Associé à Christ, il ne peut retourner à la foi juive traditionnelle. En même temps, il est encouragé à entrer dans une compréhension plus complète de l’œuvre de Christ et à rendre un culte agréable à Dieu.
Accorder de l’importance aux aliments (13.9), se préoccuper uniquement de pureté rituelle, n’est pas conciliable avec la foi des premiers conducteurs (13.7), avec l’œuvre de Christ (13.12-13), avec l’obéissance aux dirigeants actuels (13.17).
« La fausse conception, formaliste, se cristallise autour de la question des aliments ; elle menace la foi et sape l’union des chrétiens. La vraie conception, au contraire, est celle qui tend à mettre la vie même, dans toute sa profondeur personnelle et toute son extension sociale, sous la mouvance de la grâce. […] Il y a séparation entre les chrétiens et ceux qui rendent le culte du tabernacle (v. 10) ; la raison s’en trouve dans la nature du sacrifice de Jésus (v. 11-12), auquel les chrétiens ont à participer (v. 10 et 13) ; elle s’en trouve aussi dans l’aboutissement de ce sacrifice qui donne aux chrétiens une orientation future (v. 14). »2
Ayant présenté les différences fondamentales entre les deux systèmes, l’auteur résume pour les croyants hébreux la nature du vrai culte fait de louanges envers Dieu (13.15) et d’actes d’amour envers le prochain (13.16). Un culte offert « par lui » (13.15a), « sans cesse » (13.15a), sans oublier « la bienfaisance » (13.16) qui se matérialise, entre autres, le dimanche par la collecte.
Ce culte chrétien — une vie de foi sous la grâce — facilite les relations interpersonnelles. Le respect des conducteurs, la soumission heureuse à leurs décisions, permettent l’harmonie de la communauté (13.17). Enfin, l’auteur invite clairement les fidèles à prier pour lui (13.18-19).
Bénédiction finale et salutations (13.20-25)
Avant de terminer ses « paroles d’exhortation » (13.22), l’auteur résume son message en deux points :
– l’œuvre de Christ, fondement de la nouvelle alliance,
– l’œuvre de Dieu en nous « pour faire sa volonté ».
Il invoque le « Dieu de paix » (13.20), un titre qui convient bien à des chrétiens vivant dans un environnement hostile. Victimes de persécutions à l’extérieur, de risques d’apostasie à l’intérieur, les Hébreux sont ainsi encouragés à voir en Christ le « bon berger », le « Berger d’Israël » annoncé dans les Psaumes (Ps 80.1 ; 79.13).
La référence explicite à la résurrection de Christ reprend le thème essentiel de l’Épître : l’aboutissement céleste de l’œuvre de Christ. L’alliance, scellée par son sang, est « éternelle » (13.20), en écho au « salut éternel » (5.9), à la « rédemption éternelle » (9.12) et à « l’héritage éternel » (9.15).
Au verset 21, l’auteur forme le souhait que Dieu réalise sa volonté dans les croyants. Il conclut par une doxologie solennelle à la gloire du Seigneur Jésus.
Les versets 22 à 25 prennent la forme d’une courte adjonction, un peu à la manière d’un « post-it » qu’on joindrait aujourd’hui à une lettre.
* * *
Aimer ses frères, honorer son mariage, obéir à ses conducteurs, rendre culte à Dieu — si notre lecture de l’Épître aux Hébreux nous amène à vivre davantage ces vertus chrétiennes pratiques développées dans ce chapitre final, cette « parole d’exhortation » n’aura pas été vaine pour nous.
1 Ce schéma est repris de A. Vanhoye, La structure littéraire de l’Épître aux Hébreux, DDB, Paris 1963. Les mots en gras permettent de mettre en évidence les correspondances.
2 A. Vanhoye, op. cit., p. 215, 213.
24 Car Christ n’est pas entré dans un sanctuaire fait de main d’homme, en imitation du véritable, mais il est entré dans le ciel même, afin de comparaître maintenant pour nous devant la face de Dieu. 25 Et ce n’est pas pour s’offrir lui-même plusieurs fois qu’il y est entré, comme le souverain sacrificateur entre chaque année dans le sanctuaire mais pour offrir un autre sang que le sien ; 26 autrement, il aurait fallu qu’il ait souffert plusieurs fois depuis la création du monde; mais maintenant, à la fin des siècles, il a paru une seule fois pour effacer le péché par son sacrifice. 27 Et comme il est réservé aux hommes de mourir une seule fois, après quoi vient le jugement, 28 de même Christ, qui s’est offert une seule fois pour porter les péchés de beaucoup d’hommes, apparaîtra sans péché une seconde fois à ceux qui l’attendent pour leur salut. (Hébreux 9.24-28) |
Lorsqu’on évoque l’avènement de Christ, on pense plus naturellement à son retour en gloire. Or le dernier verset d’Hébreux 9 souligne la dualité de l’avènement de Jésus : il est venu et il reviendra. Entre les deux avènements, il y a des ressemblances et des différences, dont nous allons exposer brièvement la portée pour nous.
Des différences
Une venue pour les péchés et une venue sans péché
L’auteur de l’Épître aux Hébreux met l’accent sur le contraste entre la première venue de Christ « pour les péchés » et sa seconde venue, « sans péché ».
• Le premier avènement a eu comme objet principal, sinon unique, le traitement du problème du péché. L’ange l’avait d’ailleurs expliqué dès la communication du nom que le Sauveur devait porter : « Tu lui donneras le nom de Jésus ; c’est lui qui sauvera son peuple de ses péchés. » (Mat 1.21) Le péché, d’après l’attestation scripturaire constante, est le problème entre Dieu et les hommes, entre les hommes entre eux et à l’intérieur de la propre nature des hommes. Le péché est le détournement dont nous nous sommes rendus coupables à l’égard de Dieu en lui refusant la reconnaissance (dans son double sens de gratitude et de confession) de sa souveraine bonté. Or notre tendance spontanée est d’esquiver le péché et de reporter sur quelque autre facteur la causalité de ce qui ne va pas dans notre monde et en nous-même. Nous cherchons de fausses excuses et écartons la pointe de l’accusation. Cette tendance apparaît dès l’aube de l’histoire humaine et elle est toujours vivace. Il me semble que notre culture contemporaine accroît encore la force de cette tentation.
Le péché est donc la réalité qu’il fallait traiter en priorité pour que la situation de l’humanité par rapport à Dieu puisse être améliorée. L’heure pour laquelle Christ est déjà venu est celle de la croix, la croix sur laquelle il a ôté le péché du monde. Les Évangiles sont en quelque sorte des préfaces pour le récit de la croix qui y tient une place majeure, tout à fait à l’opposé des traditions littéraires des biographies de l’Antiquité. Et cela parce que Jésus-Christ est venu « pour le péché ».
Une grave dérive menace la foi évangélique lorsque le péché, avec la solution apportée par la croix à ce problème, cesse d’être au centre de la prédication. Si l’exemple de Jésus-Christ est mis avant son œuvre pour nous, si l’incarnation devient plus centrale que l’expiation, ce n’est déjà plus tout à fait la bonne nouvelle qui retentit ; la dérive est indubitable. C’est comme si le problème majeur était la différence entre la nature divine et la nature humaine, la distance entre le ciel et la terre. Or cette distance existait déjà en Éden, dans l’harmonie du premier rapport que Dieu avait institué par sa création ; ce n’était pas et ce n’est pas en soi un problème. Le vrai problème est le mésusage et l’abus de sa liberté qu’a fait la créature : le péché.
• Le second avènement sera « sans péché » (litt.). Cette mention signifie d’abord la pleine et définitive efficacité de la croix. C’est « une fois pour toutes » que Jésus-Christ a porté les péchés. « Tout est accompli » à cet égard, comme il l’a crié lui-même. Et s’il revient « sans péché » (9.28), c’est qu’il n’y a plus de problème du péché à résoudre. Il y a apporté, en donnant sa vie, en versant son sang, une solution définitive, sans besoin d’aucun complément ou d’aucune répétition. Le mal est déjà totalement vaincu. Le second avènement inaugurera la manifestation de cette victoire déjà acquise. Il sera possible à ce moment-là de voir toute la portée de la croix, qui a commencé à être mise en évidence par la résurrection et qui continue de l’être dans la vie de ceux qui reçoivent l’Esprit du Ressuscité. Mais la pleine élimination du mal — nous le savons assez ! — doit attendre le second avènement.
Il me semble que ce que l’Écriture nous révèle — si solennellement que nous ne pouvons pas l’atténuer — du châtiment éternel qui attend ceux qui se seront fermés à cette bonne nouvelle, doit être compris d’une façon qui respecte la plénitude de la victoire remportée lors de la première venue de Jésus-Christ. Rien ne soutient, dans l’Écriture, l’idée, devenue assez commune, que les réprouvés grinceraient des dents contre Dieu, qu’ils persisteraient ainsi dans la révolte et la porteraient au paroxysme. Au contraire, le temps de la patience passé (cette tolérance inouïe de Dieu), ils ne peuvent plus narguer le Seigneur par qui seul ils ont l’être, ils ne peuvent plus pécher. En subissant leur jugement, ils satisfont la justice divine — qu’ils reconnaissent désormais, comme l’enseignent Phil 2.11 et Col 1.20 (où la « réconciliation » ne signifie pas le salut mais la remise en ordre pacifiée : la fin de la guerre par la totale victoire de Dieu). Le grincement des dents doit sans doute être compris du remords total qui est le leur1.
Une venue en faiblesse et une venue en puissance
• À cause de sa mission d’Agneau de Dieu portant les péchés du monde, Jésus-Christ est venu en faiblesse, dans la misère. Il a renoncé à faire usage contre ses ennemis de sa puissance royale. Il s’est abstenu d’engager les légions d’anges qui étaient à sa disposition pour sortir du mauvais pas (Mat 26.54). Jésus a choisi la voie de la pauvreté ; il est venu pour servir et donner sa vie.
• Mais sa seconde venue sera dans sa gloire. L’éclat de son avènement foudroiera l’adversaire : « Le Seigneur Jésus apparaîtra du ciel avec les anges de sa puissance, au milieu d’une flamme de feu, pour punir ceux qui ne connaissent pas Dieu et ceux qui n’obéissent pas à l’Évangile de notre Seigneur Jésus. » (2 Th 1.7-8) « Il les paîtra avec une verge de fer, comme on brise les vases d’argile. » (Apoc 2.27)
À cause de la forme qu’a prise la première mission de Jésus-Christ, certains s’imaginent qu’il faut renverser le concept de pouvoir. Comme ce concept n’est pas bien reçu parmi les intellectuels de notre génération, ils saisissent l’occasion de suggérer que l’humilité de Jésus lors de sa première venue représente un refus du pouvoir comme tel. Or la lecture de l’ensemble du N.T. ne soutient pas cette vue. Si Jésus-Christ est venu dans la faiblesse, non pas pour juger le monde mais pour que le monde soit sauvé par lui (Jean 3.17), sans faire usage de sa force, c’était la sagesse mystérieuse et cachée du Seigneur pour l’expiation des péchés. Après cela, il a dit : « Tout pouvoir m’a été donné dans le ciel et sur la terre. » (Mat 28.18) Et il exercera ce pouvoir lors du second avènement. Son exercice sera un service, car il usera de sa force pour le bien. Mais ce n’est pas un changement du concept : c’est une voie mystérieuse, unique, que la sagesse inouïe de Dieu a conçue pour que le mal commis envers le Saint et le Juste soit la victoire même sur le mal.
Une venue voilée et une venue visible
• Une autre différence concerne la façon dont il « apparaîtra » (litt. « sera vu »). Certes Jésus a bien été vu par ses contemporains lorsqu’il a prêché aux foules, guéri des malades, circulé sur les routes de Galilée… Mais son humilité même, sa chair faible, ont été comme un voile pour la plupart de ses contemporains — et même une occasion de chute. De sorte qu’ils n’ont pas vu qui il était réellement.
• En contraste, lors du second avènement, il « sera vu » dans sa gloire de Fils de Dieu, Seigneur des seigneurs et Roi des rois. Il sera vu, là où il n’avait été qu’entrevu par certains à qui cela avait été donné. « Ce ne sont pas la chair et le sang qui t’ont révélé cela, mais c’est mon Père qui est dans les cieux », a dit Jésus à Pierre quand ce dernier a eu l’intuition juste de la véritable identité de Jésus (Mat 16.17). La plupart se sont achoppés à l’apparence. Nous-mêmes le voyons par le regard de la foi, mais cette vue est à travers bien des brumes et des obscurités. Nous l’aimons quand même, sans l’avoir vu (1 Pi 1.8). La foi n’est pas encore la vue. Le second avènement sera enfin la vision vers laquelle nous languissons : « Nous le verrons tel qu’il est » dans sa gloire (1 Jean 3.2). « Tout œil le verra » (Apoc 1.7) mais Hébreux souligne qu’il sera vu en particulier de ceux qui l’attendent pour leur salut, qui ne l’auront jusque là qu’entrevu par la foi et qui seront comblés par la vision qui leur sera accordée. C’est là notre espérance. Un chant d’enfant dit : « Je sais qu’un jour mes yeux verront Jésus ». Un brave chrétien se trompait et chantait : « Je sais qu’un jour mes yeux verra Jésus ». Sans le vouloir, il énonçait une profonde vérité : « Jésus verra nos yeux. » Non seulement nous le verrons de nos yeux, mais lui aussi plongera son regard dans nos yeux à nous et nous dira peut-être, comme Pascal l’imaginait : « J’ai versé telles gouttes de sang pour toi. »<sup<2
Des ressemblances
Au-delà des différences entre les deux avènements, il y a aussi des ressemblances qui méritent d’être soulignées.
Deux venues personnelles
Jésus est venu dans notre temps et dans notre espace, comme un individu humain, avec un corps. Il reviendra comme un individu humain. Notre espérance est l’attente d’une venue corporelle et personnelle de Christ.
Ne réinterprétons pas ce qui est dit du futur avènement comme un symbole réconfortant qui pourrait orienter la vie, mais qui n’aurait pas de réalité littérale. Son retour n’est pas un mythe, une figure de style : c’est celui de l’homme Jésus.
Deux venues au temps fixé par le Père
La première venue de Christ a eu lieu à un moment bien défini de l’histoire. Les promesses se sont accomplies selon le calendrier de Dieu. Son second avènement aura lieu à un moment tout aussi défini, que Jésus, dans les jours de son humiliation, a déclaré ne pas connaître lui-même (Mat 24.36).
Hébreux 10.38 interprète les versets d’Habakuk2 en marquant un temps fixé : « Encore un peu, un peu de temps : celui qui doit venir viendra, et il ne tardera pas. » La vision se réalisera finalement par l’avènement de Jésus3. Nous devons attendre ce temps fixé avec la patience et la persévérance de la foi (« le juste vivra par la foi »), même s’il paraît tarder.
Il en fut de même pour le premier avènement. Certaines prophéties pouvaient laisser penser que la venue du Messie aurait lieu beaucoup plus tôt : par exemple, à la lecture d’Ésaïe 40 à 66, il ne semble pas que les deux serviteurs de l’Éternel — Cyrus et le vrai Serviteur qui va libérer spirituellement le peuple — soient séparés par plus de cinq siècles ! Au calendrier de Dieu, il y avait là un espace de temps qui n’était pas spécifiquement indiqué dans les prophéties d’Ésaïe. Il faut attendre Daniel 9 pour le comprendre. Ceux qui attendaient le Messie ont donc dû patienter, rester fermes dans la foi.
Plusieurs paraboles du Seigneur avertissent que le laps de temps entre les deux avènements pourra paraître long. Pierre parle de « moqueurs » qui railleront ce délai. Après presque 2000 ans, nous constatons la nécessité de la patience. La victoire est acquise ; nous avons une pleine assurance de cette seconde venue « sans péché », mais nous ne maîtrisons pas le calendrier. Nous avons à nous placer dans la même attitude que ces croyants qui, sur la base des promesses de l’A.T. attendaient le Messie.
Dans ce temps de patience, des « signes » nous sont donnés. Ils ont commencé à être visibles dès la génération du ier siècle : « Cette génération ne passera point, que tout cela n’ait commencé à arriver. »4 (Mat 24.36) Ces signaux révèlent que notre vieux monde n’est qu’en sursis ; ils nous encouragent dans l’attente, sans nous fixer de date précise. Sans doute les verra-t-on s’intensifier au moment final ; mais il serait illusoire de prétendre connaître « le jour et l’heure ». Attendons avec confiance, en recevant les signes qui nous sont nécessaires pour faire face à l’adversité.
Le second avènement est proche et, comme les Juifs pieux qui attendaient « la consolation d’Israël » et vivaient d’une façon intègre, soyons de ceux qui attendent la venue glorieuse de notre Seigneur et Maître qui nous regardera avec amour face à face.
1 Pour bien entendre ce message de la fin du péché, je crois approprié de l’associer à un autre trait du châtiment éternel : la fixité de cette forme d’existence, selon qu’elle est seconde mort. 2 Blaise Pascal, Pensées, 553. 3 La vision qui doit venir chez Habakuk est interprétée par l’auteur d’Hébreux comme la venue d’une personne : « celui ». 4 Traduction littérale de l’aoriste ingressif du verbe « arriver ».
- Pour bien entendre ce message de la fin du péché, je crois approprié de l’associer à un autre trait du châtiment éternel : la fixité de cette forme d’existence, selon qu’elle est seconde mort.
- Blaise Pascal, « Pensées », 553.
- La vision qui doit venir chez Habakuk est interprétée par l’auteur d’Hébreux comme la venue d’une personne : « celui ».
- Traduction littérale de l’aoriste ingressif du verbe « arriver ».
1 Craignons donc, tandis que la promesse d’entrer dans son repos subsiste encore, qu’aucun de vous ne paraisse être venu trop tard. 2 Car cette bonne nouvelle nous a été annoncée aussi bien qu’à eux ; mais la parole qui leur fut annoncée ne leur servit de rien, parce qu’elle ne trouva pas de la foi chez ceux qui l’entendirent. 3 Pour nous qui avons cru, nous entrons dans le repos, selon qu’il dit : Je jurai dans ma colère : Ils n’entreront pas dans mon repos ! Il dit cela, quoique ses œuvres aient été achevées depuis la création du monde. 4 Car il a parlé quelque part ainsi du septième jour : Et Dieu se reposa de toutes ses œuvres le septième jour. 5 Et ici encore : Ils n’entreront pas dans mon repos ! 6 Or, puisqu’il est encore réservé à quelques-uns d’y entrer, et que ceux à qui d’abord la promesse a été faite n’y sont pas entrés à cause de leur désobéissance, 7 Dieu fixe de nouveau un jour — aujourd’hui — en disant dans David bien longtemps après, comme il est dit plus haut : Aujourd’hui, si vous entendez sa voix, n’endurcissez pas vos cœurs. 8 Car, si Josué leur avait donné le repos, Dieu ne parlerait pas après cela d’un autre jour. 9 Il y a donc un repos de sabbat réservé au peuple de Dieu. 10 Car celui qui entre dans le repos de Dieu se repose de ses œuvres, comme Dieu s’est reposé des siennes.11 Empressons-nous donc d’entrer dans ce repos, afin que personne ne tombe en donnant le même exemple de désobéissance. |
Cette portion de l’Épître aux Hébreux nous présente le repos sous divers aspects et nous indique comment y entrer. Ce texte est complexe ; aussi traiterons-nous ces « repos » de façon thématique, sans suivre l’ordre précis des versets.
1. Le repos initial de Dieu
Dieu s’est reposé lorsqu’il a constaté la perfection de la création (4.3,10). Après avoir achevé son œuvre, le septième jour de la création, Dieu, pleinement satisfait, s’est reposé. Ainsi, dès le début, il a montré qu’il avait un repos à lui : « mon repos ». Non un repos solitaire, mais un contentement qu’il désirait partager avec l’homme, en pleine communion avec sa créature. Or, très rapidement, le péché d’Adam a troublé ce projet. Le contexte montre que la séduction du péché (3.13), l’incrédulité (4.2) et la désobéissance (4.6), barrent l’accès au repos de Dieu.
Après l’intrusion du péché, Dieu résolut d’entreprendre de nouvelles œuvres afin d’établir un nouveau repos pour les habitants de la terre. Sans remettre en cause le repos lié à la perfection initiale de la première création, Dieu œuvre donc pour susciter une nouvelle création : « Mon Père travaille jusqu’à maintenant, et moi je travaille. » (Jean 5.17, Darby) Il le fait jusqu’à ce qu’il puisse inaugurer un repos sabbatique définitif.
2. Le repos historique pour Israël en Canaan
Dieu avait délivré son peuple de l’esclavage de l’Égypte, mais malgré les bons conducteurs choisis pour l’amener dans le repos, les Israélites furent nombreux à tomber dans le désert à cause de leur incrédulité, comme le prouvent ces paroles répétées : « Ils n’entreront pas dans mon repos ! »
Moïse, représentant de la loi, n’avait pu faire entrer le peuple en Canaan. Josué, au contraire, représentant de la grâce, l’y introduisit. Le pays promis offrait au peuple d’Israël une forme de repos, mais ce repos était incomplet (4.6) : les Israélites adultes sortis d’Égypte étaient tous morts dans le désert et seuls Caleb et Josué, hommes de foi, avaient pu entrer dans le pays promis. Ce repos était aussi imparfait (4.8) : la conquête du pays promis n’ayant pas été complète, de nombreux ennemis y subsistaient (Jug 1 ; 2). Au cours de son histoire, Israël a toujours dû batailler contre ses ennemis et s’est maintes fois détourné de Dieu. C’est ainsi que le repos d’Israël en Canaan n’offrit jamais qu’une pâle image du repos définitif de Dieu.
C’est pourquoi l’auteur de l’Épître aux Hébreux cite le Psaume 95, écrit par David environ 500 ans après l’introduction du peuple en Canaan sous Josué. Le « aujourd’hui » prononcé sous David prouve que le repos sous Josué n’a pas été définitif (4.7) et que Dieu a encore « aujourd’hui » un repos en réserve.
3. Le repos actuel et futur pour le croyant
Cet « aujourd’hui » sous David se prolonge jusqu’à maintenant : Dieu a déterminé un nouveau « jour », où les croyants peuvent et pourront entrer dans le repos. Ce dernier prend plusieurs formes.
a. Le repos de la conscience
Le repos de la conscience est obtenu par le sang de Christ à la croix. Ce sang délivre de la malédiction de la loi, du poids du péché et procure la paix avec Dieu. « Nous qui avons cru, nous entrons dans le repos » (4.3), ce repos qui découle de la foi en l’œuvre de Jésus à la croix. Mais ce n’est pas le seul repos dont il est question pour nous dans ce chapitre.
b. Le repos du cœur
Le repos du cœur est donné à ceux qui marchent dans la soumission à la volonté de Dieu, comme l’indique Jésus lui-même : « Prenez mon joug sur vous et recevez mes instructions, car je suis doux et humble de cœur ; et vous trouverez le repos pour vos âmes. Car mon joug est doux, et mon fardeau léger. » (Mat 11.29-30) La paix de Dieu est liée à la foi que l’auteur de l’Épître nous invite à mettre en œuvre tout au long de notre chemin vers le ciel. Mais il y a encore un autre repos.
c. Le repos sabbatique futur
Ce « repos de sabbat » est le repos futur, éternel, dans la gloire à venir. L’auteur le rapproche du repos du septième jour de la création, mais il ne sera pleinement acquis que dans une période future, celle de l’aboutissement du plan de Dieu pour l’homme qui pourra enfin goûter « son » repos — c’est-à-dire le repos définitif de Dieu, dans la joie de son plan parfaitement accompli et la mise à l’écart de ses ennemis définitivement vaincus. Nous, les croyants, allons y entrer pour nous reposer de toutes nos luttes, de toutes nos tentations, de toutes nos douleurs (4.10). Ce repos sera l’aboutissement de notre chemin.
d. Entrons dans le repos !
Le repos dont il est question dans ce chapitre est donc à la fois un repos acquis et un repos à poursuivre. Nous y entrons (4.3 — verbe à l’indicatif), et nous sommes exhortés à y entrer plus avant : « Empressons-nous donc d’entrer dans ce repos » (4.11 — verbe à l’impératif). Le repos est déjà notre part, mais pas encore pleinement nôtre.
Nous y sommes d’autant plus exhortés que l’exemple des désobéissants d’autrefois montre que tous ne l’atteignent pas (4.11b).
Pour entrer dans ce repos de Dieu, il faut marcher dans le chemin du Seigneur en accomplissant la volonté de Dieu, ce qui demande la mise de côté du « moi », le brisement de la propre volonté insoumise à Dieu. Cela demande aussi l’énergie fournie par l’espérance vivante d’être avec Christ dans le ciel. La foi s’empare des promesses de Dieu. Notre confiance est en Jésus, que nous n’avons qu’à suivre pour arriver à bon port, comme autrefois Israël devait suivre Josué. « Empressons-nous » de nous attacher à lui. Imitons ceux qui, par leur persévérance, ont hérité les promesses (6.12). Ne nous laissons pas décourager par ceux qui perdent espoir au milieu des difficultés, faute de foi (4.2). Alors nous pourrons déjà jouir, sans attendre le ciel, de la paix intérieure, prémices de ce repos.
4. Les trois ressources pour un vrai repos
Pour nous aider à entrer dans le repos, l’auteur place devant nous trois grandes ressources indispensables à notre voyage sur terre :
1. La parole de Dieu (4.12-13) : Elle nous aide à faire le point sur ce qui nous encombre et nous empêche d’avancer joyeusement vers le repos promis. Se placer dans la pleine lumière divine est une sécurité et un apaisement pour le croyant.
2. Le souverain sacrificateur (4.14-15) : La prêtrise de Christ nous aide à surmonter les difficultés de la vie sur terre que redoute notre faiblesse naturelle, et à offrir une louange digne de Dieu. Pour nous comprendre, Christ a pris part expérimentalement aux épreuves liées à la condition humaine sur terre. Ces tentations1 sont de deux ordres : les unes proviennent de nos limites physiques face aux obstacles placés sur notre route ; les autres sont liées aux sollicitations de Satan qui voudrait nous empêcher d’avancer vers le repos de la foi et nous faire douter de la fidélité de Dieu. Jésus a connu les unes et les autres (sans jamais pécher) et nous aide à les traverser.
3. Le trône de la grâce (4.16) : En nous approchant de ce trône, nous apprenons à connaître le cœur compatissant de Jésus. Nous y venons pour apporter à Dieu par lui nos chagrins, nos soucis, nos inquiétudes et attendons paisiblement le secours qu’il nous donnera, selon sa sagesse parfaite et son amour. Ainsi notre cœur entre dans le repos dès lors que nous lui remettons tout ce qui nous pèse.
1 Le même mot peut être traduit par « épreuve » ou par « tentation ».
« Fortifiez donc vos mains languissantes et vos genoux affaiblis. » (12.12) L’auteur veut raffermir la reconnaissance et la foi de judéo-chrétiens persécutés et tentés de délaisser le culte pour retourner à la première alliance. Celle-ci a été promulguée par les prophètes et — dans la tradition juive — par les anges. L’auteur va donc montrer la supériorité de Christ sur la première alliance, sur les prophètes et sur les anges.
Dieu a parlé deux fois (1.1-2)
Les auditeurs doivent rediriger leur foi dans la bonne direction. Or, la foi dépend de la considération portée à la révélation divine (Rom 10.17). C’est donc sur le contraste entre deux façons de la considérer que l’auteur commence. Il souligne le contraste entre la première révélation et la nouvelle, celle-ci étant, tout comme l’alliance, « plus excellente » (8.6).
Inachèvement de la première révélation (1.1)
Après avoir autrefois, à plusieurs reprises et de plusieurs manières, parlé à nos pères par les prophètes […]
Voici quelques caractéristiques de la première phase de la révélation divine :
• La première est close depuis longtemps (« autrefois ») : le dernier prophète en fut Malachie, plus de quatre siècles auparavant.
• La première est progressive (« à plusieurs reprises ») : Dieu l’a développée sur plusieurs siècles.
• La première est diverse (« de plusieurs manières ») : Dieu a employé plusieurs modes de communication pour transmettre la richesse de sa Parole (création, déluge, promesse à Abraham, prophéties, récompenses et punitions, sacrifices, etc.).
• La première était donnée essentiellement aux Juifs (« à nos pères »).
• La première a été communiquée par des intermédiaires (« par les prophètes »).
Perfection de la révélation par le Fils (1.2a)
Dieu, dans ces derniers temps, nous a parlé par le Fils […].
• La nouvelle révélation dans le Fils est ouverte. L’expression « ces derniers temps » se réfère à la présente époque ouverte depuis l’Ascension et qui s’achèvera avec la seconde venue de Jésus.
• La nouvelle s’adresse à l’humanité. Le « nous » englobe Juifs et Gentils (Éph 2).
• La nouvelle révélation est communiquée par le Fils. Cette seule affirmation contraste avec ce qui vient d’être dit dans le paragraphe précédent : – non pas sur plusieurs siècles, puisqu’en trois années de ministère, – non pas de plusieurs manières, puisque par un canal unique, – non pas par plusieurs hommes (les prophètes), mais par un seul, – non par des hommes créés ou de simples intermédiaires, mais par un homme bien particulier : un « Fils ». L’original n’emploie pas l’article, comme pour indiquer là un statut et l’opposer au statut de prophète : il ne sera pas prophète mais fils. La suite du chapitre développe ce statut à part.
« Fils » : plus que « prophète » (1.2)
Il l’a établi héritier de toutes choses ; par lui il a aussi créé l’univers.
L’auteur s’applique à montrer qu’être Fils est supérieur à être prophète. Tandis que le prophète parle au nom de Dieu et qu’il est lui-même créé, le Fils, lui, parle avec autorité car « la maison » lui appartient.
1. Héritier
Être fils, c’est être « héritier de toutes choses ». Tout lui appartient, c’est-à-dire qu’il est souverain et contrôle toute chose et tout événement (2.7-8 ; cf. Ps 2.8 ; Phil 2.9-11).
Un prophète ne domine pas tout : il a pu subir à contrecœur les incompréhensions, l’hostilité et les méfaits de ses compatriotes. Le Fils est venu dans ce monde en sachant ce qui l’attendait. Lorsque nous méditons sa « passion », rappelons-nous qu’il avait prévu la croix et choisi de ne pas se défendre afin que s’accomplissent les Écritures qu’il avait inspirées. Une étude des textes de la passion montrera qu’il a lui-même provoqué la réaction en chaîne des événements. Il a bel et bien le contrôle de tout, même quand tout semble lui échapper ; la victoire sur la croix le prouve.
2. Agent créateur
C’est par lui que Dieu a « créé l’univers » (voir le parallèle en Col 1.15-17). Dieu a parlé par des prophètes mais il n’a pas créé le monde par eux.
Ces deux caractères décrivent la relation filiale, vue du Père. La suite la décrit, vue du Fils.
« Fils » : révélateur et révélation de Dieu (1.3)
Il est le rayonnement de sa gloire et l’empreinte de son être. Il soutient toutes choses par la parole de sa puissance. Après avoir fait la purification des péchés, il s’est assis à la droite de la Majesté, dans les lieux élevés.
Ce verset produit, en première lecture, un sentiment merveilleux. Il entrouvre la porte d’un profond mystère. À partir de là, ce n’est plus « Dieu » le sujet mais « il », le Fils : le prédicateur change de ton. Il n’est plus question de mettre en contraste ancienne et nouvelle alliance, mais de dévoiler un peu plus la nature divine et le rôle salvateur du Fils.
1. Un « rayonnement » : Christ est le révélateur de Dieu
Le Fils est « le reflet de sa gloire » ou : « le rayon, le rayonnement ». Les scientifiques ont découvert qu’un rayon lumineux révèle une quantité d’informations incroyable sur des étoiles se trouvant à des milliers de milliards de kilomètres : composition chimique, âge, durée de vie, vitesse d’éloignement ou de rapprochement, etc. Quel exploit, quand on y pense ! Un monde objectivement inaccessible nous est ouvert et nous paraît moins lointain. Il en est ainsi du Fils : il accomplit l’exploit incomparable de mettre Dieu à notre portée. En effet, « Dieu est lumière » (Jean 1.5) dans sa gloire inabordable, lui qui « habite une lumière inaccessible, que nul homme n’a vu ni ne peut voir » (1 Tim 6.16). Or, « personne n’a jamais vu Dieu ; Dieu le Fils unique, qui est dans le sein du Père, est celui qui l’a fait connaître » (Jean 1.18). Ce Dieu objectivement transcendant, Jésus le rend accessible (4.16 ; 10.19-20 ; cf. aussi Rom 5.2 ; 1 Cor 16.9 ; Éph 2.18 ; 3.12). Il fait de notre Créateur lointain un Père proche et abordable (Rom 8.15-17 ; Gal 4.6-7).
Si la lumière révèle la nature et le mouvement de l’étoile lointaine, celle-ci n’en est cependant pas affectée le moins du monde : elle demeure à sa place, dans le ciel. De même, la révélation du Père par le Fils n’ôte rien au caractère glorieux et transcendant de Dieu. Dieu demeure dans son ciel de majesté. Le Père et le Fils partagent la même nature « lumineuse » tout en étant distincts l’un de l’autre.
Pas besoin d’avoir fait de hautes études pour saisir, en s’exposant à la lumière naturelle, que le soleil est « chaud » ! De même, à proximité de Christ, nous bénéficions de toute la « chaleur » bienfaisante de notre Père céleste : sa grâce, sa miséricorde, ses perfections, sa majesté, etc.
2. Une « empreinte » : Christ est la révélation de Dieu
L’image du rayonnement parle d’un Dieu rendu proche, mais ne fait pas tout à fait honneur au Fils lui-même. Un « reflet »… Pourquoi pas un fantôme ? Ce n’est pas une blague : certains hérétiques — les docétistes — affirment dès le ier siècle que le Christ possède un corps apparent, mais irréel. Faire de Christ une simple émanation de Dieu serait toutefois lui refuser la fatigue, la faim, la soif, et jusqu’à la mort. La résurrection n’aurait-elle donc pas tout à fait eu lieu ?
L’auteur n’en reste heureusement pas là. Il affirme que Christ est « l’empreinte » de Dieu : sa manifestation réelle sur terre. Plus encore, il est « l’empreinte de sa personne ». Le concept de personne est tardif ; le texte parle plutôt de « substance » (litt. : hypostase). Il désigne l’être de Dieu. Christ est donc véritablement Dieu en chair et en os, lui « que nos mains ont touché » (1 Jean 1.4).
Le mot « empreinte » se traduit aussi par « caractère ». Pensez au caractère d’imprimerie qui s’enfonce profondément pour marquer de son empreinte le papier encore vierge. C’est ainsi que le Fils montre les marques du Père.
Montrer les caractères du Père est aussi le plan de Dieu pour tous ses enfants. Et pour faire ressortir sa gloire, il doit parfois « frapper fort », en sorte que Paul dira : « Je porte en mon corps les marques de Jésus » (Gal 6.17) en parlant de ses persécutions (2 Tim 3.12). Dieu veut aussi marquer de son empreinte d’amour tous ses enfants, afin que sa gloire soit manifeste dans le monde : « À ceci tous connaîtront que vous êtes mes disciples, si vous avez de l’amour les uns pour les autres » (Jean 13.35 ; cf. Éph 5.1-2 ; 1 Jean 3.10). C’est le rôle de l’Esprit : transformer notre « caractère » à la ressemblance de Jésus (2 Cor 3.17), lui-même caractérisant le Père. Adam, créé à l’image de Dieu, a déformé celle-ci par le péché. Le second Adam, Christ, recrée en nous l’image de Dieu.
3. Le rôle salvateur du Fils
Ces deux attributs du Fils laissent place à trois actions qui résument son mandat : création soutenue, rédemption, glorification.
a. Création : « portant toutes choses par la parole de sa puissance »
Le Fils, Parole de Dieu, a créé le monde (1.2 ; Gen 1.1), mais il le préserve aussi de la destruction.
b. Rédemption : « après avoir fait la purification des péchés »
Dieu lui-même, venu en chair, a pourvu au salut (Rom 8.33 ; 1 Tim 3.16). La formulation décrit un souverain sacrificateur opérant le rite sacrificiel, ce que la suite de l’Épître développera.
c. Glorification : « assis à la droite de la Majesté »
Christ ne vit pas dans une gloire statique. Comme il soutient sa première création, il préserve aussi sa nouvelle création.
« Fils » : plus qu’« ange » (1.4-14)
Étant devenu d’autant plus excellent que les anges, qu’il a hérité d’un nom plus excellent que le leur.
« Les Juifs se glorifiaient d’avoir reçu la loi par le ministère des anges (2.2 ; cf. Actes 7.53 ; Gal 3.19). Il fallait montrer combien Christ était supérieur à ces intelligences célestes pour prouver la supériorité de la révélation dont il était le porteur (1.1). » (La Bible annotée) Ses auditeurs veulent retourner à la loi ? L’auteur montre que celle-ci avait prévu la supériorité de Christ sur les anges, d’où le grand nombre de prophéties messianiques pour appuyer ses dires.
• Contrairement aux anges, le Fils est considéré par Dieu comme son Fils, son égal (1.5, citant 2 Sam 7.14 et Ps 2.7).
• Même les anges doivent adoration au Fils (1.6, citant les Ps 89 et 97).
• Dieu ne s’adresse pas aux anges, ses serviteurs, comme il s’adresse au Fils l’appelant lui-même Dieu et roi, juste et bienheureux (1.7-9 citant les Ps 104 et 45).
• Dieu honore le Fils et souligne sa souveraineté sur sa propre création, sa divinité éternelle et sa royauté parfaite et juste (1.10-12 citant les Ps 102 et 104).
• Contrairement aux anges, Dieu a appelé son Fils à la royauté et à la sacrificature (1.13 citant Ps 110.1).
Le verset 14 conclut : contrairement au Fils, les anges n’occupent pas la place d’honneur dans le ciel, mais assument un rôle de serviteurs en faveur de ceux qui doivent hériter le salut.
Conclusion
Il a obtenu un ministère d’autant supérieur qu’il est le médiateur d’une alliance plus excellente, qui a été établie sur de meilleures promesses. En effet, si la première alliance avait été sans défaut, il n’aurait pas été question de la remplacer par une seconde. (8.6-7)
Le premier chapitre de l’Épître aux Hébreux frappe fort et dévoile une image majestueuse et incomparable de Christ dans sa personne (divine), dans son œuvre (créatrice et rédemptrice) et dans sa supériorité sur tous les saints anges. La nouvelle alliance ne pouvait bénéficier d’un meilleur fondement !
Le chapitre 2 équilibre cette présentation glorieuse du Fils avec l’humanité d’un Jésus compatissant et proche de nos faiblesses et de nos préoccupations. L’Épître peut alors développer en quoi il est un intercesseur plus excellent que les prêtres mosaïques.
Puisse cette Épître raffermir nos cœurs vacillants et nous encourager à suivre le modèle de nos pères dans la foi, ayant en vue la joie éternelle donnée à tous ceux qui auront persévéré.
Dans certaines lettres officielles, cette formule se mêle parfois aux salutations finales. Lorsque l’expéditeur est sincère, cette « considération » exprime un intérêt réel et respectueux envers le destinataire.
Dans l’Épître aux Hébreux, c’est plutôt l’auteur qui nous invite à considérer avec beaucoup d’attention, de respect et de foi le sujet principal de son message. Et l’auteur véritable, c’est Dieu. Comment nos contemporains réagiront-ils à cet appel ? Notre époque est celle de l’attention brève, du butinage de surface. En général, seuls l’intérêt immédiat et les divertissements captivent les cœurs… Mais soyons positifs : le Saint-Esprit peut réveiller les esprits.
« Considérez… » : à quatre reprises revient cet impératif dans la lettre aux Hébreux. Il correspond à quatre verbes grecs qui se complètent :
– 3.1 « Considérez… Jésus. » Le verbe original signifie (comme dans Luc 6.41) : observer soigneusement, percevoir, remarquer. Pour détecter le Jésus véritable parmi la foule des faux messies, des représentations issues de l’imagination plutôt que de la Révélation, il faut observer avec sérieux le portrait qu’en dresse le texte biblique.
– 7.4 « Considérez combien il est grand… [ce Melchisédek qui préfigure Jésus] » Le verbe original signifie : être spectateur. L’auteur de la lettre a un sujet sublime à nous exposer. Si nous aimons les spectacles grandioses, ne manquons pas celui-ci : il est à la dimension de Dieu même. Ce n’est pas de la poudre aux yeux.
– 12.3 « Considérez … celui qui a enduré de la part des pécheurs une telle opposition… » Le verbe original signifie : considérer avec attention, réfléchir. Si nous voulons nous pénétrer de l’exemple du Seigneur et comprendre ses souffrances, il s’agit de ne pas passer à la légère sur sa lutte corps et âme contre Satan et le péché. Notre capacité à persévérer dans le combat en dépend.
– 13.7 « Considérez l’issue [de la vie de ceux qui vous ont transmis l’Évangile] ». Le verbe original signifie : regarder attentivement. Le grand thème de l’épître est la suprématie de Christ, mais pour autant, il n’est pas inutile de méditer sur la vie de ceux qui ont vécu en fidèles porte-parole du divin Berger. Nous retiendrons de leur exemple qu’il est possible et désirable de croire en Christ jusqu’au bout du voyage.
L’Épître aux Hébreux tient une place à part dans le canon :
– C’est une lettre importante : Sans elle, il nous serait difficile de comprendre la portée et la pertinence actuelle d’une large partie de l’A.T., au premier chef le livre du Lévitique. Sans elle, nous ne connaîtrions pas aussi complètement le service actuel de Jésus dans la gloire en notre faveur.
– C’est néanmoins une lettre difficile : D’abord, les circonstances des destinataires (voir ci-dessous) sont très différentes des nôtres. Ensuite, les si nombreuses références à l’A.T., explicites ou implicites, nous échappent facilement, car nous sommes moins familiers avec ces textes que les premiers destinataires. Enfin, son art des enchaînements souples peut nous dérouter.
– C’est avant tout une lettre centrée sur Jésus : Aucune Épître du N.T. ne parle autant de lui ! Avec les Évangiles et l’Apocalypse (« révélation de Jésus-Christ »), elle fait partie des livres de la « bibliothèque divine » les plus directement christocentriques. L’Église, qui occupe une place importante dans plusieurs autres Épîtres, n’est presque pas mentionnée ici : Jésus est prédominant.
1. Auteur
L’Épître aux Hébreux est la seule du N.T. dont l’auteur est inconnu. Pour autant, ce n’est pas un écrit anonyme : si le nom du rédacteur nous est inconnu, il était connu des premiers destinataires (13.23).
Cet anonymat a fasciné les commentateurs depuis les premiers siècles. Des hypothèses multiples ont été avancées :
– L’auteur serait l’apôtre Paul. Il serait séduisant en effet d’avoir 14 lettres de sa plume (2 x 7) et non pas 13… La cohérence de la doctrine de l’Épître avec la doctrine paulinienne plaide en faveur de cette hypothèse. Cependant cette dernière doit être rejetée : le style est sensiblement différent, davantage qu’un simple changement de secrétaire pourrait le suggérer ; il n’y a pas de mention d’autorité apostolique (2.3-4) ; dès le canon de Muratori, Paul était écarté comme auteur de cette lettre ; enfin il est douteux que Paul puisse parler de Timothée dans les termes de 13.23.
– L’auteur serait un des proches de Paul. De nombreux noms ont été avancés, parmi lesquels les plus vraisemblables sont Apollos ou Silas1. Il s’agirait alors d’un Juif converti de la deuxième génération (2.3).
– L’Épître se charge elle-même de répondre à ces spéculations souvent oiseuses : l’auteur est Dieu (c’est lui qui parle, 1.1) et l’apôtre est Jésus-Christ (3.1). Ne sommes-nous pas parfois plus préoccupés par l’instrument humain, que sensibles au message qui vient de Dieu lui-même ?
2. Destinataires
Des questions ouvertes
Là encore, nous n’avons guère plus de précisions. La suscription « Aux Hébreux » apparaît à la fin du iie siècle, mais elle n’est pas inspirée.
– Il semble bien néanmoins que ce soit une lettre adressée à des judéo-chrétiens, car d’une part ils professent le christianisme, d’autre part ils connaissent bien le système judaïque.
– Il ne semble pas que ce soit une lettre circulaire, mais un message adressé à une église précise, dont les circonstances sont connues de l’auteur (13.18-19,23 ; 10.32-34 ; 6.10). Peut-être l’auteur s’adresse-t-il à un groupe particulier d’une grande église tenté de revenir au judaïsme, au risque de provoquer une scission (10.25).
– La localisation des destinataires n’est pas plus claire. L’expression « ceux d’Italie vous saluent » (13.24) est ambiguë.
Leurs caractéristiques morales et les parallèles à notre situation
– Des chrétiens pauvres : « Vous avez accepté avec joie l’enlèvement de vos biens, sachant que vous avez des biens meilleurs et qui durent toujours. » (10.34 ; cf. 13.5-6)
– Des chrétiens persécutés ou en danger de l’être : « [Pendant] ces premiers jours, vous avez soutenu un grand combat au milieu des souffrances, d’une part, exposés comme en spectacle aux opprobres et aux afflictions, et de l’autre, vous associant à ceux dont la position était la même. » (10.32-33) En abandonnant la foi juive (et son statut particulièrement favorable au sein de l’Empire romain) pour embrasser le christianisme, ces croyants ont dû subir des persécutions.
– Des chrétiens éprouvés : « Vous endurez des peines comme discipline. » (12.7) Outre la persécution, diverses épreuves accablent ces croyants.
– Des chrétiens en danger : l’apostasie, la lassitude, le découragement, la régression les guettent… : « Prenez garde, frères, que quelqu’un de vous n’ait un cœur mauvais et incrédule, au point de se détourner du Dieu vivant. » (3.12)2
– Des chrétiens paresseux : « Vous, en effet, qui depuis longtemps devriez être des maîtres, vous avez encore besoin qu’on vous enseigne les principes élémentaires des oracles de Dieu. » (5.11-12).
Nos circonstances sont différentes, mais qui peut nier qu’il existe des parallèles frappants entre notre situation et la leur ? Qui ne connaît des frères ou sœurs en danger de lâcher prise ? Qui ne déplore une fréquentation décroissante des réunions d’église (10.25) ? Quel groupe de chrétiens ne connaît pas d’épreuves ? Oui, c’est une lettre qui garde toute son actualité !
3. Date de rédaction
Tout laisse à penser que cette Épître a été écrite avant la destruction de Jérusalem et du temple en l’an 70 : les sacrifices sont encore offerts (9.6 ; 10.11) et l’appel à « sortir hors du camp » (13.13) se comprend mieux ainsi. Peu avant cette destruction, néanmoins, car Timothée est emprisonné (13.23), fait non mentionné dans les Épîtres de Paul, et l’auteur suggère que la première génération de témoins du christianisme est passée (2.3). On peut donc raisonnablement avancer une date autour de l’an 67.
4. Style
– Une lettre curieuse : Elle ne comporte pas d’introduction épistolaire, mais sa conclusion est presque « paulinienne ». L’auteur « parle » (2.5 ; 6.9 ; 9.5 ; 11.32). C’est en fait plus un sermon mis par écrit qu’une lettre proprement dite. Ainsi nous comprenons mieux l’alternance entre les enseignements et les exhortations (cf. infra).
– Un style choisi : L’Épître est écrite dans un style fluide, artistiquement élaboré, dans un grec riche et classique (154 hapax3 !), tout en conservant l’art hébraïque de l’arrangement des mots, de l’allitération et du rythme de la phrase.
– Une formule courante et importante : le raisonnement a fortiori. L’auteur part de prémisses incontestées pour en tirer une conséquence encore plus irréfutable, souvent introduite par l’expression « combien plus » ou « combien moins » (cf. 9.13-14 ; 12.25).
5. Mots clefs
L’Épître comprend au moins quatre mots clefs, qui éclairent magnifiquement le but de l’auteur.
« Meilleur »
Par sa venue et son sacrifice, Jésus-Christ a introduit un ensemble de choses « meilleures » que celles qui prévalaient dans la période précédente de la loi :
• Quant à lui-même :
– Son nom est meilleur que celui des anges par lesquels la loi avait été donnée (1.4).
– Le ministère qu’il a obtenu est meilleur que celui des sacrificateurs selon la loi (8.6).
– Son sacrifice est meilleur que ceux de l’A.T. (9.23), car lui seul apporte la solution définitive au problème du péché.
– Son sang est meilleur que celui d’Abel (12.24), car il parle de pardon et non de vengeance.
• Quant à nous-mêmes :
– L’alliance dont nous bénéficions (et qui donne), est meilleure que la première (qui exigeait) (7.22 ; 8.6).
– Les promesses que nous avons reçues sont meilleures, car elles sont inconditionnelles (8.6).
– Nos biens réels sont meilleurs que des biens temporaires, car célestes et impossibles à nous enlever (10.34).
– Notre patrie est meilleure qu’une patrie terrestre (11.16).
– Notre espérance est meilleure, car elle n’est pas fondée sur la loi (7. 19).
– À la suite des héros d’autrefois, nous attendons une meilleure résurrection (11.35).
Oui, Dieu a « en vue quelque chose de meilleur pour nous » (11.40). Quel privilège extraordinaire de vivre pendant la période chrétienne !
« Céleste »
Ce que Jésus-Christ a introduit est meilleur, car lié au ciel où il est assis : – notre appel est céleste (3.1), – nous avons goûté du don céleste (6.4), – notre patrie est céleste (11.16), – notre Jérusalem est céleste (12.22).
Le ciel — les « choses célestes » (8.5 ; 9.23) — est la sphère morale dans laquelle Christ est introduit et à laquelle nous avons accès par la foi. Dans cette lettre, le « ciel » est mis en contraste avec la « terre ». Ce qui a trait à la terre est passager, mais nécessaire4;.
« Éternel »
L’Épître insiste sur le changement opéré par l’œuvre de Christ : d’un ordre temporaire, muable et qui allait disparaître, on passe à un nouvel ordre, éternel, introduit par la place du Fils à la droite de Dieu5. Le terme « éternel » est lié :
– À la position du Seigneur : Il est le même éternellement (7.24 ; 13.8) ; son trône est éternel (1.8) ; sa sacrificature selon l’ordre de Melchisédek est éternelle (5.6 ; 6.20 ; 7.17, 21) ; il est rendu parfait pour l’éternité (7.28).
– Aux résultats de son œuvre : Le salut (la rédemption) qu’il nous a acquis par son sang est éternel (5.9 ; 9.12) ; le jugement qui attend ceux qui refusent ce salut aussi, d’ailleurs (6.2)… ; un héritage éternel nous est promis (9.15) et l’alliance au bénéfice de laquelle nous sommes est éternelle (13.20).
« Parfait »
Ce dernier mot clef est difficile, parfois mal traduit. Il signifie : amener à un état complet, rendre achevé et parfait, parvenir à la maturité, mener à une pleine qualification pour une tâche assignée. Pourtant, ce mot résume une grande partie du message de la lettre.
• Ce mot s’applique d’abord à Jésus dans sa personne. Non pas que Jésus ait été imparfait, loin de là (4.15b), mais ce qu’il a vécu et appris sur la terre l’a dûment qualifié pour son rôle actuel.
– Comme prince ou auteur de notre salut, il a été rendu parfait par les souffrances et par son obéissance (2.10 ; 5.9).
– Comme homme et Fils de Dieu glorifié, il a été rendu parfait pour être notre grand souverain sacrificateur (7.28).
– Comme modèle de la foi, il est celui qui l’a portée à son plus haut point (12.2).
• Ce mot s’applique aussi à l’œuvre que Jésus a faite : L’offrande de lui-même rend définitivement parfaits ceux qu’elle sanctifie (10.14), en contraste avec l’imperfection de la loi (7.11,19) et de l’ancien culte (9.9 ; 10.1).
• Pour autant, le croyant est appelé à progresser vers la « perfection », dans le sens de maturité (5.14 ; 6.1), sachant que la perfection totale est encore à venir et sera un jour la part de tous les croyants de toutes les périodes (11.40 ; 12.23).
Synthèse
Ces quatre termes sont étroitement liés : Dieu, qui veut le « meilleur » pour nous, le réalise en nous introduisant dans sa sphère à lui, « céleste », « éternelle » et, par une personne « parfaite », qui a accompli une œuvre « parfaite », il nous conduit vers la perfection. Ainsi cette lettre nous montre comment les aspirations profondes de l’homme, jamais satisfaites par le monde et très imparfaitement contentées sous la loi, trouvent dès maintenant leur « port d’attache » pour le croyant, en attendant le jour où il sera comblé lorsqu’il aura enfin atteint la cité meilleure, céleste, éternelle, parfaite (cf. 6.19-20).
6. Relations avec l’A.T.
Des citations très nombreuses
L’Épître aux Hébreux comprend une trentaine de citations directes de nombreux livres de l’A.T.6, ainsi qu’une cinquantaine d’allusions directes7. Pour l’auteur, c’est Dieu (ou l’Esprit) qui a parlé dans l’A.T. (1.1) ; l’instrument humain est reconnu, mais n’est pas du tout mis en avant (« quelqu’un, quelque part », 2.6 — pour le « grand » David !).
L’Épître aux Hébreux est indispensable pour comprendre l’A.T. : plusieurs textes sont désormais directement appliqués au Seigneur Jésus, dévoilant un sens profond sous la surface du sens immédiat. Cette lettre est en quelque sorte une leçon d’herméneutique (liée aux principes de progression de la Révélation et d’interprétation christocentrique). Quel encouragement pour nous à lire (aussi !) l’A.T. en y cherchant avant tout le Seigneur (et non des spéculations sur les détails, 9.5).
Deux textes clefs
– Psaume 110.1,4 : « Assieds-toi à ma droite, jusqu’à ce que je fasse de tes ennemis ton marchepied. […] Le Seigneur a juré, et il ne se repentira pas : Tu es sacrificateur pour toujours, selon l’ordre de Melchisédek. » L’auteur fondera plusieurs de ses argumentations sur ces deux versets.
– Lévitique 16 : Ce chapitre qui traite du grand jour des expiations (Yom Kippour) n’est pas cité littéralement, mais il y est fait de nombreuses allusions aussi implicites qu’évidentes, en particulier dans le développement des ch. 7 à 10.
Des analogies et des contrastes
L’Épître est construite autour :
– D’analogies : Il existe une magnifique continuité entre les deux Testaments : le Premier donnait des préfigurations, des « ombres » (8.5 ; 10.1) ; le Nouveau en montre l’accomplissement, la réalité.
– De contrastes : Il existe néanmoins une rupture entre l’A.T. (basé sur une ancienne alliance, liée à la loi) et le N.T. (basé sur la nouvelle alliance, accordée par grâce). De façon non polémique, l’auteur montre tranquillement et respectueusement la fin de l’ancienne alliance (8.13). « Autrefois » s’oppose à « maintenant » ou « aujourd’hui ». « Ici-bas », le « terrestre », s’oppose à « en haut », au « céleste ». L’accès autrefois fermé est désormais ouvert !
Toutefois, le contraste n’est pas encore total : notre appel est céleste, mais notre cheminement reste terrestre ; nous sommes dans la période du « déjà / pas encore » : déjà sanctifiés pour toujours (10.14), mais encore appelés à rechercher la sanctification (12.14).
7. Plan et but
L’Épître est remarquable par le soin porté aux enchaînements et aux liaisons entre les diverses parties. Elle est centrée sur Jésus-Christ, plus excellente personne, meilleur sacrifice, pionnier de la foi.
Mais c’est avant tout une « parole d’exhortation » (13.22). Les développements doctrinaux ont toujours pour but la pratique, donnée en particulier dans cinq sections d’avertissements vigoureux.
Cette parole est encore pour aujourd’hui :
– Nous sommes toujours tentés de revenir à une religion de formes et de rites. Alors regardons à une meilleure personne qui a offert un meilleur sacrifice : Jésus.
– Nous sommes menacés par l’apostasie qui se développe ou par le relâchement. Alors suivons le chemin de foi, inauguré par notre pionnier, Jésus.
PROPOSITION DE PLAN
A. Jésus-Christ : la plus glorieuse personne 1-7
Introduction : Grandeur de Jésus-Christ, le Fils de Dieu 1.1-4
1. Jésus-Christ supérieur aux anges 1.5-14
Conséquence : 1ère exhortation : Ne pas s’écarter
2.1-42. Jésus-Christ supérieur dans son humanité 2.5-18
3. Jésus-Christ supérieur à Moïse 3.1-6
Conséquence : 2ème exhortation : Ne pas douter de la Parole 3.7-4.13
4. Jésus-Christ supérieur à Aaron 4.14-5.10
Conséquence : 3ème exhortation : Ne pas être paresseux 5.11- 6.20
5. Jésus-Christ, sacrificateur d’un ordre supérieur 7.1-28
B. Jésus-Christ : le plus excellent sacrifice 8-10
Introduction : Résumé de la 1ère partie de l’épître 8.1-2
1. Jésus-Christ, médiateur d’une meilleure alliance 8.3-13
2. Jésus-Christ, entré avec son sang dans un meilleur sanctuaire 9.1-28
3. Jésus-Christ, un meilleur sacrifice par l’offrande de son corps 10.1-18
Conséquence 1 : S’approcher 10.19-25
Conséquence 2 : 4ème exhortation : Ne pas se retirer 10.26-31
Conséquence 3 : Transition : Persévérer dans la foi 10.32-39
C. Jésus-Christ : le pionnier de la foi 11-13
1. La nuée des témoins de la foi 11.1-40
Conséquence : Fixer les yeux sur Jésus-Christ, l’exemple suprême de foi 12.1-3
2. La discipline paternelle 12.4-11
Conséquence : Prendre soin les uns des autres 12.12-17
3. Une meilleure position 12.18-24
Conséquence 1 : 5ème exhortation : Ne pas refuser 12.25-29
Conséquence 2 : Amour mutuel et confiance 13.1-6
4. Vers Jésus-Christ : le vrai culte 13.7-19
Conclusion 13.20-25
1 Origène a dit très justement : « Mon avis est que les pensées sont de l’apôtre [Paul], mais la phrase et la composition sont de quelqu’un qui rapporte les enseignements de l’apôtre, et pour ainsi dire de l’écolier qui écrit les choses dictées par le maître. Mais qui a écrit la lettre ? Dieu seul le sait. »
2 Ces Hébreux devenus chrétiens étaient-ils tous réellement convertis ? L’auteur le suppose a priori, mais il leur envoie néanmoins cinq séries d’avertissements, au cas où certains n’auraient embrassé le christianisme qu’en façade. Voir notre article sur ce sujet dans Promesses 175, « La sécurité du croyant, Hébreux 6 et 10 ».
3 Un hapax désigne un mot grec qui n’apparaît qu’une seule fois dans le texte original du N.T.
4 Contrairement à ce qui a été parfois avancé, l’Épître n’est pas sous influence platonicienne ou philonienne (de Philon d’Alexandrie, Juif du Ier siècle qui a cherché à faire une synthèse entre le judaïsme et la philosophie de Platon).
5 À noter que l’Épître aux Hébreux ne fait pas de distinction entre deux périodes que d’autres textes du N.T. permettent de distinguer (1 Cor 15 ; Apoc 20-21) : le millénium, l’état éternel. Le sacrifice de Christ inaugure une ère nouvelle, le « déjà », qui se poursuit jusqu’en l’éternité.
6 Gen (3), Ex (3), Deut (1), Jos (1), 1 Chr (1), Ps (15), Prov (1), És (2), Jér (2), Hab (1), Aggée (1).
7 Ces citations sont généralement tirées de la version grecque de l’A.T. dite des Septante, ce qui peut expliquer quelques variations d’avec notre A.T., traduit directement de l’hébreu. L’auteur joue d’ailleurs parfois habilement de ces différences.
Tiré de Plaire au Seigneur
« Le point capital de ce qui vient d’être dit, c’est que nous avons un tel souverain sacrificateur, qui s’est assis à la droite du trône de la majesté divine dans les cieux. » (Hébreux 8.1)
« Je n’ai personne qui vienne m’aider », pense cette dame âgée et isolée. « Je n’ai personne qui puisse comprendre mon chagrin », se dit cette jeune femme après une déception amoureuse. « Je n’ai personne avec qui partager », déplore cet homme, muté pour son travail dans une ville éloignée. « Je n’ai personne » : qu’elle soit formulée ou enfouie, cette plainte trahit malheureusement la réalité de beaucoup dans un monde de plus en plus individualiste et égoïste.
Quel contraste avec l’affirmation triomphante de l’auteur de l’Épître aux Hébreux ! Dans les sept premiers chapitres de sa lettre, il a développé les gloires d’une Personne, une Personne unique, à la fois Dieu et homme. Avant de mettre en évidence la gloire de l’œuvre accomplie par cette merveilleuse Personne à la croix, l’auteur s’interrompt, comme pour alerter son lecteur : le point le plus important de son développement, « c’est que nous avons un tel souverain sacrificateur » :
– Quelqu’un d’apte à nous comprendre : Cette Personne glorieuse, Dieu le Fils, est devenu homme précisément pour pouvoir maintenant nous comprendre : les épreuves qu’il a connues sur terre lui permettent d’entrer dans celles que nous connaissons (2.18 ; 4.15).
– Quelqu’un de parfait : Les gens qui nous sont proches nous déçoivent parfois ; ils sont (trop souvent, pensons-nous) défaillants à notre égard. Mais lui est ce « souverain sacrificateur » qui nous « convenait », car il est saint, innocent, sans tache (7.26).
– Quelqu’un de puissant : Sa place actuelle, « à la droite du trône de la majesté divine dans les cieux » en témoigne : peut-on imaginer une place plus élevée dans l’univers ?
– Quelqu’un proche de nous : Certes, Jésus est au ciel, mais la foi nous le rend présent et proche ; et l’accès vers lui est toujours ouvert.
– Quelqu’un qui prie pour nous : C’est un de ses rôles principaux en tant que « souverain sacrificateur ».
Alors, nous qui connaissons un « tel » Jésus, ne disons, ni ne pensons jamais : « Je n’ai personne » ; remercions plutôt en pensant : « J’ai une Personne »… et quelle Personne !
Gérard Dagon est décédé à son domicile de Gandrange (Moselle), le dimanche 22 mai 2011, à l’âge de 75 ans. Il était membre du comité de soutien de Promesses. Il a marqué le mouvement évangélique français de ces dernières décennies : il fut un des fondateurs de la FEF (Fédération Évangélique Française) en 1969, dont il fut aussi le président. Gérard Dagon était également impliqué dans la dénonciation des mouvements sectaires : il fut un des fondateurs de Vigi-Sectes en 1998. Il rédigea de nombreux ouvrages : Les sectes en France, Petites églises et grandes sectes, Panorama de la France évangélique, Les sectes à visage découvert… Il était réputé pour ses convictions évangéliques affirmées et pour sa mémoire hors du commun. Promesses adresse toute sa sympathie à sa famille et à ses amis.
L’Épître aux Hébreux se classe parmi les portions difficiles du Nouveau Testament. L’aide d’un commentaire pour en comprendre la portée, les images et la pertinence actuelle sera souvent la bienvenue. Voici quelques propositions pour éclairer la lecture de cette lettre et en approfondir sa compréhension.
Warren Wiersbe, Soyez confiant, ELB
Un extrait de ce commentaire figure dans ce numéro de Promesses. Warren Wiersbe est un auteur évangélique américain, reconnu pour ses qualités de vulgarisateur. Ses commentaires sont fondés sur une exégèse solide, mais comprennent des applications directes qui font parfois défaut à d’autres livres. Il a un don particulier pour mettre en évidence des plans faciles à mémoriser. Le texte biblique est donné avant le commentaire, ce qui rend cette série facile à transporter. Ce commentaire sur Hébreux est sans doute un des plus abordables.
Collectif, Hébreux, Sondez les Écritures, vol. 12, BPC
Le commentaire sur Hébreux de la série Sondez les Écritures partage les caractéristiques de cette série : des méditations quotidiennes de trois ou quatre pages sur une partie de chapitre. Il y a des références assez nombreuses à des textes parallèles et un réel souci de dégager le plan et les principales idées, sans oublier quelques applications.
Samuel Bénétreau, L’Épître aux Hébreux, CEB, Édifac (2 vol.)
C’est de loin le commentaire évangélique le plus complet et le plus approfondi actuellement disponible en français. Samuel Bénétreau, professeur à la Faculté Libre de Théologie Évangélique de Vaux-sur-Seine, interagit avec plusieurs autres commentateurs, français ou étrangers, de diverses obédiences chrétiennes, avec une grande érudition. Après avoir passé en revue les diverses opinions sur un passage, il n’hésite cependant pas à donner prudemment son option préférée. L’approche est délibérément plus exégétique que pratique.
John MacArthur, Hébreux, Impact
Ce long commentaire (625 pages) est à l’instar des autres livres de cet auteur renommé, aux convictions vigoureuses : il expose avec clarté et détail le contenu de l’Épître, en mettant en évidence les erreurs auxquelles peut conduire une mauvaise compréhension des passages difficiles.
Andrew Murray, Le voile déchiré, Éditions Emmanuel
Ce théologien sud-africain de la fin du xixe siècle a laissé un commentaire magistral sur Hébreux, dans un style un peu daté, mais puissant. L’auteur vise principalement à susciter chez son lecteur un élan de sanctification et de ferveur envers Celui que le voile déchiré nous révèle.
John Gilford Bellett, Les cieux ouverts, BPC
Cet ouvrage est davantage une méditation qu’un commentaire. J.G. Bellett fait part de son émerveillement devant les gloires de Jésus, grand sacrificateur, que présente cette Épître. Il faut pouvoir entrer dans le style romantique de l’auteur, mais il vaut la peine de le suivre dans sa contemplation.
* * *
Outre ces commentaires, on peut mentionner les portions relatives à Hébreux dans des commentaires en un volume (comme par exemple le Commentaire biblique du disciple de William MacDonald) ou dans l’Encyclopédie des difficultés bibliques, vol. 7, d’Alfred Kuen.
Enfin, ceux qui ont le privilège de lire l’anglais facilement disposeront d’une richesse incomparable de commentaires de tout niveau et de tout type d’orientation théologique. Parmi tous ces commentaires, signalons-en deux, qui ont reçu un excellent accueil :
– William Lane, dans la série Word Biblical Commentary (WBC), avec un niveau plutôt élevé d’érudition,
– George Guthrie, dans la série New International Version Application Commentary (NIVAC), qui comporte systématiquement des sections d’application pratique très pertinentes.
19 Ainsi donc, frères, nous avons, au moyen du sang de Jésus, une libre entrée dans le sanctuaire 20 par la route nouvelle et vivante qu’il a inaugurée pour nous au travers du voile, c’est-à-dire de sa chair, 21 et nous avons un souverain sacrificateur établi sur la maison de Dieu ; 22 approchons-nous donc avec un cœur sincère, dans la plénitude de la foi, les cœurs purifiés d’une mauvaise conscience, et le corps lavé d’une eau pure. 23 Restons fermement attachés à la profession de notre espérance, car celui qui a fait la promesse est fidèle. 24 Veillons les uns sur les autres, pour nous exciter à l’amour et aux bonnes œuvres. 25 N’abandonnons pas notre assemblée, comme c’est la coutume de quelques-uns ; mais exhortons-nous réciproquement, et cela d’autant plus que vous voyez s’approcher le jour. |
Jamais un croyant de l’ancienne alliance n’aurait eu l’audace d’essayer de pénétrer dans le lieu très saint. Le souverain sacrificateur lui-même n’y entrait qu’une fois par an. Le voile épais séparant le lieu saint du lieu très saint formait une barrière entre le peuple et Dieu. Seule la mort du Christ pouvait déchirer ce voile (Marc 15.38) et ouvrir la voie vers le sanctuaire céleste où Dieu demeure.
« Allons donc à lui… Restons fermement attachés… Veillons les uns sur les autres ». Cette triple invitation dépend de l’assurance qui nous permet d’entrer dans le lieu très saint. Et cette assurance se fonde sur l’œuvre accomplie par le Christ. Le jour de la fête des expiations, le souverain sacrificateur ne pouvait entrer dans le lieu très saint que s’il apportait le sang du sacrifice (9.7). Mais notre entrée dans la présence de Dieu nous est permise, non grâce au sang d’un animal, mais grâce au sang du Christ.
Ce chemin ouvert vers la présence de Dieu est « nouveau » (récent, frais), il ne fait pas partie de l’ancienne alliance qui, elle, « est dépassée, vouée à disparaître » (8.13). Ce chemin mène à la vie parce que le Christ « vit éternellement » et qu’« il peut toujours intervenir en notre faveur » (7.25). Le Christ est le chemin nouveau et vivant ! C’est par lui, notre Souverain Sacrificateur sur la maison de Dieu (l’Église, voir 3.6), que nous venons à Dieu. Lorsque la chair de Jésus a été déchirée sur la croix et sa vie sacrifiée, Dieu a déchiré le voile du temple. C’était là un symbole du chemin nouveau et vivant ouvert pour quiconque croit.
C’est par cette assurance, qui nous vient du fait que nous avons un souverain sacrificateur vivant, que nous avons une « invitation généreuse » à entrer dans la présence de Dieu. Le souverain sacrificateur de l’ancienne alliance ne pouvait entrer dans le lieu très saint qu’une seule fois par an, mais nous, nous sommes invités à séjourner dans la présence de Dieu à chaque moment de la journée ! Considérez le privilège qu’implique cette triple invitation :
Allons donc à lui (10.22)
Nous devons, bien sûr, nous préparer spirituellement pour entrer en communion avec Dieu. Le jour de la fête des expiations, le sacrificateur devait passer par plusieurs ablutions et sacrifier un animal (Lév 16). De même, durant le service régulier, les sacrificateurs devaient se laver à la cuve de bronze avant de pénétrer dans le lieu saint (Ex 30.18-21). Le croyant du Nouveau Testament doit s’approcher de Dieu avec un cœur et une conscience purs. La communion avec Dieu exige la pureté (1 Jean 1.5–2.2).
Restons fermement attachés à notre espérance (10.23)
Les lecteurs de cette lettre étaient tentés d’abandonner leur confession de Jésus-Christ en retournant à l’ancienne alliance. L’auteur les invite à continuer fermement à professer leur espérance.
Dieu « avait projeté… de leur faire partager sa gloire » (2.10). Les croyants sont appelés à « hériter la vie céleste » (3.1) et à maintenir « l’espérance joyeuse de la gloire future » (3.6). L’espérance est l’un des thèmes principaux du chapitre 6 (6.11-12,18-20). Nous attendons le retour du Christ (9.28) et nous cherchons la cité qui doit venir (13.14).
Celui qui fixe son espérance en Jésus-Christ et se confie en la fidélité de Dieu ne sera pas ébranlé. Au lieu de regarder en arrière, comme le firent si souvent les Israélites, nous devrions porter nos regards vers l’avant, vers la venue du Seigneur.
Veillons les uns sur les autres (10.24-25)
La communion avec Dieu ne doit jamais devenir égoïste. Nous devons aussi être en communion avec d’autres croyants dans l’assemblée locale. Il semble que certains croyants, en train de fléchir, s’étaient éloignés de la communion de l’église. Il est intéressant de remarquer que l’auteur ne souligne pas ici les avantages que peut recevoir le croyant de son assemblée, mais bien la contribution qu’il peut y apporter. La fidélité dans la fréquentation de l’église encourage les autres chrétiens et les pousse à aimer et à s’adonner aux bonnes œuvres. L’une des plus fortes motivations à demeurer fidèles qui nous soit donnée est la venue imminente de Jésus-Christ.
Les trois grandes vertus chrétiennes sont soulignées ici : la foi (10.22), l’espérance (10.23), et l’amour (10.24). Ce sont là les fruits de notre communion avec Dieu dans son sanctuaire céleste. Alors entrons-y !
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