PROMESSES

« Je ne peux pas croire au Dieu de la Bible parce qu’il a ordonné un génocide. »
Le récit de la conquête de Canaan en choque plus d’un, au point d’être un obstacle à la foi. Même parmi les chrétiens, beaucoup sont frappés par la dimension tragique de ces récits.

En effet, la lecture du commandement divin dans le Pentateuque et de la narration de la conquête dans le livre de Josué donne l’impression d’une extermination des nations cananéennes.
• Deutéronome 7.1-2 : « Lorsque l’Éternel, ton Dieu, t’aura fait entrer dans le pays […] qu’il chassera devant toi beaucoup de nations […] tu les dévoueras par interdit […] et tu ne leur feras point grâce. »
• Josué 10.40 : « Josué battit tout le pays, la montagne, le midi, la vallée et les coteaux, et il en battit tous les rois ; il ne laissa échapper personne, et il dévoua par interdit tout ce qui respirait, comme l’avait ordonné l’Éternel, le Dieu d’Israël. »
Les expressions utilisées pour décrire la manière dont les Israélites devraient traiter les Cananéens sont dures à entendre : exterminer (Ex 23.23), chasser (Ex 23.28-31), livrer (Deut 7.2), détruire (Deut 12.30)… Elles sont encore plus poignantes lorsqu’il est précisé qu’ils les détruisirent entièrement « hommes et femmes, enfants et vieillards, jusqu’aux bœufs, aux brebis et aux ânes », ne laissant aucun rescapé (Jos 6.21 ; 11.11,14 ; cf. également Deut 2.34 et 3.6).
Ces expressions conduisent nos consciences modernes à rapidement accuser deux acteurs des événements décrits : le Dieu « d’amour » qui aurait commandé le massacre sanglant des Cananéens, et les Israélites qui auraient exterminé les Cananéens. L’accusation est-elle justifiée ?
Peut-on parler de génocide ?
Avant de répondre à ces questions, il convient de prendre le temps d’analyser l’ensemble des informations bibliques afin de disposer d’une photographie complète de la situation. Nous relevons ici cinq points à prendre en considération. Ils concernent d’une part la relation entre Dieu et les Cananéens, et d’autre part l’intervention israélite sous le commandement de Josué.

A. La relation entre Dieu et les Cananéen

Que s’est-il passé entre Dieu et les Cananéens ? Y-a-t-il une spécificité cananéenne ?
En Exode 33.12 à 34.9, Moïse demande à voir la face de Dieu. Ce dernier se révèle à lui en proclamant son nom : « L’Éternel, l’Éternel, Dieu, miséricordieux et compatissant, lent à la colère, riche en bonté et en fidélité, […] qui pardonne l’iniquité, la rébellion et le péché, mais qui ne tient point le coupable pour innocent… » Dieu choisit donc de se révéler sous ses caractères qui marquent sa relation avec l’homme.
Notons deux principaux traits : sa grande patience, motivée par sa miséricorde, et sa justice.

1. Dieu a été patient envers les Cananéens

Cette patience a duré au moins 400 ans [note] Ce décompte démarre à la déclaration de Dieu à Abraham (Gen 15.16). Il ne tient pas compte de toute la période qui la précède.[/note] . Lorsque Dieu promit à Abraham de lui donner le pays de Canaan, il lui précisa que le délai de réalisation de la promesse serait très long parce que « l’iniquité des Amoréens [note]Les Amoréens : terme générique pour désigner les habitants de Canaan.[/note] n’est pas encore à son comble » (Gen 15.16). Pendant cette période de patience, nous pouvons penser que les Cananéens ne sont pas restés sans avertissements, car Dieu prévient toujours avant de juger (cf. le cas de Ninive avec Jonas). Les déclarations de Rahab, habitante de Jéricho, vont dans ce sens : « Nous avons appris comment, à votre sortie d’Égypte, l’Éternel a mis à sec devant vous les eaux de la mer Rouge […] C’est l’Éternel, votre Dieu, qui est Dieu en haut dans les cieux et en bas sur la terre » (Jos 2.10 11).

C’est Dieu qui jugeait les Cananéens

Le motif du jugement était clair : « toutes les abominations qu’ils font pour leurs dieux » (Deut 20.18). Rappelons que les sacrifices d’enfants et l’immoralité sexuelle étaient très présents dans le culte cananéen [note]Ces pratiques sont aussi attestées par des découvertes archéologiques.[/note] . Les Israélites devaient donc démolir leurs autels, briser leurs statues, abattre leurs idoles et brûler leurs images taillées (Deut 7.5). Le commandement divin d’extermination n’était donc pas formulé sur une base raciale, mais sur la base du comportement immoral des Cananéens. D’ailleurs, les Israélites couraient le même risque de jugement s’ils commettaient les mêmes abominations, selon Deut 7.4 : « … tes fils, qui serviraient d’autres dieux, et la colère de l’Éternel s’embraserait contre vous : il te détruirait promptement. » Comme pour Sodome et Gomorrhe, Dieu ne pouvait plus supporter les iniquités pratiquées par les Cananéens.
Le juge était Dieu lui-même. Le texte biblique montre que les batailles sont menées par l’épée de l’Éternel lui-même : « Comme Josué était près de Jéricho […] voici un homme se tenait debout devant lui, son épée nue dans la main […] Je suis le chef de l’armée de l’Éternel, j’arrive maintenant » (Jos 5.13 14).
En revanche, le moyen de jugement visible sur le champ de bataille était l’épée des Israélites. Ils ne devaient laisser aucun survivant sur le champ de bataille, parce que les Cananéens étaient « frappés d’anathème » ou « dévoués par l’interdit ». Ces expressions traduisent le terme herem qui désigne une chose entièrement consacrée à l’Éternel (Lév 27.28). S’il s’agit d’une personne, celle-ci doit être mise à mort. Autrement dit, la vie des Cananéens revenait au Créateur. Josué a donc conduit les Israélites dans l’obéissance au commandement divin — ce que le texte biblique tient à souligner : « Josué exécuta les ordres de l’Éternel à Moïse, […] il ne négligea rien de tout ce que l’Éternel avait ordonné à Moïse. » (Jos 11.15) Il ne s’agit donc pas d’une conquête accomplie par haine contre les Cananéens.
Notre conscience peut être choquée par la violence des événements. Mais, sans rentrer dans les détails, on constate à travers l’histoire biblique que la violence humaine est présente lors de l’exécution de jugements divins. Le Fils de Dieu lui-même n’y a pas échappé. En effet, lorsque la colère de Dieu s’est déversée sur lui à notre place, toute la cruauté de la crucifixion des Romains s’est manifestée. Devons-nous en déduire pour autant que Dieu est violent ?
En conclusion, nous pouvons dire que Dieu n’a pas agi de manière spécifique avec les Cananéens : il n’y a pas d’exception cananéenne, mais une jurisprudence cananéenne. Comme Dieu a été patient avec eux, il est patient envers tous les hommes ; comme il les a détruits en jugement, il fera de même pour tous les impies (cf. 2 Pi 3.7-9).
L’accusera-t-on alors de génocide ? Cela n’a pas de sens… L’exercice de la justice reste la prérogative de Dieu.

B. L’intervention israélite sous le commandement de Josué

Les Israélites ont-ils profité de l’occasion pour commettre des actes coupables envers les Cananéens ?
Nous avons remarqué ci-avant que le texte biblique souligne l’obéissance de Josué aux commandements divins. Il a respecté scrupuleusement le cadre prescrit par Dieu lui-même ; et ce cadre, c’est la guerre.

3. Les Israélites ont conquis le pays selon les règles de la guerre

Dieu avait clairement précisé les règles de guerre que le peuple devait suivre. Il devait demander la paix avant d’attaquer une ville. « Quand tu approcheras d’une ville pour lui faire la guerre, tu l’inviteras à la paix. » (Deut 20.10, Darby) Si la ville était hostile, la guerre était justifiée. S’il s’agissait d’une ville en dehors de Canaan, seuls les hommes adultes devaient être tués. S’il s’agissait d’une ville située dans le pays, elle devait être entièrement détruite en application de l’anathème.
Il ne devait donc pas y avoir de prisonniers de guerre, ni de butins dans ces villes, comme évoqué précédemment.
Moïse a observé ce commandement pour la conquête des territoires à l’est du Jourdain en prenant soin de demander la paix (Deut. 2.26-30).
Nous n’avons pas de précisions concernant une demande de paix lors de la première campagne militaire menée par Josué (Jéricho, Aï et Béthel).
Mais les six jours de tour de la ville de Jéricho ne peuvent-ils pas être considérés comme autant d’offres implicites de paix ? Concernant les deux autres campagnes militaires, la déclaration de guerre provenait des Cananéens eux-mêmes. Les Israélites se sont retrouvés en guerre, soit à cause de leur alliance avec les Gabaonites, soit pour répondre à une agression directe. Le texte précise que « l’Éternel permit que ces peuples s’obstinent à faire la guerre contre Israël, afin qu’Israël […] les détruise » (Jos 11.20). De plus, « Israël ne brûla aucune des villes qui étaient demeurées tranquilles sur leurs collines, excepté Hatsor » (Jos 11.13, Darby).
Dans ce contexte, il est intéressant de noter le cas des Gabaonites. Ces derniers ont réussi à négocier la paix par ruse. Ils ont été asservis aux Israélites conformément au commandement divin.

4. La conquête est décrite en termes de victoires remportées

En effet, le narrateur s’attarde à rapporter la prise de villes et l’anéantissement de rois (cf. le résumé de Josué 12), plutôt que la destruction des habitants.
La conquête a donc consisté à détruire les points stratégiques que constituaient les villes [note]En réalité, seules trois villes ont été entièrement détruites et brûlées par le feu (Jéricho, Aï et Hatsor).[/note] . Ces dernières étaient les centres religieux, commerciaux, administratifs. La prise de ces villes garantissait la domination d’Israël sur le territoire. En effet, à la fin des campagnes militaires, il restait encore une grande partie à prendre en possession (« le pays qui te reste à soumettre est très grand », Jos 13.1). Chaque tribu avait la responsabilité de prendre possession des contrées qui lui étaient attribuées en partage alors que les ennemis étaient désormais affaiblis. La situation des géants Anakim est symptomatique à ce sujet : Josué les extermina avec leurs villes (Jos. 11.21), mais à Hébron, Caleb a dû déposséder les Anakim qui y étaient toujours (Jos. 14.12 ; 15.14).
Cette dernière citation semble montrer une contradiction : il détruisit entièrement, mais il en reste ! On voit donc que le style utilisé par le narrateur est hyperbolique. Lorsqu’il parle de destruction complète, il veut souligner la victoire totale obtenue par Josué. Il ne s’agit donc pas d’une formule pour décrire une éradication complète des Cananéens. D’ailleurs, ses conclusions après la description de la conquête et du partage font uniquement référence à la fin de la guerre : « Le pays se reposa de la guerre » (Jos 11.23 ; 21.44, Darby).

5. Les Israélites ont laissé vivre des Cananéens dans le pays

La cartographie du pays après la conquête est bien éloignée de celle d’un territoire peuplé uniquement d’Israélites. Cette situation est bien conforme aux annonces divines. En effet, Dieu avait expressément annoncé que la conquête serait progressive : « L’Éternel, ton Dieu, chassera peu à peu ces nations loin de ta face. » (Deut. 7.22) L’hypothèse de la présence de Cananéens en permanence dans le pays était sous-entendue par Dieu lui-même, puisqu’il avait commandé aux Israélites de ne pas s’allier à eux par mariage (Deut 7.3).
On voit aussi que dans certains cas, des échappés ont été laissés en vie : « Quand Josué et les fils d’Israël eurent achevé de leur infliger une très grande défaite, jusqu’à les détruire, il arriva que les fuyards d’entre eux échappèrent et entrèrent dans les villes fortifiées ; et tout le peuple retourna en paix au camp. » (Jos 10.20-21, Darby). On peut remarquer que dans certains cas, ils ne tuèrent que les hommes (Jos. 11.14).
En conclusion, nous pouvons dire que les Israélites n’ont pas conquis le pays dans une logique de destruction systématique des Cananéens. Leurs actes s’inscrivaient dans le cadre d’une guerre, leurs ennemis cherchant à leur faire subir le même sort.
Accuserons-nous de génocide une armée qui lance une contre-offensive ?

En synthèse

Les cinq points évoqués nous indiquent déjà qu’une lecture plus attentive du texte biblique diminue le sentiment de génocide. Le but du commandement divin était double : d’une part, juger les Cananéens qui ne se sont pas détournés de leurs abominations ; et d’autre part, préserver les Israélites de l’idolâtrie cananéenne, afin de les protéger in fine du jugement divin. On discerne alors à travers ce commandement que Dieu est à la fois juste et bon : juste, car il ne laisse pas le coupable impuni ; bon, car il veut avant tout éviter de devoir le punir.
Comment donc ne pas faire confiance à un tel Dieu ? Comment ne pas décider de se détourner de ses mauvaises voies et croire en lui ? Un exemple de jugement divin comme celui des Cananéens a aussi un rôle pédagogique ; il devrait nous inciter à nous rapprocher du Dieu « miséricordieux, lent à la colère, et grand en bonté ».


Le diagnostic

« Voici, les jours viennent, dit le Seigneur, l’Éternel, où j’enverrai la famine dans le pays, non pas la disette du pain et la soif de l’eau, mais la faim et la soif d’entendre les paroles de l’Éternel » (Amos 8.11) .

Deux sondages parus ces dernières années montrent que les chrétiens sont en état de famine spirituelle :
• Concernant les protestants français (y compris évangéliques), 13 % lisent la Bible tous les jours ou presque, 6 % au moins une fois par semaine et 81 % moins souvent, dont 29 % jamais. [note]Sondage IFOP pour l’Alliance biblique française et le quotidien La Croix, effectué en France mi-2022.[/note]
• Concernant les Suisses se définissant comme « protestants évangéliques », seuls 38 % déclarent avoir lu la Bible en entier. [note]Sondage Link pour Christianisme aujourd’hui, effectué en Suisse mi-2020.[/note]

Naturellement, les chiffres sont beaucoup plus bas si l’on considère la population totale. Le constat est sans appel : la lecture de la Bible n’est pas une priorité, même parmi ceux qui se disent chrétiens ! Et pourtant la « faim » spirituelle existe bel et bien et on cherche à la satisfaire par d’autres sources… qui ne rassasient pas !

La situation n’est pas sans analogie avec celle du temps du prophète Amos. Ce dernier critique la cupidité de ses contemporains qui oublient Dieu, oppressent les pauvres et négligent les jours de repos pour commercer davantage (Amos 8.4-6). En conséquence, Dieu envoie une famine spirituelle qui touche d’abord les jeunes (Amos 8.13).
Sans noircir exagérément le tableau, on peut constater que, dans nos églises, la lecture biblique personnelle tend à se raréfier, le culte familial à disparaître et le temps dévolu en église à la prédication biblique à se réduire au profit de la louange. Si cela ne va pas forcément jusqu’à la famine, assurément un constat partagé de dénutrition s’impose !

Le remède

« Jésus répondit : Il est écrit : L’homme ne vivra pas de pain seulement, mais de toute parole qui sort de la bouche de Dieu » (Matthieu 4.4).

La réponse de Jésus à la première tentation du diable au désert est bien connue ; elle est devenue un chant familier… Mais qu’en est-il de sa mise en pratique ? Nous prenons soin de nous nourrir physiquement chaque jour, mais pas toujours spirituellement. Les humains, dans leur grande majorité [note]Même s’il reste hélas 828 millions de personnes sur Terre à souffrir de la faim en 2021, soit environ 10 % des humains (source : Programme Alimentaire Mondial des Nations-Unies).[/note] , mangent tous les jours, mais le soutien de la vie physique n’est pas suffisant : le Seigneur insiste sur l’importance de la Parole de Dieu pour vraiment vivre ! Lui-même disait : « Ma nourriture est de faire la volonté de celui qui m’a envoyé, et d’accomplir son œuvre » (Jean 4.34).
La citation qu’il fait du Deutéronome rappelle qu’Israël au désert n’a pas souffert de la faim physique : la manne venait quotidiennement le rassasier. En revanche, il a oublié la parole de l’Éternel et une génération est morte (mais pas de faim !) dans le désert.
Manger quotidiennement – lire quotidiennement la Bible : deux activités qui devraient être naturelles, routinières. Chacun a ses habitudes alimentaires : certains privilégient un copieux petit-déjeuner alors que d’autres préfèrent se caler au dîner. Des croyants aiment ouvrir leur Bible dès le réveil alors que d’autres, plus « du soir », savourent la tranquillité des dernières heures du jour.
Et si l’on n’a pas faim ? Il nous arrive de ne pas avoir d’appétit au moment de nous mettre à table : allons-nous sauter le repas ? Peut-être, mais pas plusieurs fois de suite ! Nous allons nous forcer, ou bien choisir un plat que nous aimons particulièrement.
De même, nous pouvons reconnecter avec la Parole par un effort assumé ou en revenant vers un de nos textes favoris.
Et si l’on rate un jour ? Ce n’est pas un drame ! Une règle inflexible nous obligeant à lire au moins un chapitre de l’Écriture sans manquer un jour ne serait pas dans l’esprit de la liberté de la nouvelle alliance. Une chrétienne recommandait : « Deux jours [note]Sous-entendu sans ouvrir la Bible.[/note] mais pas trois ! » Il ne faut pas que les excuses deviennent une habitude…
Et si l’on n’aime pas tel texte ? Jésus précise : « toute parole » (cf. 2 Tim 3.16). On dit qu’il faut goûter sept fois un aliment avant de l’apprécier vraiment. Notre première lecture du Lévitique ne nous enthousiasmera pas forcément, mais au fur et à mesure que nous saisirons la trame générale de l’Écriture, la progression de la révélation, les correspondances entre les livres, nous en viendrons à apprécier même ceux que nous trouvions a priori quelque peu indigestes !
Ne nous leurrons pas : un combat est en jeu ! Notre sujet relie les deux thèmes de ce numéro : pour vaincre la famine, une guerre se joue. La faim de Jésus au désert était bien réelle, mais sa priorité fut de se conformer à la Parole de son Dieu et il a vaincu le diable. Alfred Kuen a écrit : « Lire la Bible, c’est contrecarrer le plan des forces hostiles à Dieu. Celles-ci ne demeureront pas inactives : elles chercheront par tous les moyens à déranger notre lecture ou à l’empêcher. Notre lecture de la Bible est donc, en premier lieu, une lutte spirituelle. »

La motivation

« Désirez, comme des enfants nouveau-nés, le lait spirituel et pur, afin que par lui vous croissiez pour le salut, si vous avez goûté que le Seigneur est bon » (1 Pierre 2.2-3).

Si la motivation est absente, la régularité le sera bientôt ! Pourquoi ouvrons-nous notre Bible ? Par obéissance ? pourquoi pas. Par devoir ? sans doute quelquefois. Par peur ? j’espère que non… Avant tout, ouvrons-la pour une rencontre personnelle avec son auteur, Dieu lui-même, et avec celui qui est le centre de la révélation écrite, la Parole vivante, Jésus-Christ. Ouvrons-la pour mieux le connaître et ainsi davantage l’aimer et le servir avec plus de zèle. Nos expériences passées avec le Seigneur (ses délivrances, sa protection, ses bienfaits si nombreux dont le Psaume 34 que cite l’apôtre se fait l’écho) renforcent l’envie de nous approcher de lui  : puisque [note] C’est ainsi qu’il faut comprendre le « si » du verset 3 et que la Bible du Semeur le traduit. [/note] nous avons expérimenté sa bonté, nous avons d’autant plus envie de l’écouter.
Le lait est ici le symbole d’un aliment complet [note]Dans d’autres textes, il est évoqué avec une connotation négative, comme l’aliment initial dont il faut ensuite se détacher pour avancer vers des nourritures plus solides (1 Cor 3 ; Héb 5). Notons l’intérêt de voir le sens d’un symbole à la lumière de son contexte ![/note] et l’image de Pierre est parlante : qui n’est pas réjoui de voir un bébé téter goulûment, avec un sentiment de plénitude et de satisfaction une fois sa faim apaisée ? La lecture de la Parole est indispensable pour grandir spirituellement : elle est à l’origine de la vie nouvelle en nous (1 Pi 1.23-25) et elle est l’aliment de notre croissance, présente dans toutes les étapes d’un salut qui embrasse bien au-delà de la nouvelle naissance.
Pierre, cependant, n’occulte pas les obstacles. Deux d’entre eux sont à relever :
• les tensions relationnelles (méchanceté, hypocrisie, jalousie, médisance, 1 Pi 2.1) annihileront l’effet positif de la Parole : traitons-les vite pour retrouver la joie de notre lecture ;
• les « convoitises charnelles qui font la guerre à l’âme » (1 Pi 2.11) témoignent une fois de plus de la lutte spirituelle qui est en jeu : si mes pensées et mon emploi du temps sont occupés à satisfaire mes désirs purement terrestres, la lecture de la Bible sera négligée — et les pièges ne manquent pas en la matière, multipliés par les outils électroniques constamment à notre disposition !

La conséquence

« J’ai recueilli tes paroles, et je les ai dévorées ; tes paroles ont fait la joie et l’allégresse de mon cœur » (Jérémie 15.16).

Dans ce texte, selon la meilleure hypothèse, Jérémie fait allusion au livre de la loi découvert sous Josias.
Longtemps oublié, le Deutéronome a été le guide d’action de ce roi pieux et la joie du prophète.
Le verbe « manger » indique une appropriation personnelle du message reçu. Jésus se comparait lui-même au pain de vie et invitait ses disciples à le « manger » symboliquement. Le remède à la dénutrition passe par une meilleure assimilation des aliments, qui réclame régularité des prises, mastication prolongée, choix approprié des mets.
Le parallèle avec notre assimilation de la Parole est facile à faire !
Pour « trouver » les paroles du Seigneur, les occasions ne manquent pas. Si l’on est isolé, comme Jérémie, on peut, par exemple : télécharger la Bible sur son smartphone y compris sous forme d’audiolivre, compléter par des podcasts ou des messages YouTube choisis avec discernement, se fournir dans une librairie chrétienne de livres d’édification, etc.
La Bible se « trouve » aussi en groupe et se comprend mieux à plusieurs : cherchons un groupe de lecture près de chez nous, profitons des messages bibliques de notre église, suivons des formations bibliques en présentiel ou à distance…
Et surtout, quel que soit le moyen, nous pouvons y trouver notre joie, plus encore, notre « allégresse » car la Parole nous vient du Dieu auquel nous appartenons, qui nous aime et qui nous parle ! Quel bonheur d’ouvrir sa lettre d’amour pour nous, de l’y découvrir toujours plus ! Le psalmiste disait : « Je me réjouis de ta parole, comme celui qui trouve un grand butin. » (Ps 119.162) La joie est communicative, dit-on : c’est en montrant un plaisir sincère dans notre lecture personnelle et collective que nous donnerons envie, aux plus jeunes en particulier, de lire la Parole. La famine se sera transformée en festin !

Le problème inverse

« Mettez en pratique la parole, et ne vous bornez pas à l’écouter en vous trompant vous-mêmes par de faux raisonnements » (Jacques 1.22).

Tous les chrétiens ne souffrent pas de famine spirituelle. Certains risquent davantage l’obésité !
On lit beaucoup la Bible (parfois que la Bible !), on assiste à toutes les réunions ou webinaires possibles, on affiche des versets partout… et ce surpoids ne se traduit pas en exercice  ! Il peut y avoir une grande régularité dans le culte personnel, de la connaissance accumulée, un vrai souci d’exactitude doctrinale – et peu de souci du prochain, pas d’appréciation des enjeux du moment, de l’indifférence vis-à-vis des besoins autour de soi. Jacques dénonce ce travers en évoquant de faux raisonnements, qui prennent parfois la forme d’un accent exagéré sur la séparation du monde, la pureté extérieure, la fidélité aux traditions reçues, etc. Le résultat en est aussi une vraie pauvreté spirituelle.
La solution à l’obésité spirituelle ? Se mettre à l’œuvre, s’occuper des plus démunis, recommande Jacques (Jac 1.25,27). « Entrer et sortir » disait un frère âgé à de jeunes croyants : entrer dans le sanctuaire de Dieu pour l’écouter calmement dans sa Parole et sortir pour servir activement. L’Écriture nous est donnée pour nous rendre « accompli et propre à toute bonne œuvre » (2 Tim 3.16-17).
« Il faut manger pour vivre et non vivre pour manger » : appliquons ce proverbe populaire et nourrissons-nous de l’Écriture pour œuvrer ensuite de façon intelligente et diligente pour le Seigneur.


« Car il s’agit, non de vous exposer à la détresse pour soulager les autres, mais de suivre une règle d’égalité : dans la circonstance présente votre superflu pourvoira à leurs besoins, afin que leur superflu pourvoie pareillement aux vôtres, en sorte qu’il y ait égalité, selon qu’il est écrit : Celui qui avait ramassé beaucoup n’avait rien de trop, et celui qui avait ramassé peu n’en manquait pas » (2 Cor 8.13-15).

De l’inégalité parmi les hommes

Dans le livre de Jean-Jacques Rousseau portant ce titre, le philosophe tente de démontrer sa vision optimiste de l’homme dans son « état de nature » et que la société (en particulier la propriété privée) est à l’origine des inégalités.
La Bible nous donne certes une vision idéale de l’état de l’homme créé par Dieu au jardin d’Eden, mais nous montre que c’est la chute, la désobéissance à Dieu qui est la source de tous nos maux et donc des inégalités.
Les inégalités de richesses sont partout aujourd’hui : entre États, entre citoyens d’un même pays, entre membres d’une même entreprise, entre membres d’une église locale. Alors que le PIB par habitant, indiquant la richesse produite par habitant dans un pays peut différer grandement (environ 45 000 $ pour la France et 1000 $ pour le Togo en 2021 par exemple), le salaire du PDG d’une entreprise multinationale représente parfois plus de 300 fois celui de son propre salarié.

Qui est responsable ?

Si Dieu peut parfois être directement à l’initiative d’un jugement particulier comme une famine par exemple (Jér 11.22), la plupart du temps la responsabilité humaine est engagée de manière plus directe.
Que ce soient les conséquences d’une guerre ou de la mauvaise gestion d’un État, beaucoup de famines pourraient être évitées.
Près d’un milliard de personnes souffrent de sous-alimentation. Deux milliards de plus sont mal nourries. En parallèle, on dénombre 1,3 milliard d’individus en surpoids ou obèses. Nous pourrions nourrir plus de deux fois la population mondiale, et pourtant… [note]https://www.lepoint.fr/environnement/nous-pourrions-nourrir-deux-fois-la-population-mondiale-et-pourtant-09-09-2014-1861529_1927.php[/note]…

Dans la Bible, Joseph montre l’exemple d’une sage prévision et gestion de crise du pays d’Égypte (Gen 41). Ce dernier fait preuve d’anticipation en profitant des années d’abondance pour faire des réserves pour les années de famine. Cela permet d’affirmer que les États ont une responsabilité importante dans la prévision et l’adaptation aux évènements climatiques. Malheureusement, certains pays combinent à la fois des conditions climatiques difficiles, un manque d’eau, un développement économique faible et des états ou des environnements géopolitiques instables.

Peut-on améliorer les choses ?

Les États plus riches ainsi que différentes associations ou ONG apportent un soutien financier, matériel ou humain pour faire face aux situations de famines les plus dramatiques.
A un niveau individuel, le verset d’en tête semble mettre la barre très haut. Faut-il vraiment le prendre au pied de la lettre ?
Le commentaire suivant du Nouveau Testament Annoté nous paraît bien retranscrire la pensée de Paul :
« De là, l’apôtre tire (v. 13,14) cet important enseignement qu’il ne doit pas y avoir entre les chrétiens gêne d’une part et surabondance de l’autre, mais égalité. Si les Corinthiens donnent maintenant (v. 13), les frères de la Palestine peuvent le leur rendre dans un autre temps (v. 14), soit en biens spirituels, soit en dons temporels. Ainsi l’amour, l’ardente charité qui avait produit, aux premiers jours de l’Église, cette précieuse égalité, pouvait et devait la produire encore. Partout où elle ne porte pas les mêmes fruits, c’est qu’elle s’est refroidie (Act 2.44,45 ; 4.34-37 ; 11.28-30).
Qu’on ne s’y méprenne pas toutefois, et qu’on ne demande pas à des institutions humaines et au nom de la loi, c’est-à-dire de la contrainte, ce que Paul demande au nom d’un sentiment que l’Esprit de Dieu seul peut inspirer, et qui serait dénaturé dès qu’on lui ôterait sa liberté, sa parfaite spontanéité. L’apôtre n’emploie pas même son autorité apostolique pour prescrire un devoir ; il ne commande pas, il le déclare positivement (v. 8) ; il en appelle à la charité de Christ (v. 9), et pour lui, il ne fait que donner « un conseil » (v. 10), ajoutant (v. 13) une réserve plus délicate encore.
C’est que l’égalité de l’amour chrétien vient de Dieu, tandis que l’égalité impossible dont rêvent les hommes n’est que de la convoitise et de l’injustice.
Mais, en repoussant les exigences des hommes, que les chrétiens se demandent s’ils obéissent aux inspirations de l’Évangile de Dieu ! »
Ainsi, ne diminuons pas la force de l’appel de Paul à la générosité pour les chrétiens, afin de manifester l’amour de manière concrète envers nos frères qui appartiennent au même corps.

Trouver plaisir à donner

Avec le livre Le principe du trésor, Randy Alcorn a aidé beaucoup de chrétiens à trouver une relation saine avec l’argent et à expérimenter la joie qui existe à donner. Bien sûr, tout le monde ne dispose pas des mêmes ressources et la mesure du don est donc relative (Marc 12.41-44). Quinze pour cent des paroles de Jésus sont en rapport avec le sujet de l’argent. C’est plus que les enseignements sur le ciel et l’enfer réunis ! Ce livre, qui évite à la fois les excès du légalisme et de l’évangile de « prospérité », fait ressortir 6 clés qui nous permettront de progresser dans la libéralité.
• Clé n°  1  : Dieu possède tout, je suis le gestionnaire de ses biens. Nous sommes les gestionnaires des biens que Dieu nous a confiés (et non donnés).
• Clé n° 2 : Mon cœur se trouve toujours là où je place l’argent de Dieu. Voyez ce qui se passe si vous réaffectez votre argent du temporel vers l’éternité.
• Clé n° 3 : Ma résidence permanente, c’est le ciel, pas la terre. Nous sommes citoyens « d’une meilleure patrie, […] la patrie céleste » (Héb 11.16).
• Clé n° 4 : Je dois vivre pour la ligne et non pour le point. Du point (notre vie présente sur la terre) part une ligne qui n’a pas de fin, à savoir l’éternité au ciel.
• Clé n° 5 : Donner est le seul antidote au matérialisme. Donner revient à s’abandonner joyeusement à un Être plus grand et à un projet plus large. En donnant, je descends du trône et je l’exalte.
• Clé n° 6 : Dieu accorde la prospérité non pas pour améliorer mon niveau de vie, mais pour améliorer le niveau de mes dons. Dieu nous donne plus d’argent que nécessaire pour que nous puissions donner… avec générosité.

Concluons avec ce beau passage où l’apôtre Paul fait ressortir le cercle vertueux associé à la mise en pratique de la générosité (gras ajouté) :
« Vous serez de la sorte enrichis à tous égards pour toute espèce de libéralités qui, par notre moyen, feront offrir à Dieu des actions de grâces.
Car le secours de cette assistance non seulement pourvoit aux besoins des saints, mais il est encore une source abondante de nombreuses actions de grâces envers Dieu. En considération de ce secours dont ils font l’expérience, ils glorifient Dieu de votre obéissance dans la profession de l’Évangile de Christ, et de la libéralité de vos dons envers eux et envers tous ; ils prient pour vous, parce qu’ils vous aiment à cause de la grâce éminente que Dieu vous a faite. Grâces soient rendues à Dieu pour son don merveilleux ! » (2 Cor 9.11-15)  


Cet article publié sur le blog du SEL a été reproduit avec autorisation de l’auteur. Les citations bibliques sont tirées de la Segond 21.

La famine correspond à la situation douloureuse d’une population confrontée à un manque de nourriture important et durable. Cette réalité est présente à de nombreuses reprises dans la Bible. Voici un passage en revue de ce que l’on peut retenir de la présence de ce thème dans les Écritures.

En février 2017, l’ONU lançait un cri d’alarme pour prévenir du risque de famine dans trois pays d’Afrique et au Yémen. Depuis, la situation s’est légèrement améliorée dans ces régions, mais la menace n’en reste pas moins présente et inquiétante.
Si le sujet de la famine est bel et bien actuel, il s’agit pourtant d’un phénomène qui est loin d’être nouveau ou isolé. Avec un peu plus de 80 occurrences, on retrouve le terme à de nombreuses reprises dans la Bible. Et l’histoire même du peuple d’Israël est non seulement jalonnée de famines mais commence en quelque sorte avec l’une d’elles : « Il y eut une famine dans le pays et Abram descendit en Égypte pour y séjourner, car la famine pesait lourdement sur le pays » (Gen 12.10).
La famine est une réalité tellement courante à l’époque que Jésus s’en sert comme illustration dans la parabole dite du fils prodigue : « Alors qu’il avait tout dépensé, une importante famine survint dans ce pays et il commença à se trouver dans le besoin. » (Luc 15.14)
À travers cet article, nous vous proposons un survol de quelques mentions de famines dans les Écritures et de ce que ces récits nous apprennent sur ce thème, sur Dieu et sur nous-mêmes !

I. Les raisons de la famine

a) Des explications apparemment simples

La famine correspondant à un manque de nourriture, elle résulte assez souvent d’une faiblesse de la production agricole. Au temps de la Bible mais encore aujourd’hui, cette production dépend pour beaucoup des conditions climatiques, et en particulier du manque de pluie. C’est ainsi que la famine qui sévit en Israël, lors du règne d’Achab, résulte de trois années de sécheresse (1 Rois 18.1-2).
Mais la famine peut aussi être la conséquence directe d’actes humains.
Ainsi, les guerres apportent leurs lots de malheurs et de souffrances, parmi lesquels la faim. Dans le livre des Rois, il est rapporté le siège de Jérusalem par Nebucadnetsar (2 Rois 25.1-7). Le roi de Babylone poste ses troupes aux portes de la ville et la population finit par n’avoir plus rien à manger.

b) Le mystère du rôle de Dieu dans ces situations

Au-delà de ces explications somme toute assez logiques, la famine revêt une autre dimension, beaucoup plus mystérieuse. À la lecture de la Bible, on peut légitimement se poser la question du rôle de Dieu dans la survenance de ces désastres. En effet, à plusieurs reprises, il est précisé que l’Éternel en est à l’initiative pour des raisons pédagogiques :
« Moi, je vous ai envoyé la famine dans toutes vos villes, le manque de pain dans toutes vos demeures. Malgré cela, vous n’êtes pas revenus à moi, déclare l’Éternel » (Amos 4.6).
Faut-il pour autant en déduire qu’à travers chaque famine qui survient Dieu cherche à éduquer, voire à punir, une population des fautes qu’elle a pu commettre (2 Sam 21.1) ? Pas nécessairement. Dans le Nouveau Testament (Act 11.27-30), il est question d’une famine qui doit survenir sur « toute la terre » (comprendre vraisemblablement l’Empire romain).
Rien n’indique alors une responsabilité particulière des populations touchées, surtout que de fervents chrétiens semblent concernés.

II. Les conséquences de la famine

a) L’origine d’atroces souffrances

La famine est un drame. C’est une mort lente pour ceux qui en sont victimes. Au travers des paroles du prophète Jérémie, la Bible en reconnaît d’ailleurs assez justement l’atrocité : « Les victimes de l’épée sont plus heureuses que celles de la famine : elles, elles se liquéfient, affaiblies par l’absence du produit des champs » (Lam 4.9).
Pendant la famine, le prix des denrées alimentaires explose. À Samarie, pendant le siège mené par le roi de Syrie (2 Rois 6.24-31), le peuple en vient à acheter de la tête d’âne pour une fortune. Non seulement il s’agit d’une partie où il y a peu de viande, mais surtout c’est un animal impur. La faim pousse ainsi les populations à ne plus respecter les prescriptions légales. Certaines vont même jusqu’à manger leurs propres enfants. On atteint les pires horreurs relatées par le texte biblique.

b) L’émigration comme solution

Pour s’en sortir et éviter ces situations catastrophiques, nombreux sont ceux qui émigrent dans des pays voisins non affectés. Cette conséquence est profondément actuelle mais elle est déjà bien présente dans les récits bibliques. C’est ainsi qu’Élimélec part s’installer dans le pays de Moab après qu’une famine est survenue en Juda (Ruth 1.1). La ville de Bethléhem où il habitait signifiait pourtant « la maison du pain » mais force est de constater qu’en ce temps-là le pain manquait.
L’histoire de famine la plus célèbre dans la Bible est peut-être celle qui voit Joseph gérer les affaires du pharaon en Égypte (Gen 41.53-57). Les populations de tous les pays environnants s’y rendent pour s’approvisionner en vivres. Parmi elles, on retrouve les frères de Joseph. Ce récit souligne alors la façon dont Dieu peut se servir de la famine pour accomplir son plan pour son peuple.

III. Les enseignements de la famine

a) Une interpellation spirituelle

Quelles que soient les raisons à l’origine de la famine, le manque de nourriture rappelle la dépendance de tout être humain à l’égard de Dieu. Lui seul peut pourvoir à nos besoins dans sa grâce. À l’image du peuple d’Israël, c’est vers lui qu’il nous faut nous tourner : « Ils souffraient de la faim et de la soif ; leur âme était abattue. Dans leur détresse, ils ont crié à l’Éternel, et il les a délivrés de leurs angoisses » (Ps 107.5).
Mais la Bible va plus loin encore. Quand bien même nous aurions le pain en abondance, nous ne pourrions être pleinement satisfaits. La faim matérielle est l’illustration d’une faim plus profonde qui est en nous, mais d’ordre spirituelle. C’est de celle-ci surtout que Dieu veut nous rassasier : « L’homme ne vivra pas de pain seulement, mais de toute parole qui sort de la bouche de Dieu » (Mat 4.4).

b) Un engagement concret

Si la faim questionne notre rapport à Dieu, la Bible conçoit néanmoins l’être humain dans sa globalité.
On aurait alors tort de restreindre cet enseignement à un enjeu spirituel. Si Jésus enseignait principalement les foules, il va bien multiplier des pains pour remplir leurs estomacs : « Je suis rempli de compassion pour cette foule, car voilà trois jours qu’ils sont près de moi, et ils n’ont rien à manger » (Marc 8.2).
Lorsqu’une grande famine survint dans le Nouveau Testament, les croyants ne restèrent pas immobiles. « Les disciples décidèrent d’envoyer, chacun selon ses moyens, un secours aux frères et sœurs qui habitaient la Judée » (Act 11.29) .
Voyons aussi la famine comme une occasion de « faire le bien » envers des croyants dans le besoin mais aussi plus généralement envers tous ceux qui ont faim et qui sont faits de la même chair que nous (És 58.7). La Bible nous invite ainsi à ne pas garder nos mains fermées mais à partager notre pain !


« A fame, bello et peste, libera nos Domine » ou « De la faim, de la guerre et de la peste, délivre-nous, Seigneur » : cette fameuse prière du XIV e siècle évoque à elle seule l’impuissance des hommes face à ces fléaux dits « du Moyen Âge ». En vérité, ces trois plaies récurrentes, censées être vaincues, n’ont jamais disparu. Elles progressent même aujourd’hui, avec une troublante actualité, telle la faim qui touchait jusqu’à 828 millions de personnes en 2021, un chiffre en forte hausse depuis deux ans, d’après un rapport de l’ONU qui alerte que le monde s’éloigne de plus en plus de son objectif de mettre un terme à la faim d’ici 2030. Avec le conflit en Ukraine, aux portes de l’Europe, la guerre se rappelle au mauvais souvenir de ceux qui croyaient en être éloignés, même culturellement, alors que se poursuivent les combats en République démocratique du Congo, forçant le déplacement de pans entiers de population — sans oublier des soulèvements populaires, notamment en Iran et au Sri-Lanka.
Après un Promesses spécial « épidémies et fléaux », en 2021, suit logiquement ce numéro « guerres et famines », traitées sous des angles humanitaire, théologique, éthique, historique et pastoral.
Puissent ces contributions nous questionner et inspirer notre positionnement au Nom de Celui qui vient à nous comme « le pain d’en haut » (Jean 6.32-35) et nous laisse « sa » paix (Jean 14.27).


Le désir d’échapper au vieillissement et à la mort existe depuis l’Antiquité. Au Moyen-Âge, les alchimistes européens recherchaient l’élixir de jouvence, la fontaine de jeunesse ou la pierre philosophale qui auraient permis de prolonger indéfiniment la vie.

De nos jours de nouveaux termes apparaissent ; la « médecine régénérative » vise à réparer ou remplacer les cellules ou organes défaillants. Le « transhumanisme » a l’ambition d’enrichir l’être humain avec de nouvelles ressources scientifiques et techniques : il rêve de machines capables de se connecter à un cerveau et de le télécharger pour qu’une personne survive numériquement à son décès.
La Bible répond à ce désir d’immortalité ! Elle affirme en effet que l’existence se poursuit au-delà du décès, pour une durée illimitée. Mais elle nous laisse la responsabilité de choisir entre :
• La « seconde mort » : le bannissement définitif loin de Dieu, une éternité de tourments avec le diable [note] Apoc 20.10-15 [/note] – si l’on refuse le pardon de Dieu.
• La « vie éternelle » : la présence de Dieu, dans un lieu d’une beauté inimaginable, sans deuil ni tristesse [note] Apoc 21.3-7 [/note] – si l’on accepte le pardon et l’autorité de Dieu [note] Jean 3.16 [/note] .

Cette vie éternelle n’est pas définie uniquement par son absence de fin, mais aussi par sa qualité : c’est une relation personnelle avec le Père et avec Jésus-Christ [notre]Jean 17.3 – 5[/note] , qui nous transforme dès maintenant [note]1 Jean 5.13[/note] , pendant notre vie terrestre !


La Bible mentionne quelques hommes qui se sont donné la mort. S’agit-il alors de suicides ? Ce n’est pas le cas de tous. Certains s’ôtent la vie : désespérés, ils veulent mettre un terme à leur existence ; d’autres donnent leur vie : ils acceptent la mort comme un moyen de servir Dieu ou de protéger la vie d’autres personnes.

Dans la première catégorie, on trouve des hommes qui se sont suicidés pour échapper aux conséquences de leurs actes, ou en finir avec leur mal-être, leurs remords stériles. Car les remords ne sont pas une vraie repentance où l’on a pris conscience de la gravité de son péché et où l’on s’humilie sincèrement devant Dieu ; ils n’amènent pas à confesser le péché devant Dieu, ils ne suffisent pas pour recevoir son pardon (Rom 2.4; 2 Pi 3.9). Le remords, c’est la tristesse causée par le résultat de son iniquité, alors qu’elle devrait l’être par l’offense faite à Dieu et par le mal occasionné à autrui. Sans confession, pas de pardon, pas d’espérance : cet accablement ne peut être apaisé, il ne peut que conduire à la mort (2 Cor 7.10).
Dans la seconde catégorie, la mort est acceptée comme un sacrifice permettant de vaincre l’ennemi, d’ouvrir les trésors de la bonté divine à notre prochain. C’est un don de soi, c’est aimer selon Dieu, sans limite (cf. Jean 3.1), en action et en vérité ! (1 Jean 3.18).
Distinguons cinq cas différents.

S’ôter la vie

• Abimélec, fils de Gédéon, a mis à mort ses frères pour prendre le pouvoir (Jug 9.1-6). L’Éternel ne peut oublier cet acte odieux. Ainsi, lors d’un siège, il a le crâne fracassé par un morceau de pierre jeté par une femme. Alors qu’il est en train de mourir, il refuse de saisir cette ultime occasion pour manifester un quelconque regret ou repentir. Non ! ce qui compte à ses yeux c’est de ne pas perdre la face.
Lui, le roi, être battu par une femme… quelle honte ! Il ordonne donc à son porteur d’armes de le transpercer de son épée (Jug 9.54). Cette fin tragique n’a rien de noble ou d’héroïque. Elle ne relève en rien l’image de cet homme violent et imbu de sa personne.
• Achitophel, conseiller d’Absalom, préfère se donner la mort en s’étranglant plutôt que d’affronter les conséquences de sa trahison envers le roi David (1 Sam 17.23). Quand il comprend que son plan rusé pour tuer David ne sera pas suivi par Absalom, il décide de se donner la mort, ne pouvant supporter l’affront d’un désaveu.
• Saül, roi d’Israël, a bien débuté ; mais il s’enferme ensuite dans la désobéissance envers Dieu. Son parcours se termine lamentablement sur la montagne de Guilboa. Rejeté par Dieu à cause de ses péchés et de son obstination, il est acculé par les Philistins en ce dernier combat. Grièvement blessé, il demande à son porteur d’armes de mettre fin à ses jours. Tremblant devant son monarque, ce dernier n’ose pas … ce qui pousse Saül à se jeter lui-même sur son épée (1 Sam 31.4). Le serviteur, par un acte d’imitation ou de désespoir, se suicide de la même manière. Dans cette scène tragique, c’est la peur de tomber entre les mains des ennemis, la peur d’être humilié, battu, torturé et cruellement mis à mort qui l’emporte.
• Zimri, conspirateur et meurtrier de son roi, voyant qu’à son tour il allait être renversé et tué, se retire dans son palais et le brûle sur lui (1 Rois 16.18). C’est ainsi qu’il meurt à cause des péchés qu’il avait commis.
• Judas, disciple de Jésus, troublé et pris de vains remords pour sa trahison, essaie de revenir en arrière. Devant le refus des Juifs, il leur rapporte leur argent et va se pendre (Mat 27.5).

Souhaiter la mort

• L’épouse de Job, accablée par le deuil et le dénuement, pousse son mari à se laisser mourir… voire plus. Job reste ferme. Il ne cède pas à la tentation d’en finir. Et même s’il regrette, dans son chagrin, le jour de sa naissance (Job 3.1), il est consolé par Dieu et béni durant le reste de ses jours.
• Élie, après une éclatante victoire sur l’idolâtrie, en vient à demander la mort parce qu’il se croit à tort isolé face aux menaces sur sa vie (1 Rois 19). L’Éternel le réconforte et lui fait comprendre qu’il n’a pas à décider lui-même du moment de son départ.
• Jonas est repris par l’Éternel pour avoir demandé la mort plutôt que de voir ceux qu’il considérait comme des ennemis être les bénéficiaires de la bonté de Dieu (Jon 4). Son cœur s’irrite de ce que Dieu ne faisait pas de différence, de ce qu’il était également bon envers les méchants et leur faisait grâce s’ils se repentaient. Est-il aussi irrité en constatant que le jugement qu’il a annoncé ne s’est pas produit ? Être déçu de Dieu, par manque d’amour, est un réel danger qui conduit à de telles demandes insensées.

Être proche de la mort

• Paul, apôtre et serviteur de Jésus Christ, a souffert en bien des manières pour le nom de son Maître (Act 9.16). Il en arrive au point de se sentir tout proche de la mort (« désespérer de vivre », 2 Cor 1.8-10). Mais il reçoit les forces au moment opportun, tout au long de sa carrière terrestre ; il peut alors déclarer que le Seigneur s’est tenu à ses côtés et qu’il le délivrera de toutes mauvaises actions (2 Tim 4.17-18).

Donner sa vie

• Samson a connu beaucoup d’écarts et de chutes dans sa vie de serviteur de Dieu ; mais il la termine par ce qui n’est pas un suicide mais bien plutôt un acte héroïque, un sacrifice. L’Éternel lui permet de remporter une dernière victoire donnant sa vie pour la délivrance de son peuple. Dans sa mort volontaire sous les décombres du palais des Philistins, il remporte une grande victoire sur ceux-ci (Jug 16.22-31).
• Jésus, Fils de Dieu et fils de l’homme, le seul parfait en tous points, a donné sa vie pour glorifier son Dieu et satisfaire sa justice, pour nous délivrer de la main de notre ennemi (Héb 2.15), de la puissance des ténèbres (Col 1.13), de la colère à venir (1 Thes 1.10). Il a accepté de mourir pour nous associer à sa mort et à sa résurrection, pour nous ouvrir les immenses richesses de la grâce de Dieu, pour nous donner, par-delà la mort physique, un sûr et éternel avenir avec lui.

Le Seigneur Jésus a donné sa vie (Jean 10.17-18), personne ne lui a prise ! Il s’est livré en sacrifice à Dieu. S’il a accepté de mourir, c’est pour nous sauver. S’il s’est laissé conduire au supplice et n’a en rien esquivé cette mort humiliante et honteuse, alors qu’il avait le pouvoir de le faire (Mat 26.53), c’est par amour pour son Dieu et Père et par amour pour sa créature.

Conclusion : et nous ?

Fils et filles de Dieu, prenons garde à nos voies et à nos pensées… au renouvellement de celles-ci. Ne laissons pas les fruits de notre esprit se gâter et amener la corruption de la mort dans notre vie. Rejetons toute idée qui chérirait la mort physique comme délivrance à l’adversité, à la souffrance et aux soucis. Certes, il peut arriver que, dans des circonstances extrêmes, nous aspirions à quitter notre corps de misère, mais notre espérance doit être plus fondée sur le fait d’être revêtu de la plénitude de la grâce de Dieu que d’être délivré des souffrances de cette terre (2 Cor 5.1-4).
Frères et sœurs en Jésus Christ, nous connaissons le véritable amour en ce que Jésus a laissé sa vie pour nous et que nous devons laisser nos vies pour ceux et celles de la famille de la foi (1 Jean 3.16-17). Si cela doit aller jusqu’au sacrifice de notre vie, que Dieu nous en donne l’acceptation et la force, comme c’est le cas encore aujourd’hui pour plusieurs des nôtres dans les persécutions et guerres ; mais n’acceptons jamais l’idée de provoquer notre mort pour être délivré de nos angoisses et détresses. « Mes temps sont en ta main » (Psaumes 31.15).

Pour aller plus loin : Henri Blocher, Du suicide, Ichtus – https://evangile21.thegospelcoalition.org/article/n-7-novembre-1970-du-suicide/


Peut-on se faire incinérer ?

La Bible ne traite pas du sujet de l’incinération de la même manière qu’elle traite de la vie éternelle ou de la certitude de la résurrection qui sont clairement enseignées par la Bible. Nous n’avons que quelques indices.
La Bible enseigne que le corps est le Temple du Saint-Esprit, invitant à considérer le nôtre d’une autre manière qu’une simple enveloppe charnelle. Il est vrai que le nouveau corps de l’enfant de Dieu ne sera pas fait de chair et de sang, mais plusieurs textes bibliques montrent que le corps des défunts est traité avec respect (Gen 50.7 ; 2 Sam 2.4-5 ; 21.12-14 ; Act 8.2). Moïse lui-même est enterré par l’Éternel Dieu (Deut 34.6).
Plusieurs exemples de la Bible montrent que les funérailles d’un proche ont été prises au sérieux et faites dans une grande dignité (Sara, Abraham, Jacob, Joseph, Saül, Jonathan, Jean-Baptiste et Étienne, par exemple). Pour autant, il n’y a aucune directive claire à ce sujet, les exemples tirés des textes narratifs de l’Écriture ne pouvant être considérés a priori comme des normes à suivre absolument.

On entend parfois les objections suivantes :

1. Le Nouveau Testament mentionne des « sépulcres » et des « tombeaux » (Jean 5.28-29 ; Mat 24.28). Ces textes n’évoquent pas des cendres mais bien des tombes avec des corps enterrés. Pourtant, Jésus savait bien qu’au cours des siècles, les cadavres ne restent pas tous dans les sépulcres et les tombeaux. De plus, certains chrétiens périssent brûlés. Jésus, en mentionnant les tombeaux et les sépulcres, utilisait une image pour évoquer ceux qui sont morts sans mentionner seulement ceux qui sont physiquement et réellement dans des tombeaux. Il ne donnait pas d’indication quant au style de sépulture.

2. La destruction du corps par le feu est mentionnée dans l’Ancien Testament en lien avec un jugement (Lév 20.14 ; 21.9 ; Jos 7.25 ; 1 Sam 31.12 13).
On peut nuancer en remarquant que l’incinération n’est pas proscrite. De la même manière, il n’est pas commandé de placer les corps dans des grottes, comme Abraham par exemple (Gen 25.9).

3. Les pratiques bibliques évoquent largement l’inhumation, mais il n’y a pas de directive qui exige de faire la même chose. Dans le Nouveau Testament, nous trouvons aussi la pratique d’embaumer les corps, ce que nous ne faisons pas, et qui n’est d’ailleurs pas commandé.

4. Jusqu’au début du XX e  siècle, de nombreuses incinérations concernaient des personnes opposées à Dieu, qui lançaient ainsi un défi à ceux qui enseignaient un jugement après la mort. L’Église catholique a longtemps condamné cette pratique. En réalité, l’incinération ne peut empêcher le Souverain Juge d’exercer son jugement. De même, certaines personnes pensent que l’incinération permet une certaine purification par le feu, ce que n’enseigne pas la Bible ; au contraire, la purification n’est possible que par le sang de Christ (1 Jean 1.7).

Que penser ?

Nous ne trouvons aucune interdiction claire de l’incinération, aucun ordre demandant d’enterrer les morts. S’il est important de s’occuper dignement des corps, le choix d’enterrer ou d’incinérer n’a pas de conséquence sur le devenir éternel des personnes.
Il faut aussi rappeler que le corps ressuscité étant un corps spirituel (1 Cor 15.35-54), la continuité entre le corps physique actuel et le corps de résurrection n’est pas physique ; la destruction des molécules du corps par le feu n’a aucune incidence sur la résurrection. De même, le corps ne reste pas intact sous la terre et il ne reste généralement pas dans le tombeau. Après un certain nombre d’années, les ossements sont mis dans un ossuaire commun et parfois traités avec de la chaux vive ou brûlés (en France en tout cas).
Il existe diverses sensibilités concernant l’incinération (ou crémation). Il convient de respecter les différentes manières de penser tant qu’elles ne s’opposent pas à l’enseignement explicite de l’Écriture. Affirmer que l’incinération ne permet pas la résurrection ou aura des conséquences néfastes sur le nouveau corps est un enseignement dangereux qui nie l’œuvre de Christ à la croix et ses conséquences. Les conseils de l’apôtre Paul en Romains 14 nous aident aussi pour les aspects pratiques de cette question :

1. Puisqu’il n’y a pas de directive claire dans l’Écriture, il n’est ni juste ni bon de critiquer un frère ou une sœur qui choisit de se faire incinérer ou qui refuse absolument la crémation.

2. Certaines personnes, membres de la famille ou proches, pourraient être choquées par une incinération ou mal vivre leur deuil faute de tombe. Dans ce cas, un enterrement traditionnel peut être préféré, par respect pour les vivants, tout en précisant que la personne n’est pas dans la tombe et que son avenir éternel ne dépend pas du traitement de son corps après son décès.

3. On peut préférer l’incinération, parfois moins coûteuse et qui peut éviter l’entretien d’une tombe, notamment lorsque la famille habite loin du lieu de l’inhumation. D’autres mettent en garde contre la pollution entraînée par l’incinération de personnes qui ont des amalgames dentaires contenant du mercure.

Pour conclure

Il est important que chacun soit convaincu de ses choix (Rom 14.5). Mais il n’y a pas d’argument théologique clair et décisif en faveur d’un choix. Les motivations sont importantes et le choix d’une méthode ne doit pas être dirigé par des considérations faisant intervenir de fausses doctrines (comme la purification par le feu, ou la croyance que le corps physique doit être préservé). Enfin, il convient de veiller à ne pas choquer inutilement nos proches.

Source : Un chrétien peut-il être incinéré ?
https://evangile21.thegospelcoalition.org/article/evangile-21-repond-un-chretien-peut-il-etre-incinere/


L’espérance chrétienne face à la mort ne supprime pas la douleur de la perte de nos proches. Comment mettre en pratique l’exhortation de Paul : « Consolez-vous donc les uns les autres par ces paroles » (1 Thes 4.18) ? En reliant l’analyse du parcours du deuil avec les vérités bibliques, cherchons comment devenir un interlocuteur à l’écoute des besoins des personnes endeuillées que nous rencontrons.
Cette étude relève donc de la théologie pratique plus que de la dogmatique.

L’accompagnement des personnes endeuillées fait partie de notre mission en tant que chrétiens ; et pourtant nous nous trouvons souvent démunis.
Les conséquences du deuil pour les chrétiens sont nombreuses. La foi n’empêche pas leur impact ; parfois même, la souffrance du deuil vient questionner la foi de nos frères et sœurs. Il nous faut donc nous armer pour pouvoir leur offrir un soutien fort et indéfectible !

1. La mort, un choc ! Et un questionnement…

Quand le souffle disparaît d’un corps pour ne laisser que de l’inerte, un temps de sidération est inévitable. Choc de l’irruption d’un changement définitif et total : la personne était vivante il y a quelques minutes et, d’un coup, elle n’est plus là, elle ne reviendra pas.
La Bible nous parle de ce choc de la mort qui surgit dans le monde créé par Dieu. En Romains 5.12, la mort est présentée comme la conséquence de la rupture avec Dieu. La réalité de la mort a impacté toutes les cultures. À travers l’Histoire et les continents, les rites funéraires ont pour objectif de créer un pont entre les vivants et les morts. Ils correspondent à un devoir à rendre à la personne décédée, en respectant ses dernières volontés et en facilitant son passage vers un au-delà ; les rites expriment aussi le besoin social d’entourer les proches.
Face à la mort d’un proche, chacun se questionne sur sa propre mort, inéluctable. À la douleur de perdre un être aimé, se mêle la conscience ravivée de sa propre finitude qui peut engendrer peur, tristesse, révolte…
Là aussi, on pourrait directement affirmer notre vie éternelle en Christ.
Mais n’oublions pas qu’avant notre résurrection, il y a aussi le passage par la mort, avec tout le dépouillement que cela suppose. L’enjeu est de pouvoir assimiler le fait inéluctable de devoir un jour traverser la mort, en donnant du sens à notre vie, du fait même de sa brièveté.

2. Le deuil, une épreuve de vie

Le deuil est un état douloureux provoqué par la perte d’un être humain. Le lien qui me mettait en relation avec l’autre est coupé.
Mais le deuil est aussi un parcours : le processus psychique par lequel une personne parvient progressivement à se détacher d’un être cher qui est mort.
Le deuil est un processus de guérison qui se fait dans la durée, naturellement. Chaque deuil est unique.
Néanmoins, on relève un certain nombre de constantes entre les histoires des uns et des autres.

Conséquences du deuil

• Psychologiques : ce sont les plus évidentes. 39 % des endeuillés disent avoir eu des effets psychologiques (allant dans 12 % des cas jusqu’aux pensées suicidaires) ;
• physiques : le corps parle et exprime la douleur par des symptômes très variés ;
• familiales et relationnelles  : l’endeuillé doit recomposer son paysage relationnel pour faire face au manque ;
• professionnelles : plus d’un actif sur deux a eu besoin d’un arrêt de travail pour encaisser le choc d’un deuil ;
• financières : diminution des ressources ou questions autour de l’héritage (jalousies, conflits au sein des fratries) ;
• spirituelles : selon une enquête, 30 % des personnes ont connu des ébranlements de conviction spirituelle.
Pour les chrétiens aussi, il se peut que la brutalité ou l’injustice de certaines morts vienne heurter leur foi.
Si Dieu est tout-puissant, comment peut-il accepter cette mort si atroce ? Si Dieu est amour, comment peut-il vouloir nous séparer ? Si Dieu écoute ses enfants, pourquoi n’a-t-il pas répondu aux demandes de guérison ou de protection ? Ces questions ont leur place dans le deuil. Les appels au secours des Psalmistes disent assez l’importance d’oser exprimer oralement sa souffrance.

Le temps du deuil

Une des découvertes de l’enquête du CRÉDOC [note]Centre de Recherche pour l’Étude et l’Observation des Conditions de vie, Consommation et modes de vie N° 286 ISSN 0295-9976, Octobre 2016[/note] est de montrer combien les processus de deuil sont plus longs qu’il n’y paraît. 42 % des français sont en deuil ! 24 % sont dans ce processus depuis moins d’un an, 34 % depuis 1-5 ans, 31 % depuis 5-20 ans, 12 % depuis plus de 20 ans. Dire que certains parlent d’un deuil à clore en quelques mois !
Comme dirait l’Ecclésiaste, il y a un temps pour tout.
Un temps pour rire et un temps pour pleurer (3.4). Le temps des larmes est utile pour vider son chagrin.

3. Les étapes du deuil

Elisabeth Kubler-Ross (médecin, pédiatre et psychiatre, 1926-2004) a défini des étapes du processus de deuil.
Chaque individu reste plus ou moins longtemps sur chaque étape. Dans les cas difficiles, certains endeuillés restent bloqués à une étape.
• Le choc et le déni : juste après le décès, la personne est coupée de la réalité par une sidération qui met à distance le stress. Même si le cerveau intellectuel a intégré le décès, l’information n’a pas encore atteint les niveaux plus intérieurs. Les émotions sont alors comme anesthésiées. Le déni s’apparente au refus de croire à la réalité.
• La colère : la colère est normale dans un processus de deuil. On est en colère contre les médecins, la famille, soi-même, la vie ou Dieu. Il y a aussi des colères contre le défunt : il nous a abandonnés, il n’a pas rempli son contrat relationnel.
• La négociation ou marchandage : c’est une volonté de remonter le temps, pour changer le cours des choses. Elle naît souvent de la culpabilité ; « si seulement j’avais fait ou pas fait… » On essaie ainsi d’échapper à son propre sentiment d’impuissance.
• La dépression ou tristesse : l’endeuillé ressent un grand vide intérieur. Il se replie sur lui et la dépression vient engourdir le système nerveux. La tristesse est légitime.
• L’acceptation : quand la vie reprend le dessus, une lente remontée a lieu ; l’endeuillé redéfinit son identité, sa relation aux autres, ses objectifs de vie… Celle-ci entraînera une période de reprise de la vie par petites touches. Puis on reprend progressivement la capacité à décider et choisir (Cf. David en 2 Sam 12.20,24).

Il y a dans la courbe des étapes du deuil un mouvement descendant puis un mouvement remontant. La phase la plus basse, au milieu, est celle de la tristesse ; elle peut surprendre l’entourage à un moment où l’on pense que, le deuil ayant déjà commencé depuis un certain temps, il serait possible de déjà remonter.
Or, le découragement et le vide se font souvent plus fortement ressentir au bout de quelques mois.

Concluons cette présentation des étapes du deuil en précisant que ce parcours mène à la vie : en sortant du deuil, on s’aperçoit que l’on peut non seulement survivre mais savourer la vie !

4. Accompagner le deuil

L’endeuillé peut croire que personne ne peut vraiment comprendre sa douleur. Accompagner le deuil, c’est rejoindre la personne pour briser le cercle de sa solitude, par sa présence. La consolation se nourrit de l’affection.

Écouter

Un des aspects de l’écoute est de reconnaître la légitimité du deuil et de toutes les émotions qui y sont liées. Cela demande une sensibilité pour faire preuve d’empathie, alliée à une solidité intérieure. Écouter est l’attitude première et essentielle.
L’écoute se fait d’abord autour de trois espaces de questionnements à développer :
• Qui ? Parlez-moi de lui… Il s’agit de faire parler du défunt. En faisant le récit de sa vie, de son caractère, avec quelques anecdotes, pour quelques minutes, on le fait revivre, on honore sa mémoire.
• Quoi ? Que s’est-il passé ? Qu’avez- vous vécu au moment du décès ? Les endeuillés ont besoin de raconter. C’est une façon de sortir du traumatisme et aussi d’accepter ce réel.
• Où en êtes-vous ? Après avoir parlé de celui qui est mort, il est bon de donner à la personne en deuil toute notre attention. Cela lui permet aussi de se recentrer et de reprendre contact avec la vie.

Le silence peut aussi avoir sa place : il ne s’agit pas là de remplir l’espace ou d’avoir le dernier mot. Voir pleurer quelqu’un peut mettre mal à l’aise. Mais permettre à la personne de pleurer, c’est lui offrir une épaule sur laquelle s’épancher pendant quelques minutes ; c’est prendre soin d’elle.

Soutenir

L’endeuillé est celui qui fait le parcours du travail de deuil. Il n’y a pas lieu de le faire à sa place. Cependant, l’accompagnement consiste à le soutenir. Ce soutien n’est à envisager d’une façon ni autoritaire (ne rien faire sans son accord), ni paternaliste (« vous devriez … »), ni lénifiante (« ça va passer »). Il s’agit plutôt de, pas à pas, nommer les avancées, chercher ensemble les appuis. En tant que chrétiens évangéliques, nous pouvons offrir une « constance sereine » : l’endeuillé peut exprimer sa douleur de façon paradoxale en alternant hyperactivité et abattement. Accepter ces variations avec calme fait partie de la mission de l’accompagnant. Soutenir, c’est aussi prier : assurer la personne de ma prière lui donne un appui affectif et spirituel. L’aider à retrouver elle-même le chemin de la prière est un soutien utile.
Parfois, le soutien le plus utile sera une aide matérielle (rangements) ou administrative (formalités). Le soutien sera particulièrement fort au moment des dates importantes : Noël, l’anniversaire du défunt et le premier anniversaire de sa mort. Le maître mot : accompagner la personne à son rythme et selon ses besoins !

Témoigner

C’est une tâche spécifique du chrétien : être témoin de l’Évangile, la bonne nouvelle du Salut. L’annonce de l’amour de Dieu est un des piliers de notre témoignage.
L’injonction de Paul que nous citions pour commencer : « Consolez-vous donc les uns les autres par ces paroles » (1 Thes 4.18) vient souligner le fait que les promesses de Jésus concernant la vie après la mort changent radicalement la perspective de la mort. Pour un chrétien, la certitude de la sérénité dans laquelle reposent nos bien-aimés disparus apaise la souffrance du deuil [note] Quand cette certitude est absente, l’apaisement demande une difficile prise de recul :Cf. John Piper, How do I find peace when unsaved loved ones die?The Gospel Coalition [NDLR] .

Pour conclure

Le prophète Ésaïe proclamait : « Consolez, consolez mon peuple ! » (40.1). Cet ordre prophétique est-il encore d’actualité ? Il semble bien si on écoute l’apôtre Paul : « Il nous console dans toutes nos détresses, pour nous rendre capables de consoler tous ceux qui sont en détresse, par la consolation que nous recevons nous-mêmes de Dieu » (2 Cor 1.3,4 ; trad TOB). Le mot grec est paraklesis pour consolation et parakaleo pour le verbe consoler. La racine « para-kaleo » revient 9 fois en 6 versets. Elle se traduit littéralement par « appeler auprès de… ». La consolation est bien une présence aux côtés de celui qui souffre.
Sachant que le parakletos est aussi le mot désignant le Saint-Esprit (Jean 15.26), on fera le rapprochement entre consolation et action du Saint- Esprit. La consolation est au cœur de la mission de Dieu envers chaque être humain et il veut nous employer à cela !
En conclusion, la consolation s’appuie sur la conscience de la douleur de l’autre, et la force d’une conviction chrétienne intérieure. La consolation se joue dans la vérité de cette relation d’affection. La consolation oblige donc son auteur à tenir ensemble la douleur de l’autre (sans l’occulter) et la force intérieure de sa propre foi.
Passer des larmes au sourire, sera ensuite son chemin de deuil, sur lequel nous l’accompagnerons, pas à pas, dans la confiance en Celui qui est la Vie.

Version condensée par la Rédaction de Promesses de : Nicole Deheuvels, « Accompagner le deuil », l’IBphile, n°194, avril 2022
https://www.ibnogent.org/ibphile-de-linstitut-biblique/


Expériences et réflexions d’un médecin

Il y a un an, ma grand-mère nous a quittés

C’était une grand-mère géniale et j’étais très proche d’elle. Dans ma jeunesse, je passais toutes mes vacances scolaires avec elle ; quand j’étais une jeune adulte, sa maison dans le Limousin était mon havre de paix.
Nous regardions des matchs de foot en mangeant des biscuits. Rien qu’en écrivant cet article, je sens des larmes me monter aux yeux. Elle est décédée d’un cancer généralisé… et franchement, ce n’était pas beau à voir. Dans les derniers mois, elle souffrait atrocement et nous – ses proches – le voyions bien, même si elle était très digne. Mon sentiment d’impuissance (je suis en médecine en plus !) était à son paroxysme. Voir ma « Maminette » changée par la douleur me brisait le cœur. À la fin, elle était perfusée en morphine 24h/24h… Bref, à l’époque, je n’aurais pas écrit un article sur l’euthanasie… car ce que j’aurais dit aurait sûrement été dicté par mon ressenti du moment ! La douleur et la souffrance que peut connaître un proche en fin de vie nous bouleversent et obscurcissent passablement notre jugement. On risque alors de perdre un peu de notre capacité à raisonner et de notre objectivité quand on aborde la question de l’euthanasie.

Qu’entendons-nous par « euthanasie » ?

S’agit-il de refuser d’accorder un traitement de survie qui est pesant ou inutile ? De refuser d’accorder un traitement de survie quelle qu’en soit la raison ? D’obtenir d’un médecin qu’il vous tue à votre demande ?
On évoque souvent l’euthanasie comme un acte de compassion. On parle d’ « abréger les souffrances » d’un être aimé, de le laisser partir avec dignité…
Euthanasie veut littéralement dire « belle mort ».
La pratique n’est pas nouvelle. Dans la Bible, nous voyons le récit de l’euthanasie d’Abimélec. Une tierce personne est chargée de le tuer pour lui donner « une mort digne » (Jug 9.52-54). Mais même si l’argument est souvent bien présenté (on remplace les termes « suicide assisté » ou « meurtre » par des termes plus flatteurs), rappelons-nous ce que nous dit la Parole de Dieu. En Genèse 9.1-7, Dieu régule la vie des humains dans le monde de l’après-déluge. Puis il établit un droit pénal (ou punitif) qui reflète la valeur de la vie : si quelqu’un met à mort, il devra être mis à mort par d’autres êtres humains. Ce qui est souligné ici, c’est que tuer un être humain porte atteinte à l’image même de Dieu. Nul ne peut impunément verser le sang d’un autre être humain (voir aussi Exode 20.13).

Le débat soulève d’autres problématiques

1. L’erreur diagnostique et/ou la possibilité de guérison

L’erreur de diagnostic est beaucoup plus fréquente qu’on ne l’imagine. En médecine (et je suis bien placée pour le savoir), le diagnostic comme le pronostic d’un patient sont sujets à erreur. Le Scaphandre et le Papillon est une autobiographie de Jean-Dominique Bauby (ex-rédacteur en chef du magazine féminin Elle). En 1995, il est victime d’un accident cardio-vasculaire qui le plonge dans un coma dont il sort affecté du syndrome d’enfermement. Conservant la plénitude de ses capacités intellectuelles, il ne peut plus mouvoir que l’une de ses paupières, ce qui lui permet d’établir une communication avec d’autres personnes. Dans le livre (écrit en dictant chaque lettre par le clignement de son œil gauche) il raconte son expérience du « locked-in syndrome » qui l’a enfermé dans un corps ne répondant plus à son esprit. Au moment où Jean-Dominique Bauby a été transporté à l’hôpital, tous croyaient qu’il était dans un état végétatif chronique et on voulait lui ôter les respirateurs et les sondes qui le nourrissaient. Mais cet état végétatif chronique était un mauvais diagnostic. Voici un extrait de son livre :
Je reçois des lettres remarquables. On les ouvre, les déplie et les expose sous mes yeux selon un rituel qui s’est fixé avec le temps et donne à cette arrivée du courrier le caractère d’une cérémonie silencieuse et sacrée. Je lis chaque lettre moi-même scrupuleusement.
Certaines ne manquent pas de gravité. Elles me parlent du sens de la vie, de la suprématie de l’âme, du mystère de chaque existence et, par un curieux phénomène de renversement des apparences, ce sont ceux avec lesquels j’avais établi les rapports les plus futiles qui serrent au plus près ces questions essentielles. Leur légèreté masquait des profondeurs. Étais-je aveugle et sourd ou bien faut-il nécessairement la lumière d’un malheur pour éclairer un homme sous son vrai jour ?
Cet homme, que d’autres ont considéré comme un légume, était pleinement « présent ». De même, dans d’autres situations, on risque de proposer l’euthanasie à des personnes pour qui la guérison reste parfois possible… Je pense par exemple à des personnes tétraplégiques qui se croient sans espoir de remarcher un jour, alors qu’ils y parviennent au bout de quelques années !

2. La valeur de la vie

Nous avons déjà parlé de ce grand principe à maintes reprises, mais je vais le marteler une fois de plus : la valeur de la vie se mesure à l’aune de Dieu ! Une vie reflète sa gloire, même dans la maladie, même dans la souffrance. Elle interpelle la compassion des autres et invite à partager ces fardeaux. Rappelons-nous que l’euthanasie est souvent motivée par la souffrance ou la peur : une personne qui souffre énormément ou qui a peur de souffrir, peur d’être dépendante, peur d’être indigne… ou une personne qui se sent inutile ou qui craint de le devenir. Il est pathétique et tragique que des personnes âgées ou handicapées fassent l’objet d’une pression silencieuse, où l’on évoque le coût de leurs soins par exemple. Combien de gens ressentent dans leur vie même une forme de culpabilité inacceptable ?

3. Le dérapage de la généralisation

Sans vouloir être alarmiste, je tiens à faire remarquer qu’en toute logique à partir du moment où le confort devient le critère retenu d’une vie qui mérite d’être vécue, même les déprimés pourront un jour demander l’euthanasie [note] La législation a nettement évolué dans ce sens depuis la rédaction de l’article, notamment en Belgique.[/note] .
Une fois que l’Allemagne nazie s’est emparée du livre Destruction des vies qui ne valent pas la peine d’être vécues [note] Karl Binding et Alfred Hoche, Die Freigabe der Vernichtung lebensunwerten Lebens (=Libéralisation de la destruction de vies qui ne valent pas d’être vécues),1920.[/note] , elle a créé la notion d’« homicide légitime aux malades incurables ». Le droit à la vie devait se justifier.
On se mit alors à calculer en cours de mathématiques le coût que représentaient les vieillards malades.
Un programme d’extermination se mit en place. À Hartheim, 70 273 individus ont été tués, réalisant une économie de 245 955 Reichsmarks. Lors des procès de Nuremberg, un psychiatre américain tenta de comprendre comment des hommes cultivés avaient pu en arriver là. Son constat : tout découlait de l’idée que la vie n’est pas digne, en elle-même, d’être vécue et que la valeur d’une vie se mesurait à son mérite.

4. Le rôle du médecin

Le serment d’Hippocrate (que doivent prêter tous les nouveaux médecins) décrète que le médecin ne s’occupe que du pouvoir de la vie (et non de la mort) :
« Dans toute la mesure de mes forces et de mes connaissances, je conseillerai aux malades le régime de vie capable de les soulager et j’écarterai d’eux tout ce qui peut leur être contraire ou nuisible. Jamais je ne remettrai du poison, même si on me le demande, et je ne conseillerai pas d’y recourir. Je ne remettrai pas d’ovules abortifs aux femmes. [note] Extraits du texte antique. Les versions actualisées sont plus évasives sur ces points. [NDLR] [/note]  »
Un médecin qui tue ? C’est un retour tragique d’au moins 2 500 ans en arrière dans la morale.
En revanche, je dirais que s’il est bibliquement défendable de ne pas attenter à la vie, il n’est pas bibliquement défendable de chercher à la prolonger à tout prix.
Selon la médecine actuelle, la mort est un échec.
J’ai souvent vu lors de mes stages des médecins s’acharner sur des patients, ne pouvant admettre qu’ils avaient «  échoué  » à sauver un patient  !
Mais la perspective biblique est que la mort n’est pas un échec. C’est l’aboutissement de la vie et une réalité inéluctable… alors non à l’acharnement thérapeutique ! Il faut reconnaître la différence entre nourrir un corps inconscient (fonctions normales et vitales) et imposer aux corps des traitements très lourds, pénalisants, douloureux, pour prolonger une agonie dont l’issue est certaine. Alors doit-on juste se croiser les bras en regardant l’agonie de nos proches ? Non ! Heureusement la médecine a fait des progrès incroyables et propose une alternative : les soins palliatifs. On estime qu’un spécialiste est capable d’abolir totalement la douleur physique dans environ 95% des cas. Et il reste alors la douleur spirituelle et émotionnelle, qu’il faut combler par la compassion, le dialogue et la présence. La Bible n’est pas opposée à l’idée d’alléger la souffrance du mourant. Par exemple Proverbes 31.6 nous dit : « Donnez des boissons fortes à celui qui périt et du vin à celui qui a l’amertume dans l’âme. »
Voici mon appel pour la médecine en France : je rêve qu’un jour, au lieu de dépenser des millions dans le développement de la chirurgie esthétique on investisse dans la recherche sur le traitement de la douleur. Aujourd’hui, beaucoup de médecins et de politiciens sont pro-euthanasie, car c’est une solution de facilité ! On ne veut pas voir la mort, la souffrance et on ne veut surtout pas avoir à s’en occuper… alors on élimine le problème. Mais cela revient à s’amputer la main, parce qu’on s’est cassé un ongle. Au lieu de considérer l’euthanasie comme la solution miracle, ne peut-on pas se retrousser les manches et améliorer la prise en charge physique, psychologique et morale des mourants avec des pôles multidisciplinaires (médecins, infirmières, assistance sociale et pasteurs/prêtres) ?

https://www.larebellution.com/2013/04/14/du-caractere-sacre-de-la-vie-fin-de-vie-euthanasie-12/
https://www.larebellution.com/2013/04/21/du-caractere-sacre-de-la-vie-fin-de-vie-euthanasie-22/