PROMESSES
Il ne brisera point le roseau cassé, et il n’éteindra point la mèche qui brûle encore. (És 42.3)
Je sais en qui j’ai cru, et je suis persuadé qu’il a la puissance de garder mon dépôt jusqu’à ce jour-là. (2 Tim 1.12)
Toi donc, mon enfant, fortifie-toi dans la grâce qui est en Jésus-Christ. (2 Tim 2.1)
Toi, demeure dans les choses que tu as apprises, et reconnues certaines, sachant de qui tu les as apprises : dès ton enfance, tu connais les saintes lettres, qui peuvent te rendre sage à salut par la foi en Jésus-Christ. Toute Écriture est inspirée de Dieu, et utile pour enseigner, pour convaincre, pour corriger, pour instruire dans la justice. (2 Tim 3.14–16)
J’ai combattu le bon combat, j’ai achevé la course, j’ai gardé la foi. Désormais, la couronne de justice m’est réservée ; le Seigneur, le juste juge, me la donnera dans ce jour-là, et non seulement à moi, mais encore à tous ceux qui auront aimé son avènement. (2Tim 4.7–8)
N’abandonnez donc pas votre assurance, à laquelle est attachée une grande rémunération. Car vous avez besoin de persévérance, afin qu’après avoir accompli la volonté de Dieu, vous obteniez ce qui vous est promis. (Héb 10.35–36)
Nous désirons que chacun de vous montre le même zèle pour conserver jusqu’à la fin une pleine espérance, en sorte que vous ne vous relâchiez point et que vous imitiez ceux qui, par la foi et la persévérance, héritent des promesses. (Héb 6.11–12)
Cette espérance, nous la possédons comme une ancre de l’âme, sûre et solide. (Héb 6.19a)
Fais-moi dès le matin entendre ta bonté, car je me confie en toi. Fais-moi connaître le chemin où je dois marcher, car j’élève à toi mon âme.. (Ps 143.8)
Comment accompagner une personne qui passe par une remise en question, voire une réelle crise de foi? Il s’agit déjà d’en comprendre les tenants et aboutissants.
Entretien avec Marie-Thérèse Courtet, auteure deUn modèle d’accompagnement (éd. CLC).
Comment définir une « crise »en ce qui concerne la foi ?
Il y a plusieurs degrés dans une crise traversée par une personne quant à sa foi. En effet, celle-ci peut remettre en question le caractère de Dieu, notamment dans sa bienveillance et sa fidélité face à une épreuve ; mais elle peut aussi douter de la puissance de Dieu devant l’absence d’intervention de sa part dans une situation donnée ; ou encore se réfugier dans la colère et la révolte ou l’amertume, face à son silence apparent et ces dernières, si elles persistent, peuvent remettre en cause jusqu’à l’existence même de Dieu.
Une crise de foi se cantonne-t-elle vraiment au domaine spirituel ? L’émotionnel et le physique sont-ils aussi touchés ?
Puisque nous parlons de crise en matière de foi, il va sans dire que cela touche la sphère spirituelle de la personne ; sa relation avec Dieu va être affectée. Mais il est rare de passer par une crise spirituelle sans un élément déclencheur à l’appui, lequel peut être à la fois d’ordre psychique, émotionnel (la perte d’un proche, d’un travail, d’une amitié, etc.) et/ou physique (une maladie, un accident). Il se peut toutefois qu’une personne en vienne ä douter de sa foi simplement en ayant négligé de l’entretenir, ou par manque de fondements solides. En effet, il s’agit de vivre sa foi au quotidien dans une relation authentique et non pas d’avoir une simple pratique religieuse. Une foi vivante se nourrit dans la prière, la méditation de la Parole et la communion avec d’autres chrétiens engagés, faute de quoi elle va peu à peu s’étioler et risque alors d’aboutir à une crise.
Comment détecter qu’une personne est en crise dans sa foi ?
Un chrétien traverse une crise dans sa foi lorsqu’il commence à remettre en question les vérités bibliques de base comme le salut en Jésus-Christ, l’inspiration divine de la Bible ou la présence du Saint-Esprit en lui par la nouvelle naissance, notamment. Il se met à douter de tout ce qui concerne de près ou de loin la vie de foi et prend, dit-il, du recul. Cette position de retrait par rapport à Dieu et également souvent des chrétiens, est un indice certain d’un problème dans sa foi. La perte de paix intérieure et le manque d’enthousiasme voire d’intérêt vis-à-vis des choses de Dieu sont également des preuves.
Le premier élément nécessaire à tout accompagnement d’une personne en crise est sa volonté d’être aidée. À défaut, il faudra se contenter d’intercéder dans la prière et d’essayer de garder le contact si possible. Si la personne est prête à être aidée dans sa confusion et son questionnement, il s’agira, avec son aide, de déceler les causes de cette crise dans sa foi.
Si cela vient de l’Église en général ou de certains chrétiens en particulier, il conviendra de démêler malentendus et quiproquos souvent à l’origine d’un refroidissement dans les relations et dans sa relation à Dieu. Dans le cas d’offenses ou de blessures réelles, ou supposées mais vécues comme réelles, une demande de pardon peut être nécessaire.
Écouter et parler avec la personne sont alors essentiels pour comprendre et dénouer ce qui a provoqué cette crise. Cela n’exclut pas, bien entendu, la possibilité de recevoir, pour l’aider, un discernement venu directement du Seigneur par une révélation ou une parole de sagesse à propos.
Et si la crise est liée à une promesse qui ne se réalise pas, à des circonstances qui heurtent sa conception de Dieu ?
Si la crise est davantage le fait direct de la personne dans sa relation à Dieu, là encore, il faudra faire preuve de tact et de délicatesse, notamment lorsque celle-ci passe par une épreuve, des temps difficiles ou une attente déçue telle qu’une promesse reçue et non exaucée. Souvent derrière se cache une interprétation erronée des Écritures, telle que « Dieu guérit toujours », ou de faux enseignements qui poussent à croire que Dieu va satisfaire tous les désirs et répondre à toutes les demandes de ses enfants dans le sens souhaité.
Pour ce faire, il sera souhaitable de remonter le fil du temps pour arriver à la cause profonde de l’origine de la crise, en parler librement et démonter les systèmes de croyances contraires à la Parole de Dieu ; la personne aura alors besoin de les confesser pour s’en détacher et s’aligner avec une perception plus juste de Dieu. Il se peut encore que la crise aboutisse à une saine remise en question si la personne réalise, au cours des échanges, que sa foi n’avait été jusque-là qu’une simple adhésion mentale et non un engagement du cœur ; ou bien une confession du bout des lèvres sans implication profonde.
De quoi une personne qui vit une crise dans sa foi a-t-elle besoin ? Et de quoi n’a-t-elle pas besoin ?
Un chrétien en crise dans sa foi n’a pas besoin qu’on lui fasse la morale ou des reproches — un peu à la manière des amis de Job — mais bien plutôt d’une écoute sans jugement. Il faudra certes lui dire certaines vérités pour l’aider à se remettre sur les rails, mais au moment opportun, choisi de Dieu, dans l’amour et avec beaucoup de tact. Se sachant dans une mauvaise passe, il a besoin que les personnes qui l’entourent ou l’approchent fassent preuve de compréhension et de patience à son égard ; cela lui permettra de retrouver la confiance perdue : en soi, en Dieu et peut-être en les autres. Il a besoin de savoir que quelqu’un se tient à ses côtés, étant disponible, prêt à aider mais sans mettre de pression.
Faudrait-il plutôt s’adresser à son pasteur ou à un conseiller en relation d’aide, un psychologue ?
Une personne en crise de foi s’adresse en général à son entourage ou à des personnes de confiance avec un profil en relation avec l’origine de la crise. Cela peut être le pasteur ou un ami. Il faudrait aller consulter si on sent que l’origine de notre crise remonte à plus loin que l’événement déclencheur.
Quand le doute nous assaille, certains pièges peuvent nous perdre encore davantage. Comment les discerner?
Vous passez par une sérieuse remise en question de votre foi? Vous n’êtes ni le premier, ni le dernier. Cependant, pour affronter une période de doutes ou de confusion intérieure, il est des pièges à éviter et de bons réflexes à adopter.
Trois dangers principaux
Lorsqu’on traverse une crise, trois dangers principaux nous guettent, selon le théologien Robin Reeve, professeur à la HET-PRO. « Un premier travers à éviter est de laisser les sentiments et les impressions nous dominer ». Ces derniers ne sont pas forcément stables et ont tendance à davantage troubler l’individu qu’à le mettre en sécurité. « Les affirmations de la Bible sur notre salut, l’amour de Dieu, sa grâce, sont millénaires et constantes. Leur sens ne varie pas selon nos états d’âme. » En d’autres termes, elles constituent une sorte d’étoile polaire ou de phare dans la nuit, de repère.
Le second danger est « d’accorder aux mauvais exemples donnés par d’autres chrétiens ou des communautés un poids excessif ». Ce réflexe nous pousse à nous isoler de tous les croyants, au motif que les chrétiens ne sont pas meilleurs que les autres. Pour Robin Reeve, « d’une part nul n’est parfait et d’autre part oui, des erreurs sont commises par des chrétiens, par des Églises. Mais ces derniers ne sont pas Jésus. » Lorsque cette tentation survient, le théologien recommande de chercher une écoute auprès des chrétiens qui ne sont pas « sectaires ou abusifs. ll existe bien des Églises où la grâce, l’amour et la bienveillance prévalent. »
Enfin, troisième danger, c’est de penser qu’on est le seul à traverser une crise de foi. « Bien des personnages bibliques en ont connue. » De son côté, Eric Jaffrain, expert en marketing religieux et surtout fin observateur du protestantisme, remarque: « Le plus souvent, j’entre en crise de foi suite à une blessure piquée à vif par un événement inattendu ou une parole qui appuie là où ça fait mal. » Dans ces situations, le chrétien peut être tenté de se tromper de démarche: « Au lieu de questionner notre confiance en Dieu, il est indiqué de s’interroger sur les raisons de cette blessure ou de cette colère. »
Mesures pour se protéger
Eric Jaffrain conseille justement de se poser les bonnes questions. « Où vais-je trouver la guérison pour ma blessure? C’est plus prometteur que d’alimenter pensées et discussions autour de ma révolte. »
Deuxième conseil, ne pas placer sa foi en une Église, en un système. « Optez plutôt pour la foi de Dieu, créée et donnée par Dieu. Dieu est juste et bon; et le croire, c’est apprendre à changer mes définitions et mes jugements sur moi, sur les autres et sur Dieu. » En miroir au danger qu’il a évoqué, Robin Reeve encourage le croyant en crise à lire la Bible régulièrement. « Ne lisez pas de trop longs passages à la fois. Privilégiez des lectures courtes —par exemple les Psaumes dont les auteurs partagent votre situation— et écoutez simplement ce que Dieu vous dit. »
Autre conseil du théologien, ne pas rester seul. « Trouvez un ami croyant digne de confiance, pour vous écouter et cheminer avec vous. Évitez les donneurs de conseil ou un “ami de Job », qui activerait le levier de la culpabilité, du reproche. » Enfin, pourquoi ne pas continuer de fréquenter une communauté aimante, où la Bible est prêchée, où la louange édifie, où l’on peut prendre la Sainte-Cène? Robin Reeve rappelle que l’Esprit Saint « peut vous encourager, vous consoler, fortifier votre foi ». Ou peut-être même guérir votre blessure, comme le suggère Eric Jaffrain. Avec le temps, ce dernier a acquis la conviction que « nos questions à Dieu auront une réponse. Il faut juste être prêt à entendre, pas la réponse que je veux, mais celle qu’il donnera, en son temps. »
La foi est l’assurance des choses qu’on espère, et la conviction de celles qu’on ne voit pas (Héb 11.1). La foi est l’assurance des choses qu’on espère, et la conviction de celles qu’on ne voit pas (Héb 11.1).
Aujourd’hui nous voyons au moyen d’un miroir, d’une manière obscure […] aujourd’hui je connais en partie (extrait de 1 Cor 13.12).
Le premier texte montre le côté absolu de la foi.Si je doute de Dieu et de sa révélation, mon espérance disparaît. Ce doute destructeur est un ennemi.Le deuxième texte met en évidence les limites de mes capacités actuelles : le Saint-Esprit est à l’œuvre pour me révéler Dieu, mais ma vision humaine reste incomplète et floue. Parfois je me laisse égarer par des illusions ou par des influences parasites. Ma perception de la vérité doit donc être vérifiée pour être enrichie, affinée, corrigée ou complétée. Cet examen régulier et volontaire est un doute sain, visant à me rapprocher de la vérité. Ce doute est un allié.
Parfois le doute me surprend : je ne comprends plus ce qui se passe ; je me demande si je me suis trompé ou si on m’a trompé. Cette interrogation plus ou moins anxieuse signifie-t-elle que je laisse le doute refouler ma foi ?Toute question exprime-t-elle un doute ?
Parfois je laisse le doute s’infiltrer dans ma vie alors que je maintiens un « credo » impeccable dans ma tête. Un exemple : si j’affirme « l’assurance des choses que j’espère et la conviction de celles que je ne vois pas » mais qu’en même temps j’organise ma vie uniquement autour d’espérances et de valeurs terrestres, suis-je dans la foi ou dans le doute ?
Exclure le doute
Le premier verset cité (Héb 11.1) pose un fondement absolu, illustré à travers les exemples cités dans le reste de ce chapitre 11 : les affirmations et promesses de Dieu sont sûres. Même si leur accomplissement tarde, il n’y a pas lieu d’en douter, en aucune manière, pour aucune raison, à aucun moment.
En Dieu nous avons les opposés du doute : la certitude, la stabilité et la vérité :
-Il est impossible que Dieu mente (Héb 6.18).
-Toute grâce excellente et tout don parfait descendent d’en haut, du Père des lumières, chez lequel il n’y a ni changement ni ombre de variation (Jac 1.17).
-Nous savons que le Fils de Dieu est venu, et il nous a donné une intelligence afin que nous connaissions le Véritable, et nous sommes dans le Véritable, savoir dans son Fils Jésus Christ, lui est le Dieu véritable et la vie éternelle (1 Jean 5.20 ; cf. Jean 7.28,14.6).
Prévenir le doute
Quittons le domaine du divin pour celui de l’humain. Les limites de nos capacités et les conséquences du péché brouillent un peu la frontière entre certitude et doute.
Demeurer dans les choses apprises
Toi, demeure dans les choses que tu as apprises, et reconnues certaines, sachant de qui tu les as apprises (2 Tim 3.14 ; cf. 2 Tim 2.14)
Paul indique deux caractéristiques de ces choses que Timothée a apprises et doit conserver soigneusement :
• Tu les as reconnues certaines / tu en as été pleinement convaincu : il ne s’agit pas d’un cours à mémoriser. Il s’agit d’une vraie conviction spirituelle. Peut-être Timothée avait-il vérifié ces enseignements en enquêtant dans les Écritures comme les Juifs de Bérée (Act 17.11) ?
• Tu les as apprises d’une source particulièrement fiable (Paul ? cf. Phil 4.9 ; 2 Tim 1.13 ; 2 Tim 2.2). Écoutons surtout des personnes qui ont une vraie autorité spirituelle !
Permettre à l’Esprit de nous communiquer la vérité
Nous n’avons plus Paul parmi nous, mais nous avons un guide infatigable et toujours fiable : le Saint-Esprit. Il nous rappelle ce que Jésus a dit, il nous maintient connectés au Véritable.
-Quand celui-là, l’Esprit de vérité, sera venu, il vous conduira dans toute la vérité […]. Le Consolateur, l’Esprit Saint, que le Père enverra en mon nom, lui, vous enseignera toutes choses et vous rappellera toutes les choses que je vous ai dites (Jean 16.13 ; 14.26).
-Nous n’avons pas reçu l’esprit du monde, mais l’Esprit qui vient de Dieu, afin que nous connaissions les choses que Dieu nous a données par sa grâce. (lire 1 Cor 2.11-15).
La Parole est Vérité (Jean 17.17 ; Éph 1.13). L’Esprit conduit dans la vérité, convainc, rappelle les enseignements du Seigneur, fait connaître les choses que Dieu nous a données. Nous avons les moyens d’accéder directement à la vérité divine ; la conviction donnée par un Saint-Esprit libre d’agir est assez forte pour nous libérer des doutes profonds.
Reste à faire le ménage en moi pour m’assurer que l’Esprit n’est pas « attristé » (Éph 4.30) ou bloqué par des obstacles comme l’orgueil, le refus de pardon, le refus d’accepter toute la Parole de Dieu, la présence d’idoles dans mon cœur …
Être libéré des pièges du doute par la Vérité
Si je ne laisse pas agir le Saint-Esprit en moi, que se passe-t-il ? Je suis laissé à moi-même et je m’expose à d’autres influences spirituelles qui s’infiltrent, des contrefaçons inventées par le père du mensonge : faux-docteurs (2 Tim 4.3 ; 2 Pi 2.1), faux apôtres (2 Cor 11.13), faux frères (Gal 2.4), faux prophètes (1 Jean 4.1), faux ange de lumière (2 Cor 11.14), esprits séducteurs et doctrines de démons (1 Tim 4.1). Leur but est de m’amener à douter de la vérité pour m’égarer (2 Tim 3.13).
L’accusateur veut me faire douter de mon statut d’enfant de Dieu. Il cite peut-être des faits avérés… mais il reste un menteur : rien ne pourra me séparer de l’amour de Dieu (Rom 8.35-37), rien n’empêchera mon avocat auprès du Père de prouver qu’il a déjà porté toutes mes condamnations (1 Jean 2.1).
Fuir le piège du rationalisme, une idolâtrie
Les Européens ont une culture rationaliste. Ils aiment se présenter comme cartésiens, en référence au philosophe Descartes (17e siècle) et à son « doute méthodique » : soumettre toute opinion au filtre de la raison. Cette approche valorise l’intelligence logique et la mémoire. Une survalorisation de ces beaux outils est une idolâtrie car elle les met au-dessus de l’action de l’Esprit ; elle est aussi une fausse doctrine car elle enseigne un rôle du Saint-Esprit bien inférieur à celui qui est décrit dans les versets ci-dessus. Le christianisme rationnalisé produit au mieux du « rationnel », de la sagesse humaine, autrement dit une folie (1 Cor 1.20).L’idolâtrie existe aussi bien entendu sous d’autres formes.
Utiliser le (bon) doute, éviter l’assurance illusoire
Une absence de doute peut révéler une connaissance parfaite de la vérité ; seul Dieu détient cette connaissance parfaite. Elle peut aussi traduire une totale confiance en soi, une incapacité ou un refus de constater une erreur, d’admettre un échec, de reconnaître la précarité et les limites des raisonnements et intuitions. Dans ce cas, l’absence de doute révèle un mélange variable d’arrogance, d’orgueil, de légèreté, d’ignorance, d’inconscience, d’hypocrisie et de mauvaise foi.
L’examen de soi-même
Dieu m’encourage à m’examiner :
Examinez-vous vous-mêmes, pour savoir si vous êtes dans la foi ; éprouvez-vous vous-mêmes (2 Cor 13.5).
Il ne s’agit pas d’une introspection permanente et soupçonneuse, d’un doute de soi qui paralyse et condamne. Je demande à Dieu de me montrer ce qu’il veut transformer :
Sonde-moi, ô Dieu, et connais mon cœur ! Éprouve-moi, et connais mes pensées ! Regarde si je suis sur une mauvaise voie, Et conduis-moi sur la voie de l’éternité ! (Ps 139.23-24).
C’est une mise en doute ponctuelle, dans une attitude générale d’humilité, de soumission et de confiance envers Dieu, notre Père. C’est un doute utile et bienfaisant qui tire vers le haut ; à l’opposé du doute de défiance qui tire vers le bas, vers l’incrédulité et la désobéissance.
La prudence dans la réflexion
La sincérité, les bonnes intentions et les bons sentiments ne mènent pas automatiquement à une conclusion et à une décision justes ! L’indignation légitime et la spontanéité énergique du jeune Moïse l’ont conduit au meurtre (Ex 2.11-12). Josué et le peuple d’Israël ont réagi avec compassion et solidarité avec un peuple errant…. en fait des Cananéens rusés (Jos 9.3-4,16). L’amitié sincère de Pierre lui a fait dire ce que le diable aurait voulu dire à Jésus pour essayer de le décourager (Mat 16.23)
Comme tous les humains, nous nous croyons capables de réfléchir de manière neutre et objective. En fait nous sommes encombrés de « biais cognitifs » . Il s’agit de mécanismes involontaires qui provoquent un filtrage de nos perceptions et une distorsion de nos raisonnements. Par exemple le biais culturel m’amène à privilégier ce qui correspond à la culture de mon groupe ethnique, de mon milieu professionnel, de mon église. De plus notre mémoire n’est pas une référence sûre pour nos réflexions : elle est assez malléable pour effacer, sélectionner, transformer et même inventer des souvenirs. Nous nous croyons rationnels et logiques. Mais nous sommes aussi façonnés par nos sentiments, émotions, préjugés, traditions, partis-pris et intérêts.
Notre difficulté à « produire du 100% pur vrai » nous incite à la prudence, à un doute raisonnable et salutaire.
Distinguer quelques formes de doute
La transition entre incrédulité et foi
Aussitôt le père de l’enfant s’écria : Je crois ! Viens au secours de mon incrédulité ! (Marc 9.24).
C’est la demande d’un « débutant » en foi, mais un disciple reste toujours en apprentissage, en progression (Luc 17.5 ; 2 Thes 1.3). Ce que la foi ne s’est pas encore approprié reste dans une « zone grise », marquée par du doute, de l’incertitude.
L’attente de confirmation pour une étape spéciale
[Gédéon] dit : Je te prie, si j’ai trouvé grâce à tes yeux, donne-moi un signe que c’est toi qui parles avec moi (Jug 6.17).
Gédéon croit mais a besoin d’une confirmation pour être sûr d’avoir bien compris l’appel de Dieu. Et Dieu accepte, pour l’aider à franchir un seuil majeur dans l’expérience de sa foi.
La dépression
[Élie] alla dans le désert où, après une journée de marche, il s’assit sous un genêt, et demanda la mort, en disant : C’est assez ! Maintenant, Éternel, prends mon âme, car je ne suis pas meilleur que mes pères (1 Rois 19.4).
Élie se sent totalement indigne. Dieu l’a utilisé pour rappeler au peuple qu’il est le vrai Dieu (période sans pluie, démonstration de la puissance de Dieu face aux prophètes de Baal ; cf.1 Rois 18.22-40). Mais la reine Jézabel vient d’invoquer ses dieux en lui annonçant sa détermination à l’éliminer. Élie est démoralisé par un sentiment d’échec et par la menace de la reine. Il demande la mort ! C’est le signe d’une dépression profonde.
N.B. : La dépression spirituelle peut résulter d’un découragement, d’un éloignement spirituel mais aussi d’un mauvais fonctionnement de l’âme ou du corps. Soyons très prudents : cette forme de doute ne vient pas nécessairement d’une faiblesse spirituelle de la personne concernée.
La perplexité
La perplexité est le sentiment d’être dépassé par une situation difficile. On ne sait pas que penser et que faire. Pour désigner cet état d’esprit, le Nouveau Testament emploie le verbe aporein et le nom aporia (litt. absence de passage, d’où le mot français aporie, embarras du discours, impasse dans le raisonnement). Paul l’emploie à deux reprises, à son sujet et au sujet des Galates.
Étant dans la tribulation de toute manière, mais non pas réduits à l’étroit ; dans la perplexité mais non pas sans ressource (2 Cor 4.8 version Darby).
Il a été de fait dans une situation désespérée mais il a gardé sa confiance (foi) en Dieu :
Nous avons été excessivement accablés, au-delà de nos forces, de telle sorte que nous désespérions même de conserver la vie. Et nous regardions comme certain notre arrêt de mort, afin de ne pas placer notre confiance en nous-mêmes, mais de la placer en Dieu qui ressuscite les morts. (2 Cor 1.8-9).
Ce même sentiment de perplexité-confiance apparaît encore :
-Je suis en perplexité à votre sujet (Gal 4.20 version Darby).
-J’ai cette confiance en vous, dans le Seigneur (Gal 5.10).
La perplexité est la conscience que nous sommes au bout de nos ressources et de notre imagination ; elle n’est pas un manque de confiance en Dieu. Elle est bien de l’ordre de l’incertitude mais pas du doute envers Dieu.
L’hésitation, difficulté à choisir et décider
Mais celui qui a des doutes (Darby : hésite) au sujet de ce qu’il mange est condamné, parce qu’il n’agit pas par conviction (ou : principe de foi). Tout ce qui n’est pas le produit d’une conviction est péché (Rom 14.23).
Certains croyants juifs ont été élevés dans le respect des prescriptions cérémonielles de la loi. Ils sont maintenant sous la grâce, libérés de ces prescriptions ; mais ils hésitent, ils sont encore en transition entre la loi et la grâce. Renoncer aux prescriptions alimentaires de la loi est une telle rupture avec leur vie de Juifs zélés que leur comportement ne s’est pas encore ajusté à leur foi. Il ne faut pas les forcer !
Jacques recommande qu’en cas de manque de sagesse on en demande à Dieu… mais sans douter (Jac 1.5-8). Autrement dit : si vous demandez quelque chose à Dieu, ne cherchez pas en même temps à trouver des solutions sans lui. Vous risquez de ne pas arriver à faire un choix stable pour l’une de ces solutions que vous allez successivement imaginer ou essayer. Le doute commence dans l’ambivalence entre compter sur Dieu et compter sur soi. Il devient confusion quand nos idées successives nous conduisent à l’indécision et à l’instabilité.
L’ambivalence
Matthieu utilise à deux reprises un mot qui désigne une ambivalence (dualité), deux pensées opposées présentes en même temps : dans les deux cas une foi intense coexiste avec un sentiment déstabilisant de précarité, de perplexité, d’incertitude.
Ce n’est pas une hésitation paralysante entre croire oune pas croire ; c’est un mélange de foi dynamique et d’incertitude.
-Aussitôt Jésus étendit la main, le saisit, et lui dit : Homme de peu de foi, pourquoi as-tu douté ? (Mat 14.31).
-Quand ils le virent, ils l’adorèrent. Mais quelques-uns eurent des doutes (Mat 28.17).
Pierre a eu une foi extraordinaire en qualité mais limitée en quantité-durée ; le doute l’a rattrapé à mi-chemin entre la barque et Jésus. Pourtant il a reçu peu après les clés du royaume des cieux ! (Mat 16.19).
Les disciples ont obéi, ils se sont rendus de Jérusalem jusqu’en Galilée, sur la montagne que Jésus leur avait désignée (Mat 28.7,16) ; ils se prosternent et l’adorent ; ils démontrent ainsi leur foi. Un certain flottement apparaît cependant : ils sont probablement très impressionnés par ce « nouveau Jésus » et perplexes sur la suite des événements. Jésus s’approche d’eux, leur parle, les rassure et aussitôt leur confie la grande mission de faire des disciples. Quelle grâce de sa part !
Le doute « chrétiennement correct »
Il existe une forme invisible et inaudible du doute ; le doute banal, normal, ordinaire, modeste et humble. Un doute qui s’encourage dans les amitiés de groupes homogènes, qui se justifie dans des échanges bien cadrés, qui se réjouit en se contemplant dans des miroirs rassurants ;un doute par abstention. C’est le doute de l’indifférence par rapport à une partie de la Parole de Dieu. Je sais par exemple que Dieu veut me donner une nouvelle identité, me transformer à l’image de son Fils, me libérer de tout lien. Je sais que le Saint-Esprit habite en moi (Rom 8.9,11 ; 1 Cor 3.16 ; 2 Tim 1.14) ; je sais que Dieu est mon Père. Dans la réalité, où est mon curseur entre la foi totale et le déni radical sur ces points ? Quelque part dans la zone grise conciliant étrangement l’acceptation virtuelle et le doute réel. Une vie de « bon chrétien » religieux ou charnel exprime beaucoup de doute sur l’œuvre de Christ, sur la sainteté et l’amour de Dieu. Commettre un péché « en cachette », c’est douter de la toute-connaissance de Dieu.
Ce doute non verbalisé est proche de l’incrédulité. Pourtant il est souvent excusé au nom de la « faiblesse ». C’est bien une faiblesse… de la foi. Or une petite foi est une foi qui recule devant le doute !
Conclusion
Le Seigneur n’a pas connu le doute ; mais il a connu pire : le trouble (Jean 12.27), l’angoisse du combat (agonie, Luc 22.44), l’abandon, la détresse, des souffrances physiques et morales intenses. Il peut donc nous encourager dans « l’aujourd’hui », nous aider à surmonter nos doutes. Et nous attendons le jour où disparaîtront les doutes des questions sans réponse. Reprenons le verset cité en introduction, mais cette fois complet :
Aujourd’hui nous voyons au moyen d’un miroir, d’une manière obscure, mais alors nous verrons face à face ; aujourd’hui je connais en partie, mais alors je connaîtrai comme j’ai été connu (1 Cor 13.12).
Extrait du livre Le côté obscur de la vie chrétienne (chapitre 5),
Les citations bibliques sont extraites de la version Segond 1910
Dans cet article, nous verrons comment Dieu lui-même, par l’Esprit Saint, convainc notre esprit que nous sommes ses enfants, ses héritiers et les cohéritiers de Christ :
« Vous avez reçu un Esprit d’adoption, par lequel nous crions : « Abba ! Père ! » L’Esprit lui-même rend témoignage à notre esprit que nous sommes enfants de Dieu. (Rom 8.15-16).
L’apôtre Paul met en relief deux réalités opposées : l’esclavage et la filiation, la crainte et l’assurance, l’esprit de servitude et l’Esprit d’adoption. Il s’agit du troisième pilier de l’assurance du salut. Après le sang de Christ qui garantit notre salut, les fruits de la vie nouvelle qui démontrent notre salut, considérons maintenant le témoignage du Saint-Esprit qui nous convainc de notre salut.
Un esprit de servitude
Avant de nous donner l’assurance du salut, l’Esprit doit nous convaincre de péché. La conviction de péché, c’est lorsqu’on constate qu’être un pécheur n’est pas un concept théorique, mais une réalité tragique. Il s’agit d’une profonde prise de conscience de la méchanceté de notre propre cœur accompagnée de la certitude que nous méritons d’être rejetés par Dieu.
Savoir que je suis pécheur est une chose. Savoir que je suis asservi au péché, incapable de m’en défaire et coupable de mon état en est une autre. Le bon sens enseigne la première, mais seul l’Esprit de Dieu convainc de la seconde.
L’Esprit d’adoption
Après la terreur ressentie en prenant conscience de notre asservissement au péché, seul Dieu pourra nous convaincre que nous sommes ses enfants et non ses ennemis. Généralement, cette conviction ne se fera pas instantanément, mais sera le fruit d’une œuvre continuelle de l’Esprit en nous. Le travail de l’Esprit consistera à nous faire comprendre notre nouvelle réalité d’enfant de Dieu. Avant de parler du témoignage de l’Esprit, il faut donc parler de la réalité de l’adoption.
a- L’adoption
L’apôtre Paul déclare en Romains 8.15 : « Vous avez reçu un Esprit d’adoption » et dans l’Épître aux Galates, il nous dit pourquoi nous avons reçu l’Esprit d’adoption : « Parce que vous êtes fils, Dieu a envoyé dans nos cœurs l’Esprit de son Fils, lequel crie : Abba ! Père ! Ainsi tu n’es plus esclave, mais fils ; et si tu es fils, tu es aussi héritier par la grâce de Dieu. » (Gal 4.6,7)
Dieu envoie son Esprit en ceux qu’il a adoptés comme enfants. Qui sont ceux que Dieu adopte ? Tous les hommes ne sont-ils pas les enfants de Dieu ? Évidemment non ! Par nature, les hommes sont fils du diable et non de Dieu (Gen 3.14,15 ; Mat 23.33 ; Jean 8.44 ; Eph 2.1-3 ; 1 Jean 3.8-10). Voici comment on devient enfant de Dieu :« Mais à tous ceux qui l’ont reçu, à ceux qui croient en son nom, elle a donné le pouvoir de devenir enfants de Dieu, lesquels sont nés, non du sang, ni de la volonté de la chair, ni de la volonté de l’homme, mais de Dieu. » (Jean 1.12,13)
Ceux qui ont reçu Christ dans leur vie et qui croient en lui, ceux-là sont enfants de Dieu.
Malgré toutes ces promesses, certains ont de la difficulté à croire qu’ils sont enfants de Dieu. Ils comprennent l’Évangile et le croient de tout leur cœur. Ils portent des fruits et ont toutes les raisons de croire qu’ils sont sauvés, cependant, ils sont encore dans la crainte. Seul Dieu lui-même arrivera à persuader leurs cœurs qu’ils sont enfants de Dieu.
b- Le témoignage de I’Esprit
Comment savez-vous que vous êtes sauvés vous qui avez l’assurance de votre salut ? Vous le savez par une sorte d’intuition infaillible et non par une connaissance apprise intellectuellement. Une conviction qui ne vient pas de ce que d’autres vous ont dit, mais de ce que vous savez intérieurement être la vérité. Cette assurance est le témoignage de l’Esprit à votre esprit. Ce n’est pas une simple impression, ou un espoir vacillant ; c’est une profonde certitude que l’Évangile est vrai et que je suis sauvé. Je sais que je ne sais pas tout, mais je sais que ce que je sais est vrai et je sais que j’appartiens à Dieu pour l’éternité. L’apôtre Jean écrit :« Si nous recevons le témoignage des hommes, le témoignage de Dieu est plus grand ; car le témoignage de Dieu consiste en ce qu’il a rendu témoignage à son Fils. Celui qui croit au Fils de Dieu a ce témoignage en lui-même ; celui qui ne croit pas Dieu le fait menteur, puisqu’il ne croit pas au témoignage que Dieu a rendu à son Fils. Et voici ce témoignage, c’est que Dieu nous a donné la vie éternelle, et que cette vie est dans son Fils. » (1 Jean 5.9-11)
Cette expérience est ce qu’on appelle la pleine assurance. Le degré de notre assurance peut varier, mais l’Esprit œuvre dans le cœur de tous les enfants de Dieu pour les amener à cette pleine assurance.
Nous lisons dans Romains 8.16 : « L’Esprit lui-même rend témoignage a notre esprit que nous sommes enfants de Dieu. » Comment l’Esprit témoigne-t-il à notre esprit que nous sommes enfants de Dieu ? Il existe toutes sortes d’enseignements mystiques concernant la signification de ce verset. Malheureusement, certains se sont dangereusement éloignés de la véritable assurance du salut en suivant ces faux enseignements, en cherchant une expérience mystérieuse, en attendant une révélation spéciale. Voici comment le professeur Louis Berkhof explique le sens véritable du témoignage de l’Esprit en nous :
« Ce témoignage du Saint-Esprit ne doit pas être envisagé comme étant une communication transmise au croyant par une voix secrète lui donnant l’assurance qu’il est un enfant de Dieu ; non plus comme une opération spécifique du Saint-Esprit sur la pensée, par laquelle il conduirait l’attention vers un passage de l’Écriture contenant cette assurance. Il ne faut pas le voir non plus comme un témoignage qui serait donné une fois pour toutes au moment de la conversion que le croyant pourrait à tout moment invoquer pour se rassurer, peu importe s’il porte les fruits de l’Esprit ou s’il suit les désirs de la chair. L’Esprit de Dieu témoigne continuellement en habitant dans les cœurs de ceux qui craignent le Seigneur et par le renouvellement de l’homme qu’il opère dans la grâce si manifestement divine. Il ouvre les yeux de la foi à la beauté et à la gloire des promesses de Dieu, il illumine l’intelligence de sorte que leur portée spirituelle est comprise, et il convainc le cœur de leur pertinence pour des pécheurs perdus.[…] Plus la vie de la foi se développera, plus notre progrès dans la voie de la sanctification augmentera, alors la voix de l’Esprit résonnera avec plus de clarté et dissipera tous les doutes en remplissant le cœur de joie et de paix. » 1
L’Esprit qui habite dans les croyants n’est pas un résident silencieux et imperceptible ; il est vivant et il manifeste sa présence. Cette présence est le témoignage qu’il rend à notre esprit que nous sommes enfants de Dieu. Il ne s’agit pas d’un témoignage instantané ou ponctuel, mais plutôt d’un témoignage continuel et progressif qui s’inscrit dans l’œuvre de sanctification que l’Esprit Saint opère en nous. Ce témoignage se développe pendant des années. Remarquez le contexte de sanctification dans lequel l’apôtre Paul nous présente le témoignage de l’Esprit au début et à la fin de cette péricope :
« Ainsi donc, frères, nous ne sommes point redevables à la chair, pour vivre selon la chair. Si vous vivez selon la chair, vous mourrez ; mais si par l’Esprit vous faites mourir les actions du corps, vous vivrez, car tous ceux qui sont conduits par l’Esprit de Dieu sont fils de Dieu. […] Or, si nous sommes enfants, nous sommes aussi héritiers : héritiers de Dieu, et cohéritiers de Christ, si toutefois nous souffrons avec lui, afin d’être glorifiés avec lui. » (Rom 8.12-14,17)
À mesure que nous sommes sanctifiés par l’Esprit, le témoignage intérieur de notre filiation divine grandit. Ce témoignage a un but précis : nous amener à voir Dieu comme notre Père. Dieu est le Créateur, l’Éternel, la Parole, l’Alpha et l’Oméga, le Tout-Puissant, la Trinité, le Roi, le Juge, le Seigneur. Nous devons le révérer pour tout ce qu’il est et nous incliner devant sa majesté. Tout ceci, Dieu l’est pour tous les hommes indépendamment de leur statut. Toutefois, il y a quelque chose que Dieu est uniquement pour ceux qui sont en Jésus-Christ : un Père.Il est bien d’appeler Dieu « Seigneur ! », mais il y a un problème avec notre assurance si nous n’arrivons pas à l’appeler « Père ! ». Ce problème sera corrigé à mesure que nous serons conduits par l’Esprit, car il nous convaincra que notre statut face à Dieu n’est pas celui d’une simple créature en face de son Créateur, d’un pécheur en face de son Juge ou d’un serviteur en face de son Maître. Notre statut est plutôt celui d’un enfant bien-aimé par son Père. Celui qui se sait ainsi l’enfant de Dieu, s’écrie naturellement « Père ! », car aucun autre titre n’exprime mieux ce que Dieu est pour lui (Rom 8.15) : « Vous avez reçu un Esprit d’adoption, par lequel nous crions : Abba ! Père ! »Certains ont enseigné que le mot « abba » signifiait « papa » et non « père ». Ce n’est pas tout à fait juste. Abba est la forme syriaque du mot hébreu pour père et il s’agit du mot par lequel Paul interpellait son propre père dans sa langue maternelle. Paul l’écrit dans sa propre langue avant de le traduire en grec pour ses lecteurs, car sa langue maternelle exprime mieux le sentiment de filiation qui l’habite vis-à-vis de Dieu. Il n’y a donc pas de distinction de sens entre les mots abba et père, l’apôtre utilise le mot dans sa langue maternelle, puis le traduit immédiatement au bénéfice de ses lecteurs.
L’Écriture ne dit pas que seuls ceux qui se sentent enfants de Dieu sont sauvés, mais bien que ceux qui croient au Fils sont enfants de Dieu et que l’Esprit agit en eux pour les amener à appeler Dieu « Père ! », à ne plus craindre et à savoir, non pas à supposer, mais à savoir qu’ils sont enfants de Dieu. Cette œuvre de l’Esprit se développera graduellement pendant des années pour produire une pleine assurance.
Il est très peu question de Thomas dans les Évangiles. Simplement cité dans la liste des apôtres dans les Synoptiques et les Actes, il est mentionné quatre fois dans l’Évangile selon Jean.
Par contre, il est presque universellement connu à cause de son attitude après la résurrection de Jésus. Qui n’a pas entendu quelqu’un s’écrier : « Moi, je suis comme Thomas, j’ai besoin de voir pour croire » ? C’est souvent la seule chose qu’on connaisse de lui et c’est un alibi facile pour refuser de croire !
Comme les autres apôtres, Thomas a été choisi et appelé par Jésus. Avec eux, il a suivi son maître pendant plus de trois ans. Comme les autres, il a reconnu en lui le Messie et il pensait qu’il allait bientôt établir son royaume. Comme les autres, il a entendu le Seigneur leur enseigner de multiples fois qu’il allait être rejeté, souffrir beaucoup, mourir et ressusciter après trois jours (Marc 8.31 ; 9.12,31 ; 10.32-34). Comme les autres, il n’a ni compris, ni reçu cet enseignement. Comme les autres, il est complètement désarçonné après la mort du Seigneur et son ensevelissement. Comme les autres, il ne s’attend pas à ce que le Seigneur ressuscite. Le soir du premier jour de la semaine, il ne se joint pas aux autres disciples réunis. Il n’est pas là quand « Jésus vint, se présenta au milieu d’eux » (Jean 20.19).
Pourquoi est-il absent ? Est-il trop accablé, désappointé pour se joindre aux autres ? Pourtant, la solitude risque plutôt d’aggraver son découragement.
Peut-être a-t-il trop peur pour prendre ce risque ? Pourtant, il a montré du courage en exhortant ses condisciples à monter à Béthanie lors de la maladie de Lazare : « Allons aussi, afin de mourir avec lui. » (11.16)
Dans la semaine, il retrouve les autres disciples qui lui annoncent la grande nouvelle : « Nous avons vu le Seigneur » ! Il refuse de les croire : « Si je ne vois dans ses mains la marque des clous, et si je ne mets mon doigt dans la marque des clous, et si je ne mets ma main dans son côté, je ne croirai point. » (20.25)
Pourquoi tant de résistance ? Il entend le témoignage d’au moins dix personnes et il n’est pas convaincu ! Chaque fois que Jean nomme Thomas, dans son Évangile, il ajoute son surnom « Didyme » (en grec Jumeau). Aurait-il eu un jumeau ? Probablement. Alors combien de fois l’a-t-on pris pour son frère et réciproquement ? Peut-être que ses amis n’ont vu le dimanche précédent qu’un sosie de Jésus ? Il lui faut des preuves ! On peut confondre quelqu’un avec un autre au point de s’y méprendre, mais imiter les marques des clous dans les mains et les pieds d’un crucifié, impossible ! Il faut qu’il voie et qu’il touche !
« Huit jours après, les disciples de Jésus étaient de nouveau dans la maison, et Thomas se trouvait avec eux. Jésus vint, les portes étant fermées, se présenta au milieu d’eux, et dit : La paix soit avec vous ! Puis il dit à Thomas : Avance ici ton doigt, et regarde mes mains ; avance aussi ta main, et mets-la dans mon côté ; et ne sois pas incrédule, mais crois. Thomas lui répondit : Mon Seigneur et mon Dieu ! » (20.26-28)
Jésus est là au milieu des siens. On a l’impression qu’il n’est venu que pour Thomas ! Il a tout vu, tout entendu. Dans sa grâce, il rencontre Thomas au point où il en est : « Regarde, touche, crois. » Thomas est en face de ses propres paroles, il doit prendre une décision. Il pourrait s’excuser, expliquer son attitude, confesser son incrédulité… Non ! Il répond par une des plus belles confessions de la Bible sur la seigneurie et la divinité de Jésus, point culminant de cet Évangile !
Thomas est passé du doute à l’incrédulité. Celui qui doute dit : « Je ne peux pas croire ! Il y a trop de difficultés ! » L’incrédule dit : « Je ne croirais pas à moins que vous m’apportiez la preuve que je vous demande. » Jésus, lui montrant ses mains, lui apporte la preuve. Alors, dans l’esprit de Thomas, tout se remet en ordre : il voit tout clair ! Celui qui est devant lui est bien le Saint de Dieu, la résurrection et la vie, le Christ, le Fils de Dieu… Il est son Seigneur et son Dieu !
Jésus reconnaît la foi de son serviteur et bénit tous ceux qui, à la suite du témoignage des apôtres, croiront sans avoir vu : « Parce que tu m’as vu, tu as cru. Heureux ceux qui n’ont pas vu, et qui ont cru ! » (20.29)
N’a-t-on pas parfois regardé Thomas d’un peu de haut ? Pourtant, ne lui ressemblons-nous pas souvent ? Dieu a permis que l’histoire de Thomas nous parvienne pour nous avertir et nous encourager. Nous pouvons être terriblement ébranlés au plus profond de nous-mêmes. Ce que nous vivons ne correspond pas du tout à l’idée que nous avions de la vie chrétienne. Nous pouvons alors être tentés de tout lâcher…
Et là, quelqu’un arrive et vous dit : « C’est moi, l’Éternel, ton Dieu, qui empoigne ta main droite et qui te dis : N’aie pas peur ! Je viens moi-même à ton secours. » (És 41.13, S21)
Si quelqu’un d’entre vous manque de sagesse, qu’il la demande à Dieu, qui donne à tous simplement et sans reproche, et elle lui sera donnée. Mais qu’il la demande avec foi, sans douter ; car celui qui doute est semblable au flot de la mer, agité par le vent et poussé de côté et d’autre. Qu’un tel homme ne s’imagine pas qu’il recevra quelque chose du Seigneur : c’est un homme irrésolu, inconstant dans toutes ses voies. (Jacques 1.5-8)
Certains versets pris hors contexte peuvent conduire à des interprétations déroutantes qui auront des conséquences négatives sur la vie des croyants. C’est le cas des versets 5 à 8 du chapitre 1 de l’Épître de Jacques. Certains lecteurs ont peut-être déjà été étonnés de la dureté des mots de Jacques. L’apôtre est-il vraiment en train de dire que, si nous avons quelques fois des doutes, ou que nous faisons parfois preuve d’hésitation, alors Dieu ne répondra pas à nos prières ? N’est-ce pas contradictoire avec le fait que nous devions prier humblement pour demander la sagesse ? Si nous n’avions de réponse à nos prières qu’à condition d’être en permanence absolument confiant et intellectuellement certain, alors ces réponses de Dieu dépendraient de nos propres efforts… et n’arriveraient pas souvent ! Il convient dès lors de replacer ces versets dans leur contexte pour tenter de mieux comprendre ce que Jacques veut dire ici.
Le contexte
Le premier sujet abordé par Jacques dans son Épître concerne les épreuves auxquelles ses destinataires, des Juifs convertis à Christ, pourraient être exposés. Après les avoir encouragés à considérer ces épreuves comme « un sujet de joie complète » à cause du bénéfice qu’ils pourraient en retirer spirituellement (versets 2 à 4), Jacques les exhorte à prier « avec foi, sans douter » afin d’obtenir la sagesse que Dieu, dans sa grâce, désire donner à tous ceux qui en font la demande (versets 5 à 8). Le lien entre les deux paragraphes est établi par la répétition de termes identiques ; les croyants devraient tendre vers la perfection, « ne manquant de rien » (v. 4b, Darby), et « si quelqu’un manque de sagesse », il est invité à prier pour cela (v. 5). Dans des temps d’épreuves, le croyant soumis à diverses causes d’affliction ou de souffrance, est invité à se tourner vers Dieu dans la prière. C’est de lui, écrit Jacques, que viendra la sagesse, présentée ici comme la solution qui transformera l’épreuve en une occasion de croissance spirituelle. Après quelques observations sur la sagesse nous nous pencherons sur la manière de la demander.
La sagesse
L’une des qualités dont tout croyant pourrait venir à manquer, en particulier dans l’épreuve, est la sagesse. « Si quelqu’un d’entre vous manque de sagesse » écrit Jacques, mais cette condition semble en réalité souligner une situation connue de presque tous les lecteurs de l’épître. Il faudrait presque lire : « Puisque vous manquez de sagesse ». En effet, quel croyant pourrait se targuer de ne pas en manquer ?
Jacques, un des frères du Seigneur, est un croyant d’origine juive s’adressant à d’autres Juifs convertis ; il emploie ce terme en ayant certainement en tête ses mentions dans les Écritures, et confiant que ses lecteurs sauront reconnaître l’allusion. Le livre des Proverbes en particulier présente la sagesse comme un moyen d’accéder à la pensée de Dieu ainsi qu’à la façon de l’appliquer dans la vie du croyant : « Car la sagesse viendra dans ton cœur, et la connaissance fera les délices de ton âme… » (voir Prov 2.10-19, voir aussi 3.13-14 et 9.1-6).
Plus loin dans l’Épître, Jacques oppose la sagesse « terrestre, charnelle, diabolique » et « la sagesse d’en haut » (3.13-18). Les caractéristiques de cette dernière sont proches de la description faite par Paul du « fruit de l’Esprit » (Gal 5.22-23). Mais alors que le croyant ne peut pas manquer de l’Esprit, la sagesse, elle, peut venir à manquer. Le croyant est alors invité à simplement la demander à Dieu, qui répond aux prières.
Dieu, qui donne…
En promettant à ses lecteurs que Dieu donnera la sagesse à ceux qui en font la demande, Jacques confirme les enseignements de l’Ancien Testament : « Car l’Éternel donne la sagesse » (Prov. 2.6). Mais il se fait aussi certainement l’écho des paroles de Jésus sur la prière : « Demandez, et l’on vous donnera » (Mat 7.7). Il en va de notre responsabilité de croyant de présenter nos besoins à Dieu. Mais nous avons aussi la promesse qu’il n’ignorera pas notre prière.
En effet, tout comme Jésus a pu le faire, Jacques affirme avec assurance que Dieu répondra. Pour cela il se base sur le caractère même de Dieu. Dieu, comme le rappelle Jacques, « donne à tous simplement et sans reproche ». Le premier adverbe, parfois traduit « libéralement », peut désigner la générosité de ce don. Mais il exprime surtout le fait que Dieu n’hésite pas à répondre favorablement à la demande qui lui est faite. Son intention est tout entière de satisfaire le besoin de sagesse afin de permettre à ses enfants d’avoir les forces de tenir ferme dans les épreuves. En ce sens, la première caractéristique de ce don s’articule bien avec la seconde, « sans reproche » et forme un contraste évident avec la personne qui doute dans les versets 7 et 8. L’intention de Jacques est donc ici de souligner la façon dont Dieu donne : sans retenue, sans hésitation, et sans arrière-pensée.
Enfin, Dieu ne nous réprimande pas pour nos échecs et nos manquements passés, il ne nous accable pas non plus en nous rappelant constamment la valeur de ses dons. Ces versets, tout comme les enseignements de Jésus en Matthieu 7, nous encouragent à venir présenter avec confiance nos requêtes à ce Dieu qui ne varie pas dans sa grâce.
Prière, foi et doute
Après avoir souligné la façon dont Dieu donne, Jacques aborde la façon dont nous devons demander. Si le contexte est bien celui de la demande de sagesse, il est possible de lire ce passage plus généralement comme un enseignement sur l’importance de la foi dans la prière. Jacques vient de spécifier que la réponse de Dieu aux prières n’est pas le privilège de quelques-uns, car Dieu donne « à tous » (v. 5). En revanche, la façon dont nous demandons peut faire obstacle à l’obtention d’une réponse. Dieu n’accorde pas toutes les requêtes, souvent du fait de la légèreté et du caractère autocentré de celui qui les formule (cf. 4.2-3). Mais il répond aux prières formulées « avec foi », « sans douter ».
Jésus a utilisé les mêmes mots lorsqu’il enseignait sur la prière. Alors que ses disciples manifestaient leur étonnement après que, sur l’ordre de Jésus, un figuier avait séché sur place devant leurs yeux, le Seigneur leur avait dit : « Je vous le dis en vérité, si vous aviez de la foi et que vous ne doutiez point, non seulement vous feriez ce qui a été fait à ce figuier, mais quand vous diriez à cette montagne : Ôte-toi et jette-toi dans la mer, cela se ferait. Tout ce que vous demanderez avec foi par la prière, vous le recevrez. » (Mat 21.21-22)
Dans ces passages, la foi désigne plus que la confiance dans le fait que Dieu accordera ce que nous lui demandons. Elle englobe une réalité plus large : elle décrit la vie d’un croyant qui confie tous les aspects de sa vie à Dieu, sans hésiter. Au contraire, le doute désigne une forme d’hésitation. Il ne renvoie pas seulement à un « doute » sur le fait que Dieu répondra et agira. Il désigne plutôt un esprit divisé qui, d’emblée, empêche de faire confiance à Dieu. Il ne s’agit pas tant d’un doute intellectuel que d’une forme de duplicité. Ce que Jacques dénonce, c’est un conflit de loyauté, comme entre Dieu et « le monde » (Jac 4), ou entre Dieu et « Mammon » comme l’a enseigné Jésus (Mat 6.24).
La fin du verset 6 offre une comparaison imagée de celui qui doute avec « le flot de la mer, agité par le vent et poussé de côté et d’autre ». Telle la surface agitée de l’océan dont l’aspect change constamment, bouleversée par des vents dont l’intensité et la direction varient, la personne dont l’esprit est divisé n’a ni foi assurée, ni direction stable. Jacques décrit une personne dont la confiance en Dieu est loin d’être inébranlable, une personne prête à être emportée à tout vent de doctrine ou à céder face aux arguments ou à l’hostilité de ses opposants. Les versets 7 et 8 sont sans appel : « Qu’un tel homme ne s’imagine pas qu’il recevra quelque chose du Seigneur : c’est un homme irrésolu, inconstant dans toutes ses voies. » La personne qui doute, dont l’esprit est divisé, ne saurait s’attendre à ce que Dieu réponde à ses prières, car sa loyauté envers le Seigneur est loin d’être constante et sincère.
Simplicité ou indécision
Dans ce passage, Jacques dénonce la personne dont l’esprit est divisé. Bien que le mot qu’il emploie (dipsyschos) soit un terme inédit en grec, la Bible exprime la même idée à divers endroits. Dieu bénit ceux « qui le cherchent de tout leur cœur » (Ps 119.2). De même, lorsqu’un docteur de la loi demande à Jésus quel est le plus grand commandement, ce dernier cite le Deutéronome : « Tu aimeras le Seigneur, ton Dieu, de tout ton cœur, de toute ton âme, et de toute ta pensée. » (Mat 22.37) Jacques s’inscrit dans la même pensée lorsqu’il invite ses lecteurs à prier « avec foi, sans douter ». Si les croyants doivent devenir « parfaits et accomplis » (v.4), la lettre les encourage à désirer la « simplicité », une caractéristique divine qui transparaîtra dans leur cœur et dans leur vie.
Inversement, le doute dénoncé ici devra donc être compris comme une forme d’indécision, de conflit intérieur. Ces versets ne doivent donc pas servir à accabler les croyants qui, dans des difficultés dont les causes peuvent avoir diverses origines, se demandent où est Dieu. Lorsque David s’écrie : « Jusqu’à quand, Éternel ! m’oublieras-tu sans cesse ? Jusqu’à quand me cacheras-tu ta face ? » (Ps 13.2), il exprime avec sincérité son incompréhension face à des circonstances hostiles. Mais c’est bien à Dieu que cette prière est adressée, et c’est de lui que David attend le secours, sans que sa foi n’en soit ébranlée : « Moi, j’ai confiance en ta bonté» (Ps 13.6). Il croyait que Dieu était digne de confiance et qu’il pouvait lui remettre tous les aspects de sa vie.
Nous pouvons bien nous interroger : notre confiance en Dieu est-elle totale ou bien hésitons-nous entre Dieu et le monde ? Suis-je simple/loyal ou partagé ? Mais à tous ceux qui s’attendent à Dieu, Jacques ne dit pas que le Seigneur les rejettera s’ils lui adressent des questions ou formulent des inquiétudes, car ils continuent de le chercher dans ces circonstances. C’est justement dans les difficultés que nous avons besoin de la sagesse qui vient de Dieu. Jacques nous encourage à la demander plutôt que de nous appuyer sur nos propres ressources. Cet encouragement est associé à une promesse : Dieu donne, sans retenue ni hésitation, à ceux qui désirent être « parfaits et accomplis », par sa grâce.
Le doute est un sentiment d’incertitude qui remet en question l’existence ou la vérité même des choses. Il se manifeste dans tous les domaines et de différentes manières. Il est commun à tous les êtres humains, c’est un sentiment naturel. Il est souvent présent dans la pensée de ceux qui croient en Dieu. C’est l’arme privilégiée du diable qu’il a utilisée dès le commencement lors de la tentation dans le jardin d’Éden. Déguisé en serpent, il suggéra à Ève qu’elle avait mal compris l’ordre de Dieu et que ce dernier avait menti. Il lui dit : « Vous ne mourrez point ; mais Dieu sait que, le jour où vous en mangerez, vos yeux s’ouvriront, et que vous serez comme des dieux, connaissant le bien et le mal. » (Gen 3.4) Ainsi le doute s’oppose à la foi qui est une ferme assurance.
Doute ou incrédulité ?
Il ne faut cependant pas confondre doute et incrédulité. L’incrédulité est le refus délibéré de croire, tandis que le doute est une forme d’hésitation, de flux et de reflux, comme le définit l’apôtre Jacques : « Celui qui doute est semblable au flot de la mer, agité par le vent et poussé de côté et d’autre, il est irrésolu, inconstant dans tout ce qu’il entreprend. » (Jac 1.6,8)
L’incrédulité n’a pas son origine dans l’impossibilité de résoudre des problèmes intellectuels, mais elle est d’ordre sentimental et spirituel. L’orgueil incite l’incrédule à demeurer délibérément indépendant de Dieu ; il refuse de se soumettre à sa volonté afin de décider seul pour sa vie.
Le doute, quant à lui (traduction, entre autres, des mots grecs dipsuchos : l’état d’un homme chroniquement partagé entre deux opinions, irrésolu ; oudiakrinô : séparer, porter un jugement, faire une distinction), est une remise en question, une hésitation, un acte de la raison. Il s’exprime par cette question « Est-ce bien vrai ? ». Cette remise en question est nécessaire et positive dans le domaine des connaissances et de la recherche scientifique, pour inciter à approfondir toutes les preuves qui rendront les découvertes sûres. Elle est également utile dans le domaine subjectif donc dans celui de la foi où l’on a besoin de confirmations, mais ce n’est pas cet aspect que je souhaite traiter ici. Le doute devient nocif dans le domaine objectif, en particulier dans le rapport avec la parole de Dieu, donnée autrefois soit directement à la personne soit par le moyen des prophètes et aujourd’hui parla Bible. Il trouve sa source dans la suspicion, la méfiance, l’incompréhension, mais surtout dans les « croyances limitantes » qui résultent de l’éducation, de nos blessures, de certains échecs, de ce que nous avons vu et entendu au cours de notre vie. Ces croyances 2 s’ancrent dans nos pensées et construisent nos raisonnements. Nos choix de vie résultent de nos croyances. Une croyance devient certaine lorsqu’on a trouvé plusieurs faits qui convergent pour la rendre crédible. La difficulté est que le diable a toujours menti et sait utiliser soit des personnes que nous côtoyons soit nos faiblesses pour influencer nos pensées, et par là nous tromper. Mais le chrétien a le Saint Esprit pour renouveler ses pensées.
Expliquons cela. Les événements de la vie sont des choses réelles que nos yeux voient, que nos oreilles entendent, qui mettent en éveil nos cinq sens. Et pourtant deux personnes confrontées à une même réalité vont opter pour des attitudes et des choix différents.
Prenons deux exemples, celui des douze espions envoyés par Moïse et celui du combat des Philistins contre Israël (Goliath / David).
L’exemple des douze espions: le doute a gagné tout le peuple d’Israël (Nom 13-14)
L’événement et ses deux perceptions
Douze explorateurs, choisis parmi les chefs de tribu, sont envoyés par Moïse pour évaluer le pays promis. Ils ont quarante jours pour explorer les différents lieux. Leur rapport est surprenant : ils ont tous vu la même chose mais dix ont une perception commune de leur visite alors que les deux autres en ont une totalement différente. Ils proposent donc deux plans d’action opposés.
L’événement : ils découvrent tous un pays riche (lait, miel, fruits), un peuple fort parmi lesquels certains sont des géants, des villes fortifiées. Tout cela est vrai, réel.
La perception des dix : « Oui, c’est vraiment un pays ruisselant de lait et de miel ; et en voici les fruits ». Seulement les hommes sont « terriblement forts », les forteresses sont « immenses » (13.28). La perception de ce qu’ils ont vu, passée par le filtre de ce qu’ils croient (même avec Dieu on ne pourra pas les vaincre), les amènent à surévaluer la puissance de l’ennemi, et ainsi à ne pas comprendre le vrai rapport de force.
La perception de Caleb et de Josué : rien dans le texte ne permet de penser qu’ils remettent en cause les observations factuelles des dix.
Sentiments des dix : ils prennent une attitude de vaincus en dénigrant devant les fils d’Israël le pays choisi par Dieu et ajoutent : « Nous ne sommes pas capables de monter contre ce peuple, car il est plus fort que nous[…] à côté d’eux, nous avons l’impression d‘être comme des sauterelles, et c’est bien l’effet que nous leur faisons ; c’est un peuple de cannibales « qui dévore ses habitants », nos enfants et nos petits-enfants deviendront la proie de l’ennemi » (13.32,33 ; 14.3). Le doute s’installe ; la perception de la situation met en évidence leurs croyances : « Dieu veut notre malheur, il veut nous faire tous mourir, y compris les femmes et les enfants, il est contre nous ». Ces croyances sont fausses et pourtant elles semblent bien étayées par les faits.
Sentiments de Caleb et Josué : ils montrent une attitude de confiance et d’assurance, ils affirment « Nous en sommes vraiment capables ».Leurs croyances sont alimentées par la foi dans la Parole et la puissance de Dieu. Ils ont appris à connaître Dieu par des victoires passées, par sa fidélité lorsqu’il renouvelait les promesses faites à l’ancêtre Abraham au moment où le peuple méritait le jugement et l’abandon. Ils sont intimes de Dieu qui manifeste sa gloire par la libération du pouvoir du Pharaon et la traversée de la mer Rouge, par ses soins au quotidien avec la manne et l’eau du rocher. Pour ces deux chefs, pas d’inquiétude : « Si l’Éternel prend plaisir en nous, il nous fera entrer[…]Ne craignez pas le peuple du pays, nous n’en ferons qu’une bouchée, leur protection s’est retirée de dessus eux. L’Éternel est avec nous » (14.8,9).
L’action et ses conséquences
Les dix sont centrés sur eux-mêmes. Leur doute, fondé sur ce qu’ils pensent d’eux-mêmes, est hélas contagieux. Les Israélites veulent retourner dans le pays où ils avaient été esclaves. « Toute l’assemblée se souleva… ». Ils décident de choisir un autre guide, ils préparent un complot pour lapider Moïse et Aaron. Ainsi, ceux qui avaient besoin d’encouragement et d’espérance pour poursuivre le chemin sont entraînés par ces dix chefs dans le dénigrement et la révolte. Ensemble, ils méprisent Dieu. Quand Caleb et Josué s’opposent à eux et déclarent qui est vraiment Dieu, ils persistent dans leurs fausses croyances, leur doute fait place à l’incrédulité. C’est pour cela que Dieu exprime sa colère ; la mort atteint toute une génération : « Jusqu’à quand ce peuple me méprisera-t-il, ne me croira-t-il pas ? » (14.11) ; « Je vous traiterai selon les plaintes que vous avez exprimées : vos cadavres tomberont dans le désert » (14.28,29).
Caleb et Josué sont centrés sur les promesses de Dieu : le pays est un très bon pays, nous ne ferons qu’une bouchée des Cananéens, leur protection s’est éloignée d’eux, l’Éternel est avec nous, montons et prenons possession. Leurs croyances, leur foi, leur fait voir, au-delà de la réalité, le but ultime de Dieu : offrir le pays promis à son peuple choisi pour qu’il ait tout en abondance, pour habiter au milieu de lui, pour être son Dieu. Caleb et Josué n’ont pas confondu la réalité avec la vérité (la réalité invisible Héb.11.1) qui est contenue dans la Parole de Dieu. « Caleb a été animé d’un autre esprit et il m’a pleinement suivi » dit l’Éternel (14.24).La marche par la foi est le chemin de la maturité où le doute fait place à la ferme assurance.
La récompense : de cette génération, seuls Caleb et Josué entreront dans le pays. « Mais vos enfants, dont vous avez dit qu’ils deviendraient une proie de l’ennemi, je les y conduirai et ils connaîtront le pays que vous avez méprisé » (14.31). La bonne nouvelle est que la promesse de Dieu n’est pas annulée, mais différée ; ainsi Caleb, animé par sa foi, réclame pour héritage une montagne dont il prendra réellement possession quarante ans plus tard (Jos 14.12,13).
Exemple du combat de Goliath contre le peuple d’Israël : le doute a perdu (1 Sam 17)
L’événement
Le géant Goliath, champion des Philistins, méprise le peuple de Dieu et en même temps Dieu lui-même. Conscient de sa force et sûr de lui, il a en face de lui un peuple terrorisé et en plein doute, puis David, inconnu de tous, mais bien connu de Dieu. Il méprise ce jeune homme au teint rosé qui n’a aucune envergure : « Suis-je un chien, moi pour que tu viennes à moi avec des bâtons ? » (1 Sam. 17.43) Même Saül pose la question à son chef d’armée Abner : « De qui ce jeune homme est-il fils ? »(17.55) Pourtant David s’est illustré par une confiance indéfectible en Dieu. Pour nous, les « Goliath » ne sont pas des formateurs, mais des révélateurs de ce que nous sommes déjà, révélateurs de nos croyances.
La perception du peuple et de Saül
Toute l’armée est en train de prendre position pour le combat, on pousse bien le cri de guerre, mais « à la vue de cet homme[…] chacun disait : l’avez-vous vu avancer contre nous ? »(v.25) Autrement dit, c’est perdu d’avance, au minimum nous serons faits prisonniers et serviteurs pour toujours. Ils essaient de se motiver mutuellement pour aller au combat en parlant entre eux de la récompense que le roi a promise au vainqueur, sans succès. Le roi Saül a également perdu tout espoir, « il est effrayé » (v.11), et lorsque David se présente, il lui fait comprendre qu’il est un gamin inexpérimenté alors que la situation désespérée nécessite les compétences d’un combattant exceptionnel.
Perception de David
Avant d’être en première ligne devant ce géant, il a déjà connu des situations qui le dépassaient. Il a vécu des victoires extraordinaires dans le secret de ses journées de travail : « Ton serviteur a frappé le lion et l’ours ; et ce Philistin, cet incirconcis, sera comme l’un d’eux, car il a insulté l’armée du Dieu vivant. » (v.36)
Sentiments de Saül et du peuple
Une attitude de vaincus les anime : « démoralisés et une grande peur » ; « Goliath, champion des Philistins sortit de leurs rangs, et lança son défi habituel. David l’entendit. À la vue de cet homme, tous les soldats d’Israël s’enfuirent terrorisés. »(v.11,23) Saül dit à David : « tu n’es pas capable » (v.33). Leurs pensées sont déformées par les fausses croyances qu’ils se sont forgées en prenant l’habitude de vivre sans se placer sous la protection de leur Dieu.
Sentiments de David
Il prend l’attitude de vainqueur car c’est un habitué des victoires : « L’Éternel m’a délivré des griffes du lion et de l’ours, lui me délivrera de la main de ce Philistin » (v.37). David dit au Philistin : « Tu marches contre moi avec l’épée, la lance et le javelot ; moi, je marche contre toi au nom de l’Éternel, le maître de l’univers, au nom du Dieu de l’armée d’Israël que tu as insulté. Aujourd’hui l’Éternel va te livrer entre mes mains. Je t’abattrai et je te couperai la tête. Aujourd’hui je vais donner les cadavres du camp des Philistins aux oiseaux du ciel et aux bêtes sauvages. Toute la terre saura alors qu’Israël a un Dieu » (v.45,46). Ses croyances sont établies sur la connaissance du Dieu victorieux. La Parole de Dieu est l’arme efficace contre le doute, car elle pénètre l’âme et l’esprit et juge les sentiments et les pensées du cœur. (Héb 4.12)
L’action et ses conséquences
David décide d’aller au combat : « ton serviteur ira et combattra avec ce Philistin » (v.32). Mais il doit faire face à plusieurs obstacles qui sont susceptibles de le faire douter :
1. Le mépris et les critiques de son frère qui le traite d’orgueilleux (v.28). L’assurance des humbles paraît toujours de l’orgueil pour les orgueilleux. David ferme ses oreilles à la critique et passe son chemin pour aller à l’essentiel.
2. L’ampleur du défi. David ne craint pas les défis, la marche n’est pas trop haute car il a l’habitude de vivre des victoires au quotidien. Depuis son enfance, son activité de berger lui a donné l’occasion de connaître celui qui donne la victoire.
3. Être quelqu’un d’autre. Quand Saül lui propose son armure qui lui permettrait d’apparaître devant l’ennemi comme un grand combattant, il refuse : « Je ne peux pas marcher avec cette armure, je n’y suis pas habitué »(v.39). Il est impossible de vivre avec la foi (la croyance) d’un autre. Cela est également créateur de doute (lui, il y arrive, moi pas).
4. Voir la réalité avec ses yeux en perdant de vue le but suprême du combat :la mise en évidence de la gloire de Dieu par la victoire : « la bataille est à l’Éternel » (v.47). Le but n’est pas la victoire, mais d’entrer dans le projet de Dieu, de le considérer comme le seul Dieu qui voit tous les géants comme des nains.
La récompense
David ne vacille pas et reste ferme dans sa décision :« David avec une fronde et une pierre fut plus fort que le Philistin, et frappa le Philistin et le tua » (v.50). David aura la fille du roi pour femme, selon la promesse de Saül au vainqueur. Le peuple est associé à la victoire, le doute fait place à l’assurance. L’armée reprend vie, se lève, pousse des cris, poursuit l’ennemi et l’écrase.
Conclusion
Les fils d’Anak rencontrés par les explorateurs de Moïse, ou Goliath contre lequel David a lutté, qui sont-ils aujourd’hui ? Ils prennent la forme de défis dont la puissance et l’enjeu nous dépassent. Nous font-ils douter et paniquer ou au contraire nous donnent-ils l’occasion de laisser Dieu briller à travers nous ? Ils mettent en évidence les croyances qui orientent nos choix. Comme dit le proverbe : «Comme il a pensé dans son âme, tel il est. » (23.7)Ces géants ont divers noms. Ils peuvent s’appeler alcool, drogue, pornographie, jeu, smartphone ; ce sont les addictions. Mais il y a beaucoup plus subtil : la moquerie, les fausses accusations, le paraître qui nous fait revêtir des tenues (armure) que nous n’arrivons pas à porter, le complexe d’infériorité qui nous fait répéter au fil des jours que nous ne sommes pas capables mais nuls, la jalousie, la colère, etc. L’enjeu est de taille, comme l’exprime l’apôtre Paul :« Le Christ nous a rendus libres pour que nous connaissions la vraie liberté. C’est pourquoi tenez bon et ne vous laissez pas réduire à nouveau (par le doute) en esclavage » (Gal5.1).
Soit nous vivons en croyant que les délivrances sont pour les autres et jamais pour nous, soit nous décidons de croire que nous ne pouvons pas perdre la liberté que Dieu nous a donnée d’être victorieux dans nos défis. Ne doutons jamais de la bonté de Dieu qui accomplit ses promesses. Rappelons-nous que lorsqu’un géant tombe, notre destinée, c’est-à-dire la raison pour laquelle Dieu nous a fait naître, est pleinement vécue.
Les citations sont extraites de la version Darby
« Homme de peu de foi. » Si le Seigneur Jésus m’interpellait ainsi après avoir répondu à une de mes prières, cela ne m’étonnerait pas, et je suppose que vous êtes comme moi : nous prions souvent le Seigneur sans avoir au fond du cœur l’assurance que nous allons recevoir ce que nous demandons.
Mais quand le Seigneur dit cela à un homme qui fait appel à lui alors qu’il est debout sur une mer en furie après avoir obéi à son commandement, alors là je me pose des questions sur la foi et le doute !
C’est à l’apôtre Pierre que le Seigneur fait ce reproche ; cet épisode de sa vie nous est rapporté dans l’évangile selon Matthieu au chapitre 14. Après avoir miraculeusement nourri plus de 5000 personnes, Jésus a obligé les disciples à monter dans une barque et à entreprendre la traversée du lac de Galilée, puis il s’est retiré à l’écart pour prier.
« La barque était déjà à une distance de plusieurs stades de la terre, malmenée par les vagues ; car le vent était contraire. Vers la fin de la nuit, Jésus se dirigea vers ses disciples en marchant sur les eaux du . À la quatrième veille de la nuit, Jésus alla vers eux en marchant sur la mer.
Quand les disciples le virent marcher sur la mer, ils furent troublés et dirent : C’est un fantôme ! Et dans leur crainte, ils poussèrent des cris. Jésus leur dit aussitôt : Rassurez-vous, c’est moi, n’ayez pas peur ! Pierre lui répondit : Si c’est toi, ordonne-moi d’aller vers toi sur les eaux.
Et il dit : Viens ! Pierre sortit de la barque et marcha sur les eaux pour aller vers Jésus. Mais en voyant que le vent était fort, il eut peur, et, comme il commençait à enfoncer, il s’écria : Seigneur, sauve-moi ! Aussitôt Jésus étendit la main, le saisit et lui dit : Homme de peu de foi, pourquoi as-tu douté ? Ils montèrent dans la barque, et le vent tomba.
Ceux qui étaient dans la barque se prosternèrent devant Jésus et dirent : Tu es véritablement le Fils de Dieu. » (Mat 14.24-33 – Bible à la Colombe)
Quand nous lisons ce récit confortablement assis sur les bancs de l’église ou dans notre fauteuil, nous nous étonnons que les disciples n’aient pas réalisé tout de suite que c’était Jésus qui venait à eux en marchant sur l’eau ; ils venaient tout de même d’assister à la multiplication des pains et des poissons ! Rien n’aurait dû les surprendre de la part du Seigneur !
Oui mais, les difficultés…
Mais ils étaient bien comme nous, ou plutôt nous sommes tout à fait comme eux : quand nous sommes aux prises avec des difficultés, nous oublions bien vite le Seigneur et les délivrances qu’il nous a accordées dans le passé. Si nous pensons à lui, il nous arrive même de nous demander si nous ne nous sommes pas fait des illusions, s’il n’est pas un « fantôme », alors que les difficultés, elles, sont bien réelles ! Nous pouvons même aller jusqu’à méconnaître son action en notre faveur et y voir une menace supplémentaire, un « fantôme ».
Mais le Seigneur est plein de compassion ! Il ne fait aucun reproche aux disciples effrayés (alors qu’il en fera un à Pierre !) et il les encourage aussitôt : « Rassurez-vous, c’est moi, n’ayez pas peur ! » Quel soulagement cela a dû être pour les disciples d’entendre ces paroles, de reconnaître la voix de Jésus au sein de la tempête !
La foi en action
Parmi ces disciples, il y a Pierre bien sûr, Pierre le bouillant, Pierre l’impétueux, toujours prompt à réagir. Il est le seul à prendre la parole, et ce qu’il dit nous étonne. Quelle idée : demander au Seigneur de lui commander de marcher sur l’eau lui aussi ! Je pense que moi je n’aurais jamais osé, parce que ma foi est bien trop petite ! Mais lui, il a osé, il a été le seul à oser…
Pierre a une foi immense, mais une foi éclairée, lucide : il sait qu’il a besoin d’un commandement du Seigneur pour marcher sur l’eau. Il ne pourra le faire que si cela correspond à la volonté du Seigneur ; il ne dit pas : « Seigneur, je veux, moi aussi, marcher sur l’eau ! » Il en a pourtant envie, mais il ne veut pas agir suivant son désir sans le « feu vert » du Seigneur.
Ne nous méprenons pas : Pierre ne pose aucune condition au Seigneur ; l’expression « si c’est toi… » a probablement une valeur affirmative : « puisque c’est toi… »3 Pierre n’a pas besoin que Jésus lui ordonne de venir à lui pour être sûr que c’est le Seigneur, mais il a besoin de cet ordre pour mettre sa foi en action.
C’est ce que Jacques enseignera plus tard : « La prière agissante (la prière accompagnée d’un acte de foi) du juste a une grande efficacité. Élie était un homme de même nature que nous : il pria avec instance pour qu’il ne pleuve pas, et il ne tomba pas de pluie sur la terre pendant trois ans et six mois. » (Jac 5.16-17) La foi se prouve par des actes…
Pierre n’hésite pas une seconde : dès que Jésus lui dit « Viens ! », il met le pied hors de la barque, et marche sur l’eau d’une mer en furie. Il marche… « les yeux fixés sur Jésus, l’auteur de la foi et celui qui la mène à la perfection. » (Héb 12.2)
Jusqu’au moment où…
Et tout va bien… jusqu’à ce qu’il détourne les yeux du Seigneur, car alors il voit les circonstances et elles sont effrayantes : le vent soulève d’énormes vagues, et lui, il est debout sur l’eau au milieu de ces vagues !
Alors Pierre « commence à enfoncer ». Il « commence » seulement, alors qu’il aurait dû couler comme une pierre (c’est le cas de le dire !). Mais le Seigneur étend la main et le saisit : il est sauvé !
Alors vient cette parole surprenante : « Homme de peu de foi, pourquoi as-tu douté ? » Parole surprenante, mais aussi parole qui me reprend, car si la foi de Pierre était petite, alors la mienne est microscopique !
Comme nous l’avons vu plus haut, Pierre avait une foi extraordinaire, au point d’oser sortir de la sécurité (toute relative !) de la barque pour marcher sur l’eau à la rencontre du Seigneur. Et pourtant le Seigneur (qui ne peut se tromper) dit qu’il a manqué de foi, qu’il a douté au lieu d’avoir confiance.
Douter de qui ou de quoi ?
Pierre a donc douté : de qui ou de quoi a-t-il douté ? La réponse à cette question peut nous aider à comprendre ce que le Seigneur lui reproche, et ce qu’il veut nous apprendre par cet épisode de la vie de Pierre.
Pierre n’a certainement pas douté du Seigneur ! S’il n’avait pas eu confiance en lui, il n’aurait jamais mis ne serait-ce qu’un pied hors de la barque, et il ne lui aurait pas non plus demandé de le sauver lorsqu’il a commencé à enfoncer !
Mais Pierre a douté de sa capacité à faire ce que le Seigneur lui demandait : aller jusqu’à lui en marchant sur une mer déchaînée. C’est arrivé lorsqu’il a détourné ses regards du Seigneur pour regarder les circonstances, lorsque la parole du Seigneur (« Viens ! ») est devenue moins importante pour lui que ses émotions, que la peur qu’en pêcheur expérimenté il pouvait ressentir en se voyant debout sur une mer en furie.
Dieu donne ce qu’il ordonne
Ne lui jetons pas la pierre ! Combien souvent il nous arrive de douter alors que nous avons reçu une réponse positive du Seigneur ! Nous avons prié avant de nous engager dans ce qui nous apparaît comme la volonté de Dieu pour nous, mais, quand des difficultés surviennent, nous doutons, non pas du Seigneur lui-même, mais de la capacité qu’il nous donne d’aller jusqu’au bout de ce qu’il nous demande. Or, comme Saint-Augustin l’a écrit quelque part,« Ce que le Saint-Esprit ordonne, il le donne. » Cela s’applique aussi au Seigneur Jésus et à la situation de Pierre, mais Pierre a douté…
La foi n’est pas une denrée, que l’on peut avoir en plus ou moins grande quantité, mais une relation qui est plus ou moins intense. Nous pouvons nous comparer à un moteur électrique : pour qu’il fonctionne il faut qu’il soit relié à une source de courant (« les yeux fixés sur Jésus ») ; si l’on coupe l’alimentation, il continuera à tourner un moment par inertie, mais il ne tardera pas à s’arrêter; par contre, si la tension du courant augmente, il tournera plus vite.
C. S. Lewis, grand connaisseur de l’âme humaine, a écrit un livre intitulé Tactique du diable dans lequel un démon expérimenté donne des conseils à son jeune neveu apprenti. Dans sa sixième lettre, il lui dit que le doute est une arme à utiliser pour contrecarrer l’œuvre de Dieu, et il affirme que si son élève arrive à ce que le chrétien auquel il cherche à nuire soit plus occupé de ce qu’il ressent que de Dieu lui-même, il aura réussi.
Échec au doute
C’est ce qui est arrivé à Pierre et qui nous arrive souvent : si nous sommes focalisés sur ce que nous ressentons par rapport à telle ou telle circonstance, nous perdons le Seigneur de vue, et l’intensité de notre foi baisse…
Le Seigneur est toujours là ; nous avons toujours confiance (foi) en lui, mais nous doutons : vais-je arriver au bout ? Notre foi est « petite », elle n’est peut-être plus « agissante », mais le Seigneur lui ne varie pas : il nous suffit de nous « rebrancher » sur lui et nous remportons la victoire dans nos circonstances.
Je suis un homme de peu de foi et il m’arrive souvent de commencer à enfoncer à cause de mes doutes, mais je ne sombre pas car Jésus, mon Sauveur, est le Seigneur tout-puissant.
À lui la gloire, pour l’éternité, mais aussi dès à présent dans mes circonstances !
La Bible présente maints exemples d’hommes et de femmes de foi. Mais elle est aussi un livre réaliste et elle n’occulte pas les moments de doute de ses héros.
La Bible présente maints exemples d’hommes et de femmes de foi. Mais elle est aussi un livre réaliste et elle n’occulte pas les moments de doute de ses héros.Face aux multiples questions que soulève cette épineuse question du doute — Est-ce un péché de douter ? Faut-il nier le doute ? Le doute peut-il être utile ? — quelques exemples bibliques nous donneront des éléments de réponse. Pour chaque exemple, nous essayerons d’identifier d’où vient le doute, la façon dont il se montre, le moyen par lequel le croyant en est sorti et les « bénéfices » qu’il a pu en retirer.
Élie — ou le doute du découragé (1 Rois 19)
D’où vient son doute et comment se montre-t-il ?
La journée avait été sur-occupée : le prophète Élie avait rassemblé le peuple sur le Carmel, bâti un autel de grosses pierres, fait descendre le feu du ciel, égorgé 400 prophètes, prié avec instance, couru devant le char d’Achab pendant des dizaines de kilomètres. Et le voilà, quelques jours plus tard, découragé, sous un genêt, demandant à Dieu de mourir, doutant de sa mission, de lui-même, du peuple… (cf. 1 Rois 18-19)Le découragement d’Élie, qui est parfois aussi le nôtre, a sans doute plusieurs causes :
– On peut être pris par sa mission: on se donne à fond pour un travail pour Dieu et, quand il est fini, on se retrouve désemparé. Peut-être parce que le service pour le Maître a surpassé dans notre cœur le Maître du service.
– On peut être déçu du résultat de son travail : Élie espérait ramener le peuple à Dieu, mais il doit constater qu’en dépit de ses exploits du Carmel, Achab reste inféodé à Jézabel. Il n’a pas été plus efficace que ceux qui l’ont précédé.
– On peut cultiver le sentiment que tout repose sur soi : dans son réquisitoire contre son peuple, Élie multiplie les « je » en contraste avec les « ils ». Se croire indispensable et se voir incapable de tout faire, amène à une tension intérieure difficile à vivre.
– On peut manquer de mise en perspective : Élie avait courageusement fait face à 400 hommes et s’enfuit maintenant devant une seule femme.
Les conséquences sont la fuite devant ses responsabilités (qui avait dit à Élie que son service était fini ?), une vision biaisée et injuste de la réalité (Élie avait-il oublié qu’il n’était pas tout seul ?4 ), jusqu’à vouloir même mourir.
Comment sortir du doute ?
Dieu vient aider lui-même son prophète en lui envoyant un ange. Un frère ou une sœur découragé a souvent besoin d’un messager (autre sens du mot ange) de la part du Seigneur pour l’aider à repartir. L’ange apporte des éléments tangibles (un gâteau, une cruche). Le découragé est fortifié par un retour à la réalité concrète.
Mais ce qui a fait sortir Élie du doute est ce que Dieu lui a dit à l’entrée de la caverne du Sinaï. Le découragé, le moment venu, a besoin d’entendre la vérité sur Dieu et sur lui-même. S’il est dans cet état, c’est qu’il avait sans doute une vision faussée du Dieu qu’il servait ;or l’Éternel n’était pas seulement le Dieu de justice mais aussi le Dieu de grâce. Et lui-même, Élie, n’était pas le seul fidèle. Acceptons de revoir notre conception de Dieu et faisons un peu moins tout tourner autour de notre petite personne.
Quel bénéfice en retirer ?
« Va, reprends ton chemin », dit l’Éternel à Élie. Pour sortir du découragement, il est bon de retourner à l’activité. Mais pas à la suractivité. C’est pourquoi Élie doit partager son service avec Élisée qui lui succédera. Ainsi Élie comprend que tout ne repose pas sur lui. Servons Dieu dans notre mesure, dans notre temps, en étant conscients que c’est lui qui demeure et qui agit. Élie a bien compris la leçon, puisqu’il commence par oindre son successeur.
Job — ou le doute de l’éprouvé (livre de Job)
D’où vient son doute et comment se montre-t-il ?
Job a vécu une succession de drames : matériels avec la perte de ses biens, familiaux avec la mort de ses enfants, personnels avec sa maladie. Il est envahi par l’amertume, devant une souffrance qu’il juge imméritée.
Ses « amis » (Dieu nous garde de tels amis !) le suspectent de s’être très mal conduit pour mériter pareil sort. Alors Job se met à douter : il sait qu’il n’a pas commis de grave péché ; c’est donc que Dieu est injuste. Il s’isole et interpelle Dieu en le sommant de s’expliquer.
Une épreuve particulièrement douloureuse peut ébranler la foi, la confiance en Dieu. L’homme de la rue dira : « Mais qu’ai-je fait au bon Dieu pour mériter tout cela ? » Le chrétien ne le formulera pas ainsi, mais le pensera… L’épreuve devient tentation5 . Ai-je eu raison de croire dans un Dieu qui permet de telles circonstances ?
Comment sortir du doute ?
Après les longs plaidoyers de Job, Dieu intervient lui-même et lui parle de sa grandeur, de sa création. L’antidote à ce type de doute n’est pas l’explication de la souffrance — que Dieu ne donne pas — mais la vision de la souveraineté de Dieu. Laissons nos « pourquoi » et même nos « pour quoi » pour nous abandonner entre les mains d’un Dieu tellement plus grand, plus puissant, plus sage que nous, et qui nous aime, en dépit de tout.
Quel bénéfice en retirer ?
La fin du livre de Job est étonnante avec une happy end presque trop belle pour être vraie. Elle est là pour nous faire comprendre que le bonheur peut encore être présent. L’épreuve peut nous envahir au point de ne plus discerner les aspects positifs de la vie, alors que la joie cohabite souvent avec la souffrance (relisons l’Épître aux Philippiens pour en avoir la démonstration).
Dieu a demandé à Job de prier pour ses amis indélicats. Si notre épreuve a été renforcée par des consolateurs fâcheux, ne laissons pas l’amertume à leur encontre s’ajouter à notre douleur, mais intercédons pour ceux qui ont créé ou accentué le doute.
Asaph — ou le doute de l’aigri (Ps 73)
D’où vient son doute et comment se montre-t-il ?
Asaph enrage. Les méchants autour de lui prospèrent et lui souffre. Le sentiment de l’injustice du monde l’envahit. Il ne comprend pas le silence apparent de Dieu, son inaction. Il en vient jusqu’à dire : « C’est donc en vain que j’ai purifié mon cœur, et que j’ai lavé mes mains dans l’innocence. » (Ps 73.13).
Ce doute peut naître facilement dans notre cœur car, avec l’évangile, nous attendons volontiers la prospérité… Telle chrétienne voit ses collègues en couple et reste célibataire par fidélité au Seigneur. Ou tel entrepreneur chrétien perd des marchés parce qu’il refuse de verser un pot-de-vin. Etc. Effectivement, la foi implique des « sacrifices » et les refuser conduit à l’amertume qui avait envahi Asaph. De multiples questions se pressent alors à notre esprit : ai-je bien fait de confier ma vie au Seigneur ? Pourquoi ne récompense-t-il pas mes renoncements ? Quand va-t-il permettre que je sorte de cette situation ?
Comment sortir du doute ?
La première étape consiste à ouvrir son cœur à Dieu, comme le fait Asaph dans son Psaume. Disons tout ce que nous ressentons à Dieu, même les pensées dont nous ne sommes pas très fiers — il les connaît déjà parfaitement ! À la suite des psalmistes, nous constaterons la vertu apaisante de cette transparence.
La seconde étape nous amène à « pénétrer dans les sanctuaires de Dieu » (Ps 73.17). Il s’agit d’une façon poétique de désigner des moments de communion avec le Seigneur. Asaph saisit l’ampleur des plans de Dieu qui vont jusque dans la gloire. Mettre les circonstances en perspective de l’éternité permet de les relativiser. Connaître Dieu, vivre en relation avec lui devient un « bien » supérieur à la prospérité temporaire des méchants.
Quel bénéfice en retirer ?
Asaph voit sa relation avec Dieu transformée. Au lieu d’attendre les dons, il fait ses délices du Donateur. Et il peut « raconter toutes les œuvres » de son Dieu. Sa perspective s’est élargie, sa connaissance de Dieu approfondie. Transformons ainsi nos aigreurs en louanges !
Jean-Baptiste — ou le doute du déçu (Mat 11)
D’où vient son doute et comment se montre-t-il ?
Jean est dans une situation personnelle difficile : emprisonné par Hérode, il croupit dans un cachot alors qu’il avait drainé des foules considérables au Jourdain lorsqu’il prêchait le baptême de repentance. Il sent que son service est bientôt fini. Et Jésus qui ne fait rien pour lui. Se serait-il trompé sur son compte, lui qui le prenait pour le Messie tant attendu qui allait délivrer le peuple (Mat 11.2-3) ?
Nous pouvons connaître de tels moments de doute. Notre service peut s’arrêter brutalement ou ne pas porter les fruits escomptés. Nous nous trouvons dans une « prison » morale. Le Seigneur n’agit pas comme nous l’attendions et nous sommes déçus, déstabilisés, découragés… Pis, nous nous mettons à concevoir des doutes sur la réalité divine : « Es-tu vraiment celui que j’attendais ? » Ces doutes peuvent aller de l’existence même de Dieu à la remise en cause d’un de ses attributs, comme sa bonté, sa sagesse ou sa puissance.
Comment sortir du doute ?
Jean a la bonne réaction : il envoie ses disciples à Jésus. Si nous sommes en « prison »nous-mêmes, cherchons de l’aide auprès d’amis et demandons-leur de parler à Jésus pour nous, de nous aider à renouveler notre vision du Seigneur. D’une manière plus générale, ne gardons jamais nos doutes pour nous-mêmes mais ouvrons-nous à d’autres qui sauront nous aider à voir les choses sous un autre angle. Et même si nous ne pouvons pas réaliser tous nos plans, Dieu le sait ; abandonnons-lui nos projets interrompus ou les fruits de notre service.
Quel bénéfice en retirer ?
Immédiatement après, Jésus rend un témoignage extraordinaire à propos de Jean (Mat 11.7-11) : « plus qu’un prophète », « pas de plus grand que Jean-Baptiste » ! Loin de critiquer Jean pour ses doutes, il le met en valeur. Tirons-en un principe important : celui qui doute n’est pas disqualifié !
La réponse de Jésus a permis à Jean de mieux comprendre la réalité de l’action de Dieu. Il n’agit pas forcément selon nos schémas, mais il fait tout concourir à son but d’amour.
* * *
D’autres exemples bibliques pourraient allonger cette liste — et ce numéro de Promesses en présentera quelques-uns. Mais relevons l’importance de la vision de Dieu : si le doute naît, c’est en général qu’elle est faussée ; si le doute s’efface, c’est qu’elle est corrigée.
Élie voyait un Dieu justicier ; Job pensait que Dieu était contre lui et Asaph qu’il était injuste ; Jean-Baptiste était déçu de Dieu dans ses attentes. Dieu est venu les rencontrer au fond de leur doute et il a changé leur vision : Élie a rencontré le Dieu de grâce ; Job a été amené à voir la souveraineté du Créateur ; Asaph est entré dans les sanctuaires pour y contempler l’action finale du Très-Haut et Jean-Baptiste a été encouragé par les miracles du Seigneur qu’on lui a racontés.
Nos propres doutes ne cadrent peut-être pas exactement avec ceux de ces fidèles d’autrefois, mais, au sein de notre perplexité, recherchons la face du Seigneur, demandons-lui de renouveler notre vision de sa personne et de son action — et comme autrefois, il répondra !
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