PROMESSES

« Car je connais les projets que j’ai formés sur vous, dit l’Éternel, projets de paix et non de malheur, afin de vous donner un avenir et de l’espérance. » (Jér 29.11)

« JĂ©rĂ©mie 29.11 est l’une des promesses les plus mal comprises de toute la Bible ! » a dit un jour un de mes professeurs. J’ai hochĂ© la tĂŞte en l’entendant, mais, pour ĂŞtre honnĂŞte, sans vraiment comprendre ce qu’il voulait dire. Qu’y a-t-il de faux Ă  appliquer ce verset Ă  nos vies ?

Voici comment j’ai appris cette leçon — et de la manière dure. J’ai reçu cette promesse quand, Ă  la fin de mes Ă©tudes supĂ©rieures, on m’a offert une carte de vĹ“ux oĂą figurait ce verset. Naturellement, je savais exactement ce que « l’avenir » et « l’espĂ©rance » selon Dieu voulaient dire pour une personne dans ma situation : un travail. J’avais dĂ©jĂ  commencĂ© Ă  en chercher, et le verset de JĂ©rĂ©mie a boostĂ© ma confiance.

J’ai passĂ© la majeure partie de l’annĂ©e suivante Ă  essayer de trouver du travail. J’ai envoyĂ© des centaines de courriels, des dizaines de curriculum vitae et de lettres de motivation. J’ai perfectionnĂ© ma stratĂ©gie de relance tĂ©lĂ©phonique. J’ai eu quelques bons entretiens mais aucune offre.

De cette manière assez pitoyable, mes Ă©checs pour trouver un emploi ont suscitĂ© une crise. Qu’attendait Dieu ? me suis-je demandĂ©. OĂą Ă©taient mon avenir et mon espĂ©rance ? Et pourquoi Dieu ne m’avait-il pas procurĂ© un travail ? En attendant les rĂ©ponses Ă  ces questions, j’ai appris Ă  lire JĂ©rĂ©mie 29 diffĂ©remment et, plus important encore, Ă  reconnaĂ®tre les façons subtiles dont j’avais tordu ma vision de Dieu.

La vraie histoire de Jérémie 29

Pour mieux comprendre JĂ©rĂ©mie 29, j’ai Ă©tĂ© obligĂ© de me plonger dans l’histoire de JĂ©rĂ©mie, en particulier le chapitre 28. Ce texte raconte une confrontation entre le prophète JĂ©rĂ©mie et un autre prophète nommĂ© Hanania. Ils sont debout dans le temple de JĂ©rusalem, qui est vide parce que les Babyloniens ont saccagĂ© la ville, quand Hanania fait une promesse audacieuse : Dieu va restaurer IsraĂ«l dans moins de deux ans. Tous les objets volĂ©s, toutes les personnes contraintes Ă  l’esclavage et Ă  l’exil, rentreront prochainement.

JĂ©rĂ©mie a discernĂ© exactement de quel genre de promesse il s’agissait. Cette prĂ©diction semblait bonne Ă  court terme et rendait Hanania et ses partisans très populaires. Hanania peut mĂŞme avoir cru lui-mĂŞme la promesse. Mais ce n’Ă©tait pas vrai ; Dieu n’avait pas l’intention de tout amĂ©liorer dans les deux ans. Par JĂ©rĂ©mie, Dieu dit Ă  Hanania : « Tu inspires Ă  ce peuple une fausse confiance. » (JĂ©r 28.15)

Suit Jérémie 29. Face aux fausses promesses de prospérité, Jérémie envoie une lettre à Babylone qui dit en substance aux exilés : « Votre exil va durer 70 ans. Vous allez mourir à Babylone. Vos enfants vont mourir à Babylone. Installez-vous là-bas. »

Nous lisons souvent Jérémie 29 comme si ce chapitre était une bonne nouvelle, claire et simple. Mais pour les premiers lecteurs de la lettre de Jérémie, ces mots ont été une énorme déception. Le peuple de Dieu avait terriblement souffert. Ils avaient perdu leur terre, leur trône, leur temple. Ils avaient dû faire 1000 km avant de défiler vaincus à travers une ville païenne dans laquelle ils étaient maintenant considérés comme des symboles vivants de la puissance du dieu de cette ville.

C’est dans ce contexte de dĂ©sespoir que JĂ©rĂ©mie fait entendre la promesse de Dieu : « Je connais les projets que j’ai formĂ©s sur vous […] projets de paix et non de malheur, afin de vous donner un avenir et de l’espĂ©rance. »Ces mots n’Ă©taient pas faciles Ă  entendre. JĂ©rĂ©mie promettait que Dieu avait un plan certain, qui se rĂ©aliserait — mais pas comme IsraĂ«l l’aurait attendu. Dieu ne comptait pas simplement annuler les difficultĂ©s d’IsraĂ«l. Pourtant, la promesse Ă©tait maintenue : Dieu rĂ©tablirait entièrement son peuple et les sortirait de leur situation dĂ©sespĂ©rĂ©e, mais il ne le ferait pas de la manière qu’ils avaient prĂ©vue.

Longtemps j’ai lu JĂ©rĂ©mie 29 comme si j’écoutais Hanania — comme si Dieu s’efforçait de faire tout pour mon bien-ĂŞtre dans un avenir proche et d’une manière qui me paraisse logique. C’est ce que mon professeur voulait dire quand il parlait de mal comprendre les promesses de Dieu : nous prenons JĂ©rĂ©mie 29.11 hors de son contexte et y lisons les promesses que nous voulons recevoir.

Dieu, un distributeur automatique de bénédictions ?

Lorsque nous rĂ©alisons que notre interprĂ©tation de JĂ©rĂ©mie 29.11 (ou de tout autre passage) est erronĂ©e, nous devons prendre du recul et considĂ©rer pourquoi nous en sommes arrivĂ©s Ă  considĂ©rer Dieu davantage comme un distributeur automatique de bĂ©nĂ©dictions que comme notre crĂ©ateur et notre sauveur. C’est Martin Luther qui plaisantait : « Ce que les paĂŻens avaient dans leur bois, nous l’avons dans nos opinions. » Il voulait rappeler par lĂ  que l’idolâtrie existe encore. La forme change selon les gĂ©nĂ©rations, mais la tendance Ă  remplacer la vĂ©ritĂ© de Dieu par un mensonge existe toujours chez chacun de nous. Nous avons une capacitĂ© surprenante Ă  nous tromper nous-mĂŞmes.

Ayant cela à l’esprit, notons que Dieu ajoute : « Vous me chercherez, et vous me trouverez, si vous me cherchez de tout votre cœur. […] Je vous rassemblerai de toutes les nations et de tous les lieux où je vous ai chassés. » (Jér 29.13-14) La bénédiction (ici le retour d’exil) est directement liée à une bonne relation avec Dieu, et cette bonne relation vient de ce qu’on le recherche « de tout son cœur».

Il existe de nombreuses façons de contrer notre tendance subtile Ă  transformer les promesses et les projets de Dieu en caricatures de ce qu’ils sont rĂ©ellement. Nous pouvons lire la Bible en faisant davantage attention au contexte. Nous pouvons partager nos idĂ©es sur Dieu et sur l’Écriture avec d’autres. Cependant, le moyen le plus important est de rechercher Dieu. Rechercher Dieu ne se traduira pas toujours par des solutions immĂ©diates aux problèmes de notre vie. Mais cela nous amènera Ă  rĂ©aliser que notre vie s’inscrit dans un plan beaucoup plus large — un plan oĂą Dieu rĂ©sout les dĂ©ceptions de la vie d’une manière qui dĂ©passe tellement notre vision limitĂ©e.


« Qu’est-ce que demain va m’apporter ? » Que nous l’exprimions ou non, cette question est souvent présente à notre esprit. Les hommes dépensent des sommes considérables pour sonder l’avenir, par des moyens très variés, qui vont des études sérieuses de prévisionnistes aux illusions proposées par tant de charlatans qui se prétendent devins.

Le chrétien se pose aussi la même question, mais il possède déjà des réponses : la confiance qu’il a mise dans la mort et la résurrection de Jésus Christ l’assure d’un avenir ultime, éternel, dans la maison de son Père céleste. Plus encore, il y sera récompensé en fonction de sa fidélité dans son service ici-bas (cf. l’article de Florent Varak).

Pour l’immédiat, il sait que sa destinée est dans la main de son Dieu (Ps 31.16), qui a pour lui des projets de paix (Jér 29.11) — même si, avec l’article de Chris Blumhofer, nous verrons que ce verset doit être bien compris. Il se confie dans son Seigneur pour son avenir professionnel, pour sa vie personnelle (marié ou célibataire), pour son service chrétien, pour ses décisions — comme le développent divers articles de ce numéro.

Ainsi, le chrétien « ne craint point les mauvaises nouvelles ; son cœur est ferme, confiant en l’Éternel. » (Ps 112.7) Et cette attitude tranquille sera en elle-même un témoignage dans un monde de plus en plus inquiet pour son avenir.