PROMESSES

La Bible, Parole inspirée de Dieu, est unique. Toutefois personne n’a encore jamais mis la main sur le rouleau ou le papyrus original d’un de ses 66 livres. Elle nous est parvenue par divers manuscrits (en hébreu et en araméen pour l’A.T., en grec pour le N.T.). Ce texte dans les langues originales doit à son tour être traduit pour être accessible à l’immense majorité des lecteurs qui ignorent ces langues anciennes.

Les deux articles qui suivent traitent de ces sujets :

– Roger Liebi nous initie avec conviction aux questions relatives à la fiabilité du texte et aux comparaisons entre les différents manuscrits dont nous disposons.

– Viviane André nous permet de mieux comprendre la diversité des traductions de la Bible disponibles en français aujourd’hui et leurs spécificités, de façon à guider le choix de chacun.

En tant que revue de réflexion biblique, la rédaction de Promesses utilise prioritairement les traductions littérales qu’elle recommande pour l’étude du texte biblique. Les citations des articles sont généralement tirées de la version Segond Nouvelle Édition de Genève (NEG), 1979. À l’occasion, d’autres traductions peuvent être utilisées et sont indiquées à la suite de la citation.

Nous attirons néanmoins l’attention sur le fait que seul le texte biblique est inspiré : certaines traductions rajoutent des titres qui ne le sont pas, même s’ils sont utiles pour se repérer dans le texte. Enfin, le lecteur est invité à une lecture « critique » (dans le bon sens du terme) des notes de bas de page et des introductions des traductions qu’il utilise ; certaines sont en effet influencées par une approche critique (dans le mauvais sens du terme) de l’inspiration plénière et verbale de l’Écriture, qui n’est pas celle que nous retenons.

Un nombre variable de livres dans la Bible ?

Pour l’Ancien Testament, les manuscrits de la version grecque (la Septante) contiennent quelques livres absents des manuscrits hébreux. Les catholiques et les orthodoxes en reconnaissent un nombre variable comme sacrés — ils les appellent « deutérocanoniques » —, tandis que les protestants, à la suite des Juifs, les écartent de la liste des livres faisant autorité et leur donnent le nom d’ « apocryphes ». De ce fait, ils sont absents de certaines éditions et présents dans d’autres :

?  les versions Segond et la Bible du Semeur ne les incluent pas ;

la Bible en français courant et la Bible en français fondamental incluent les deutérocanoniques catholiques dans certaines de leurs éditions ;

la Bible de Jérusalem, la Bible de Maredsous et la Bible des peuples les incluent systématiquement ;

la Traduction œcuménique de la Bible (TOB) 2010 inclut les deutérocanoniques catholiques, mais aussi orthodoxes.

 Ces livres apocryphes ne sont pas inspirés et servent de justification à certaines hérésies. La rédaction de Promesses encourage ses lecteurs à choisir des éditions qui ne les incluent pas, de façon à bien faire la distinction entre le texte inspiré et les ajouts ultérieurs.

Écrit par


Adapté d’un article paru dans La Bonne Nouvelle, 6/1995, p. 86.

La tendance actuelle, même dans les milieux évangéliques, est de confondre tolérance et compassion. La première ne se trouve nulle part dans la Bible alors que notre Seigneur, la Parole faite chair, est l’exemple parfait de la seconde. Ainsi, au nom de la tolérance, on en vient gentiment à relativiser les doctrines les plus essentielles de la foi chrétienne. Et pour ce faire, on est obligé de toucher, consciemment ou inconsciemment, au caractère exclusif, normatif et pleinement suffisant de la Bible, Parole infaillible de Dieu.

Que faire face à un monde qui tolère toutes les formes de religiosité et de spiritualité, aussi longtemps qu’elles n’enseignent pas de dogmes exclusifs ? La tentation est forte de céder au relativisme ambiant, enclins que nous sommes par notre cœur à rechercher la respectabilité, la reconnaissance publique, plutôt que le rejet et la moquerie. Pourtant si nous voulons marcher à la suite des prophètes, du Seigneur, des apôtres et des chrétiens fidèles qui nous ont précédés dans l’histoire, nous devrons nous souvenir du lot qui fut souvent le leur dans ce monde (Jean 15.18-21).

Notre responsabilité actuelle est donc de tenir ferme sur la doctrine de l’exclusivité et de la toute suffisance de l’Écriture, car c’est là que se mène le combat parmi les évangéliques aujourd’hui ; et, comme le disait Luther : « C’est là où la bataille fait rage que se trouve la loyauté du soldat, et tenir ferme sur tout le reste du front n’est que fuite et déshonneur si l’on flanche sur ce point-là. »

I. L’heure du bilan

Au risque de vous surprendre, j’aimerais tenter de vous montrer comment deux courants théologiques, en général opposés sur le terrain, et apparemment très lointains l’un de l’autre, ont, en fait, le même problème de base : une incompréhension envers la nature de l’Écriture sainte.

Le premier de ces courants se caractérise par des phrases telles que celle-ci : « En matière de religion, chacun a sa vérité. Peu importe ce que tu crois, pourvu que cela te fasse du bien. De toute façon toutes les religions conduisent à Dieu. »

C’est la pensée répandue dans le modernisme théologique. Elle naît d’une relativisation de l’autorité de la Parole de Dieu et d’un manque de foi au caractère normatif de l’Écriture. Elle place la raison humaine au-dessus de l’Écriture.

Quand ce modernisme est exprimé de façon si massive, il n’y a aucun problème à le détecter et à le dénoncer. Ce qui est dangereux pour nous, ce sont ses germes, plus subtils, qui peuvent habiter notre propre pensée. Lequel d’entre nous ne s’est pas surpris un jour à relativiser la portée universelle du jugement de Dieu, alors qu’il se trouvait face à une personne qui jouait la corde sensible de l’amour de Dieu ? Pourtant, le développement des trois premiers chapitres de l’Épître aux Romains est tout à fait clair. Il se termine par cette déclaration : « Nous avons déjà prouvé que tous, Juifs et Grecs, sont sous l’empire du péché, selon qu’il est écrit : Il n’y a point de juste, pas même un seul. » (Rom 3.9-10)

Le second de ces courants est encore plus familier. C’est celui du « sentimentalisme non doctrinal évangélique ». Il est caractérisé par une phrase qui, au premier abord, paraît très spirituelle, mais qui en fin de compte porte atteinte au caractère normatif et exclusif de l’Écriture sainte. La voici : « Ce qui compte, c’est ce que nous avons là, dans le cœur, et non pas nos divergences doctrinales ».

Que répondre à une telle phrase ? Si vous acquiescez, vous cautionnez le flou doctrinal. Si vous répondez par la négative, votre interlocuteur vous taxera d’intellectualiste mort.

Discernons d’abord quel est le problème énoncé par une telle proposition :

– une accentuation de l’expérience au détriment de la doctrine ;

– une surévaluation de l’événement actuel (ce que je vis dans mon « cœur ») par rapport à l’événement combien plus important de l’inspiration de l’Écriture !

– une priorité du sentiment sur l’intelligence.

Ce sentimentalisme évangélique est donc une position très subtile. Sous couvert d’hyperspiritualité, il relativise la révélation que Dieu nous a donnée dans sa Parole.

Et sans juger du cœur des personnes qui tiennent l’un ou l’autre de ces discours, constatez avec moi comment ces deux positions, apparemment très éloignées, se rejoignent sur un point : le rejet du caractère normatif, exclusif et tout suffisant de la Parole de Dieu.

Pour le modernisme, un rejet en faveur de la raison.

Pour l’évangélisme événementiel, émotionnel, un rejet en faveur du sentiment.

Mais dans les deux cas, il y a une négation de l’autorité de l’Écriture et de son caractère normatif et infaillible. Pourquoi ? Parce que, si c’est la raison ou le sentiment de l’homme qui décide de ce qui est acceptable, la Bible devient un livre variable en fonction de nos préférences. On en arrive donc à lui faire dire « tout et son contraire ». Et que ferait le mathématicien d’un manuel dont les théorèmes conduisent chaque fois à des résultats différents en fonction du savant qui l’emploie ? C’est à cela que conduisent tant le modernisme que l’évangélisme sentimental non doctrinal. Nous le constatons déjà dans certaines églises. La lecture de la Parole de Dieu et la prédication de celle-ci occupent de moins en moins de place dans le culte. La référence à l’Écriture sainte devient absente des discussions. Le culte de famille disparaît des foyers…

Que faire pour contrer ce problème ? Redéfinir ensemble ce qu’est l’Écriture sainte et la façon dont Dieu a parlé.

Il. Dieu s’est révélé

La Bible est « révélation de Dieu » et s’affirme comme telle.

L’apôtre Pierre déclare que l’Esprit de Dieu veille sur les auteurs sacrés afin qu’ils parlent de la part de Dieu : « Sachez tout d’abord vous-mêmes qu’aucune prophétie de l’Écriture ne peut être un objet d’interprétation particulière, car ce n’est pas par une volonté d’homme qu’une prophétie a jamais été apportée, mais c’est poussés par le Saint-Esprit que des hommes ont parlé de la part de Dieu. » (2 Pi 1.20-21)

Première vérité : Dieu s’est révélé. Il nous est donc interdit d’accepter toute spiritualité et recherche de Dieu comme équivalente. Cela nous empêche aussi d’affirmer que toute expérience mystique est bonne, car il y a une norme selon laquelle tout doit être jugé.

III. Dieu s’est révélé de façon cohérente et compréhensible

1. Le message de la Bible est cohérent

L’Écriture n’est pas un amalgame de récits sans lien les uns avec les autres. Elle contient un message central qui peut se résumer en trois mots : « Création, Chute, Rédemption ».

Les auteurs bibliques citent leurs prédécesseurs en leur accordant une grande autorité. Christ déclare que sa venue accomplit la prophétie d’Ésaïe (Luc 4:17-21).

Les thèmes se retrouvent et se développent peu à peu jusqu’à leur plein épanouissement. Pensez simplement à celui de l’agneau et du sacrifice sanglant.

L’Écriture est comprise dans son ensemble et en tenant compte des grandes lignes de son message.

Avant d’appliquer un texte à votre vie, examinez son contexte avec soin. Le sens qu’il a dans l’ensemble de l’Écriture. Qui l’a prononcé, à qui il est adressé et dans quel but. Vous éviterez ainsi le travers de vous approprier par exemple des jugements portés contre les pharisiens, des paroles comme celles des amis de Job qui furent en définitive condamnées par Dieu…

Cette cohérence rend impossible toutes affirmations contradictoires dans la Bible.

Bien sûr, il faut distinguer entre contradictions et vérités qui dépassent notre entendement pécheur si souvent obscurci. Il existe de nombreuses vérités que nous ne pouvons pas cerner totalement (Trinité, deux natures de Christ en un seul homme, élection et responsabilité, etc.). Mais, elles ne doivent pas être considérées comme contradictoires. Ce sont des démonstrations de la grandeur de Dieu dont la sagesse et l’intelligence nous dépassent infiniment.

2. Le message de la Bible est compréhensible

Dieu s’est abaissé et s’est exprimé en tenant compte de nos limitations humaines. Cette accommodation de Dieu est un fait extraordinaire que nous ne pouvons pas oublier. Il s’est soumis aux règles de grammaire et de style en usage.

C’est une maladie de notre temps que de relativiser la clarté de l’Écriture. Certes, nous sommes pécheurs et pouvons être mal affermis au point de tordre le sens de l’Écriture. Mais la Parole de Dieu est claire et compréhensible.

Gardons-nous de nous servir de l’Écriture pour justifier nos sentiments et nos expériences de toutes sortes, au lieu de la servir en nous efforçant de la comprendre avec l’intelligence que Dieu nous a donnée. Façon de faire extrêmement dangereuse, car il est possible de faire dire n’importe quoi à la Bible quand nous nions contexte et cohérence. Le Psaume 53.2 affirme même : « Il n’y a point de Dieu » — mais le contexte montre que c’est l’insensé qui dit cela en son cœur.

Si Dieu s’est révélé sous une forme intelligible, cela veut dire que notre intelligence doit précéder les sentiments dans notre analyse des phénomènes de spiritualité.

S’il s’est révélé de façon cohérente, cela nous contraint à formuler les vérités dans l’Écriture sous forme de doctrines, d’énoncés théologiques et de préceptes clairs et cohérents.

La Parole de Dieu est une révélation qui ne fait pas abstraction de l’intelligence. Elle donne de vraies réponses à ceux qui ont l’honnêteté de poser de vraies questions. Elle permet d’argumenter avec l’incroyant. C’est ce que Paul fit à Rome : « Paul leur annonça le royaume de Dieu, en rendant témoignage, et en cherchant, par la loi de Moïse et par les prophètes, à les persuader de ce qui concerne Jésus. L’entretien dura depuis le matin jusqu’au soir. » (Act 28.23)

C’est là notre responsabilité, tout en comptant sur l’Esprit de Dieu qui seul convainc de péché et fait naître à la vie nouvelle. Alors, devenir chrétien n’est pas un saut dans l’irrationnel et l’incontrôlable, comme vous l’avez peut-être entendu. C’est une soumission intelligente à la révélation cohérente et compréhensible de Dieu. Soumission qui donne le cadre dans lequel nos sentiments peuvent s’épanouir d’une façon qui glorifie Dieu.

IV. Dieu s’est révélé d’une façon exclusive

Au deuxième commandement, il dit : « Je suis un Dieu jaloux. »

La révélation suprême de Dieu en Jésus-Christ a aussi un caractère exclusif. Il dit : « Je suis le chemin, la vérité et la vie. Nul ne vient au Père que par moi. » (Jean 14.6). Il ne dit pas : « Je suis une vérité… ». Paul renchérit : « Mais quand nous-mêmes, quand un ange du ciel annoncerait un autre Évangile que celui que nous vous avons prêché, qu’il soit anathème ! » (Gal 1.8)

Et quand Paul songe à la relève dans le ministère, que fait-il ? Il exhorte Timothée à répéter ce qu’il a entendu de lui à des hommes fidèles qui l’enseigneront à d’autres à leur tour (2 Tim 2.2). Pourquoi ? Parce qu’il y a une « bonne doctrine » qu’il s’agit de suivre si on veut être un ministre fidèle du Seigneur (1 Tim 4.6).

V. Dieu s’est révélé d’une façon suffisante

Le texte classique sur ce thème est 2 Tim 3.16-17 : « Toute Écriture est inspirée de Dieu, et utile pour enseigner, pour convaincre, pour corriger, pour instruire dans la justice, afin que l’homme de Dieu soit accompli et propre à toute bonne œuvre. »

• L’homme n’a besoin ni de la tradition de l’Église, ni de révélations nouvelles après la clôture du Nouveau Testament pour comprendre le salut, grandir dans la foi et vivre à la gloire de Dieu dans ce monde. Bien sûr, il faut distinguer le salut de la connaissance purement intellectuelle des Écritures (les pharisiens sondaient les Écritures sans pour autant venir à Christ, cf. Jean 5.39-40). Il faut illumination et régénération par le Saint-Esprit pour que l’Écriture porte ses fruits.

• La suffisance de l’Écriture ne concerne pas uniquement le salut. Paul dit à Timothée qu’au moyen de l’Écriture il est parfaitement « adapté et préparé » à « toute bonne œuvre ». La Parole de Dieu équipe tant pour la doctrine que pour la morale. Elle est donc le manuel parfaitement adapté à un jeune pasteur dans des églises à problèmes comme celle d’Éphèse.

N’est-ce pas d’ailleurs l’exemple que nous donne notre Seigneur en face du diable (Mat 4.1-11) ?

C’est le doute quant à la suffisance qui fait inventer à l’Église d’aujourd’hui toutes sortes de moyens techniques et de méthodes de remplacement dans l’évangélisation, dans le culte, dans la cure d’âme. C’est le doute quant à la suffisance de l’Écriture qui fait rechercher toutes sortes d’expériences pour le progrès dans la foi. C’est une mauvaise compréhension de ce qu’est l’Écriture qui en fait tordre le sens pour justifier tant de pratiques extravagantes.

Ainsi, la Parole de Dieu est devenue le manuel du code de la route que nous apprenons sur le bout des doigts pour passer l’examen, puis dont nous nous contentons de garder de vagues connaissances pour nous débrouiller sur la route sans plus jamais avoir recours au manuel.

Alors, si vous désirez plus que l’Écriture pour obtenir la sagesse, vous vous trompez, mais si vous vous contentez de moins que l’Écriture, vous vous trompez aussi, car elle seule est suffisante pour équiper parfaitement l’homme de Dieu et tout chrétien pour sa marche quotidienne.

Écrit par


« Ainsi la foi vient de ce qu’on entend, et ce qu’on entend vient de la parole de Christ. » (Rom 10.17)

La Bible : 66 livres, une vraie et belle bibliothèque, le livre le plus vendu, le plus traduit, le plus répandu, au monde. Un seul chiffre pour l’illustrer : l’association des Gédéons vient de franchir le cap des 2 milliards de Nouveaux Testaments distribués.

Dieu nous a écrit pour se faire connaître. La Bible n’est pas un livre de recettes, ou un code de loi, c’est le message que Dieu adresse aux hommes, aux perdus pour qu’ils soient sauvés, aux affligés pour qu’ils soient consolés, à chacun pour s’approcher de lui, connaître ce grand Dieu qui s’est révélé en Jésus-Christ et pour l’adorer par une vie de piété et de service.

C’est pourquoi on ne lit pas la Bible « en diagonale », on la lit soigneusement, on la relit, on la médite, on s’en imprègne. Elle doit toucher notre cœur, notre être le plus profond, pour être agissante dans notre vie.

Toutefois la Bible n’est pas Dieu. Quand Jésus notre Seigneur s’identifie à la « parole » dans le premier chapitre de l’Évangile selon Jean, c’est au message qu’il s’identifie et pas aux mots.

À notre époque caractérisée par des mutations rapides, va-t-on adapter la Bible aux changements culturels, ou bien la Bible va-t-elle nous guider pour juger ces changements ? Pourquoi faut-il prendre du temps pour la lire et l’étudier ? Quelles versions choisir ? Comment comprendre ces textes anciens ? La lire seul ? En famille ? En école biblique ? Voilà quelques questions évoquées dans ce numéro.

Écrit par


Michel Varton
Extrait de Portes Ouvertes Magazine

Au cours de ses premières années, Portes Ouvertes n’avait qu’un seul but : livrer clandestinement des bibles dans le monde communiste. Pourquoi faire cela ?

Nous trouvions la confiance et l’assurance (certains diraient l’audace) parce que le livre que nous apportions n’était pas n’importe quel ouvrage de littérature.

C`était la Parole de Dieu. Le message unique de salut, révélé par Dieu, que tout être humain a le droit d’entendre. Nous obéissions à un ordre divin qui dépassait les restrictions placées par des régimes athées.

Notre souci, cependant, n’était pas simplement de livrer des bibles dans ces pays. Nous désirions que les chrétiens, par la suite, vivent le message biblique. D’ou le cri du cœur de frère André : « Il faut vivre le Livre. »

Dans la plupart des nations, la Bible est plus accessible aujourd’hui. Elle peut être téléchargée depuis internet. Mais le défi de vivre le Livre reste d’actualité. Pour toutes nos actions, humanitaires ou non, notre but est que l’Église, même dans une situation de persécution, respire le message biblique.

Ainsi, en Irak et en Syrie, où la haine semble être le seul message entendu par le monde, les chrétiens ouvrent leurs églises et leurs campements aux réfugiés de tous bords. Dans un contexte de souffrance et de terreur, ils apprennent à vivre le Livre, et attirent d’autres personnes à Christ.

Karl Marx disait : « Donnez-moi 26 soldats de plomb [les lettres de l’alphabet], et je vais changer le monde. » Mais la vraie puissance qui change le monde, c’est lorsque Dieu parle à travers son Livre et que les chrétiens apprennent à le mettre en pratique.

Vivons le Livre !


Ma décision de faire un institut biblique

Si l’on m’avait dit quelques mois plus tôt que je partirais me former en vue de devenir pasteur, je ne l’aurais pas cru. Beaucoup me voyaient plutôt embrasser la carrière de golfeur professionnel, sport que je pratiquais à haut niveau amateur.

Certains pourraient trouver étrange l’idée de rejoindre un institut biblique. C’est vrai qu’à 25 ans, après une vie étudiante bien remplie, de nombreux voyages à travers le monde, un diplôme en poche, une vie chrétienne qui venait de débuter 2 ans plus tôt, on peut se dire qu’il est enfin temps de rentrer dans la vie active : un boulot, une vie d’église, envisager le mariage et une vie de famille.

Ce désir de formation est né alors que je voyais tous ces gens autour de moi, ma famille, mon entourage ou ces personnes dans les rues qui n’avaient pas reçu cette nouvelle vie en Jésus. Je voulais leur dire, leur parler de mon Sauveur et Seigneur, les voir embrasser la foi et être transformées par Dieu. Je remarquais bien vite que mon enthousiasme n’était pas suffisant pour communiquer efficacement le message de l’Évangile. Appuyer mon discours sur l’histoire biblique et la Parole de Dieu n’était pas toujours simple faute de formation. À part quelques cours de catéchisme comme enfant, mon ignorance était grande. Je ne connaissais que très peu de choses de l’Ancien Testament et cela me gênait beaucoup dans mes discussions.

Je suis reconnaissant au Seigneur d’avoir mis sur ma route un ami missionnaire de mon église locale. Il a pu répondre à mes questions et renforcer ce désir qui montait en moi de me former dans la Parole. Plusieurs options de formation étaient possibles en francophonie ou en Amérique du Nord où j’avais fait profession de foi pendant mes études universitaires. C’est finalement après une visite sur place avec cet ami, que j’ai opté pour me former à l’Institut Biblique de Genève.

Faire le choix de me former ne fut pas toujours bien accueilli par ma famille non croyante. Elle avait espoir que je me fasse une bonne situation dans le monde des affaires. Mes amis golfeurs que j’avais côtoyés durant tant d’années ne comprenaient pas toujours mon récent changement de cap. Certes, j’allais faire le sacrifice de renoncer à de nouvelles ambitions sportives, mais un désir nouveau jaillissait en moi, bien plus fort.

Près de 20 ans plus tard, je regarde encore ce temps de formation comme une période riche en rencontres et opportunités d’apprentissage. Ce que j’ai vécu et appris fut un tremplin pour la suite de mon service dans l’œuvre de Dieu. Je n’oublierai pas les conseils de mon ami missionnaire qui me disait que, quoi qu’il arrive à la suite de cette première année, cela ne serait que du bonus. Soit je revenais avec plein de choses apprises et utiles pour mon service dans l’église, soit je poursuivais une formation plus longue afin de me préparer à un ministère à plein temps.

Ce que cette formation m’a apporté

Mon arrivée à l’Institut m’a vite conforté dans mon choix. Je me sentais à ma place. J’avais soif de découvrir tant de nouveaux domaines jamais explorés auparavant : l’histoire biblique, la théologie systématique, l’approfondissement de livres bibliques, l’ecclésiologie, les religions et les sectes, l’histoire de l’Église, la vie chrétienne… autant de matières passionnantes dont je découvrais la valeur. Il faut dire que j’avais du terrain à rattraper par rapport à la trentaine d’autres étudiants de ma promotion. Beaucoup venaient de familles évangéliques et avaient été bien nourris depuis leur jeunesse (école du dimanche, camps chrétiens, campagnes d’évangélisation, voyages missionnaires) et passer par un institut biblique ne semblait qu’une suite logique dans leur parcours. Certains de mes camarades étaient venus avec l’idée de se former un an avant de reprendre leur travail.

Certes, on est en droit d’attendre toutes sortes de cours et de connaissances nouvelles dans un institut biblique, mais ce qui reste gravé dans le temps ce sont les relations et rencontres faites. Dans la grande majorité, nos enseignants étaient des pasteurs, des implanteurs d’églises ou des missionnaires qui venaient à l’Institut pour une semaine complète ou plus afin de partager leurs connaissances mais aussi leurs expériences du terrain. Nous ne les côtoyions pas seulement lors des cours mais aussi aux autres moments de la semaine (repas, temps de pauses, temps libre). Ces échanges informels étaient vraiment riches. J’aimais entendre ces profs qui avaient l’humilité de parler de leur ministère sans cacher les joies et les difficultés liées à leur service. Je pense à cet enseignant nous partageant quelques histoires vécues où le Seigneur l’avait conduit d’une manière providentielle pour partager la Bonne Nouvelle à des jeunes des rues ; à celui qui m’avait invité à visiter à l’hôpital un jeune garçon atteint d’une leucémie. Ces moments particuliers furent pour moi la découverte de réalités liées au ministère dans l’Église qui ne se voient pas toujours dans les livres.

Cette formation m’a aussi apporté une meilleure connaissance du monde évangélique. À part ma petite dénomination et mon église locale, je ne connaissais rien aux mouvements et œuvres évangéliques de mon pays. Les enseignants issus de divers horizons m’ont beaucoup appris là-dessus et cela a été bien utile par la suite.

Et puis, une première année en internat avec une trentaine d’autres étudiants (célibataires, couples mariés avec ou sans enfants, de différentes nationalités, de tous âges) cela ne laisse personne indifférent. La vie en communauté est en soi une école du caractère. C’est par elle aussi que l’on apprend à confronter nos points de vue, nos façons de faire différentes. Mes camarades de promotion voient rapidement qui je suis et inversement. C’est là aussi, dans cette famille pour un temps, que nous apprenons à vivre la patience, le pardon et la réconciliation.

Autres moments forts vécus pendant cette année en internat : quelques sorties d’évangélisation en soutien à des églises, sorties qui ont été très formatrices. Elles m’ont permis de réaliser toute l’importance du travail en équipe dans l’expression de nos différents dons au sein de l’église locale.

Fort de cette première année à l’Institut, j’ai poursuivi ma formation par 3 années mêlant stages pratiques et cours, le tout sous la supervision de 2 formateurs différents. C’est le module de cette formation en alternance qui m’a décidé à poursuivre mes études à l’Institut. J’aimais l’idée de pouvoir lier rapidement les cours avec la réalité du ministère dans l’église locale, c’était important pour moi. Et puis, apprendre aux côtés d’un formateur aguerri, c’est riche en découvertes et en partage d’expériences.

Aujourd’hui encore je retire beaucoup de fruits de ces années de formation biblique. Investir son temps dans l’étude de la Parole de Dieu est un atout précieux pour soi-même et pour mieux rentrer dans ces œuvres que le Seigneur a préparées d’avance. Cependant, équipé pour le ministère, on ne l’est jamais totalement. Certainement que ces années m’ont encouragées à aller plus loin encore dans la connaissance de Dieu et de sa Parole. Je me sens encore tellement ignorant et émerveillé à la fois quand je contemple le « mystère de Christ » (Éph 3.4).

Cerise sur le gâteau et providence de Dieu, j’ai été béni d’y rencontrer Muriel, celle qui est devenue ma femme, qui partage ma vie et me soutient depuis 20 ans dans le ministère pastoral… mais bon, cela, je ne peux pas vous l’assurer !

Ce que je recommanderais à quelqu’un qui envisage une telle formation

Dernièrement, un jeune homme de mon assemblée est parti pour entamer une formation en institut biblique. Naturellement, il s’est lui-même posé toutes sortes de questions avant de faire le pas et j’ai eu la joie de l’accompagner dans sa démarche. Parmi les recommandations que je lui ai faites, il y avait celles-ci :

?  Termine tes études, acquiers d’abord un métier si tu en as la possibilité.

Acquiers un peu d’expérience du monde du travail, cela te sera utile pour mieux comprendre la réalité de la vie chrétienne des membres de l’église.

Parle de ton projet de formation aux responsables de ton église locale. Sollicite leurs avis et leurs conseils. Ils te connaissent et peuvent alimenter tes réflexions.

Recherche le soutien dans la prière de ton église locale avant de partir faire une telle formation. Beaucoup d’instituts le demandent à l’inscription.

Laisse à Dieu la possibilité d’orienter la suite de ta première année comme il le veut. Si un ministère à plein temps semble se dessiner pour toi, pourquoi ne pas le considérer, même si ce n’était pas prévu au départ ?

Profite de ce temps à part avec le Seigneur. Permets-lui de modeler ta vie de disciple de Jésus.

 Pour conclure

Donner une ou plusieurs années de sa vie pour une formation biblique, c’est certainement un investissement que l’on ne regrette pas. C’est un atout précieux pour quiconque envisage de servir l’Église de Jésus-Christ. C’est une richesse personnelle que d’acquérir de la connaissance, de la pratique et de la sagesse.

Oui, aller faire un institut biblique est à considérer car c’est aussi :

– connaître des serviteurs de Dieu riches en expériences vécues et qui ont à cœur de les partager à ceux de la prochaine génération.

– faire de belles rencontres avec des étudiants qui partagent le même désir de mieux connaître Dieu pour mieux le servir et le glorifier dans leur vie.

 


Dans un de ses livres, Phyllis J. Le Peau raconte cette histoire : Quelques étudiants du séminaire devaient prêcher sur l’histoire du bon Samaritain. Quand l’heure de leur sermon arriva, chacun d’entre eux fut retardé délibérément en se rendant au cours. Tandis que les étudiants couraient sur le campus, ils rencontrèrent une personne qui prétendait avoir besoin d’aide. Aucun des étudiants ne s’arrêta pour l’aider. Le Peau conclut non sans ironie : « après tout, ils avaient un sermon important à délivrer ».

J’ai un jour entendu un homme de tradition chrétienne regretter : « La dernière fois que je suis allé à l’église, j’ai vu des gens qui s’y rendaient se battre pour une place de parking. Depuis je n’y vais plus. »

La nécessité de la mise en pratique (1.22-24)

22 Mettez en pratique la parole, et ne vous bornez pas à l’écouter en vous trompant vous-mêmes par de faux raisonnements.

Après voir encouragé ses lecteurs à recevoir « avec douceur la parole qui a été plantée en vous et qui peut sauver vos âmes » (1.21), Jacques donne deux commandements :

– 1. Mettre la Parole en pratique. L’expression originale est très forte : litt. « soyez des faiseurs de la parole. » Il ne s’agit pas seulement de connaître, de lire ou d’entendre, mais de vivre la Bible, de suivre ses instructions.

– 2. Ne pas se contenter d’écouter. Jacques s’élève contre ceux qui seraient en quelque sorte des « auditeurs libres » de la Bible. Ils lisent l’Écriture, se soumettent volontiers à la prédication et à l’enseignement de la Parole, mais sans en tirer des principes de vie. Un rapport si distant avec l’Écriture fait courir le risque de s’illusionner soi-même, de « marcher à côté de la plaque », comme on dit familièrement.

À quoi peut ressembler un « faux raisonnement » ? Voici quelques exemples :

– Comprendre que l’on est pécheur, savoir que Christ est mort pour les pécheurs, comprendre que l’on a besoin de Dieu — mais choisir de ne pas se repentir, de ne pas se donner à Christ.

– Comprendre que la Bible parle de la maîtrise de la colère — mais chaque fois que la moutarde monte au nez, plutôt que de demander l’aide de Dieu et de se repentir pour sa réaction, rejeter sur les autres la responsabilité de cette colère.

Jacques nous rappelle que Dieu ne cherche pas de purs experts en exégèse. Il attend des hommes qui aiment l’Écriture, qui l’étudient pour mieux vivre. Cette Épître n’est pas la seule à nous rappeler cela : le sermon sur la montagne (très proche de l’Épître de Jacques) se termine par la parabole célèbre des deux maisons : « C’est pourquoi, quiconque entend ces paroles que je dis et les met en pratique, sera semblable à un homme prudent qui a bâti sa maison sur le roc. La pluie est tombée, les torrents sont venus, les vents ont soufflé et se sont jetés contre cette maison : elle n’est point tombée, parce qu’elle était fondée sur le roc. Mais quiconque entend ces paroles que je dis, et ne les met pas en pratique, sera semblable à un homme insensé qui a bâti sa maison sur le sable. La pluie est tombée, les torrents sont venus, les vents ont soufflé et ont battu cette maison: elle est tombée, et sa ruine a été grande. » (Mat 7.24–27)

Dans une compétition équestre, un cheval avait fait un « refus d’obstacle » et son cavalier était tombé. C’est cela dont Jacques parle : voir dans l’Écriture où est placée la barre, et refuser de l’atteindre. Jésus a dit : « Vous êtes mes amis, si vous faites ce que je vous commande. » (Jean 15.46)

23-24 Car, si quelqu’un écoute la parole et ne la met pas en pratique, il est semblable à un homme qui regarde dans un miroir son visage naturel, et qui, après s’être regardé, s’en va, et oublie aussitôt comment il était.

À cette époque, les miroirs étaient des morceaux de cuivre ou de bronze polis. Les plus riches s’en procuraient en argent. Mais ils restaient très inférieurs aux miroirs actuels. Pour se faire une idée de son visage, il fallait regarder avec beaucoup d’attention (le verbe décrit une action intensive) et faire bouger le miroir pour changer l’éclairage et l’angle de réflexion.

Ce n’est pas très utile de se regarder dans un miroir, sauf pour se raser, se maquiller — des gestes qui accompagnent l’acte de se regarder. C’est le sens de l’analogie. Lire ou écouter la Parole sans la mettre en pratique ne sert à rien.

Le fruit de la mise en pratique (1.25)

Mais celui qui aura plongé les regards dans la loi parfaite, la loi de la liberté, et qui aura persévéré, n’étant pas un auditeur oublieux, mais se mettant à l’œuvre, celui-là sera heureux dans son activité.

Par opposition à celui qui ne fait que regarder, celui qui « s’immerge » dans l’Écriture pour découvrir comment mieux vivre sera heureux.

Il ne s’agit pas du bonheur tel que le monde le définit… Le bonheur dont il est question est un bonheur intérieur. Il est vrai que la vie chrétienne n’offre pas que des hauteurs et comprend aussi des vallées difficiles. Mais vivre bien, selon notre Créateur, conduit à un bien-être inégalable :

– le bonheur du pardon ;

– le bonheur d’investir sa vie pour le bien d’autrui ;

– le bonheur futur d’être dans la présence de Dieu.

Mais ce bonheur est associé à trois actions :

– « plonger » dans la Parole — c’est-à-dire s’immerger en elle, l’étudier ;

– « persévérer » dans la Parole — c’est-à-dire s’engager sur le long terme, comme pour une course de fond ;

– « pratiquer activement » la Parole — c’est-à-dire développer un zèle pour la mettre en pratique.

Ces exercices ressemblent à l’apprentissage du piano. Les débuts ne sont pas faciles, mais plus on travaille, plus on éprouve de la joie. Moins on travaille, plus on le regrette parce qu’on se fait moins plaisir !

Regardez les qualificatifs associés à la Parole de Dieu :

– « la loi parfaite », c’est-à-dire sans impureté, sans erreur ;

– « la loi de la liberté » : cela peut paraître étrange, mais la loi de Dieu libère l’homme ; elle donne à l’homme qui a sa confiance en Dieu un cadre qui lui correspond, parce qu’il a été créé dans cet objectif (cf. Ps 19.8-10).

La Parole c’est plus qu’un simple livre. Parce que Dieu en est l’auteur (2 Tim 3.16 ; 2 Pi 1.20-21), et parce qu’elle est utile : elle nous qualifie à réaliser « toute bonne œuvre » (2 Tim 3.17), elle juge nos sentiments et nos pensées (Héb 4.12), elle nous fait réussir dans nos projets (Jos 1.8), et accompagne notre bonheur (Ps 1.1).

Trois exemples de mise en pratique (1.26-27)

Si quelqu’un croit être religieux, sans tenir sa langue en bride, mais en trompant son cœur, la religion de cet homme est vaine. La religion pure et sans tache, devant Dieu notre Père, consiste à visiter les orphelins et les veuves dans leurs afflictions, et à se préserver des souillures du monde.

Jacques associe trois exemples à cette mise en pratique. On ne mesure pas la profondeur spirituelle d’un homme à ses actes religieux — mais à son comportement, à ses paroles et à ses actes.

Pour preuve, le terme « religieux » n’est utilisé qu’ici dans le N.T. Il décrit des hommes et des femmes faisant des gestes religieux (prière, jeûne, etc.). Le mot apparenté, « religion » ne se retrouve que 4 fois dans le N.T. (deux fois en Jacques, une 3e fois en Colossiens pour parler d’une pratique hérétique, et en Actes pour parler de la religion juive).

– 1. Un homme religieux, une femme religieuse, se repère dans sa manière de parler. Il ou elle sait maîtriser les élans de sa langue (Jacques développera ce point au ch. 3).

– 2. Un homme religieux, une femme religieuse, se repère dans le fait qu’il prend soin des faibles. Les veuves et les orphelins à cette époque étaient les plus démunis. Pas d’assurance vie, pas de programme social, très peu d’emplois disponibles pour eux… Dieu en avait un soin particulier : « Le père des orphelins, le défenseur des veuves, c’est Dieu dans sa demeure sainte. » (Ps 68.6) La loi avertissait : « Maudit soit celui qui porte atteinte au droit de l’étranger, de l’orphelin et de la veuve. » (Deut 27.19) Aujourd’hui ce devoir demeure pour toutes les personnes en situation de faiblesse. Ce n’est pas un travail institutionnel (réservé aux anciens, au pasteur, aux diacres, à des organisations spécialisées, etc.), c’est le travail des hommes et des femmes qui sont pieux, qui aiment Dieu. Les chrétiens forment un peuple qui se soucie des autres. « Visiter » va plus loin qu’une courte visite. C’est prendre un réel souci, apporter une aide concrète.

– 3. Un homme religieux, une femme religieuse, se préserve « des souillures du monde ». Parce que le chrétien a été lavé une fois pour toutes (Héb 10.10,14 ; 1 Cor 6.9-11, etc.), il est blanc. Et parce qu’il est blanc, il veille à ne pas se salir.

***

Tous les grands réveils spirituels enregistrés dans l’Écriture et dans l’histoire se sont accompagnés d’une prise de conscience de l’importance de l’Écriture associée à une attitude de repentance chaque fois que nécessaire. Hier comme aujourd’hui, la grâce de Dieu couvre nos défaillances et nous pousse au changement (cf. Tite 2.11-13). En cela nous pouvons compter sur l’intercession et l’assistance du Christ : il a parfaitement obéi à notre place et peut nous secourir dans nos faiblesses (cf. Héb 2.10 ; 5.9 ; 7.28 ; 12.1-3)

Écrit par


Comment transmettre à nos enfants le désir d’entrer en relation avec Dieu, le goût de la Bible et de la prière en famille ?

Lorsque nous lisons la Bible, nous pouvons trouver un certain nombre de conseils et de directives concernant l’éducation de nos enfants même s’il y a peu de textes spécifiques à la vie de famille, car tous s’appliquent à elle. Dans l’Ancien Testament, la famille est le lieu privilégié où se vit la foi. Dans le contexte du Nouveau Testament, la vie d’église se vit souvent dans la famille. L’Écriture nous explique des fonctions, elle nous décrit des principes et des attitudes, mais elle nous dit très peu de choses sur les formes ; celles-ci sont à définir dans le cadre de chaque époque et de chaque culture. Deux textes de l’Ancien Testament peuvent plus particulièrement nous aider à nous situer comme parents chrétiens.

Apprendre à mettre en pratique la Parole de Dieu

« Tu aimeras l’Éternel, ton Dieu, de tout ton cœur, de toute ton âme et de toute ta force. Et ces commandements, que je te donne aujourd’hui, seront dans ton cœur. Tu les inculqueras à tes enfants, et tu en parleras quand tu seras dans ta maison, quand tu iras en voyage, quand tu te coucheras et quand tu te lèveras. Tu les lieras comme un signe sur tes mains, et ils seront comme des fronteaux entre tes yeux. Tu les écriras sur les poteaux de ta maison et sur tes portes. » (Deut 6.5-9)

Ce texte rappelle la nécessaire cohérence que doit présenter notre vie. Il nous est certainement familier, mais il convient d’en souligner quelques aspects. Il se situe dans le contexte du rappel au chapitre 5 de la loi fondamentale du Décalogue ; nous sommes au cœur de la relation entre Dieu et son peuple, au centre de l’Alliance. La mise en pratique de la Parole de Dieu est la caractéristique de la sagesse pour l’Hébreu. Cette mise en pratique fait l’objet de diverses exhortations dans ce passage, avant qu’il ne soit fait référence à l’enseignement de l’enfant.

Nous sommes loin de la conception occidentale qui repose sur le volume des connaissances accumulées. Quant au verbe « inculquer », il signifie littéralement « aiguiser », comme on aiguise les dents d’un outil. Il ne peut s’agir que d’un enseignement dynamique et de l’apprentissage de l’application des directives du Seigneur afin d’avoir « du mordant » dans la vie. Dieu a un projet de bonheur pour son peuple et donc pour les familles qui le composent (Deut 5.33 ; 6.2-3,24). Il y a un lien direct entre la mise en pratique des commandements du Seigneur et sa bénédiction : être heureux et prolonger ses jours (cf. Éph 6.3). Il souligne l’importance du projet familial et de sa cohérence : à partir du moment où cette loi sera dans ton cœur (c’est à dire au plus profond de toi, touchant tes pensées, ta volonté, tes sentiments), tu en témoigneras à tes enfants en toutes circonstances — à la maison ou en voyage, quelle que soit l’heure de la journée. Mais surtout, tu en témoigneras : – par tes actes (« un signe sur tes mains », v. 8), – par tes attitudes, tes pensées et tes paroles (« des frontaux entre tes yeux », v. 8), en faisant de ton foyer un signe de l’autorité du Seigneur. Quiconque y rentrera pourra le voir en franchissant ta porte. Et toi tu seras le premier à te souvenir, quand tu entreras dans ta maison, que la foi en Dieu se vit d’abord à l’intérieur du foyer (« sur les poteaux et les portes de ta maison », v. 9). Même si, d’une façon plus large, nous pouvons dire que cette Parole est appelée à accompagner toutes nos allées et venues, toutes nos activités quotidiennes, c’est la transmission de cette mise en pratique de la parole de Dieu qui apparaît donc comme le cœur de l’éducation à donner à nos enfants.

Pour cela, donner du goût

Le deuxième texte est Proverbes 22.6 qui invite à donner le goût. Une traduction proche de l’original pourrait être : « Instruis l’enfant selon la voie qu’il doit suivre ; et quand les poils de la barbe lui pousseront, il ne s’en détournera pas. »

Plusieurs mots ou expressions de ce verset méritent une attention particulière et sont propres à inspirer notre action :

1. « Instruis l’enfant » : Le verbe « instruire » a la même racine que le mot « palais » qui désigne la partie supérieure de la bouche. Il est très utile de comprendre pourquoi. En Israël, quand une femme venait d’accoucher, la sage-femme apprenait au bébé à téter. Pour cela, elle enduisait le palais de l’enfant d’un peu de jus de figue. L’enfant, intrigué par ce goût étrange, commençait alors un mouvement répété de succion avec sa bouche. Il suffisait de lui présenter le sein pour qu’il commence à téter. Instruire, c’est donner le goût ! C’est la cohérence entre notre exemple et nos paroles qui donnera ce goût ; c’est l’enseignement de la Parole de Dieu expliquée et vécue ; c’est l’amour porteur d’espérance… Comment déclencher chez nos enfants le goût de vivre en étant attaché à Dieu ?

Le bon enseignant est celui qui sait déclencher chez ses élèves le goût d’apprendre. Voici son profil : il aime son métier ; il aime ses élèves ; il aime la matière qu’il enseigne. Partant de là, il va chercher à adapter sa pédagogie à ses élèves. Il va la rendre aussi active, aussi accessible, aussi attractive que possible. Ainsi ses élèves auront le goût d’écouter, d’apprendre, de comprendre, et ils auront envie de participer à ses cours. Pour atteindre cet objectif, l’enseignant va investir beaucoup de sa personne. C’est exactement à cela que nous sommes appelés en tant que parents, ou en tant qu’enseignants de la Parole de Dieu à l’école du dimanche, dans le groupe de jeunes ou à l’église : donner le goût de marcher avec Dieu, de chercher son conseil, de s’engager pour lui. Cela se communique d’abord par notre vécu. Il faut donner de notre personne : – Aimer notre « métier », être heureux d’être chrétien. – Aimer les enfants que Dieu nous donne. – Avoir de l’enthousiasme pour communiquer l’amour de Dieu, car c’est cela, notre « matière » à enseigner.

2. « selon la voie qu’il doit suivre » : En effet, pour chaque enfant, il y a un chemin différent. Selon son tempérament, ses dons, ses talents, ses penchants, au travers de notre action, Dieu va lancer ses flèches. C’est aussi la perspective d’un projet de vie porté par le Seigneur qui donnera son goût, sa saveur à l’existence. Quelle grâce de pouvoir contribuer à conduire un enfant dans la découverte de ce chemin-là ! Il faut passer du temps avec les enfants pour découvrir leur personnalité et leurs dons. Tant d’enfants ne se croient bons à rien! Chacun est différent. L’un est doué intellectuellement, l’autre est sportif, celui-ci est persévérant (on le dit têtu), celui-là est doux… Que de blessures quand on entre avec eux dans le jeu des comparaisons ou qu’on applique une discipline identique à des personnalités différentes ! Une vraie connaissance de l’enfant ne s’acquiert que progressivement, dans la compréhension de ce que sont les phases de son développement physique, mais surtout affectif et intellectuel. C’est en observant l’enfant que l’on apprend à le connaître (Prov 21.11,12). Ainsi, nous achevons ce que Dieu a commencé en lui (Ps 139.13-16). Nous pouvons corriger ses mauvais penchants (Ps 58.4) et nous pouvons prier pour lui. Le dialogue avec nos enfants doit être une priorité majeure dans notre emploi du temps. On constate souvent chez les pères un manque d’intérêt ou de savoir-faire. Il est important d’en parler en couple.

3. « et quand les poils de la barbe lui pousseront, il ne s’en détournera pas » : Non, ce n’est pas seulement quand il sera vieux qu’il se souviendra de l’enseignement reçu, mais au moment de la puberté. C’est au temps de l’adolescence, quand l’enfant structure sa vie et que peu à peu se met en place sa personnalité d’adulte, qu’il peut choisir de continuer sa vie en pleine harmonie avec Dieu. Nous semons pour l’adolescence, pour ce temps capital de restructuration de la pensée et du système de valeurs. Quelle grâce d’avoir enseigné l’enfant dès ses premières années ! Au risque de se répéter, il faut souligner le rôle du foyer, et des parents tout particulièrement. Il est essentiel que l’éducation qu’ils donnent à leurs enfants se fonde sur la meilleure cohérence possible entre leurs paroles et leurs actes. Les aspects formels de l’éducation chrétienne (culte de famille et activités au sein de l’église) doivent trouver leur application dans la vie de tous les jours. Il y a souvent chez les enfants de famille chrétienne une saturation du savoir, et parfois une irritation à devoir agir d’une certaine façon. C’est la valeur de l’exemple de leurs parents qui leur donnera le goût de devenir chrétien.

Un exemple, le culte en famille

Un point important concerne le culte en famille sur lequel il nous a semblé bon de revenir. Rappelons que le culte de famille ne doit pas avoir pour seul objectif d’habituer les enfants à un exercice de piété, mais bien de les entraîner à la découverte du Seigneur, de la place qu’il a dans la vie de leurs parents, et enfin de leur apprendre ce qu’est la vie avec Dieu. C’est également là qu’ils discerneront, dans le partage familial, ce qui devrait changer dans leur vie.

Certains donnent au culte de famille une forme compassée et particulièrement sérieuse. L’expression « culte de famille » y contribue ; si elle rebute les enfants et constitue un frein à la manifestation de la joie et de la louange, autant en changer l’appellation. Évitons donc ce qui est ennuyeux pour les enfants, la monotonie, la routine, et faisons preuve de créativité. Il existe maintenant des aides à la pratique du culte de famille qui ont une approche intéressante et proposent à la fois des thèmes variés et une pédagogie active. Il est particulièrement recommandé de faire des enfants des participants actifs, en leur demandant de proposer des chants et des thèmes qu’ils prépareront avec ou sans votre aide, en fonction de leur âge.

L’actualité de la famille et les situations vécues à l’école serviront utilement à intégrer l’éthique chrétienne dans les circonstances de l’existence. Certains parents trouvent utile d’avoir un thème mensuel articulé sur divers sujets : la doctrine chrétienne, les fruits de l’Esprit, la mission, des livres de la Bible, etc. Alterner les sujets bibliques avec des récits missionnaires, de fiction ou des allégories fera rebondir le rythme des rencontres et renouvellera l’intérêt.

Il est bon que ce soit le père qui anime le culte de famille, mais c’est une activité qui doit être très largement partagée avec la maman. Cette responsabilité peut aussi être déléguée ponctuellement à l’un des enfants. Il est important d’être soi-même, honnête et de partager certains problèmes.

Le culte de famille offre la possibilité de donner le goût de la Parole de Dieu mais aussi de la prière. Il permet l’apprentissage de l’intercession. Les enfants peuvent établir leur propre liste d’amis, de membres de l’église, de missionnaires ou de prisonniers (à cause de leur foi) qui ont besoin du secours de la prière. Les parents devront veiller à faire des prières relativement brèves pour maintenir une écoute attentive des enfants. La prière en famille devrait être comme un bouquet que l’on offre à Dieu, où chacun s’exprime librement et courtement. Il est utile de choisir une heure, toujours la même.

Outre la monotonie et une mauvaise animation, les difficultés du culte de famille viennent souvent des différences d’âge des enfants et de leurs rythmes d’activité différents. Il est parfois malaisé de trouver des thèmes qui captivent autant les petits et les grands. La télévision et le travail scolaire sont aussi les ennemis du culte de famille.

Une erreur fréquente est d’en faire un temps marqué par une ambiance d’église mal adaptée au contexte familial. Les parents rigides dans leur pratique de la discipline risquent de renforcer chez leurs enfants une attitude de rejet qui conduira à l’échec. Un culte de famille quotidien est certainement une bonne chose, aussi longtemps qu’il est possible et compatible avec les activités des membres du foyer. Quand les enfants grandissent, il faut souvent davantage de souplesse. Comme le reste du vécu familial, le culte de famille est un sujet à aborder régulièrement lors des réunions de famille. Le culte de famille, quand il est pleinement expression de foi, de joie et de communion, marque les enfants (et les parents) d’une empreinte durable. Il constitue véritablement une bénédiction qui sera le plus souvent transmise à la génération suivante.

 

 


Le Psaume 119 est une hymne magnifique qui exalte la grandeur de la Parole de Dieu. Dieu a permis que le plus long chapitre de la Bible soit celui qui encourage le plus à lire cette Parole, à la méditer et à la mettre en pratique.

Dans ce Psaume 119, comme dans d’autres Psaumes et plus encore dans les Proverbes, il n’est pas toujours aisé de saisir le lien entre les versets successifs. Cet apparent désordre fait écho à la diversité de notre vie, où nous passons d’une circonstance à une autre, d’une occupation à une autre, d’un état d’âme à un autre — et, dans chaque situation, la Parole est là, pertinente, guide sûr auquel nous pouvons nous référer.

Rappelons que le Psaume 119 constitue un acrostiche élaboré, composé de 22 strophes de 8 versets chacune, chaque verset d’une même strophe commençant par la même lettre de l’alphabet hébraïque, dans l’ordre de cet alphabet. Cet agencement suggère que la Parole de Dieu est complète et couvre tous les domaines (de A à Z, dirions-nous aujourd’hui).

Dans cet article, nous allons chercher à glaner quelques enseignements sur l’importance de la Parole dans nos vies, au fil de trois des 22 strophes de ce Psaume1.

89 A toujours, ô Éternel ! Ta parole subsiste dans les cieux.

90 De génération en génération ta fidélité subsiste ; Tu as fondé la terre, et elle demeure ferme.

91 C’est d’après tes lois que tout subsiste aujourd’hui, Car toutes choses te sont assujetties.

92 Si ta loi n’avait fait mes délices, J’aurais alors péri dans ma misère.

93 Je n’oublierai jamais tes ordonnances, Car c’est par elles que tu me rends la vie.

94 Je suis à toi : sauve-moi ! Car je recherche tes ordonnances.

95 Des méchants m’attendent pour me faire périr ; Je suis attentif à tes préceptes.

96 Je vois des bornes à tout ce qui est parfait : Tes commandements n’ont point de limite.

Les trois premiers versets magnifient la grandeur et l’éternité de la Parole : elle est à la fois établie dans les cieux (v. 89) et agissante sur la terre (v. 90)2.

C’est grâce à elle que les lois de la création restent valables. Le N.T. s’en fait l’écho quand l’auteur de l’Épître aux Hébreux affirme que la création, surgie à la parole du Créateur, est maintenue par sa même « parole puissante » (Héb 1.3). Et c’est le Fils, Parole vivante, artisan de la création, qui continue d’agir pour maintenir la cohérence de notre univers : sans lui et sa parole providentielle, il serait impossible de parler de “lois de la physique” !

« À toujours », dit le psalmiste : la fermeté éternelle de cette Parole a été attestée par Jésus lui-même : « Le ciel et la terre passeront, mais mes paroles ne passeront point. » (Mat 24.35) Nous pouvons donc avoir une pleine confiance dans cette Parole, objective et permanente. Dieu s’est engagé par écrit — il ne reniera pas et ne se contredira jamais.

Cette Parole créatrice est aussi rédemptrice (v. 92). Comment échapper à notre « misère » fondamentale d’êtres marqués indélébilement par le péché, sinon en accordant foi à la Parole de Dieu (Rom 10.17) ? Dans sa grande diversité, elle possède la puissance de communiquer la vie (v. 93) et l’Esprit de Dieu a pu utiliser les textes les plus variés de l’Écriture comme moyen de salut.

Désormais j’appartiens à Dieu (v. 94). Pour autant, le salut initial reçu se prolonge par un salut au quotidien ; d’où l’exclamation : « Sauve-moi ! » Non parce que je pourrais perdre mon salut éternel, mais parce que j’ai chaque jour à mettre en œuvre ce salut, en particulier pour être délivré des ennemis du chrétien, les « méchants » (v. 95) — tout ce qui s’oppose à ma croissance chrétienne (cf. Éph 6.10-18). Et le moyen reste le même : rechercher les ordonnances, être attentifs aux préceptes de Dieu. J’ai donc un besoin vital de trouver dans la Parole le moyen d’être délivré et protégé, avant tout dans mes pensées.

Le v. 96 conclut cette strophe par une description magnifique mais paradoxale de la Parole de Dieu :

– D’un côté, la Parole, « parfaite », sans erreur, sans faute dans chacun de ses détails et toute ensemble, est « bornée » : elle contient un nombre fini (quoiqu’imposant !) de mots et des avertissements très sévères sont donnés à celui qui voudrait dépasser ces bornes en y rajoutant (cf. Apoc 22.18 ; Marc 1.1-13). Aussi ne nous laissons jamais imposer comme « parole de Dieu » ce qui ne s’y trouve pas.

– D’un autre côté, les commandements divins « n’ont pas de limite » : ces mots finis dans leur nombre sont susceptibles d’une infinité d’application dans leur faculté de répondre aux besoins de chaque croyant, au milieu de la diversité de ses circonstances propres. Laissons la Parole, toujours pertinente et vivante, nous parler, ici et maintenant ; laissons-nous saisir par tel verset, peut-être lu et relu déjà maintes fois, mais qui va prendre un relief nouveau.

97 Combien j’aime ta loi ! Elle est tout le jour l’objet de ma méditation.

98 Tes commandements me rendent plus sage que mes ennemis, Car je les ai toujours avec moi.

99 Je suis plus instruit que tous mes maîtres, Car tes préceptes sont l’objet de ma méditation.

100 J’ai plus d’intelligence que les vieillards, Car j’observe tes ordonnances.

101 Je retiens mon pied loin de tout mauvais chemin, Afin de garder ta parole.

102 Je ne m’écarte pas de tes lois, Car c’est toi qui m’enseignes.

103 Que tes paroles sont douces à mon palais, Plus que le miel à ma bouche !

104 Par tes ordonnances je deviens intelligent, Aussi je hais toute voie de mensonge.

Cette strophe commence par un élan d’amour du psalmiste pour la loi de Dieu. Cette expression résonne de façon étrange pour la plupart d’entre nous pour qui la « loi » est plus synonyme de contrainte, de texte aride, d’interdits, que de délices littéraires. Il est peu probable que les textes du Lévitique ou du Deutéronome fassent partie des lectures bibliques qui nous transportent le plus… Mais « c’est le langage d’un homme ravi par une beauté morale » car les lois de l’Éternel sont « les directions réelles, valides ou irréfutables ; elles sont fondées sur l’essence même des choses et sur la nature de Dieu »3.

Le paradoxe de la liberté chrétienne est d’aimer ce qui nous contraint car la loi de Dieu me libère du péché pour être soumis volontairement au Seigneur (Jac 1.22 ; Rom 6.17 ; 8.1-4). Ouvrir la Bible n’est alors plus un pensum mais une immense joie, un délice meilleur encore que le miel (v. 103 ; cf. Jér 15.16).

Cet amour pour la Parole n’est pas de la bibliolâtrie, mais l’expression de notre amour pour son Auteur. Comment prétendre aimer le Seigneur sans jamais ouvrir la lettre d’amour qu’il nous a envoyée ? Cette lettre nous permettra de le connaître, et de le connaître vraiment, non pas selon notre imagination ; car notre seule source de connaissance objective est l’Écriture sainte.

Cet amour du psalmiste se traduit par une méditation continuelle (v. 97b). Comme pour l’exhortation « priez sans cesse », nous avons de la peine à comprendre ce que les auteurs bibliques veulent dire par ces expressions qui nous paraissent excessives. Comment concilier nos occupations légitimes à une méditation ou une prière ininterrompues ? Cependant, même les plus occupés d’entre nous ont des « temps morts », des moments creux (trajets, attentes dans une file, etc.), qui peuvent être mis à profit pour « ruminer » un texte lu le matin… Méditer est différent d’étudier. Méditer, c’est laisser la Parole pénétrer profondément dans notre être intérieur ; c’est appliquer les mots du texte sacré à notre vie ; c’est laisser la Parole demeurer en nous dans toute sa richesse (Col 3.16) pour modeler nos actions, nos paroles, nos sentiments.

Les conséquences développées dans les v. 98 à 100 surprennent : le psalmiste semble avoir « pris la grosse tête » et être plus enflé qu’édifié dans l’humilité (1 Cor 8.1) ! Il s’agit en fait d’un raisonnement a fortiori : posséder la Parole donne un « plus » que même les gens les plus instruits (les « maîtres », v. 99), même les gens les plus expérimentés (les « vieillards », v. 100), même les gens les plus opposés (les « ennemis », v. 98) n’ont pas. Nous pouvons ainsi à juste titre nous glorifier dans cette Parole de Dieu qui nous a été révélée et, par elle, poser la seule base valable d’une vraie connaissance (cf. Prov 1.7 ; 9.10).

Les v. 101 et 104 se complètent : d’un côté, la Parole nous aide à ne pas nous égarer (v. 104) ; d’un autre côté, c’est celui qui s’éloigne du mal qui peut garder la Parole (v. 101), car la connaissance est « selon la piété » (Tite 1.2). La causalité va dans les deux sens et engendre un cercle vertueux.

L’enseignement dispensé par la Parole est directement attribué à Dieu (v. 102) : quelle motivation pour la garder « dans la foi et dans l’amour » (2 Tim 1.13) ! L’autorité de la Parole vient de son origine, de celui qui parle par elle.

105 Ta parole est une lampe à mes pieds, Et une lumière sur mon sentier.

106 Je jure, et je le tiendrai, D’observer les lois de ta justice.

107 Je suis bien humilié : Éternel, rends-moi la vie selon ta parole !

108 Agrée, ô Éternel ! les sentiments que ma bouche exprime, Et enseigne-moi tes lois !

109 Ma vie est continuellement exposée, Et je n’oublie point ta loi.

110 Des méchants me tendent des pièges, Et je ne m’égare pas loin de tes ordonnances.

111 Tes préceptes sont pour toujours mon héritage, Car ils sont la joie de mon cœur.

112 J’incline mon cœur à pratiquer tes statuts, Toujours, jusqu’à la fin.

Le v. 105 est peut-être le plus connu (et le plus chanté !) des 176 versets du Psaume. La Parole est là, tant pour nous donner les indications très concrètes pour le détail immédiat de la journée (« à mes pieds »), que pour nous tracer des perspectives de vie à long terme (« sur mon sentier »). Elle est là tant pour les jours d’ombre (la « lampe ») que pour illuminer toute notre existence (Jean 8.12).

Les v. 106 et 112 marquent de forts engagements du psalmiste. Il a pris la ferme résolution dans son « cœur » de consacrer du temps à étudier la Parole et, surtout, à la mettre en pratique, dans la durée, avec constance. Voulons-nous les faire nôtres ? Décider de mettre à part du temps chaque jour pour la Bible, en dépit de toutes les occupations et les “pièges à temps” de notre vie moderne ?

Le v. 108 rapproche les « sentiments » des « lois ». Nos sentiments sont à passer au crible de la Parole de Dieu dans toute sa rigueur pour être approuvés par Dieu. Le croyant ne se laisse pas envahir par ses sentiments mais laisse l’Écriture les canaliser, car elle a la capacité de pénétrer entre âme et esprit (Héb 4.12).

Les deux derniers versets ouvrent une perspective vers l’avenir, marquée par la répétition de « toujours ». L’ « héritage » que Dieu nous a préparé est déjà là, présent dans le texte inspiré, qui en est pour ainsi dire l’acompte (v. 111). La Bible ranime en nous l’espérance d’un futur éternel. En dépit des oppositions (v. 110) et des circonstances de vie difficiles (v. 107, 109), elle suscite en nous une joie actuelle et qui un jour sera parfaite. Et pour fortifier cette attente, rien de tel que de mettre en pratique la Parole entendue (v. 112).

* * *

Dans ces 24 versets, nous avons vu :

– l’origine de la Parole : elle vient de Dieu ; par son moyen, nous sommes mis en relation avec lui, comme l’indiquent tous les « tu » de ces textes ;

– la nature de la Parole, à la fois finie et infinie ;

– les effets de la Parole, à la fois objectifs (la vie, la délivrance, la direction) et subjectifs (la joie, l’amour, la louange) ;

– l’exigence de la Parole, qui doit être méditée et mise en pratique.

L’expérience décrite par le Psaume 119 est avant tout personnelle (le psalmiste parle à la première personne du singulier). Si utiles que soient les aides apportées par la communion fraternelle autour de la Bible ou par l’enseignement dans l’église, le Seigneur nous demande un engagement personnel pour sa Parole, pour l’aimer et la vivre.

  1. Le choix de ces 3 strophes parmi les 22 est un peu arbitraire. Toutefois, elles débutent la 2de moitié du Psaume et sont particulièrement riches d’expressions diverses sur la Parole. De plus, plutôt qu’une étude thématique de ce Psaume, plus fréquente, il est utile de se laisser enseigner aussi par les enchaînements des versets.
  2. Le v. 90 est un des 7 versets parmi les 176 du Psaume qui ne mentionne pas explicitement la Parole sous une forme ou une autre (cf. v. 3,37,84,121,122,132).
  3. C.S. Lewis, Réflexions sur les Psaumes, p. 89.

Écrit par


La Bible est un livre qui est étudié depuis des siècles, et il en existe aujourd’hui toutes sortes de lectures : par exemple, la lecture fondamentaliste soutient que le texte inspiré doit être interprété littéralement ; les lectures libérales rejettent la pleine inspiration de la Bible ; les lectures idéologiques cherchent à légitimer des luttes sociales ou politiques, etc. Si un seul et même texte peut aboutir à des lectures si diverses, c’est parce que ces approches mettent en œuvre des méthodes d’interprétation qui divergent entre elles, et non parce que le texte n’aurait pas un sens bien défini1. C’est pourquoi, il nous paraît essentiel de nous interroger sur le cadre interprétatif qui découle du statut de « Parole de Dieu » de la Bible. Auparavant, nous ferons deux remarques générales : l’une concernant la notion de lecture non littérale, l’autre relative à la notion d’approche neutre d’un texte.

Deux questions préalables

La lecture non littérale : une porte ouverte à toutes les interprétations ?

Face au danger du subjectivisme, la tentation peut être grande de penser que la seule lecture acceptable de la Bible est la lecture « littérale »2 . Or il est clair que les paroles de Jésus lui-même ne doivent pas toujours être comprises de cette façon : ainsi en est-il lorsqu’il dit à Nicodème qu’il lui faut naître de nouveau (Jean 3.3), ou lorsqu’il propose à la femme samaritaine de lui donner à boire (Jean 4.10), ou encore lorsqu’il encourage à manger sa chair et boire son sang (Jean 6.53). En fait, « pour que Dieu se fasse comprendre, il n’est pas nécessaire qu’il parle un langage littéral au sens restreint, mais qu’il parle le langage ordinaire. Or le langage ordinaire n’est pas littéral […] Le langage biblique doit donc être interprété selon l’usage et les conventions de langage en cours à l’époque de rédaction de chaque texte, et non pas selon la préconception illusoire qu’est le littéralisme.3 » Une lecture non « littérale » ne conduit donc pas à un subjectivisme total, puisque le processus d’interprétation se fait en tenant compte des conventions linguistiques, littéraires, culturelles, etc. qui existaient lorsque le texte a été écrit. Bien sûr, si aucun élément n’oriente vers l’abandon du sens « littéral », c’est ce sens qu’il faut retenir. Cela semble d’ailleurs ressortir de ce que dit Paul aux Corinthiens, lorsqu’il affirme ne pas leur écrire autre chose que ce qu’ils lisent et comprennent (2 Cor 1.13). Avec une telle ligne de conduite, nous nous garderons du subjectivisme total qui permet de faire dire au texte ce qu’on veut bien lui faire dire, ainsi que du présupposé littéraliste, qui en ne tenant pas compte de certaines données culturelles et linguistiques, peut conduire à des lectures erronées.

L’interprétation d’un texte peut-elle être neutre ?

Bien que l’interprétation d’un texte dépende de conventions et de facteurs bien précis, elle dépend aussi de nos présupposés4. Par exemple, celui qui nie l’existence des miracles considérera que les récits bibliques qui parlent de miracles sont des mythes ou des légendes. Comment dès lors est-il possible d’adopter les présupposés bibliques, si toute interprétation est fonction des présupposés de l’interprète ? Plusieurs éléments de réponse peuvent être donnés.

Tout d’abord, il faut relever qu’aucun lecteur ne peut échapper totalement au sens du message divin. En effet, d’un côté, personne n’échappe complètement à la connaissance de Dieu et de la vérité, ne serait-ce que par le biais de la création (Rom 1.19-21) et de la conscience (Rom 2.15) ; d’un autre côté, l’Écriture permet de rendre sage le simple (Ps 19.7) et de lui donner du discernement (Ps 119.130).

Ensuite, s’il est vrai que l’interprète est influencé par ses présupposés dans sa compréhension du texte, ces derniers ne l’empêchent pas de percevoir que d’autres lectures existent, mais ils lui font simplement écarter celles qui sont en conflit avec eux.

Enfin, l’Esprit peut conduire l’interprète à accepter une nouvelle compréhension du texte étudié, l’amenant à modifier certaines de ses croyances et sa compréhension d’autres textes bibliques. Il existe ainsi une spirale vertueuse, qui, à force d’aller-retour entre le texte et sa compréhension corrigée, amène progressivement le lecteur à une compréhension plus juste des Écritures.

Il est vrai que toute interprétation présuppose certaines convictions doctrinales, comme l’inspiration de la Bible par exemple. Cela induit une interprétation des Écritures, de laquelle est ensuite tirée une théologie, qui à son tour va influer sur l’interprétation des textes. Mais comme le relève J. Packer, « ce n’est pas un cercle vicieux, du point de vue logique, car ce n’est pas un système qui permet de présupposer ce qui serait à prouver, mais une suite d’approximations successives, méthode fondamentale à toutes les sciences.5 »

C’est donc en partant de la conviction que la Bible est pleinement Parole de Dieu et parole humaine6, que nous allons maintenant réfléchir au cadre interprétatif que cela induit.

La Bible est Parole de Dieu : implications herméneutiques

Un texte divin

• Un texte accessible

En tant que Créateur, Dieu connaît bien mieux que nous nos limites, aussi pouvons-nous avoir la certitude que, s’il a décidé de se révéler à nous par le biais de la Bible, alors il s’agit d’un texte qui nous est accessible.

En même temps, la Bible contient des textes difficiles à comprendre (2 Pi 3.16), ainsi que des enseignements qui correspondent aux différents stades de la maturité chrétienne (Héb 5.12), ce qui nous incite à chercher la pensée de Dieu en progressant dans notre compréhension des Écritures.

• Un texte vrai, sans erreur, sans contradiction

Dieu ne ment pas (Nom 23.19), aussi nous pouvons avoir la certitude que ce qu’il dit est la vérité. Comme il est également omniscient (Héb 4.13) et immuable dans son être (Jac 1.17) et ses desseins (Ps 33.11), rien de ce qu’il affirme n’est susceptible d’être à corriger à cause du fait qu’il ne connaîtrait pas telle ou telle chose du passé, du présent ou de l’avenir, ou du fait qu’il aurait changé d’avis. Par conséquent, tout ce qu’il y a dans la Bible est vrai, et ne peut ni se contredire, ni contenir d’erreur.

Tout texte biblique doit donc être interprété à la lumière du reste de l’Écriture, en accord avec le reste de l’Écriture. Il s’agit d’une règle fondamentale de l’herméneutique chrétienne : l’Écriture interprète l’Écriture. Jésus lui-même a appliqué ce principe en répondant au diable, « il est aussi écrit », lorsque ce dernier cherchait à le faire chuter en lui citant un verset de l’Ancien Testament (Mat 4.6-7).

• Un texte qui fait autorité

Dieu est le Seigneur des seigneurs (Deut 10.17), c’est-à-dire celui qui a autorité sur toutes choses. Puisque la Bible est sa Parole, tout ce qu’elle dit doit avoir pleine autorité pour nous : c’est notre pensée qui doit s’incliner devant certains enseignements qui paraissent paradoxaux (existence du mal et parfaite bonté de Dieu ; responsabilité humaine et souveraineté divine), et non la Bible qui doit être « revue et corrigée » pour répondre à nos critères de logique.

Dans le même ordre d’idée, nous ne pouvons souscrire aux approches herméneutiques qui affirment par exemple, qu’il faut faire le tri dans la Bible entre ce qui est parole d’homme et ce qui est véritablement Parole de Dieu, et ce, quel que soit le critère de tri retenu (cohérence scientifique, distinction entre faits historiques et ce qui est du domaine de la foi, etc.). En effet, en agissant de la sorte ce n’est plus le texte biblique qui a autorité sur l’interprète, mais c’est ce dernier qui prend autorité sur le texte biblique, c’est-à-dire, finalement, sur Dieu lui-même !

• Un texte qui délimite ce que nous pouvons connaître de Dieu

Dieu n’appartient pas au domaine du créé, puisqu’il est le Créateur de toutes choses et qu’il est Esprit (Jean 4.24). Nous ne pouvons donc le connaître que dans la mesure où il se révèle à nous, et nous ne pouvons connaître de lui que ce qu’il a décidé de nous révéler (Deut 29.29). Gardons-nous donc de chercher à aller plus loin que ce que Dieu a décidé de nous révéler, en nous égarant dans des spéculations, notamment lorsque cela concerne sa personne.

• Un texte qui peut nous dépasser

Les pensées de Dieu nous dépassent (És 55.8-9), non seulement parce qu’il est Dieu, mais également parce que notre perception des choses est faussée par le péché (Éph 4.17-18), et que notre connaissance est limitée (1 Cor 13.12). Aussi, c’est avec une grande humilité qu’il nous faut aborder le texte biblique, en sachant accepter certaines affirmations claires que nous n’arrivons pas à « mettre en équation ».

• Un texte dont le sens peut dépasser la pensée de son auteur humain

Les auteurs humains rédigeaient leurs écrits en étant inspirés par Dieu, aussi est-il tout à fait possible que le texte biblique puisse avoir un sens qui dépasse celui qu’ils avaient en vue lors de sa rédaction. L’Écriture elle-même en témoigne, lorsqu’elle dit que les auteurs de l’Ancien Testament se sont interrogés sur les temps et les circonstances auxquelles se rapportaient certaines choses qu’ils écrivaient sous l’inspiration de l’Esprit (1 Pi 1.10-12).

• Un texte progressif et cohérent

Même si le message biblique forme un tout cohérent, la révélation se complète progressivement de la Genèse à l’Apocalypse : la notion de révélation progressive est donc un point à garder à l’esprit lors de l’interprétation du texte biblique.

• Un texte qui peut être actualisé

Le fait que Dieu ne change pas (Jac 1.17) donne le fondement à la pratique herméneutique qui consiste à actualiser le texte dans le cadre de notre situation présente. En effet, puisque Dieu demeure le même dans son être, cela signifie que ce qu’il exprime de sa volonté et de ses attentes dans la Bible reste valable pour nous aujourd’hui, dans la mesure bien sûr, où nous prenons en compte le contexte7 du texte dans l’actualisation que nous en faisons.

L’interprète : soumis à Dieu et ouvert à l’œuvre de l’Esprit

Lire la Bible avec un cœur endurci en obscurcit le sens, et ce n’est que lorsqu’on se tourne vers le Seigneur qu’on la comprend mieux (2 Cor 3.14-16). Cela n’est pas surprenant, car celui qui est né de Dieu a son Esprit qui habite en lui (Rom 8.9), et qui œuvre en lui pour transformer son intelligence afin qu’il soit à même de comprendre la volonté de Dieu (Rom 12.2) et de s’y conformer.

Affirmer qu’il faut se tourner vers Dieu pour comprendre sa Parole ne signifie pas qu’elle serait intellectuellement incompréhensible pour le non-croyant. Ce dernier peut avoir une certaine compréhension du message biblique, mais, s’il ne veut pas accepter ce qu’il a compris et s’endurcit, alors cela le conduit à des pensées obscurcies (Éph 4.18). Il est donc essentiel de se tourner vers Dieu avec prière, pour lui demander de nous aider à comprendre sa Parole (cf. Éph 1.16-18 ; Col 1.9), et cela d’autant plus qu’en étant l’auteur du texte, c’est lui le plus à même de nous expliquer ce qu’il a voulu nous dire !

Un tel état d’esprit de la part de l’interprète présuppose qu’il fasse preuve d’humilité et de droiture lorsqu’il aborde le texte biblique (cf. Mat 11.25), mais aussi qu’il soit prêt à se laisser remettre en question, puisqu’un des rôles des Écritures est de « redresser » (2 Tim 3.16, Semeur).

La Bible écrite par des hommes : implications herméneutiques

Les outils de l’étude

La notion biblique d’inspiration renvoie à une action surnaturelle de Dieu qui s’accomplit au travers de la culture, des facultés, du travail et de la personnalité des auteurs. C’est pourquoi les outils utilisés pour interpréter des textes non inspirés vont pouvoir être utilisés pour l’interprétation d’un texte biblique. Il est toutefois essentiel de garder un point fondamental à l’esprit, savoir que leur utilisation ne pourra se faire qu’à l’intérieur du cadre spécifique délimité par l’origine divine de la Bible.

La connaissance de l’auteur, du but de son écrit, de ses destinataires ainsi que du contexte (social, religieux, politique, historique, etc.) dans lequel il l’a rédigé, sont autant d’éléments qui peuvent apporter un éclairage précieux sur la compréhension de son écrit.

La langue et la culture

Quant au texte, il a été rédigé dans une culture et une langue données, d’où l’importance de prendre en compte les contextes linguistique, situationnel et littéraire pour bien le comprendre.

Par exemple, en hébreu, la forme des verbes ne renvoie pas d’abord au temps de l’action (passé, présent, futur), mais à l’état de l’action : le parfait (ou accompli) renvoie à une action accomplie alors que l’imparfait (ou inaccompli) renvoie à une action qui n’est pas encore terminée. Ainsi, pour l’hébreu ancien « le parfait peut fort bien se rapporter à l’avenir — en se plaçant du point de vue d’un observateur futur (passé prophétique) — et voir une action passée incomplète en se situant à un moment donné du passé. C’est toujours le contexte, et non le verbe, qui détermine le temps d’une action. “Un enfant nous est né” peut se rapporter au passé, au présent ou au futur.8 »

Ou encore, la culture hébraïque peut exprimer le comparatif par le biais d’une opposition : lorsque Jésus dit qu’il faut haïr sa propre famille pour pouvoir être son disciple (Luc 14.26), il est clair que celui qui appelle à aimer non seulement ses amis, mais aussi ses ennemis (Luc 6.32-35), ne peut ici exhorter à la haine envers les siens. Jésus dit simplement que celui qui veut être son disciple doit être prêt à le faire passer avant sa propre famille. Cette lecture est confirmée par le passage parallèle de Matthieu où Jésus dit que celui qui aime les siens plus que lui n’est pas digne de lui (Mat 10.37).

Nous terminerons par un dernier exemple : lorsque Jésus annonce qu’il restera trois jours et trois nuits dans le tombeau avant de ressusciter (Mat 12.40), il ne voulait pas dire qu’il allait y rester trois fois vingt-quatre heures. Dans la culture juive de l’époque, l’expression « un jour et une nuit » était une expression qui servait à désigner un jour, et tout jour entamé était compté comme un jour dans leurs calculs. Voilà pourquoi tout en étant ressuscité le dimanche matin alors qu’il avait été mis au tombeau le vendredi après-midi, Jésus est bien resté trois jours et trois nuits dans le tombeau. C’est bien ainsi que les pharisiens avaient compris les choses, puisqu’en se souvenant que Jésus avait dit qu’il ressusciterait après trois jours, ils demandent à ce que le sépulcre soit gardé jusqu’au troisième jour, et non qu’il soit gardé à partir du quatrième jour (Mat 27.63-64).

Une bonne compréhension d’un écrit nécessite de tenir compte de son contexte situationnel, c’est-à-dire de son contexte historique, politique, culturel, social, religieux, géographique, etc. Dans le cas de la Bible, les textes ont été rédigés dans une culture très différente de la culture occidentale, et cela, il y a 20 à 35 siècles ! Il y a donc un énorme « fossé historique et culturel » à franchir pour arriver à une interprétation la plus correcte possible des Écritures.

Le style littéraire

Une bonne compréhension d’un texte passe par la connaissance de sa fonction9, ainsi que de son contexte littéraire10. Il est évident qu’on ne va pas interpréter de la même façon un écrit poétique, narratif ou apocalyptique.

Néanmoins il ne faut pas perdre de vue que les règles ou les styles pour un genre défini peuvent varier d’une langue à l’autre, et peuvent même évoluer au cours du temps. Par exemple, les règles de la poésie hébraïque étant différentes des règles de la poésie française, il serait erroné de porter un jugement sur la poésie biblique d’après les normes de la poésie occidentale. Comme l’écrit P. Courthial, « les formes et les genres littéraires occidentaux ou (et) modernes auxquels nous sommes habitués nous conditionnent ; aussi l’interprète devra-t-il veiller à ne pas se laisser induire en erreur par des rapprochements abusifs.11 »

Il est important aussi, d’avoir conscience que la Bible utilise des figures de langage, car une lecture « au pied de la lettre » de textes qui sont rédigés en employant des figures de style conduit à des non-sens, ou à des interprétations erronées. Par exemple, l’hyperbole, couramment employée dans la Bible, consiste en une exagération délibérée des traits d’une idée ou d’une réalité : l’auteur du Psaume 119 écrit que ses yeux versent des torrents d’eau (Ps 119.136), le livre du Deutéronome parle de villes fortifiées jusqu’au ciel (Deut 1.28), l’évangéliste Jean affirme que, si on voulait écrire tout ce que Jésus a fait, alors le monde entier ne serait pas assez grand pour contenir tous ces livres (Jean 21.25), etc. La prise de conscience qu’il s’agit de conventions de langage permet de dédouaner les auteurs de mensonge ou de travestissement de la vérité.

 

* * *

 

Dans le rapide survol que nous venons de faire, nous avons relevé que l’interprétation d’un texte dépend des présupposés de l’herméneute. Néanmoins, même parmi les personnes qui acceptent la pleine inspiration de la Parole de Dieu, force est de constater qu’il n’y a pas toujours unanimité d’interprétation. Ces divergences ne doivent pas nous décourager, mais au contraire nous stimuler à interpréter sa Parole avec une approche herméneutique qui soit la plus rigoureuse possible, en étant respectueuse du double statut des Écritures : pleinement et entièrement Parole de Dieu, mais aussi pleinement parole d’homme. Elles doivent également nous pousser à nous tourner vers Dieu avec humilité, pour lui demander son secours pour interpréter sa Parole. Et par dessus tout, ne perdons pas de vue que la bonne compréhension des Écritures ne saurait être une fin en soi, puisque l’Écriture doit avoir des répercussions dans la vie du croyant, en l’éduquant, le corrigeant et le préparant à des œuvres selon Dieu (2 Tim 3.16-17). Comprendre le texte biblique est une première étape, appliquer et vivre ensuite ce qu’on a compris est la deuxième étape indispensable, sans laquelle nous nous séduisons nous-mêmes (Jac 1.22).

1 Si des personnes peuvent tordre le sens des Écritures (2 Pi 3.15-16), si Jésus peut s’opposer au diable par des « il est écrit » (Mat 4.3-10), c’est bien parce que le texte biblique a un sens qui ne peut être fonction de l’interprétation subjective des uns ou des autres.
2 Nous entendons par là une lecture qui tend à juxtaposer les sens des mots de la phrase, tels qu’ils apparaissent dans les dictionnaires : par exemple la lecture qui voudrait que l’expression « il pleut des cordes » signifie que des cordes tombent du ciel.
3 F.F. Bruce, S. Romerowsky, « Interprétation biblique », Le grand dictionnaire de la Bible, Ex-celsis, 2004, p. 753.
4 Un présupposé est une croyance non démontrable qui est l’objet d’une foi plus ou moins cons-ciente.
5 J. Packer, « L’herméneutique et l’autorité de la Bible », Hokhma, n° 100, 2011, p. 23.
6 Tout en inspirant les auteurs bibliques, Dieu ne court-circuite pas leur humanité : ces derniers s’expriment avec leur personnalité, leur culture, leur langue, etc.
7 Nous parlons ici du contexte au sens large du terme : il s’agit du contexte historique, culturel, religieux, mais aussi de la notion de révélation progressive de Dieu, etc.
8 A. Kuen, Comment interpréter la Bible, Emmaüs, 1991, p. 66. 9 Le texte peut avoir une fonction informative, ou émotive (exprimer ce que ressent l’auteur), ou encore impressive (c’est à dire créant un effet).
10 Par contexte littéraire nous entendons le type d’écrit (narratif, poétique, apocalyptique, etc.), mais aussi le contexte de la phrase pour déterminer le sens du mot, le contexte du paragraphe pour déterminer le sens de la phrase, le contexte de la section pour déterminer le sens du paragraphe, etc.
11 P. Courthial, Fondements pour l’Avenir, Kerygma, 1982. (Source Internet consultée le 30-07-2013 : http://www.vbru.net/src/divers/doctrine/courthial_hermeneutique.html)

 


Recension de livre

Erreurs d’exégèse se présente comme un guide pratique et concis qui nous fait réfléchir sur notre manière d’approcher le texte biblique. Don Carson met à jour plusieurs travers courants d’interprétation et les explique avec sagesse et clarté. L’auteur enseigne une véritable méthode d’étude biblique qui se base sur une analyse à la fois grammaticale, lexicale, culturelle, théologique et historique. Erreurs d’exégèse repère ainsi les erreurs courantes dans lesquelles ceux qui étudient la Bible peuvent tomber. Au final, ce livre permettra à toute personne désireuse d’interpréter droitement la Parole de vérité de mieux comprendre comment bien le faire. Le texte qui suit est extrait de cet ouvrage paru aux éditions Impact. Ce livre est disponible dans votre librairie chrétienne, ou vous pouvez le commander sur le site web de La Maison de la Bible (http://maisonbible.ch/) ou d’Excelsis (http://www.xl6.com/).

Anachronisme sémantique

Cette erreur se présente quand l’usage récent d’un mot est employé dans la lecture d’un texte plus ancien. Au niveau le plus simple, cela se passe dans une même langue, comme quand les premiers pères grecs de l’Église utilisent un mot d’une manière que l’on ne peut démontrer avoir été prévue par les auteurs du Nouveau Testament. Il n’est pas évident, par exemple, que leur utilisation de  έπίσκοπος (episkopos, évêque) pour désigner un conducteur d’église qui a la surveillance de plusieurs églises locales ait une quelconque justification dans le Nouveau Testament.

Mais le problème a une deuxième facette quand nous y ajoutons un changement de langue. Notre mot dynamite est étymologiquement tiré de de  δύναμι (dynamis, pouvoir/puissance, ou même miracle). Je ne sais pas combien de fois j’ai entendu des prédicateurs proposer une interprétation de Romains 1.16 qui ressemblait plus ou moins à cela : « je n’ai pas honte de l’évangile, car il est la dynamite de Dieu pour sauver quiconque croit » — souvent avec un hochement de tête, comme si quelque chose de profond ou même d’ésotérique avait été prononcé. Ce n’est pas uniquement la vieille erreur de racine que l’on rencontre à nouveau. C’est pire : c’est un appel à une sorte d’étymologie inverse, l’erreur de racine aggravée par l’anachronisme. Paul a-t-il pensé à la dynamite quand il a écrit ce mot ? Et, quoi qu’il en soit, la mention même de la dynamite comme une sorte d’analogie est singulièrement mal venue. La dynamite fait sauter, démolit, arrache la roche, creuse des trous, détruit. La puissance de Dieu, dont parle Paul, est souvent identifiée avec la puissance qui a ressuscité Jésus de la mort (par exemple en Éphésiens 1.18-20) ; et quand elle agit en nous, son but est εις σωτηρίαν (eis soterian, « pour le salut », Romains 1.16, NEG), visant à l’intégrité et à la perfection implicite dans la consommation de notre salut. Donc, même en dehors de l’anachronisme sémantique, la dynamite apparaît inadéquate comme moyen de ressusciter Jésus d’entre les morts ou comme moyen de nous rendre conforme à la ressemblance de Christ. Bien sûr, ce que les prédicateurs essayent de faire quand ils parlent de la dynamite est de donner une certaine indication sur la taille de la puissance en question. Cependant, la mesure de Paul n’est pas la dynamite, mais le tombeau vide.

Exactement de la même manière, c’est de l’anachronisme sémantique pur de remarquer que, dans le texte « Dieu aime celui qui donne joyeusement » (2 Corinthiens 9.7), le mot grec pour « joyeux » est  ίλαρόν (hilaron) et de conclure qu’en réalité Dieu aime celui qui donne en étant hilare. Peut-être devrions-nous faire passer des rires en play-back pendant que circule la corbeille des offrandes.

Un troisième niveau du même problème a été malheureusement donné en exemple dans trois articles sur le sang, dans Christianity Today1. Les auteurs ont fait un excellent travail en expliquant les merveilles découvertes par la science, que le sang peut faire — en particulier son rôle purifiant quand il nettoie les impuretés cellulaires et transporte la nourriture à chaque partie du corps. Quelle merveilleuse image (nous dit-on) de la manière dont le sang de Jésus Christ nous purifie de tout péché (1 Jean 1.7). En fait, cela ne se passe pas du tout de cette manière. Pire, cela conduit de façon irresponsable à une erreur mystique et théologique. L’expression « le sang de Jésus » se réfère à la mort violente, sacrificielle de Jésus2. En général, les bénédictions que l’Écriture déclare comme étant accomplies ou réalisées par le sang de Jésus sont aussi déclarées comme étant accomplies ou réalisées par la mort de Jésus (par exemple la justification, Romains 3.21-26 ; 5.6-9 ; la rédemption, Romains 3.24 ; Éphésiens 1.7 ; Apocalypse 5.9). Si Jean nous dit que le sang du Seigneur Jésus Christ nous purifie de tout péché, il nous indique que notre espoir d’être continuellement purifiés et pardonnés ne repose pas sur nos prétentions à être bons si, en même temps, notre vie est une imposture (1 Jean 1.6 est probablement dirigé contre des proto-gnostiques) mais sur une marche continuelle dans la lumière et sur une dépendance continue de l’œuvre que Christ a achevée sur la croix.

1 Paul Brand and Philip Yancey, « Blood : The Miracle of Cleansing », CT 27/4, 18 février 1983, p. 12-15 ; « Blood : The Miracle of Life », CT 27/5, 4 mars 1983, p. 38-42 ; « Life in the Blood », CT 27/6, 18 mars 1983, p. 18-21.
2 Cf. Alan Stibbs, The Meaning of the Word ‘Blood’ in the Scripture, London, Tyndale, 1954.

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