PROMESSES
Jacques, dans son Épître, s’adresse à des chrétiens d’origine juive dispersés dans l’Empire romain (1.1). Une grande distance le sépare de la majorité d’entre eux. Il n’en connaît personnellement qu’une partie. Il se fait visiblement du souci à cause des problèmes qui se manifestent parmi ces croyants : querelles, immoralité, matérialisme, désobéissance à la Parole de Dieu, discrimination envers les frères de condition modeste, dureté de cœur, avarice, présomption, etc. Il a des choses sévères et solennelles à leur communiquer. Peut-être même sent-il son esprit s’irriter à cause de tous les manquements dont sont capables ses coreligionnaires. Et pourtant…
Un détail ne devrait pas manquer de frapper tout lecteur attentif. Plus que tout autre auteur des Épîtres du Nouveau Testament, Jacques s’adresse à ses destinataires sur le ton du cœur à cœur le plus ardent. À quinze reprises il emploie l’expression « frères » ; dans neuf cas, il complète par l’adjectif possessif, « mes frères » ; dans trois autres cas, il dit même « mes frères bien-aimés ». Par comparaison, l’apôtre Paul, dans toutes ses Épîtres, ne dit « mes frères » que deux fois, et « (mes) frères bien-aimés » que trois fois.
Ce détail nous révèle beaucoup sur l’attitude de « Jacques, serviteur de Dieu et du Seigneur Jésus-Christ » (1.1). Animé par l’amour de Dieu et de ses frères dans la foi, l’apôtre fait entendre sans détour ses inquiétudes, ses reproches, ses cris d’alarme. Mais à aucun instant il ne s’élève au-dessus de ses frères ; il agit comme si ces croyants lointains, si peu conséquents, étaient embarqués avec lui sur un navire dont le salut dépendait de tout l’équipage, dont lui-même fait partie. Puissions-nous aujourd’hui nous inclure dans cette fraternité, et ne pas douter qu’à travers les exhortations de Jacques, c’est Dieu lui-même qui cherche à faire de tous ses enfants bien-aimés des croyants matures, heureux dans leur marche chrétienne (1.25), prêts pour le retour du Seigneur (5.7,8).
Tout lecteur assidu de la Bible, sachant que cet exercice peut parfois soulever des questions épineuses pour lui-même et des controverses avec d’autres, tentera normalement d’appliquer quelques règles élémentaires et sûres de bonne compréhension du Livre.
Si la Bible est réellement le message de Dieu aux hommes, il n’est pas déraisonnable d’espérer que Dieu en guide la lecture par son Saint-Esprit. C’est même biblique (cf. 2 Pi 1.20,21). Il n’est pas non plus superflu d’écouter les conseils de « docteurs » que Dieu a donnés à l’Église pour l’encourager dans son exploration des pages sacrées, et pour en expliquer le contenu avec rectitude (cf. 2 Tim 2.2,14-16 ; 4.1-5).
Un de ces « docteurs », John MacArthur, présente dans un de ses livres quelques principes d’interprétation des Écritures (principes qui valent parfois comme des « garde-fous » !). Il n’est de loin pas le seul à recommander cette approche1 . Je m’en inspire librement dans le texte qui suit.
A. Trois erreurs à éviter (2 Tim 2.15)
1. Éviter de forcer un passage biblique pour favoriser sa propre interprétation.
2. Éviter une étude superficielle des textes. En 1 Tim 5.17, ceux qui œuvrent à la prédication et à l’enseignement doivent étudier sérieusement la Bible et travailler avec effort pour approfondir leur connaissance de la Parole de Dieu. Rien ne tombe tout cuit du ciel. Dieu désire que nous nous penchions sérieusement sur sa Parole.
3. Éviter de « spiritualiser » un passage, à moins qu’il ne nous y invite clairement.
B. Cinq principes pour une interprétation saine des Écritures
1. Le principe littéral
En général, mieux vaut comprendre l’Écriture dans son sens premier, littéral. Toutefois, on prendra toujours garde à aborder un passage en tenant compte de son genre littéraire (historique, législatif, liturgique, poétique, prophétique, sapiential, épistolaire, didactique, autobiographique). C’est le principe que tout lecteur avisé devrait appliquer en abordant n’importe quel texte. Cette approche recquiert un minimum de sensibilité aux divers procédés de style, aux figures (symboles, hyperboles, métaphores, comparaisons, etc.), aux tournures hébraïques ou grecques, aux jeux de mots, à la syntaxe et aux procédés « architecturaux » (acrostiches, parallélismes, chiasmes, répétitions, etc.). La plupart des bons commentaires bibliques rendent compte de ces procédés.
2. Le principe historique
Autant que possible, il faut tenir compte du « contexte » historique de la rédaction d’un écrit (comme lorsqu’on aborde n’importe quel témoignage du passé ou d’une société différente de la nôtre). Attention aux anachronismes ! Tel texte s’interprète souvent de lui-même pour peu qu’on éclaire les circonstances historiques de sa composition. Un livre biblique situé dans son cadre historique général sera mieux compris. On étudiera avec profit les conditions politiques et culturelles qui prévalaient au moment de la rédaction, en se souvenant que le message était en général adapté à la compréhension d’un auditeur de l’époque. Cela étant, il n’est pas nécessaire de se transformer en érudit pour saisir l’essentiel nécessaire à la compréhension d’une grande majorité des livres bibliques2.
3. Le principe grammatical
Souvent la construction syntaxique d’un passage, son champ sémantique et lexical (le sens, le choix et les associations des mots, la fréquence de certaines répétitions, les familles de mots de sens voisin) donnent des clés de compréhension du texte3.
Ici, il convient de mentionner la méthode inductive, qui est simple et efficace. Elle comporte trois stades : l’observation, l’interprétation et l’application. On part de l’étude des détails d’un texte, de phrases telles qu’elles apparaissent dans l’original, pour aboutir à la redécouverte des mécanismes de la langue, à la formulation de règles élémentaires, et plus tard à des conclusions générales, puis à des applications personnelles.
En analysant le texte biblique (observation), on tente de répondre aux questions « Qui ? Quoi ? Où ? Quand ? Comment ? Pourquoi ? » On étudie les mots, en distinguant leurs diverses catégories (noms, verbes, adjectifs, etc.) et leurs diverses fonctions (sujet, complément direct, attribut, etc.), pour établir le sens le plus probable de la phrase, du paragraphe, ou d’un ensemble plus vaste. Si possible, on cherche le sens original des mots en utilisant les lexiques et dictionnaires à disposition.
L’interprétation est dès lors ébauchée. Elle demandera à être confirmée, si nécessaire, par des apports bibliques complémentaires (voir points 4 et 5 ci-après).
4. Le principe de la synthèse ou de l’analogie des Écritures
L’Écriture s’interprète par l’Écriture. Il ne faut jamais échafauder une doctrine sur un seul texte difficile, ou même obscur (cf. 2 Pi 3.15,16). Une doctrine biblique doit être en harmonie avec l’ensemble des Écritures. C’est le principe qui a été suivi par les rédacteurs du Nouveau Testament, toujours prêts à démontrer que leur message était en accord avec la totalité des textes inspirés accessibles à leur époque (l’Ancien Testament et, selon les auteurs, les textes du Nouveau Testament déjà rédigés). Ce fut aussi la règle selon laquelle les grands réformateurs exposaient les Écritures.
5. Le principe pratique de l’application
Selon 2 Tim 3.16, l’Écriture sainte est « utile pour enseigner, convaincre, redresser et éduquer dans la justice » et pour nous préparer à toute bonne œuvre. L’enseignement biblique est destiné à être appliqué dans notre vie quotidienne, à tous les niveaux. Si elle n’aboutit pas à ce résultat, l’herméneutique est une science vaine. Mais attention : ne tirons pas des leçons pratiques à la légère, en détournant un texte de son but initial, comme s’il fallait à tout prix faire parler un passage qu’on n’est pas même sûr d’avoir réellement compris.
C. La clé secrète
Revenons à ce que nous exprimions en introduction. Si la Bible a été inspirée par le Saint-Esprit, elle ne peut se comprendre sans le secours du Saint-Esprit, œuvrant dans le cœur et l’intelligence de ceux qui ont reçu le Saint-Esprit lors de leur conversion????? . Sans ces réalités, tous les bons principes énumérés ci-dessus ne déboucheront jamais sur une réelle progression dans la découverte du Livre de Dieu. Le Saint-Esprit fournit la clé secrète de la Parole de Dieu à ceux qui la lui demandent humblement.
Par l’opération du Saint-Esprit qui nous a régénérés et immergés (baptisés une fois pour toutes) dans le Christ, les Écritures s’ouvrent à nous. C’est lui qui nous amène dans les profondeurs de cette précieuse Parole pour que nous la comprenions et l’aimions (Luc 24.45 ; Act 16.14 ; 1 Cor 2.6-16).
Ce sont alors la méditation constante et l’étude systématique de l’Écriture qui peu à peu nous révèlent Dieu, son caractère, ses desseins de grâce. Le puzzle se complète et nous recevons une compréhension plus juste et plus profonde de l’ensemble de la doctrine biblique. Bien entendu, nous ne connaîtrons jamais qu’en partie (1 Cor 13.12) tant que nous serons ici-bas. Mais nous pouvons toujours avancer dans cette connaissance du Seigneur et de sa Parole. Quelle sainte passion que de nous y dédier !
Si nous sommes vraiment ancrés en Christ et en sa Parole, le Saint-Esprit ne cesse d’opérer pour nous renouveler intérieurement, nous faire découvrir ce qui doit être changé en nous, pour nous humilier, nous amener à la repentance lorsqu’il le faut, mais aussi pour nous encourager, nous ouvrir les yeux sur son incommensurable Personne, sur la gloire de ses plans envers nous et envers le monde, et pour faire de nous des serviteurs, des servantes utiles à leur Maître (cf. Tite 3.4-8).
1Concernant l’herméneutique (l’art d’interpréter les textes), il n’existe pas énormément de littérature évangélique en français. Rares sont les ouvrages que l’on puisse recommander sans aucune réserve. Toutefois, voici quelques bons titres : – Eric Lund et P.C. Nelson, Herméneutique, 174 pages, Éditions Vida, 1985 ; – Alfred Kuen, Comment interpréter la Bible ?, 321 pages, Éditions Emmaüs, 1991. Pour ceux qui ne disposent que de peu de temps, l’excellente brochure d’Alfred Kuen, Comment étudier la Bible ? (110 pages, Éditions Ligue pour la lecture de la Bible) explique succinctement comment étudier et interpréter la Bible.
2On peut utilement se rapporter aux introductions de plusieurs Bibles (Semeur, Segond, etc.) ou Bibles d’études (MacArthur, etc.).
3Étudier le texte biblique dans les langues originales (hébreux et grec) constitue ici un grand avantage. Pour ceux qui n’ont pas eu l’occasion d’entreprendre de longues études, et qui n’envisagent plus de le faire, il existe beaucoup de moyens auxiliaires à la portée du grand public. Étant moi-même dans ce cas, j’ai acquis un N.T. en grec avec une traduction littérale en français sous le texte (Nouveau Testament interlinéaire grec/français, Alliance biblique universelle). On peut éventuellement apprendre les rudiments du grec soi-même, ou avec l’aide d’un frère plus instruit (c’est ce que j’ai fait en apprenant à lire le texte, et en me focalisant sur une meilleure compréhension des mots du texte original). Restons néanmoins modestes et faisons attention à ne pas commettre de contresens en raison d’une méconnaissance des subtilités de la langue originale ; les bons commentaires nous guideront en cela.
« Que la parole du Christ habite en vous avec sa richesse, instruisez-vous et avertissez-vous réciproquement, en toute sagesse, par des psaumes, des hymnes, des cantiques spirituels ; sous l’inspiration de la grâce, chantez à Dieu de tout votre cœur. Quoi que vous fassiez, en parole ou en œuvre, faites tout au nom du Seigneur Jésus, en rendant grâces par lui à Dieu le Père. » Col 3.16,17 |
Ces versets nous invitent à prêter attention à trois points d’ancrage indispensables sans lesquels la vie du chrétien ne peut trouver son équilibre :
1. Une méditation régulière de la Parole de Dieu
Lire la Parole, c’est écouter Dieu qui a parlé. Méditons donc régulièrement la Parole de Dieu, ayons une écoute attentive, écoutons « comme écoutent des disciples » (És 50.4). C’est ainsi que la lecture du Livre se traduira en prière et en vie sainte.
2. Une vie de prière
Nous sommes tous d’accord sur l’importance de la prière ; pourtant, que de peine nous avons à prendre le temps pour un cœur à cœur avec Dieu, temps essentiel pour donner à la vie chrétienne son souffle et sa puissance. Quelqu’un a dit : « Quand je travaille, c’est moi qui agis ; quand je prie, c’est Dieu qui agit. »
3. Un partage personnel avec nos frères et sœurs dans la foi
Dieu nous a unis en une communauté vivante, au sein de laquelle chacun doit pouvoir s’exprimer. Développons un réel intérêt pour nos frères et sœurs. Partageons ce que nous sommes, ce que Dieu fait dans nos vies. Et que la louange en découle.
Ainsi nous irons ensemble de l’avant avec assurance, car « celui qui nous a appelés est fidèle. » (1 Thes 5.24)
Une Epître à part… Pourquoi ? À cause peut-être d’un style rugueux, coupé, énergique, marqué par beaucoup d’impératifs (60 sur 108 versets), beaucoup de questions (une vingtaine), des thèmes multiples… Un livre donc difficile à résumer, souvent critique, peu systématique, rare en mentions de Jésus (seulement deux, en 1.1 et 2.1, et encore, sans référence directe ni à son incarnation, ni à sa crucifixion, ni à sa résurrection). De quoi indisposer le lecteur qui veut lire tranquillement une portion de la Parole de Dieu sans se sentir obligé à l’engagement personnel. Mais puisque l’Epître existe, tout lecteur convaincu de l’inspiration divine de chaque livre de l’Écriture se doit d’y plonger ses regards, dans un esprit de prière, afin d’en retirer le plus grand profit possible (cf. 2 Tim 3.16,17).
Qui en est l’auteur ?
Il s’agit probablement de Jacques (1.1) le demi-frère de Jésus (Mat 13.55 ; Marc 6.3 ; Gal 1.19 ; 2.7,9,12), qui se serait converti après la résurrection de Jésus (1 Cor 15.7 ; Act 1.14) et qui jouait un rôle de premier ordre dans l’église de Jérusalem (Act 12.17 ; 15.13 ; 21.18 ; Gal 2.12).
Sa réputation fut telle que Juifs et non Juifs l’ont appelé « Jacques le Juste » (Eusèbe, Histoire Ecclésiastique, 2.23) à cause de sa piété et de sa vie de prière ; on lui aurait accolé le sobriquet de « genoux de chameaux », parce qu’il fut souvent trouvé à genoux dans le Temple, implorant Dieu de pardonner à la nation juive. La tradition rapporte qu’en 62 apr. J.-C. Jacques fut convoqué devant le sanhédrin, qui le somma de déclarer dans le Temple que Jésus n’était pas le Messie. Jacques répondit en clamant que Jésus était le Fils de Dieu et le Juge du monde ! Là-dessus, il fut amené en haut du Temple et jeté en bas, puis frappé avec un gourdin jusqu’à la mort. Au dernier moment, il pria encore : « Père, pardonne-leur, car ils ne savent pas ce qu’ils font ! » (cf. Luc 23.34) Il vaut vraiment la peine de découvrir le livre d’un homme aussi exemplaire de fidélité jusqu’à la fin !
Pourquoi croyons-nous que Jacques, frère de Jésus, fut l’auteur de ce texte, alors que d’autres Jacques pourraient être pressentis ? Par exemple, Jacques fils de Zébédée et frère de Jean (Mat 4.21 ; Act 12.2), Jacques fils d’Alphée (Mat 10.3 ; Act 1.13), ou Jacques le père de Jude (mais pas de Jude l’Iscariote, cf. Luc 6.16). Voici nos raisons : (1) La simplicité de l’adresse (1.1) : il fallait un Jacques bien connu pour écrire ce type de lettre sans donner plus d’explications sur son identité, et la faire accepter par les chrétiens.
(2) L’histoire du canon : quoique le livre ait eu des difficultés à « percer » pendant les premiers siècles, Origène le théologien, Eusèbe l’historien et Jérôme le traducteur (auteur de la Vulgate au IIIe s.), ont reconnu comme auteur Jacques le demi-frère de Jésus. De plus, le Concile de Carthage a proclamé sa canonicité en 397.
(3) L’attribution traditionnelle de ce texte au demi-frère du Seigneur, même si certains commentateurs en doutent.
(4) Des ressemblances entre le « Jacques » de cette Epître (2.7 ; 2.5 ; 1.27 ; 5.19-20 ; 1.27 ; 1.16,19 ; 2.5) et celui qui intervient en Actes 15 (15.17 ; 15.13,14 ; 15.19,20 ; 15.29 ; 15.25). 1
Qui sont les destinataires ?
Jacques s’adresse aux Juifs convertis à Christ dispersés partout dans le monde connu à cette époque (cf. les références « juives » : synagogue (2.2) ; Seigneur des Armées, le Jahvé Sabaoth de l’AT (5.4) ; Seigneur de gloire (2.1) ; frères (5.7,10,12), comme dans les Actes). Il est fort probable que les destinataires étaient des Juifs convertis au christianisme — nous dirions aujourd’hui des Juifs messianiques ; ils auraient été dispersés partout après le martyre d’Étienne (Act 7.59-8.4 ; 11.19). Jacques, occupant une place importante à Jérusalem, aurait eu de la sympathie pour tous ses frères dispersés, désirant les instruire dans les domaines de la vie chrétienne pratique. En effet, il souffrait de trouver chez ses frères chrétiens d’origine juive des tares dangereuses : par exemple, l’amour des richesses (5.1-6), le formalisme légaliste 1.22-27 ; 2.14-26), le manque d’amour pratique (2.1-13), le mauvais usage de la langue (3.1-12), les disputes et toutes sortes de passions (3.14-4.6). Il voulait que leurs vies soient d’une exemplarité incontestable à cause du « beau Nom » invoqué sur eux. Mais Paul avait le même souci pour les croyants d’origine païenne. Il ne faudrait donc pas en déduire que le message de Jacques est réservé aux chrétiens juifs.
Quand Jacques a-t-il rédigé ce livre ?
Nous proposons une date entre 45 et 50 apr. J.-C. Pour quelles raisons (1) L’Épître a une orientation juive, parce que la « voie » chrétienne (cf. Act 19.9) était au début essentiellement composée de Juifs convertis. Les païens convertis étaient minoritaires dans l’Église.
(2) Est absente, dans l’épître, toute référence à la controverse entre certains judaïsants, qui insistaient pour que les païens qui se convertissaient soient circoncis (Act 15.1-12), et les apôtres (Act 15.13-29). Si le livre avait été écrit après la conférence de Jérusalem en 50 apr. J.-C., cette dispute aurait mérité une mention.
(3) Il existe plus d’affinités entre Jacques et Jésus qu’entre Jacques et Paul, en ce qui concerne leur enseignement. Si l’Épître avait été écrite après les événements d’Actes 15, « l’angle d’attaque » des problèmes aurait sûrement davantage ressemblé à celui de Paul, à l’exemple des analogies entre les Épîtres de Pierre et celles de Paul.
(4) La simplicité de ton quand il est fait référence aux responsables de l’église locale (« docteurs », 3.1 et « anciens », 5.14) favorise une date antérieure à l’an 50 (moment de la conférence d’Actes 15).
(5) L’utilisation du terme « synagogue » (2.2) plutôt que d’ « église » met en évidence que le christianisme était surtout confiné aux Juifs convertis à Christ au moment de la composition du livre.
Quels sont les points saillants de l’Épître ?
• Toutes les références à l’A.T. : Jacques évoque Abraham, Rahab, Job, Élie, la loi et les dix commandements ; de plus, il fait allusion à 21 livres de l’A.T. (de Genèse à Deutéronome, Josué, 1 Rois, Psaumes, Proverbes, Ecclésiaste, Ésaïe, Jérémie, Ézéchiel, Daniel, et 7 des 12 petits prophètes).
• L’absence d’un développement systématique des doctrines centrales exposées par l’apôtre Paul (le salut par grâce fondé sur la Croix et la résurrection).
• Une fine appréciation de la création et de la nature (30 fois !) : Jacques en parle plus que Paul dans toutes ses Épîtres !
• 29 mentions directes ou allusives à la langue : les Juifs n’avaient pas bonne réputation dans ce domaine…
• La ressemblance entre l’enseignement de Jésus et celui de Jacques.
• L’emploi de phrases courtes et percutantes, de figures de style : o métaphores (comparaisons implicites) : « la langue est un feu » (3.6) ; « vous êtes une vapeur » (4.14 )
o comparaisons : « celui qui doute est semblable au flot de la mer, que le vent agite et soulève » (1.6) ; « le riche…passera comme la fleur de l’herbe » (1.10) ; celui qui écoute la Parole et ne la pratique pas « est semblable à un homme qui regarde dans un miroir son visage naturel et qui, après s’être regardé, s’en va et oublie aussitôt comment il est » (1.23,24). • L’âme de ce livre le rapproche de la littérature de « sagesse » de l’A.T. (Proverbes, Ecclésiaste).
• Ce livre est immédiatement et précisément praticable, car la vie chrétienne doit être pure, morale, éthique, juste, réelle.
• Les exhortations de Jacques s’ancrent dans des doctrines chrétiennes majeures : (1) La doctrine de Dieu : 1.5,13,17 ; 2.19 ; 3.9 ; 4.15 ; 5.4,11.
(2) La doctrine du péché : 3.2 ; 1.14,15,20,21 ; 2.7,9-11 ; 4.1-4,6 ; 5.4.
(3) La doctrine de l’eschatologie : 1.12 ; 2.5,12 ; 3.1 ; 5.7-8.
(4) La doctrine de l’Esprit : 4.5.
(5) La doctrine du salut : 1.18,21 ; 2.14-26,21-25 ; 5.15.
(6) La doctrine de l’église locale : 5.13-16.
Nous avons dans ce livre un aperçu de la nature du vrai christianisme biblique vécu par des Juifs convertis au Messie, mais vivant encore sous une très forte influence de l’A.T. Ce livre n’a pas reçu l’empreinte des Épîtres de Paul. Mais attention ! L’Épître de Jacques et l’Épître de Paul aux Romains (pour citer la plus fameuse) ne se contredisent pas. Jacques et Paul se complètent. Paul appréciait Jacques (Act 15.13 ; 21.8) et le reconnaissait (Gal 1.19 ; 2.9,12). Paul a écrit au sujet de la foi salvatrice du point de vue de Dieu, tandis que Jacques a décrit l’expression de la foi dans le service actif de l’homme. La preuve de la foi salvatrice en Christ est donnée par la foi mise au service des autres, et cela au nom de Christ. Jacques dit en fin de compte que la vraie foi pense aux autres et se met au travail pour eux.
Quel est le plan de l’Épître ?
Le caractère informel du livre en rend la structuration un peu aléatoire. J’ai compté jusqu’à 26 essais de schématisation de l’Épître. J’en propose un 27e !
Chapitres 1 et 2 : Les rapports entre la foi et les œuvres
1.1-15 : La foi affronte les épreuves et la tentation – la foi associée à la sagesse permet de surmonter les épreuves et d’acquérir la patience (1.1-12)
– la foi doublée d’une juste connaissance de Dieu et du cœur humain permet d’affronter la tentation (1.13-15) 1.16-27 : La foi reconnaît l’activité de la Parole de vérité dans… – la régénération (1.16-21)
– le passage de l’écoute à la pratique (1.22-25)
– une conduite en société qui soit utile aux autres alliée à la recherche d’une pureté morale qui honore Dieu (1.26-27) 2.1-13 : La foi discerne et combat l’esprit de partialité – la partialité est condamnable (2.1)
– la partialité s’inspire de faux jugements (2.2-4)
– la partialité est à l’origine des injustices sociales (2.5-7)
– la partialité est incompatible avec l’amour véritable (2.8-11)
– la partialité est contraire à l’esprit de miséricorde et de liberté (2.12-13) 2.14-26 : La vraie foi sauve – la vraie foi en Christ s’active pour le bien des autres (2.14-19)
– la vraie foi s’est illustrée chez Abraham et Rahab (2.20-26)
Chapitres 3 à 5 : Les rapports entre la sagesse céleste et les œuvres
La sagesse céleste… 3.1-12 contrôle l’emploi de la langue
3.13-18 est garante d’une bonne conduite
4.1-3 doit prévaloir sur les passions, les querelles et les désirs mal orientés
4.4-12 cultive l’humilité et rejette la médisance
4.13-17 participe à la formation et à l’exécution de nos projets
5.1-6 lutte contre la corruption causée par les richesses
5.7-12 attend patiemment l’avènement de Christ
5.13-18 nourrit la prière
5.19-20 contribue à la restauration d’un frère
Comment lire cette Épître ?
Une lecture superficielle de cette Épître est à exclure : chacun de ses paragraphes est à méditer en vue d’être appliqué dans notre expérience quotidienne. La mise en œuvre des principes exposés dans cette Épître est indissociable d’un examen de conscience approfondi et sincère dans tous les domaines que le Saint-Esprit veut vivifier, corriger, illuminer et affermir dans nos vies. Une attitude de prière humble et volontaire doit en baigner la lecture.
1Par ailleurs, l’auteur de l’Epître est souvent proche de Matthieu (au moins 19 passages convergents), et il y a dans ce livre plus de parallèles avec l’enseignement de Jésus (dans les Évangiles) que dans aucun autre livre du N.T. Notons aussi la ressemblance entre Jacques (4.6 ; 1.5 ; 1.19 ; 3.18 ; 4.13-16 ; 5.20) et le livre des Proverbes (3.34 ; 2.6 ; 29.20 ; 11.30 ; 27.1 ; 10.12).
«… la langue est un petit membre, mais elle a de grandes prétentions. Voyez comme un petit feu peut embraser une grande forêt ! Or la langue aussi est un feu, elle est le monde de l’injustice… » (Jacques 3.5,6a)
Ces expressions, fortes il est vrai, mais combien justes, émanent de Dieu lui-même, et leur portée n’est nullement exagérée. Pour les justifier, il suffit de penser à tel innocent à qui un faux témoignage a apporté le déshonneur, la mort peut-être ; à telle femme couverte du mépris de la société par la calomnie ; à tel homme trop confiant, dupé par des mensonges ; à des enfants scandalisés par des propos malsains.
Mais sans aller puiser des preuves dans ces fautes graves et en demeurant dans le cercle d’observations que nous fournit notre propre expérience, nous n’aurons que trop d’occasions de reconnaître que de nos paroles légères, de nos propos inconsidérés, de nos simples plaisanteries, de nos petites médisances peuvent sortir bien des choses affligeantes pour notre prochain, et lui causer bien du chagrin. En général, on ne se fait pas une idée juste des conséquences funestes que peuvent entraîner nos paroles, et l’on ne songe guère qu’à l’effet qu’elles produisent au moment où elles sont prononcées.
Mais suivez-les, je vous prie, dans leur rapide voyage de bouche en bouche, et vous serez effrayés des ravages qu’elles vont faire. Ce ne sera, si vous le voulez bien, qu’une simple médisance, qu’on ne fera que répéter, mais pourquoi celui qui l’entend la cacherait¬-il à celui qui la répétera ensuite ? Et si cette parole se répercute d’écho en écho, faudra-t-il beaucoup de temps, je vous le demande, pour qu’une famille, une église, voire un village, en soient informés ? Ce fait divers, raconté d’abord avec exactitude, sera bientôt dénaturé, déformé. Ce qui était vrai le matin se trouvera faux le soir. Répété devant des inconnus ou des Aindifférents, l’« événement » parvient à l’oreille d’un ami, d’un protecteur, d’un maître… pour quels résultats néfastes ! Brouilles entre voisins, reproches entre parents, perte de confiance d’un supérieur, etc. : voilà les fruits amers d’une simple médisance.
Mais prenons un autre exemple. Suivons un jugement téméraire : on n’affirme pas que le fait soit vrai, on le suppose seulement. Trop tard, le trait est parti. Le premier a dit « peut-être », le second ajoute « c’est probable », puis « plus que probable », le troisième dira « c’est certain » avec un petit geste qui va loin et enfin chacun dira « on l’a vu ».
Puis, pour tout réparer, mais plutôt pour tout gâter, un ami officieux rapporte à l’accusé ce qu’on a dit de lui. Alors, la cible de toute cette médisance, le point de mire des flèches acérées, celui autour de qui gravite ce tourbillon de méchanceté, s’indigne que l’on scrute ses intentions, s’irrite, recherche, remonte à la source du bruit, se plaint et se justifie. Ceux qui ont dit et répété ne veulent pas avoir tort ; de là, explications, disputes, vengeances, et chacun se retire emportant dans le cœur une blessure qui saignera toute la vie.
Cet autre exemple encore. C’est une plaisanterie, faite non pas aux dépens d’un absent mais sur un homme présent qui s’efforce de la prendre en riant. S’il est spirituel, il renvoie la flèche, et, de réponse en réponse, on arrive à des paroles acerbes, amères, ironiques, et chacun veut sortir en vainqueur de la joute oratoire. Si la victime est timide, elle est d’autant plus douloureusement blessée qu’elle ne peut arracher le trait de son cœur pour le renvoyer à son adversaire… Mais quelle peine, quelle colère contenue, quelle haine peut-être fermente dans ce cœur outragé… alors que l’amour n’agit pas avec inconvenance, ne fait pas de mal au prochain1 . Dans la bouche de l’homme parfait, point de fraude, dit le prophète, mais des paroles de grâce2.
Je sais que toutes les médisances, tous les jugements téméraires, toutes les railleries n’auront pas des conséqAuences aussi graves, mais faut-il, à la guerre, que vingt balles portent pour tuer un homme ? Faut-il vingt traits pour faire saigner un cœur ? Ne reste-t-il pas, dans la vie de celui qui ne veille pas sur sa langue, assez de médisance, de raillerie, de paroles vaines et déplacées, de méchanceté peut-être, pour souiller bien des réputations, brouiller bien des amis ?
Qui pourra jamais dire le mal accompli de cette manière ? Personne, parce que la voie souterraine et sombre qu’il emprunte échappe à l’observateur le plus attentif. Il est pratiquement impossible de suivre, de bouche en bouche, une parole prononcée et répétée ; il est surtout impossible d’apprécier le trouble qu’elle apporte dans les esprits, mais chacun peut connaître l’effet que produit sur son cœur une parole nuisible proférée en sa présence puisque, malgré soi, il retient dans sa mémoire une prévention, une certaine répugnance à l’égard de celui qu’on a critiqué, même si ce dernier se conduit honorablement.
Si, de chaque trait lancé, de chaque flèche décochée, il reste quelques traces douloureuses, quelle sera la somme de mal produite par une langue qui, durant une vie entière, aura semé médisances, propos inconsidérés, opprobres, railleries…?
La langue sait pourtant se donner des allures d’innocence : on croit si facilement en faire bon usage. On parle d’un absent, on n’en dit pas de mal, on raconte simplement son histoire. Tout est vrai, rien n’est omis, on l’a vu soi-même. D’ailleurs, tout le monde le sait ; le répéter n’apprend rien à personne… Mais il ne faut pas que cela s’oublie ! Du reste, on reconnaît à l’absent de bonnes qualités, on les cite, on les énumère, on en relève le prix… Mais, ajoute-t-on avec un air de fausse commisération, c’est bien dommage qu’à côté de cela il y ait telle ou telle chose… à part cela, il est bien brave… enfin, qui n’a pas ses défauts ?
« Voyez, c’est comme tel autre qui ne lui ressemble pas à cet égard, mais qui, d’un autre côté, tombe dans des excès contraires ; je l’ai d’ailleurs remarqué, ainsi un jAour… » : ici recommence une nouvelle histoire, encore véritable, citée comme exemple. « Malgré cela, ajoute-t-on, je ne lui en veux nullement, je lui rendrais volontiers service »… Voilà pour l’avenir. Pour le présent, on l’égratigne, on le blesse, on le déchire innocemment…
Oui, si souvent, on ne croit pas faire mauvais usage de sa langue, on donne simplement son avis : « Soyez prudent avec lui », c’est la thèse générale. Mais bientôt, sous un fallacieux prétexte, sans même peut-être s’en apercevoir, on passe au particulier. Alors on ajoute : « Ne faites rien sans prendre vos mesures avec cet homme, il pourrait vous tromper, ou se tromper lui-même… enfin, je ne puis rien vous dire de formel, je ne le connais pas suffisamment, vous le connaissez sans doute mieux que moi, mais enfin, je puis vous donner le conseil de prendre toutes vos précautions. Je parle dans votre intérêt, etc. » Quel est le résultat le plus clair de ces paroles sans fondement ? L’auditeur intéressé écoute avec attention, ses soupçons sont éveillés, sa confiance est détruite pour toujours ; il gardera par devers lui une fausse opinion de celui qui a été l’objet de l’entretien, et les conséquences néfastes des « bienveillantes » mises en garde se prolongeront pour une durée inestimable.
Mais pourquoi cette démangeaison d’offrir de tels conseils ? Un motif s’impose : le plaisir de se faire écouter, de se donner une importance capitale dans les relations entre amis.
Pendant ces discours, il y a tel auditeur qui écoute seulement, qui approuve d’un sourire. Par complaisance, il ajoute un mot à la conversation, puis y abonde en citant aussi son trait. Cet autre commence par décerner un éloge pompeux pour être plus crédible quand il lancera sa critique : il pourra ainsi s’attribuer le mérite de l’impartialité. Quelqu’un citera un tort, mais ce sera pour l’excuser ; un autre parlera de ses propres défauts afin de pouvoir, en toute liberté, énumérer ceux des autres.
Il faudrait des pages pour commenter tout le mal que la langue peut faire. Pour pasAser le temps (alors que Dieu dit de le racheter), quelqu’un plaisante ; un second approuve, retient la plaisanterie pour pouvoir, le cas échéant, la resservir avec autant de succès. Les manifestations de ce mal sont innombrables. Sans remords, on prend un secret plaisir à répandre le venin de la calomnie sur ses frères, tout en sachant que « si quelqu’un pense être religieux et qu’il ne tienne pas sa langue en bride, le service religieux de cet homme est vain ».3
Si un serpent venimeux échappe au contrôle de celui qui sait le charmer, le reptile mord4 . Le charme qui nous empêchera de mordre, nous chrétiens, c’est l’action puissante du Saint-Esprit.
On peut mettre le mors aux chevaux pour les faire obéir5 . Toutes les espèces de bêtes sauvages ont été domptées par les hommes, mais pour la langue, personne n’est parvenu à la dompter ni à l’asservir6 . Aussi nous faut-il remonter à la source : la Parole de Dieu, toujours pénétrante, nous dévoile les origines secrètes du vice de la médisance. Elle déclare en effet : « De l’abondance du cœur, la bouche parle »7 , et aussi : « De toutes les paroles oiseuses que les hommes auront prononcées, ils devront rendre compte au jour du jugement. »8 Quel sera donc le remède à l’abondante méchanceté de nos cœurs ? La crainte de Dieu, sa Parole, son Esprit, son amour dans nos cœurs :
– La crainte de déplaire au Dieu qui nous a sauvés, nous a rachetés, nous a donné une telle part et une telle espérance ;
– Sa Parole, qui nous fournit de si puissants correctifs quand elle trouve de l’écho dans nos cœurs : « Tu n’iras pas ça et là, médisant parmi ton peuple »9 ;
– Son Esprit qui nous conduit dans toute la vérité10 ;
– Son amour, qui nous porte à donner notre vie pour les frères11 .
Je rappellerai ici un trait bien connu de l’histoire d’Ésope, le fabuliste grec. Son maître Xanthus lui ayant donné l’ordre d’acheter au marché ce qu’il y aurait de meilleur et rien d’autre, Ésope n’acheta que des langues qu’il fit accommoder à toutes les sauces. Les convives ne tardèrent pas à s’en dégAoûter : « Hé, qu’y a-t-il de meilleur que la langue ? » répondit Ésope, « c’est le lien de la vie civile, la clé des sciences, l’organe de la vérité et de la raison. » « Eh bien, » reprit Xanthus, qui prétendait l’embarrasser, « achète-moi demain ce qu’il y a de pire. » Le lendemain, Ésope ne fit encore servir que des langues, disant que la langue est la pire chose qui soit au monde : « C’est la mère de tous les débats, la nourrice de tous les procès, la source des divisions et des guerres ; si elle est l’organe de la vérité, c’est aussi celui de l’erreur et, qui pis est, de la calomnie. » Ces paroles, prononcées 500 ans avant J.C., sont toujours d’application et sont restées célèbres dans le monde entier.
* * *
Mais quittons ce pénible sujet de la médisance, et considérons ensemble le bien immense qu’a fait et que peut faire ce petit membre. La bénignité (indulgence, douceur, condescendance affectueuse) de la langue est un arbre de vie 12 .
L’Épître de Jacques fait trois comparaisons à propos de la langue (3.4-6,11-12) : d’abord le très petit gouvernail d’un navire, ensuite un petit feu qui allume une grande forêt et enfin une fontaine qui fait jaillir par la même ouverture le doux et l’amer. Le petit gouvernail amène le navire au port avec sa cargaison, si précieuse pour l’humanité, malgré tous les éléments contraires. C’est l’image du bien que la langue peut faire lorsqu’elle est bridée et que nous sommes rendus capables de gouverner notre manière de parler par les principes si précieux de la nouvelle nature. Par elle, nous bénissons le Seigneur et Père, et nous savons que la louange est bienséante, chose agréable à Dieu, qualifiée de bonne13 . Par elle aussi, ceux qui craignent l’Éternel dans un temps particulièrement mauvais, relaté dans le livre de Malachie, parlent l’un à l’autre et captent ainsi l’attention du grand Dieu qui a fait les cieux et la terre, de telle sorte que l’Écriture déclare : « Il a été attentif.» 14
Par la langue encore, nous nous consolons l’un15 l’autre en nous occupant du glorieux retoAur du Seigneur Jésus. Par elle, nous nous édifions les uns les autres sur notre très sainte foi16 et ainsi, encouragés, nous poursuivons la course qui est devant nous. Par elle, nous pouvons faire connaître l’œuvre merveilleuse de notre Sauveur, nous pouvons nous exciter l’un l’autre à l’amour et aux bonnes œuvres17 , remuer les cœurs, de telle sorte que la personne du Seigneur Jésus nous devienne toujours plus sensible. Ce faisant, nous acquerrons un titre qu’on ne rencontre pas souvent dans les Écritures : « Fils de consolation.18 » Par elle, nous pouvons ramener un égaré dans le bon chemin, sauver une âme de la mort et couvrir une multitude de péchés19 . Par elle aussi, nous pouvons consoler la veuve et soutenir l’orphelin ; nous pouvons dire des choses précieuses sur la personne de Christ lorsque notre langue revêt le style d’un écrivain habile20 .
Par elle aussi nous pouvons parler de Celui qui a été crucifié, amener ainsi une âme à la connaissance de ce grand salut et permettre au ciel de se réjouir. Par elle encore, nous pouvons éclairer nos frères retenus ou asservis dans des mouvements d’erreur. Par elle toujours, nous pouvons bénir ceux qui nous persécutent21 et, service si précieux, c’est par elle que nous prions.
L’éternité livrera tous les secrets résultats de ce travail de la prière, de l’intercession et de la supplication. Les assemblées auront été soutenues, gardées, richement douées de dons précieux parce que la langue aura parlé de ces sujets devant Dieu. De graves difficultés auront été surmontées, non pas parce que l’on aura discuté devant les intéressés, mais parce que, dans le secret, on les aura soumises à Dieu. Qui pourra révéler, sinon le tribunal de Christ, tout le bien que la langue, sous l’action puissante du Saint-Esprit, aura fait dans ce monde ?
L’Ecclésiaste déclare : « Les paroles de la bouche du sage sont pleines de grâce »22 , ou, en quelque sorte, sèment le salut. Le divin Modèle pouvait dire : « Il m’a donné la langue des savants, pour que je sache soutenir par une parole celui qui est las »23 , et c’est ce qu’il fait le long du chemin, disant aux uns et aux autres : « Ayez bon courage. »
La langue peut encore être employée pour chanter les louanges du Seigneur et ainsi permettre à la joie selon Dieu de s’extérioriser : « Si quelqu’un est joyeux, qu’il chante des cantiques. »24
Dieu est l’auditeur attentif de toutes nos conversations25 . Qu’il nous accorde la grâce d’y songer davantage et, si nous sommes attentifs à nos paroles, il nous bénira : la chose est certaine. Car « celui qui garde sa langue garde son âme de la détresse. »26
1 1 Cor 13.5
2 És 53.9 ; Luc 4.22
3 Jac 1.26
4 Eccl 10.11
5 Jac 3.3
6 Jac 3.7-8
7 Luc 6.45
8 Mat 12.36
9 Lév 19.16
10 Jean 16.13
11 1 Jean 3.16
12 Prov 15.4
13 Ps 147.1
14 Mal 3.16
15 1 Thes 4.18
16 Jude 20
17 Héb 10.24
18 Cf. Act 4.36
19 Jac 5.20
20 Ps 45.2
21 Luc 6.28
22 Ecc 10.12
23 És 50.4
24 Jac 5.13
25 Ps 139.4
26 Prov 21.23
L’auteur, né en 1909 et décédé en 1986, a exercé plusieurs ministères, dont ceux de pasteur et d’enseignant aux Institut Biblique de Nogent-sur-Marne et à la Faculté de Théologie évangélique de Vaux-sur-Seine. Cet article, paru initialement dans la revue Ichthus (1984, no 127), 25 ans avant la crise économique que nous connaissons, est un complément utile et fort actuel en marge des passages de l’Épître de Jacques consacrés au thème de la richesses et de la pauvreté. |
Il est très important pour le chrétien de savoir ce qu’il doit faire de son argent, surtout si par « argent » nous parlons de tout ce qu’il possède : ses biens meubles et immeubles. En effet, nous vivons dans une société où la place d’une personne dépend, de façon considérable, de son argent. C’est un problème actuel pour nous qui sommes dans un système « capitaliste », mais c’est un problème qui a toujours existé, car malgré ce qu’affirment certains démagogues, l’homme a toujours eu le sens de la propriété. D’ailleurs c’est un sens que la plupart des animaux possèdent aussi. Les hommes et les femmes ont toujours eu des objets leur appartenant. Ceux qui vivaient dans les sociétés les plus simples avaient des ornements : des colliers ou des bagues. Dans les sociétés plus compliquées, ils ont eu des troupeaux et des esclaves, et puis des vergers et des maisons. Et puis le commerce est venu remplacer les échanges et a permis à certains hommes d’amasser du métal : de l’or ou de l’argent qui représentait la possibilité d’acheter ce qu’on désirait. L’histoire nous apprend que ce n’est pas seulement l’habileté qui enrichit le commerçant mais aussi la ruse ou le mensonge. Et le guerrier par sa violence peut aussi entasser le butin chez lui. Dans ce monde où il est placé, que doit faire le chrétien pour acquérir et conserver les biens qu’il désire ? Tournons-nous vers la Bible pour résoudre ce problème.
Ancien Testament
Dans l’Ancien Testament, la loi de Moïse, résumée dans les Dix Commandements donnés par Dieu sur le Sinaï, établit le droit de propriété de façon rigoureuse. Nous trouvons deux commandements sur dix qui protègent la propriété : « Tu ne déroberas pas », « Tu ne convoiteras pas le bien de ton prochain, quel qu’il soit ». On peut y assimiler celui qui condamne l’adultère.
L’Ancien Testament dans son ensemble considère que la richesse est une bénédiction de Dieu. Nous le voyons dans le cas d’Abraham, de Jacob, de Job, de Salomon, et de beaucoup d’autres. Mais les lois d’Israël sont ainsi faites par Dieu pour que les richesses ne s’accumulent pas chez la même personne. La terre, par exemple, une des formes principales de la richesse, appartient à Dieu qui la répartit équitablement entre des familles, selon leurs besoins en location. Dieu dit : « Le pays est à moi et vous êtes chez moi comme des hôtes étrangers… » (Lév 25.23) La Bible condamne le péché du roi Achab qui veut prendre à Naboth sa vigne (1 Rois 21). Ce dernier dit au roi : « Je ne te donnerai pas l’héritage de mes pères ! »
Pour bien montrer que l’homme n’est qu’un locataire de Dieu, il doit lui donner un pourcentage de tous ses revenus, qu’ils soient en argent ou en nature. C’est la dîme. En outre, les personnes que l’on possédait, enfants ou esclaves, devaient être « rachetées » à Dieu (Ex 13 ; No 18.15). Le droit de propriété en Israël est donc tempéré par l’affirmation sans cesse répétée que Dieu est le détenteur de toute richesse.
Malgré ces lois, la société se transforma en Israël au point que la richesse s’accumula dans les mains de quelques hommes riches et que les pauvres perdirent le peu qu’ils avaient. Les prophètes s’élevèrent alors vivement contre les richesses égoïstes : – « Ils ont confiance en leurs biens / Et se félicitent de leur grande richesse. / La libération de leur âme est chère / Et n’aura jamais lieu. » (Ps 49.7,9)
– « Je le sais, vos crimes sont nombreux / Et vos péchés énormes. / Vous opprimez le juste, vous le rançonnez, / Et vous évincez le pauvre… » (Amos 5.12)
– « Je m’approcherai de vous pour juger… / Ceux qui retiennent le salaire de l’employé, / Qui oppriment la veuve et l’orphelin… » (Mal 3.5)
Nouveau Testament
Certains commentateurs pensent que le Nouveau Testament offre un autre enseignement. Le professeur Jacques Ellul, par exemple, dit que l’Ancien Testament voit l’argent comme une bénédiction alors que le Nouveau Testament y voit une malédiction. C’est inexact. L’enseignement des deux est le même. Seulement, au temps de Jésus, la société a évolué, et la Paix Romaine assure la sécurité du commerce. De grosses fortunes ont pu se constituer, le niveau de vie s’est considérablement élevé, et l’écart entre les pauvres et les riches s’est élargi. À côté des gens très riches, une masse de pauvres souffre dans la misère.
Jésus est particulièrement sévère pour les riches. Dès sa naissance, il est du côté des pauvres. Sa mère, Marie, annonce que Dieu va « renvoyer les riches à vide. » (Luc 1.53) Il ne choisit pas de naître dans un palais mais comme un pauvre parmi les plus démunis.
Pendant son ministère, à maintes reprises, le Christ condamne les riches. Il déclare qu’un chameau passe plus facilement par le trou d’une aiguille qu’un riche par la porte du Royaume de Dieu (Mat 19.23). Il dit : « Malheur à vous, riches, car vous avez votre consolation. » Il raconte la parabole du riche insensé (Luc 12.20) et l’histoire du mauvais riche et de Lazare (Luc 16.19-31). Il parle de la « séduction des richesses qui étouffe la parole de Dieu » (Mat 13.22).
Les apôtres, à leur tour, prendront la même attitude. Ainsi Jacques dira : « Le riche se flétrira dans ses entreprises. » (Jac 1.11) « A vous maintenant, les riches ! Votre richesse est pourrie, vos vêtements sont mités. Votre or et votre argent son rouillés ; et leur rouille s’élèvera en témoignage contre vous et dévorera votre chair comme un feu. Voici, le salaire des ouvriers qui ont moissonné vos champs et dont vous les avez frustrés crie… » (Jac 5.1-6)
On pourrait citer bien d’autres passages, mais nous ne devons pas commettre l’erreur de penser que la richesse est un péché en soi et la pauvreté une vertu, aux yeux de Jésus et de ses disciples. Il n’y a pas de condamnation systématique de la propriété. Jésus a raconté des paraboles où l’homme riche est l’image de Dieu le Père, par exemple dans l’histoire de l’enfant prodigue, dans celle des ouvriers loués à différentes heures, ou dans celle des mines et des talents. Le Bon Samaritain a de l’argent et s’en sert bien. Jésus ne condamne pas le fait de chercher un trésor ou une perle rare. Il porte une robe sans couture, un vêtement de luxe, il va manger chez les publicains, qui sont hommes d’argent ; il loge chez Zachée.
Il n’y a pas de différence fondamentale entre l’Ancien et le Nouveau Testaments ; l’un et l’autre mettent en garde contre le danger que représente la richesse. D’abord parce que la richesse fait naître un dangereux sentiment de sécurité.
La fortune est une ville forte pour le riche (Prov 10.15). On a l’impression d’être abrité à l’ombre de l’argent (Eccl 7.12). L’argent semble répondre à tout (Eccl 10.19). On aime à croire : « Je suis riche, je n’ai besoin de rien… » (Ap 3.17)
Ensuite la richesse donne l’impression qu’on peut tout acheter, que l’on est tout-puissant. À tort : « Que ton argent périsse avec toi, toi qui as cru que le don de Dieu s’achetait à prix d’argent ! » (Act 8.18)
Enfin la richesse donne soif d’en avoir davantage, même par des moyens malhonnêtes. Mais « …quand les richesses s’accroissent, n’y attachez pas votre cœur. » (Ps 62.11b) La Bible nous met donc en garde contre l’amour de l’argent. Attention ! cet amour, nous pouvons l’éprouver même si notre portefeuille est vide.
« L’amour de l’argent, c’est la racine de tous les maux. » (1 Tim 6.10) « Ne vous livrez pas à l’amour de l’argent. » (Hébr. 13.5) Ne nous confions pas dans les biens que nous avons, comme le riche insensé. La solution n’est pas de dilapider, de gaspiller l’argent que nous avons, comme le fils prodigue (Luc 15). La solution est d’administrer, de gérer les biens qui appartiennent à Dieu en réalité. Nous sommes tous dans la situation de serviteurs qui ont reçu plus ou moins de talents de leur Maître et doivent les administrer sagement (Mat 25.14-30). Ceux qui en ont reçu beaucoup doivent veiller particulièrement à les gérer selon la volonté de leur Maître, sachant qu’ils auront des comptes à rendre.
Aujourd’hui
Pratiquement, que devons-nous faire pour obéir à la Parole de Dieu ?
Nous devons savoir que l’argent est une nécessité qu’il faut utiliser sans lui permettre de devenir une obsession. Je crois qu’il faut faire nôtre la prière de Proverbes 30 : « Ne me donne ni pauvreté, ni richesse. » (v. 8) Méfions-nous du pouvoir de séduction de l’argent.
Surtout restons toujours conscients du fait que notre argent appartient à Dieu, même si nous croyons l’avoir « gagné ». Il est un père tendre et miséricordieux qui veut notre joie et notre bonheur. Il sait que nous avons besoin de détente et de loisir. Toutefois, méfions-nous des efforts de notre société de consommation qui nous pousse à gaspiller notre argent, à tout dépenser sans compter. Nous sommes les gérants des biens de Dieu, responsables devant notre Maître des biens qui nous ont été confiés. Demandons-lui la sagesse qui nous manque pour être fidèles, et nous n’aurons pas à rougir quand nous devrons lui rendre nos comptes, et que nous l’entendrons dire : « Cela va bien, bon et fidèle serviteur, entre dans la joie de ton Seigneur. »
La santé et la maladie font partie intégrante de notre existence. Pourtant, nous redoutons généralement la souffrance, et le cas échéant, cherchons à guérir au plus vite. Du début à la fin de l’A.T., la maladie est un thème fréquent (9 mentions dans le Second livre des Rois !). Il en est de même dans le N.T. (17 guérisons opérées par Jésus dans le seul Évangile selon Luc). Mais tous ces récits ne font pas de la Bible un ouvrage de médecine : Jésus n’a jamais promulgué ni une doctrine ni une pratique en matière de procédés thérapeutiques ! Et nous serions bien empruntés pour établir des méthodes curatives sur la base des guérisons apostoliques mentionnées dans les Actes (ch. 3, 5, 8, 19, 28).
Dans les épîtres, la maladie et la guérison n’occupent pas une très large place. Mais à l’heure qu’il est, on assiste à une surenchère dans certaines sphères du monde évangélique où la guérison est perçue comme un droit fondamental du chrétien. Dès lors, la confusion et les conflits d’opinion vont bon train : est-il normal de tomber malade ? faut-il toujours espérer la guérison ? La palette de réponses est variée.
Le sujet mérite notre réflexion. Pour limiter notre étude, nous nous focaliserons sur Jacques 5.13-18, le seul passage des Épîtres qui traite spécifiquement du sujet et qui suggère le chemin à suivre dans le traitement d’un certain type de maladie. Approchons ce texte avec le maximum d’objectivité et par le menu, en écoutant Jacques, le demi-frère de Jésus, qui fut un responsable important de l’église de Jérusalem.
Le texte dans la traduction Louis Segond, Nouvelle édition de Genève 1979
13. Quelqu’un parmi vous est-il dans la souffrance ? Qu’il prie. Quelqu’un est-il dans la joie ? Qu’il chante des cantiques.
14. Quelqu’un parmi vous est-il mala¬de ? Qu’il appelle les anciens de l’église, et que les anciens prient pour lui, en l’oignant d’huile au nom du Seigneur ;
15. la prière de la foi sauvera le malade, et le Seigneur le relèvera ; et s’il a commis des péchés, il lui sera pardonné.
16. Confessez donc vos péchés les uns aux autres, et priez les uns pour les autres, afin que vous soyez guéris. La prière agis¬sante du juste a une grande efficacité.
17. Élie était un homme de la même na¬ture que nous : il pria avec instance pour qu’il ne pleuve point, et il ne tomba point de pluie sur la terre pendant trois ans et six mois.
18. Puis il pria de nouveau, et le ciel donna de la pluie, et la terre produisit son fruit.
Voici ce que révèle l’analyse détaillée de ce passage, à partir des textes originaux.
Verset 13
« est-il dans la souffrance » : litt. souffre-t-il (le verbe signifie : être dans une mauvaise situation, être réduit aux extrémités, cf. 2 Tim 2.3,9 ; 4.5). Le terme a un sens large.
« qu’il prie » : La solution aux contrariétés, aux persécutions, aux problèmes est simplement la prière. Et pour celui qui est dans la paix de la joie, qu’il chante et adore avec louanges !
Verset 14
« est-il malade » : Le verbe utilisé (être faible, malade) a donné l’adjectif « asthénique », qui indique un manque de force, de vitalité physique ou psychique, un état de dépression, de faiblesse (Petit Robert). Jacques fut conduit à employer ce mot pour décrire un chrétien réduit à un état continuel de fatigue et de faiblesse, surtout physique et/ou psychique (cf. 1 Cor 2.3 ; 15.43 ; 2 Cor 10.10 ; Héb 4.15 ; 5.2 ; 7.28). Ce verbe est employé 20 fois (surtout dans les Évangiles et dans les Actes) pour évoquer la faiblesse, la maladie physique (sans précision quant à la nature du mal), et au moins 12 fois pour désigner ceux qui sont faibles, affaiblis psycho-spirituellement (Rom 4.19 ; 8.3 ; 14.1,2,21 ; 1 Cor 8.9,11,12 ; 2 Cor 12.10 ; 13.3,4,9). Une situation psycho-spirituelle asthénique d’abattement engendre souvent apathie et fragilité physiques. Jacques n’a utilisé ni le terme maladie au sens physique dans la majorité des réf. du N.T., ni paralysie. Le contexte doit nous servir d’arbitre pour opter entre le sens de maladie physique grave, ou de faiblesse spirito-psycho-somatique. Nous penchons pour cette dernière acception, forts :
– des douze références parallèles citées ci-dessus,
– de la mention d’Élie dans les versets 17 et 18 (cf. 1 Rois 18-19) : celui-ci n’a pas été malade physiquement, mais plutôt psychiquement et spirituellement, pour un temps limité.
« qu’il appelle les anciens de l’Église » : L’« asthénique » lui-même prend l’initiative (et non ses proches) d’appeler les anciens. Deux titres sont donnés aux hommes qui occupaient cette fonction : le premier désigne un homme d’un certain âge ayant acquis une vaste expérience de la vie, sachant parler et agir avec sagesse ; le second, littéralement « évêque », s’applique à celui qui surveille, administre (cf. 1 Tim 3.1-7 ; Tite 1.5-9 ; Act 20.17,28 ; Phil 1.1). Le titre d’anciens désigne les membres d’un collège de dirigeants aux qualités dûment reconnues .
« en l’oignant d’huile » : Le verbe « oindre » n’est pas celui utilisé pour faire une onction sacrée ; il veut dire : frictionner, graisser, enduire, étaler ou appliquer de l’huile sur le corps pour le détendre, le renouveler ou soigner des plaies (cf. Luc 10.33-34). L’huile d’olive (avec son action apaisante) et le vin (comme désinfectant) comptaient parmi les agents thérapeutiques les plus courants de la médecine populaire. Cette onction est donc de nature médicale ; elle suggère que les anciens étaient autorisés à admettre l’utilisation de médicaments en parallèle à leur secours spirituel et fraternel. La recommandation de Jacques n’a pas toujours été comprise ainsi : la pratique actuellement très répandue qui consiste à verser quelques gouttes d’huile sur la tête ou sur le front du malade en lui imposant les mains de manière rituelle ne me semble pas suivre son enseignement dans ce cas précis.
« au nom du Seigneur » : En prononçant le nom du Seigneur, les anciens reconnaissent publiquement que leur acte et leur autorité honorent la volonté du Seigneur, et non la leur. Prier « au nom du Seigneur » ne tient ni de la magie, ni du ritualisme. De plus, ce n’est pas l’énonciation de ces mots qui va opérer la guérison. « Au nom du Seigneur, je te guéris » n’est pas une formule dont la récitation mécanique va automatiquement être accompagnée d’un miracle.
Verset 15
« la prière de [la] foi » : Chacun des anciens dûment qualifiés doit avoir confiance que le Seigneur va guérir l’« asthénique ». Au préalable, ils vont se renseigner pour bien saisir le fond de la situation, avant de se lancer dans cette entreprise de si haute importance. Il se peut que les anciens, discernant l’état moral et spirituel du demandeur, concluent que le Seigneur a un autre plan que la guérison (cf. 1 Cor 5 ; 2 Tim 4.20). La « prière » (e??? : requête basée sur un besoin légitime) « de [la] foi » est exigée des anciens entourant le malade. Trop souvent des guérisseurs itinérants, lors de grandes réunions, proclament leur capacité de guérir tout visiteur de tout mal. Lorsqu’une guérison ne s’effectue pas, on déclare : « C’est la faute du malade qui n’a pas assez de foi ! » … et tout le monde s’en contente. Or, Jacques précise que ce sont les anciens locaux qui doivent manifester la foi nécessaire à la guérison (cf. Marc 2.3-5). Toute la scène se passe en privé chez le faible-malade, pas en plein air devant des milliers de gens « traités » à la chaîne. Notons bien que c’est la « prière de [la] foi » et non l’onction qui agit efficacement !
« sauvera » : Le sens étymologique du verbe est « délivrera, émancipera » l’affaibli de son état de faiblesse, de fatigue ; ce contexte n’a rien à voir avec l’acte du salut éternel. Le Seigneur va le relever, le restaurer à sa vigueur antérieure.
« le malade » : C’est ici l’adjectif verbal substantivé du verbe ??µ?? (être fatigué ; être souffrant), employé ailleurs dans le N.T. uniquement en Héb 12.3-4 et Apoc 2.3, où il s’agit de la fatigue, de la lassitude, de l’épuisement résultant des assauts constants du monde, des incroyants ou des faux frères pour faire tomber l’enfant de Dieu. Ces assauts sans fin sapent la résistance jusqu’à produire la lassitude, le manque de force pour résister. Un frère affligé d’un tel burn-out a besoin de l’aide directe des anciens.
« et s’il a commis des péchés » : C’est une éventualité ; dans le cas où il serait accablé par le poids de péchés particuliers, il est bon qu’il les confesse devant Dieu, après en avoir parlé aux anciens.
« il lui sera pardonné » : Celui qui est devenu captif d’un péché réitéré, cause de son affaiblissement, sera pardonné après s’être repenti par une confession sincère. Quelle promesse de valeur (cf. v. 16) !
Verset 16
« Confessez donc vos péchés les uns aux autres » : Attention, la confession du péché, lorsqu’elle est nécessaire, fait partie intégrante du processus de guérison dans le cas de ce verset, afin que le péché soit pardonné et que le malade soit rétabli. On peut penser que cette confession a lieu après l’appel aux anciens. Voici le déroulement possible de la démarche du malade : il appelle les anciens, expose sa condition psycho-somatique déficiente, reconnaît (ou non, s’il n’a rien sur la conscience) qu’une habitude de pécher l’a amené dans sa condition ; un adjuvant médical est utilisé si nécessaire, tandis que tous prient, chacun à son tour, pour le malade, mais aussi pour soi-même, car chacun se reconnaît pécheur. Les anciens se souviendront probablement de « petits » péchés d’attitude intérieure, de tel ou tel propos déplacé, de telle décision égoïste, à avouer au Seigneur, afin qu’eux aussi soient purifiés et fortifiés dans leur être tout entier, en vue de pouvoir prier avec foi. Notons que tous les noms et les verbes dans ce verset sont au pluriel ! Tous viennent dans l’humilité, prêts à admettre leurs lacunes et leurs manquements les uns devant les autres. L’orgueil et l’attitude de supériorité des anciens, face au frère en piteux état, sont formellement exclus. Les anciens n’ont en eux-mêmes aucune puissance inhérente pour guérir, ils sont eux aussi pécheurs par nature. L’humilité et la compassion authentiques sont donc de mise.
« afin que vous soyez guéris » : Jacques affirme que la confession et la prière par tous sont les clefs de la guérison de l’homme asthénique. Une confession publique ou privée de péchés qui ne serait pas authentique n’est qu’une comédie, une honte. Mieux vaut ne rien dire du tout ou rester à la maison si l’honnêteté n’y est pas. Par ailleurs, il n’y a rien dans la procédure décrite par Jacques qui ressemblerait à une séance de guérisons à la chaîne sans confession explicite des péchés, et sans considération à l’égard d’un éventuel appui médical.
« la prière agissante du juste a une grande efficacité » : Les mots s’accumulent avec force. D’abord « la prière » (le mot ici diffère du v. 15 et désigne une requête, une supplication, une intercession pour un besoin particulier), puis l’adjectif verbal « agissante » (tiré du verbe e?e???? : être efficace), puis le mot « juste » (qui désigne tout individu justifié en Christ au moment de sa conversion, « en règle » avec le Seigneur), et finalement, l’expression « a une grande efficacité » (a beaucoup de puissance, de robustesse) : voilà un assemblage plein de promesses et d’encouragement.
Versets 17, 18
Jacques termine ses instructions inspirées en prenant un exemple tiré de la vie d’Élie (1 Rois 17-18). Le prophète est très affaibli dans sa marche avec l’Éternel à un moment crucial de sa vie. Toutefois, il a vu intervenir la main de l’Éternel avec puissance en réponse à sa foi, exprimée vigoureusement dans une simple prière. Son exemple replace chaque croyant devant la réalité centrale de tout notre texte, mais aussi de toute notre marche chrétienne : si nous faisons confiance à notre Dieu et Sauveur, si nous sommes intègres devant lui, il y a en lui pleine réserve de miséricorde, de puissance et de sagesse pour répondre à tous nos besoins, à toute détresse, et pour nous relever si nous sommes tombés. Dieu peut nous secourir sans médiation humaine, mais il peut aussi nous diriger vers ceux à qui il a confié la responsabilité de diriger notre église locale. Dans ce dernier cas, c’est Jacques qui nous dévoile la marche à suivre.
En guise de post-scriptum :
Notre article laisse volontairement dans l’ombre toute une série de situations auxquelles les versets de Jacques 5 n’apportent pas de réponse explicite. Par exemple : Qu’en est-il des bébés malades ? des personnes atteintes d’un cancer incurable ou de la maladie d’Alzheimer ? des infirmes de naissance ? etc. Il est évident que la question de la santé, de la maladie et de la guérison comporte de nombreux aspects qui mériteraient une étude beaucoup plus approfondie. Des médecins chrétiens ont du reste écrit d’excellents ouvrages à ce propos.
Qu’il nous suffise ici de rappeler l’exemple de l’apôtre Paul, par le moyen duquel Dieu accomplit des guérisons spectaculaires (jusqu’à une résurrection !). Affligé en lui-même d’une douloureuse (et peut-être rebutante) maladie chronique, il pria à plusieurs reprises pour en être délivré. Sans résultat. Mais Dieu lui fit comprendre la raison de ce non exaucement, et lui révéla ce grand secret : « Ma grâce te suffit, car ma puissance s’accomplit dans la faiblesse. » (cf. 2 Cor 12.6-10)
Cette méditation est extraite du recueil « Courants d’eau pour mon âme », avec l’aimable autorisation des éditeurs (Éditions Europresse, BP 505 – 71322 Chalon-sur-Saône Cedex – France, 2003). Elle figure en date du 7 octobre. |
« Mes frères, si quelqu’un parmi vous s’est égaré loin de la vérité, et qu’un autre l’y ramène, qu’il sache que celui qui ramènera un pécheur de la voie où il s’était égaré sauvera une âme de la mort et couvrira une multitude de péchés. » (Jac 5.19,20)
Le pauvre rétrograde tombe souvent dans l’oubli.
Un membre de l’église a terni sa profession de foi ; l’église l’a excommunié et il est désormais compté « comme un païen et un publicain ». Je connais des hommes puissants dans le ministère de l’Évangile qui sont tombés dans le péché il y a une dizaine d’années. Et aujourd’hui encore, dès que nous en parlons, on répond : « Mais voilà ce qu’ils ont fait il y a dix ans. »
Les chrétiens devraient avoir honte de garder rancœur pendant si longtemps. Oui, faisons preuve de plus de précaution dans nos contacts, mais garder l’opprobre sur un frère pour la faute qu’il a commise il y a si longtemps est contraire à l’esprit de l’apôtre Jean qui accompagnait Pierre trois jours après que celui-ci eut renié son Maître avec force jurons et imprécations.
Il est de bon ton aujourd’hui, si quelqu’un chute dans le péché, de dire : « C’est un homme mauvais, laissons-le de côté1 . » Mais n’est-ce pas précisément une raison pour aller d’autant plus à sa recherche ? Imaginons que le pauvre homme n’ait jamais été enfant de Dieu, qu’il n’ait jamais vraiment connu la vérité ? N’y a-t-il pas davantage de raisons de le rechercher ? Je ne comprends pas cet excès d’orgueil qui empêche d’aller à la recherche du pire des pécheurs. Plus le cas est désespéré, plus nous avons de raisons de le faire.
Mais supposons que l’homme soit enfant de Dieu et que vous l’ayez rejeté. Souvenez-vous qu’il est votre frère. Il appartient à Christ tout autant que vous. Il est justifié et possède la même justice que vous. Si, après qu’il a péché, vous le méprisez, vous méprisez en fait votre propre Maître. Prenez garde. Vous aussi pouvez être tenté et chuter un jour !
1 Il est évident que l’attitude inverse, consistant à tolérer dans l’église des propos ou des comportements contraires à l’enseignement de la Parole de Dieu, n’est pas acceptable non plus. De nos jours, elle est malheureusement aussi répandue que la dure absence de miséricorde. (NDLR)
Chronique de livre
Ce commentaire de l’Épître de Jacques est une traduction (version originale : Be mature, Cook Communications Ministries, 4050 Lee Vance View, Colorado Springs, USA, 1978) parue aux éditions BLF Europe, Rue de Maubeuge, 59164 Marpent, France, 2006. L’ouvrage fait partie de la collection « Soyez » qui s’efforce de couvrir tout le Nouveau Testament, chaque commentaire portant un titre analogue. Par exemple : Soyez épanouis – Colossiens ; Soyez justes – Romains ; Soyez sages – 1 Corinthiens, etc. Warren W. Wiersbe est un pasteur, professeur, auteur et conférencier de renommée internationale. |
a) Le motif
Warren W. Wiersbe nous dévoile d’entrée de jeu le motif profond de son livre :
« Si nous vieillissons tous, nous ne grandissons pas tous en maturité. Il existe une grande différence entre l’âge et la maturité. Dans l’idéal, nous devrions grandir spirituellement à mesure que nous avançons en âge. Mais trop souvent, la réalité est différente. Les problèmes qui résultent de l’immaturité se retrouvent dans notre vie personnelle, familiale et d’église. Comme pasteur, je constate qu’elle est à l’origine de la majorité des problèmes. Si les chrétiens croissaient normalement, ils pourraient devenir des vainqueurs plutôt que des victimes. » (Préface, p. 7)
b) Le but de l’Épître L’Épître
de Jacques s’attaque à cette anomalie. Le mot « parfait », plusieurs fois utilisé dans cette lettre, doit cependant être bien compris. S’appliquant à l’état idéal du croyant (« afin que vous soyez parfaits et accomplis, et qu’il ne vous manque rien », 1.4b ; cf. Héb 6.1), ce terme n’indique pas une sorte d’infaillibilité permanente réservée à une élite : « Quand [Jacques] parle d’un homme parfait, il ne parle pas d’un homme sans péché, mais d’un homme adulte, mature et équilibré. » (p. 15)
c) Démarche générale
Se conformant à la démarche de Jacques, Warren Wiersbe prend soin, avant d’entrer dans le vif des problèmes pratiques, éthiques ou relationnels, de rappeler qu’il est primordial de se souvenir d’où proviennent nos ressources : de Dieu (1.5,17,18) et de sa Parole révélée (1.22-25). C’est là que résident la force et le courage d’agir. Au chrétien qui sait qu’il manque de maturité, mais désire croître spirituellement, l’auteur rappelle en effet dès les premières pages l’importance d’user du « miroir » de la Parole de Dieu, et de la pratiquer avec persévérance. C’est la Parole qui doit nous sert de jauge, non la comparaison avec d’autres croyants (p. 20).
Ceci étant posé, Warren Wiersbe excelle à nous rendre désirable la pleine bénédiction découlant de l’obéissance à la Parole, et de la dépendance du « Père des lumières » (1.17). L’auteur parvient à nous persuader qu’une vie spirituelle en progrès est possible pour tous, qu’elle est belle et hautement désirable (alors que le diable cherche toujours à nous convaincre du contraire), et que se soumettre à Dieu, c’est faire fuir l’ennemi, pour voir Dieu s’approcher de nous et pour goûter au vrai contentement (cf. 4.6-10).
d) Plan et méthode
Warren Wiersbe s’attache à décrire, dans divers domaines de notre existence, ce que maturité veut dire. Voici comment il énumère les principales caractéristiques du croyant mature (p. 16) . En parallèle, dans la colonne de droite, nous indiquons les titres des chapitres du commentaire correspondant à cette liste.
Le croyant mature… | |
I. est patient dans l’épreuve (chapitre 1) 1.Difficultés extérieures : 1.1-12 2. Tentations intérieures : 1.13-27 | Ch. 1 Il est temps de grandir Ch. 2 Transformer les épreuves en triomphes Ch. 3 Comment faire face à la tentation Ch. 4 Cessez de vous faire des illusions |
II. met en pratique la vérité (chapitre 2) 1. La foi et l’amour : 2.1-13 2. La foi et les œuvres : 2.14-26 | Ch. 5 L’homme riche et l’homme pauvre Ch. 6 Fausse foi Ch. |
III. contrôle sa langue (chapitre 3) 1. Exhortation : 3.1-2 2. Illustration : 3.3-12 (Six métaphores sur la langue) 3. Application : 3.13-18 | Ch. 7 Un fauteur de trouble si petit… Ch. 8 Où trouver la sagesse |
IV. sème la paix et non la discorde (chapitre 4) 1. Trois guerres : 4.1-3 2. Trois ennemis : 4.4 -7 3. Trois avertissements : 4.8-17 | Ch. 9 Comment mettre fin aux querelles Ch. 10 Soyez prévoyants |
V. prie dans les difficultés (chapitre 5) 1. Difficultés financières : 5.1-9 2. Difficultés physiques : 5.10-16 3. Difficultés nationales : 5.17-18 4. Difficultés dans l’église : 5.19-20 | Ch. 11 Des paroles qui valent leur pesant d’or Ch. 12 La puissance de la patience Ch. 13 Prions |
e) Style
Le style dynamique de Wiersbe reste toujours accessible et concret. À l’instar de Jacques lui-même, dont la langue abonde en images, l’auteur sait assaisonner ses commentaires d’illustrations et d’exemples qui font mouche. Quelques échantillons :
Illustrations tirées de la Bible ?
à propos de la soumission de notre volonté (p. 28) :
Dieu ne peut travailler en nous sans notre consentement. Nous devons lui soumettre notre volonté. Les personnes matures ne s’opposent pas à la volonté de Dieu mais l’acceptent volontiers et y obéissent avec joie. Elles « font de (toute) leur âme la volonté de Dieu » (Éph 6.6). Si nous tentons de surmonter les épreuves sans soumettre notre volonté, nous serons, au bout du compte, plus semblables à des enfants immatures qu’à des adultes matures. À ce sujet. Jonas est un bon exemple de ce qu’il ne faut pas faire. Dieu a ordonné à Jonas de prêcher la repentance aux païens de Ninive, et il a refusé. Dieu a dû réprimander Jonas pour que le prophète accepte la mission qu’il lui avait confiée. Mais il n’a pas obéi de tout son cœur. II n’est pas sorti grandi de cette expérience. Comment le savons-nous ? Parce qu’au dernier chapitre du livre de Jonas, le prophète réagit comme un enfant gâté ! II est assis à l’extérieur de la ville à bouder en espérant que Dieu enverra son jugement. II est impatient envers le soleil, le vent, le ricin, le ver et même envers Dieu.
Illustrations tirées de l’expérience pastorale ?
à propos du combat contre la tentation (p. 39) :
La vie chrétienne est une question de volonté et non d’émotions. J’entends souvent des croyants dire : « Je n’ai pas envie de lire la Bible », ou encore : « Je n’éprouve pas l’envie d’aller à la réunion de prière. » Les enfants agissent selon leurs désirs, les adultes en fonction de leur volonté. Ils agissent en fonction de ce qui est bien, peu importe s’ils en ont envie ou non. Cela explique pourquoi les croyants immatures cèdent facilement à la tentation : ils laissent leurs émotions décider pour eux. Plus vous exercerez votre volonté à dire « non » à la tentation, plus Dieu sera au contrôle de votre vie : « Car c’est Dieu qui opère en vous le vouloir et le faire selon son dessein bienveillant. » (Phil 2.13) ?
à propos de la langue (p. 85) :
Un ami pasteur m’a parlé d’une dame de son église qui avait une solide réputation en matière de commérage. Elle passait la journée accrochée au téléphone à raconter les derniers ragots à qui voulait l’entendre. Elle est allée voir le pasteur un jour pour lui dire : « Pasteur, le Seigneur m’a montré que le commérage était un péché dans ma vie. Ma langue me cause des ennuis ainsi qu’aux autres. » Mon ami savait qu’elle n’était pas sincère parce que ce n’était pas la première fois qu’elle lui disait ce genre de chose. Prudemment, il lui demanda : « Alors, que comptez-vous faire ? » Elle lui répondit très pieusement : « Je veux déposer ma langue sur l’autel. » Mon ami lui dit alors, très calmement : « Il n’existe pas d’autel assez grand », et la laissa réfléchir là-dessus.
Illustrations de type anecdotique
à propos de ce qui inspire nos paroles (p. 95) :
J’ai entendu parler d’un homme qui se disait croyant. Un jour il s’est mis en colère au travail et a lâché quelques jurons. Mal à l’aise, il s’est tourné vers son collègue et lui a dit : « Je ne sais pas ce qui m’a pris, ça ne me ressemble pas ! » Avec sagesse, son partenaire a répondu : « Ça te ressemble sûrement, sinon ça ne serait pas sorti de toi !
à propos des riches et de leurs abus de pouvoir (p. 138) :
Bien souvent, les riches détiennent aussi le pouvoir politique et sont en mesure d’obtenir ce qu’ils veulent. Dans une bande dessinée, j’ai lu un jour ceci : « Quelle est la règle d’or ? », demandait l’un des personnages. Et l’autre de lui répondre : « Celui qui a l’or décide des règles ! » Jacques a demandé : « Les riches ne vous oppriment-ils pas et ne vous traînent-ils pas devant les tribunaux ? » (2.6) Mentionnons encore une qualité de l’ouvrage. Warren Wiersbe ne se fixe pas uniquement sur l’Épître de Jacques, mais il circule largement dans l’Écriture tout entière, citant très à propos des textes qui appuient ses commentaires.
f) Annexes
L’ouvrage se termine par des questions d’étude, chapitre par chapitre, et par une traduction complète de l’Épître (Version Parole vivante).
g) Réserves
L’interprétation de quelques termes peut prêter à discussion, mais ce sont des accidents isolés. Par exemple, nous avons de la peine à suivre Warren Wiersbe lorsqu’il traduit, en Jac 3.17, par « résolu » ce que Second avait rendu par « sans partialité » : le terme original (ad?????t??) veut pourtant bien dire « sans parti pris, impartial ».
Quelques affirmations sont excessives. Par exemple, à propos des « œuvres de la chair » (Gal.5.19) : « Ce sont [les œuvres] accomplies par les gens qui ne sont pas sauvés et qui vivent pour l’ancienne nature. » On doit rappeler ici qu’il arrive malheureusement aux croyants de « marcher selon la chair », et que les épîtres du N.T. sont partiellement nées de la nécessité de lutter contre ce triste état.
D’autres passages sont parfois un peu réducteurs. Par exemple, à propos de la tentation : « Une tentation est l’occasion d’accomplir une bonne chose par un mauvais moyen, en désaccord avec la volonté de Dieu. » (p. 36) Ne peut-on pas aussi être tenté d’accomplir des choses mauvaises par pure méchanceté, des choses perverses par pure perversité, des choses folles par pure folie
En bref
Malgré les quelques remarques ci-dessus, l’ensemble de l’ouvrage vaut largement son acquisition. Son étude est de nature à remettre en selle tout croyant bloqué dans son évolution spirituelle, mais désireux de ne se priver d’aucune occasion d’atteindre le but que le Seigneur ambitionne pour lui.
Vie pratique
Le trésor d’une personne peut avoir peu de prix aux yeux d’une autre. Effectivement, chacun de nous use de ses propres critères de valeur. Ce sont les yeux qui font la différence : « L’œil est la lampe du corps. » (Mat 6.22) Celui dont la vision embrasse les dimensions invisibles et éternelles de la vie verra autrement que celui qui n’en perçoit que les dimensions temporelles. Cette réalité est illustrée par les réponses données à Jésus par Zachée d’une part, et par le « jeune homme riche » d’autre part. Les deux étaient riches des biens de ce monde. Zachée a compris que ce qui est temporel ne peut pas être préféré à ce (ou Celui) qui est éternel. Le jeune homme riche a compris que quelque chose lui manquait dans la vie, mais comme beaucoup aujourd’hui, il a fixé les yeux sur les choses temporelles, au détriment de la richesse éternelle.
Un grand nombre de pratiques religieuses et culturelles du peuple de Dieu de l’Ancien Testament ont préfiguré les réalités de l’ère de l’Évangile. Ainsi en a-t-il été du concept de droit d’aînesse. Les Écritures indiquent que, dans la « famille » de Dieu, c’est à Jésus que revient l’honneur du droit d’aînesse. Il est dit de lui qu’« il est l’image du Dieu invisible, le premier-né de toute la création » (Col 1.15), et qu’« il est la tête du corps, de l’Église ; il est le commencement, le premier-né d’entre les morts, afin d’être en tout le premier. » (Col 1.18) L’honneur suprême qui a été glorieusement conféré à Jésus a été conçu pour la gloire de Dieu à travers nous, ses créatures. Quand nous nous réjouissons de la richesse de sa grâce en Christ, cela plaît à notre Père céleste et son nom est glorifié. Le but de toute la révélation de Dieu à l’homme est que nous puissions connaître la grandeur infinie de sa puissance. Ce n’est que par révélation qu’il nous devient possible de participer à cette promesse glorieuse. Jésus s’en est réjoui : « Je te loue, Père, Seigneur du ciel et de la terre, de ce que tu as caché ces choses aux sages et aux intelligents, et de ce que tu les as rév???élées aux enfants. » (Mat 11.25) Il ajoute un peu plus tard : « Mais heureux sont vos yeux, parce qu’ils voient, et vos oreilles, parce qu’elles entendent ! Je vous le dis en vérité, beaucoup de prophètes et de justes ont désiré voir ce que vous regardez, et ne l’ont pas vu, entendre ce que vous entendez, et ne l’ont pas entendu. » (Mat 13.16,17)
Beaucoup de non croyants investissent tous leurs espoirs dans des temps meilleurs : ils appellent de leurs vœux une sorte de « royaume » bienheureux sur la terre. Mais pour nous, les Écritures nous encouragent à croire que, dès à présent, nous avons été délivrés de la puissance des ténèbres et transportés (plantés) dans le royaume de Christ (Col 1.13). Paul a déclaré que « si quelqu’un est en Christ, il est une nouvelle créature. Les choses anciennes sont passées ; voici, toutes choses sont devenues nouvelles. » (2 Cor 5.17) Ces deux passages, parmi beaucoup d’autres, montrent clairement que Jésus tient en réserve un grand trésor, d’inestimable valeur, pour tous ceux qui sont fidèles, pour tous ceux qui ne sont pas prêts à vendre leur héritage éternel pour un morceau de nourriture terrestre (cf. Gen 25.31-34).
Ce trésor, le don du salut, a été acquis pour nous à un prix énorme, car « ce n’est pas par des choses périssables, par de l’argent ou de l’or, que vous avez été rachetés de la vaine manière de vivre que vous aviez héritée de vos pères, mais par le sang précieux de Christ, comme d’un agneau sans défaut et sans tache. » (1 Pi 1.18-19) Dans un sens, il est impensable qu’un tel sacrifice ait été consenti pour nous, pécheurs indignes et misérables. Néanmoins, il a été accompli. Ce qu’il a vraiment coûté à Dieu, à Jésus, et à tout le ciel, nous ne le comprendrons que dans le monde à venir. La clarté de notre compréhension de ce trésor dépend de la qualité de notre foi, comme Paul le rappelle avec instance aux Éphésiens :
« [… ] Je fléchis les genoux devant le Père [… ] afin qu’il vous donne, selon la richesse de sa gloire, d’être puissamment fortifiés par son Esprit??? dans l’homme intérieur, en sorte que Christ habite dans vos cœurs par la foi ; afin qu’étant enracinés et fondés dans l’amour, vous puissiez comprendre avec tous les saints quelle est la largeur, la longueur, la profondeur et la hauteur, et connaître l’amour de Christ, qui surpasse toute connaissance, en sorte que vous soyez remplis jusqu’à toute la plénitude de Dieu. » (Éph 3.14-19)
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