PROMESSES

Philip Nunn sert le Seigneur depuis 1992 comme missionnaire en Colombie. Il est particulièrement impliqué dans l’évangélisation dans les écoles et dans la formation de nouvelles assemblées chrétiennes dans ce pays. Il est marié avec Anneke et a quatre enfants.

Nous pensons habituellement à Jésus qui marchait, enseignait et guérissait, entouré de ses douze disciples. Et pourtant, lorsque nous regardons de plus près les récits de l’Évangile, nous découvrons plusieurs femmes qui aimaient Jésus et montraient un intérêt actif dans ce qu’il disait et faisait. Certaines, comme les deux sœurs Marthe et Marie, lui offraient une chaleureuse hospitalité ; d’autres, telle la femme samaritaine, lui amenèrent une foule pour qu’il l’enseigne. Parfois, une femme reconnaissante le parfumait, ou lavait ses pieds sales et fatigués. Marie, sa mère, se tenait près de lui quand elle le pouvait. D’autres, comme Jeanne et Susanne, suivaient Jésus et les Douze, et « l’assistaient de leurs biens » (Luc 8.1-3). Il me semble, en considérant toutes ces femmes merveilleuses, que la vie et le caractère de l’une d’entre elles brillent au-dessus des autres : Marie de Magdala. Vous êtes-vous demandé pourquoi le Christ ressuscité a choisi de se montrer vivant à Marie de Magdala avant tout autre personne (Marc 16.9) ? Il y a quelque chose de spécial en ce qui la concerne. Elle rayonne, lorsqu’on la compare aux attitudes et au comportement des apôtres. Elle avait beaucoup à leur apprendre par ses actes. Et elle peut également être un modèle pour nous aujourd’hui.

1. Tourmentée par les démons

Il n’est pas dit grand chose au sujet de l’environnement de cette femme. Le nom de « Magdala » signifie « tour ». Peut-être l’appelait-on ainsi à cause de sa constance ou de sa force de caractère. Mais il y avait également une ville appelée Magdala sur la rive occidentale de la mer de Galilée (même si certaines cartes ont une orthographe différente). Il est plus vraisemblable que cette Marie ait été différenciée des autres du fait qu’elle venait de cette ville. Il était tout à fait courant à l’époque d’identifier les femmes par rapport à leur parenté, comme « Jeanne, femme de Chuzas », et « Marie, mère de Jacques et de Joses » (Luc 8.3 ; Matt 27.56). Marie de Magdala est mentionnée au moins douze fois par son nom, mais sans connexion familiale. Cela signifie pour certains qu’elle était célibataire. Mais surtout, un élément singulier de son passé attire l’attention : c’est son rapport avec les démons.

Lorsque nous suivons les voyages de Jésus, nous lisons que « des femmes aussi qui avaient été guéries d’esprits malins et d’infirmités » le suivaient, et parmi elles, il y avait « Marie, qu’on appelait Magdeleine, de laquelle étaient sortis sept démons » (Luc 8.1-3). Certains esprits malins peuvent provoquer des maladies. Lorsque le démon est sorti, la personne est de nouveau en bonne santé. Mais attention, si les démons « sortent », il faut qu’à un moment, ils soient « entrés ». D’après ce que j’ai pu observer ici en Colombie, les démons peuvent s’attaquer à la fois aux chrétiens et aux incroyants. Mais il y a en général une raison ou un événement « historiques » qui permettent aux démons d’ « entrer », de demeurer ou de prendre possession d’un non chrétien. Dans la plupart des cas, vous trouverez dans le passé familial sorcellerie, drogue, inceste, prostitution et autres. Si vous avez rencontré quelqu’un possédé ou tourmenté par un démon, vous comprendrez aisément la peur, l’insécurité et l’impuissance que ressentait Marie de Magdala. Il n’est pas inhabituel pour ces personnes désespérées d’envisager le suicide. Et c’est dans cet état-là qu’elle a rencontré Jésus. Les démons ne se contentent habituellement pas de « sortir ». Ils peuvent se cacher à l’intérieur un moment. Dans le cas de l’homme possédé de Marc 5, la sortie de ses démons relève plus du processus que de l’événement immédiat.

Je pense que la compréhension du milieu d’où Marie venait est indispensable pour comprendre la passion inébranlable et la fidélité tenace avec lesquelles elle a suivi son Maître. Quelle est la mesure de votre dévotion à Jésus ? Votre christianisme peut-il être décrit comme une « bonne habitude » ou un « passe-temps » plutôt que comme une « passion » ? Jésus s’est servi de la présence d’une autre femme pécheresse pour mettre en évidence cette réalité spirituelle : « Celui à qui il est peu pardonné aime peu » (Luc 7.47). Une énorme dette a été pardonnée à chaque chrétien. Tout comme Marie de Magdala, nous devrions aimer passionnément. Et pourtant, nous prenons nos péchés tellement à la légère ! Nous venons à Jésus sans nous presser, sans angoisse, sans désespoir. Nous nous considérons comme de relativement bons citoyens, qui ont juste besoin d’un coup de pouce pour aller au Ciel. Il est tout simplement impossible aux Pharisiens, et à leurs équivalents modernes, d’aimer comme Marie de Magdala.

2. Au service de Jésus

Une fois que Jésus l’a complètement libérée, elle l’a suivi et l’a servi. Vous avez peut-être croisé la route de l’un de ces chrétiens enthousiastes et toujours actifs. Ce qu’ils aiment, c’est servir. Peut-être êtes-vous l’un d’eux. Eh bien, Marie de Magdala nous enseigne deux leçons simples et puissantes :

– Pour le servir comme il le désire, vous devez d’abord être libre. Trop de croyants essaient de le servir tout en étant toujours liés par des souvenirs tristes, un complexe, un esprit rancunier, de l’amertume ou autre chose. Nous finissons par avoir l’habitude de vivre notre christianisme sous un nuage gris. Puis-je vous conseiller d’arrêter votre service et de rechercher une pleine libération ? La liberté en Christ n’est pas une doctrine académique, c’est une expérience réelle à la disposition de chaque croyant.

– Pour le servir comme il le désire, il faut le suivre. Le fait d’être né de nouveau et actif dans les activités chrétiennes ne suffit pas.

Il nous faut avoir le désir de servir nous-mêmes le Seigneur, et pourtant, la plupart du service chrétien est effectué en équipes. Le Seigneur a constitué une équipe d’apôtres, Paul a voyagé et servi avec d’autres. Nous voyons également que Marie de Magdala a servi Jésus au sein d’une équipe de femmes. Les équipes sont habituellement faites de personnes aux caractères différents, et cela peut facilement devenir une source de problèmes. Vous seriez surpris de savoir combien de conflits et de tensions existent entre des missionnaires qui ont donné leur vie pour servir le même Maître ! Même l’équipe des apôtres a eu ses moments de conflits et de stress internes (Marc 9.34). Marie de Magdala n’était pas une solitaire, ni ne se distanciait du service en équipe, et pourtant, l’Écriture ne la cite dans aucune des situations de conflit. Elle aimait avec passion, et pourtant était assez souple pour travailler avec « plusieurs autres » (Luc 8.3). Marie de Magdala partageait son Seigneur et son service avec bon nombre de personnes différentes :

(a) Les hommes (Luc 8.1). Les Douze avaient été choisis spécialement par Jésus. Ils étaient parfois un peu autoritaires et critiques vis-à-vis des autres. Les yeux de Marie de Magdala, comme les yeux de la plupart des autres femmes sensibles, devaient l’avoir remarqué. Il n’y a aucune preuve qu’elle ait été en concurrence avec eux, ni qu’elle soit entrée en conflit avec eux. Elle était active et heureuse dans son rôle d’aide.

(b) Les femmes riches. D’entre celles qui servaient, on trouvait des femmes comme « Jeanne, la femme de Chuzas, intendant d’Hérode » (Luc 8.3). Les femmes d’un milieu aisé ont souvent l’habitude de faire comme elles l’entendent et de dire aux autres quoi faire. Il n’est pas toujours aisé de travailler avec elles. Il n’y a aucune preuve que Marie de Magdala soit entrée en conflit avec elles.

(c) Les femmes politiques. Le Seigneur avait appelé deux frères, Jacques et Jean, fils de Zébédée, un pêcheur. Ils se sont joints aux Douze (Marc 3.13-19). Leur mère était également parmi ces femmes, qui suivaient et servaient Jésus (Matt 27.55-56). Il me semble qu’elle devait être une femme quelque peu ambitieuse. À un moment où les dix autres apôtres étaient occupés ailleurs, elle amène Jacques et Jean à Jésus, s’agenouille devant lui et lui dit : « Ordonne que mes deux fils que voici, s’asseyent, l’un à ta droite et l’un à ta gauche, dans ton royaume. » Lorsque les autres disciples l’apprirent, cela créa des tensions entre eux. (Matt 20.21). Jésus avait surnommé ces deux jeunes gens « Fils du Tonnerre » (Marc 3.17), et je me suis parfois demandé si ce surnom avait quelque chose à voir avec le caractère de leur mère ! Et pourtant, nous ne trouvons aucun rapport de conflit entre Marie de Magdala et cette femme. Elle était préparée à « partager » Jésus avec des femmes compliquées.

(d) La parenté de Jésus. L’apôtre Jean rapporte que Marie de Magdala était présente à la Croix, avec la mère de Jésus et l’une de ses tantes (Jean 19.25). La mère de Jésus et sa tante avaient d’étroits liens de famille avec Jésus, mais pas Marie de Magdala. Les liens familiaux peuvent aisément provoquer des frictions au sein d’équipes, et pourtant Marie de Magdala aimait et servait son Maître sans aucune manifestation de jalousie ou d’esprit de compétition. Pouvez-vous travailler de manière heureuse avec ceux qui pensent qu’ils sont plus proches du Seigneur, ou plus spirituels que vous ?

3. Près de la croix

Marie de Magdala est connue pour s’être tenue près de la croix du Seigneur. Pour certains, le fait de se tenir là pouvait être considéré comme une attitude de passivité, comme une présence relativement insignifiante. Regardons-y de plus près. Marie de Magdala, ainsi que les autres femmes, avait marché depuis la Galilée jusqu’à Jérusalem. Jésus avait été fait prisonnier le jeudi soir, et ces femmes avaient dû rester éveillées toute la nuit du jeudi, en se demandant ce qui allait arriver à leur Seigneur. Pouvez-vous imaginer ce qui s’est passé dans leur cœur quand elles ont entendu le peuple crier : « Crucifie, crucifie-le ! » Le vendredi matin, elles ont suivi Jésus au Calvaire. Elles l’ont vu être crucifié et élevé sur cette croix. Elles n’ont trouvé aucun réconfort moral dans les Douze : en fait, l’un d’eux l’avait trahi, et un autre l’avait publiquement renié. Si vous avez déjà été à l’hôpital voir un proche souffrir, vous pouvez bien comprendre que Marie de Magdala devait être, à ce moment-là, épuisée émotionnellement.

Mais Matthieu rapporte quelques autres incidents : pour ajouter à la peine, « ceux qui passaient par là l’injuriaient, hochant la tête » (27.39). Et pourtant, Marie de Magdala n’avait pas honte de son Seigneur. Ensuite à partir de midi et pendant trois heures, « il y eut des ténèbres sur tout le pays » (27.45). Je me souviens d’une éclipse totale de soleil qui s’est déroulée ici en Colombie quand j’étais un jeune garçon. Pendant une chaude après midi, nous avons connu quelques minutes de ténèbres. Outre quelques chiens qui hurlaient et des poulets affolés qui allaient se jucher pour dormir, je me rappelle d’un froid étrange. Pendant les trois heures de ténèbres, Marie de Magdala, ainsi que les autres femmes, devaient se sentir fatiguées, mais avoir également très froid. Alors, elles ont entendu celui qu’elles aimaient crier encore d’une voix forte et mourir (27.50). « Et voici la terre trembla, et les rochers se fendirent, et les sépulcres s’ouvrirent » et des personnes mortes revinrent à la vie (27.51-52). Un tremblement de terre provoque de la panique, sans parler des tombes ouvertes et des morts ressuscités. Il nous est même dit que le centurion et son équipe de tueurs professionnels « eurent une fort grande peur » (27.54). Qu’est-ce qui retenait ainsi Marie de Magdala près de cette croix ? Pourquoi ne s’était-elle pas enfuie avec les autres disciples ? Je pense que ce qui a fait la différence, c’est le milieu d’où elle venait : « Celui à qui il est peu pardonné, aime peu » (Luc 7.47). Une gratitude profondément ressentie était le moteur de sa dévotion.

Avant de continuer, nous devrions peut-être nous demander comment notre foi et notre dévotion à Christ répondent à l’injustice, à la peine et à la souffrance. Nos « pourquoi » sans réponse nous écartent-ils du Seigneur ? Comment notre expérience chrétienne nous fait-elle répondre aux rires et au ridicule ? Comme Pierre, nous tenons-nous à distance d’une identification publique avec Jésus ? Et qu’en est-il de ces moments de ténèbres, où le futur semble si incertain. Restons-nous fermes, et dans la proximité de notre Seigneur ? Parfois, la mort inattendue de l’un de ceux que nous aimons ébranle notre monde. Parfois, nous nous trouvons dans d’autres tremblements de terre (comme le chômage, le divorce, les divisions d’assemblée) qui ébranlent les fondations de nos certitudes. Parfois, nous nous trouvons face à la résurgence de problèmes financiers ou de santé oubliés depuis longtemps. Comme Marie de Magdala, dans le trouble, la douleur, le froid et la fatigue, restons près de notre Seigneur.

4. Face à la mort de son Maître

Jésus est mort après 3 heures le vendredi après midi. Au coucher du soleil, le sabbat allait commencer, et il n’y avait plus que quelques heures pour préparer le corps de Jésus et le mettre dans une tombe. Joseph d’Arimathée et Nicodème se chargèrent de l’ensevelissement (Matt 27.57-61 ; Jean 19.38-42). Pendant ce temps-là, « Marie de Magdala et l’autre Marie étaient là, assises vis-à-vis du sépulcre » (Matt 27.61).

Auriez-vous critiqué Marie de Magdala si elle était rentrée à la maison après la crucifixion ? N’avait-elle déjà pas fait plus que son devoir ? En fait, maintenant que Jésus était mort et qu’elle était inoccupée, il aurait été tout à fait raisonnable qu’elle rentre se reposer. Mais Marie de Magdala n’est pas partie. Elle a suivi le corps jusqu’à ce qu’une grande pierre soit roulée devant l’entrée du tombeau. Un cœur aimant et dévoué fait toujours plus que ce qui est strictement nécessaire. Il marche un kilomètre de plus. Il va au-delà de son devoir. Mesurez-vous votre service ? Comparez-vous votre degré de dévouement avec celui des autres ? Un cœur qui aime vraiment le Seigneur ne s’embarrasse pas de telles comparaisons !

5. Face au tombeau vide

« De fort grand matin, le premier jour de la semaine, […] comme le soleil se levait, » Marie de Magdala et deux autres femmes « viennent au sépulcre » (Marc 16.1-3). Êtes-vous de ceux qui se lèvent tôt le matin ? Bien sûr, nous pouvons méditer la Parole de Dieu et jouir de la communion avec le Seigneur à tout moment de la journée, mais le matin tôt est un moment spécial. Notre esprit est frais. Nous sommes dispos. Nous donnons le ton de la journée qui commence. Vous pouvez trouver des références à Abraham, Josué, Gédéon et au Seigneur lui-même, qui se levaient tôt le matin. Lorsque l’on s’intéresse aux biographies d’hommes et de femmes de Dieu, on découvre que presque toujours, ce sont des lève-tôt. Et qu’est-ce qui a fait se lever tôt ces femmes fatiguées ? L’ange du sépulcre le savait. Il leur dit : « Je sais que vous cherchez Jésus le crucifié. » Et alors, il ajoute la bonne nouvelle : « Il n’est pas ici ; car il est ressuscité, comme il l’avait dit. » (Matt 28.5-6).

Vous avez sans doute remarqué que l’amour et la passion ne sont pas toujours logiques et rationnels. Il y a quelques mois, nous avons offert à une voisine d’emmener régulièrement son enfant avec les nôtres à l’école en voiture. Cela lui épargnerait ainsi du temps et de l’argent. À notre surprise, la maman a décliné notre offre : « J’aime emmener et aller chercher mon petit garçon », nous a-t-elle dit. Lorsqu’une femme pécheresse a versé un parfum coûteux sur les pieds de Jésus, certains de ses disciples s’en sont indignés : « A quoi bon cette perte ? » (Matt 26.8). Ce n’était pas une utilisation rationnelle des ressources. Marie de Magdala et les autres femmes ont acheté des aromates pour oindre le corps de Jésus. Elles se sont levées et sont allées tôt le matin, et en chemin, « elles disaient entre elles : Qui nous roulera la pierre de devant la porte du sépulcre ? » (Marc 16.3) Bonne question ! La garde romaine serait-elle coopérative ? C’était peu vraisemblable ! Elles auraient peut-être dû en parler avant d’acheter les aromates ! Mais leur cœur et leur esprit étaient fixés sur Jésus, pas sur ces détails techniques. L’amour trouve toujours un moyen.

Ce triste vendredi, après avoir laissé le corps de Jésus dans le tombeau, Marie de Magdala et les autres femmes, « s’en étant retournées, […] préparèrent des aromates et des parfums » (Luc 23.55-56). Cela n’était-il pas du gaspillage ? Pourquoi une telle dépense ? Personnellement, je serais enclin à me passer des aromates et du parfum. Ce que vous mettez sur un corps mort n’a pas vraiment d’importance, n’est-ce pas ? Les femmes savaient que Nicodème et Joseph avaient déjà enveloppé le corps avec « une mixtion de myrrhe et d’aloès, d’environ cent livres ». (Jean 19.38-42). N’était-ce pas assez ? Mais un cœur aimant et dévoué ne raisonne pas ainsi. Ce que font les autres n’a pas d’importance. Il fallait exprimer leurs propres sentiments. Tant de cantiques chrétiens ont déjà été composés, pourquoi vouloir en composer un nouveau ? Tant de livres chrétiens et de traités ont déjà été écrits, pourquoi faire l’effort d’en écrire un autre ? Tant de chrétiens aisés donnent généreusement à l’œuvre du Seigneur, pourquoi donc apporter ma petite contribution ? Tant d’évangélistes éloquents annoncent l’évangile à la radio et à la télévision, pourquoi m’occuperais-je à distribuer quelques traités ? Tant de grandes organisations s’occupent d’aider les personnes nécessiteuses dans ce monde, alors pourquoi m’occuper de cette famille d’émigrés qui vient juste d’arriver à côté de chez nous ? Notre apport peut être petit, et pourtant un cœur aimant et dévoué ne raisonne pas comme ça. Comme Marie de Magdala, nous voulons aussi donner à Jésus quelque chose qui sente bon. « Mais n’oubliez pas la bienfaisance, et de faire part de vos biens, car Dieu prend plaisir à de tels sacrifices. » (Héb 13.16) Ces actes sont également appelés « un parfum de bonne odeur, agréable à Dieu » (Phil 4.18).

6. Rencontrée par le Ressuscité

Comme je l’ai souligné plus haut, Marie de Magdala était allée au sépulcre pour chercher Jésus (Matt 28.5). Ce n’est pas facile de se lever tôt quand on est fatigué. Près du sépulcre, elles ont subi un autre « grand tremblement de terre » lorsque l’ange du Seigneur a roulé la pierre (Matt 28.2). Vous pouvez rencontrer des difficultés dans le chemin, mais quiconque cherche vraiment Jésus le trouvera finalement. « Vous me chercherez, et vous me trouverez, car vous me rechercherez de tout votre coeur, et je me ferai trouver à vous, dit l’Éternel » (Jér 29.13-14). Dans l’Évangile selon Jean, nous trouvons racontée la rencontre émouvante entre Marie de Magdala et le Christ ressuscité. Les disciples étaient entrés dans le tombeau vide et « s’en retournèrent donc chez eux. Mais Marie se tenait près du sépulcre, dehors, et pleurait. » (Jean 20.10-11) Elle était seule avec sa peine. Celui que son cœur aimait avait disparu. Dans son angoisse, elle ne semble pas remarquer que deux anges lui parlent. Dans sa profonde détresse, elle regarde à Jésus qui se tient à côté d’elle et ne le reconnaît pas. Ce n’est que lorsqu’elle entend la voix chaleureuse et familière du Seigneur qui l’appelle par son nom qu’elle sort de ses tristes affres et qu’elle l’adore.

Parfois, notre tristesse naturelle peut mettre une distance entre nous et la bénédiction que le Seigneur voudrait nous donner. Le Seigneur peut se servir d’autres chrétiens, et même d’anges, pour consoler nos cœurs. Nous écoutons leurs mots, nous savons qu’ils sont vrais, et pourtant nous ne les laissons pas atteindre notre âme. Nous voyons la preuve de la bonté du Seigneur à notre égard ; dans notre cœur nous savons que le Seigneur est proche, et pourtant, dans notre détresse, nous ne lui permettons pas de réjouir notre cœur. Êtes-vous seul ? Êtes-vous blessé ? Le même Seigneur Jésus, qui s’est soucié de Marie de Magdala, se soucie aussi de vous. Il vous invite à élever vos yeux au-dessus de vos tristes circonstances et à le regarder. Il veut que vous l’aimiez et l’adoriez.

7. Contestée dans son témoignage

Lorsque Jésus a été tenté par Satan, il lui a répondu : « Tu rendras hommage au Seigneur ton Dieu, et tu le serviras lui seul » (Luc 4.8). Après l’adoration vient le service. Le Seigneur demande alors à Marie de Magdala d’aller porter un message aux autres disciples, « qui étaient dans le deuil et pleuraient. » (Marc 16.10). Le Seigneur s’occupait aussi d’eux. Lorsque nous nous ouvrons à la consolation de notre Seigneur, il nous donne habituellement assez de grâce pour que nous puissions aussi réconforter les autres (2 Cor 1.3-4). Marie de Magdala était très spéciale aux yeux du Seigneur, mais elle n’était pas la seule.

Marie a essuyé ses yeux et a obéi au Seigneur Elle a fait exactement ce qu’il lui a demandé, et elle l’a fait immédiatement. Comment les disciples ont-ils réagi à son message ? « Et ceux-ci, apprenant qu’il était vivant et qu’il avait été vu d’elle, ne le crurent point. » (Marc 16.11) Essayez d’imaginer cette rencontre. Avec joie et passion, Marie de Magdala annonce la bonne nouvelle, et tout simplement les disciples ne la croient pas. D’autres ont-ils remis en question la véracité de votre témoignage ? Savez-vous ce que l’on ressent lorsque l’on est soupçonné de déformer la vérité ? Comment a-t-elle réagi à cette situation émotionnelle très inconfortable ? A-t-elle reproché aux disciples d’être sexistes pour refuser un témoignage féminin ? A-t-elle juré, comme Pierre, pour ajouter du poids à ses mots ? (Matt 26.74). A-t-elle couché son récit par écrit en le faisant circuler pour prouver ses dires ultérieurement ? S’est-elle mise en colère en protestant ? Non ! Marie de Magdala a simplement fait ce que Jésus lui avait demandé, et a remis la réaction des disciples au Seigneur. Le Seigneur a remarqué cette situation tendue. Nous lisons que « plus tard, il apparut aux onze, comme ils étaient à table, et leur reprocha leur incrédulité et leur dureté de cœur, parce qu’ils n’avaient pas cru ceux qui l’avaient vu ressuscité » (Marc 16.14). Ensuite, et comme toujours, le Seigneur se tient à côté et soutient ses serviteurs. Nous avons ici en Colombie un dicton qui affirme que « tôt ou tard, un corps mort refait surface ». Le Seigneur fait en sorte que la vérité se fasse jour à un moment ou à un autre (Luc 12.1-3). Certains jettent-ils le discrédit sur vos motifs, vos paroles ou vos actes ? Avez-vous l’impression d’être incompris ? Comme Marie de Magdala, dites la vérité calmement et clairement. Adorez-le avec joie. Et continuez à faire ce que le Seigneur vous a demandé de faire. L’opposition ne justifie jamais l’amertume ni la paralysie.

Attachés à Lui sans réserve

Après que j’ai apporté un message dans une église en Allemagne, un jeune frère m’a demandé comment obtenir « un cœur passionné pour Jésus ». Marie de Magdala nous en montre le chemin.

1. Reconnaissez votre état de péché. À moins que vous ne ressentiez véritablement ce que Christ a fait (et fait actuellement) pour vous, vous ne pourrez qu’ « aimer peu ».
2. Continuez à suivre le Seigneur, pas les disciples, pas l’église locale, pas les illustres et pieux prédécesseurs, pas même les doctrines. Nous devons suivre le Seigneur avec les autres, mais nous ne suivons pas les autres1.
3. N’ayez pas un cœur partagé. Les douceurs et les en-cas coupent l’appétit. Si vous suivez des conventions religieuses et vous efforcez de satisfaire des attentes humaines, vous en tirerez suffisamment de satisfaction pour perdre l’appétit quant à la réalité profonde. À la fin de la vie de Josué, son conseil au peuple d’Israël a été : « Or prenez bien garde à vos âmes pour aimer l’Éternel, votre Dieu. » (Josué 23 : 11).

Notes:
1 Cette affirmation ne contredit pas les propos de l’auteur de l’article sur Paul, l’anti-modèle pour aujourdh’hui (p.1). Même si nous sommes appelés à imiter les croyants qui ont marché fidèlement à la suite de Christ, nous devons suivre Christ, et non des hommes (note de l’éditeur).


Dans un de ses derniers livres, Le Christ incomparable, John Stott, écrivain chrétien anglican bien connu, donne le portrait de douze personnes qui ont pris Jésus Christ pour modèle et qui elles-mêmes sont devenues des exemples pour beaucoup.
Avec l’aimable autorisation des éditions de la Ligue pour la Lecture de la Bible (LLB), nous publions un extrait de ce livre, dont nous recommandons chaudement la lecture à chacun. Ce livre est publié par LLB, 51 boulevard Gustave André, 26000 Valence.
Cet extrait concerne William Wilberforce, un chrétien anglais qui a joué un rôle politique éminent au début du XIXe siècle et a été à l’origine de l’abolition de l’esclavage en Grande-Bretagne.

William Wilberforce a été profondément influencé par Jésus Christ. Il s’est sans cesse souvenu qu’il aurait un jour à se tenir devant le trône du jugement dernier du Christ. À une occasion, Wilberforce a résumé les ambitions de sa vie en ces termes : « Le Dieu tout-puissant a mis devant moi deux grands objectifs : la suppression de la traite des esclaves et la réforme des mœurs. »

Je propose de considérer ces deux buts dans l’ordre inverse. L’influence de Wilberforce sur les valeurs et les normes morales anglaises peut être attribué à son livre fameux qui avait pour titre : Une vue pratique du système religieux qui prévaut chez les gens qui se disent chrétiens, au sein de la classe supérieure et de la classe moyenne dans ce pays, mis en contraste avec le vrai christianisme. Publié en 1797, réimprimé cinq fois la même année, traduit en cinq langues européennes et familièrement appelé Le vrai christianisme, il a connu un impact fantastique.

La plupart de ses titres de chapitre commencent par les mots Conceptions inadéquates sur…, son but étant, à partir de sa connaissance étendue de la Bible, d’exposer tout ce qu’a d’insuffisant le christianisme « nominal » ou « seulement professé », et de clarifier les qualités indispensables du christianisme « réel », « vrai », « fondamental » ou « pratique ». Il insiste sur ce qui les différencie et ce qui « consiste en la place différente qui est donnée à l’évangile ». Ses doctrines fondamentales sont « la corruption de la nature humaine, l’expiation accomplie par le Sauveur et l’influence sanctifiante du Saint-Esprit ». De ces vérités, acceptées avec foi et expérimentées, découle une vie radicalement nouvelle, inspirée par la reconnaissance envers Dieu, caractérisée par l’amour, la sainteté et l’humilité, et qui imprègne chacun des domaines de notre vie, à la fois privés et publics

Tandis qu’il écrivait, Wilberforce était douloureusement conscient de ce que la religion et la morale connaissaient un sérieux déclin dans l’Angleterre de son temps. « La Bible repose, fermée, sur un rayon. » Surtout, « l’habitude fatale de considérer la morale chrétienne comme distincte des doctrines chrétiennes a imperceptiblement gagné du terrain. […] Même dans la majorité des sermons aujourd’hui, on trouve difficilement une trace de doctrine biblique. »

Wilberforce a été en particulier révolté par la part que la Grande-Bretagne a prise dans le commerce des esclaves. Il en a dépeint ainsi l’horreur :

« Le raid nocturne soudain sur quelques villages paisibles (particulièrement en Afrique occidentale), la rafle et la conduite vers la côte d’hommes, de femmes et d’enfants enchaînés, le long et lent voyage à travers l’Atlantique, la crasse et la puanteur de l’espace empoisonné où les esclaves étaient entassés par couches, et puis le travail sur les plantations de sucre sous la cravache des surveillants. »

Entré au Parlement en 1780 pour représenter le Yorkshire à l’âge de vingt et un ans, il a proposé, sept ans plus tard, une motion relative au commerce des esclaves. Il n’était pas particulièrement avenant. Petit, il avait une mauvaise vue et le nez retroussé. Quand Boswell1 l’entendit parler, il déclara que c’était « une parfaite crevette » mais, plus tard, il concéda que la crevette s’était présentement transformée en requin ! Wilberforce a aussi dû faire face à l’opposition déterminée d’intérêts établis. Mais, en dépit de tous les problèmes, il a persévéré. En 1789 il s’est adressé à la Chambre des Communes2 à propos du commerce des esclaves en ces termes : « Son horreur m’est apparue si énorme, si atroce, si irrémédiable que mon propre esprit a été gagné pour l’abolition. […] Que les conséquences en soient ce qu’elles veulent, moi, depuis ce temps, j’ai décidé que je n’aurai pas de repos jusqu’à ce que j’aie obtenu son abolition. »

C’est ainsi que les projets de loi pour l’abolition : Abolition Bills (relatives au commerce des esclaves) et les Foreign Slaves (y interdisant l’implication des bateaux anglais) furent débattus aux Communes en 1789, 1791, 1792, 1794, 1796, 1798, 1799. Ce fut chaque fois un échec jusqu’au Projet de loi pour l’abolition du commerce des esclaves enfin voté en 1807. Alors, après les guerres napoléoniennes, Wilberforce mit toute son énergie en faveur de l’abolition de l’esclavage lui-même. Mais, en 1825, les problèmes de santé le contraignirent à quitter le Parlement, et Thomas Fowell Buxton prit la direction de la campagne. En 1833 le Projet de loi pour l’abolition de l’esclavage fut approuvé par une large majorité dans les deux Chambres du Parlement. Trois jours plus tard, Wilberforce mourut. Il fut enterré à Westminster Abbey3, en reconnaissance pour ses quarante-cinq ans de lutte persévérante en faveur des esclaves africains.

Cependant Wilberforce ne s’est pas battu tout seul. Il a été certes reconnu comme le leader de la campagne mais il n’aurait pu gagner sans la lame de fond que représenta le soutien du pays, et spécialement de ses amis proches du sud de Londres. […]

John Venn, [l’un d’entre eux], faisait beaucoup de place, dans ses sermons, à la responsabilité morale devant Dieu, au fait que nous aurons à lui rendre des comptes. C’est cela, écrivait Michael Hennell, « qui [leur] donnait […] cette totale intégrité, agissant comme le sel et le levain à la Chambre des Communes. C’était ce sens de la responsabilité devant Dieu qui rendait l’équipe anti-esclavagiste capable de poursuivre sa campagne pendant une guerre européenne majeure et malgré vingt-cinq années d’échecs, de désappointements et de désillusions. »

Michael Hennell nous dit aussi que le Premier Ministre, William Pitt le Jeune, demanda une fois à Henry Thornton [un ami de Wilberforce] pourquoi il avait voté contre lui en une certaine occasion. Thornton répliqua : « J’ai voté aujourd’hui de telle sorte que si mon Maître était revenu à ce moment-là, j’aurais pu lui rendre compte de mon intendance. »

Wilberforce aurait pu dire la même chose. Son sens élevé du devoir envers autrui découlait de son sens de la responsabilité envers le Christ, son Sauveur, Seigneur et Juge.

Notes
1 Écrivain anglais de la deuxième partie du XVIIIe siècle, observateur de la vie de son temps. (Note de Promesses)
2 Une des deux chambres du parlement anglais. (Note de Promesses)
3 Cathédrale de Londres, où sont couronnés et enterrés la plupart des monarques anglais, ainsi que certains hommes célèbres. (Note de Promesses)


Il y a quelques années, un ami chrétien, d’environ dix ans plus jeune que moi, me fit une remarque qui me fit réfléchir : « Tu sais, Anne, ton avis est important pour moi, parce que tu es comme une grande sœur pour moi. »

Sur le moment, ça m’a presque inquiétée : ça voulait dire que je devais toujours être « au top »… Je sais bien que Dieu nous voit déjà parfaits, mais en même temps, nous continuons à pécher (1 Jean 1) et penser que quelqu’un pourrait prendre exemple sur moi aurait pu me faire peur.

A la réflexion, vouloir paraître parfaite en jouant un rôle ne sert à rien. Que je n’aie pas honte de mes faiblesses, que je sache reconnaître mes torts ; car je suis responsable de mes actes avant tout devant Dieu, et me savoir observée par les autres ne doit pas me paralyser (Prov 29.25). Je fais mes choix de vie devant le Seigneur ; quand je pèche, c’est au Seigneur avant tout que je confesse mes péchés (sans oublier bien sûr ceux à qui j’ai pu causer du tort) ; c’est au Seigneur que je devrai rendre compte un jour (Rom 14.10-12).

Et c’est certainement en vivant ma vie chrétienne de manière sincère, responsable et droite que je pourrai être un modèle pour ceux qui me suivent : mes enfants, mais aussi mes « petits frères » et mes « petites sœurs » dans la foi. Dieu n’en exige pas plus : « Ce que l’Eternel demande de toi, c’est que tu pratiques la justice, que tu aimes la miséricorde, et que tu marches humblement avec ton Dieu. » (Michée 6.8)

Quant à la société, quel idéal féminin propose-t-elle aux adolescentes ? Des top-modèles, prêtes à tous les sacrifices pour rester « au top » (même à se priver de manger jusqu’à en mourir) ! Dans un style très différent, des chrétiennes authentiques peuvent être des modèles, même si elles ne sont pas toujours « au top » dans leur vie de foi…


Olivier Favre a fait ses études de théologie à l’Institut Biblique Européen de Lamorlaye ainsi qu’à la Faculté Libre de Théologie Réformée d’Aix-en-Provence. Il a été pasteur de l’Église Réformée Baptiste de Lausanne pendant 14 ans. Depuis juillet 2005, il partage son ministère entre deux petites églises réformées baptistes à Payerne et Neuchâtel. Il est marié et père de trois fils.

Introduction

Les chrétiens évangéliques du début du XXIe siècle cherchent à toucher leurs contemporains. Un bon exemple d’évangélisation nous est fourni par la rencontre entre le Seigneur Jésus-Christ – notre divin modèle – et le jeune homme riche.1

Dans la rencontre qui précède (Marc 10.13-16), Jésus nous indique quelles sont les qualifications requises pour entrer dans le royaume de Dieu. Et c’est par là qu’il nous faut commencer.

I. Les qualifications requises pour entrer dans le royaume de Dieu (v.13-16)

Des gens cherchent à apporter leurs enfants à Jésus afin qu’il les bénisse, mais les disciples leur font obstacle, pensant que Jésus a mieux à faire qu’à s’occuper de nourrissons – négligés par les hommes de l’époque au profit des réalités spirituelles.

Lorsque Jésus voit cela, il est indigné et blâme ses disciples (v.14a). Puis il accueille ces enfants, les embrasse et les bénit en leur imposant les mains (v.16) et enfin il saisit l’occasion pour indiquer quelles sont les qualifications requises pour entrer dans le royaume de Dieu. Il déclare : « Quiconque ne recevra pas le royaume de Dieu comme un petit enfant, n’y entrera point. » (v.15)

Essayez d’imaginer la scène ! Jésus, qui tient peut-être un nouveau-né dans ses bras, dit : « Regardez ce nouveau-né. Il est l’exemple même des qualifications qui doivent caractériser ceux qui entrent dans mon royaume. » Cela surprend les disciples. Pour eux, seuls les gens respectables sont qualifiés pour accéder au royaume de Dieu. Mais notre Seigneur bouleverse leur entendement et le nôtre : ses critères ne sont pas les nôtres.

Que voulait enseigner Jésus au moyen de ce nourrisson ?

– Ce n’est pas la pureté et l’innocence, car les Juifs n’ont jamais eu une notion naïve et idéaliste de l’enfant comme nous l’avons aujourd’hui, suite aux ravages accomplis dans les milieux éducatifs par Rousseau et Piaget. Lisez les Proverbes et vous constaterez tout de suite qu’ils savaient que, dès sa naissance, l’enfant est sur la voie de la mort et qu’il doit être corrigé pour qu’il s’en détourne (Pr 22.15 ; 29.15).

– C’est l’incapacité personnelle et l’humble confiance de l’enfant qui retiennent l’attention de notre Seigneur. Un nouveau-né est un être extrêmement vulnérable et dépendant. Il suffit qu’il soit abandonné pour qu’il meure. Par contre il s’abandonne sans difficulté, avec confiance et sans réserve aux bras qui l’accueillent. Et, comme la rencontre avec le jeune homme riche va le confirmer, ce sont là les qualifications requises pour entrer dans le royaume de Dieu. Car aussi longtemps que nous pensons trouver en nous-mêmes les capacités nécessaires pour y accéder, nous en sommes encore loin.

Après cet épisode quelque peu déconcertant pour les disciples, Jésus se trouve en face de quelqu’un qui reçoit enfin leur respect – le jeune homme riche. C’est par cette rencontre que nous allons découvrir l’évangélisation selon le Maître.

II. Les atouts du jeune homme riche (v.17-22)

Cet homme était un « chef » nous dit Luc 18.18 ; peut-être un pharisien ou en tout cas un homme de la classe supérieure. Il avait une bonne moralité puisqu’il s’était efforcé de garder tous les commandements de Dieu depuis sa jeunesse (v.20). En plus de cela, il avait des aspirations religieuses puisqu’il appelle Jésus « bon maître » et qu’il se préoccupe de la façon d’obtenir la vie éternelle (v.17b). Pour couronner le tout, il était très riche car il avait de grands biens (v.22).

À vue humaine, cet homme était un candidat idéal pour l’évangélisation actuelle. C’était la situation rêvée ! Imaginons-nous au coin de la rue en train de distribuer des invitations ou des traités et voilà qu’un homme arrive et nous dise : « Que dois-je faire pour hériter la vie éternelle ? »

Que lui répondrions-nous ? N’aurions-nous pas vite fait de lui un « chrétien », un « bon » membre d’église en l’espace de quelques phrases, de quatre lois spirituelles et d’une prière de consécration ? Mais l’échange avec notre Seigneur produit un tout autre effet, puisque cet homme si prometteur à vue humaine « s’assombrit… et s’en alla tout triste » (v.22). Cette rencontre nous bouscule ; c’est la raison pour laquelle elle est particulièrement adaptée pour nous mettre en garde contre une propension à vouloir obtenir des résultats rapides chez des personnes apparemment bien disposées.

Alors laissons-nous remettre en question par la façon dont notre divin Maître proclama l’Évangile à ce jeune homme.

III. La proclamation de l’Évangile par Jésus (v.17-21)

A) Son attitude

On pourrait penser que la tristesse du jeune homme riche procède d’un manque d’amour du Seigneur à son égard, mais il n’en est rien puisque le v.21 nous dit : « Jésus l’ayant regardé, l’aima ». Comment est-ce que Pierre – qui a probablement dicté cet Évangile à Marc – a pu affirmer une telle chose ? C’est parce que l’amour et la compassion du Seigneur pour ce jeune homme étaient évidents.

Cette observation est capitale : si Jésus adresse un message dur à entendre à cet homme, un message qui l’amène à partir tout triste, ce n’est pas par manque d’amour. C’est justement parce qu’il l’aime qu’il lui parle si clairement. Car l’amour vrai consiste à dire la vérité à son frère (Éph 4.15), même si elle est dure à entendre.

Un exemple : vos enfants descendent en luge sur une pente enneigée et vous savez qu’elle se termine par un précipice. Allez-vous renoncer à les avertir du danger afin de ne pas gâcher leur plaisir ? Non, par amour vous allez les avertir du danger, au risque de gâcher leur plaisir.

De même, notre amour pour les perdus doit nous inciter à leur annoncer l’Évangile dans toute sa clarté, sans masquer les vérités qui peuvent nous paraître les plus sévères comme : la nature pécheresse de l’homme, son état de culpabilité et de perdition éternelle devant Dieu. Ils doivent comprendre dans quelle situation désespérée ils se trouvent devant Dieu.

B) Son message

Afin de bien mesurer le poids des paroles du Seigneur, essayez de vous replacer dans le contexte de cette rencontre. À vue humaine, ce jeune homme possède de nombreux atouts. Il est religieux, riche, moral, respectable et il arrive avec une question précise et pertinente quant à sa destinée éternelle : « Bon maître, que dois-je faire pour hériter la vie éternelle ? » (v.17)

Que lui auriez-vous répondu ? « Repens-toi de tes péchés et crois au Seigneur Jésus. » C’est ce qu’on aurait tendance à dire aujourd’hui.

Pourtant, ce n’est pas ainsi que lui répond notre Seigneur. Pourquoi ? Parce qu’en général une telle phrase ne suffit pas pour qu’un homme prenne conscience de sa nature profondément pécheresse. Avant de l’appeler à la repentance et à la foi, Jésus veut le mettre précisément face à sa culpabilité. Pour ce faire, il le confronte au caractère de Dieu et à sa loi.

1. Le caractère de Dieu (v.18)

Comme le jeune homme l’avait appelé « Bon Maître », Jésus se sert de cette expression pour le faire réfléchir. Il faut savoir qu’à l’époque les Juifs réservaient le qualificatif « bon » exclusivement à Dieu. Ainsi, lorsqu’il répond : « Pourquoi m’appelles-tu bon ? Personne n’est bon si ce n’est Dieu seul », Jésus veut faire prendre conscience à son interlocuteur de la distance infinie qui existe entre Dieu et l’homme pécheur. Dieu seul est parfaitement bon et aucun homme, serait-il moral et religieux, ne peut atteindre une bonté satisfaisante à ses yeux.

Ainsi, par cette première phrase, Jésus se sert d’un attribut de Dieu, en l’occurrence sa bonté, non pour inciter l’homme à s’approcher de Dieu, mais pour lui montrer sa culpabilité et sa misère. Malgré tout ce qu’il a fait, ce jeune homme riche, n’est pas assez bon pour satisfaire les exigences de Dieu.

C’est là une leçon pour nous. Dans l’évangélisation, apprenons à faire usage des attributs de Dieu afin d’amener le pécheur à voir la distance infinie qui le sépare de son créateur. Notre évangélisation doit commencer par Dieu et son caractère, c’est ainsi que l’homme est remis à sa juste place et convaincu de péché.

Paul agit de même à Athènes en confrontant ses auditeurs païens avec le Dieu tout-puissant, tout autre et autosuffisant (Act 17.24-28).

2. La loi de Dieu (v.19)

Ensuite Jésus place le jeune homme face à la loi de Dieu. Pourquoi ? Comme le dit l’apôtre Paul, elle est l’instrument établi par Dieu pour amener l’homme à reconnaître son péché et sa culpabilité (Rom 3.20). C’est ainsi qu’en une seule phrase, notre Seigneur cite les six derniers commandements du Décalogue – ceux qui concernent les devoirs de l’homme envers son prochain.

Et quelle est la réponse du jeune homme à cette liste ? « Maître, j’ai gardé tout cela dès ma jeunesse » (v.20). En fait, face à ces commandements énoncés d’une façon générale, il n’éprouve encore aucune conviction de péché. C’est pourquoi Jésus ne s’arrête pas là, mais il applique un des commandements au problème spécifique de cet homme, celui de l’avarice. En lui disant : « Va, vends tout ce que tu as, et donne-le aux pauvres », Jésus met en lumière son péché et sa culpabilité. Le jeune homme est attaché à ses richesses, il est matérialiste.

Et ce n’est qu’à partir de ce moment-là que Jésus adresse au jeune homme riche un appel à la conversion. Car une réelle conviction de péché précède toujours une conversion authentique.

Nous comprenons ainsi l’importance capitale de l’utilisation de la loi de Dieu dans l’évangélisation. Si notre Seigneur l’a employée, c’est parce qu’elle est l’instrument parfaitement adapté pour conduire à Christ, comme l’atteste l’apôtre : « Ainsi la loi a été un précepteur pour nous conduire à Christ, afin que nous soyons justifiés par la foi » (Gal 3.24). N’essayons pas d’être plus sages que le Seigneur ! Employer la loi de Dieu à sa juste place n’est ni moralisateur, ni légaliste, c’est tout simplement biblique et capital si nous voulons voir de vraies conversions. Certes, cette façon de faire repoussera peut-être certains, entraînera sans doute aussi des conversions moins rapides – nécessitant parfois de longs entretiens avant qu’une conviction de péché précise naisse – mais elle produira des fruits durables. Car la Bonne Nouvelle ne consiste pas à déclarer qu’avec Jésus tout ira bien, mais qu’en Christ se trouve la réconciliation avec Dieu et le pardon pour de pauvres pécheurs perdus.

Donc, dans notre évangélisation, ayons le courage de mettre le doigt sur des péchés spécifiques au moyen de la loi de Dieu. Certes, nous ne lisons pas dans les cœurs comme le Seigneur, alors restons tout de même prudents afin de ne pas mettre de fausse pression sur le pécheur, mais n’escamotons pas cette étape.

3. L’appel (v.21b)

Une fois que le jeune homme est convaincu de culpabilité, Jésus l’appelle à entreprendre deux actions qui forment les deux aspects de toute conversion authentique.

a) Il lui demande de vendre tout ce qu’il a afin de le distribuer aux pauvres. Pour un homme riche attaché à ses biens, c’est à la repentance que Jésus l’appelle par cet acte. C’est reconnaître que son affection mal placée est un péché et s’en détourner avec horreur.

Ce que Jésus exige de cet homme n’est pas simplement une repentance verbale, mais un changement radical de comportement dans les domaines où le péché est reconnu. D’avare qu’il était, Jésus appelle cet homme à devenir généreux. Quelle transformation !

Jésus nous montre par là qu’il est impossible de devenir chrétien et de continuer à vivre comme auparavant. La repentance authentique implique toujours un changement de comportement et un rejet délibéré du péché. Les théories selon lesquelles il est possible d’accepter Jésus comme Sauveur dans un premier temps, puis comme Seigneur beaucoup plus tard, sont contredites par ce passage, car la repentance authentique implique toujours une soumission à la seigneurie du Christ.

b) Ensuite Jésus lui dit : « Viens et suis-moi. » C’est un appel à la foi. Jésus lui demande de se confier en lui et non plus en ses richesses. Il l’appelle à se placer sous son autorité dès cette vie présente. C’est un appel exigeant qui ne consiste pas à « laisser entrer Jésus dans son cœur », mais à se soumettre et à le suivre en tant que disciple. À reconnaître qu’il est le seul à donner un sens à la vie.

Quelle leçon ! Jésus ne présente pas la vie chrétienne comme un chemin facile, mais plutôt comme une vie de renoncement, d’incompréhension et de persécution à sa suite (Jean 15.18-21).

IV. La réponse de l’homme (v.22)

Un tel message n’est pas attirant pour l’homme irrégénéré, puisqu’il nous est dit que le jeune homme « s’assombrit à ces paroles et s’en alla tout triste, car il avait de grands biens. »

Nous ne savons pas ce qu’il advint de lui par la suite. Est-il revenu vers le Seigneur plus tard ? Nous l’ignorons. À première vue nous aurions tendance à dire que cette rencontre avec Jésus ne lui a fait aucun bien, puisqu’il semble être en plus mauvais état à son départ qu’à son arrivée. Il était enthousiaste et le voilà abattu.

Pourtant, si nous considérons la chose avec un regard spirituel, nous pouvons dire qu’il est plus proche du royaume de Dieu maintenant qu’il ne l’était auparavant. Car il est conscient de sa culpabilité devant Dieu. Et lorsqu’un homme est conscient de son péché, il est plus proche du royaume de Dieu que lorsqu’il se croit juste.

Et notez bien que notre Seigneur, qui est si prompt à soulager la douleur des hommes en général, ne court pas après ce jeune homme pour tenter de le consoler ou pour négocier avec lui une entrée facilitée dans le royaume. Il ne nuance pas ses propos après avoir constaté leur effet sur son interlocuteur. Mais il se contente de tirer une leçon générale pour ses disciples à partir de ce cas particulier.

V. La leçon divine (v.23-27)

Jésus, qui prépare ses disciples à leur futur ministère, leur montre qu’ils auront des déceptions s’ils prêchent fidèlement l’Evangile. Ils verront des gens prometteurs et enthousiastes s’en aller tout tristes, préférant leur péché à l’amour de Dieu. D’autres s’éloigneront sous une conviction de péché, car ils auront besoin de temps avant d’accepter l’Evangile.

Au moyen d’une illustration surprenante – celle du chameau et du trou d’aiguille – Jésus veut graver dans notre esprit une leçon importante par rapport à l’évangélisation. C’est que le salut est une œuvre impossible aux hommes. Ce qu’il dit du riche ici est valable pour tous les hommes. Il aurait tout aussi bien pu dire : « Il est plus facile à un chameau de passer par le trou d’une aiguille qu’à un orgueilleux, un colérique, un vicieux, un voleur, un médisant… d’entrer dans le royaume de Dieu. »

IMPOSSIBLE, telle est la leçon divine que Jésus veut nous transmettre. Comme il était impossible au jeune homme qui nous paraissait si prometteur de se sauver, de même il est impossible à tout homme de se sauver par lui-même.

Si nous ne voulons pas avoir une mauvaise perspective dans notre évangélisation, nous devons constamment nous rappeler cette vérité. Nous sommes appelés à une mission IMPOSSIBLE à vue humaine. Il est IMPOSSIBLE au prédicateur de sauver ceux qui l’écoutent. Il est IMPOSSIBLE à ses auditeurs de répondre à son appel, parce qu’ils sont morts dans leurs péchés. Et s’il y a de l’espoir dans cette mission impossible, c’est parce que notre confiance ne repose pas sur nous, mais sur Dieu auquel tout est possible (v.27).

Toutefois, notez bien que Jésus n’interdit pas à cet homme de venir au salut. Son message est simple, direct et engageant. Il ne cherche pas à lui voiler la vérité, bien au contraire. Il lui montre son péché avec compassion. Il l’invite avec amour et insistance. Ainsi, si cet homme ne vient pas au salut, ce n’est pas par une cause extérieure qui le maintient loin de Dieu, mais en raison de la méchanceté et de l’avarice de son cœur qui l’empêchent de répondre à cet appel. Son intelligence est pervertie, ses sentiments sont faussés et sa volonté est asservie à sa nature pécheresse. Dans cet état, il est incapable de voir la gloire de l’Evangile qui lui est présenté.

Pour venir au salut, entrer dans le royaume de Dieu, il a besoin que Dieu lui accorde la foi véritable et une nature nouvelle, une nature qui lui permette ensuite de voir la réalité spirituelle telle que Dieu la voit. Et cela nul homme ne peut le fabriquer (Jean 3.3-8). C’est pourquoi, nous dépendons totalement de Dieu pour les résultats de notre évangélisation.

Conclusion

Cet enseignement du Seigneur doit avoir des conséquences pratiques sur notre évangélisation.

– Il nous rappelle que nous devons aimer les incroyants. Les aimer à un tel point que nous serons prêts à leur dire la vérité sur leur état spirituel aux yeux de Dieu. À nous servir des attributs de Dieu, de sa loi, afin de les amener à une conviction de péché authentique.

– Il nous conduit à nous méfier des « méthodes » qui présentent un Évangile facile et dont les résultats reposent sur les capacités humaines. Un tel Évangile n’est pas l’Évangile biblique qui est exigeant et réclame un engagement définitif de l’être tout entier au service du Seigneur.

– Il nous incite à accompagner notre proclamation de l’Evangile d’abondantes prières, car c’est sur Dieu que nous comptons pour voir des fruits à notre travail. Car lui seul est capable de ramener des morts spirituels à la vie. À lui seul soit toute la gloire.

Notes
1 Pour ceux qui voudraient prolonger la réflexion, vous pouvez vous référer au livre de Walter Chantry, Le Maître à l’ouvre, Europresse, Chalon-sur-Saône, 1991.


 

En marge de 1 Samuel 17

Frank Schœnbach est né en 1953 ; il est marié, père de 4 enfants et 3 fois grand’père. Il travaille comme chirurgien en Allemagne. Par son père, qui fut prisonnier de guerre en France, où il a trouvé le Seigneur, il a toujours entrenu des relations avec les chrétiens francophones. Cet article a été réalisé avec l’aide de Florence Delacoux.

Oh non, pas encore ça ! Comme hier et les jours d’avant, il est à nouveau là, notre gigantesque problème en personne ! Il nous abreuve d’injures, d’outrages, qui nous font tellement peur que nous préférerions nous enfuir. Comment cela va-t-il finir ? Comment nous en sortir ?

1. ATTENDONS-NOUS AU PIRE

Oui, ce gigantesque problème…

– nous ne pouvons pas ne pas l’entendre : Goliath crie si fort à travers la vallée (v. 3) que chacun peut l’entendre, sans mégaphone, et nous ne comprenons que trop bien ses paroles ;

– nous ne pouvons pas ne pas le voir : du haut de ses 2,90 m, il domine tout ce que nous connaissons autour de nous et par notre expérience (v. 4) ;

– nous ne pouvons pas le congédier : voilà déjà 40 jours que nous subissons ses discours provocateurs pleins de haine (v. 16) ;

– nous ne pouvons pas mépriser ses arguments : il suffit de regarder ses armes, et rien que sa lance, aussi longue qu’un arbre, dont le fer pèse près de 7 kg (v. 7). Une telle pique mettrait n’importe qui par terre ! et quiconque peut porter une cotte de maille de 60 kg doit certainement avoir une force illimitée ;

– nous ne pouvons pas esquiver l’affrontement : c’est juste une question de temps avant que le vrai combat ne commence, et pas besoin de se demander comment cela va finir !

– nous ne pouvons pas ignorer que ce monstre tire parti des fautes de nos ancêtres (ce qui est bien navrant !). En fait, nous avons hérité cet ennemi de nos chers aïeux, qui ont désobéi à Dieu lors de la conquête de notre pays (voir Juges 1-3). Maintenant, nous devons en supporter les conséquences, et nous ne savons que faire !

– En un mot : NOTRE ADVERSAIRE EST INVINCIBLE !

2. LA STRATEGIE DE GOLIATH

L’intimidation. Jusqu’à maintenant, il s’est contenté de proférer des injures. Si nous y regardons de près, il n’a encore fait de mal à aucun Israélite, mais il nous en fera certainement ! Cela provoque en chacun de nous un sentiment de découragement, de la crainte et le désir de s’enfuir (v. 11, 24).

La dislocation de notre cohésion. Il essaie de nous isoler (v. 8, 10). Il ne veut se battre que contre un seul homme, et il veut le tuer tout seul. Chacun tremble intérieurement. Ce sentiment se répand comme une épidémie (v. 24), car chacun se retrouve seul face à la mort.

L’initiative du mouvement. Il profite de sa supériorité pour dicter les règles du combat (v. 8-9). N’est-ce pas un comble ? Qu’est-ce qui nous empêche de nous liguer pour l’abattre ? Dieu n’a-t-il pas autrefois ordonné à notre peuple tout entier de partir à la conquête de notre pays, sous le commandement de Josué (voir Josué 1.11-16) ? Et nos pères ont vraiment combattu ensemble et ont remporté la victoire contre un peuple de géants (Josué 11.21 ; 14.15).

L’exploitation de notre lâcheté. Il abuse de moqueries et de mépris (v. 11, 24), et nous nous tenons là comme des imbéciles sous les yeux de nos ennemis, et comme figés devant eux. Goliath sait aussi bien que nous tous que personne ne se lèvera pour le combattre, parce que personne n’a aucune chance contre lui – n’est-ce pas ?

La perte de notre temps (v. 16). Depuis longtemps, plus rien ne se passe, que ce soit ici sur le champ de bataille, ou à la maison, dans nos familles et dans nos champs. Notre temps se perd.

Oui, Goliath est déterminé à nous barrer le passage, à camper devant notre porte, et à nous anéantir. Quelles formes prend-t-il aujourd’hui ? Nous l’entendons rugir chaque jour dans nos vies, mais il s’adapte à chacune de nos situations. Ses propos perfides résonnent à nos oreilles:

– Pense à ta solitude de célibataire ou de veuf, de veuve : comment vas-tu pouvoir continuer à faire face ?
– Comment vas-tu gérer les problèmes dans ta famille ou les relations avec certains de tes parents difficiles (ou de la famille de ton mari, de ta femme peut-être ?), afin que tout finisse bien ?
– Vas-y essaie de dénouer les tensions, ou même les conflits sérieux de ton mariage

– Peux-tu continuer à supporter les pressions à l’école, les tensions avec un ou plusieurs professeurs ?

– Allez, viens à bout des soucis qui frappent actuellement à ta porte, concernant ton travail, tes difficultés financières, ta santé ou ton handicap !

– Arrive enfin à surmonter ton péché favori (peut-être tout à fait secret), ces mauvaises pensées qui montent souvent à ton esprit, cette dépression toujours latente !

– Abandonne ta vie de foi superficielle, elle n’est d’aucune utilité !

– Fais face à tes problèmes relationnels avec certains frères et sœurs difficiles, qui transforment votre église en champ de bataille, au lieu de faire de l’église votre foyer !

– Et puis il y a encore ces innombrables petites contrariétés de ta vie quotidienne qui t’irritent au plus haut point et qui, parce qu’elles te tapent sur les nerfs, t’apparaissent comme de gigantesques obstacles…

Non formulée, mais résonnant pourtant haut et fort, voici la phrase dévastatrice qui se cache derrière toutes ces attaques : N’INSISTE PAS, TU N’AS AUCUNE CHANCE D’Y ARRIVER !

Lorsque l’un de nous se trouve plus courageux, plus équilibré et plus solide que les autres, il essaie de relever ce défi surhumain. Mais son armure, forgée avec tant de savoir-faire, de compétence et de diligence (v. 38-39) ne l’aide pas à faire un seul pas. Qu’il essaie néanmoins d’avancer, il aura l’air parfaitement ridicule !

3. L’IRRUPTION DE DAVID

C’est alors qu’apparaît quelqu’un qu’on n’attendait pas, et c’est lui qui provoque le tournant décisif dans cette bataille : David. Parce qu’il est également Israélite, il est confronté au même problème que les autres, même s’il n’en est pas encore conscient. Et il annonce publiquement, à l’étonnement général, qu’il va aller se battre contre Goliath tout de suite (v. 32). Comment ceux qui l’entendent vont-il réagir ?

Ses trois frères estiment que le jeune homme, qui est manifestement le benjamin et complètement insignifiant dans la hiérarchie familiale (voir 1 Sam 16.4-11), agit en irresponsable, en curieux à la recherche de sensations fortes (v. 28). Il doit être effronté et insensé pour oser s’engager dans une telle aventure. Ils lui reprochent son initiative – tout en restant eux-mêmes passifs.

Le roi Saül le considère comme un homme jeune et inexpérimenté (v. 33 et suivants), et lui conseille tout d’abord de ne pas aller se battre contre Goliath, ce guerrier professionnel. Mais s’il insiste pour y aller, il aura besoin de conseil humain (v. 38-39) et de l’aide d’un aîné expérimenté – même si ce dernier n’est malheureusement pas assez courageux pour s’approcher lui-même d’un centimètre du problème qui les menace !

Goliath voit en David un gamin ridicule, qu’il ne prend pas du tout au sérieux, mais qu’il méprise profondément et qu’il maudit au nom de ses dieux (v. 42-44). Le colosse est absolument certain de sa propre victoire, car il ne voit que ce jeune garçon, et derrière lui les soldats hébreux terrifiés, qu’il dépasse tous de plus d’un mètre. Mais il n’a pas la moindre idée de la grande puissance qui se cache derrière les Israélites, ni de la faiblesse de ses propres dieux.

4. DAVID ET SON DIEU

Les hommes de l’armée d’Israël connaissaient bien cette puissance, au moins théoriquement. Mais David comptait fermement sur son intervention très concrète.

– En cela, il s’appuyait sur ses expériences précédentes avec son Dieu. En tant que berger, il n’avait pas seulement connu la rudesse et la beauté du désert, joué de la flûte et de la harpe avec plaisir, écrit de beaux psaumes dans des endroits ombragés, et ne s’était pas non plus juste un peu exercé à la fronde. Il s’était aussi retrouvé dans des situations mettant sa vie en péril, ayant eu à combattre contre des lions et des ours. Il avait vu comment Dieu l’avait « délivré » (v. 37). Ces expériences lui donnent maintenant la pleine certitude que son Dieu peut le délivrer également dans ce combat, et qu’il le fera.

– David évalue la situation du point de vue de Dieu. Il ne voit pas un géant invincible, qui se moque des troupes d’Israël (v. 10) mais un païen incirconcis, c’est-à-dire le serviteur de dieux morts, qui défie les armées du Dieu vivant (v. 26). Ici, ce n’est pas la réputation de quelques hommes, ou de son peuple, dont il s’agit, mais de l’honneur de Dieu. Il sait que son Dieu se tient aux côtés de son peuple, pour autant que ce dernier se confie en lui. Dieu n’acceptera pas indéfiniment que son peuple ou lui-même soient méprisés et traînés dans la boue.

David savait dans son cœur que le Seigneur n’est pas indifférent à son peuple, mais qu’il est tout près de lui dans les moments de besoin, de crises, et de conflits. Comme Ésaïe l’a écrit plusieurs siècles plus tard, « dans toutes leurs détresses, il a été en détresse, et l’Ange de sa face les a sauvés » (És 63.9). Et Jérémie l’exprime ainsi : « C’est pourquoi mes entrailles se sont émues pour lui ; certainement, j’aurai compassion de lui, dit l’Éternel » (Jér 31.20 ; voir Os 11.8).

Paul a également fait l’expérience de cette aide spéciale et de la présence du Seigneur lorsqu’il était en prison, seul et attendant sa sentence (2 Tim 4.17-18). L’apôtre fait certainement allusion aux paroles de David dans le Psaume 22 lorsqu’il souligne qu’il a été « délivré de la gueule du lion ».

– David n’est pas naïf au point de comparer ses outils de berger et l’utilisation, peut-être très habile, qu’il en fait, à l’armure high-tech de Goliath. Il ne se fie pas à son fantastique talent de frondeur (il savait très bien qu’il pouvait rater sa cible : n’oublions pas qu’il avait cinq pierres en réserve !), mais il va à la rencontre de l’ennemi au nom du Dieu d’Israël, qui est également le Seigneur des armées célestes, que Goliath avait outragé (v. 45). Ce n’étaient pas des cailloux contre une armure de bronze – mais Dieu contre Goliath !

Nous lisons dans le Nouveau Testament que notre combat n’est pas contre la chair et le sang, ce qui signifie contre d’autres hommes, leurs moyens et leurs possibilités, mais contre les forces spirituelles, et que nos armes dans ce combat doivent être spirituelles, selon Dieu, si nous voulons être vainqueurs (2 Cor 10.3-4 ; Éph 6.10-17). Nous sommes également appelés à résister fermement au diable, lorsqu’il « rugit » dans nos vies à pleine voix (1 Pi 5.8-9).

– David voit par la foi – par les yeux de Dieu, pour ainsi dire – l’ennemi déjà vaincu (v. 46-47). Il n’a pas pour ambition de passer pour un héros admirable. Dans cette situation très menaçante pour lui, il lui importe beaucoup plus que les Israélites, tout comme les Philistins, sachent qu’Israël a un Dieu, qui combat lui-même, et qui ne sauve pas par des moyens ou des capacités purement humains.

Le Seigneur Jésus et ses disciples nous ont montré à maintes reprises un ennemi déjà mortellement atteint, même si la victoire finale est encore à venir (Apoc 12 et 20) : « Maintenant c’est le jugement de ce monde ; maintenant le chef de ce monde sera jeté dehors » (Jean 12.31) « parce que le prince de ce monde est jugé » (Jean 16.11). « Ainsi donc, puisque les enfants participent au sang et à la chair, lui aussi, d’une manière semblable, y a participé, afin d’écraser par sa mort celui qui détenait le pouvoir de la mort, c’est-à-dire le diable. » (Héb 2.14)

Avons-nous saisi que ces analogies s’appliquent aussi à nos propres vies ?

Malgré nos problèmes « criants », saurons-nous jeter la pierre décisive contre Goliath ?

Faisons donc totalement confiance à Dieu, car Christ nous précède !


Florent Varak a grandi dans une famille passionnée de spiritualité orientale. En 1984, il se convertit au christianisme. Il est titulaire d’une maîtrise de théologie et pasteur d’une église évangélique à Lyon depuis plus de 10 ans. Il est marié et père de trois enfants. Il enseigne aussi à l’Institut Biblique de Genève (IBG). Conférencier et écrivain, il est l’auteur de deux ouvrages : La Foi charismatique (Editions CLE) et La Réincarnation (Editions CLE). De nombreux articles, dus à sa plume sur des sujets actuels sont disponibles sur le site www.grace-lyon.org ou www.unpoissondansle.net. Florent Varak fait partie du comité de soutien de Promesses.

Il est des moments dans la vie avec Dieu où le Seigneur prend plaisir à tester notre intégrité. Il autorise des circonstances ou des situations, où un homme va refléter concrètement son amour pour Dieu. Tel fut le cas pour Daniel dans le récit rapporté au ch. 6 de son livre.[note]Cette étude est reprise et adaptée de l’étude du livre de Daniel par Florent Varak disponible sur www.unpoissondansle.net/dan/dan.php?d=&i=6. [/note]

La jalousie des collègues (6.1-5)

En 539 av. J.C., le roi perse Cyrus conquiert la ville de Babylone. Après avoir pris la ville, Cyrus continue sa conquête, et laisse à Gubaru (appelé Darius dans le livre de Daniel) le soin de gérer sa nouvelle acquisition.

Ce Gubaru (alias Darius) nomme 6 gouverneurs par provinces, soit 120 « satrapes », c’est-à-dire 120 hauts fonctionnaires. Trois ont la charge de superviser l’ensemble, et Daniel est en quelque sorte le premier ministre de cette administration. C’est merveilleux ? Pas vraiment !
– Ses collègues, perses ou mèdes, sont verts. Verts de jalousie, verts de rage, verts d’envie.
– Pour comble, Daniel est vieux (environ 80 ans) et Juif. Pour eux, il n’a rien à faire dans le gouvernement de Babylone.
– Ces charmants collaborateurs cherchent un moyen d’accuser Daniel de négligence (6.5), mais ne trouvant rien, ils se tournent vers la religion de Daniel pour y découvrir un motif de dénonciation.

Le complot des collègues (6.6-9)

Les collègues de Daniel complotent. Pour renverser Daniel, ils s’appuient sur deux éléments :
– La Loi de Dieu dit : « Tu n’adoreras que le Seigneur ton Dieu. » Cela fait partie des 10 commandements. Si le roi signait un décret obligeant à adorer un dieu, alors Daniel serait cuit. Ou plutôt mangé, car si la peine de mort chez les Babyloniens c’était le bûcher, pour les Perses, c’était les lions [note]Le feu était leur dieu, et il aurait été sacrilège de l’utiliser comme moyen de condamnation.[/note].
– La loi des Mèdes et des Perses se voulait irrévocable lorsqu’elle était scellée par les dignitaires de ces empires.
Leur stratégie est particulièrement haineuse. Ils trompent le roi en disant que « tous les chefs du royaume, les intendants, les satrapes, les conseillers et les gouverneurs » sont d’accord sur cette proposition. Manifestement, c’est tous, sauf le premier ministre ! Le roi Darius ne prend pas soin de vérifier les dires de ces dizaines de dignitaires qui réclament bruyamment la signature du décret.

De telles demandes apparaissent démesurées aujourd’hui – du moins dans les pays occidentaux. Mais les despotes du coin et de cette époque exigeaient souvent le culte de leur personne.

L’intégrité spirituelle de Daniel (6.10-15)

Le refus de Daniel le condamne à la fosse aux lions. Daniel a eu une longue vie, bien remplie. Il a été fidèle à Dieu, tout en étant un fonctionnaire responsable au sein des divers empires qu’il a traversés. Je suppose qu’il a au moins été tenté de trouver une solution pour échapper à ce piège :
– Cesser de prier pendant 30 jours par exemple.
– Ou prier la nuit, lorsque personne ne regarde.
Je me demande ce que j’aurais fait… C’est une chose d’être intègre pour Dieu sans pression ; c’en est une autre de l’être lorsqu’une foule de personnes influentes qui sont vos propres collègues vous poussent à ne pas l’être.

L’intégrité spirituelle de Daniel est remarquable. Et elle se résume en une phrase : il vit pour Dieu quels que soient les agissements des gens autour de lui. Il continue donc à prier, 3 fois par jour, devant les fenêtres. Il continue même de le faire lorsque les hommes entrent chez lui (v. 11).

L’étau se ressert donc sur Daniel. Le roi est affligé ; il réalise qu’il a été floué, mais qu’il ne peut rien pour arrêter ce qu’il a lancé.

Les conséquences de l’intégrité de Daniel (6.16-28)

Daniel est jeté dans la fosse aux lions, dont l’ouverture est scellée [note]Le scellement devait consister à poinçonner un morceau de terre glaise. La signature en relief contenue sur l’anneau identifiait l’auteur de l’acte. [/note]. Il se trouve que dans cette situation unique de l’histoire, Dieu a choisi d’intervenir pour préserver Daniel. Six siècles plus tard, lors des persécutions romaines, bien des chrétiens n’auront pas le même privilège. Il semble même que Paul ait échappé de justesse à ce terrible châtiment [note]Du moins si l’on interprète ce verset littéralement (NDLR).[/note] (2 Tim. 4.17). L’auteur de l’épître aux Hébreux fait sans doute allusion à cet épisode dans la superbe présentation des héros de la foi de l’Ancien Testament : « Et que dirais-je encore ? Car le temps me manquerait si je passais en revue […] les prophètes qui, par la foi, […] fermèrent la gueule des lions. » (Héb 11.32-34)

Devant cette délivrance miraculeuse, le roi décide de punir les accusateurs de Daniel ; son décret est radical : « Que ces hommes qui avaient accusé Daniel soient amenés et jetés dans la fosse aux lions, eux, leurs enfants et leurs femmes ! » La Loi de Moïse interdisait que l’on punisse la famille d’un coupable (Deut. 24.16) ; l’ordre du roi était donc injuste. Mais les monarques non juifs n’avaient pas la même sensibilité. La condamnation avait un effet dissuasif sur toute personne qui voulait tromper un roi. Cela tuait dans l’œuf toute possibilité de vengeance également.

Le texte décrit crûment ce qui se produisit : « Et avant qu’ils soient parvenus au fond de la fosse, les lions se ruèrent sur eux et brisèrent tous leurs os. » (6.24)

Le roi est évidemment impressionné par la délivrance de Daniel – surtout en contraste avec le « festin » qui a suivi – au point qu’il rédige une lettre destinée aux provinces dont il avait la gouvernance : « Je donne l’ordre que, dans toute l’étendue de mon royaume, on ait de la crainte et du respect devant le Dieu de Daniel.

Car il est le Dieu vivant
Et il subsiste à jamais !
Son royaume ne sera jamais détruit.
Et sa domination durera jusqu’à la fin.
C’est lui qui sauve et délivre,
Qui opère des signes et des prodiges
Dans les cieux et sur la terre.
C’est lui qui a sauvé Daniel
De la griffe des lions. » (6.25-27)

La religion de Darius, dualiste, à laquelle étaient associés de nombreux dieux, souvent illustrés ou représentés par le feu, n’est pas comparable à la puissance si éclatante du Dieu d’Israël. Le roi Darius ne s’est pas trompé à son sujet !

Gérer le succès

L’honneur, c’est comme le parfum, ça doit rester à l’extérieur – c’est du poison quand on le boit ! Le roi Darius aurait dû se méfier de la flatterie de sa cour. Le roi aurait dû veiller à cultiver l’humilité. Parce qu’il était sensible à la flatterie, il a pu être manipulé aisément. La recherche de la gloire, de l’approbation des autres, est l’un des grands dangers de l’homme. Au fond, c’est de l’orgueil.

Fait étrange : si un péché comme l’adultère est rapidement identifié dans une église et si le processus de discipline se met en place pour de tels péchés, on l’envisage mal pour l’orgueil. Pourtant, c’est l’un des sept vices que l’Eternel déteste : « Il y a six choses pour lesquelles l’Éternel a de la haine, et même sept qu’il a en horreur : les yeux hautains, la langue trompeuse, les mains qui répandent le sang innocent, le cœur qui médite des projets injustes, les pieds qui se hâtent de courir au mal, le faux témoin qui profère des mensonges, et celui qui déchaîne des querelles entre frères. » (Prov. 6.16-19)

De gros échecs spirituels ont lieu après de grandes victoires ou de grands sommets.
– Pierre s’est entendu dire par le Seigneur : « Arrière de moi, Satan », juste après qu’il a dit à Jésus sa compréhension de son identité : « Tu le Christ, le Fils de Dieu. » (Mat 16)
– C’est après la victoire sur Jéricho qu’Acan a pris du trésor défendu (Jos 7).
– C’est après des milliers de conversions, et une vie d’église remarquable, qu’Ananias et Saphira tombèrent morts pour leur péché (Act 5).

Et on pourrait multiplier les exemples.

Dans le développement de notre intégrité et de notre marche avec le Seigneur, soyons très vigilants sur la gestion du succès. Pour l’avoir ignoré, Darius est tombé dans un piège monstrueux. Daniel, lui, a toujours su gérer cette situation avec Dieu.

Le piège de la jalousie

Les conseillers du roi étaient jaloux du succès de Daniel – comme quoi les hommes n’ont pas beaucoup changé au cours du temps :
– Joseph a été vendu comme esclave par ses propres frères, jaloux de l’amour que lui portait leur père.
– Saül a voulu tuer David à plusieurs reprises à cause de ses succès militaires, et du choix de Dieu.
– Les Proverbes parlent de la jalousie (ou de l’envie) en des termes catégoriques : « Car la jalousie met un homme en fureur, il est sans pitié au jour de la vengeance. » (6.34) « Un cœur calme est la vie du corps, mais la jalousie est la carie des os. » (14.30) « La fureur est cruelle et la colère impétueuse, mais qui tiendra devant la jalousie ? » (27.4)
– Actes 13.45 montre que les chefs religieux juifs étaient jaloux du succès de l’Eglise, et que cela motivait leur désir de persécution.
Mais la jalousie existe en dehors des païens, ou du temps de l’A.T. Au point que les apôtres ont eu à la traiter à bien des reprises.
– Romains 13.13 nous exhorte à marcher loin de la jalousie, et de la discorde.
– Paul reproche longuement aux Corinthiens leur jalousie les uns envers les autres. Leurs cultes cherchaient à attirer l’admiration des autres, sans souci de service mutuel (1 Cor. 3.3 ; 2 Cor 12.20).

Dieu avant tout !

Les gens qui aiment Dieu aiment… Dieu. Pas l’ambiance des gens qui aiment Dieu, pas les activités religieuses ou spirituelles. Ils aiment Dieu. Ils honorent Dieu. Ils vivent pour lui. C’est-à-dire qu’ils lui obéissent, quel que soit leur état d’âme, leurs sentiments…
– Daniel commence sa carrière dans la cour des rois avec un test d’intégrité. Il a à peine 15 ans. Loin de ses parents, des sacrificateurs, des coutumes de son peuple, il choisit de ne pas manger des viandes déclarées impures par le Lévitique. Il choisit de mettre en avant ses convictions morales et spirituelles. Quitte à mettre en danger sa carrière et son avenir.
– Daniel a plus de 80 ans maintenant. Le même scénario se produit. Il demeure fidèle à ses principes. Un mot pour les adolescents : vous deviendrez ce que vous développez aujourd’hui ; si votre vie d’ado chrétien est un bain de compromis, il n’y aura pas d’âge où cela va changer. Il n’y a pas d’âge magique, où un homme devient intègre facilement. C’est un choix coûteux et difficile, qui se prend dès maintenant.

La relation avec Dieu est prioritaire sur les autres. Des hommes n’ont pas eu la chance de Daniel. Rappelons rapidement l’histoire de Bernard Palissy : né à Agen, en 1510, il devient maître verrier, étudie la géologie, la physique, la chimie, l’agronomie. Soucieux de découvrir le secret des émailleurs italiens, il travaillera seul durant une quinzaine d’années, sacrifiant tout à ses recherches. Il se convertit. Il travaille pour la famille royale, à Saintes puis à Paris et offre à Henri II des compositions émaillées de grande qualité. Puis vient la Saint-Barthélémy (1572). Palissy part s’exiler à Sedan. Il est emprisonné à la Conciergerie, puis à la Bastille pour hérésie. Le roi Henri III désire vivement garder ce sujet qui est le seul artisan du temps capable de lui fabriquer de la vaisselle précieuse en terre cuite. Comme ni les menaces ni les promesses ne produisent aucun effet sur le prisonnier pour lui faire renier sa foi, le roi se rend en personne dans la prison, et lui demande d’abjurer : « Si vous ne le faites pas, ajoute Henri, je me verrai forcé de vous laisser condamner à mort. ».

– « Sire, répondit Palissy, est-ce le roi de France à qui j’entends dire : ‘Je serai forcé ?’ Je ne suis qu’un pauvre potier, un des plus petits sujets de Votre Majesté et de plus aujourd’hui prisonnier, mais aucune puissance au monde ne peut me forcer à agir contre ma conscience. Vous êtes un des plus puissants maîtres de la terre et vous dites : ‘Je suis forcé’ ! Sire, lequel de nous deux est libre ? »

Palissy meurt à la Bastille en 1590. Il n’a pas été délivré comme Daniel. Dieu ne promet nulle part qu’il nous délivrera – mais il le peut, et il l’a fait parfois dans l’histoire. Notre obéissance doit seulement s’appuyer… sur notre devoir, pas sur l’espoir de ne jamais être confronté à la mort.

Le secret d’un témoignage convaincant

Plus de 60 ans au service de Dieu ! Performance rare et belle. Daniel est un homme exemplaire. Pourquoi Dieu a-t-il utilisé cet homme aussi longtemps, devant des rois si divers et si nombreux ? Je crois que la réponse principale est sa pureté. Daniel a à l’avance mis en pratique 2 Timothée 2.20-22 : « Dans une grande maison, il n’y a pas seulement des vases d’or et d’argent, mais il y en a aussi de bois et de terre ; les uns pour un usage noble et les autres pour un usage vil. Si donc quelqu’un se purifie, il sera un vase d’un usage noble, sanctifié, utile à son maître, propre à toute œuvre bonne. Fuis les passions de la jeunesse et recherche la justice, la foi, l’amour, la paix, avec ceux qui invoquent le Seigneur d’un cœur pur. »

Voulons-nous être utiles à Christ, notre Maître ? Propres à toute œuvre bonne ? La pureté – morale, doctrinale, spirituelle – est un préalable obligatoire. Cela implique une discipline quotidienne. C’est une passion, un choix, un désir. Si notre passion est le service du Christ, notre Rédempteur, recherchons avec passion la purification.


Tout apprentissage commence par l’imitation. Encore faut-il bien choisir son modèle. Qui sont les modèles de nos enfants ? Beaucoup d’« adultes » sans repères moraux, ni souci de cohérence… Qui servent de modèles aux adolescents ? Des people décadents et pathétiques, des héros virtuels, des politiciens chamailleurs… Quels modèles inspire Monsieur Tout-le-monde ? Les ténors de la technique, de la finance, ou de l’écologie ; les ordonnateurs des modes et de la consommation ; les « missionnaires » des idées religieusement et psychologiquement correctes…

Non sans raison, la grande majorité de nos contemporains ne reste pas longtemps fidèle à ses modèles. Non seulement parce qu’on n’en trouve plus guère de crédibles, mais surtout parce que la post-modernité est assise sur l’hypothèse que chacun possède le vrai modèle à l’intérieur de soi… et donc qu’il n’y a pas de modèle universel.

En réalité, nos sociétés sont en train de se désintégrer par excès d’attentes individuelles, démesurées et antagonistes. La Bible nous avertit que la « religion » de l’homme va à rebours de son épanouissement1. Cette idéologie aura pour fin le couronnement d’un homme exalté, tyran absolu et « modèle » aberrant de l’homme sans Dieu2. La débâcle sera en proportion.

Quant aux chrétiens, ils sont exhortés par la Parole divine à imiter « ceux qui, par la foi et l’attente patiente, reçoivent l’héritage promis »3 , à l’exemple d’Abraham, père des croyants. Pour nous, la foi en Jésus-Christ seul et l’expérience de la patience sont assurément deux exercices essentiels, mais totalement étrangers à la mentalité ambiante. Diriger nos pensées vers ceux qui nous ont précédés dans ce chemin, et qui sont entrés en possession du seul héritage qui nous soit éternellement acquis, voilà ce qui peut, aujourd’hui, nous soulever, nous enthousiasmer et nous inspirer dans notre vie pratique. Et si nous redoutons que cette « imitation des modèles » devienne épuisante, ou reste purement charnelle, nous constaterons, au cours des pages qui vont suivre, que Dieu lui-même encourage les siens à garder « les yeux fixés sur Jésus » (le Modèle par excellence), et leur donne aussi les moyens de lui ressembler4.

Notes
1 Jéremie 17.5-6
2 2 Thessaloniciens 2.3-4
3 Hébreux 6.12b
4 Hébreux 12.1-2; 2 Corinthiens 3.17-18


« Veille sur toi-même et ton enseignement »
1 Timothée 4.16

Face à l’apostasie qui était déjà une réalité au 1er siècle, l’apôtre Paul exhorte Timothée à veiller sur sa vie et son ministère à Ephèse.

Un jour, un ami est venu au bureau de Chuck Swindoll (pasteur en Californie et auteur d’excellents livres) et lui a dit sans détour : « Je ne pense pas que vous tomberez dans des péchés de nature morale ou éthique. Mais ce qui m’inquiète, c’est que vous pourriez être tenté de négliger votre temps personnel avec Dieu, ainsi que votre temps dans l’étude des Ecritures. C’est pourquoi, j’aimerais vous exhorter : ‘Ne permettez pas que cela ne se produise.’ »

Chuck Swindoll a pris ces paroles à cœur et il a mis sur papier cinq promesses qu’il voulait tenir absolument :

1. Je promets de continuer à faire un travail original et conséquent au niveau de mon étude de la Parole. Les personnes que je sers ont droit à mes efforts les meilleurs.

2. Je promets de garder mon cœur brûlant pour Dieu. Cela signifie que je vais prier souvent et avec ferveur, et que je vais rester dévoué (fidèle) à mon Seigneur et à son appel.

3. Je promets de rester redevable. Vivre sa vie sans avoir à rendre de comptes à personne n’est pas seulement non biblique, mais dangereux.

4. Je promets de rester fidèle à ma famille. Mon épouse mérite mon temps, mon affection, et mon attention entière. Il en va de même pour mes enfants.

5. Je promets d’être qui je suis. Simplement qui je suis. Je veux continuer à pouvoir rire, à dire des choses un peu « à côté », à être un ami, et à faire quelques fautes chaque mois.

Et si nous prenions dans la liste ci-dessus les résolutions qui nous concernent, pour les inclure dans notre programme de vie ?


Tony Anthony & Angela Little – Éditions Ourania, 2006

La revue Promesses avait publié une recension du livre de Tony Anthony, L’œil du tigre. Il s’avère depuis que ce livre recèle de nombreuses inexactitudes, semble-t-il voulues par l’auteur, ce qui est inacceptable pour un livre de témoignage chrétien. Nous ne souhaitons donc plus le recommander.


Joël Prohin est marié avec Anne et père de deux filles. Il travaille dans la finance, tout en s’impliquant activement dans son église locale, en région parisienne, et en collaborant à diverses revues ou commentaires bibliques.

Rome, automne 67 1. Une sombre prison. Dans sa cellule, un homme écrit, penché sur son écritoire. Il a froid. Il est seul. Il vient d’être condamné. Il va mourir bientôt. Autrefois, il était reconnu, considéré, admiré, entouré. Il a connu des succès retentissants. Tout cela a disparu.

Cet homme a consacré sa vie à enseigner – maintenant, son enseignement est remis en question, critiqué, falsifié. Il s’est dévoué au service des autres ; il a aidé, matériellement, spirituellement, de nombreuses personnes – on l’a oublié, si même on ne s’est pas détourné de lui : à Rome, où il pouvait nommer en détail de nombreuses connaissances avant même d’y être allé, plus personne ne semble se soucier de lui. Il a été honoré – on le calomnie, on l’accuse faussement.

Que dirait-on d’un tel homme en 2007 ? C’est un « loser », quelqu’un qui a raté sa vie, un « has-been »… Mais lisons par-dessus son épaule. Qu’est-il en train d’écrire à un de ses amis les plus chers ? « Je n’ai point de honte, car je sais en qui j’ai cru. […] J’ai combattu le bon combat, j’ai achevé la course, j’ai gardé la foi. Désormais, la couronne de justice m’est réservée ; le Seigneur, le juste juge, me la donnera dans ce jour-là. » (2 Tim 1.12 ; 4.7-8). Sont-ce là les paroles d’un désespéré ? En rien ! Le prisonnier du cachot romain se considère comme un vainqueur ! Certes, les apparences sont trompeuses, mais il sait voir au-delà. Il est pauvre, mais il a enrichi de nombreuses personnes en leur apportant le trésor de la vie éternelle. Son enseignement est rejeté, mais il aura une influence unique dans le monde entier. Il est seul, mais il va bientôt rejoindre la glorieuse compagnie des saints endormis en attendant une éternité avec son Seigneur et la foule innombrable de ses rachetés. Il est méprisé, mais il sait que son Maître lui a réservé une récompense bien méritée.

Paul, vu d’aujourd’hui, n’est pas précisément le genre de personne qui reviendrait souvent dans la catégorie « people » des magazines. Qui voudrait prendre pour modèle un homme qui finit si misérablement sa vie ? Et pourtant, lui-même, inspiré par l’Esprit Saint se présente à plusieurs reprises dans ses lettres comme un modèle à imiter. A partir du contexte de ces différents passages, nous allons chercher des indications sur la façon de suivre l’exemple de Paul aujourd’hui. Et ainsi, comme le disait l’auteur de l’épître aux Hébreux, faisant peut-être allusion au grand apôtre dont les thèmes sont souvent si proches des siens, nous nous souviendrons de ce conducteur qui nous a annoncé (par lettres interposées) la parole de Dieu ; et ayant considéré quelle a été la fin de sa vie, nous pourrons imiter sa foi (Héb 13.7).

1. Un modèle de vie au quotidien

« Vous savez vous-mêmes comment il faut nous imiter, car nous n’avons pas vécu parmi vous dans le désordre. Nous n’avons mangé gratuitement le pain de personne ; mais, dans le travail et dans la peine, nous avons été nuit et jour à l’œuvre, pour n’être à la charge d’aucun de vous. Ce n’est pas que nous n’en ayons le droit, mais nous avons voulu vous donner en nous-mêmes un modèle à imiter. » (2 Thes 3.7-9)

L’exemple de Paul

Les Thessaloniciens avaient connu une conversion radicale : en peu de temps, ils s’étaient tournés des idoles vers Dieu et spontanément, sans attendre, ils étaient devenus :

– individuellement, des « imitateurs [de Paul] et ceux du Seigneur, en recevant la parole au milieu de beaucoup d’afflictions, avec la joie du Saint-Esprit » (1 Thes 1.6) ;
– collectivement, des « imitateurs des églises de Dieu qui sont en Jésus-Christ dans la Judée », parce que eux aussi, avaient souffert de la part de leurs propres compatriotes les mêmes maux qu’elles avaient soufferts de la part des Juifs (1 Thes 2.14).

C’est le témoignage que Paul leur rend dans la première lettre qu’il leur adresse de Corinthe en 51. Mais une mauvaise compréhension des conséquences du retour du Seigneur amène Paul à leur adresser peu de temps après (en début 52) une seconde lettre, où il est obligé, non plus de louer leur conduite, mais de se présenter comme un exemple vis-à-vis de certains Thessaloniciens. En effet, certains d’entre eux semblaient avoir arrêté de travailler, « vivant dans le désordre », peut-être dans l’attente d’un retour rapide de Jésus-Christ.

Or Paul et ses compagnons leur avaient montré l’exemple pendant les quelques semaines passées à Thessalonique : alors que comme prédicateurs de l’évangile, ils auraient eu droit à un soutien légitime de la part des membres de l’église, ils avaient préféré travailler pour leur gagne-pain tout en prêchant la Parole.

Le modèle pour aujourd’hui

Notre premier devoir chrétien est de soigner notre conduite dans la vie quotidienne. N’arrive-t-il pas qu’on soit déçu de constater qu’un serviteur de Dieu, qui prêche avec éloquence, est loin de mettre en pratique ses belles paroles dans le cadre de son foyer ? Une conduite irréprochable doit aller de pair avec le service pour le Seigneur et Paul a toujours été très attentif d’allier les deux (cf. par ex. 2 Cor 6). Ne croyons jamais être autorisés à compenser nos défaillances dans nos relations conjugales, parentales, familiales ou professionnelles par une activité « spirituelle » ; au contraire, mettons en règle notre vie à la maison et au bureau avant de chercher un service plus loin.

Un autre enseignement de ce texte tient à l’équilibre de la vie de Paul : il travaille « paisiblement » pour sa subsistance (v. 12) et il sert le Seigneur en même temps. Dans notre société occidentale, il est de plus en plus difficile de mener les deux de front : les exigences économiques font qu’on demande toujours davantage des travailleurs et que le temps disponible pour le Seigneur, pour l’église, pour l’évangélisation, s’amenuise ; alors on laisse cela aux « spécialistes » à plein temps. Ce n’est pas l’exemple que Paul nous donne ici. Revisitons nos priorités !

2. Un modèle de renoncement

« Soyez tous mes imitateurs, frères, et portez les regards sur ceux qui marchent selon le modèle que vous avez en nous. » (Phil 3.17)

L’exemple de Paul

C’est de sa première captivité romaine que Paul écrit à l’église de Philippes une lettre au ton très personnel (début 63). Dans le chapitre 3 de cette lettre, il rappelle ce qu’il a été autrefois : « quelqu’un de bien », un Juif impeccable, avec toutes les lettres de créance possibles (v. 4-6). Il en était même venu à persécuter l’Eglise… Mais tout cela, d’une part, il l’a laissé de côté, considérant tous ses anciens privilèges comme « une perte », « de la boue » (v. 7-8) ; d’autre part, il se tourne chaque jour résolument vers Christ pour avancer dans sa connaissance et sa communion (v. 8-14).

Pensons à ce que Paul a laissé de côté : le confort d’une position reconnue de rabbin juif, avec les émoluments afférents, la possibilité d’une vie de famille « normale », la fidélité à ses racines, etc. Tout cela pour suivre un Juif méprisé, crucifié, dont lui-même avait été autrefois un des plus vifs opposants ! D’aucuns auraient jugé qu’il avait lâché la proie pour l’ombre. Mais il a devant lui un prix à gagner – plus encore, une personne ressuscitée à qui s’attacher !

Mais tous – y compris parmi les Philippiens – n’avaient pas les mêmes objectifs ou les mêmes motivations (cf. 1.18) et Paul est obligé de constater des différences d’opinion (2.1-5 ; 3.15-16), des disputes entre sœurs (4.2), des conduites charnelles (3.18-19 ; 2.21). C’est pourquoi il se présente comme un exemple pour tous.

Toutefois Paul est conscient de ne pas être le seul à suivre fidèlement le Seigneur et après Timothée (2.19-22) ou Epaphrodite (2.29-30), il évoque d’autres chrétiens qui sont déjà ses imitateurs (3.17). Paul n’est jamais tombé dans le syndrome d’Elie qui s’était cru le seul à être resté fidèle (1 Rois 19.14).

Le modèle pour aujourd’hui

Ce chapitre 3 est riche de multiples enseignements pour nous. Pour avancer dans notre vie chrétienne, comme Paul, il est nécessaire de se libérer de certaines entraves ; citons-en trois :

– Renoncer aux privilèges de naissance : Il est facile de penser au rang social, car l’évangile est d’abord annoncé pour (et surtout reçu par) les pauvres. Mais on peut également y ranger les privilèges « ecclésiastiques » : qu’il est facile de se glorifier d’une ascendance chrétienne, de son assiduité à l’église, de sa connaissance livresque… Ces « acquis » sont tout aussi bons que pouvait l’être la connaissance de l’A.T. reçue par Paul aux pieds de Gamaliel, mais quand ils deviennent une gloriole, il faut savoir ne plus s’y attacher.

– Renoncer aux ombres du passé : Qu’aurait-on conseillé aujourd’hui à un ex-persécuteur ? Certainement de suivre une thérapie approfondie pour se libérer de ses sentiments de culpabilité, pour se sentir accepté inconditionnellement par Dieu, etc. Or Paul a préféré laisser tout cela « en arrière » (v. 13). Faisons comme lui et évitons autant que possible de remuer les fantômes d’un passé auquel nous ne pourrons rien changer de toute façon. Et tournons-nous vers le but, l’avenir.

– Renoncer au perfectionnisme : Paul sait qu’il n’a atteint ni le but, ni la perfection. Pour autant, cela ne l’empêche pas « d’en vouloir » et de chercher à grandir encore et toujours dans sa vie chrétienne. Imitons ce désir, en renonçant au mythe inaccessible d’une perfection atteinte sur la terre, tout comme à la satisfaction d’avoir atteint ce qu’on estimerait être un niveau « suffisant ».

3. Un modèle de dévouement

« Ce n’est pas pour vous faire honte que j’écris ces choses ; mais je vous avertis comme mes enfants bien-aimés. Car, même si vous aviez dix mille maîtres en Christ, vous n’avez cependant pas plusieurs pères, puisque c’est moi qui vous ai engendrés en Jésus-Christ par l’évangile. Je vous en conjure donc, soyez mes imitateurs. » (1 Cor 4.16)

L’exemple de Paul

Les Corinthiens se divisaient : les uns se réclamaient de Paul, d’autres de Pierre, d’autres encore d’Apollos, etc. L’apôtre qui, d’Ephèse où il se trouvait (en 56), avait eu vent de la situation, remet donc les choses au point :

– Les uns et les autres ne sont que des serviteurs2, au service du même Maître (v. 1).

– Les jugements que l’on porte sur la terre sont imparfaits : Dieu seul, qui lit dans les cœurs, peut apprécier valablement le travail de chacun (v. 2-7), qui ne sera de toute façon que le produit de ce que Dieu a donné à chacun par grâce.

– La conduite des apôtres, de Paul en particulier, était en total contraste avec celle des Corinthiens. Au lieu de se disputer pour des leaders, mieux valait pour eux les imiter un peu plus.

– Enfin, les Corinthiens avaient été évangélisés par Paul lui-même et, de même qu’un jeune garçon cherche à imiter son père, ils auraient dû davantage chercher à ressembler à leur père spirituel. D’où le ton pressant de Paul : « Je vous en conjure donc, soyez mes imitateurs. »

le modèle pour aujourd’hui

Dieu n’appelle pas forcément chacun de nous aux mêmes renoncements que l’apôtre, dont l’appel et le service étaient tout à fait particuliers. Cela étant, Paul nous donne un modèle de dévouement pour le service du Seigneur qu’il est utile de méditer.

– Paul avait renoncé au confort matériel. Or qui, en Occident, connaît pour Christ « la faim, la soif, la nudité » (v. 11) ? Ne devons-nous pas reconnaître, au contraire, que nous sommes esclaves de notre recherche effrénée de toujours plus de confort ? Le matérialisme est sans doute un des plus graves dangers que court l’Eglise dans nos pays nantis : on sacrifiera beaucoup de temps et d’énergie pour acquérir le dernier gadget à la mode, alors que l’œuvre du Seigneur est délaissée…

– Paul s’appuyait sur des actes, pas sur de belles paroles (v. 19-20). Un chrétien fidèle devrait être tout sauf une chiffe molle, un indécis ou un vantard. Faire plus qu’on ne dit pourrait être une règle d’or.

– Paul savait que les dons qui pouvaient le distinguer n’étaient que dons de Dieu (v. 7). A une époque où mettre en avant « ses expériences avec le Seigneur », ce qu’on a fait, vécu, construit, etc., prend parfois le pas sur la simple « dispensation » de la Parole (v. 1-2), il est bon de rappeler que tout ce que nous avons pu faire pour Dieu, c’est au fond lui qui l’a fait par nous.

Mais Paul savait aussi que ce dévouement aurait sa récompense. Ce n’était pas maintenant le temps du règne, mais il viendrait un jour où le juste Juge saurait reconnaître publiquement ses serviteurs fidèles. Quel encouragement aussi pour nous !

4. Un modèle d’amour pour les autres

« Soit donc que vous mangiez, soit que vous buviez, soit que vous fassiez quelque autre chose, faites tout pour la gloire de Dieu. […]
Soyez mes imitateurs, comme je le suis moi-même de Christ. » (1 Cor 10.31-11.1)

L’exemple de Paul

Une seconde fois dans cette lettre, Paul se présente comme un modèle. Il vient de faire un long développement sur le sujet des viandes et, plus largement, sur la liberté chrétienne (ch. 8 à 10). Il a eu soin de rappeler que notre liberté s’arrête là où commence la faiblesse de notre frère « pour lequel Christ est mort » (8.11) ; aller au-delà est grave : c’est pécher « contre Christ », rien moins !

En conclusion, il rappelle une série de garde-fous de notre liberté. Non qu’il faille la restreindre : « Tout est permis », dit-il clairement (1 Cor 6.9-12 ; 10.23). Mais le privilège du chrétien est justement d’être libre de choisir le meilleur, ce qui fait du bien à mon frère, non par contrainte, mais par amour. Alors, il restreindra librement le champ des possibles en examinant si ce qu’il se propose est 1° utile, 2° édifiant (v. 23), 3° dans l’intérêt d’autrui (v. 24-29), 4° fait avec actions de grâces (v. 30), 5° pour la gloire de Dieu (v. 31).

Le modèle pour aujourd’hui

Nous vivons dans un siècle qui prône l’individualisme. Il faut d’abord chercher à « se réaliser soi-même », à « prendre du temps pour soi ». L’autre sera, au mieux, un faire-valoir ou un ingrédient de mon propre bonheur, au pire un rival ou un obstacle à écarter. Quel contraste avec la tendre délicatesse de Paul pour des chrétiens peu matures qui n’avaient pas compris que les viandes ne devaient pas être un critère de vie spirituelle ! Il est prêt à renoncer à manger pour ne pas scandaliser.

Les viandes ne sont peut-être plus aujourd’hui un sujet « chaud » comme elles l’étaient à Corinthe3 , mais il est facile de trouver d’autres applications très actuelles, comme les loisirs, l’habillement, etc. Ces textes ne doivent pas être pris comme un moyen de pression de la part de chrétiens légalistes pour imposer leurs vues étroites, mais comme un encouragement à vivre les situations de la vie de chaque jour en prenant en compte ce que ressent, ce que comprend, ce que vit mon frère, ma sœur. C’est cela, au fond, vivre cette unité de l’Eglise de Jésus Christ si bien représentée par le seul pain de la cène (v. 17). Cherchons donc un peu plus à nous adapter à tous et demandons un peu moins aux autres de s’adapter à nous (v. 33, Semeur)…

Conclusion

Pourquoi Paul nous demande-t-il à quatre reprises de l’imiter, lui, et non pas d’imiter directement notre Seigneur ? Après tout, notre modèle est Jésus Christ, pas un homme comme Paul qui a eu ses faiblesses comme les autres !

Tout d’abord, nous avons à imiter Paul car lui-même cherchait à imiter le Christ : « Soyez mes imitateurs, comme je le suis moi-même de Christ », dit-il clairement dans le quatrième texte cité. Si on nous fait un procès injuste, il est certain que nous aurons plus de profit à imiter notre Seigneur devant Caïphe et Pilate, que Paul devant le sanhédrin (Act 23). Mais, au-delà des quelques manquements de l’apôtre, il nous laisse le témoignage d’un homme qui a suivi son Maître de tout son cœur.

De plus, il est bien conscient qu’il n’est pas le seul à imiter Christ et à pouvoir se présenter comme modèle : les Thessaloniciens avaient aussi vu Silvain (Silas) et Timothée, que Paul s’associe ; les Philippiens avaient d’autres croyants fidèles qui marchaient déjà selon le modèle de Paul ; aux Corinthiens, Paul envoie Timothée, dont il souligne les qualités. Chaque chrétien a sa façon particulière d’imiter son Seigneur et nous avons besoin de plusieurs modèles pour nous inspirer. Sachons relever chez chacun ce qui en lui reflète Christ pour chercher à notre tour à le reproduire. Cette imitation ne sera pas du mimétisme, mais plutôt une inspiration à mieux vivre tel ou tel aspect de la vie chrétienne4.

Enfin, les exhortations de Paul sont encourageantes : le Seigneur pourrait nous paraître inaccessible dans sa perfection. Or il y a eu un homme qui a pu, sans orgueil déplacé, se présenter comme un imitateur de Christ, en se sachant encore faillible, mais néanmoins en se portant devant, comme guide pour des générations de lecteurs. Oui, suivons Paul, cet « anti-modèle », pour mieux suivre Jésus !

Notes
1 La chronologie de la vie de l’apôtre Paul peut varier d’un ou deux ans, selon les hypothèses retenues. Les dates mentionnées dans cet article correspondent à la chronologie dite « longue », qui me semble mieux coller avec les divers déplacements de l’apôtre. Pour une étude plus complète du sujet et des indications bibliographiques, voir A. Kuen, Introduction au Nouveau Testament, Les épîtres de Paul, éd. Emmaüs, p. 45-52.
2 Le terme grec utilisé signifiait à l’origine « rameur de second rang ». Il semble avoir la connotation de serviteur d’un rang particulièrement humble.
3 Bien que le sujet de l’usage (modéré) de boissons alcoolisées soit encore chaudement débattu…
4 L’auteur de l’épître aux Hébreux enjoint d’imiter la foi des conducteurs et de se rappeler la Parole qu’ils ont annoncée, mais pas de reproduire leurs tics !