PROMESSES

D’année en année, les experts économiques, les futurologues et autres augures modernes nous gratifient de leurs pronostics quant à l’évolution de cette plaie qui gangrène nos sociétés « avancées »: la Crise. Pronostics tout en nuances, bien sûr. Ce qui n’empêche pas les termes de « reprise » ou de « relance » d’avoir une allure vaguement suspecte, aux relents de propagande électorale.

Mais la méfiance à l’égard de la chose politique n’explique pas tout. En fait, tout se passe comme si des forces obscures s’amusaient à démonter, les unes après les autres, toutes les prévisions. Tant et si bien que l’on se garde désormais d’évoquer la « fin de la Crise », de peur de passer pour des rêveurs.

Nos contemporains vivent donc à l’heure des désenchantements, et même, pour les plus touchés, du désespoir. Pour autant, ouvrent-ils les yeux sur les origines réelles de la Crise? Veulent-ils les ouvrir?

A notre grande tristesse, nous devons admettre que la majorité est aujourd’hui plus encline à accepter les pseudo-remèdes qu’on lui propose en toute fébrilité, plutôt que d’opérer le seul retournement de conduite qui serait radicalement salutaire.

Et c’est ainsi que nos experts, mais aussi toute la foule des laissés pour compte, continuent de miser sur une « reprise de la conjoncture », sur un redémarrage de la consommation, des investissements, de l’embauche et de l’emploi, bref, sur un retour aux « années bénies » du boom économique. La Crise n’a donc pas guéri le peuple de sa mentalité matérialiste et consumériste, et il reste franchement myope en ce qui concerne ses intérêts profonds.

La Bible nous offre pourtant un moyen de comprendre « notre » Crise, et d’en sortir. Au travers des expériences humaines qu’elle relate – en particulier au travers de l’histoire du peuple d’Israël (lisez-en le saisissant condensé dans les versets 16 à 37 du chapitre 9 de Néhémie), nous pouvons d’emblée établir un premier principe: les moments de désintégration sociale, économique et morale ne sont pas imputables en premier chef à de mauvais systèmes, ou à la mauvaise gestion des divers pouvoirs du corps social. Non, il faut rechercher les causes de nos débâcles plus en amont, car toute misère et toute injustice, toute dérive structurelle, prennent racine dans une perturbation de la relation entre l’homme et son Créateur.

C’est pourquoi l’apôtre Paul, dans la magistrale fresque du chapitre 1 (v. 18 à 32) de son épître aux Romains, ne craint pas d’affirmer que l’anarchie généralisée, dans ses formes les plus diverses, n’a qu’une grande cause première: les hommes… retiennent injustement la vérité captive… ayant connu Dieu, ils ne l’ont point glorifié comme Dieu, et ne lui ont point rendu grâces, mais ils se sont égarés dans leurs pensées… (v. 18, 21).

Du jardin d’Eden jusqu’aux convulsions terribles de notre siècle chaotique, le scénario reste le même. Le rejet des normes de Dieu et de ses moyens de salut équivaut à un sabordage, suivi d’un naufrage. Et même s’il faut admettre que Dieu a parlé successivement (et souvent simultanément) bien des langages: la création, la conscience, la loi, les prophètes, son propre Fils venu en chair, sa Parole écrite, l’Eglise, malgré donc la variété des approches, l’homme a souvent préféré se donner des idoles selon son cour révolté. C’est pourquoi il ne faut pas craindre, en analysant les temps que nous traversons, de revenir au noud du problème, que l’Ecriture nomme aussi apostasie, abandon de la foi (2 Thes 2.3).

Ce numéro de Promesses voudrait vous fournir une solide étude des tenants et des aboutissants de notre Crise (voir l’article de J.-P. Graber dans notre dossier spécial), mais aussi vous rappeler qu’en temps de démission morale et sociale, Dieu investit ses enfants d’une mission, de ressources et de moyens insoupçonnés (voir l’étude de D. Arnold).

Oui, Dieu reste la Source de vie et de paix, toujours à disposition de ceux qui reviennent à Lui dans un esprit de repentance et de foi. Pourquoi, par les encouragements de l’Ecriture, ne serions-nous pas poussés à implorer le Seigneur afin qu’Il accorde à nos peuples déchristianisés de saisir que leur bonheur ne dépend pas avant tout des impératifs de l' »économie de marché », ni des succès de la philosophie du Nouvel Ordre Mondial, mais de leur réconciliation avec le Dieu d’où proviennent toute grâce excellente et tout don parfait (Jac 1.16)?

C.-A. P.



Notre équipe de rédaction se renforce!
En effet, nous avons la joie d’annoncer à nos lecteurs que notre secrétaire et son mari (chargé de la gestion des abonnements) ont reçu un merveilleux complément en la personne de leur premier enfant, né le 1er mai à Vevey (CH).
Nous souhaitons au petit MARC, et à ses parents, Dung et Myriam Blumenstein, toute la bénédiction du Bon Berger sur leur précieuse famille.
La Rédaction



ETUDE BIBLIQUE

(2 Rois 3)

Daniel ARNOLD

Les journaux cherchent souvent à capter l’attention par des manchettes insolites. L’engagement militaire entre Moab et la coalition d’Israël-Juda-Edom au IXe siècle avant Jésus-Christ aurait fait leur bonheur, car les éléments atypiques y sont légions. Parmi les titres accrocheurs, on n’aurait eu que l’embarras du choix: « Trois armées sauvées par une harpe », « Nos fins stratèges militaires oublient les réserves d’eau », « Le prophète des villes disponible en plein désert », « Un pacifiste écrase les armées de Moab », « Une pénurie d’oculistes fatale à Moab », « Retrait insensé des troupes alliées ».

Les éléments intrigants tournent principalement autour des paroles et des actes d’Elisée, mais pas uniquement. La levée du siège israélite suite au sacrifice du fils du roi de Moab laisse perplexe au point que les traducteurs, divisés, attribuent la fureur engendrée tantôt aux Moabites (Jér, Darby, TOB, Syn), tantôt aux Israélites (Segond, Semeur). Cependant, même si les éléments intrigants abondent dans ce récit, la logique humaine y est aussi présente.

Stratégies humaines

La révolte de Moab est motivée par la crise que traverse Israël. En moins de deux ans, le roi Achab et son successeur sont morts et l’armée israélite a été défaite par les Syriens. Les Moabites profitent de cet affaiblissement temporaire pour secouer la tutelle israélite.

La réaction d’Israël est tout aussi compréhensible. Affaiblie par la crise, la nation ne veut pas encore perdre une importante source de revenus. Une intervention rapide contre son vassal s’impose. Ne disposant que d’une armée atrophiée, le roi Joram d’Israël cherche un soutien auprès de deux nations voisines ayant un intérêt commun à voir la puissance de Moab limitée. De plus, le roi Josaphat de Juda, son principal allié, avait déjà montré ses bonnes dispositions à l’égard d’Israël en combattant aux côtés d’Achab (1 Rois 22). Un plan d’attaque ingénieux est élaboré. En passant par le chemin du désert d’Edom (v.8), la coalition cherche à contourner Moab par le sud de la mer Morte pour prendre la défense adverse à revers.

Sur le plan religieux, l’ingénieux Joram cherche à gagner le bon plaisir de l’Eternel. Ayant compris que le baalisme pratiqué par son père Achab et par son frère Ahazia leur a été néfaste, Joram renverse les statues de Baal érigées par son père (v.2). La réforme religieuse est manifeste, tout en étant limitée. Les prophètes de Baal ne sont pas tués (ils le seront par Jéhu, conspirateur et successeur de Joram: 2 Rois 10.18-27), Joram, en habile politicien, cherche à concilier des intérêts divergents. Il veut gagner le soutien de l’Eternel et de ses fidèles sans trop froisser les gens vendus au paganisme.

La « sagesse » de Joram s’avère totalement inefficace. Sur le plan militaire, le contournement « ingénieux » de Moab tourne à la catastrophe. La distance à parcourir, le terrain aride à traverser, le nombre élevé d’hommes et d’animaux à abreuver ont été sous-estimés. Sans eau, et donc sans force, hommes et bêtes deviennent une proie facile pour l’ennemi. Sur le plan religieux, les réformes de Joram sont tout aussi inefficaces puisqu’elles laissent l’Eternel indifférent comme l’indiquent les paroles d’Elisée: Si je n’avais égard à Josaphat, roi de Juda, je ne ferais aucune attention à toi et je ne te regarderais pas (v, 14). Le roi n’est pas allé assez loin dans son rejet du baalisme (contrairement à Jéhu son successeur: 2 Rois 10.30).

L’engagement surprenant d’Elisée

L’engagement d’Elisée est tout autre. Si les efforts empreints de « sagesse » humaine ont conduit le pays au bord du gouffre, les actes déroutants du prophète conduisent la nation vers le salut.

Tout d’abord, Elisée surprend par sa disponibilité. Le prophète peut être trouvé sans aucune difficulté, alors même que les armées semblent égarées en plein désert. A-t-il accompagné les troupes comme aumônier ou logeait-il là « par hasard »? Toujours est-il qu’Elisée, fidèle à lui-même, est présent là où se trouvent des besoins (cf. Promesses 119 « Elisée, le prophète du peuple »).

Deuxièmement, les paroles d’Elisée à l’égard de Joram étonnent par leur dureté. Bien que le roi vive dans le compromis, il confesse la souveraineté de l’Eternel et semble même implorer deux fois l’aide divine (Le roi d’Israël dit: Hélas! l’Eternel a appelé ces trois rois pour les livrer entre les mains de Moab v.10, 13). Joram a aussi détruit les statues de Baal, et comme Elisée est le prophète de la grâce, le lecteur pourrait s’attendre à plus de compréhension. Les paroles d’Elisée sont pourtant claires: Si je n’avais égard à Josaphat, roi de Juda, je ne ferais aucune attention à toi et je ne te regarderais pas (v.14). Les efforts de réforme de Joram ne valent rien aux yeux de l’Eternel. Joram ne mérite pas d’être sauvé et, si finalement, il est quand même secouru, c’est uniquement parce qu’il est associé à Josaphat. La grâce est donc bien attachée au ministère d’Elisée, mais ce n’est pas une grâce sans forme ni contour. Le salut est possible uniquement parce qu’il y a association avec Josaphat le juste (qui est aussi le descendant de David et l’ancêtre du Messie). Ce principe trouve sa pleine expression dans le Nouveau Testament avec l’imputation de la justice de Christ au pécheur qui lui est attaché.

Un étonnement plus important encore vient de la demande d’Elisée à avoir un joueur de harpe. Certes, la musique inspire. La musique calme aussi les esprits. Celle de la harpe en particulier apaise et détend. Elisée en avait-il personnellement besoin ou pensait-il à ses auditeurs qui devaient prêter attention à son message étonnant? Comme souvent avec Elisée, la dimension utilitaire est secondaire. Elisée a recours à des objets pour illustrer ses messages. En demandant un joueur de harpe, Elisée se situe à l’opposé de ce qu’on pouvait attendre. Pour secourir une armée, on a besoin d’épées, de lances, de chars de fer, mais pas d’un instrument de musique. A la rigueur, une trompette peut servir à rassembler les hommes et un tambour peut encourager une troupe à marcher au pas. Une harpe, par contre, n’est d’aucune utilité. Son transport est difficile et délicat, et sa musique adoucit les mours au lieu de stimuler la combativité et le courage. Par le recours à une harpe, Elisée veut montrer que la solution recherchée sort de l’ordinaire. La paix intérieure est fondamentale. Or cette paix ne peut être présente que s’il y a communion avec Dieu. Fondamentalement, c’est la paix avec Dieu qui doit être recherchée.

L’ordre donné par Elisée de creuser des trous en plein désert peut aussi étonner. Cependant, ceux qui connaissent la région savent que l’eau peut arriver à l’improviste dans les wadi asséchés. Venus de la Méditerranée, les nuages chargés d’humidité restent accrochés aux collines élevées de Judée et y déversent leur eau. Les torrents formés après un orage s’écoulent ensuite rapidement vers l’est à travers le désert de Judée. Elisée annonce donc l’arrivée d’un phénomène naturel, mais peu fréquent. Le prophète insiste sur l’absence de vue. « Vous serez bénis, mais vous ne verrez pas l’origine de la bénédiction ». Le peuple pécheur (qui ne voit pas Dieu) ne pourra pas voir la pluie. Il pourra néanmoins bénéficier d’une grâce particulière.

Elisée annonce une victoire totale: le salut des Israélites, mais aussi la défaite de l’ennemi. Le pays sera dévasté: Vous frapperez toutes les villes fortes et toutes les villes d’élite, vous abattrez tous les bons arbres, vous boucherez toutes les sources d’eau, et vous ruinerez avec des pierres tous les meilleurs champs (v.19). Cet ordre d’Elisée surprend, car il paraît contraire aux injonctions de Moïse: Si tu fais un long siège pour t’emparer d’une ville avec laquelle tu es en guerre, tu ne détruiras point les arbres en y portant la hache.(Deut 20.19-20). Lors d’une campagne militaire, le pays ne devait pas être ravagé. Cependant, il faut noter que le développement sur le siège d’une ville (Deut 20.10-20) est formé de trois parties: une première partie qui traite d’un siège en terre étrangère (Deut 20.10-15); une deuxième qui aborde la situation lors d’une guerre dans la terre promise (Deut 20.16-18); une troisième qui parle des arbres (Deut 29.19-20). Faut-il comprendre que les ordres de cette troisième section s’appliquent aux deux régions (l’étranger et la terre promise) ou seulement à la seconde région (la terre promise), ce qui annulerait la difficulté? L’ordre d’Elisée de dévaster un pays étranger ne s’opposerait pas, alors, à la loi mosaïque.

Pour Israël, la dévastation du pays paraît contre-productive, car le but de la campagne était de garder sous tutelle un pays qui pouvait payer d’importants revenus. Or en saccageant le pays pour une longue période (il faut du temps pour que les arbres repoussent et un gros effort est nécessaire pour vider les puits et débarrasser les terres agricoles de leurs pierres), Israël se punit lui-même puisqu’il détruit les terres qui devaient lui rapporter des produits. Pour Juda, par contre, la dévastation est positive, car l’appauvrissement des Moabites est synonyme d’un affaiblissement général du pays. Ce voisin belliqueux sera donc moins menaçant. Nous voyons ainsi que l’ordre d’Elisée va dans le sens annoncé: Dieu sauve Israël pour aider Juda et non pour aider Israël.

Quand on comprend le sens des gestes et des paroles d’Elisée, tout devient logique. Le prophète agit en plein accord avec son ministère. Il annonce la grâce à celui qui est tourné vers l’Eternel (Juda), mais il rejette celui qui est indifférent ou qui essaie simplement d’utiliser le Seigneur (Israël).

Une dernière surprise

La narration se termine par une surprise de taille. Les Israélites lèvent le camp devant le sacrifice d’un enfant. Pourquoi partir alors que l’ennemi est à genoux?

Dans un dernier effort, le roi de Moab cherche à s’en prendre au roi d’Edom (v.26). Veut-il punir le roi d’Edom pour s’être allié avec Israël et Juda ou cherche-t-il à le convaincre de changer de camp? Cherche-t-il à tuer le plus faible des trois rois pour redonner courage à ses troupes? Quoiqu’il en soit, il n’atteint pas son but et devant l’échec, il finit par sacrifier son propre fils. A la surprise générale, alors que tout le reste avait échoué, le lecteur apprend soudain que ce dernier acte abominable met fin au siège. Pourquoi?

Les Moabites sont-ils tout à coup revigorés par la conviction que leur dieu les aidera? Les Israélites craignent-ils que les Moabites aient reçu une force nouvelle? Littéralement, on a: « il y eut un grand qasap sur Israël ». Qasap signifie colère, fureur, indignation, irritation, trouble, ou même écume (pour de l’eau agitée). C’est probablement moins la colère que le trouble qui est souligné ici, le trouble d’Israël qui craint subitement le courroux de Kemosh, le dieu national des Moabites (cf. note de la TOB).

Les juifs, qui se soucient peu de la colère de l’Eternel, craignent la colère du dieu païen, et cela malgré leurs succès militaires et malgré l’intervention surnaturelle de Dieu qui vient de démontrer sa puissance, et sa volonté de sauver Israël, de battre l’ennemi. La superstition est une folie. Elle voile l’intelligence et étouffe le bon sens. Contre toute logique, Israël se retire.

Joram est le roi des aveugles. Elisée le champion du discernement. C’est pourquoi lorsqu’il fallait sauver la coalition de la débâcle, Elisée avait demandé une harpe, symbole de la douceur et de la paix, symbole de la communion avec Dieu: Comme le joueur de harpe jouait, la main de l’Eternel fut sur Elisée (v.15). Ce ne sont pas les armes et la force qui donnent la victoire (Israël l’avait à portée de main), mais la lucidité qui vient d’une communion avec Dieu. S’il fallait résumer le conflit, on pourrait dire: « Trois armées sauvées par une harpe, puis égarées par la superstition ».

D.A.


A nos lecteurs africains
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Écrit par


DOCTRINE

Par le Dr Lothar GASSMANN,
traduction Henri LÜSCHER

Lothar Gassmann est né en 1958 à Pforzheim en Allemagne; études en théologie évangélique à l’Université de Tubingue, doctorat; auteur de plusieurs ouvrages et articles traitant des problèmes actuels (œcuménisme, new-age, syncrétisme religieux, écologie, etc.)

Dans cette confrontation, les textes bibliques et les citations ne seront pas mentionnés pour des raisons de place. Mais ils s’y trouvent abondamment dans l’ouvrage de l’auteu r«Zeugen Jehovahs, Geschichte, Lehre, Beurteilung» (Hänssler-Verlag, D-7362 Neuhausen-Stuttgart, 1996).

Texte traduit avec l’autorisation du journal »Das Signal »no 106 mai-juin 1996.

Les enseignements des Témoins de Jéhovah sont répandus, entre autres moyens, par leurs journaux « La Tour de Garde » et "Réveillez-vous!"

La doctrine de la Tour de Garde

La foi chrétienne

La Bible

-est pleinement inspirée de Dieu

-a la même valeur dans toutes ses parties

 

-est centrée sur le royaume de Jéhovah

-ne peut être interprétée valablement que par la Société de la Tour-de-Garde

-se comprend par le recours très fréquent aux préfigurations, aux parallélismes et aux allégories

-contient des dates pour le calcul exact d’événements historiques et eschatologiques

-a, dans la "Traduction du monde nouveau", gagné sa forme voulue de Dieu, notamment par l’insertion du nom de "Jéhovah"

La Bible

-est pleinement inspirée de Dieu

-est remplie d’une dynamique historico-sotériologique (heilsgeschichtlich) (Ancien Testament – Nouveau Testament, Promesse – Accomplisse- ment, Loi -Evangile, Lettre – Esprit)

-est centrée sur Christ et son ouvre rédemptrice

-s’interprète par elle-même et peut être comprise dans ses déclarations nécessaires au salut par chaque chrétien, sous la direction du Saint-Esprit

-se comprend principalement à partir du sens du mot et du contexte

-contient des dates, mais ne rend pas possible une chronologie sans lacunes, et met en garde contre les spéculations concernant des dates de la fin des temps

-se base sur les textes des manuscrites hébreux, araméens et grecs, dont la "Traduction du monde nouveau" s’écarte par des paraphrases, des insertions de mots tordant le sens, des traductions erronées, des annotations et un apparat critique qui induisent en erreur.

La doctrine de la Tour de Garde

La foi chrétienne

Dieu

-porte le nom de "Jéhovah"

-est un; la doctrine de la Trinité n’est pas biblique et est d’origine païenne

 

Jésus-Christ

-est un fils de Dieu, voire l’archange Michaël (la première créature de Jéhovah), devenu un homme parfait, et qui après sa mort et sa résurrection (dans le sens d’une création nouvelle) fut élevé à un rang angélique supérieur

-est, en tant qu’homme parfait, au même rang qu’Adam

Le Saint-Esprit

-est la "puissance opérante" impersonnelle ou "manifestation inspirante" de Jéhovah

 

 

L’homme

-n’a pas d’âme, mais est une âme

 

-meurt totalement lors de sa mort terrestre; il n’y a de résurrection que dans le sens d’une création nouvelle complète sur la base d’un modèle stocké dans la mémoire de Jéhovah

-ne va pas à la perdition et aux tourments éternels ("enfer") s’il rejette Jéhovah, mais sera simplement anéanti; l’"enfer" signifie "tombe" et est un lieu de repos

Dieu

-porte le nom de "JHWH" (tétragramme), qui est probablement prononcé "Jahweh"

-est un Etre en trois Personnes: Père, Fils et Saint- Esprit; il est vrai qu’on ne trouve pas le terme Trinité dans la Bible, mais bien des déclarations implicites et explicites y font référence

Jésus-Christ

-est le Fils de Dieu, c’est-à-dire le Fils, la deuxième Personne de la

 

 

-est en tant que vrai homme et vrai Dieu infiniment supérieur à Adam et à toutes les créatures Trinité, vrai Dieu et vrai

Le Saint-Esprit

-est Dieu, c’est à dire la troisième Personne de la divine Trinité: Il parle, pense, enseigne, connaît l’avenir; on peut lui mentir et blasphémer contre lui; il est le Consolateur (Paraclet) qui, après l’ascension de Christ, le représente au sein de son Eglise homme à la fois

L’homme

est une âme en tant qu’être dans sa totalité (Gesamtwesen), mais il a aussi une âme dans le sens d’un noyau indestructible de sa personnalité

-passe, lors de sa mort terrestre, à un état intermédiaire sous la forme d’une personnalité indestructible (existence qui continue sans le corps terrestre), en attendant la résurrection (revêtement d’un corps éternel)

-va à la "géhenne" ("enfer de feu", éloignement de Dieu, perdition éternelle), s’il rejette le Dieu trinitaire. L’enfer est caractérisé dans la Bible comme un lieu de tourments incessants et conscients

La doctrine de la Tour de Garde

La foi chrétienne

La rédemption

-est accomplie en ce que le Christ-Michel comme second Adam sacrifie son corps parfait au poteau des tourments, créant un fondement pour les hommes, afin qu’ils parviennent également à la perfection par des ouvres adéquates. Des ouvres humaines sont donc nécessaires à la rédemption.

L’Eglise

-existe comme communauté de salut (Heilsgemeinde) des Témoins de Jéhovah qui, en tant que telle, affronte les états et communautés religieuses (=Babylone, la prostituée) en s’éloignant d’eux le plus possible

-se compose de 144’000 personnes rassemblées depuis Pentecôte, mais spécialement au sein de la Société de La Tour de Garde, pour régner comme classe céleste avec Christ, et plusieurs millions "d’autres brebis" (="une grande multitude de peuples" (Volksmenge) qui sont destinées à une vie éternelle sur la terre renouvelée en paradis (et non pas dans le ciel)

-possède, sous la forme d’une corporation dirigeante (leitende Körperschaft) au sein de la Société de la Tour-de-Garde, un "règne visible de Jéhovah sur la terre"

Les temps de la fin

-ont commencé en 1914, lorsque Christ établit son règne invisible et jeta Satan sur la terre; Christ est donc présent, invisible, depuis 1914; il n’y a pas de retour visible de Jésus-Christ

-convergent vers la bataille d’Harmaguédon, dans laquelle les ennemis de Jéhovah et de la société de la Tour-de-Garde seront anéantis dans le monde entier; puis la terre sera purifiée des effets de cette destruction par les survivants et transformée en un paradis qui durera éternellement et qui est destiné à la "grande multitude des peuples" (Volksmenge)

-offrent une espérance céleste au nombre limité des 144’000 spécialement élus de la "classe johannique" (Johannes-Klasse)

La rédemption

-est accomplie par le sacrifice expiatoire de Jésus-Christ qui a, à la croix, vaincu le péché, la mort et le diable. Les ouvres humaines sont la conséquence et le fruit de la foi en Jésus comme Rédempteur, mais en aucun cas la condition du salut

 

L’Eglise

-est la communion invisible de tous les chrétiens rachetés et nés de nouveau par le sacrifice parfait de Christ qui on reçu par la foi l’Esprit de Dieu, et qui se rassemblent dans différentes dénominations visibles où subsistent des hypocrites et des incroyants

-est fragmentée aujourd’hui en dénominations, comportant des chrétiens issus des nations et des Juifs messianiques, qui seront unis plus tard dans l’éternité, dans la gloire céleste

 

 

 

-est soumise au Christ seul comme son Chef, sans représentant terrestre (au moins dans le Protestantisme)

 

Les temps de la fin

-ont commencé avec l’élévation et l’ascension de Christ (en l’an 33 env.), tandis que les signes des temps (avant tout la fondation de l’état d’Israël en 1948) annonçant le retour de Christ se multiplient; Christ, dans l’avenir, reviendra visiblement en puissance et en gloire

-convergent vers le retour de Christ, la disparition du monde présent et le création d’un nouveau ciel et d’une nouvelle terre précédée peut-être par un règne – limité temporellement – de mille ans1

 

 

-offrent une espérance céleste à tous les hommes qui aiment Jésus-Christ et lui appartiennent

1Dans le protestantisme, il y a différentes interprétations concernant le Millénium ou le règne de mille ans mentionné dans Apoc. 20, d’où cette formulation prudente du Dr L. Gassmann. Le chrétien qui croit en l’accomplissement certain de toutes les prophéties encore non accomplies attend pour l’avenir un règne de mille ans selon Apoc. 20 (note de la réd. Das Signal)

Jésus est Dieu

Les Témoins de Jéhovah (et pas seulement eux) nient la Trinité (unité de son Etre, Dieu, Père, Fils et Saint-Esprit). Jésus ne serait qu’une créature (l’archange Michel, le second Adam parfait), mais pas Dieu dans le vrai sens. Ci-dessous un aperçu ra-ide des passages bibliques qui démontrent que Dieu (JHWH), «Jéhovah» et Jésus-Christ sont un et que la doctrine des Témoins de Jéhovah concernant Jésus n’est pas biblique.

JHWH est Dieu:Gen 1.1; Deut 6.4; Ps 45.7-8;
et Jésus est Dieu: Jean 1.1,18; 20.28; Rom 9.5; Tite 2.13; Héb 1.8; 2 Pi 1.1

JHWH est Seigneur: Gen 15.7; Ex 20.2; Nom 6.24; Deut 6.4;
et Jésus est Seigneur: Marc 12.35-37; Luc 2.11; Jean 20.28; Act 2.36; 10.36; Rom 10.9; 1 Cor 8.5-6; 12.3; 16.22; 2 Cor 4.5; Phil 2.11; 1 Pi 2.3; 3.15; Jac 2.1

JHWH est le Premier et le Dernier, l’Alpha et l’Oméga: Es 41.4, 48.12; Apoc 1.8
et Jésus est le Premier et le Dernier, l’Alpha et l’Oméga: Apoc 1.17-18; 2.8; 22.12-16

JHWH est le Sauveur: Es 43.3,11; 63.8; Luc 1.47; 1 Tim 4.10
et Jésus est le Sauveur: Mat 1.21; Luc 2.11;Jean 1.29; 4.42; Tite 2.13; Héb 5.9

JHWH est Roi: Ps 95.3; Es 43.15; 1 Tim 6.14-16;
et Jésus est Roi: Apoc 17.14; 19.16

JHWH est Juge: Gen 18.25; Ps 50.4,6; 96.13; Rom 14.10
et Jésus est Juge: Jean 5.22; 2 Cor 5.10; 2 Tim 4.1

JHWH est le Rédempteur: Ps 130.7- 8; Es 48.17; 54.5; 63.9
et Jésus est le Rédempteur: Act 20.28; Héb 9.12

JHWH est le Créateur: Gen 1.1; Job 33.4; Ps 95.5-6; 102.26; Es 40.28
et Jésus est le Créateur: Jean 1.1-3; Col 1.15-18; Héb 1.1-3

JHWH existe dès l’éternité: Gen 1.1; Ex 3.15; Ps 90.2; Dan 6.27; Rom 1.20
et Jésus existe dès l’éternité: Jean 1.1; 8.58; 12.41; 17.5; 1 Cor 10.4; Phil 2.6; Héb 9.26; 13.8; Jude 25

JHWH pardonne les péchés: Ex 34.6-8; Néh 9.17; Dan 9.9; Jon 4.2
et Jésus pardonne les péchés: Marc 2.1-12; Act 5.31; 26.18; Col 2.13; 3.13

JHWH ressuscite les morts: 1 Sam 2.6; Mat 22.31-32; Jean 5.21; Act 2.24; 3.15; Rom 4.24; 2 Cor 1.9
et Jésus ressuscite des morts: Luc 7.11-17; Jean 5.21; 6.40; 11.39-44

JHWH reçoit louange et adoration: Deut 32.3; Es 45.23; Ps 22.27-28; 66.4; 95.6; 97.7; 99.9; Apoc 14.7; 19.10
et Jésus reçoit louange et adoration: Mat 2.2; 14.33; 28.9,17; Jean 5.23; 20.28; Act 1.24; 7.59; 9.10-16; 22.16- 21; 1 Cor 1.2; 16.22; 2 Cor 12.8-9; Phil 2.10-11; Héb 1.6; Apoc 5.8-14.

Dr G.L.


Quelques informations sur les Témoins de Jéhovah

Les adeptes de la secte des Témoins de Jéhovah se considèrent comme "chrétiens" malgré leurs doctrines non bibliques. Ils diffusent surtout les deux périodiques "Réveillez-vous" et "La Tour de Garde". Ce dernier paraît depuis 1879. Son tirage international en 1994 a été de plus de 16 millions d’exemplaires; chaque mois parurent 2 éditions en 117 langues. La désignation officielle de cette secte aux structures rigoureusement hiérarchiques est "La Société de Bibles et de Traités La Tour de Garde" (Watchtower Bible and Tract Society). Leur propre "traduction" de la Bible porte le nom de: "Les Saintes Ecritures -Traduction du monde nouveau" et contient un grand nombre de falsifications de textes de la Bible.

Texte tiré avec autorisation de l’éditeur «Das Signal. no 106 mai/juin 1996, périodique de l’Association Suisse des Protestants actifs (Schweizerischer Bund aktiver Protestanten, Postfach 154, CH-5726 Unterkulm).


EVANGELISATION

Comment mener une discussion missionnaire avec eux

par le Dr Lothar GASSMANN
Traduit avec l’autorisation du journal « Das Signal » no 106 mai-juin 1996

Lors du jugement d’un tribunal de l’Administration supérieure berlinoise (Berliner Oberverwaltungsgericht) en décembre 1995, la communauté religieuse des Témoins de Jéhovah a été apparentée aux grandes églises, bien qu’elle se distance fondamentalement de la foi chrétienne dans presque toutes ses doctrines. La liste ci-dessous n’est pas une analyse de la doctrine de la Société de la Tour de Garde, mais une aide aux chrétiens qui ne reculent pas devant une occasion de témoigner auprès des adeptes de cette secte très active.

1. Considérez les Témoins de Jéhovah qui frappent à votre porte comme des hommes que Dieu vous a envoyés, et non pas comme des ennemis, afin que vous puissiez leur transmettre le message du salut du Dieu Trinitaire et de la rédemption par Jésus-Christ.

2. Priez pour ces hommes avant et après la rencontre. Priez aussi pendant la rencontre, mais seulement intérieurement, car une prière en commun avec un Témoin de Jéhovah n’est pas possible pour un chrétien (ils nient le Dieu Trinitaire que nous prions).

3. Demandez à Dieu l’amour, la gentillesse et la sagesse. Demandez Lui aussi qu’il vous garde, vous et votre famille des fausses doctrines et des puissances séductrices. Mettez-vous sous la protection du sang de Jésus-Christ.

4. Rencontrez les Témoins de Jéhovah avec respect. Ne ridiculisez pas leurs vues, mais mettez-vous avec eux sous l’autorité de l’Ecriture Sainte.

5. Précisez que vous reconnaissez l’Ecriture Sainte comme règle absolue, comme les Témoins de Jéhovah, cependant l’Ecriture Sainte seule et non pas « La Tour de Garde », ni la « Traduction du monde nouveau » de la Société de la Tour de Garde, mais le texte original ou une traduction très proche du texte original (p.ex. la traduction J.N. Darby).

6. Il serait bon qu’avant la discussion, vous soyez familiarisé avec les doctrines fondamentales de la Société de la Tour de Garde et avec leur réfutation. Lisez de la bonne littérature chrétienne pour vous informer sur ce sujet.

7. Toutefois, ce qui est plus important c’est d’être familiarisé avec la Bible et de suivre ses instructions. Revêtez-vous de la panoplie divine selon Eph 6.13-18.

8. Observez que les Témoins de Jéhovah se servent constamment de notions bibliques auxquelles ils donnent un autre sens que celui que vous connaissez. Insistez sur des définitions de sens clair. Les Témoins de Jéhovah désignent aussi Jésus comme « Fils de Dieu », mais entendent par cela l’archange Michel comme fils de Dieu (et non pas Jésus-Christ comme Dieu, le Fils).

9. Empêchez-les de gambader d’un passage biblique à l’autre (c’est leur méthode), et concentrez-vous sur quelques thèmes et passages bibliques seulement qui seront discutés à fond.

10. Ne permettez pas que votre partenaire de discussion sorte des textes bibliques de leur contexte, mais insistez toujours sur le contexte (la relation qu’a un verset biblique avec l’ensemble du texte) et le sens des mots qui se dégage des déclarations bibliques.

11. Tentez de prendre la discussion en main et gardez-en la direction, en l’axant sur les thèmes centraux de la foi chrétienne (Dieu, Christ, Rédemption).

12. Démontrez – dans la mesure de la littérature correspondante à disposition – les nombreuses erreurs et fausses prophéties de la Société de la Tour de Garde (p. ex. les prophéties non accomplies pour 1874, 1878, 1925 et 1975). Demandez ensuite à vos visiteurs s’ils considèrent vraiment une organisation qui a trompé ses adeptes si souvent comme une autorité digne de confiance.

13. Respectez l’effort missionnaire et le zèle éthique des Témoins de Jéhovah, mais précisez-leur clairement que les ouvres humaines ne présentent aucune garantie complémentaire quant à l’obtention du salut éternel, mais sont bien plus une conséquence du salut complet acquis par Jésus-Christ au Calvaire en notre faveur.

14. Si vous avez de la peine à mener une discussion théologique, ne vous laissez pas entraîner plus loin, mais confessez joyeusement la rédemption parfaite que vous avez reçue par Jésus-Christ. Mettez ensuite fin à l’entretien et congédiez les Témoins de Jéhovah en les recommandant à l’amour de Dieu qui veut les sauver.

15. Une autre approche consiste à leur remettre de la bonne littérature chrétienne. Comme les adeptes de la Tour de Garde n’osent pas, en règle générale, lire des livres de la « chrétienté », il est recommandé de les leur donner avec la proposition de vous entretenir avec eux de cette littérature. Comme ils tiennent beaucoup à revenir, ils ne se soustrairont guère à cette proposition.

16. Il est important de pratiquer un christianisme crédible pendant (et après) tout l’entretien, ce qui signifie concrètement: rester aimable, ne pas se laisser provoquer, tout en offrant éventuellement quelque chose à boire ou à manger.

17. Si l’on n’a pas de temps pour une discussion, on peut le dire poliment – et le visiteur doit aussi l’accepter. Si l’on ne se sent pas à la hauteur de discuter seul avec un Témoin de Jéhovah, on peut alors demander à d’autres chrétiens d’y assister (les adeptes de la Tour de Garde viennent, eux aussi, à deux la plupart du temps). En principe, on ne devrait pas se soustraire à une rencontre avec les Témoins de Jéhovah, car eux aussi sont des hommes que Dieu aime et désire sauver.

18. Dès qu’un Témoin de Jéhovah démontre une ouverture pour l’Evangile biblique, un processus douloureux de détachement de la secte commence: Il est considéré comme un renégat banni et perd tous ses anciens amis ainsi que le cadre « sécurisant » de la Société de la Tour de Garde. C’est pourquoi il est important de lui offrir un nouveau « chez soi », où il se sent à l’aise: une église fidèle à la Bible et disposée à l’aider, à le porter, à le consoler; cela pourrait être un groupe de maison au sein duquel chacun porte l’autre, donc un lieu de sécurité.

19. Il est possible qu’il reste des lésions psychiques suite aux pressions morales et à la soumission à l’organisation de la Tour de Garde. Elles devront être guéries avec délicatesse. Le message de la rédemption du pécheur par grâce seule offre de l’air à respirer. Il délivre de l’esclavage de la justice par les ouvres et de l’angoisse terrifiante d’Harmaguédon.

20. Une rencontre missionnaire avec les Témoins de Jéhovah ne peut pas être préparée de la même manière que celle que préconise la Société de la Tour de Garde, mais seulement dans la prière et sous la direction souveraine du Saint-Esprit.

21. Le but de vos contacts n’est pas la conversion à une église ou à une confession définies, mais la conversion au Seigneur Jésus-Christ, Fils de Dieu, comme l’Ecriture nous le décrit.

Car Dieu a tant aimé le monde qu’il a donné son Fils unique, afin que quiconque croit en Lui, ne périsse point mais qu’il ait la vie éternelle (Jean 3.16).

H.L.


Chronique de livres

Thomas WATSON
Editions Europresse, 128 pages

L’auteur était connu pour sa grande âme de berger et tous ses écrits bouillonnent de son désir fervent de voir son Sauveur glorifié dans la vie de ses disciples. Les expressions frappantes et les illustrations vivantes coulent de sa plume et rendent son style agréable et son message inoubliable. Voici deux exemples: « La repentance provoque la joie des anges, et le mécontentement celle des démons » (page 72) et à la page 84: « Un seul instrument désaccordé ruine toute la musique, et un seul esprit mécontent sème la discorde dans tout le voisinage ».

Il définit le contentement chrétien ainsi: « C’est une douce disposition de l’esprit qui permet au chrétien de se comporter de manière équilibrée en toute sorte de conditions », (page 24). Cette douce disposition n’est pas le fruit de la négligence, de l’indifférence ou d’une autosatisfaction. « Le vrai chrétien est une énigme, car il est à la fois l’homme le plus reconnaissant et le moins satisfait. Il se contente d’un morceau de pain et d’un peu d’eau, mais il ne se satisfait jamais de ce qu’il reçoit par grâce. Il aspire et désire toujours davantage. Sa prière revient sans cesse: « Seigneur, donne-moi plus de ressemblance à Christ et de communion avec lui! » .Il souffre de ce que l’image de Christ ne se révèle pas plus clairement en son âme », (page 101).

Mais Watson sait que ce don de Dieu ne peut être cueilli aussi facilement que la manne. Il commence donc avec l’affirmation du grand apôtre: « J’ai appris… », et consacre les cinq courts premiers chapitres à montrer que Dieu donne le contentement par son instruction divine.

Ce don n’est pas facultatif. Citant Héb 13.5 il poursuit: « Le Dieu qui nous ordonne de croire nous commande aussi d’être contents… Notre cour ne doit pas s’agiter plus que la mer en furie, qu’une seule parole des lèvres divines suffit à calmer », (page 27). Le même verset contient la promesse où « Dieu s’engage ainsi formellement à fournir notre nécessaire provision » (page 28).

Bien qu’il ait écrit au XVIIe siècle, Watson, comme beaucoup d’autres pasteurs puritains, avait une profonde connaissance de la nature humaine déchue et des remèdes spirituels à lui appliquer. Des exemples bibliques, bien choisis, tombent de sa plume pour avertir des dangers du mécontentement et nous convaincre de le repousser énergiquement. « Si Dieu ne répond pas à la convoitise des Israélites, ils lui demandent de leur ôter la vie. La manne ne suffit plus, il leur faut les cailles de surcroît. Achab, bien que roi et comblé de toutes les terres qui reviennent à la couronne, aurait-on pu penser, rentre chez lui triste et irrité parce qu’il ne peut posséder la vigne de Naboth! » (page 34).

Vous ne serez pas étonné de trouver que le plus long chapitre est intitulé: « Les prétextes du mécontent ». Tirant des exemples de tous les domaines de la vie – la famille, l’emploi, les amis, les épreuves, notre époque, l’Eglise, nos péchés – Watson ne nie pas les douloureuses réalités qui peuvent remplir nos jours. « Nous pouvons à juste titre nous lamenter, car nous vivons à une époque où les écluses s’ouvrent à toute nouvelle imagination, et l’opinion de tout homme est sa propre bible » (page 51). Puis ce docteur de l’âme apporte le remède: « Affligeons-nous de cet état de choses, mais veillons à ce que le mécontentement ne nous fasse pas murmurer. Plusieurs considérations nous aideront en ce sens… » et d’une façon éminemment pratique, il démontre que Dieu tourne les erreurs en un avantage pour la vérité.

Comme un bon médecin vise à guider ses patients vers une bonne santé, Watson s’efforce de conduire les chrétiens plus loin que la soumission et la patience dans les épreuves. « Le contentement révèle… la gaieté… il ne se contente pas de supporter sa croix, il s’en charge (Mat 6.24). Il voit la sagesse de Dieu en toutes choses » (page 105). Il donne d’excellents conseils pour y arriver et de grands encouragements pour persévérer sur cette voie.
Vivement recommandé.

Tony HYNES

Écrit par


Avant de nous interroger sur la crise actuelle, sur ses causes et sur ses effets, il est opportun de rappeler le sens du mot « crise ». Ce dernier trouve son origine dans le grec « krisis » qui signifie décision ou jugement. Et c’est bien de cela qu’il s’agit.
La crise représente une phase décisive et périlleuse d’une évolution, le moment paroxystique où la trajectoire d’une évolution change de cours. La crise est ainsi le temps d’une décision inéluctable et mécanique provoquée par l’Histoire, par les déterminants de la vie politique, sociale, économique et culturelle. Mais cette décision, voire ce jugement, peuvent procéder de Dieu lui-même pour les croyants. Toute crise, quelle que soit sa forme ou sa durée a son issue, bonne ou mauvaise.

Dans l’Histoire, les crises sont récurrentes.
En un sens, l’Histoire est faite d’une succession de crises séparées les unes des autres par des temps de latence et de calme relatif. La crise actuelle n’est pas un phénomène intrinsèquement nouveau. Dans
les années 1970 déjà, Valéry Giscard d’Estaing, alors Président de la République française écrivait: « Le monde est malheureux, et il est malheureux parce qu’il ne sait pas où il va et parce qu’il devine que,
s’il le savait, ce serait pour découvrir qu’il va à la catastrophe ».
Ce langage, pour le moins inhabituel sous la plume d’un homme d’Etat en activité, témoigne que les crises sont de toujours, ou alors que celle qui affligeait l’Europe au temps des deux chocs pétroliers et
du terrorisme d’extrême-gauche n’en finit pas de déployer ses incidences délétères.

Si presque toutes les générations ont connu tourments, incertitudes et soubresauts, la crise de cette fin de millénaire est caractérisée par sa très grande ampleur, par son aspect transnational ou universel, par le fort sentiment d’impuissance qui l’accompagne et par sa généralité.

Tous les champs d’action et de réflexion de l’humanité sont en crise, à commencer par le système des valeurs. Un article récent de l’hebdomadaire français « L’Express », intitulé « Ce que croient les enfants », rapporte ces paroles d’une enseignante, qui résonnent comme la quintessence de l’effondrement du christianisme et de ses valeurs plus que millénaires qui constituaient les fondements de la culture occidentale: « Il y a dix ans, les enfants conservaient encore des repères chrétiens assez classiques. Aujourd’hui, chaque enfant se bricole sa propre vision de l’au-delà ». Dans l’esprit de nos contemporains, il n’y a plus de repères incontestables auxquels les hommes et les femmes pourraient ancrer leurs vies. La culture, support de l’expression sophistiquée et complexe des diverses valeurs
et de leurs enchevêtrements, exhale souvent un parfum de vanité, de confusion ou de nihilisme protestataire dans nombre de ses ouvres.

Les relations humaines sont en crise parce qu’elles portent de plus en plus la marque de l’indifférence, de la peur ou de la haine. Les mutations sociologiques et les nouvelles moeurs conduisent à l’éclatement de la cellule familiale traditionnelle et, de proche en proche, à la  multiplication des comportements pathologiques .et des problèmes sociaux.
En dépit de la distribution contrôlée de méthadone et d’héroïne, la consommation de drogue, loin de reculer, nous renvoie plutôt l’image du mal de vivre et du mal-être d’une partie notable de la jeunesse.

La violence gangrène le tissu social de grandes villes au point que, par endroits l’Etat de droit ne parvient plus à imposer ses normes. Hommes et femmes de tous âges appréhendent d’être agressés
psychiquement et physiquement et craignent pour leur sécurité.

La crise se manifeste également dans les rapports que nous entretenons avec la science et la technologie. Le génie génétique et d’autres découvertes scientifiques laissent entrevoir
la stabilisation sinon la guérison de maladies considérées jusqu’il y a peu comme incurables ou irréversibles. Mais nous avons peur que ces innovations entraînent des effets secondaires monstrueux sous forme de maux inédits non maîtrisables ou qu’elles nous asservissent en servant d’instruments aux mains d’obsédés de la rationalité sociale, désireux d’imposer l’utopie de la normalité de l’homme abstrait parfait.

L’économie aussi est en crise. Pour l’homme de la rue, prioritairement attaché à son niveau de vie et légitimement à la sécurité de son emploi, c’est surtout, et peut-être même exclusivement, l’ économie qui est en crise. Il est vrai que le domaine économique nous offre l’image de l’émergence de contradictions chaque jour plus fortes, plus inadmissibles et plus scandaleuses. plus que jamais dans l’histoire de l’humanité, les progrès technologiques permettraient de produire des biens et services de qualité, en abondance et rapidement. Pourtant les besoins fondamentaux de millions de personnes ne sont
pas satisfaits! Depuis près de 3 ans, les annonces de licenciements des grandes entreprises multinationales sont régulièrement suivies d’une augmentation du cours de leurs actions en bourse!

La croissance économique n ‘est plus créatrice d’emploi comme naguère. C’est qu’aujourd’hui les progrès de productivité sont convertis en dividendes rémunérateurs ou en diminution des coûts de production, et non plus en réductions du temps de travail ou en augmentations des salaires réels génératrices d’un accroissement de la demande globale.

Produire le moins cher possible et vendre le plus cher possible afin de maximiser le profit sans autres considérations humaines ou sociales: de manière simplifiée, c’est la fameuse logique économique qui,
conjuguée à la dissolution accélérée des frontières et des Etats-nations, implique la globalisation des marchés. Logique économique et globalisation des marchés exercent un imperium toujours plus absolu sur les populations.
En 1951, Frank Abrams, président de la Standard Oil du New-Jersey, écrivait: « Le rôle de la direction est de maintenir un juste équilibre entre les intérêts des différentes parties concernées: les actionnaires, les employés, les consommateurs et l’ensemble de la collectivité ». Il est hélas révolu le temps où cette philosophie imprégnait la plupart des entreprises des pays industrialisés occidentaux.

L’emprise grandissante de la logique économique creuse les inégalités sociales et contribue à l’émergence d’une société à deux vitesses. En raison du chômage et de la précarisation des emplois
existants, les tensions sociales sont avivées, la jalousie à l’égard des bénéficiaires de sécurité matérielle attisée, les relations sociales se détériorent, les consensus s’érodent et les solidarités vraies
s’amenuisent.

La sphère politique et l’Etat, en tant qu’institution, n’échappent évidemment pas à la crise, notamment en raison de la perte de crédibilité de gouvernements qui ne parviennent pas à maîtriser
les fléaux du monde contemporain et qui de surcroît peinent à définir leur rôle dans la société.

Ma foi chrétienne ne m’empêche pas d’être un adepte réservé de l’analyse et de l’approche systémiques, lesquelles voient dans les diverses sphères de la vie humaine autant de variables s’influençant réciproquement.
Il est à mes yeux évident que les crises des divers secteurs de la vie sociale sont en interaction, qu’elles se nourrissent et s’aggravent mutuellement. De proche en proche, les diverses crises sectorielles se transforment en une crise généralisée et massive. Ainsi, la crise des valeurs exerce une influence manifeste sur la culture, sur les relations sociales et sur les systèmes d’éducation. La crise économique
explique en grande partie la crise politique dont souffrent nos pays.
On pourrait multiplier les exemples d’interactions entre les diverses crises sectorielles. Tout cela pour dire qu’aujourd’hui, plus encore que par le passé, l’aggravation d’une crise sectorielle amplifie inéluctablement la crise générale à cause des nouvelles techniques de l’information et du phénomène de l’accélération de l’Histoire.

Les historiens parlent de drôle de guerre pour qualifier la situation qu’a vécue la France entre septembre 1939 et le 10 mai 1940. La guerre était déclarée, mais l’armée française attendait sur sa ligne Maginot et aucun soldat allemand n’avait foulé le sol de l’Hexagone. A certains égards, la crise que nous connaissons est également une drôle de crise. Tout le monde parle de crise économique alors que, contrairement à ce qui s’est produit durant la grande dépression de la première moitié des années 1930, les taux de croissance de la plupart des pays européens ont continué à être positifs depuis 1990. La Suisse, il est vrai, a fait moins bien que ses voisins, mais en valeur réelle notre PNB de 1996 n’est pas plus bas que celui de 1990. D’autres domaines de nos sociétés se prêtent aux mêmes constatations. Cela démontre que si les crises actuelles sont indiscutables et graves, elles présentent
néanmoins une dimension psychologique considérable, les hommes et les femmes aggravant dans leur imaginaire les aspects objectifs de ces crises. Par leurs angoisses compréhensibles et leurs visions pessimistes de l’avenir, les humains accélèrent les crises. C’est particulièrement vrai dans le domaine économique où l’épargne de protection excessive et la diminution corrélative de la demande engendrent de forts ralentissement conjoncturels. Ainsi le psychologique et le réel conjuguent-ils leurs effets délétères pour précipiter le mouvement des crises vers des phases plus paroxystiques. Drôles de crises que celles qui sont intériorisées avant d’éclater pleinement.

Dans le cadre de cette conférence, il n’est certes ni possible ni opportun d’analyser les causes de la crise actuelle d’une manière un tant soit peu exhaustive. Je me bornerai à dire qu’à mes yeux trois facteurs fondamentaux se joignent pour modeler et changer en profondeur nos sociétés: la logique économique, les avancées technologiques et les mentalités collectives.

J’ai déjà évoqué la logique économique et quelques-unes de ses conséquences.

Les avancées technologiques constituent le principal instrument du mythe prométhéen, peut-être le plus grand moteur inconscient de notre civilisation. Beaucoup d’innovations technologiques apportent de véritables et légitimes améliorations à l’humanité et doivent être acceptées à leur juste et grande valeur. Mais aujourd’hui, la science et la technologie sont toujours plus autonomes relativement
aux critères du bien et du mal. Les passages des progrès scientifiques aux applications technologiques sont trop peu soumis aux normes discriminatoires de la conscience. Dennis Gabor a saisi cette dérive en énonçant sa première loi de la technologie: « tout ce qui peut être fait le sera ». En réfléchissant à cette problématique, Roger Garaudy a écrit avec pertinence: « Tout ce qui est techniquement possible est nécessaire et souhaitable ». C’est en ce sens que science et technologie peuvent devenir oppressantes pour l’homme. Le génie génétique présente pour le moins autant de virtualités négatives que d’aspects positifs pour l’humanité. La vente de sang contaminé et l’affouragement des bovins par des farines animales, contre les lois élémentaires de la nature et du bon sens, laissent mal augurer d’une utilisation
sage du progrès scientifique.

Les mentalités collectives constituent vraisemblablement le déterminant le plus important du déclenchement, du degré de gravité et de la nature des crises. Les mentalités collectives de ce temps me semblent présenter les caractéristiques essentielles que voici:
-Un agnosticisme multiforme largement répandu, selon lequel Dieu, s’il existe, n’est en aucun cas le Dieu de l’Histoire révélé par l’Ancien et le Nouveau Testament, mais bien plutôt le Grand Psychologue qui nous comprend du haut de sa distante bienveillance.
-La conviction qu’il n’y a pas de vérité absolue dans l’ordre spirituel, religieux, éthique et social, mais bien plutôt des vérités partielles, contingentes et provisoires, issues de la culture d’une époque. C’est le relativisme.
-La volonté de s’abstraire de la condition humaine et de nier la nature humaine. Le dessein de s’abstraire de la condition humaine explique les tentatives de l’humanité de réaliser l’utopie d’un paradis terrestre dont seraient bannies la souffrance, les maladies, la peine du travail, les contradictions
et limitations humaines, voire même la mort. Nier la nature humaine, c’est, entre autres, refuser de voir que l’origine du mal est en l’homme et non pas d’abord dans la société.
-La quête d’une spiritualité irrationnelle et irréelle qui se manifeste par le goût pour les religions orientales, le surnaturel sous toutes ses formes, les tarots, les horoscopes et autres pourvoyeurs de tranquillité psychique éphémère.
-La croyance que les êtres humains ne sont pas véritablement responsables de leurs comportements pathologiques, ces derniers étant imputables à l’environnement socio-culturel. Cette croyance détermine grandement l’attitude de nos tribunaux et de nos systèmes d’éducation.
L’individualisme égoïste, avec ses corollaires logiques que sont l’indifférence à son prochain, l’absence de solidarité active et la régression de l’esprit de sacrifice.
-Le profond désir du plus grand nombre que l’Etat n’interdise plus, mais qu’il se borne à réparer les effets négatifs de nos comportements pathologiques.
-La consommation de sensations physiques et psychiques érigées en but ultime de la vie et en valeur absolue de la société.
-Le matérialisme pragmatique et les résultats à court terme reconnus comme critères premiers des décisions humaines. C’est le règne de l’utilitarisme.
-Le mépris, voire la haine d’une différence qui interpelle et brise des certitudes faciles, confortables et anesthésiantes.
-En dépit d’un certain retour à la nature et aux mythes passéistes de l’âge d’or, la croyance majoritaire que la science et la technique constituent les principaux instruments de la résolution de presque tous les fléaux qui assaillent l’humanité.

Répétons-le. Les mentalités collectives, les avancées technologiques et la logique économique constituent l’origine principale de la crise généralisée d’aujourd’hui dont nous développerons maintenant quelques aspects plus spécifiquement sociaux et politiques.

La crise sociale

De manière quintessente et schématique, la Révolution française et la Révolution industrielle qui a débuté en Angleterre vers 1760 constituent les deux grandes portes d’entrée du monde moderne.
La Révolution française et le Siècle des Lumières qui l’a initiée ont notablement contribué à modifier la pensée dans les ordres théologique, philosophique, culturel et politique. La Révolution industrielle a, quant à elle, bouleversé les domaines de l’économie et de la technologie. C’est à cette époque que les machines ont commencé à remplacer la main humaine. C’est également à cette époque que la vérité d’un Dieu personnel, transcendant et salvateur, source ultime et unique de références supra-humaines intangibles, a été contestée sérieusement par les élites. Les masses sont restées attachées plus longtemps à la réalité d’un Dieu révélé. Le mouvement d’évacuation de Dieu s’est accentué au cours des deux à trois dernières décennies à un point tel que nous vivons aujourd’hui dans une société post-chrétienne.

Ce phénomène du rejet de Dieu et des valeurs du christianisme a été accompagné par l’émergence progressive de la société industrielle qui a pris le relais de la société agraire. La société industrielle et sa fille, la société post-industrielle, sont notamment caractérisées par la  concentration
accélérée de toutes les activités humaines. Ces diverses concentrations ont donné naissance à un nouveau type d’homme: l’homme de masse.
Ce dernier souffre à la fois de sur-intégration et de sous-intégration.

De sur-intégration, parce qu’il est prisonnier partiellement volontaire de l’uniformisation des modes de vie et des comportements humains, d’un conformisme social parfois étouffant ainsi que de multiples réseaux de contraintes et de conditionnements. Bien plus que nos ancêtres, nous vivons dans un rapport de dépendance très étroit à l’égard de la société.

Mais par ailleurs, les hommes d’aujourd’hui pâtissent souvent d’une sous-intégration parce qu’ils sont privés d’une communauté naturelle de taille humaine qui leur serve de structure d’accueil sécurisante. En ce sens, l’homme de masse est fréquemment solitaire, individualiste et livré à lui-même
dans une société atomisée fortement centralisée et organisée.

Le rejet grandissant de Dieu et la société de masse atomisée ne pouvaient que susciter une indifférence croissante à l’égard d’autrui, et partant une détérioration des relations humaines.

Cette indifférence relativement à l’autre ne peut qu’être aggravée par la crise économique, le chômage, la précarisation des emplois, le sentiment d’incertitude et l’insécurité qui se manifestent avec une acuité toujours plus vive.

Il s’ensuit que la première manifestation de la crise sociale réside dans l’effritement ou le recul de la solidarité. L’indifférence menace la solidarité. Une indifférence aggravée tue la solidarité.

Banalement, cette absence de solidarité vraie s’observe le long des boulevards de nos grandes cités lorsqu’une personne est en difficulté ou agressée. Elle se traduit par la méfiance spontanée face à autrui, par la peur de l’inconnu, de l’étranger, de l’autre, par une montée des égoïsmes, parfois même par la haine de celui qui est différent.

Les clivages sociaux sont de toujours parce qu’ils sont consubstantiels à la nature humaine. Mais l’effondrement de la solidarité les renforce et concourt à l’apparition d’une société dite à deux ou à plusieurs vitesses.

Toute une série d’anciens clivages renforcés et de nouveaux clivages conduisent à ces fractures sociales superposées dont on parle tant.
-Un premier et primordial clivage se creuse sous l’effet de l’évolution fortement divergente de la rémunération du capital et du travail. Il y a deux décennies encore, ces deux grands facteurs de production étaient rétribués assez équitablement, référés l’un à l’autre. Aujourd’hui, l’impitoyable logique économique, la globalisation des marchés et la pression des actionnaires impliquent une réduction drastique des coûts, dont les salaires constituent la composante essentielle à hauteur
d’environ 60%. Dans ces conditions les entreprises remplacent, autant que faire se peut, les travailleurs par des processus de production automatisés. Il n’est dès lors pas étonnant que les revenus réels de la majorité des salariés stagnent ou diminuent, alors que ceux des détenteurs de capitaux, et plus particulièrement des propriétaires d’actions, augmentent sensiblement. En Suisse par exemple, le revenu disponible des ménages a diminué de 4,8% entre 1991 et 1995, alors que durant le même laps de temps, le cours et les dividendes de très nombreuses actions s’envolaient. La comptabilité nationale des divers pays industrialisés confirme cette tendance. Cette évolution est d’autant plus choquante que le profit ne récompense plus véritablement la prise de risque et les talents d’un entrepreneur indépendant, mais bien plutôt l’attente tout à la fois fiévreuse et passive des individus et des institutions qui ont les yeux rivés sur les écrans de la bourse sans véritablement travailler et courir de graves périls. Le capitalisme spéculatif tend à l’emporter sur le capitalisme productif.
.-Un deuxième clivage oppose les hommes et les femmes qui savent comme l’on doit savoir et ceux et celles qui ne savent pas comme l’on doit savoir. Se pose ici toute la problématique de la maîtrise des compétences professionnelles, des techniques et des moyens de communications modernes.
Heureusement que beaucoup de gens assimilent ces savoirs et ces savoir-faire contemporains. Robert Reich, ancien Secrétaire américain au Travail, range dans cette catégorie les identificateurs et les résolveurs de problèmes ainsi que les courtiers et les stratèges. Mais à l’évidence, et en dépit de tous les ambitieux programmes d’éducation, tous ne peuvent pas l’être, faute de disposer des ressources psychiques, matérielles ou intellectuelles nécessaires.
Un très récent rapport de l’OCDE précise que près de 20% de la population adulte suisse éprouve des difficultés de lecture. Les chiffres ne sont guère différents chez nos voisins. C’est d’autant plus dramatique que les entreprises ont de moins en moins besoin de travailleurs peu capables d’exercer autre chose que des tâches simples et répétitives. Dans les prochaines années, une
grande partie de ce type de travailleurs sera condamnée à un chômage durable.
Toujours plus délicate sera la situation des personnes âgées en particulier, qui peinent à utiliser des outils aussi courants que les nouveaux moyens de paiement ou les ordinateurs appelés à l’omniprésence. A n’en pas douter, ce clivage associé à la dureté et à la fausse rationalité de notre temps, mène
d’une part à la disqualification de valeurs autrefois reconnues telles que la fidélité, la patience, la disponibilité, l’empathie et le sens de l’esthétique gratuite, et, d’autre part, à l’exclusion de ceux qui ne savent pas ou plus comme l’on devrait savoir.
-La haine du différent, attisée par la crise sociale, renforce et renforcera de plus en plus un troisième clivage, qui recoupe en partie le deuxième. Cette césure sépare ceux qui se comportent comme l’on doit se comporter en se conformant aux principaux codes de notre époque et ceux qui ne le font pas. Ces derniers, parmi lesquels il convient de compter les toxicomanes, mais aussi les adeptes convaincus de philosophies, de religions ou de styles de vie honnis,sont eux également de plus en plus guettés par la marginalisation et l’ostracisme.
-Un quatrième clivage, ultra-classique et déjà indirectement évoqué oppose les hommes et les femmes pourvus d’un emploi stable aux chômeurs de longue durée. Nous nous bornerons ici à souligner la gravité de ce grand fléau en rappelant qu’entre 1980 et 1996, le taux de chômage a passé de 6,2 à 12,6% en France, de 3,4 à 10% en Allemagne, de 7,7 à 12% en Italie et de 0,2 à 5,2% en Suisse.
Il est vrai que durant ces quinze dernières années, ce taux a régressé de 7,1 à 5,2% aux Etats-Unis.Mais l’UE compte aujourd’hui près de 20 millions de sans-emploi et les pays de l’OCDE plus de 35 millions.
-Un cinquième clivage oppose les personnes fortement ancrées dans une communauté restreinte ou large, telle qu’une famille solide ou un groupement très solidaire et protecteur, aux personnes fragilisées par leur solitude.
Nous pensons ici à certaines personnes âgées ou à des femmes seules élevant leurs enfants. Là aussi, l’éviction sociale fait des ravages.
-Un sixième clivage, fondamental, synthétisera avec toujours plus de vigueur les quatre premiers, celui qui trace une ligne de partage entre les personnes qui perçoivent des revenus suffisants pour participer aux festins des îlots de prospérité et les victimes de la nouvelle pauvreté qui pourront de moins en moins s’asseoir à la table du banquet de la société. Dans notre pays, qui demeure un des plus riches de la planète, nous recensons près de 500.000 nouveaux pauvres, soit près de 1/14 de la population. Ce sixième clivage figure sous la forme la plus achevée de la société à deux vitesses
et engendre à son tour un septième clivage.
-Dans notre pays et ailleurs, ce septième fossé, plus béant qu’il y a cinq ou dix ans, oppose les catégories sociales qui ont accès à la médecine de pointe, aux meilleures écoles et à certaines expressions de la culture, aux couches de la population qui en sont privées, faute de revenus suffisants.
En Suisse, le nouveau système d’assurance maladie s’éloigne de l’universalité pour pratiquer des tarifs différenciés en fonction des risques couverts. De très sérieux projets visent à faire participer les parents au financement des écoles du secondaire II par le biais d’écolages nouveaux ou substantiellement plus élevés.
Ces tendances, qui s’abreuvent à l’effondrement des solidarités et à la crise des finances publiques, réduisent singulièrement la relative et satisfaisante égalité sociale qui prévalait naguère dans notre pays et surtout, vident progressivement de sa substance le célèbre et excellent postulat de l’égalité des chances qui fut l’un des joyaux de l’Europe du XXe siècle.

La détérioration des relations humaines, la déliquescence du tissu social, la multiplication des clivages, le phénomène de l’exclusion, la nouvelle pauvreté et le chômage: grande est la vraisemblance que les principales caractéristiques de la crise sociale nourrissent immanquablement les frustrations, les mécontentements, les jalousies et les sentiments de révolte au point d’ébranler les régimes démocratiques et des modes de vie qui semblaient assurés pour longtemps.

La crise politique

Nos pays subissent une profonde crise politique. Cette crise polymorphe est d’abord celle de l’Etat.

L’Etat est un fait de nature, une institution permanente. Le pouvoir peut changer de forme, jamais il ne disparaît totalement. La conception chrétienne de l’Etat dérive substantiellement du chapitre 13 de l’Epître aux Romains. Le pouvoir étatique y est légitimé et sa fonction d’ordre reconnue. Pour le christianisme biblique, l’Etat existe parce que la nature humaine est universellement orientée vers le mal. Les deux grandes fonctions ontologiques de l’Etat consistent dès lors à protéger les
individus contre leurs violences réciproques et contre les agressions extérieures. Notons que l’origine divine de l’institution étatique n’empêche nullement ses perversions.

Aujourd’hui, la notion même d’autorité étant discréditée, nos contemporains ont logiquement une conception contractuelle de l’Etat. Pour eux, l’Etat n’est légitimé que s’il accroît leur bien-être et va au devant de leurs désirs.

Comme les fonctions ontologiques de l’Etat sont vivement contestées, l’Etat ose de moins en moins interdire, réprimer et sanctionner les comportements pathologiques tout en étouffant la société par un corset de directives bureaucratiques.

Mais il faut voir que l’affaiblissement de la fonction d’interdiction de l’Etat nourrit sa fonction de réparateur des comportements pathologiques et donc son étendue. Sur le mode intimiste ou violent, les individus disent de plus en plus à l’Etat: « N’empêche plus la libre actualisation
de tous nos désirs, mais bien plutôt, effaces-en les conséquences ».
Les Etats sont véritablement en train de devenir des effaceurs fatigués d’effets secondaires.

Les Etats sont ainsi simultanément faibles et étendus, gros et mous. C’est bien dans le double mouvement d’extension et d’affaiblissement de l’Etat que réside sa crise majeure.
L’évacuation de Dieu n’est pas pour rien dans l’extension croissante de l’Etat, et c’est avec pertinence que Louis Lavelle a pu écrire: « Tout se passe comme si les hommes, au moment où la foi les abandonne, pensaient pouvoir attribuer à l’Etat la fonction providentielle que Dieu cesse pour eux d’assumer dans le monde ». Jeanne Hersch perçoit elle aussi les ressorts profonds de l’extension de l’Etat avant d’aboutir à cette conclusion: « C’est tout juste si on ne demande pas à l’Etat d’arrêter le temps, de supprimer l’histoire, d’exclure toute souffrance, d’éliminer la mort. Et on lui demande
bel et bien à la fois d’imposer les règles universelles de l’accord entre tous les hommes, et de respecter l’unicité de chaque exception, de chaque être singulier, de chaque comportement marginal ».

L’activité et la cohérence étatiques souffrent manifestement de ces contradictions.

Paradoxalement, en dépit de la mode ultra-libérale, la plupart des Etats européens gagnent en étendue. Durant ces dernières années, très peu d’entre eux ont enregistré une régression de leurs prélèvements obligatoires, lesquels continuent à dépasser 45 et même 50% de nombreux pays.

Ces propos ne doivent pas être interprétés dans le sens d’une mise en cause radicale de l’action sociale de l’Etat. Leur visée est de rendre compte des fondements de la crise de l’Etat.

La crise de l’Etat participe directement ou indirectement à au moins trois des quatre grandes causes de la grave crise des finances publiques qui affecte absolument tous les pays.
-La première cause est philosophique. Nous venons de l’évoquer. Trop d’individus et de catégories sociales revendiquent que l’Etat reste passif devant l’expression de toutes les formes pathologiques de leurs libertés, tout en exigeant de lui qu’il répare et supporte financièrement les multiples conséquences
de l’usage perverti  de ces libertés. Autrement dit, ces hommes et ces femmes exigent de l’Etat qu’il soit libéral face à la concrétisation de leur liberté instinctuelle, mais socialiste lorsqu’il s’agit de gommer les conséquences de leurs comportements pathologiques ou d’assurer leur sécurité matérielle.
La deuxième cause est institutionnelle. Elle est liée au fonctionnement des régimes démocratiques et tient au fait que la majorité des contribuables attendent beaucoup de l’Etat, mais ne sont pas disposés à payer les impôts et taxes nécessaires pour couvrir toutes les dépenses étatiques. A l’ère de l’ultra-libéralisme, nombreux sont ceux qui souhaitent que les pouvoirs publics
réduisent les dépenses, mais il ne veulent surtout pas que les coupes budgétaires interviennent dans les domaines qui les concernent directement. Un gouvernement occidental qui augmenterait les impôts pour couvrir l’intégralité de ses dépenses serait à coup sûr battu lors des prochaines élections générales. Cruelle contradiction de la nature humaine qui asphyxie les finances publiques.
-La troisième cause est structurelle. Elle est imputable à l’enchevêtrement des compétences politico-administratives, à la production d’actes administratifs superflus et aux réflexes corporatistes de certains titulaires de la fonction publique.
-La quatrième cause est conjoncturelle. Elle rend compte de la diminution des recette fiscales due à la récession économique.

En raison des critères de convergences imposés par le Traité de Maastricht, les pays membres de l’UE tentent tous de réduire leurs déficits publics à 3% du PIE. Entre 1993 et 1996, ils sont parvenus à ramener ces déficits de 7 à 4,5%. Cette réduction n’empêche nullement l’aggravation de la dette publique. Elle ne fait que la freiner, et surtout, réduit sensiblement les marges de manouvre des gouvernements européens, ce qui accroît leur impopularité.

Il y a aussi crise politique parce que les gouvernements et l’électorat se tiennent en esclavage mutuel, ce qui rend hypothétique une résolution véritable des problèmes qui se posent. A la suite de nombreux autres, le politologue Maurice Duverger affirme que presque tous les partis camouflent leurs objectifs réels pour attirer les électeurs.
Les politiciens s’adressent souvent aux instincts et aux facultés émotionnelles plutôt qu’à la raison et au sens moral des électeurs. Mais n’en est-il pas ainsi parce que les masses sont plus réceptives à la première démarche qu’à la seconde? Les partis au pouvoir utilisent parfois les finances
publiques à des fins électorales.
C’est blâmable. Mais que penser des électeurs qui récompensent ce procédé? Le second comportement n’engendre-t-il pas le premier? Les gouvernements suivent l’opinion plus qu’ils ne la forment. C’est peut-être une des définitions de la démocratie. Mais si ce régime ne se réduit qu’à cela, il est condamné. La recherche de l’intérêt général pâtit évidemment de cet esclavage mutuel des gouvernements, des partis politiques et des électeurs.

La politique est encore en crise parce que les consensus s’effritent en raison d’une extrême pluralité des intérêts et des opinions qui n’est plus transcendée par des valeurs et des références communes. Presque plus aucun gouvernement ne parvient à obtenir un accord général sur les grands axes de la politique à conduire. Tout cela entrave fortement la cohérence d’une politique gouvernementale.

Durant sa dernière campagne électorale, Jacques Chirac a mis en honneur le concept de pensée unique. Dans ce contexte, la pensée unique signifie qu’il n’y aurait pas d’autres politiques possibles que
celles qui sont menées par la plupart des gouvernements européens, qu’ils soient de centre-gauche, de centre-droite ou du centre. La logique économique, la globalisation des marchés, la nécessité de redresser les finances publiques avec ou sans perspective d’entrer dans l’union monétaire le 1.1.1999, les nouvelles mentalités collectives, les progrès technologiques et la crise sociale constitueraient un réseau de contraintes tel qu’il n’est plus possible de gouverner autrement que ne le font Jacques Chirac, Helmut Kohl, Romano Prodi, Bill Clinton et les autres. Comme Mammon triomphe partout de César, les politiques conduites par la plupart des gouvernements se rapprochent de plus en plus, principalement en Europe.
Comment voudrait-on que les électeurs européens les plus exposés à la crise généralisée placent encore leur confiance dans les partis et les gouvernements démocratiques quand en matière d’emploi, de chômage et d’insécurité, 11 ans de gouvernement socialiste en France aboutissent pratiquement au même résultat que 14 ans de mesures de centre-droite en Allemagne ou que plus de 20 ans de politique centriste en Italie?
Ces convergences au niveau de l’action étatique et de ses effets découragent indubitablement les nombreux électeurs mécontents et expliquent aussi bien le regain de l’abstentionnisme que celui du populisme et des votes protestataires d’extrême-droite surtout, mais aussi parfois d’extrême-gauche.

Ajouter à cela que les gouvernements parviennent de moins en moins à maîtriser les défis auxquels ils sont confrontés, c’est expliquer assez facilement la perte de crédibilité dont sont victimes la plupart des gouvernements.

Parmi tous les fléaux qui ravagent nos sociétés, le chômage et l’insécurité sont certainement ceux qui taraudent le plus l’esprit des masses. Si les gouvernements ne parviennent pas à les endiguer, pas plus qu’à réduire la crise politique, l’évolution actuelle mènera rapidement au chaos, à la paralysie et à l’effondrement des institutions démocratiques et libérales. Les masses appelleront un « sauveur », un nouvel « homme fort ». L’Europe a déjà connu le scénario dans les années 1930 avec l’arrivée au pouvoir d’Hitler. Si aucune inflexion notable ne vient modifier les trajectoires actuelles, le temps n’est peut-être
plus très éloigné où l’on pourra dire de tous les pays ce que disait Machiavel de l’Italie de son époque: « à bout de souffle, elle attend celui qui pourra guérir ses blessures, … la voilà prête à suivre un drapeau, pourvu qu’il se trouve quelqu’un qui veuille le saisir ». Un chrétien perspicace dirait que les temps de l’Apocalypse sont proches.

Le thème général des Rencontres de Lavigny est intitulé « La Crise, chance ou fatalité? ». La crise généralisée qui gangrène nos sociétés sera une chance à condition que les hommes et femmes de ce temps comprennent d’abord qu’elle est ultimement imputable à un système de valeurs erroné, à des comportements pathologiques et au rejet grandissant du judéo-christianisme, puis qu’ils en tirent la leçon salvatrice en acceptant de changer de mentalités et d’accompagner l’exercice de leurs libertés de sens des responsabilités et de solidarité à l’égard d’autrui.

En revanche, si ces mêmes hommes et femmes persistent à voir dans la crise le produit d’une quelconque malchance, de la globalisation des marchés ou d’une nécessité aveugle inscrite dans l’Histoire et s’ils s’obstinent à se débarrasser de toute culpabilité pour charger des boucs-émissaires
commodes de tous les fléaux de la société, la crise s’aggravera à un point tel que nous nous dirigerons vers une catastrophe majeure qui, dans un bruit assourdissant, retentira comme la résultante inéluctable et l’indicateur irréfutable de nos errements.

L’Ecriture affirme dans Gal 6.5: Ce qu’un homme aura semé; il le moissonnera aussi. Ce qu’une société sème, elle le moissonne aussi. Ce simple texte et son analogie sont absolument conformes
au principe de causalité dans l’ordre moral, mais aussi sur le plan de la vie humaine.

Le Dieu de Jésus-Christ, par respect pour le libre-arbitre qui est le garant de la liberté et de la dignité humaine, place tous les êtres humains, toutes les sociétés et toutes les générations devant ce choix: J’ai mis devant toi la vie et la mort, la bénédiction et la malédiction. Choisis la vie afin que tu vives, toi et ta postérité (Deut. 30.19).

Puisse notre génération en crise choisir les chemins de la vie et du bien afin de survivre et de laisser à ses enfants un monde un peu meilleur qu’il n’est aujourd’hui.

J.-P. G.

Pierre WHEELER
Editions Barnabas 1996, 143 pp.
NB: les citations tirées du livre sont mises entre guillemets.

Deux hommes marchent-ils ensemble s’ils ne se sont pas concertés? (Amos 3.3) – Quelle communion y a-t-il entre la lumière et les ténèbres? (2 Cor. 6.14)

L’ouvrage de Pierre Wheeler vient à son heure! Son but est d’alerter les évangéliques qui se réclament encore de la Bible comme seule autorité et base de foi. La première partie parut en 1989. La situation ayant beaucoup évolué depuis, l’auteur a ajouté une deuxième partie en 1996, montrant l’influence grandissante du pape Jean-Paul II, qui veut à tout prix créer « une façade d’unité visible » de l’Eglise chrétienne sous l’égide de l’Eglise catholique.

La séduction est grande en ce qu’elle cherche à nous dépouiller de tous les bienfaits qui ont découlé de la Réforme.

L’auteur commence par mettre trois choses au point:
-Est-il pensable que la prière de Jésus pour l’unité des disciples dans Jean 17 n’ait pas été exaucée? Cette unité est bel et bien une réalité spirituelle.
-Jésus-Christ est l’unique sauveur et médiateur.
-La Bible est la seule autorité, étant Parole de Dieu inspirée par le Saint-Esprit.

La définition du mot « ocuménisme » est suivie d’un bref historique de l’ocuménisme et du COE (Conseil Ocuménique des Eglises), à ses débuts de caractère nettement évangélique, puis manipulé par l’Eglise catholique et glissant vers la politisation.

Le pape a effectué d’habiles manouvres:
-Les hérétiques sont devenus des « frères séparés ».
-Luther a été quasiment « réhabilité ».
-Par le biais du syncrétisme, tout doit être réuni en « une seule Eglise, évidemment catholique romaine ».

Jean-Paul II tire avantage du « laxisme du protestantisme » pour le pénétrer. Comment peut-on évangéliser ensemble quand Marie médiatrice et les sacrements sont déclarés nécessaires au salut, tout en maintenant « l’unique médiation de Jésus-Christ »? C’est du double parler.

Malgré certains arguments prônant l’unité qui pourraient paraître plausibles, un gouffre sépare la doctrine catholique de la doctrine biblique: « pour les uns le salut est essentiellement obtenu par les sacrements ou par les mérites, pour les autres il est l’ouvre du Saint-Esprit qui opère la régénération de celui qui met sa confiance en Jésus-Christ seul. »Comme certains rois juifs, l’Eglise catholique a depuis longtemps fait entrer dans le culte des éléments païens condamnés par la Bible.

L’annexe I de la première partie contient un examen détaillé des hérésies catholiques, confirmées surtout par le Concile de Trente au 16e siècle, déclarées toujours valables par le nouveau Catéchisme catholique qui se veut innovateur mais ne l’ est pas sur le fond. L’auteur juxtapose ces hérésies aux vérités bibliques. Dans l’annexe II, on trouve une confession de foi évangélique basée sur la Bible seule (en l’occurrence celle de la FEF, Fédération Evangélique de France), en confrontation avec les courants modernes libéraux.

Dans la deuxième partie du livre, Pierre Wheeler examine de plus près ce qui se prépare « dans les coulisses », quitte à être critiqué par les ocuménistes inconditionnels. Il ne fait aucun doute que l’objectif principal de Jean-Paul II est l’intégration des chrétiens de tous bords dans le giron de l’Eglise catholique. Cela ressort clairement de sa dernière encyclique, selon laquelle « la totalité de la vérité révélée se trouve toujours auprès de l’Eglise catholique ». Le pape, infaillible, veut devenir le chef absolu du christianisme, y attirant si possible juifs, musulmans, hindous, etc.

« L’avance ocuménique protestante » trouve son expression dans la déclaration « Evangéliques et catholiques ensemble », signée par quelques éminents évangéliques tels que Stott et Packer (« signataires bien naïfs ») .

Le livre se termine par une pressante mise en garde. L’auteur examine la question de la séparation, qui peut être une nécessité bibliquement fondée; le problème de la « Semaine de l’Unité » lancée par l’Eglise catholique; le poids donné à « l’action socio-politique » liée à « l’indifférentisme doctrinal ». Puis il s’attaque au « double langage » qu’emploient les promoteurs (catholiques) de AD 2000. Pour donner un exemple: la « conversion » telle que Jean-Paul II la conçoit est une conversion à l’Eglise catholique plutôt qu’à Dieu.

Le vocabulaire biblique a un sens précis et ce serait notre devoir d’en informer nos interlocuteurs catholiques plutôt que de collaborer avec eux sur une base chancelante. Face à ce « flux de la vague ocuménique », nous avons à apporter l’Evangile pur au monde qui nous entoure, même si nous savons que, selon la prophétie biblique, un « Nouvel Ordre Mondial » qui « sera anti-(Jésus)-Christ » se prépare. Notre vocation de « faire de toutes les nations des disciples » reste inchangée. Mais faisons-le dans la fidélité et avec prudence. C’est sur ce mot d’ordre que Pierre Wheeler termine son exposé lucide et magistral.

Tout enfant de Dieu soucieux de suivre son Sauveur dans la fidélité à la Bible devrait lire ce livre et en tirer les conclusions inéluctables.

J.-P. SCHNEIDER