PROMESSES

Pierre Wheeler, pasteur en retraite, créateur d’expositions sur la Bible, auteur de livres et de brochures, ancien membre du Comité National de la Fédération Evangélique de France (F.E.F.), a été enseignant dans des instituts bibliques et a été l’animateur de la Commission théologique de la F.E.F. Il est marié, père de quatre enfants.

L’importance du sujet que nous allons traiter est évidente, car un article concernant l’identité de Jésus-Christ figure dans toutes les confessions de foi évangéliques. En général, on trouve des expressions comme : « Nous croyons à sa parfaite divinité ; à sa parfaite humanité » ou encore : « Homme et Dieu », ou « Homme-Dieu ». Cependant, ces expressions ne se trouvent pas dans la Bible. Comment donc les évangéliques en sont-ils arrivés à définir la personne de Christ en de tels termes ?

Evidemment, un tel article dans nos confessions de foi est nécessaire. Il faut insister sur l’identité de Jésus, car si Jésus-Christ n’était pas à la fois divin et humain, Dieu et Homme, nous ne pourrions être sauvés, pardonnés, et justifiés devant Dieu par la foi seule.

La connaissance de la doctrine exacte de Jésus-Christ (appelée « christologie »), n’est pas nécessaire au salut. Nous le savons, puisque notre Seigneur lui-même a promis le paradis au « bon larron » sur la croix, alors que cet homme ne savait presque rien de la personne de Christ. Corneille, le centenier, non plus ; il avait juste un début de relation personnelle avec Dieu et n’a appris que « Dieu était avec lui (Jésus) », que grâce au discours de Pierre (Act 10.34-43).1

Incompréhension des disciples avant la Pentecôte

Il est bon de rappeler que des incompréhensions existaient au sujet de la personne de J.-C. parmi les douze disciples. Philippe l’a reconnu comme le Messie promis dans l’Ancien Testament, mais ne semble pas avoir saisi l’essentiel, puisqu’il parle de « Jésus de Nazareth, fils de Joseph » (Jean 1.45). Dans la chambre haute, Philippe n’a pas compris davantage. Sa requête : « Seigneur, montre-nous le Père et cela nous suffit » (Jean 14.8,9), entraîne un reproche de la part du Seigneur, affligé de l’ignorance persistante de son disciple, malgré les trois ans qu’ils ont passé ensemble. Par contre, Nathanaël (Jean 1.49) a saisi bien plus rapidement, telle une révélation, que ce rabbi Jésus était « le Fils de Dieu ».

Pierre, à Césarée de Philippe (Mat 16.16), a aussi reçu la même révélation, mais plus tard que Nathanaël. En répondant à la question de Jésus : « Qui dites-vous que je suis ? », Pierre déclare que Jésus est le Fils de Dieu, fruit certain d’une longue réflexion de sa part.

Thomas, lui, ne comprenait pas non plus, semble-t-il. La pleine révélation lui est arrivée huit jours après la résurrection de Christ. On le constate par sa parole d’adoration : « Mon Seigneur et mon Dieu ».

Les écrits néo-testamentaires nous éclairent

De toute évidence, c’est Jean qui, parmi les apôtres, a le plus insisté sur la divinité de Jésus-Christ. Son Evangile en rend témoignage. Cependant, la rédaction de ce texte, venant à la fin de la vie de Jean, a nécessité une mûre réflexion de sa part. Le Père de l’Eglise, Clément d’Alexandrie, vers la fin du 2ème siècle après J.-C, parle de l’Evangile selon Jean comme spirituel pour compléter les synoptiques. Jean offre donc plus de détails sur la personne de Jésus-Christ que les autres évangélistes.

Au 2ème siècle, le problème de l’identité de Jésus était largement débattu. Des tentatives d’explication le concernant parcouraient déjà la Judée et les provinces voisines. Elles s’appuyaient sur des raisonnements humains. Les Ecritures apostoliques n’étaient pas alors copiées en nombre suffisant et distribuées. De ce fait, des idées erronées se répandaient.2 De fausses hypothèses de définition avaient devancé le texte de Jean.

Avant les écrits de Jean, les épîtres de Paul aux Philippiens et aux Colossiens circulaient. Mais étaient-elles parvenues jusqu’en Judée, en Samarie, en Syrie et en Egypte ? Certes, l’Ancien Testament, la version des Septante en grec, était très répandue dans les synagogues de la diaspora, mais encore fallait-il l’étudier pour comprendre que Paul cite, en Phil 2.10, le texte d’Es 45.23, qui précise que « tout genou fléchira devant moi (l’Eternel, Yahweh) ». Jésus était donc le Yahweh de l’Ancien Testament incarné.

A partir des détails ci-dessus, nous comprenons pourquoi de grands débats au sujet de Jésus-Christ et sa personne troublaient l’Eglise des premiers siècles. Le manque d’un canon néo-testamentaire dûment confirmé y contribuait et, hélas, des pseudépigraphes3 faisaient leur apparition, parfois avec un arrière-plan de philosophie grecque. Cette prolifération de discours sur la nature de Christ ne devrait pas nous surprendre outre mesure. En effet, déjà dans les Evangiles, nous découvrons que cette connaissance dépend essentiellement d’une révélation divine, et non de notre intelligence (Mat 16.17 ; Jean 3.1-3).

Tentatives de description de la personne de Jésus-Christ

La liste de toutes les hérésies qui se rapportent à notre Seigneur est longue. Il y a d’abord le docétisme et la croyance ébionite, et ensuite d’autres qui se multiplient ; les historiens mentionnent l’adoptianisme4, l’arianisme5, l’apollinarianisme6, le nestorianisme7, et plus tard, le monophysisme8, le monothélisme9, et d’autres encore

. Les hypothèses élaborées pour définir ce qui s’est passé lors de l’Incarnation et après se rangent généralement en deux catégories : celles des docétistes et celles des ébionites.

Les ébionites, d’origine juive, ne voyaient en Jésus de Nazareth que le fils de Marie et de Joseph, un homme élu de Dieu et déclaré par lui Fils de Dieu à son baptême. Les ébionites et leurs « descendants – adoptianistes et ariens – refusaient la déité de notre Seigneur à cause de leur croyance en la transcendance absolue d’un Dieu unique. Arius écrivait à ce sujet : « Un Dieu, le seul non-engendré, le seul éternel, le seul véritable, le seul immuable, le seul non-créé, etc. ». Aussi, pour Arius, Jésus, le Logos était un être créé par le Dieu unique, une création spéciale, par laquelle toutes choses avaient été créées10. L’arianisme s’est propagé rapidement et beaucoup d’évêques dans l’est de l’Empire et même plusieurs empereurs romains, dont Constance II, fils de Constantin le Grand, furent ariens. A un moment donné, presque la moitié de l’Empire romain occidental fut subjuguée par l’arianisme. Jérôme disait de cette époque : « Le monde entier gémissait et s’étonnait de se retrouver arien (officiellement, à cause d’une décision impériale) »11. C’est Athanase, l’évêque d’Alexandrie, qui lutta de toutes ses forces contre l’arianisme. Cinq fois exilé, il résista toujours, bien qu’il semblât qu’à un moment donné le monde qui s’élevait contre lui allait l’écraser. Grâce à Athanase, l’hérésie d’Arius a été finalement rejetée par la majorité des Eglises.

Le docétisme, du grec, dokein (apparaître comme), propage l’erreur que Jésus paraissait être un homme, mais qu’il ne l’était pas vraiment. L’apôtre Jean, dans ses épîtres, insiste sur la venue de Jésus dans la chair : il l’avait vu et entendu et même touché (voir 1 Jean 1.1-3 ; 4.2,3). Les commentaires sont généralement formels : Jean se lève contre une forme de docétisme qui commençait à influencer les Eglises.

Le docétisme a des origines dans la philosophie grecque, le platonisme et le néoplatonisme notamment, dont l’une des thèses principales est que la matière est mauvaise. Le corps, étant matière, ne pouvait donc pas être capable d’être en union avec le divin, Dieu. Aussi Dieu a-t-il, lors de l’Incarnation, pris l’apparence d’un homme. Il s’ensuivait alors qu’un être divin ne pouvait souffrir corporellement sur la croix. On comprend que les gnostiques qui annonçaient un salut par l’illumination et la connaissance, et non par le sacrifice expiatoire de l’Agneau de Dieu sur la croix, sont également docétistes dans leur approche de la personne de Jésus. L’apollinarianisme (l’âme de Jésus fut divine, son corps humain) le monophysisme ont tous été influencés par le docétisme qui maintenait qu’il n’y avait pas d’Incarnation véritable. D’ailleurs, la dichotomie souvent évoquée aujourd’hui entre le Jésus historique (au sujet duquel, selon certains théologiens, empreints de libéralisme théologique, on ne connaîtrait pratiquement rien, puisqu’ils n’acceptent pas les Evangiles comme récits historiques) et le Christ de la foi (qui serait le fruit des conjectures de l’Eglise primitive sur Jésus de Nazareth, divinisé par ses partisans, devenant ainsi le Christ) sent fortement le docétisme.

Les grands conciles

Les grandes figures du christianisme présentes aux premiers conciles dits ocuméniques (Nicée en 325, Constantinople en 381, Ephèse en 431 et Chalcédoine en 451), ont compris la nécessité de travailler le sujet dans le détail. Ils ont accompli un travail remarquable en produisant des Symboles selon la révélation biblique. Dans les Ecritures, nous ne trouvons pas de déclarations aussi claires, mais tout y est à l’état implicite. Tous les âpres débats et les longues joutes oratoires qui se sont déroulés lors de ces conciles démontrent indirectement l’importance de la question. Les évêques qui sont finalement arrivés à faire reconnaître la révélation juste de Jésus-Christ (selon les Ecritures), ont bien compris que notre Sauveur devait être à la fois vrai homme et vrai Dieu, faute de quoi il n’y avait plus de véritable Evangile à propager, ni de pardon, ni de justification par la foi. Les protestants évangéliques d’aujourd’hui, comme ceux d’hier, doivent énormément aux théologiens conciliaires.

Le concile de Chalcédoine (451) a probablement fait connaître au monde la meilleure définition de la personne de notre Seigneur. En voilà un extrait :

« Nous déclarons d’une voix unanime que l’on doit confesser un seul et même Jésus-Christ notre Seigneur ; le même parfait dans la divinité et parfait dans l’humanité, vraiment Dieu et vraiment homme ; le même composé d’une âme raisonnable et d’un corps, consubstantiel au Père selon la divinité et consubstantiel à nous selon l’humanité, en tout semblable à nous, hormis le péché ; engendré du Père avant les siècles selon la divinité ; dans les derniers temps né de la vierge Marie, selon l’humanité, pour nous et pour notre salut ; un seul et même Jésus-Christ, Fils unique, Seigneur, en deux natures,. »

Le concile a déclaré qu’en Jésus-Christ ces deux natures, divine et humaine, existent.

« sans confusion, sans changement, sans division, sans séparation (entre elles), sans que l’union ôte les différences des natures. Au contraire, la propriété de chacune est conservée et concourt en une seule personne et une seule hypostase (personne distincte), en sorte qu’il n’est pas divisé en deux personnes, mais que c’est un seul et même Fils unique, Dieu le Verbe, notre Seigneur Jésus-Christ »12.

Serait-ce possible de rendre une explication plus claire ? Sans doute, car l’amélioration est toujours possible. D’autant plus que l’insistance dans le deuxième extrait ci-dessus vise plus particulièrement l’apollinarianisme qui maintenait que l’âme de Jésus était divine et son corps humain. Cela serait diviser le Christ. Le Nouveau Testament ne mentionne même pas cet aspect des choses. Pourtant, les textes apostoliques suffisent largement pour nous montrer que les natures de Christ, divine et humaine, sont « sans confusion, etc. ». Quand des définitions erronées existent, il est alors nécessaire d’expliciter.

Conclusion

Athanase, déjà mentionné plus haut, est considéré comme responsable de ce que les Eglises appellent : Le symbole (déclaration de foi) de St Athanase. Il est très peu probable qu’Athanase soit l’auteur de cette confession de foi, mais elle est toujours désignée par ce nom. Il est aussi appelé en latin : le Symbolum Quicunque puisqu’il commence par les mots : « Quiconque veut être sauvé. ». Cette entrée en matière dévoile à la fois l’intention du texte et l’importance de la foi en Christ pour tout individu qui aspire au salut13. Le symbole termine de la même manière.

La question se pose : est-ce vrai ? Faut-il croire à tout ce que dit cette excellente confession de foi pour être sauvé, dans le sens biblique du terme ? Ou, plus simplement, se contenter de la réponse de Paul à la question du geôlier à Philippes : « Crois au Seigneur Jésus et tu seras sauvé »14? Nous avons déjà précisé plus haut que la connaissance d’une christologie exacte n’est pas obligatoire pour être sauvé et en avons donné deux exemples bibliques. En même temps, il fallait que la christologie définie par les Pères de l’Eglise soit vraie et juste, car notre salut dépend d’un tel Sauveur, Homme-Dieu. Pourquoi une christologie exacte serait-elle donc conjointe à notre accession au salut ?
Pour deux raisons, évidentes a posteriori :
Si Jésus-Christ n’avait pas été véritablement humain, il n’aurait pas pu légitimement prendre la place d’autres humains sur la croix. Il fallait qu’un homo sapiens remplace d’autres homo sapiens. Le sang des bêtes sacrifiées (preuve de leur mort) sous l’ancienne Alliance ne faisait que couvrir le péché. Le péché n’était pas ôté. Mais Jésus, l’Agneau de Dieu, ôte le péché. Celui qui accepte cette ouvre est sauvé car Jésus a ôté son péché pour toujours.
Si Jésus-Christ n’était pas véritablement de nature divine (Dieu), son sacrifice n’aurait eu de valeur légale que pour une autre personne (« vie pour vie »). Mais étant Dieu, et donc infini, son sacrifice avait une valeur infinie. Aussi, sa mort à la place de millions d’humains est efficace pour ôter le péché de millions d’hommes.

« A celui qui nous aime, qui nous a délivrés de nos péchés par son sang, et qui a fait de nous un royaume de sacrificateurs pour Dieu son Père, à lui la gloire et le pouvoir aux siècles des siècles. Amen. » (Apoc 1. 5, 6)

L’extrait suivant de L’Homélie IX sur Jérémie d’Origène (La Vie n° 3146, du 15 déc. 2005), sur l’engendrement éternel du Fils trouve ici sa place :

« Voyons ce qu’est notre Sauveur : rayonnement de gloire ; le rayonnement de gloire n’a pas été engendré une fois pour toutes de manière à n’être plus engendré, mais aussi longtemps que la lumière est génératrice de rayonnement, aussi longtemps est engendré le rayonnement de la gloire de Dieu. [.] le Sauveur est sans cesse engendré par le Père » (le Fils doit obligatoirement être aussi éternel que le Père).

Chez Maître Eckhart (mort en 1327), dominicain, appelé le père du mysticisme, nous trouvons dans ses Sermons (n° 101) la phrase :.

« Dieu le Père a engendré (son Fils) dans l’éternité et ne cesse de l’engendrer. » (La Vie, n° 3144, p. 49. 1er déc. 2005)

Nous pensons en effet que le Fils a été éternellement engendré du Père, et qu’il l’est encore15.

1 Pierre a sans doute expliqué à Corneille plus que Luc n’a rapporté. Mais Pierre n’aurait pas pu entrer dans tous les détails de la christologie
2 Il se peut que ce soit à cause de cette monnaie courante de fausses définitions que l’Evangile selon Jean n’ait pas tout de suite été reconnu comme inspiré, et accepté dans toutes les Eglises.
3 Le nombre de textes pseudépigraphes (littéralement, faux écrits ) ayant trait à Jésus-Christ et aux apôtres est très considérable (plusieurs centaines). Ils racontent n’importe quoi au sujet de Christ, et ont donc été rejetés, généralement parce qu’ils ne provenaient pas d’une source sûre, et ensuite, à cause des invraisemblances qu’ils racontaient. Il est à noter que des livres comme L’homme qui devint Dieu (de Gérald Messadié) et le Da Vinci Code (de Dan Brown), ainsi que les films où l’on met en exergue Marie-Madeleine, sont régulièrement basés sur des pseudépigraphes.
4 Doctrine développée au VIIIe siècle par les Espagnols Elipand et Félix d’Urgel : Dieu aurait, selon elle, « adopté » Jésus comme son Fils à la naissance de ce dernier.
5 Doctrine développée aux IVe et Ve siècles par le prêtre alexandrin Arius : elle nie que Jésus soit de la même nature (ou de la même « substance ») que Dieu le Père. Elle nie en particulier la préexistence éternelle de Christ.
6 Doctrine de l’évêque Apollinaire (IVe siècle) qui niait qu’il y ait eu quoi que ce soit d’humain dans l’âme de Christ.
7 Doctrine de Nestorius, patriarche de Constantinople (Ve siècle), qui affirmait que la nature divine et la nature humaine de Christ étaient juxtaposées, sans connaître une véritable union.
8 Doctrine professée en particulier par l’hérésiarque byzantin Eutychès (Ve siècle) qui, au contraire des nestoriens, prétendait que le Christ incarné n’avait qu’une seule nature, la divine.
9 Doctrine propagée par l’Empereur Héraclius (VIIe siècle) selon laquelle Jésus-Christ avait bien deux natures, mais une seule volonté.
10 De nos jours, les Témoins de Jéhovah sont ariens.
11 Cité dans History of the Christian Church, A.R. Whitham, Rivingtons, 1957
12 Ces extraits proviennent de l’Histoire universelle de l’Eglise catholique, vol 4., p. 534-535, Rohrbacher, Librairie J.-M. Soubiron, Montréjeau, 1903.
13 La version en anglais de ce symbole figure dans le Prayer Book (livre du rituel de l’Eglise anglicane) et commence et termine par les mots : « … à moins de croire à ce symbole, on ne peut être sauvé ».
14 Nous acceptons pleinement la parole de Paul pour être sauvés. La foi en Jésus-Christ, en sa mort et en sa résurrection, est amplement suffisante.
15 L’illustration du soleil peut nous aider. Sa lumière en émane constamment. Si aucune lumière n’en émanait, le soleil ne serait pas le soleil. Si le Fils n’émanait pas de Dieu le Père, Dieu ne serait plus Dieu. Cette illustration du soleil, de sa lumière, et de sa chaleur peut nous aider à comprendre la Trinité.

Écrit par


Introduction

Suite au premier article de ce numéro intitulé « L’ocuménisme dans la Bible, le bon et le mauvais », ainsi que le deuxième « Ocuménisme d’hier et d’aujourd’hui », nous voulons, dans cette troisième partie, comprendre ce qui se passe dans le domaine ocuménique en cette fin de siècle.

D’abord, nous jetterons un coup d’oil sur les efforts ocuméniques que déploie actuellement l’Eglise romaine, et ensuite nous donnerons un aperçu de quelques projets du Conseil Ocuménique des Eglises (COE) pour les prochaines années. En conclusion, nous essayerons de relever quelques attitudes, décisions et/ou positions, souvent ambiguës, que les églises professantes pourraient facilement adopter ou accepter – presque sans s’en rendre compte -et qui risquent d’obscurcir la pureté du message de l’Evangile et la doctrine biblique de la séparation.

a. Efforts ocuméniques actuels de l’Eglise Romaine

Après Vatican II…

Le concile de Vatican II (1962 -1965) a certes fait naître beaucoup d’espoir chez tous ceux qui croyaient à l’ocuménisme. Cependant, après le pape Jean XXIII, son successeur Paul VI a été dans l’ensemble plus réticent pour laisser entrer par les fenêtres ouvertes du Vatican l’air frais tant désiré par Jean XXIII. Aussi, tout le monde s’attendait-il à l’avènement de quelques merveilles dans le domaine ocuménique dès l’arrivée de Jean-Paul II, en 1978. Venant d’un pays communiste et grand voyageur devant l’Eternel, ce pape pèlerin promettait beaucoup de par ses contacts médiatiques et ocuméniques. Hélas, les ocuménisants de tous bords furent rapidement déçus, et l’on a commencé à parler d’un « hiver ocuménique papal ».

Décrets conciliaires observés

Cependant, les décrets de Vatican II – surtout ceux d' »Unitatis Redintegratio » (1) concernant l’ocuménisme – n’ont pas été mis en quarantaine. Aussi, après avoir bien précisé dans le « nouveau » Catéchisme (2) que rien des dogmes romains n’a été abrogé, Rome a fait publier le « Directoire ocuménique » (3) en 1994. Dans cet ouvrage, des précisions sont offertes aux évêques catholiques et aux comités locaux qui les secondent, dans le but clairement affiché de faire avancer l’ocuménisme entre catholiques, orthodoxes et protestants. Le Conseil pontifical pour la Promotion de l’Unité des Chrétiens, dont le président actuel est le cardinal Cassidy, doit être régulièrement informé de tout ce qui se fait sur le terrain dans les diocèses du monde entier.

Lettre apostolique et encyclique: « Qu’ils soient un »

Suite au « Directoire ocuménique », Jean-Paul II rédigea sa lettre apostolique, « Tertio millennio adviente », sur le Jubilé de l’An 2000, ainsi que son encyclique sur l’ocuménisme: « Qu’ils soient un ». D’après ces ouvrages, la plus grande préoccupation du pape actuel serait de créer l’unité visible de la chrétienté pour l’an 2000. Dans sa lettre apostolique, le programme est bien défini. Après les années de préparation de 1997, 98 et 99, pendant lesquelles Jésus-Christ, l’Esprit Saint et le Père seront respectivement honorés, en l’An 2000, de grandes manifestations pan-chrétiennes avec Musulmans et Juifs sont prévues à Jérusalem et au mont Sinaï. Puis à Rome, un grand congrès eucharistique terminera le Jubilé.

Primauté du pape mise en question?

Pour la réalisation d’un tel programme, Jean-Paul II semble être prêt à déplacer les montagnes (sauf les 7 collines de la ville éternelle!). Les péchés du passé sont regrettés – sans toutefois être nommés, (inclut-il donc l’Inquisition et les persécutions des protestants promulguées par Rome?) – et même la primauté du pape peut actuellement devenir, éventuellement, « un objet d’études », dans l’ensemble du mouvement ocuménique. Peut-être pour mieux la comprendre? Disons que depuis cette ouverture, les propositions sont nombreuses. Un théologien luthérien verrait le pape comme « patriarche d’Occident » (déjà l’un de ses titres), ce qui dévoile jusqu’où certains protestants seraient prêts à accepter le pape comme chef des églises occidentales (4).

Malgré cette humble proposition du pape, il semble que son infaillibilité « ex cathedra » ne soit pas remise en question. Le pape entrouvre même la porte à une déclaration « ex cathedra » à la fin de ce siècle. Cela serait rendre témoignage à la vérité, et servirait l’unité (5)
Mais comment le COE voit-il toute cette préparation?

b. Sur l’agenda du COE: ocuménisme à la catholique ?

La plupart des églises non catholiques n’ont pas réagi de façon particulièrement chaleureuse vis-à-vis de l’encyclique de Jean-Paul II, « Qu’ils soient un ». Konrad Raiser, le secrétaire général actuel du COE. aurait dit personnellement au pape, lors d’une de ses visites à Rome, que c’était un « ocuménisme à la catholique ». Malgré « l’ouverture » du pape concernant sa primauté, il ne semble pas que les églises non catholiques vont « mordre » à cet appât sans beaucoup réfléchir auparavant.

Unité visible recherchée à Graz en 1997

Par ailleurs, le COE s’intéresse davantage au « concret » qui sera vécu à Graz du 23 au 29 juin 1997, organisé par « toutes les Eglises chrétiennes » de « tous les pays d’Europe » (6);et dont le thème est « la réconciliation, don de Dieu, source de vie éternelle ». Après le même genre de rassemblement à Bâle, il y a 7 ans, sur « la paix, la justice et sauvegarde de la création » le problème de la réconciliation, surtout en Europe – l’ex-Yougoslavie s’impose! – est plus « spirituel ». Nous apprenons qu’anglicans, baptistes, luthériens, méthodistes, orthodoxes, réformés, vieux catholiques et pentecôtistes font partie de la « conférence des Eglises européennes » (la K.E.K.) qui organise « Graz » avec le C.C.E.E. (Conseil (Catholique) des Conférences Episcopales Européennes).

Parmi les thèmes principaux du Rassemblement, la recherche d’une « unité visible » entre les Eglises, et le dialogue avec les religions et les cultures, sont parmi les premiers objectifs cités. Ce Rassemblement pense-t-il devancer le pape en créant avant lui l’unité visible des Eglises? Ou Graz est-il juste une étape de plus dans la préparation de l’unité visible dont le pape cueillera le fruit mûr en l’an 2000?

Proposition d’un Concile universel en l’an 2000

Par ailleurs, Monsieur Raiser propose la mise en place d’un Concile chrétien universel pour l’an 2000 afin de surmonter les problèmes qui divisent les Eglises. Au fond, le but d’un tel concile est toujours l’application du document du Pérou, le fameux B.E.M. (7) (Baptême, Eucharistie, Ministère). Un tel Concile, estime K. Raiser, donnerait l’occasion de parler de la question de la primauté du pape.

Multiplicité de rencontres inter églises

En attendant les grandes dates ocuméniques telle que Graz, ainsi que la réalisation de grands projets, comme ce désir de Concile en l’an 2000, les rencontres inter-églises se multiplient partout dans le monde. Chaque fois que les catholiques peuvent être présents, ils le sont. Ils accomplissent ainsi les projets du Vatican II et les directives proposées dans la Direction Ocuménique, dont nous avons parlé plus haut. La « politique » organisant ces rencontres n’oublie pas non plus les autres religions, ni, d’ailleurs, les problèmes éthiques.

Quant à ce dernier sujet, certains chrétiens pensent qu’il offre un bon terrain d’entente pour faciliter la création de l’unité visible, mais sachons que M. Konrad Raiser craint que le « problème » de l’homosexualité dans les églises – faut-il, oui ou non, pleinement accepter homosexuels et lesbiennes comme membres des églises? – ne divise davantage la chrétienté! Or, le fait même de soulever une telle question, comme si les églises avaient le droit d’accepter ou de rejeter un péché semblable, selon leur propre goût, nous fait comprendre que même le COE a des tendances amorales (8).

Besoin de tolérance dans le monde

En terminant cette section de notre article, nous ajoutons encore ce mot. Dans notre monde, le besoin de tolérance se fait cruellement sentir. Le genre humain est abreuvé de violence. Les médias, visuels et écrits, s’en chargent si bien, et… si mal! Aussi, le désir de plus de tolérance devient-il, dans le cour de tous, comme une nécessité impérieuse.

Or, en général, le mouvement ocuménique s’attaque aux divisions d’ordre religieux, ethnique et même culturel – afin d’essayer de les supprimer. Le monde entier donc applaudit, et les églises évangéliques ne restent pas sans réagir favorablement aux efforts déployés pour créer enfin la compréhension et la paix entre tous.
Dans ce sens-là, nous aussi, nous souhaitons la réussite des pourparlers organisés dans ces buts: ne désirons-nous pas la paix encore plus que les autres? Ce qui contribue à faire régner la justice et la paix, aussi bien que la liberté, l’égalité et la fraternité sur notre planète Terre, ne saurait être vu de mauvais oil par un chrétien évangélique.

Quelle est la manière de faire de Dieu?

Mais – et voilà ce que nous devons surtout comprendre – ce n’est pas ainsi que viendra le Royaume de Dieu sur la terre. Ce n’est pas la mission que le Seigneur ressuscité a confiée à ses apôtres sur le mont des Oliviers (voir la fin de Mat 28 et de Luc 24). Si nos yeux ne sont pas éclairés par la parole de Dieu, nous pourrons facilement tout confondre et perdre de vue irrémédiablement le véritable objectif du peuple de Dieu sur la terre depuis l’Ascension de Jésus-Christ: prêcher en Son nom à toutes les nations la repentance en vue du pardon des péchés (Luc 24.47).

Dans la dernière section de cet article nous dévoilerons quelques pièges dans lesquels les chrétiens des églises professantes pourraient facilement tomber, tout en conservant le sincère désir d’honorer Dieu.

c. Pour que les évangéliques ne soient pas pris au piège

Slogans « spirituels » tentants

« Aujourd’hui on ne peut plus vivre en vase clos ». Comme l’on se sent aujourd’hui dépendant des autres! L’autonomie dans le sens strict du terme n’est guère possible. Aussi, le COE en appelle-t-il au monde évangélique pour qu’il fasse route avec les autres églises, et insiste sur l’importance de la présence évangélique en son sein. Ce discours est-il vraiment sans arrière-pensées? Quoi qu’il en soit, certains évangéliques se laissent emballer – que cela soit pour le COE, ou pour Graz, ou même pour une exposition sur la Bible dans une localité, car le cri retentissant, « l’union fait la force » et, « plus on est nombreux, plus on est fort », l’emporte. On oublie si vite les promesses de Dieu dans des textes bibliques, tels que 1 Sam 14.6, 2 Chron 14.10 et Zach 4.6, où Dieu se montre le Dieu des faibles, des minorités et du petit nombre. Heureusement que, par exemple, comprenant l’appel de Dieu, quelques évangéliques ont vu clair pour la mission « Ascension 96 » à Lyon, avec la « Tente de l’Unité », et n’ont pas collaboré pour un effort en commun, même si le but avoué était d' »annoncer ensemble Jésus-Christ »,

Evangéliser la terre entière avant l’an 2000

Evangéliser tous ensemble paraît aujourd’hui un sine qua non, puisque d’ici l’an 2000, l’Eglise de Jésus-Christ devrait saturer la terre du message de l’Evangile. Toutefois, cet objectif peut facilement évoluer en un activisme fébrile. On est prêt parfois à s’associer à presque n’importe quoi, et avec n’importe qui, afin d' »évangéliser » le monde entier. Une multiplicité d’organisations se sont créées ces derniers temps pour accomplir la tâche – dont des mouvements comme « AD 2000 », « DAWN » et l’organisation sour française « AUBE », « Evangélisation 2000 », présidée par le prêtre Tom Forrest, etc.

Si, comme fruit des efforts évangéliques, nous nous réjouissons déjà de penser que des millions de personnes par tout le monde auront entendu au moins une fois parler de Jésus-Christ, nous craignons cependant que dans le tohu-bohu d’activisme ainsi engendré, les évangéliques ne sachent se démarquer du monde religieux. Deux voix se feront donc entendre en même temps, vite rangées par le grand public sous le même chapiteau. L’une annoncera l’Evangile, tel qu’il est présenté dans les Ecritures, et l’autre parlera d’activités religieuses ou de sacrements qui seront un autre évangile, qui n’est pas l’Evangile. Ce problème de deux « évangiles » existait au temps où l’apôtre Paul évangélisait les Galates (voir Gal 1.6-10). La même situation demeure 1950 ans plus tard. Plus que jamais!

Qu’est-ce que l’Evangile

L’article « Evangelism », dans le Dictionnaire du Mouvement Ocuménique (Dictionary of the Ecumenical Movement, 1991, WCC Publications, Geneva), quoique intéressant et informatif, n’arrive pas à clairement définir ce qu’est évangéliser, ni ce qu’est l’Evangile. Dans l’ensemble, pour le COE, évangéliser c’est informer de Jésus-Christ qui réconcilie le monde à Dieu. L’appel à se repentir, à croire et à accepter le message de Dieu, répondant individuellement à l’ordre du Seigneur pour recevoir le pardon de ses péchés, est singulièrement absent. Avant donc de partir ensemble « évangéliser » il serait sage d’apprendre d’abord ce qu’est l’Evangile pour les camarades de route. Quelques surprises pourraient nous être réservées.

Les marches pour Jésus

Innovée à Londres dans le quartier malfamé de Soho en 1986 par Roger Forster afin d’annoncer l’Evangile de façon plutôt originale aux habitants malheureux de ses rues, la première « Marche pour Jésus » (officielle) était une grande réussite. L’Eglise était allée vers les perdus.

L’idée a pris racine et, quelques années plus tard, des millions de gens auraient « marché pour Jésus » le samedi 25 mai 1996 dans 170 pays et dans plus de 2000 villes. Dans la seule ville de Sao Paulo, on estime que 2 millions de chrétiens ont défilé.

Que Dieu nous garde de critiquer un tel élan, mais si, selon notre source d’information (9), cet événement mondial est « principalement soutenu par les Eglises et organisations évangéliques », que faire quand « de nombreux fidèles d’autres Eglises y participent aussi »? Le prophète Amos, 7 siècles avant Jésus-Christ, rappelait à ses contemporains que deux personnes ne peuvent marcher ensemble sans en être convenu, ou sans être d’accord. Amos donc nous appelle à la vigilance. Personnellement, avant de me mettre en route avec quelqu’un pour rendre témoignage au Seigneur Jésus, je veux savoir avec qui je rends témoignage ainsi que la nature du témoignage que nous devons rendre ensemble.

Il y a quelque temps, à Zurich, les catholiques qui participaient à une marche portaient un crucifix. Or les statues n’ont aucune place dans une manifestation chrétienne et Dieu lui-même les interdit totalement dans le deuxième des dix commandements. Un chrétien voulant obéir au Seigneur a-t-il le droit de s’associer à une telle effigie? D’autant plus qu’il s’agit d’une représentation de Dieu même, objet de culte!

Et que fera-t-on quand certaines « marches » deviendront des pèlerinages? Marches et pèlerinages peuvent rapidement devenir cousins germains. Il y a quelques années, des évangéliques allaient organiser une marche en Grande Bretagne du nord au sud et de l’est à l’ouest, pour « marquer le Royaume Uni d’une très grande croix ». Jeunesse en Mission parle de reprendre la route des Croisés d’il y a quelque 900 ans, en passant par Istanbul, avec l’objectif de demander pardon des erreurs commises autrefois lors des Croisades du Moyen Age… Certes les Croisés ont commis des exactions, mais sur quelle base biblique est organisée une telle « longue marche »? Les évangéliques d’aujourd’hui sont-ils responsables des péchés de la chrétienté d’autrefois?

Semaines de prière: laquelle est « la bonne »?

Les mêmes réserves s’appliquent à la prière. « Prier ensemble » ou « être ensemble pour prier » est un genre de jeu de mots, (employé par Rome en 1986 pour justifier l’appel du pape à une réunion de prière syncrétiste à Assise) qu’un évangélique trouve inacceptable. Si un chrétien ne prie pas Dieu au nom de Jésus, sa prière ne peut être exaucée. Et si quelqu’un ne prie pas seulement au nom de Jésus – mais affuble sa prière de Marie ou de quelque « saint » – sa prière ne peut être pure. Certains catholiques prient seulement Jésus en votre présence; puis, ailleurs, s’adressent aux saints.

C’est ainsi que des églises de professants ne sauraient se joindre aux catholiques lors de la Semaine de prière de l’Unité des Chrétiens, la 3e semaine de janvier.

« Evangéliques et catholiques ensemble »

Tel est le titre d’une déclaration faite en 1994 et qui a été signée par plusieurs évangéliques notables et par quelques « pères » catholiques. Malgré le contexte américain, qui a beaucoup influencé, le document choque. Les catholiques sont considérés par les signataires évangéliques comme chrétiens nés de nouveau, et l’Eglise romaine donc comme l’une des nombreuses dénominations chrétiennes.

Déjà l’attitude de Billy Graham va dans ce sens. Depuis un certain nombre d’années, bien des catholiques sont parmi les « conseillers » des rallyes de Billy Graham, et sont censés expliquer l’Evangile à ceux qui répondent à l’appel donné en fin de réunion. Ce qui inquiète plus d’un évangélique…

Dans un sens, le document « Evangéliques et catholiques ensemble » ferme la porte à l’évangélisation des catholiques. Bien sûr, l’appel à la « conversion » des catholiques a été lancé dans les écrits de Jean-Paul II et d’autres catholiques. Seulement, leur « conversion » n’est pas celle de la Bible, car la leur est inséparable de l’Eglise (romaine). Or l’exemple du « bon larron » sur la croix qui reçoit la promesse du paradis sans l’Eglise, montre une fois pour toutes que le Seigneur seul sauve, et que l’Eglise ne véhicule jamais le salut, comme le déclare malheureusement l’Eglise catholique.

Pour une excellente compréhension de cette déclaration, « Evangéliques et catholiques ensemble », et pour saisir les dangers contenus dans le document, nous recommandons vivement l’évaluation de Bernard Dodler (écrire à CRIE, BP 1422, F-68071 Mulhouse).

Conclusion

Il devient évident que les évangéliques d’aujourd’hui « non-conformistes » par rapport à la pensée du monde religieux et profane, risquent fort d’être traités de sectaires, de bigots, d' »antis », etc.. Mais les Evangiles ne nous avertissent-ils pas de ce genre de réaction?

Cependant, ce que nous ne devons pas oublier, c’est la porte actuellement grande-ouverte – grâce au mouvement ocuménique (!) – pour rendre témoignage au monde religieux, tout en dénonçant ce qui est contre la Parole de Dieu.

Nous croyons qu’une prise de position fermement maintenue, et expliquée de manière compréhensible par des paroles accompagnées de grâce, assaisonnées de sel, comptera pour beaucoup auprès des frères évangéliques à moitié séduits. En même temps, nos bonnes paroles pourront aussi aider les personnes religieuses enivrées du vin ocuménique à voir clair et à saisir l’enseignement de la Parole de Dieu.

C’est aussi la mission que Dieu nous confie aujourd’hui.

P. W

1 Vatican II. Les 16 documents conciliaires. L’ocuménisme, Chapitre 1 p. 499. 1967. Fides.
2 Catéchisme de l’Eglise catholique. 1992. MAME/PLON.
3 Directoire Ocuménique. 1994. Cerf.
4 BSS N° 950 du 26 juin 1996. p. 3/4.
5 Jean-Paul II. Qu’ils soient un. Paragraphe 94. 1995. Bayard Editions/Centurion.
6 BSS ND 951 du 3 juillet 1996. La lettre de Graz, p. 5-8
7 Ce document, publié en 1982 par les Presses de Taizé et le Centurion, est le résultat de 50 années de travaux de la Commission Foi et Constitution du COE. Son but est de faire reconnaître au sein de la chrétienté un même baptême, une même eucharistie et un même ministère dans toutes les églises. Ainsi un nourrisson, baptisé chez les Réformés, par un ministre anglican, devrait pouvoir plus tard prendre sans problème l’hostie catholique.
8 BSS ND 929, du 13 décembre 1995. p. 4
9 BSS ND 948 12 juin 1996 p. 3

Écrit par


Un grand abîme

Entre les églises multitudinistes et les églises confessantes existe un grand abîme. Au moins, officiellement.

A première vue, toutes se réclament de la Parole de Dieu. En réalité, leurs fondements sont souvent fort éloignés. Tandis que les églises confessantes s’efforcent, dans l’ensemble, de vivre en conformité avec les enseignements de l’Ecriture, les églises multitudinistes, quant à elles, s’appuient davantage sur leur tradition, sur leur histoire propre, ou sur les présupposés de la société contemporaine, que sur la Révélation biblique.

Concernant la question que nous avons à examiner -le ministère féminin dans l’Eglise, ses libertés et ses limites, -nous avons à constater qu’en principe les grandes églises multitudinistes n’ont pas le désir de respecter l’enseignement de la Bible à ce sujet. Certes, Jean-Paul II, qui dit «non» aux femmes prêtres, fait quelques références à l’Ecriture, mais l’autorité déterminante reste pour lui celle de la Tradition de l’Eglise romaine et du Magistère.

Heureusement, au moins jusqu’à un passé récent, les Eglises des confessants ont accepté comme critère de leur vie et de leur action: Que dit l’Ecriture? Parfois nous nous demandons si chez certaines ce souci prime toujours, en particulier concernant le sujet que nous traitons dans ce numéro de Promesses.

Attention: terrain piégé

Néanmoins, deux pièges existent dans lesquels les églises confessantes risquent de tomber.

Le premier est l’ ambiance féministe dans laquelle nos églises évangéliques vivent et évoluent. Etant les enfants de notre siècle, qu’on le veuille ou non, nous risquons d’en subir les influences.

Non pas que tout soit mauvais dans cette mouvance pour la promotion des femmes ! Toutes les retombées ne sont pas forcément négatives. Ne sommes-nous pas prêts à applaudir la lutte contre la pornographie? La femme ne doit jamais être un jouet sexuel. Et sans discussion, les femmes devraient gagner un salaire égal à celui des hommes si elles accomplissent le même travail qu’eux.

Cependant, quand le mouvement féministe veut créer une sorte d’unisexe qui entraîne certains de ses adhérents, prétendument chrétiens, à ne plus reconnaître Dieu comme Père, nous crions halte. Là, on exagère.

Ainsi, nous rejetons catégoriquement l’accusation féministe qui veut que notre Seigneur, et Paul et les autres apôtres, aient subi l’influence de leur temps dans leur attitude au sujet de la condition féminine. C’est mal connaître la société d’il y a 2000 ans, car le Nouveau Testament est plutôt révolutionnaire par rapport aux femmes. Nous demandons à ces détracteurs un peu d’honnêteté. Ne peuvent-ils pas imaginer que ce sont plutôt eux qui sont influencés par leur époque? Il est facile d’accuser les autres de ce qu’on manifeste soi-même. Attention à cette forme de transfert.

Expérience et doctrine

Le deuxième piège concerne l’ expérience et la doctrine, appelées dans «Semailles et Moisson» (no 8, act. 1994) «deux sours ennemies?», avec un point d’interrogation. Nous ne savons pas si la journée de réflexion à ce sujet a pu abolir l’inimitié supposée entre l’expérience et la doctrine, mais le grand principe est sûrement de ne pas laisser l’expérience l’emporter sur le clair enseignement de la Parole de Dieu. La première est subjective. Si nos émotions dominent, elle peut nous amener très loin de ce que Dieu a déclaré.

En effet, pour le sujet traité, nous avons constaté ceci: le fait que nos sours missionnaires aient dû accomplir ce dont des hommes auraient pu se charger -s’ils n’avaient gardé leurs pieds dans leurs pantoufles tout près du foyer -prime à tel point que cet exemple de dévouement dans le domaine de l’expérience amène certains promoteurs du ministère pastoral féminin à voir la doctrine biblique tout à fait autrement (1). Certes, nous admirons nos sours missionnaires et louons Dieu pour leur engagement, mais si Dieu s’est servi d’une Débora ou d’une Jaël quand les hommes manquaient à l’appel, il a néanmoins pu conférer la charge de «juge» à des hommes plus souvent qu’à des femmes. Il ne faut pas faire une règle à partir des exceptions.

Dieu est souverain

De tels exemples d’expérience nous apprennent justement que Dieu reste souverain. Sa volonté s’accomplira et son oeuvre se fera de toute façon. Si son peuple a besoin d’être délivré d’un Jabin quelconque et que Dieu ne trouve pas d’homme suffisamment courageux pour le faire, Il suscitera très facilement une Débora et ensuite une Jaël. Si les apôtres ont le cour trop lent à croire à la résurrection du Fils de Dieu et que de saintes femmes y croient plus facilement, elles deviennent aussitôt les messagères du Seigneur ressuscité. Si, pour aller sur le champ missionnaire, les hommes sont paresseux, le Dieu souverain se sert bien volontiers de nos sours -à la honte des frères -pour sauver les âmes qu’Il a prédestinées à la vie éternelle.

Dieu est souverain: sa volonté s’accomplira toujours. Alléluia.

P.W.
Notes:
1 Dans le récent débat en milieu évangélique au sujet du ministère de la parole et des «droits» des soeurs le concernant, on relève régulièrement l’anomalie que constituent des femmes missionnaires qui, à l’étranger, sont souvent obligées de «tout faire», mais qui, dès leur retour en Europe, sont implicitement tenues au silence. Nous comprenons que d’aucuns en soient troublés, voulant éviter «deux poids et deux mesures», pourtant, c’est mal s’y prendre pour rétablir l’autorité, la souveraineté et la volonté de notre Dieu.

Écrit par


Introduction

Ce qui se passe à Jérusalem en Actes chapitre 2 -jourde la naissance officielle de l’Eglise de Jésus-Christ -est révolutionnaire!

Cette révolution spirituelle débute dans une pièce à l’étage (et non dans le Temple) et ensuite dans une rue adjacente (et non dans le parvis du Temple ou sur les degrés par lesquels on y montait). La langue hébraïque -véhicule d’expression de la révélation de l’Eternel à Israël, et son dérivé, l’araméen, dont le Seigneur Jésus se servait pour enseigner -sont abandonnés pour céder le pas à des langues «païennes». Si ceux qui écoutent et comprennent ces langues sont des Juifs, ils sont issus principalement de la Diaspora méprisée. Autre signe de révolution: ceux qui prêchent n’ont pas reçu de formation théologique aux écoles rabbiniques; c’étaient des Galiléens «sans instruction».

Leur message était aussi révolutionnaire. A part le sujet «impossible» d’un Jésus ressuscité, Pierre rappelle aux auditeurs, en citant le prophète Joël, que désormais «fils et filles» allaient prophétiser à ce sujet, de même que les hommes et femmes esclaves. Quelle ahurissante nouvelle!

Le prophétisme sous l’ancienne alliance

Pour en saisir l’ampleur , nous devons nous souvenir du mouvement prophétique sous l’ancienne alliance. Après les prophètes patriarcaux «silencieux» (Gen 20.7, Ps 105.15) et les prophètes «orateurs» ( comme Elie, Elisée et d’autres) viennent les prophètes «écrivains», dont seul Amos, exceptionnellement, semble-t-il, n’ a pas été formé théologiquement.

Et voilà que, désormais, déclare Pierre, filles et garçons vont prophétiser avec des esclaves, hommes et femmes. Pour ce qui concerne les femmes, deux ou trois cas précédents révèlent que notre Dieu n’a jamais été trop lié par les usages habituels, car Myriam (Ex 15.20), Hulda (2 Chron 34.22) et Anne (Luc 2.36) sont toutes trois appelées prophétesses. Cependant, tout de même, quelle explosion!

Et la libération spirituelle de la femme de se trouver déclarée et inaugurée par cette parole de Pierre.

Et dans le Nouveau Testament?

Disons, en passant, que ce nouvel aspect s’est déjà fait sentir dans le ministère de Jésus-Christ – surtout au moment de sa résurrection. Ce sont les saintes femmes qui ont d’abord annoncé la nouvelle aux apôtres qui doutaient. Dès cette mission spéciale, on devine aussitôt qu’un grand avenir est réservé au ministère féminin sous la nouvelle alliance.

Mais qui sont ces filles qui allaient prophétiser? Et quelle était la nature de leur parole prophétique?

Pour bien comprendre, rappelons-nous toujours les types différents de prophètes existant dans l’Ancien Testament (voir ci-dessus), car il existe aussi des classes différentes dans le Nouveau Testament. L’Ancien Testament est si souvent la clé du Nouveau et vice versa.

Le sens du terme «prophète» dans le Nouveau, comme dans l’Ancien Testament, est «porte-parole» du Seigneur. Le sacrificateur représente le peuple devant Dieu et le prophète représente Dieu auprès des hommes, en leur apportant Sa parole. Ainsi, les premiers prophètes du Nouveau Testament- ceux mentionnés dans le livre des Actes des apôtres, tel que Barnabas et ceux d’Actes 15.32, Jude et Silas, -édifiaient, consolaient et exhortaient les chrétiens (voir 1 Cor 14.3), leur délivrant la pensée divine pour leur vie chrétienne. Leurs paroles inspirées de l’Esprit n’étaient pourtant pas Parole de Dieu. Aucune d’entre elles n’a été conservée par l’Eglise primitive. Mais combien ces messages étaient nécessaires, car nul livre ou épître du Nouveau Testament n’était encore écrit (1).

A côté de ces prophètes exhortateurs, il existait dans l’Eglise apostolique des prophètes de prédiction. Le seul prophète de ce type nommé est Agabus, mais il y en avait d’autres (voir Act 11.28). Par deux fois, Agabus prédit des événements futurs (Act 11.28 et Act 21.10-14).

Ensuite, il se trouve un troisième genre de parole prophétique, beaucoup plus fréquent. C’est celui dépeint en Actes chapitre 2: l’annonce de la Parole de Dieu, ou en termes plus modernes, l’évangélisation. Pierre, apôtre et évangéliste, accrédité par le Seigneur Jésus lui-même, proclame l’Evangile. Il était, ce jour-là, l’orateur principal. Mais les 119 autres ne se tournaient pas les pouces. Tous et toutes étaient engagés et parlaient de la part de Dieu. Dans ce sens fils et filles ont prophétisé et la déclaration de Pierre se réalise chaque fois que d’autres fils et filles et esclaves (!) poursuivent la tâche, rendant témoignage et expliquant l’Evangile dans la puissance du Saint-Esprit. Jusqu’à aujourd’hui! Dans ce sens-là, tout le peuple de Dieu, toute l’Eglise de Jésus-Christ, est un peuple de prophètes; nous sommes tous les porte-parole de Dieu. Quel contraste avec l’Israël de l’ancienne alliance!

Le R.I. de l’Eglise primitive

Vient ensuite, dans le Nouveau Testarnent, le Règlement Intérieur apostolique concernant l’annonce de la Parole par les hommes et par les femmes.

Si tous et toutes pouvaient parler, d’abord aux Juifs, ensuite aux païens, on distingue une certaine discipline à l’intérieur des assemblées. Ce n’était pas n’importe quel homme qui prenait la parole. D’abord, il devait en avoir reçu le don. Puis, ce qu’il disait était contrôlé (1 Cor 14.29). Peut- être celui qui prenait la parole avait- il besoin d’être d’abord reconnu par les anciens -comme Timothée (voir Act 16.2 et 1 Tim 4.14) – avant de commencer son ministère. Il y avait de l’ ordre au sein de l’Eglise apostolique. Voir encore Jac. chapitre 3, verset 1.

De même pour les sours. Tant de services ont été accomplis par elles dans l’Eglise, pour l’Eglise et en dehors de l’Eglise. Elles pouvaient prier dans la chambre haute avec les apôtres (Act 1.14); elles pouvaient être les porte-parole du Seigneur par leur témoignage/explication de l’Evangile, faisant équipe avec les douze (Act 2); elles pouvaient faire beaucoup d’oeuvres bonnes et d’aumônes comme Dorcas (Act 9.36-39); elles pouvaient ouvrir leur maison pour des réunions de prières nocturnes comme Marie (Act 12.12); elles pouvaient loger apôtres et évangélistes de passage comme Lydie (Act 16.15); elles pouvaient expliquer, dans leur foyer, avec leur mari, la Parole de Dieu plus exactement, comme Priscille (Act 18.26) -oui, même à un serviteur «plein temps»-; elles pouvaient être diaconesses comme Phoebé (Rom 16.1 ), voyager avec leur mari si celui-ci était «à plein temps» comme l’épouse de Pierre (I Cor 9.5), combattre côte à côte avec un apôtre pour l’Evangile comme Evodie et Syntyche (Phil 4.3), enseigner d’autres dames (Tite 2.4) et des enfants comme grand-maman Loïs et maman Eunice (2 Tim 1.5), laver les pieds des saints, secourir les malheureux (1 Tim 5.10), accompagner les âmes faibles, exhorter celles qui chancellent, pour ne pas parler des tâches «modernes» dans nos églises, donc non mentionnées dans la Bible, telles le secrétariat, l’organisation de la bibliothèque, de la cassettothèque, de la vidéo-cassettothèque, montrer aussi aux hommes comment bien nettoyer le bâtiment de l’église, etc. Tout cela, c’était du «jamais vu» dans la société juive avant le jour de la Pentecôte !

Cependant, deux responsabilités leur sont interdites dans la norme de la vie de l’Eglise: il s’agit de deux fonctions publiques. Tout d’abord, l’enseignement de la doctrine lors des séances plénières de l’ église locale est proscrit à nos sours et, secondement, la direction de l’église. Celle-ci était confiée à des évêques, appelés aussi anciens, après le passage des fondateurs. Le Nouveau Testament ne parle pas «d’ anciennes», tandis que des diaconesses existent, dont Phoebé (Rom 16.1), (2). Dans les deux cas, le principe de base est de ne pas prendre de l’autorité sur l ‘homme, car c’est l’homme qui est appelé à représenter publiquement le Maître et le Directeur suprême: Jésus- Christ.

Contestation

Aujourd’hui on conteste les décisions de celui qui a été donné comme chef de l’Eglise, Jésus-Christ et que Paul nous a transmises. Même dans les églises évangéliques. On en discute et souvent cela ne plaît pas. On n’en comprend peut-être pas encore la raison profonde, aussi essaie-t-on de les contourner, de les gommer, de les expliquer autrement (3). On évoque le temps des apôtres, les coutumes en vogue au moment de la rédaction des textes. On privilégie des versets qui, sortis de leur contexte, semblent dire le contraire. L’ ambiance féministe aidant, on décide enfin de refuser ces prescriptions en cherchant des exemples de sours qui ont eu, malgré tout, un ministère public béni. Mais la fin justifie-t-elle les moyens? (4).

Reconnaissons aussi l’influence du mouvement charismatique. Celui-ci, avec son accent fort utile mais souvent exagéré sur les dons spirituels peut troubler ceux et celles qui ont reçu un don de la parole. «J’ai reçu un don», dit-on facilement, «et les dons spirituels sont pour l’édification de l’Eglise». Ainsi, coûte que coûte, on doit exercer son don, n’ importe quand et n’importe où. On oublie facilement le Règlement Intérieur apostolique en 1 Cor cha. 12, 13, 14 et en 1 Tim ch2. Parfois, certains charismatiques, imbus de leurs paroles prétendument «prophétiques», déclarent la Bible dépassée et «rétro». Ils n’en auraient plus besoin aujourd’hui. Ce qui compte c’est le «rhéma» (la parole parlée) et non pas le «logos» (parole écrite ), mais cette différence de signification concernant ces deux mots grecs est fabriquée par eux et …n existe pas.

Nous pensons qu’il y avait des contestataires à ce sujet aux temps apostoliques (5). C’est pourquoi Paul et Pierre précisent l’affaire en rappelant aux destinataires de leurs épîtres certains textes vétéro-testamentaires .

L’Ancien Testament en parle

Paul remonte la filière jusqu’à la nature et la Genèse. Or la nature n’a pas changé, ni les faits historiques racontés dans le premier livre de la Bible. En 1 Corinthiens chapitre II, Paul rappelle l’interdépendance des hommes et des femmes (I Cor 11.8, 12) et aussi leur complémentarité. A Timothée, il rappelle ce qui s’est passé dans le jardin d’Eden avant et après la chute, mais, précise-t-il encore, les sours ne sont pas désavantagées de ne pouvoir enseigner, car elles seront sauvées (au sens large du terme) en raison de leur fonction maternelle.

Evidemment, la loi de la chute (Gen 3) a fait que les femmes dans toutes les civilisations (sauf peut-être quelques cultures matriarcales) ont vécu, malheureusement, sous la domination masculine. S’il y a eu, en Israël, un léger mieux (Abraham qui obéit à Sara Gen 21.12, Débora, Jaël et ensuite Esther qui délivrent le peuple de Dieu, la prophétesse Hulda consultée par le souverain sacrificateur Hilkija et le roi Josias), tout n’était pas parfait dans ce domaine (voir Gen 19 pour les filles vierges de Lot et Juges 19 pour la concubine du Lévite).

Nous constatons donc que la libération de la femme par le Seigneur et par les apôtres est extra-ordinaire. D’abord égalité devant Dieu concernant la grâce de la vie (1 Pi 3.7) et ensuite le fait d’être un en Jésus-Christ, car devant Dieu il n ‘y a plus ni homme ni femme,… (GaI 3.28). Les dons spirituels, départis aux uns et aux autres, aux hommes et aux femmes, permettent une liberté d’action jamais connue jusqu’alors, bien que le prophète Joël l’ait prédite en partie. Est donc bannie dans les églises locales cette domination masculine! Frères et sours oeuvrent ensemble pour leur Maître commun, même si la direction de l’assemblée et l’enseignement de la Parole au culte, etc. restent confiés aux frères. Même là, les exceptions existent. Les quatre filles de Philippe pourraient en faire partie (6), de même que l’élue de 2 Jean. Mais gare à une Jézabel enseignante qui dépasse toutes les bornes (Apoc 2.18-25)1

Résumé des fonctions et des rôles féminins et masculins dans différents domaines

Les détails qui suivent peuvent nous aider à comprendre pourquoi le Saint-Esprit a inspiré les apôtres -surtout Paul -à préciser les rôles féminins et masculins, en leur demandant de ne pas enseigner la doctrine publiquement dans l’église réunie et de ne pas prendre la direction de l’assemblée:

Au point de vue physique: sans conteste hommes et femmes ont des corps différents: Dieu créa 1’homme qui engendre et la femme qui enfante et qui allaite. Leurs rôles ne sont aucunement inter-changeables physiquement.

Néanmoins, le monde d’ aujourd’hui, comme autrefois le monde gréco-romain du temps de Paul, essaie de changer ce principe de corps spécifique en «inventant» 1 ‘homosexualité, le lesbianisme et le transsexualisme.

Nous croyons que tous les vrais chrétiens, ceux et celles en qui le Saint-Esprit demeure, se lèveront toujours contre ces déviations qui constituent une abomination aux yeux de l’ Eternel.

Autre détail: un danger existerait pour les frères de trop admirer la sour prédicatrice debout devant eux. (Oui, nous savons fort bien que les frères devraient, dans ce cas, écouter le message et ne pas fixer les regards sur la messagère, mais… ?).

Au sein de la famille: les différences de rôles et de fonctions au sein de la famille sont également assez clairement précisées dans la Bible. Le modèle divin pour nous inspirer est celui de Jésus-Christ et de sa fiancée, l’Eglise (2 Cor 11.2). Aucun enfant de Dieu, dans son bon sens, ne contestera la soumission de l’Eglise à son Seigneur (7) ni l’amour infini de notre Epoux pour nous en tant qu’assemblée rachetée par son sang.

L’amour du mari pour son épouse doit donc être plus grand que pour lui-même et, quand l’épouse le perçoit, la question de sa soumission dans le Seigneur ne pose généralement pas de grands problèmes. D’ailleurs, de même que nous, chrétiens, nous ne sommes pas seulement d’heureux serviteurs du Seigneur, mais aussi ses amis, devenant ainsi coéquipiers avec Lui, de même, les époux devraient oeuvrer ensemble.

Au point de vue social: les deux guerres mondiales ont beaucoup influencé l’Occident. L’invention de toutes sortes d’appareils ménagers a aussi considérablement changé la vie de la femme. Du coup, le travail au foyer a été de beaucoup allégé. Personne, d’ailleurs, ne le regrette. Peut-être même que, par ce biais, les travaux ingrats de la ménagère ont été en partie supprimés? S’il en est ainsi, tant mieux. La femme de Prov 31 est probablement le meilleur exemple de ce que la femme «libérée» peut accomplir pour la gloire de Dieu et l’honneur de son mari. C’est ainsi qu’elle sera très honorée en retour. Notons que cette épouse-là vivait sous l’ ancienne alliance.

Pour ce qui concerne le «mental»: nous disons bien «mental» et non pas «intellectuel». Au point de vue intellectuel, ni l’homme ni la femme n’est naturellement supérieur à l’autre. Mais les structures mentales de l’homme et de la femme sont très souvent différentes. Le don naturel de l’ intuition est nettement plus prononcé chez le beau sexe que chez le sexe fort. L’homme calcule plutôt, tend à être davantage cartésien, demeurant souvent objectif. La femme, étant plus subjective que lui, «sentira» le malaise, ou une situation douteuse. Ainsi les deux se complètent.

En principe l’homme souhaite que son épouse soit belle. Mais la jeune fille s’occupe moins de l’apparence physique du futur conjoint que de son caractère. Leurs approches sont différentes.

Ainsi dans le couple, les deux mentalités sont complémentaires. Le Créateur l’a voulu ainsi. Il s’agit de dons précieux. Insensés sont ceux qui veulent ne jamais en tenir compte.

Dans le domaine spirituel: toutes les différences déjà repérées, inventées et instituées par le Créateur jouent leur rôle. Nos assemblées locales seraient misérablement pauvres si les femmes, par leur influence, ne donnaient pas une «âme» à nos églises. Quant aux hommes, il leur incombe plutôt d’en être 1’«esprit». Et Dieu veut qu’au sein des rassemblements particuliers, les esprits et les âmes oeuvrent ensemble sous le même Directeur .

Sous cet aspect, on comprend on comprend pourquoi les anciens sont généralement des hommes mariés. S’il peut exister des éléments dans la vie d’une église qu’un évêque ne doit pas partager avec son épouse, beaucoup de décisions concernant l’organisation de l’église peuvent normalement être discutées, en privé, avec elle selon sa capacité spirituelle. A l’occasion, selon le sujet à discuter, la présence de dames à la réunion d’anciens pourrait être précieuse.

Conclusion

Avant de bâtir son Eglise, le Créateur tout sage avait déjà donné à son image 1’homme et la femme, avec leur rôle et leurs fonctions – physiques, familiaux, sociaux, mentaux et spirituels.

La vocation de l’Eglise est en partie de faire connaître la sagesse de Dieu dans sa grande diversité aux puissances sataniques dans les lieux célestes (Eph 3.10). Si l’Eglise militante sur la terre ne sait traduire fidèlement dans ses pratiques la réalité céleste -c’est-à-dire la relation existant entre le Père et le Fils et celle établie entre le Christ et son Epouse -les démons qui nous observent remarqueront que son image est défectueuse (voir 1 Cor 4.9).

Puisque Dieu sauve des hommes et des femmes et les baptise dans l’Esprit pour former un seul corps (1 Cor 12.13), nous croyons que leur rôle départi par l’Esprit est d’une grande importance. D’où la nécessité d’observer les règles.

Nous nous rendons compte que, pour tout ce qui concerne la question des ministères, masculins ou féminins, dans l’Eglise, nous devons tous continuellement comprendre quelle est la volonté du Seigneur (Eph5. 17) et l’exécuter.

P.W.
Notes:
I Le grand besoin de ce premier type de prophétie néo-testamentaire est très évident. Dans l’Ancien Testament, la «première» Bible de l’Eglise primitive, il y a toutes sortes de paroles et de textes qui devaient être appliqués à la vie chrétienne. Aujourd’hui, ceux qui enseignent la Bible et qui connaissent l’A.T., le font continuellement, car le N.T. nous en donne des exemples. Mais au début de la nouvelle alliance, alors que le N. T. n ‘exis tait pas, le besoin d’hommes, inspirés par le Saint-Esprit, pour exhorter de cette façon-là les églises locales, était très nécessaire. Les premiers prophètes du N.T. comblaient cette lacune. Paul fait référence à eux en Ephésiens chapitres 2 et4: le fondement des apôtres et prophètes. Ensuite, les uns comme apôtres, les autres comme prophètes et encore en 1 Cor 12.28: premièrement des apôtres, secondement des prophètes.
Le genre de message prophétique donné pourrait être semblable à ce que Pierre expliquait dans la chambre haute. D’un seul coup le Saint-Esprit lui révèle qu’Achitophel, signalé dans les Psaumes comme traître au roi David, était une préfiguration de Judas 1scariot!
2 Le terme grec «presbuteros» a deux significations: a) «vieillard» et b) «ancien», ou «presbytre». Le contexte décide comment le traduire. Le substantif féminin existe, traduit par «femme âgée». Dans 1 Timothée 5.2, d’aucuns aimeraient traduire le terme par «anciennes». Si le texte est quand même ecclésial, et que les anciens soient mentionnés plus loin dans le chapitre, le contexte dans les versets 1 et 2 est celui de la famille spirituelle et non pas de la direction de l’Eglise. Voir aussi Tite 2.1-9 où cette mention vient après la liste au chapitre 1 des qualités obligatoires d’un ancien.
3 Nous refusons catégoriquement l’interprétation du texte de 1 Cor 14.34-35 qui place cette parole dans la bouche des Corinthiens. Cela nous fait penser à certains libéraux qui blâmeraient Marie d’avoir été assise aux pieds du Maître et exalteraient Marthe, ou encore à ceux qui voudraient que le vrai fils prodigue soit l’aîné des deux frères. Chez les Corinthiens il y avait suffisamment de désordre pour comprendre que l’ensemble de la lettre était correctif Ces paroles font partie d’un ensemble d’avertissements. Trois fois dans le chapitre 14 se trouve l’ordre de se taire (versets 28, 30 et 34) pour des raisons diverses.
4 A cette question rhétorique la réponse est non. A titre d’exemple, nous pensons à la bénédiction de Dieu sur le ministère public de certaines officières de l’Armée du Salut. Elle n’est pas signe de l’accord de Dieu sur la non-observation des ordonnances du baptême et de la Cène) par ces chrétiens.
5 Elizabeth Catherwood, dans The Role of Women, p. 53, (1985. 1VP), nous apprend l’existence de mouvements féministes dans le monde gréco-romain et surtout à Ephèse. Ceci, malgré la condition féminine très pénible de cette époque. Paul donc, précise-t-elle, regimbe contre ce mouvement par ce qu ‘il dit en Ephésiens chapitre 5: Femmes, soyez soumises, …etc.
6 Le fait que Paul demande aux sours de se voiler lors de leur prière ou prophétie en public montre qu’au moins parfois les sours prophétisaient à Corinthe. Leur silence, exigé au chapitre 14, paraît donc plutôt étonnant. Dans ce texte de 1 Cor 14, le silence comprenait certainement et surtout les questions que les sours avaient envie de poser (verset 35) et peut-être aussi le jugement à apporter sur les prophéties (verset 29).
Remarquons que la Parole fait une distinction entre la prophétie et l’enseignement de la part d’un docteur ( 1 Cor 12.28; Eph 4.11 ). C’est surtout l’enseignement qui est interdit aux sours dans 1 Timothée chapitre 2.
7 Dans son livre «Homme-femme, vers une autre relation», ( 1992, Grâce et Vérité), Gilbert Bilézikian tord le sens des Ecritures pour démontrer, vaille que vaille, que le texte d’Ephésiens 5.22-23 n’évoque pas la question de la soumission de l’Eglise à Christ, son chef (p. 122-129). Ceci, afin de montrer qu’une femme n’a pas besoin de se soumettre à son mari plus que le mari à son épouse. Nous n’apprécions pas son exégèse. Une telle interprétation ignore tout du thème de cette lettre, qui est celui de l’exaltation du Christ, au-dessus de tout et de tous. Dieu a donné Christ comme chef à l’Eglise. Alors comment justifier qu’Il a été donné comme «source», comme l’ex- plique ce frère et cela, après son exaltation? Le Christ a été la «souce» de l’Eglise au moment de sa Passion.
G. Bilézikian insiste, qu’au fond, la soumission de l’épouse se fait uniquement dans le cadre d’une soumission réciproque entre le mari et l’épouse (voir verset 21 ). Soit. Mais alors, suivant cette logique, à quel moment et dans quelles circonstances, frère Bélizikian, le Christ devient-il soumis à l’Eglise? Depuis quand le Seigneur a-t-il cessé d’être… Seigneur de son peuple ?

Écrit par


Après avoir présenté «La Bible et ses versions» (No 101/1992) nous résumons dans les lignes qui suivent la question du libéralisme théologique, souvent appelé la haute critique. Celle-ci essaie de remonter aux sources et aux origines de la Bible et de ses livres.

Manifestation à Lausanne

En 1992, la Ligue pour la lecture de la Bible a fêté son 125e anniversaire. Voulant marquer cet événement, la Ligue suisse a conçu le projet de présenter en Suisse le modèle grandeur nature du Tabernacle de Moïse, créé il y a quelque temps en Allemagne par le Bibel-Center de Breckerfeld. Ce modèle, dressé dans le quartier général de la Ligue à Vennes-Lausanne, a été enrichi d’une excellente exposition sur la Bible, ainsi que de montages audio-visuels du CEP A. Pour compléter l’ensemble, des ateliers de fabrication (poterie, cuivre, tissage, etc.) ont été créés, ainsi qu’un «chemin dans le désert» où l’on voit de l’eau couler d’une roche, le tout parsemé de versets bibliques appropriés, peints sur pierre. Il y a même, en cage, quelques cailles, et, dans un enclos, un chameau – un vrai, à deux bosses !
 La manifestation se préparait bien et le grand public commençait à recevoir la «pub» à ce sujet. C’est à ce moment-là que des protestations protestantes s’élevèrent alors que les rabbins se montraient plutôt favorables! Des articles apparurent, dénigrant l’action de la Ligue. Le journal «le Protestant» publia un article: «La vérité du Tabernacle» (1); le magazine de la Société Biblique ne parla que de la «Spiritualité du Tabernacle» en refusant son historicité (2)!

Libéralisme théologique

L’argument avancé par les auteurs de ces articles est tout simplement celui du libéralisme théologique: les textes concernant le Tabernacle dans les livres de l’Exode, du Lévitique et des Nombres, ne seraient ni de la plume de Moïse, ni de son époque. Tous les textes seraient plutôt une fiction pieuse, écrite au temps de l’exil babylonien, voire après, et attribué et (faussement) à Moïse.

Les écrivains de ces textes bibliques (intéressants mais frauduleux) seraient, selon cette thèse, de la classe sacerdotale – ce qu’on appelle techniquement la source P. Nécessairement, bien d’autres textes de la Bible auraient d’autres «sources», que les auteurs traditionnellement reconnus (on parle des sources J, E, D, H) (3). Les auteurs véritables, tel Moïse, ont été tout simplement… «licenciés». Ainsi, Moïse ne serait nullement l’auteur du Pentateuque; les Psaumes seraient plutôt le livre des cantiques du 2e temple, (très peu proviendraient de David); la prophétie d’Esaïe aurait au moins trois auteurs. Michée et Zacharie seraient «cousus» pareillement et des fragments de leur oeuvre sont attribués à d’autres écrivains. Les livres de Ruth et de Jonas ne seraient que des histoires pour apprendre à Israël à ne pas se montrer sectaire. Le livre de Daniel ne serait pas de l’époque de son héros, il viendrait du temps des Macchabées, environ 165 avant J.-C. Voilà quelques thèses de la haute critique, dite libérale.

Si nos lecteurs désirent de plus amples informations à ce sujet, qu’ils se renseignent en étudiant les introductions aux livres bibliques présentées dans certaines versions: TOR, Jérusalem, et autres. Même les annotations dans la version en «Français courant» ne sont pas complètement libres de ce modernisme. Que le public évangélique en soit averti!

Origine de ces thèses

La théologie libérale est un enfant du rationalisme des encyclopédistes français du 18e siècle, le siècle dit des Lumières. Ces philosophes, déistes pour la plupart, avaient rejeté la notion d’un Dieu personnel qui se révèle aux hommes. Tout phénomène naturel s’explique, croyaient-ils, et «l’hypothèse» d’un Dieu qui intervient dans l’histoire humaine n’est pas nécessaire. Le fruit de leurs labeurs se trouve dans les 35 volumes de leur Encyclopédie, travail d’érudition remarquable, mais devenu aussi une tribune pour attaquer la religion en général.

Cet esprit de recherche et d’explication du 18e siècle est allé trouver «gîte et couvert» de l’autre côté du Rhin chez les théologiens allemands protestants du 19e siècle, eux-mêmes déjà influencés par l’Aufklärung (4). Selon eux, le judaïsme et le christianisme ne seraient pas des religions divinement révélées; les miracles, interventions de Dieu, n’auraient jamais eu lieu; les prophéties bibliques ne pouvaient pas avoir été prononcées des siècles avant l’accomplissement des événements prédits! Tout cela, au nom du rationalisme.

Deux livres, «Principes de géologie» (5), et «De l’origine des espèces par voie de sélection naturelle» (6), parus vers le milieu de ce même siècle, ont apporté beaucoup d’eau à ce moulin libéral. La thèse évolutionniste de la planète Terre et de la vie animale, lancée par les auteurs de ces livres, a été appliquée à la religion, qui aurait tout simplement évolué de l’animisme, en passant par le démonisme, le polythéisme, la monolâtrie, jusqu’au monothéisme de l’Ancien Testament, puis à celui du Nouveau Testament.

A partir d’une telle hypothèse, F.C. Baur (1762-1860), J. Wellhausen, (1844-1918) et bien d’autres ont commencé à redater les textes bibliques. Les textes trop «évolués», selon l’échelle évolutionniste établie, ont été remis «à leur place chronologique». Force était alors d’inventer de nouveaux auteurs, d’où les «sources»: J,E,D,P, etc. Toute cette théorie semblait être confirmée, pour le Tabernacle, par le fait que nous ne trouvons que peu de références à celui-ci et au culte mosaïque dans les livres historiques qui suivent le Pentateuque: Josué, Juges et 1 Samuel.

Comment réfuter?

Ce que les libéraux ont oublié en cherchant confirmation dans les récits historiques rédigés après les cinq livres de la Loi de Moïse, est tout simplement l’infidélité des Israélites. Le syncrétisme qu’ils ont pratiqué pendant la période des Juges les avait éloignés du culte mosaïque. On ne retrouve le Tabernacle qu’au début du livre de 1 Samuel et bien vite il disparaît de nouveau de la page biblique. Les péchés d’Hophni et de Phinées, fils du souverain sacrificateur et juge Eli, avec la prise de l’arche par les Philistins, ont pour ainsi dire forcé l’Eternel à abandonner Silo (7).
 Nous devons aussi comprendre que toutes les lois et les règles sur les sacrifices données à Moïse par Dieu, n’ont pas pu être mises en pratique et appliquées à la lettre, même pendant la marche dans le désert (8). D’ailleurs, c’est bien évident que beaucoup d’entre elles avaient été écrites dans la perspective de l’entrée dans le pays promis, (voir Nom 15.2). Cependant, qu’elles aient été données à Israël par Moïse et que le Tabernacle ait été dressé au pied du Sinaï, voilà ce que nous acceptons comme historique.

L’apport de l’archéologie

Nous pouvons encore évoquer certaines découvertes archéologiques qui viennent contrecarrer la pensée libérale qu’un tel culte fut impossible à l’époque de Moïse.

Si d’autres peuples, tels les Egyptiens, transportaient des tentes démontables et des coffrets religieux par des barres passées dans les anneaux fixés au coffret, pourquoi les Israélites vivant plus ou moins à la même époque, en auraient-ils été incapables? Si les Cananéens de Ras Shamra (Ougarit) au 14e siècle pratiquaient un culte avec un sacrificateur en chef, offrant des holocaustes et des sacrifices pour le péché, pourquoi refuser cette possibilité au peuple d’Israël qui vivait à la même période? (9) Non pas que Moïse ait «copié» sur les autres peuples: il a été, comme la Bible le précise, «divinement averti», Dieu lui ayant montré le modèle sur la montagne (voir Héb 8.5; Act 7.44; Ex 25.9, 40; etc.).

L’archéologie aidant, un examen plus approfondi des thèses libérales révèle les incompatibi1ités qui jaillissent partout dans leurs propos.

Libéralisme: une échelle de valeurs changeante

L’un des grands problèmes que présente le libéralisme est que ses théories évoluent continuellement. Par exemple, les introductions des premières éditions de la TOB (voir ci-dessus) ont déjà dû être modifiées dans une édition plus récente.
 Pour ce qui concerne le Tabernacle, même un commentaire moderniste, tel que Peake (édition de 1967), est contraint d’avouer que le récit de la construction du Tabernacle dans le désert «ne peut plus être regardé comme une fiction de la source P. D’ailleurs, est-il ajouté, il est de plus en plus reconnu que beaucoup d’éléments de P ont pour base d’anciennes traditions historiques sérieuses». Tout en maintenant l’hypothèse des sources pour le Pentateuque, les éditeurs du commentaire Peake ont dû, au moins en partie, reconnaître le bien-fondé des indications historiques évoquées dans ces livres.

Malheureusement, force est de constater que les sources du libéralisme théologique jaillissent de coeurs incrédules. La question du serpent dans le jardin d’Eden résonne encore dans les oreilles: «Dieu a-t-il réellement dit?»

Conclusion

Cependant le fait de «croire en Jésus comme Sauveur personnel» (vérité fondamentale, essentielle, et ô combien précieuse), ne nous protège pas nécessairement des doutes concernant l’authenticité de la parole de Dieu. Bien plus, nous qui aimons la Parole avons besoin d’examiner toutes choses afin de retenir ce qui est bon (1 Thess 5.21). Les promoteurs des thèses modernistes sont, et ont été, très souvent des exégètes d’une rare intelligence et d’une grande érudition. Nous ne mettons pas en doute leur culture biblique et générale. D’ailleurs tous leurs travaux n’ont pas été vains (10). Mais leurs conclusions qui relèvent d’abord d’idées «a priori» (11), puis de la philosophie et d’un certain type d’exégèse (12), les ont amenés à emprunter des déviations tortueuses plutôt que de rester sur, les routes nationales spirituelles et bien tracées de la Bible. Sur ces bases, le diable ne pouvait que rapidement entamer leur confiance personnelle dans la Parole écrite (la Bible), et dans la Parole vivante (le Christ).

L’influence de tout ce mouvement libéral et moderniste a été néfaste. Il a engendré, et engendre encore, un protestantisme souvent sans foi et sans convictions bibliques (13). Ce qui est encore plus malheureux, c’est que les théologiens catholiques, qui avaient cependant combattu ce modernisme, même par des encycliques papales (14), ont été eux aussi entraînés dans ce sillage d’ incrédulité.

Le libéralisme théologique ne fait que museler la Bible, tandis que la proclamation de tout le conseil de Dieu, l’Evangile de la vérité biblique, est le sine qua non de l’accession au salut. Seule la voix de Dieu peut donner la vie à nos contemporains, car… Toi seul, Seigneur, tu as les paroles de la vie éternelle.

«Toutes les chances des Eglises résident dans la Bible, si elles réussissent à la laisser parler dans lemonde actuel» Karl Jaspers, philosophe (1883-1969).

NOTES:

1 Le Protestant, No 4, avril 1992. P 5. «La vérité sur le Tabernacle». Samuel Amsler.
2 Société Biblique Suisse. Bible Actualité 1/1992 (plusieurs articles).
3 L ‘hypothèse de plusieurs auteurs pour le Pentateuque a une longue histoire. Jean Astruc, 1684-1766, en est le premier promoteur officiel. Elle a été élaborée sur le postulat qui affirme que les auteurs proposés dans les livres bibliques ne sont pas nécessairement les vrais auteurs. Les textes bibliques sont donc attribués à des «sources», selon leur contenu, leur vocabulaire, leurs figures de rhétorique, sujets préférés, etc. L’hypothèse ne reconnaît pas l’unité de la structure des livres et des parties des livres. C’est cette structure qui milite contre de tels découpages.
4 Die Aufklärung: mouvement de recherche rationaliste allemand, dû principalement aux travaux de Christian Wolff ( 1679-1754), et de H.S. Remarius (1694-1768).
5 Les «Principes de géologie» de Charles Lyell préconisent «l’étude des phénomènes en action», (Larousse). Lyell prône «L’évolution lente de la formation des couches géologiques» et s’élève contre le catastrophisme. Bien des chrétiens reconnaissent la valeur de ces propositions tout en n’excluant pas le catastrophisme, telle déluge de la Genèse.
6 Charles Darwin (1809-1882), publia son livre en 1859, suite à un voyage autour de l’Amérique du Sud, pendant lequel il a pu étudier certaines formes de la vie animale sur des îles au large du continent. Ces formes de vie, isolées géographiquement de leurs espèces semblables, auraient, pour Darwin, évolué autrement que celles d’ailleurs.
7 Voir Ps 78.60; Jér 7.12, 14; 26.6,9.
8 Les sacrifices de la fleur de farine seraient difficilement réalisables au cours du voyage dans le désert puisqu’Israël, nourri de la manne, ne pratiquait que très rarement le labourage (voir Nom 20.5).
9 Les articles du Nouveau Dictionnaire Biblique ( 1992, Emmaüs) éclairent ces points. Voir: Arche, Ras-Shamra.
10 Un bon exemple du travail accompli par la haute critique serait l’antériorité de l’Evangile selon Marc, au lieu de celle de Matthieu, qui avait généralement été acceptée à travers les siècles. Un autre exemple serait la datation de l’épître aux Galates. Actuellement, grâce à la haute critique, elle est en principe reconnue comme la toute première lettre de Paul, écrite peu de temps après son premier voyage missionnaire.
11 Voir ci-dessus, dans le paragraphe: «Origine de ces thèses». 1l y a surtout trois à priori: 1. Le christianisme n’est pas une révélation divine. 2. Le miracle n’existe pas. 3. Les prophéties n’ont jamais été prononcées des siècles avant l’événement.
12 Dans l’exégèse faite par les théologiens libéraux, il y a souvent d’abord un essai d’amélioration du texte original. On soupçonne des erreurs de copistes dans le texte biblique dès qu’il présente des problèmes de compréhension. Aussi essaient-ils de le changer en proposant d’autres termes et/ou lettres. Par exemple, E. Heaton dans son commentaire sur Daniel (1967. SCM Press Ltd), déclare d’emblée que les versets 24-27 de Daniel 9 sont «extrêmement corrompus au point de vue du texte», alors que E.J. Young, dans le Nouveau Commentaire Biblique parle de «ce paragraphe remarquable», malgré des difficultés de traduction.
13 Bien évidemment ce fait n’exclut pas qu’un reste fidèle de pasteurs et d’ouailles évangéliques existe toujours au sein du protestantisme multitudiniste, agissant toujours pour la gloire de Dieu.
14 Le Syllabus de Pie IX et les encycliques de Pie X, Lamentabili et Pascendi étaient particulièrement anti-modernistes.


P.W.

Écrit par


L’étude qui suit est adaptée d’un article de la nouvelle édition du Nouveau Dictionnaire Biblique: Manuscrits

Introduction

De tous les livres de l’Antiquité, religieux et profanes, qui ont été écrits sur papyrus ou sur parchemin, aucun autographe ne nous est parvenu. La toute première rédaction, écrite de la main même de l’auteur ou de son scribe, semble irrémédiablement perdue, à moins d’une stupéfiante découverte à venir…

Pour connaître cette rédaction première, les érudits doivent donc chaque fois la rétablir à partir d’un examen minutieux des copies manuscrites qu ‘ils possèdent. Ce travail est toujours nécessaire pour tous les écrits – des auteurs grecs et latins comme des auteurs bibliques. Evidemment, le rétablissement de la rédaction première est d’autant plus aisé que 1’on possède des copies en grand nombre et que leur origine est plus ancienne.

Ce grand travail de «résurrection» du texte original s’appelle critique textuelle ou basse critique, en contraste avec la haute critique qui, pour sa part, essaie de remonter aux sources et de découvrir les auteurs de l’ouvrage.

Manuscrits bibliques

Les manuscrits bibliques nous sont parvenus sur papyrus et sur parchemin. Moïse aurait pu éventuellement écrire ses premiers textes sur des tablettes faites d’argile, surtout le texte du Deutéronome écrit dans la vallée du Jourdain où il y avait de l’argile, (voir 1 Rois 7.46), mais les textes eux-mêmes ne nous disent pas quel type de support a pu être utilisé après Moïse. Quoi qu’il en soit, nous ne possédons aujourd’hui que des textes calligraphiés sur papyrus et parchemin. ils sont précieusement conservés dans les grands musées et bibliothèques, publics, privés et universitaires, et sont rarement exposés au grand public en raison de leur valeur inestimable et de leur fragilité. Assurément, ils sont plus précieux que des joyaux…

Depuis bientôt deux siècles, une tendance fâcheuse de la plupart des exposants de la haute critique a été de postuler que la première rédaction d’un livre biblique a été généralement faite longtemps après la période contemporaine de l’auteur supposé. il y aurait donc, disent-ils, entre un auteur donné et le texte qui lui est attribué, une longue période de tradition orale.

Les exégètes évangéliques refusent- en principe – cette hypothèse dans la mesure où un examen détaillé du texte biblique ne semble pas soutenir l’existence d’un laps de temps nécessaire à la tradition orale. Certains livres de l’Ancien Testament portent des indices d’un témoin oculaire et nomment parfois très pertinemment l’auteur du livre ou d’une partie du livre. Ces données, éléments aussi de la haute critique, doivent être prises en considération: ne pas les reconnaître serait un manque évident de sérieux et d’objectivité dans l’approche du sujet. C’est pourquoi, dans un élan plein de foi, nous acceptons les divers manuscrits comme copies de la Parole de Dieu; tout en reconnaissant que les copistes, étant humains, ont pu commettre des erreurs dans leur travail.

Critique textuelle

Les manuscrits de la Bible sont beaucoup plus nombreux que ceux d’autres livres antiques. De plus, un grand nombre d’entre eux sont bien plus près du temps de la rédaction première que peuvent l’être les manuscrits des ouvrages profanes. Il s’agit là d’un incroyable avantage… aussi la critique textuelle arrive-t-elle assez facilement à rétablir le texte biblique original.

Evidemment, le travail de base est plus long pour la Bible puisque le nombre de manuscrits à consulter est bien plus élevé. La basse critique doit d’abord dater toutes ces multiples copies – quelque 6000 à 7000! Ensuite il lui faut les classer par «famille» ou «type de texte». Pour effectuer ce classement, la date de la copie n’entre pas nécessairement en ligne de compte.

Variantes

La finalité du difficile travail de la critique textuelle est de reconnaître et ensuite d’éliminer les erreurs des copistes, ll est impossible qu’un copiste ne fasse pas de temps en temps quelques fautes, et celles-ci ne peuvent malheureusement que se perpétuer dans les copies des copies.

Heureusement que les copistes ont souvent tendance à faire les mêmes types d’erreurs! On les désigne par une terminologie précise: haplographie, dittographie, métathèse, fusion, fission, homophonie, homoeo-téleuton, etc1. Une telle classification aide à reconnaître l’origine des variantes et à rectifier aussitôt le texte.

Cependant, le nombre astronomique de toutes les variantes – n’a-t-on pas annoncé le chiffre de 200’000 pour le seul Nouveau Testament? – pourrait faire frémir. Même quand on apprend que ces variantes ne se trouvent qu’en 10’000 endroits différents du texte du Nouveau Testament, on n’est guère rassuré! Pourtant, lorsqu’on découvre que 98,33% du texte est pur, l’inquiétude disparaît. A. T. Robinson suggère que seule une millième partie de la totalité du texte néo-testamentaire pose de vrais problèmes à la basse critique, nous donnant donc des écrits justes à 99,9%! C’est fantastique! Si les experts de la critique textuelle des classiques grecs pouvaient se fier avec la même certitude aux copies de la République de Platon ou de la Physique et de la Métaphysique d’Aristote…

Basse critique de l’ Ancien Testament

Le travail des experts de la basse critique de l’ Ancien Testament n’est peut-être pas aussi difficile que le travail correspondant propre au Nouveau Testament, par le fait que de prestigieux copistes juifs, les Massorètes, ont déjà fixé le texte hébreu entre le Ve et le Xe siècle après Jésus-Christ.

L’activité de ces docteurs juifs consistait à ajouter au texte biblique copié toute une série de notes et de «corrections» dans les marges, appelées «massore parva» , ainsi que sur le haut et le bas de chaque page, appelées «massore magna». La «massore finalis» se trouvait à la fin de chaque livre. Les massorètes y inscrivaient scrupuleusement le nombre de mots de chaque livre, ainsi que le mot du milieu du livre. Ils comptaient aussi le nombre d’occurences d’une lettre dans un livre. «Tout ce qui pouvait être compté, l’était» disait le Docteur W .Robinson. Et comme de surcroît ils avaient inventé le système des signes vocaliques, indiquant la prononciation exacte de chaque mot, les massorètes ont accompli une tâche prodigieuse de fixation de texte qui ne peut guère être surpassée.

Travaux actuels

Pourtant, l’étude de la basse critique de l’Ancien Testament se poursuit encore de nos jours car l’examen de nouveaux manuscrits bibliques – ceux de Qumran, par exemple, les fameux Rouleaux de la mer Morte – peuvent encore éclairer les spécialistes. Il s’est constitué tout dernièrement un nouveau comité de travail, international et interconfessionnel, qui s’y attelle, les Sociétés Bibliques ayant pris l’initiative de ce projet. Le professeur Schenker , récemment interviewé à ce sujet, a déclaré que tous les membres de cette équipe reconnaissent que «la Bible est inspirée et, dans ce sens, est Parole de Dieu». «… nous ne nous plaçons pas au- dessus du texte, dit- il encore, nous sommes à son service», Ces paroles rassurent ainsi les évangéliques. Ils espèrent seulement que ce travail sera fait dans le respect ABSOLU du texte sacré. Nous pouvons encore prier pour ces hommes.

Force nous est de constater que de toutes façons la totalité de la chrétienté a toujours été dépendante de ce genre de travail spécialisé; qu’il ait été fait par des juifs ou par des chrétiens de différentes confessions. Mais nous croyons aussi à la puissance inhérente de la Parole de Dieu. Elle s’imposera toujours.

Basse critique du Nouveau Testament

Tout au long des siècles les spécialistes de la basse critique du Nouveau Testament ont toujours été nombreux. Parmi les Pères de l’Eglise citons Origène et Jérôme, et aussi Eusèbe de Césarée. Celui-ci était chargé par Constantin le Grand de faire copier 50 exemplaires du Nouveau Testament tous frais payés par la trésorerie impériale. Origène et Jérôme ont, quant à eux, travaillé le texte de toute la Bible: Origène, le texte de l’Ancien Testament dans l’ «Hexapla» – cinq différents types de textes grecs, en colonnes, avec le texte hébreu, mais cette oeuvre resta inachevée; et Jérôme, avec la Vulgate, la première version latine officielle, traduite directement de l’hébreu pour l’Ancien Testament et du grec pour le Nouveau Testament.

Ensuite, au Moyen Age, Alcuin de York et Théodulph d’Orléans, pendant le règne de Charlemagne, ont travaillé le texte de la Vulgate, à partir de nombreuses copies existantes.

Au moment de la Renaissance et de la Réforme, un nouveau travail d’érudition était entrepris, d’abord parce que le texte original de la Vulgate s’était perdu au cours des siècles, ensuite parce que le texte hébreu et grec avait été reconnu comme bien plus sûr. Aussi, Erasme des Pays-Bas et le Cardinal Ximénès en Espagne ont publié chacun un Nouveau Testament latin-grec. Ces éditions étaient véritablement révolutionnaires car, pour Rome, le texte latin de la Vulgate, et nul autre, constituait la Bible catholique. Par la suite, Robert Estienne, Théodore de Bèze et surtout les Elzevir (oncle et neveu) ont établi le «textus receptus» -«texte reçu» grec, du Nouveau Testament, tant respecté. Ensuite et surtout au XIXe siècle, les hellénistes se sont éloignés du «texte reçu», principalement parce que d’autres manuscrits du Nouveau Testament ont été découverts: Sinaïticus, Vaticanus, etc. Une «bataille» s’est engagée par la suite, surtout parmi les chrétiens anglo-saxons, gravitant autour des versions anglaises dépendantes, soit du texte reçu soit de nouveaux textes grecs, établis par Tregelles, Westcott, Hort et d’autres, – gentille «bataille» qui se poursuit encore aujourd’hui dans certains milieux.

Conclusion

Pour les spécialistes, les différences entre les éditions du texte grec sont importantes et les chrétiens ne doivent pas fermer les yeux sur les vrais problèmes qui en découlent. Il serait facile de terminer avec une Bible tronquée et par conséquent hérétique – comme la version des Témoins de Jéhovah. Mais reconnaissons que la plupart des différences sont plutôt d’ordre technique et non pas d’ordre doctrinal. Les diverses leçons proposées ne viennent pas gêner la rédaction d’une Confession de Foi, même très détaillée. Mais pour ne pas rester dans l’ignorance concernant certaines difficultés – comme celle, par exemple, qui caractérise la fm de l’évangile de Marc2 – les chrétiens feront bien de se servir d’une version de la Bible, telle que celle dite de la Colombe, où bon nombre de ces problèmes textuels sont mentionnés dans des notes en bas de page.

Combien nous devrions être reconnaissants aujourd’hui envers notre Dieu d’avoir veillé sur Sa Parole, (Jér 1.12), d’avoir suscité tout au long des siècles, et encore de nos jours, des érudits spécialisés qui, comprenant les langues anciennes que Dieu a employées pour nous donner la Bible, sont encore prêts à se pencher sur les textes bibliques pour en faire de meilleures traductions.

C’est grâce à leurs travaux, combien précieux, que des millions de chrétiens nés de nouveau peuvent encore recevoir sans obstacle majeur, jour après jour et tout au long de leur pélerinage terrestre, toute parole qui sort de la bouche de Dieu.

Notes:
1 Voir pour plus de détails: Gleason Archer. Introduction à L’Ancien Testament. 1978. Emmaüs. Pages 52 -56.
2 Voir pour plus de détails: Nouveau Commentaire Biblique. 1978. Emrnaüs. Page 924.

P.W

Écrit par


(Dans cet article, les abréviations suivantes ont été employées: le F.C. = la version en Français Courant; la C. = Version dite à la Colombe; la P .V. = Parole Vivante).

Devant le foisonnement des versions différentes de la Bible, certains croyants restent interloqués. «Quoi», s’exclament-ils, quand sort sur le marché une traduction nouvelle, «encore une autre! » .Et de se décider de l’acheter aussitôt «pour voir», même si, par la suite, sur l’étagère, elle sert plutôt de «ramasse-poussière» !

De multiples versions aujourd’hui.

Reconnaissons que le monde entier bénéficie de cette multitude de nouvelles traductions. Ainsi, beaucoup d’ethnies lisent pour la première fois la Parole de Dieu dans leurs langues maternelles, (1). Grâce à des missionnaires, surtout ceux de la Société Wycliffe, et à des P.C., genre deskop solaire, l’immense travail de la création d’un alphabet pour écrire une langue «inconnue», et ensuite la traduction de la Bible dans cette langue, sont de beaucoup accélérés. Ce qui ne veut pas dire pour autant que le traducteur se dore au soleil pendant cette activité intellectuelle intense. Je connais personnellement plus d’un missionnaire qui a profité de son travail et de ses vastes connaissances de «sa nouvelle langue non-écrite», pour présenter sa thèse de doctorat d’université. Bravo! Le missionnaire restera ainsi une véritable autorité au «top» de la culture, et sera estimé du peuple qu’il a appris à aimer et à servir. Il sera assi très apprécié du gouvernement du pays.

L’historique de la traduction de la Bible

Des traductions de la Bible ont été faites avant l’ère chrétienne. Vers 250 av. J.-C., des Juifs de la très grande communauté israélite d’Alexandrie en Egypte, ont traduit l’ A. T .en grec. Cette version s’appelle la Septante, (connue sous le sigle «LXX»), et s’est répandue dans tous les pays du bassin méditerranéen oriental où se trouvaient des communautés juives, issues de la Diaspora. La LXX était «la Parole de Dieu» de l’Eglise primitive, et Paul, dans ses épîtres, la cite plus fréquemment que le texte hébraïque. Il existerait d’autre versions grecques, ainsi que des Targums (sorte de paraphrase en araméen, langue proche de 1’hébreu, et parlée par les Juifs de la Palestine).

La Réforme et après

Au moment de la Réforme, l’élément le plus important – et loin au-dessus de toute la portée sociologique de ce réveil – fut le retour à la Bible. Les traductions de celle-ci se multiplièrent alors, et au moins deux d’entre elles, – celle de Martin Luther, en allemand, et celle de la Version autorisée du King James d’Angleterre, ont jeté les bases et ont façonné tout la langue de ces peuples, tant le génie de la traduction faisait autorité. Puis, lors de la Contre-Réforme, les catholiques, à leur tour, s’y mettaient aussi. Là, la version en «vieil françois», (le N.T. en 1667; l’A.T. en 1696), de Lemaistre de Sacy – qui était d’ailleurs d’origine huguenote – a remporté une grande victoire littéraire. Le poète Jean Racine en était tant influencé que ses deux pièces, Athalie et Esther, en furent inspirées.

Au X Xe siècle

C’est depuis la deuxième guerre mondiale que la traduction de la Bible en français a pris un nouvel élan. Du côté catholique, les Moines de Maredsous en Belgique, le Cardinal Liénart de Lille et l’Ecole Biblique de Jérusalem, ont chacun sorti leur version. Elles ont été suivies plus tard par celles du chanoine Osty et de Pierre de Beaumont, et d’autres encore. Les protestants, surtout l’aile évangélique, se sont concentrés davantage sur une nouvelle forme de version, appliquant les principes de traduction de l’Américain Eugène Nida. Il s’agit de ne pas traduire littéralement (Darby), ou littérairement (Segond, la Colombe), mais de surtout rendre le texte compréhensible. Ce principe, dit de «l’équivalence dynamique», est excellent. Il permet au non-croyant et au lecteur inhabitué de toujours saisir le sens du texte hébreu et grec. Dans ces versions (le F.C., Bible du Semeur, le Livre), les hébraïsmes et hellénismes disparaissent, mais le sens des idiomes est présenté dans un langage clair et moderne. Il s’agit néanmoins d’une vraie traduction.

Le principe de «l’équivalence directe» (2)

Par contre, le principe de l’équivalence directe, ou complète, dans la traduction de la Parole de Dieu, est tout autant nécessaire. Autrement -oui, encore une foi – le sens exact pourrait nous échapper! Si les versions visant seulement la compréhensibilité du texte biblique se prévalaient complètement, le chrétien qui voudrait approfondir les paroles du Seigneur, pourrait se trouver lésé.

Par exemple, le verset: Heureux ceux qui procurent la paix, car ils seront appelés fils de Dieu (Mat 5.9, la C.) est rendu dans le F.C., Heureux ceux qui créent la paix autour d’eux, car Dieu les appellera ses fils. Si le sens semble être clair dans le F.C., ce n’est pas vraiment ce que dit le texte original dans le grec, qu’on trouve justement dans la Colombe. La forme passive «seront appelés» inclut une autre pensée: Dieu pourrait ne pas être le seul qui les appelle ses fils.

Pour la traduction de certains termes également, la différence est parfois grande. Le message de Jean-Baptiste: Repentez-vous… (dans la C.) devient: Changez de comportement (dans le F.C.). Mais le terme «repentance» signifie, dans le grec, un changement de pensée, de mentalité, ce qui produit par la suite un changement de comportement. Ce changement de comportement est reconnu nécessaire par Jean-Baptiste, qui dira aussi: Produisez donc des fruits dignes de la repentance (la C., Luc 3.8), tandis que le F.C. traduit: Accomplissez des actes qui montrent que vous avez changé de comportement. Cette traduction comporte presque un pléonasme.

«Le changement de comportement» du F.C. a donc devancé la pensée du Saint-Esprit, et a occulté pour ainsi dire la source du changement qui est la pensée, la mentalité, donc la volonté de l’homme. Le terme «repentance» est certainement plus juste, mais celui qui annonce la Bible aura le devoir le l’expliquer.

En même temps, une version de complète équivalence comme celle de Chouraqui, va bien trop loin et finalement obscurcit le sens de la Parole de Dieu – même si ceux qui déjà connaissent bien le texte biblique apprécient son pittoresque.

Versions oecuméniques

Il existe aussi plusieurs versions oecuméniques, dont la principale est certainement la TOB (Traduction Oecuménique de la Bible). Il s’agit là probablement de l’un des rares bons fruits du mouvement oecuménique, à moins que l’on y inclue l’esprit de tolérance envers les «frères séparés» que Vatican II a engendré. La TOB, cependant sert plutôt à la communauté catholique, l’ encourageant à lire davantage la Parole.

Dans la TOB, les livres et chapitres apocryphes (3), sont en principe groupés ensemble et placés entre les deux Testaments, ce qui aide celui ou celle qui débute sa lecture de la Bible à les reconnaître, et… à les éviter plutôt. Mais dans les versions Maredsous, Liénaft et Jérusalem, les livres apocryphes sont mélangés aux textes des livres canoniques, et par conséquent, le jeune enfant de Dieu peut tout confondre. J’ai une fois constaté qu’une chrétienne, dans une librairie évangélique a malencontreusement vendu l’édition oecuménique du F.C. contenant donc les apocryphes, à une jeune femme qui cherchait Dieu. J’avais par la suite le fâcheux problème d’expliquer à cette jeune femme que certains livres de sa nouvelle Bible n’ont pas été inspirés du Saint-Esprit! La difficulté fut grande. Et comment devrais-je dire que la soeur lui avait vendu une «mauvaise» Bible? Dans le F .C., les livres apocryphes sont quand même groupés ensemble entre les deux Testaments.

Editons annotées

Autrefois la gloire des éditions protestantes de la Bible a été de les imprimer sans notes explicatives. La Parole elle-même, pensaient les réformateurs, était suffisamment claire. Par contre, celles éditées par les imprimeurs catholiques comportaient des notes, surtout celles de la Contre-Réforme. La hiérarchie romaine craignait la clarté toute simple du texte de la Bible. Mais avec «les arguments et les réflexions» de J.-F. Ostervald, introduits dans les Bibles protestantes au début du XVIIIe siècle, les Protestants ont commencé à faire machine arrière. Aujourd’hui, les éditions telles que Scoffield et Thompson surabondent en annotations, commentaires explicatifs, introductions, vocabulaires, glossaires et schémas.

Si. en principe ces ajouts, tout en laissant le texte intact, aident l’étudiant de la Bible à cerner plus facilement le plan d’ensemble de la volonté de Dieu contenu dans la Bible, nous devons bien faire attention aux notes accompagnant les versions catholiques et oecuméniques. Celles qui sont archéologiques, historiques et géographiques, conviennent fort bien. Cependant, d’autres d’ordre dogmatique et ecclésiologique sont tout à fait tendancieuses et présentent aussi parfois le point de vue de la théologie libérale, critique et moderniste, tordant le sens de l’Ecriture. Cette tendance de tordre le sens des Ecritures existait autrefois (voir 2 Pierre 3.16): nous n’en sommes malheureusement pas exempts aujourd’hui.

A propos, il serait plus sage de mettre votre version Témoin de Jéhovah au feu, si vous en avez une, à moins que vous ne la gardiez pour confondre ces «Témoins» au moment où ils frappent à votre porte. Pour certains versets, tel que Jean 3.16, le sens est bien rendu, mais pour d’autres versets le sens exact est non seulement faussé mais même carrément contredit par des paroles mensongères (4).

Quelle version utiliser?

Tout dépend du travail que le Maître vous donne à faire!

Si vous devez visiter une personne inconvertie et âgée ou encore un immigrant, ignorant toujours les nuances de la langue qu’ il est en train d’ apprendre, et qui de plus ne connaît pratiquement rien sur le Dieu de la Bible, surtout ne partez pas lui rendre visite avec la version de Chouraqui dans votre serviette! Servez-vous plutôt du F.C. ou de la Bible du Semeur.

S’il s’agit d’un chrétien âgé ou d’un jeune enfant de Dieu, la P.V. vous sera certainement un bon outil de travail. Même quand vous partez à l’étude biblique, la P. V. s’avérera précieuse.

Cependant, au moment de votre culte personnel, il nous semble que la C., la Scoffield, ou la Thompson seraient plus indiquées, car les notes pourraient vous aider dans votre méditation du texte. Sans hésitation nous proclamons que la Parole a été conçue, dans son fond et par sa forme, pour être étudiée, et c’est tout exprès que le St-Esprit a fait écrire à travers les écrivains sacrés des textes difficiles, voire obscurs, afin de nous amener à la réflexion profonde à leur sujet. L’immense champ qu’est cette Parole de Dieu ne produira beaucoup de fruits que s’il est sérieusement labouré. Les plus précieux trésors de la Parole n’apparaissent qu’après le bêchage, l’ensemencement et ensuite le mûrissement de l’esprit.

Conclusion

En terminant ces remarques au sujet des versions nombreuses de la Bible qui sont à notre disposition, nous ne pouvons que vous encourager à devenir des ouvriers qui n’ont pas à rougir, dispensant avec droiture la parole de la vérité (2 Tim 2.15).

Toutes les versions bonnes, exactes et utiles que nous ont légués les savants capables de traduire la Bible, constituent pour nous un héritage spirituel des plus précieux. Elles contribuent grandement à ce que souhaite Paul pour son enfant spirituel Timothée, énoncé dans le verset ci-dessus. Pourvu que nous les utilisions.

Notes

1Au 31 décembre 1990
318 langues possèdent la Bible entière
726 langues possèdent le N.T.
902 langues possèdent au moins un livre de la Bible
Ces 1946 langues sont des langues maternelles de 80% de l’humanité. (Chiffres donnés par «La Bible dans le monde» no 154, le! » trimestre 1991).
2 Le livret anglais «Complete Equivalence in Bible Translation» par le Dr James Price explique ce principe. 1987. Thomas Nelson Publishers, Nashville, USA.
3 Les apocryphes: Il s’agit de livres religieux juifs écrits vers lafin de l’époque de l’A.T., et qui n’ont pas été reconnus par le peuple juif comme faisant partie du Canon de l’A.T. Cependant au XVle siècle, le magistère de l’Eglise romaine, au Concile de Trente, les a acceptés dans sa Bfble, la Vulgate, pour des raisons évidentes – certaines doctrines qui s’y trouvent militent contre le protestantisme. Le substantif «moderne» pour ces livres est «deutéro-canoniques» – ça sonne moins faux! – mais autrefois, au XVllle siècle et avant, tout le monde les appelait «apocryphes» (= cachés quant à leurs origines).
4 Le petit livre «Les Sainte Ecritures.., une falsification» expose très clairement les textes de la Bible qui ont été falsifiés par les Témoins de Jéhovah. A obtenir à: Diffusion de l’Evangile, 70, Rue de la Gardiette; F -13013 Marseille

P.W.

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