PROMESSES
La Bible mentionne quelques hommes qui se sont donné la mort. S’agit-il alors de suicides ? Ce n’est pas le cas de tous. Certains s’ôtent la vie : désespérés, ils veulent mettre un terme à leur existence ; d’autres donnent leur vie : ils acceptent la mort comme un moyen de servir Dieu ou de protéger la vie d’autres personnes.
Dans la première catégorie, on trouve des hommes qui se sont suicidés pour échapper aux conséquences de leurs actes, ou en finir avec leur mal-être, leurs remords stériles. Car les remords ne sont pas une vraie repentance où l’on a pris conscience de la gravité de son péché et où l’on s’humilie sincèrement devant Dieu ; ils n’amènent pas à confesser le péché devant Dieu, ils ne suffisent pas pour recevoir son pardon (Rom 2.4; 2 Pi 3.9). Le remords, c’est la tristesse causée par le résultat de son iniquité, alors qu’elle devrait l’être par l’offense faite à Dieu et par le mal occasionné à autrui. Sans confession, pas de pardon, pas d’espérance : cet accablement ne peut être apaisé, il ne peut que conduire à la mort (2 Cor 7.10).
Dans la seconde catégorie, la mort est acceptée comme un sacrifice permettant de vaincre l’ennemi, d’ouvrir les trésors de la bonté divine à notre prochain. C’est un don de soi, c’est aimer selon Dieu, sans limite (cf. Jean 3.1), en action et en vérité ! (1 Jean 3.18).
Distinguons cinq cas différents.
S’ôter la vie
• Abimélec, fils de Gédéon, a mis à mort ses frères pour prendre le pouvoir (Jug 9.1-6). L’Éternel ne peut oublier cet acte odieux. Ainsi, lors d’un siège, il a le crâne fracassé par un morceau de pierre jeté par une femme. Alors qu’il est en train de mourir, il refuse de saisir cette ultime occasion pour manifester un quelconque regret ou repentir. Non ! ce qui compte à ses yeux c’est de ne pas perdre la face.
Lui, le roi, être battu par une femme… quelle honte ! Il ordonne donc à son porteur d’armes de le transpercer de son épée (Jug 9.54). Cette fin tragique n’a rien de noble ou d’héroïque. Elle ne relève en rien l’image de cet homme violent et imbu de sa personne.
• Achitophel, conseiller d’Absalom, préfère se donner la mort en s’étranglant plutôt que d’affronter les conséquences de sa trahison envers le roi David (1 Sam 17.23). Quand il comprend que son plan rusé pour tuer David ne sera pas suivi par Absalom, il décide de se donner la mort, ne pouvant supporter l’affront d’un désaveu.
• Saül, roi d’Israël, a bien débuté ; mais il s’enferme ensuite dans la désobéissance envers Dieu. Son parcours se termine lamentablement sur la montagne de Guilboa. Rejeté par Dieu à cause de ses péchés et de son obstination, il est acculé par les Philistins en ce dernier combat. Grièvement blessé, il demande à son porteur d’armes de mettre fin à ses jours. Tremblant devant son monarque, ce dernier n’ose pas … ce qui pousse Saül à se jeter lui-même sur son épée (1 Sam 31.4). Le serviteur, par un acte d’imitation ou de désespoir, se suicide de la même manière. Dans cette scène tragique, c’est la peur de tomber entre les mains des ennemis, la peur d’être humilié, battu, torturé et cruellement mis à mort qui l’emporte.
• Zimri, conspirateur et meurtrier de son roi, voyant qu’à son tour il allait être renversé et tué, se retire dans son palais et le brûle sur lui (1 Rois 16.18). C’est ainsi qu’il meurt à cause des péchés qu’il avait commis.
• Judas, disciple de Jésus, troublé et pris de vains remords pour sa trahison, essaie de revenir en arrière. Devant le refus des Juifs, il leur rapporte leur argent et va se pendre (Mat 27.5).
Souhaiter la mort
• L’épouse de Job, accablée par le deuil et le dénuement, pousse son mari à se laisser mourir… voire plus. Job reste ferme. Il ne cède pas à la tentation d’en finir. Et même s’il regrette, dans son chagrin, le jour de sa naissance (Job 3.1), il est consolé par Dieu et béni durant le reste de ses jours.
• Élie, après une éclatante victoire sur l’idolâtrie, en vient à demander la mort parce qu’il se croit à tort isolé face aux menaces sur sa vie (1 Rois 19). L’Éternel le réconforte et lui fait comprendre qu’il n’a pas à décider lui-même du moment de son départ.
• Jonas est repris par l’Éternel pour avoir demandé la mort plutôt que de voir ceux qu’il considérait comme des ennemis être les bénéficiaires de la bonté de Dieu (Jon 4). Son cœur s’irrite de ce que Dieu ne faisait pas de différence, de ce qu’il était également bon envers les méchants et leur faisait grâce s’ils se repentaient. Est-il aussi irrité en constatant que le jugement qu’il a annoncé ne s’est pas produit ? Être déçu de Dieu, par manque d’amour, est un réel danger qui conduit à de telles demandes insensées.
Être proche de la mort
• Paul, apôtre et serviteur de Jésus Christ, a souffert en bien des manières pour le nom de son Maître (Act 9.16). Il en arrive au point de se sentir tout proche de la mort (« désespérer de vivre », 2 Cor 1.8-10). Mais il reçoit les forces au moment opportun, tout au long de sa carrière terrestre ; il peut alors déclarer que le Seigneur s’est tenu à ses côtés et qu’il le délivrera de toutes mauvaises actions (2 Tim 4.17-18).
Donner sa vie
• Samson a connu beaucoup d’écarts et de chutes dans sa vie de serviteur de Dieu ; mais il la termine par ce qui n’est pas un suicide mais bien plutôt un acte héroïque, un sacrifice. L’Éternel lui permet de remporter une dernière victoire donnant sa vie pour la délivrance de son peuple. Dans sa mort volontaire sous les décombres du palais des Philistins, il remporte une grande victoire sur ceux-ci (Jug 16.22-31).
• Jésus, Fils de Dieu et fils de l’homme, le seul parfait en tous points, a donné sa vie pour glorifier son Dieu et satisfaire sa justice, pour nous délivrer de la main de notre ennemi (Héb 2.15), de la puissance des ténèbres (Col 1.13), de la colère à venir (1 Thes 1.10). Il a accepté de mourir pour nous associer à sa mort et à sa résurrection, pour nous ouvrir les immenses richesses de la grâce de Dieu, pour nous donner, par-delà la mort physique, un sûr et éternel avenir avec lui.
Le Seigneur Jésus a donné sa vie (Jean 10.17-18), personne ne lui a prise ! Il s’est livré en sacrifice à Dieu. S’il a accepté de mourir, c’est pour nous sauver. S’il s’est laissé conduire au supplice et n’a en rien esquivé cette mort humiliante et honteuse, alors qu’il avait le pouvoir de le faire (Mat 26.53), c’est par amour pour son Dieu et Père et par amour pour sa créature.
Conclusion : et nous ?
Fils et filles de Dieu, prenons garde à nos voies et à nos pensées… au renouvellement de celles-ci. Ne laissons pas les fruits de notre esprit se gâter et amener la corruption de la mort dans notre vie. Rejetons toute idée qui chérirait la mort physique comme délivrance à l’adversité, à la souffrance et aux soucis. Certes, il peut arriver que, dans des circonstances extrêmes, nous aspirions à quitter notre corps de misère, mais notre espérance doit être plus fondée sur le fait d’être revêtu de la plénitude de la grâce de Dieu que d’être délivré des souffrances de cette terre (2 Cor 5.1-4).
Frères et sœurs en Jésus Christ, nous connaissons le véritable amour en ce que Jésus a laissé sa vie pour nous et que nous devons laisser nos vies pour ceux et celles de la famille de la foi (1 Jean 3.16-17). Si cela doit aller jusqu’au sacrifice de notre vie, que Dieu nous en donne l’acceptation et la force, comme c’est le cas encore aujourd’hui pour plusieurs des nôtres dans les persécutions et guerres ; mais n’acceptons jamais l’idée de provoquer notre mort pour être délivré de nos angoisses et détresses. « Mes temps sont en ta main » (Psaumes 31.15).
Pour aller plus loin : Henri Blocher, Du suicide, Ichtus – https://evangile21.thegospelcoalition.org/article/n-7-novembre-1970-du-suicide/
Lorsqu’ils entendirent parler de résurrection des morts, les uns se moquèrent, et les autres dirent : Nous t’entendrons là-dessus une autre fois. Ainsi Paul se retira du milieu d’eux. Quelques-uns néanmoins s’attachèrent à lui et crurent, Denys l’aréopagite, une femme nommée Damaris, et d’autres avec eux. (Actes 17.32-34)
Qui était ce Denys qui, lors du passage de l’apôtre Paul à Athènes, saisit l’occasion d’entendre l’évangile et d’y croire ? Ce nom fait référence au dieu grec du vin, Dionysos. Son surnom (l’aréopagite) semble signifier qu’il était un habitué de la place publique où les citoyens passaient et perdaient pas mal de temps à l’affût de toutes sortes de nouvelles (Act 17.21).
Ce type d’homme oisif n’est-il pas une image contemporaine de tous ceux et celles qui se nourrissent d’informations en tous genres, qui se gavent des médias ? Ne dit-on pas que trop d’informations tue l’information ? À force de vouloir être au courant de tout, l’homme risque de passer à côté de la bonne nouvelle, celle qui peut révolutionner sa vie.
Parmi tous les discoureurs et philosophes de tout bois, ceux qui voulaient atteindre les sommets des connaissances et de la sagesse humaine tout en se perdant dans les dédales des raisonnements humains, la voix de Dieu se fit entendre par un de ses serviteurs. Cette prédication de l’apôtre Paul leur fut présentée comme une sortie à ces labyrinthes à corps et à esprits perdus. Par lui, Dieu leur disait en quelque sorte : « Cessez de courir d’une idole à l’autre, d’une doctrine à l’autre, d’une mode à l’autre. Je suis le grand Dieu Créateur, celui qui vous est encore inconnu malgré vos connaissances, celui à qui vous devrez rendre des comptes si vous n’acceptez pas Jésus, lequel est ressuscité d’entre les morts. »
La résurrection ! Une folie pour la plupart de ces hommes, pourtant avides de toute nouveauté, du moment qu’elle ne les place pas devant leur culpabilité et la justice divine. C’est ainsi que bon nombre des auditeurs de Paul voulurent reporter à plus tard cette discussion. Ils préféraient continuer à se fatiguer en vain dans leurs explorations de la sagesse humaine. L’homme est avide d’entendre et de voir tant que cela ne concerne pas les choses de Dieu (Ecc 1.8,13).
Parmi cette foule, se trouvait Denys. Il voulut en savoir plus, en se détachant de ses comparses et de l’intérêt superficiel qu’ils avaient manifesté dans un premier temps. Convaincu par les paroles de Dieu dont l’apôtre était le messager, il quitta alors les discours philosophiques pour s’attacher à Christ.
Ce ne fut probablement pas facile pour Denys de tourner le dos à son ancienne vie, à ses relations, à ses habitudes, pour commencer une nouvelle existence où des persifleurs n’allaient pas manquer de se moquer de ses nouvelles valeurs et manières de vivre, mais Denys, Damaris et quelques autres, prirent la plus importante décision qui soit et s’engagèrent dans le chemin de la vie qui se termine auprès de Dieu tandis que les autres sentiers se perdent dans les méandres du fleuve de la vanité qui se jette dans la mort.
Jésus est mon secours,
Le soutien de mon âme.
En suivant mon parcours,
Je m’éclaire à sa flamme.
Jésus est mon ami.
Jamais, il ne délaisse.
À lui, je suis soumis
Dans ma grande faiblesse.
Jésus est mon Sauveur,
Mon tout-puissant soutien.
De qui aurais-je peur
Quand je lui appartiens ?
Jésus est mon espoir,
Ma vie, mon avenir.
Dans la nuit la plus noire,
Jésus m’aide à tenir.
Peut-on déclarer sa joie en Dieu, alors qu’une grande partie de l’humanité est plongée dans les peines et les pleurs ? Sans parler des fléaux que sont les guerres (parfois même de religions), les famines, les épidémies, etc. Faudrait-il refuser de voir les familles déchirées, les divorces, le chômage, les injustices, les incivilités journalières, les rancunes, les mesquineries et autres méchancetés quotidiennes, la jalousie et l’égoïsme ambiants ? Face à un tel constat, peut-on encore être des chantres de la joie ?
Plus que jamais ! Ceux et celles qui jouissent du don et de la révélation du Fils unique de Dieu, doivent être des ambassadeurs du Dieu bienheureux qui appelle l’humanité à la joie d’être ses bien-aimés enfants.
Que de sujets de joie dans la vie d’un chrétien ! Le Père, le Fils et le Saint Esprit sont pour lui. La foi en un Dieu vivant et puissant lui a été donnée, l’amour de Dieu a été versé dans son cœur par l’Esprit, et l’espérance d’être à jamais avec Dieu, entourant le Fils, illumine sa vie.
En Dieu, le chrétien né de nouveau trouve un céleste Père qui, bien mieux qu’un père dans la chair, aime et prend soin de ses enfants.
En Jésus, le Fils éternel du Père, le chrétien sait qu’il a un sauveur et un ami qui ne fait jamais défaut, même au sein des circonstances les plus difficiles de la vie.
L’Esprit de Dieu, vient faire sa demeure dans le chrétien pour qu’il vive selon la volonté de Dieu. Et vivre selon cette volonté procure une joie certaine, quoi qu’en pensent ceux qui sont étrangers à la vie divine : « C’est une joie pour le juste de pratiquer la justice. » (Prov 21.15)
« Servez l’Éternel, avec joie. » (Ps 100.2) Ainsi, si nous voulons jouir de plus de joie, il nous faut le servir plus ! Voilà le secret de la joie du chrétien dans un monde d’insatisfactions et de mécontents. À son service, Dieu nous offre plus de joie à goûter et à partager que les riches de cette terre n’en auront jamais dans leurs biens temporels (Ps 4.7). Pour être joyeux et le rester, il faut donc nous tourner vers les intérêts de Dieu et vers ceux de notre prochain, ne pas regarder à soi mais au royaume de Dieu qui est la justice, la paix et la joie, par le Saint Esprit (Romains 14.17).
Oui, mes frères et sœurs en Christ, soyons remplis de joie et du Saint Esprit (Actes 13.52) !
SUICIDE OU SACRIFICE ?
Il existe plusieurs types de morts. La plus troublante est celle que l’on s’applique contre soi-même : le suicide (de sui : soi et caedere : tuer : « le meurtre de soi »). La Bible n’est pas silencieuse à ce sujet. Plusieurs récits font part d’hommes qui se sont donné la mort. La question est de savoir s’ils sont pour autant suicidaires ? Ce ne semble pas le cas de tous. Nous allons voir que certains envisagent la mort comme une fin, tandis que d’autres pensent la mort comme un moyen.
1. La mort comme une fin
Les hommes de cette première catégorie se sont suicidés pour eux-mêmes. Ils ont — faussement — cru pouvoir se délivrer des conséquences de leurs actes. Ils voulaient en finir avec leur mal-être ou avec leurs remords.
Remords stériles, du reste. Car si le remord pousse à s’apitoyer sur ses actes, il ne provoque pas forcément la prise de conscience du péché. C’est la repentance qui permet de s’humilier sincèrement devant Dieu, demandant ce pardon qu’il ne peut accorder qu’à tout pécheur contrit, implorant sa grâce (Rom 2.4 ; 2 Pi 3.9). La repentance donne aussi à cette âme la volonté de changer le cap de sa vie, avec l’aide de Dieu.
Le remord ne va pas si loin. C’est la tristesse causée par le résultat de son iniquité, alors qu’elle devrait l’être par l’offense faite à Dieu et le mal occasionné à autrui. Cet accablement, dévoyé par les modes de pensée de ce monde sans Dieu, ne peut que conduire à la mort (2 Corinthiens 7.10).
Quelques exemples
Abimélec, fils de Gédéon, a mis à mort ses frères pour prendre le pouvoir (Juges 9.1-6). L’Éternel ne peut oublier cet acte odieux. Ainsi, lors d’un siège, Abimélec a le crâne fracassé par un morceau de pierre jeté par une femme. Alors, mourant, il ne veut pas saisir cette ultime occasion pour manifester un quelconque regret. Non ! ce qui compte à ses yeux, c’est de ne pas perdre la face. Lui, le roi, être battu par une femme… quelle honte ! Il ordonne donc à son porteur d’armes de le transpercer de son épée (Juges 9.54). Cette fin tragique n’a rien de noble ou d’héroïque. Elle ne relève en rien l’image de cet homme violent et imbu de sa personne.
Saül débute bien comme roi d’Israël — tant qu’il est humble à ses yeux. Il suit le chemin de la volonté propre et finit lamentablement sur la montagne de Guilboa. Rejeté par Dieu à cause de ses péchés et de son obstination, il est acculé par les Philistins lors du dernier combat de sa vie égoïste et jalouse. Grièvement blessé, il demande à son porteur d’armes de mettre fin à ses jours. Tremblant, ce dernier n’ose pas… ce qui pousse Saül à se jeter lui-même sur son épée (1 Samuel 31.4). Le serviteur imite ensuite son maître. Dans cette scène qui a conduit à ces « meurtres », c’est la peur d’être livré à ses ennemis, la peur d’être humilié, battu, torturé et mis à mort qui l’emporte.
Achitophel, conseiller d’Absalom, préfère se donner la mort en s’étranglant plutôt que d’affronter les conséquences de sa trahison envers le roi David (2 Samuel 15.12,31 ; 17.23). Quand il comprend que son plan astucieux pour tuer David ne serait pas suivi par Absalom, il décide de mourir de peur de devoir rendre compte un jour à l’ami trahi.
Zimri, conspirateur et meurtrier de son roi, voyant qu’à son tour il va être renversé et tué, se retire dans son palais et le brûle sur lui (1 Rois 16.18-19). C’est ainsi qu’il meurt à cause de ses péchés !
Judas, disciple de Jésus, troublé et pris de vains remords, rapporte l’argent de sa trahison pour ensuite aller se pendre (Matthieu 27.5). Au-delà de cette terre, il devra pourtant poursuivre son existence loin de Dieu avec ces deux crimes, lui qui est appelé le « fils de perdition » (Jean 17.12).
2. La mort comme un moyen
La seconde catégorie d’hommes exprime autre chose : le sacrifice — au sens de « renoncement à soi » — est le seul chemin pour vaincre l’ennemi, pour ouvrir les trésors de la bonté divine à notre prochain, pour aimer selon Dieu, en action et en vérité !
Quelques exemples
Samson, fils de Manoach, est vu par certains comme ayant commis beaucoup d’écarts et de chutes dans sa vie de serviteur de Dieu1 . Il termine cependant par ce qui n’est pas un suicide mais bien plutôt un sacrifice. L’Éternel lui permet de remporter une dernière victoire en s’offrant pour la délivrance de son peuple. Par sa mort, sous les décombres du palais des Philistins, il entraîne bon nombre de ceux-ci (Juges 16.22-31).
Jésus, Fils de Dieu, unique et parfait en toutes choses, a donné sa vie pour glorifier son Dieu et satisfaire sa justice, pour nous délivrer de la main de l’ennemi de nos âmes (Hébreux 2.15), pour nous délivrer de la puissance des ténèbres (Colossiens 1.13), pour nous délivrer de la colère à venir (1 Thes 1.10), pour nous associer à sa mort et à sa résurrection, pour nous ouvrir les immenses richesses de la grâce de Dieu, pour nous donner, par-delà la mort physique, un sûr et éternel avenir avec lui.
Le Seigneur Jésus a donné sa vie (Jean 10.17-18), personne ne la lui a prise ! Il s’est livré en sacrifice à Dieu. S’il a accepté de mourir c’est pour nous sauver. S’il s’est laissé conduire au supplice et ne s’est esquivé en rien à cette mort ignominieuse, alors qu’il avait le pouvoir de le faire (Matthieu 26.53), c’est par amour pour son Dieu et Père et par amour pour sa créature.
3. La mort comme tentation finale de l’homme découragé
Job, accablé par le deuil et le dénuement, est poussé par son épouse folle de tristesse ou de rage à se laisser mourir (Job 2.9). Job reste ferme. Il ne cède pas à la tentation d’en finir. Et même s’il regrette, dans son chagrin, le jour de sa naissance (Job 3.1), il est consolé par Dieu et béni durant le reste de ses jours.
Élie, après une éclatante victoire sur l’idolâtrie, en vient à demander la mort parce qu’il se croit, à tort, seul contre vents et marées (1 Rois 19). L’Éternel doit alors remettre ses idées en place et lui révéler qu’il ne connaît pas tout et qu’il ne peut pas juger de la sorte. L’Éternel a encore besoin de lui. Élie n’a pas à décider du moment de son départ.
Jonas, fils d’Amitthaï, doit être repris par l’Éternel pour avoir demandé la mort plutôt que de voir ses ennemis bénéficier de la bonté de Dieu (Jonas 4). Son cœur, exclusif dans ses amitiés et ses affinités, s’irrite de ce que Dieu ne fasse pas de différences, de ce qu’il soit également bon envers les méchants et leur fasse grâce s’ils se repentent.
Nous, fils et filles de Dieu, devons aussi prendre garde à nos pensées. Laissons Dieu les renouveler en nous (Rom 12.2). Ne laissons pas les fruits de notre esprit se gâter et amener la corruption de la mort dans notre vie. Rejetons toute idée qui chérirait la mort physique comme délivrance de l’adversité et des soucis. Il peut arriver que, dans des circonstances extrêmes, nous aspirions à quitter notre corps de misère. Mais notre espérance repose sur un fait grandiose : non pas tant la délivrance des infirmités de cette terre, mais surtout le fait d’être revêtus de la plénitude de la grâce de Dieu (2 Corinthiens 5.1-4).
Conclusion
Il y a donc ceux qui se prennent la vie et ceux qui demandent à Dieu de leur prendre la vie. Il y a ceux visent un objectif plus grand que leur vie, et ceux qui portent comme une charge trop lourde le poids de leur vie.
Certains hommes de Dieu sont allés plus loin. Découragés, ils ont été tentés de demander à Dieu d’abréger leur souffrance. Ne critiquons pas cette volonté émanant d’hommes écrasés par les circonstances, même si le passage à l’acte doit nous choquer. Mais montrons bien plutôt à nos contemporains un modèle d’abnégation, à la suite de notre bon Berger.
Nous, frères et sœurs en Jésus-Christ, nous connaissons le véritable amour en ce que Jésus a laissé sa vie pour nous et que nous devons laisser nos vies pour ceux et celles de la famille de la foi (1 Jean 3.16-17 ; Gal 6.10).
La vie chrétienne est une course dont le départ est la Croix. Cependant, il ne s’agit pas d’une série de sprints où l’on se contente d’atteindre des buts à court terme. C’est bien plutôt un mélange de marathon et de course de relais.
Un marathon parce que c’est une course de fond qui demande de la patience, de la persévérance, de l’endurance, à la grande différence que l’on n’arrive pas, spirituellement parlant, exténué ou même à l’agonie comme ce messager grec qui courut jusqu’à l’Aréopage d’Athènes au prix de sa vie. C’est la vie éternelle qui se trouve par-delà la ligne d’arrivée, et les forces nécessaires sont données à ceux qui comptent sur Dieu (Es 40.31). Qu’il est beau de voir des chrétiens courir sans s’arrêter, poursuivre sans se lasser, malgré le poids des ans (2 Cor 4.16), et achever ainsi la course (2 Tim 4.7).
À la faveur de leur fidèle engagement, le témoin peut-être transmis à d’autres pour que l’étendard de la foi continue à flotter à la vue de tous. Il y a donc deux courses en une. Celle de chaque croyant, en étroite relation avec son Seigneur, et celle de l’Église au travers des temps.
Comme les Saintes Écritures nous l’enseignent, nous ne devons pas perdre de vue ces deux aspects de notre parcours terrestre afin d’être de bons relayeurs de la foi, engagés dans la course qui est devant nous et que d’autres poursuivront jusqu’au retour de Jésus-Christ – pour qui et vers qui nous courrons avec patience.
Commentaires et sermons brossent les portraits d’Abraham ou de Jacob, mais qu’en est-il du maillon manquant, Isaac ? Dans le plan divin, ce dernier est pourtant indispensable à l’accomplissement des promesses faites à son père, et à la bénédiction de la terre entière. Ce serviteur a certes une vie moins flamboyante, mais néanmoins pleine d’instructions et remarquable pour un trait particulier : la recherche et le maintien de la paix. Signe de faiblesse ou marque de sagesse ?
Les faiblesses et les fautes de ce serviteur de Dieu sont souvent relevées. S’il n’a pas été exempt de chutes – c’est là le lot de tous –, ses manquements n’ont pas pour autant prêté à conséquences comme ceux de son père par exemple. Voici un homme qui malgré des problèmes de couple a été fidèle et n’a pas pris d’autre femme ou de concubine ; qui malgré les vexations n’a pas pris les armes ; qui malgré les tentations n’a pas quitté la terre promise. Fidélité, douceur d’esprit, tempérance, patience, débonnaireté, persévérance sont-elles si peu pour qu’on lui intente un procès en faiblesse ? Le Nouveau Testament honore de telles vertus. Isaac aurait-il été un homme en avance sur son temps dans une période peu encline à de tels comportements ? Il différait certes de son père, mais Dieu ne cherchait pas un clone. Dieu nous jugera sur ce qu’il nous donne d’être et d’accomplir, et non sur ce que d’autres sont ou font.
Retour à la source
Au crépuscule d’une étape de sa vie, Isaac se promène dans les champs pour réfléchir. Il attend de lever les yeux sur sa future épouse et ses prochaines responsabilités (Gen 24.62-67). Il s’en revient de Lakhaï-roï. Ce lieu signifie le « puits du Vivant qui se révèle (ou qui me voit) ». Isaac s’est rendu là où le Dieu qui sonde les profondeurs du cœur (Pr 20.27) révèle sa volonté. Après la mort de son père, il décidera même d’habiter, avec son épouse, aux alentours de ce puits de Lakhaï-roï (Gen 25.11). Nous avons justement tous besoin de cette connaissance de Dieu, dans les grands comme dans les petits changements de nos vies.
Un chemin parsemé d’embûches et de bénédictions
Une famine le contraint à lever le camp et à se mettre en quête d’un endroit où survivre. L’Éternel l’avertit alors d’éviter l’Égypte (Gen 26.1-4). Il séjourne chez les Philistins. Dès lors, l’homme de Dieu prospère. Il augmente ses biens et le nombre de ses serviteurs au point de susciter jalousie et malveillance : on bouche les puits de son père. Que l’on sache l’importance de l’eau pour les hommes et les bêtes, et l’on comprendra combien l’envie peut facilement conduire à ses sœurs que sont fraude, méchanceté, dispute et querelle. Après les pensées coupables dissimulées et les sabotages à l’encontre d’Isaac survient le rejet officiel, public, lorsque Abimélec lui ordonne de quitter son royaume, bourbier de mensonge et de conflits.
Isaac prouve qu’il est un homme de paix. Il n’insiste pas sur le fait qu’il n’a fait de tort à personne, au contraire de ses détracteurs, qu’il n’a pas rendu le mal pour le mal alors que l’on a ravagé une partie de l’héritage terrestre de son père. Il quitte la ville sans menace même si, de l’aveu de ses ennemis, il est plus puissant qu’eux (Gen 26.12-17).
En paix avec Dieu et avec les hommes, il creuse à nouveau les puits que ses ennemis de l’ombre avaient bouchés. Il redonne à ces points d’eau les noms attribués par Abraham (Gen 26.18). Cela témoigne que le fils est aussi en paix avec l’action et la pensée de son père. Il poursuit l’œuvre commencée ; à sa manière il est vrai, et avec son caractère, mais dans une humble continuité. C’est pour nous un enseignement précieux, à notre époque où l’on abandonne aisément les sentiers anciens (Jér 6.16), où l’on se creuse des citernes qui ne retiennent ni l’eau ni la paix (Jér 2.13). La paix, justement, n’est ni dans l’immobilisme ni dans la nouveauté à tout prix ; elle est un principe actif et non passif. Il faut la rechercher, ce qui demande des efforts. Il faut creuser pour la trouver, et recreuser pour la retrouver. Il faut l’entretenir comme un puits, y retravailler quand elle a été recouverte par des monceaux de pierres.
Lorsque les serviteurs d’Isaac creusent un puits dans la vallée, les opposants ne tardent pas à revenir. Ils cherchent à s’approprier le fruit du travail d’autrui, mais plus encore ils cherchent à provoquer, à pousser à la faute celui qu’ils jalousent (Gen 26.19-20). Isaac est réellement homme de Dieu : il ne cède pas à la tentation de faire justice lui-même, alors qu’il en a les moyens. Une fois de plus, il n’insiste pas sur ses droits, et ce que beaucoup considèrent comme une faiblesse est au contraire un témoignage pacifique de la force que Dieu lui donne. Il lui est donné de résister au mal et plus encore de le surmonter par le bien (Rom 12.21) en leur cédant cette eau vive si importante pour les bergers.
Poursuivant la paix comme nous devons tous encore le faire aujourd’hui (Rom 12.18), Isaac leur laisse le point d’eau non sans l’appeler le puits de la dispute. Il se déplace et fait creuser à un autre endroit quand ses ennemis viennent à nouveau lui contester le fruit de son labeur. Avec la force d’En haut, il ne répond pas à ce qui est maintenant de l’opposition franche, du harcèlement. Il leur abandonne ce puits de la haine (Gen 26.21). Mais l’Éternel a en réserve pour lui un autre puits, bienfaisante récompense, où Isaac peut jouir d’un moment de paix (Gen 26.22), comme par la suite le peuple d’Israël trouvera un lieu de repos après l’amertume des eaux de Mara (Ex 15.22-27). Enfin un espace où vivre sans dispute, sans querelle, sans provocation, sans violence. Pourquoi ne pas s’y installer durablement après tant de peines, d’agacements et de retenues ?
Le sentier de la paix
Étonnant Isaac. Il sait qu’il doit encore se remettre en route et monter à Beer-Shéba. Il marche sur les traces de son père qui y avait creusé un puits, et surtout bâti un autel où il avait invoqué le Dieu d’éternité, aux desseins et promesses sûrs et véritables. Sans attendre, l’Éternel lui apparaît dans la nuit pour l’encourager, l’assurer de sa présence, de son action en sa faveur, et lui réitère la promesse faite à son père. Dans ce lieu béni, le fils adore. Il dresse sa tente et fait creuser un puits (Gen 26.23-25).
Le diable ne tarde jamais à revenir, quand bien même il se drape d’atours plus charmeurs. Abimélec, flanqué d’un conseiller et de son général, se présente tout en flatterie et en dissimulation. Isaac n’est pas dupe. L’ennemi ne change pas mais s’adapte au gré des circonstances. Abraham n’avait-il pas déjà eu affaire à ce même roi en ce même lieu ? N’avait-il pas repris ce monarque quant à sa propension à s’emparer de force des biens d’autrui ? Le puits de Beer-Shéba était à Abraham et Abimélec le sait très bien (Gen 21.22-34). Le roi de Guérar craint probablement la puissance du fils. En homme rusé, il veut tourner la situation à son avantage ou tout du moins en statu quo (Gen 26.26-30). Après avoir flatté, il se présente à son avantage. Il estime avoir été généreux en laissant partir Isaac sain et sauf. Expulser un hôte après avoir laissé ses sujets lui causer du tort, est-ce là un traitement de faveur ?
Le caractère pacifique d’Isaac se manifeste à nouveau. Il ne relève pas la duplicité de celui qui le hait et accepte de le laisser partir en paix après lui avoir juré qu’il ne lui fera pas de mal ni dans le présent, ni à l’avenir. Après avoir officialisé ce serment sans tarder, il renvoie son ennemi avec grâce. Alors, en ce même jour, comme pour manifester clairement son approbation, Dieu fait jaillir de l’eau au fond du puits que les serviteurs ont creusé. Ce point d’eau devient alors pour Isaac le puit du serment comme il l’avait déjà été pour son père.
Conclusion
Quel encouragement pour nous, à poursuivre, de génération en génération, la recherche de la paix et sa sauvegarde ! Se contenter de mentionner le puits de Shéba et le souvenir qui y était lié ne pouvait suffire à assurer le succès d’Isaac. De même, il nous faut recreuser les puits que nos devanciers dans la foi nous ont indiqués. L’ennemi a souvent travaillé à les faire disparaître.
« Retire-toi du mal, et fais le bien ; cherche la paix, et poursuis-la. » (Ps 34.14).
« Quand les voies d’un homme plaisent à l’Éternel, il met ses ennemis mêmes en paix avec lui. » (Pr 16.17).
Il n’est pas facile de poursuivre la paix, mais à la fin du chemin parsemé de pièges, d’embûches, de tristesses, d’exercices de foi, cette entreprise mène à la lumière divine qui manifeste toutes choses et éclaire le visage de ceux qui sont appelés fils ou filles de Dieu (Mat 5.9).
À la même époque, deux citoyens romains naissent au sein de l’Empire. Saul, issu d’une famille juive, voit le jour dans la ville de Tarse, au sud de la Turquie actuelle, tandis que Sénèque naît à Cordoue, en Espagne. Tous deux vont grandir et connaître les avantages d’une éducation intellectuelle privilégiée afin de les destiner à de hautes fonctions dans leur culture respective.
Jeune, Sénèque se rend à Rome pour y devenir l’élève de plusieurs maîtres dont Attale, qui enseigne la philosophie stoïcienne1 . Quant à Saul, il étudie à Jérusalem auprès du rabbin Gamaliel (Act 22.3).
Voilà deux personnes assoiffées d’idéal qui souhaitent vivre ce qu’elles emmagasinent et ne pas considérer qu’elles ont agi alors qu’elles ont seulement parlé. Saul et Sénèque s’engagent donc avec ardeur et enthousiasme, chacun dans la voie qui s’ouvre à lui ; l’un comme rabbin, docteur de la loi mosaïque, l’autre comme orateur éloquent, précepteur, conseiller à la cour impériale. Les deux chemins pris par ces deux contemporains illustrent les grandes différences entre la sagesse qui vient d’en haut, de Dieu, et celle qui provient de l’homme et de ses travaux.
Convaincus de ce qu’ils ont reçu comme enseignements, ces deux hommes ne se ménagent pas pour en être de dignes représentants. Saul va jusqu’à pourchasser les chrétiens, dans l’église naissante, les faisant mettre en prison ou même à mort (Act 8.3 ; 9.1). Rien ne semble l’arrêter dans son zèle, dans son désir d’être fidèle à ce qu’il tient pour la vérité — non pas que les principes, ordonnances et préceptes de la Torah, des prophètes et des psaumes, soient erronés mais il n’en saisit pas l’essence même. Sénèque, dont la renommée grandit à Rome, doit faire face aux jalousies qui prévalent à la cour impériale. Il n’est pas facile de vivre en tant que philosophe conséquent avec le message que l’on porte aux alentours du trône du pouvoir temporel.
Mais voilà que ces deux routes, semble-t-il toutes tracées, bifurquent et amorcent un virage inattendu. Saul est arrêté par Dieu à l’approche de la ville de Damas (Act 9). Par cette révélation divine, les écailles qui l’aveuglent tombent et il s’engage dès lors comme serviteur de Christ en laissant complètement tomber les honneurs et la reconnaissance qui auraient pu être siens. Quelques années plus tard, dans la cité romaine, à la suite de l’assassinat de l’empereur Caligula en 41, son successeur Claude exile Sénèque, le brillant orateur, en Corse, dans une retraite forcée loin des fastes du palais ; son éloignement durera huit années, bien longues pour cet homme de cour à la personnalité complexe, et conscient de ses contradictions.
Sénèque n’est pas le fondateur du stoïcisme, mais l’un de ces plus illustres porte-drapeaux, du moins quant à l’une de ses facettes. Ainsi, il ne cherche pas la souffrance pour l’endurer avec courage. Non, il fait tout pour l’éviter et si elle s’invite de force, alors il cherche dans la sagesse humaine les ressources pour pouvoir lui faire face, la surmonter et atteindre le repos de l’âme par un apprentissage du contrôle de lui-même. Sénèque croit en l’homme. Il parle comme si la source du mal n’est pas vraiment dans la nature humaine (au contraire de Saul, devenu l’apôtre Paul de Romains 7). Sénèque écrit sur le bonheur, l’idéal d’une vie qui vaut la peine d’être vécue, sur les attitudes à avoir devant la mort, face aux épreuves de l’existence. Cependant, ses conseils qui paraissent parfois bons, ne sont souvent que des maximes, des belles pensées dont les hommes aiment à se souvenir mais qui ne donnent aucune force en elles-mêmes pour traverser l’épreuve.
En 49, Sénèque est gracié et revient à Rome pour prendre la charge de précepteur auprès du fils de la nouvelle impératrice, Néron qui, sous son instigation, deviendra en 54, à l’âge de dix-sept ans, le nouvel empereur. Le philosophe est alors à l’apogée de sa carrière. Il est célèbre, riche, influent et ce jusqu’au sommet de l’empire.
Pendant ce temps, Paul, l’ancien pharisien aux intéressantes perspectives d’avenir, parcourt les routes de l’empire, et ce dans des conditions difficiles (2 Cor 11.23-28), sans notoriété officielle (2 Cor 6.9), sans biens terrestres tout en enrichissant les autres de la vraie grâce de Dieu (2 Cor 6.10). Cette vie peu enviable de l’extérieur est pourtant riche et extraordinaire quant à sa relation avec Dieu et aux fruits qui en découlent. S’il rencontre l’adversité, il ne regrette en rien son appel à servir Christ quand bien même cela le conduit devant les tribunaux, et notamment dans la ville de Corinthe, lorsqu’il comparaît à la demande des Juifs, devant le frère aîné de Sénèque qui répond au nom de Gallion, alors sénateur et proconsul d’Achaïe (Act 18.12-17).
En 60, comme prisonnier pour l’amour de Christ, Paul est incarcéré à Rome pour comparaître devant l’empereur en personne. Nous ne savons pas si Paul et Sénèque se sont rencontrés lors de ce séjour (voir encart), mais il est évident que Néron est complètement sorti du cadre de l’enseignement que son précepteur s’est efforcé de lui inculquer. En effet, Sénèque n’a pu, au fil des années, que constater la dérive de son ancien élève et son incapacité à contrôler ses excès grandissants et plus qu’inquiétants. À tel point qu’il a voulu se retirer de la cour, prendre de la distance, mais la permission de cette retraite lui fut refusée. Sénèque n’est pas un homme libre. Peut-être se déplace-t-il dans le palais et la ville sans être entravés par des liens au contraire de Paul (Phil 1.13), mais le seul homme libre des deux, affranchi du péché et des vanités de cette terre, c’est bien l’apôtre dont une des consolations est de savoir son disciple Timothée, son enfant quant à la foi, fidèle à l’enseignement qu’il lui a transmis.
Après la libération de Paul, Néron, orgueilleux et vaniteux, s’enfonce dans la mégalomanie. En 64, il fait arrêter et mettre à mort les chrétiens de la ville en les accusant de l’incendie qui a ravagé la cité. L’année suivante, un complot se fomente pour éliminer cet empereur cruel. La tentative échoue et Néron en profite pour se débarrasser de Sénèque en lui donnant l’ordre de mettre fin à ses jours, ce que ce dernier fait en s’ouvrant les veines. Triste fin que celle de cet homme ayant couru après les honneurs et les richesses temporelles tout en se faisant le porte-parole d’une certaine forme de sagesse humaine. Quelle doit être son amertume en quittant ainsi la scène poussé par la folie meurtrière de celui qu’il a instruit en vain dans les voies de la raison humaine ?
L’apôtre Paul, n’a pas été un orateur brillant et estimé (2 Cor 10.10), un homme de pouvoir. Il a plutôt choisi l’opprobre du Christ, l’estimant comme un plus grand trésor que tout ce qui est ici-bas (Phil 3.7-8). Il a combattu le bon combat et achève sa course terrestre avec l’approbation de Dieu (2 Tim 4.6-8) et l’assurance d’une vie éternelle en Christ.
« Cette parole est certaine et digne de toute acceptation ; car c’est pour cela que nous travaillons et que nous sommes dans l’opprobre, parce que nous espérons dans le Dieu vivant qui est le conservateur de tous les hommes, spécialement des fidèles. » (1 Tim 4.9-10)
Aujourd’hui les effets bénis de la vie et des travaux de l’apôtre sont manifestes, si bien qu’il est aisé de se dire qu’il a choisi la bonne voie. Mais à l’époque, à part lui et les chrétiens, combien auraient associé à son nom la mention d’une vie réussie ? Pourtant elle l’a bien été au-delà de tout ce que nous pouvons imaginer, et pas seulement dans ses résultats posthumes. Pour qui suit fidèlement le Seigneur Jésus, il est une abondance de vie que le monde ne peut percevoir ni même soupçonner.
Voulez-vous réussir votre vie, plutôt que de réussir dans la vie ? Suivez donc l’exemple de l’apôtre Paul qui nous invite dans son sillage :
« Soyez mes imitateurs, comme moi aussi je le suis de Christ. » (1 Cor 11.1)
Qui est Sénèque ?Sénèque est né à Cordoue (environ 4 apr. J.-C. jusqu’à 65). Précepteur de Néron dont il encourut la disgrâce, celui-ci lui ordonnant de s’ouvrir les veines. On a de lui des traités de philosophie morale inspirés de la doctrine stoïcienne et des tragédies (Médée, les Troyennes, Agamemnon, Phèdre). D’après le Larousse. |
Paul et Sénèque se sont-ils rencontrés ?Jérôme, Augustin, les Actes des Martyrs de Linus, parlent d’une correspondance qui aurait été échangée entre Paul et le philosophe, lors du séjour de l’apôtre à Rome. Ces lettres, qui ont été conservées, mais avec des recensions différentes, n’ont pas une grande portée. Sénèque loue Paul et sa doctrine, mais il lui recommande d’améliorer son style et il lui envoie un traité sur la valeur des mots. Paul lui recommande d’être attentif à son enseignement. C’est au quinzième siècle seulement que l’on a nié l’authenticité de ces lettres, et contesté que Sénèque fût devenu chrétien ; le séjour de Paul à Rome, ses rapports avec Gallion, frère de Sénèque, et les vagues analogies que l’on a cru trouver entre les maximes du philosophe et la doctrine de l’apôtre, ne constituent en effet pas une preuve suffisante (Jean-Augustin Bost, Dictionnaire d’Histoire Ecclésiastique, Librairie Fischbacher, Paris, 1884) – Nous pouvons ajouter que Paul, s’il a terminé sa course en martyr, n’aurait pas mis fin lui-même à ses jours, étant, comme ses épîtres nous l’enseignent, complètement entre les mains de Dieu tant pour sa vie que pour sa mort. De plus, pourquoi aurait-il donné un quelconque argument à la doctrine stoïcienne en échangeant par écrit à propos de celle-ci ? Au contraire, sous la direction du Saint Esprit, il nous met en garde contre la vacuité de la sagesse humaine (1 Cor 1.20 ; 2.5 ; 3.20). |
1Le stoïcisme est une philosophie fondée par Zénon dans la Grèce antique qui prône la recherche du bonheur dans l’accomplissement de la vertu. L’homme, par ses efforts sur lui-même, par le moyen de la raison et de la sagesse humaine, par une vie en harmonie avec la nature, peut endurer et surmonter les difficultés de la vie, avec un degré plus ou moins élevé d’indifférence, et ce afin d’atteindre un état de félicité que les épreuves et limites de l’existence terrestre ne perturbent plus.
Sébastien Théret, Frédéric Mondin
« Car toute la loi est accomplie dans une seule parole, celle-ci : « Tu aimeras ton prochain comme toi-même. » Mais si vous vous mordez et vous dévorez les uns les autres, prenez garde que vous ne soyez détruits les uns par les autres. » (Gal 5.14-15)
Nos frères galates se comparaient, se défiant ou se jalousant tour à tour (5.26). Empêtrés dans les méandres charnels de leur fausse spiritualité, ils se détournaient de la grâce de Christ (5.4) pour ne plus adorer Dieu, mais leur propre ego : « Ce n’est que de l’orgueil que vient la querelle » (Pr 13.10a ; cf. Pr 28.25).
« Aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimés » (Jean 13.34). Quel paradoxe : Jésus commande l’amour alors qu’il va subir le calvaire de la croix à cause de la dureté des hommes !
Il nous le répète aujourd’hui : « À ceci tous connaîtront que vous êtes mes disciples, si vous avez de l’amour les uns pour les autres. » (Jean 13.35). Les querelles ne viennent pas de cours purifiés par Christ. Pire, elles ternissent tragiquement l’éclat de grâce de notre témoignage chrétien.
Un enfant de Dieu irrité mesure rarement la gravité de ses propos ou de ses actes. Les Galates en arrivaient à « se mordre » : ils laissaient des traces tenaces de férocité dans leurs relations ! La morsure inocule alors son poison dans l’Église. La discorde répand son venin jusqu’à causer de durables divisions entre amis : « Un frère offensé est plus difficile à gagner qu’une ville forte, et les querelles sont comme les verrous d’un palais. » (Pr 18.19) Combien d’efforts patients pour conquérir une ville forte ou briser un verrou royal ?. Combien de temps pour guérir une amitié brisée ? Combien d’années pour défendre un christianisme discrédité par le péché d’un chrétien ? Combien de siècles pour reconquérir le renom de Christ perdu par de meurtrières querelles de religion ?
Opposons à la colère qui monte notre identité en Christ. « L’homme violent excite la querelle, mais celui qui est lent à la colère apaise la dispute. » (Pr 15.18) Le violent est dominé par sa nature pécheresse (la chair), mais celui qui est lent à la colère reflète le caractère et la justice de Dieu (Ex 34.6). « Ainsi, mes frères bien-aimés, que tout homme soit […] lent à la colère ; car la colère de l’homme n’accomplit pas la justice de Dieu. » (Jac 1.19-20)
Les Douze ont côtoyé trois années le meilleur maître, mais ils passent leur temps à se comparer (Marc 9.33-34). La nuit où il sera livré en sacrifice, le Seigneur a besoin de leur soutien. Il vient d’instaurer la cène, moment poignant. Mais ils se mettent encore à se quereller « pour savoir lequel d’entre eux serait estimé le plus grand. » (Luc 22.24)
Que fait Jésus ? Bon, doux et bienveillant, le plus grand maître que la terre ait jamais porté leur enseigne patiemment les valeurs de son royaume. Non pas celles de la soif de pouvoir, mais celles de l’amour qui s’abaisse jusqu’à prendre la dernière place pour élever son prochain (Luc 22.25-27).
Les Douze, les Galates, de grands serviteurs dans l’histoire, ont tous été tentés de se comparer, de se « battre » pour être reconnus comme le plus important, le plus pieux, le plus fidèle, le plus près du Seigneur et de la vérité. La piété de ces hommes s’est subtilement séparée de Christ (5.4) pour tendre vers un légalisme caché. Celle où ils croient pouvoir jauger leur spiritualité – et celle des autres ! – sur des critères tout humains : rites, paroles, actes « convenables ». La réponse de Christ ne change pas : « Demeurez en moi » et vous porterez le fruit de la seule spiritualité vraiment vivante (Jean 15.4 ; Ps 37.4).
Le modèle d’humilité laissé par Christ à ses disciples (Jean 13 ; Marc 10.45) nous place devant un choix : l’amour qui édifie (1 Cor 13.5) ou le choc des volontés (1 Timothée 1.4 ; 6.4-5 ; 2 Tim 2.14 ; Tite 3.9). Servir ses propres intérêts, c’est arroser le terrain fertile aux vaines disputes qui perdent les hommes (1 Cor 10.24 ; Phil 2.21). Les talents gâchés ne font pas avancer le Royaume (Mat 25.24-29).
Les querelles sont un fruit de la chair (Gal 5.20), et ceux qui s’y engagent sont disqualifiés par Dieu pour enseigner (1 Tim 3.3). Les charnels marchent à la manière de ce monde où la jalousie et ses mesquineries sont monnaie courante (1 Cor 3.3 ; Jac 3.14,16). Or, ce qui nous est demandé, c’est d’être doux et honnêtes, non pas laxistes quant au mal, mais fuyant la querelle (Tite 3.2). Afin que les hommes lisent en nous la lettre d’amour de Dieu pour eux (Rom 13.13 ; 2 Cor 3.2).
Ô Galates insensés. Ô chrétiens insensés que nous sommes lorsque nous nous laissons conduire par la chair plutôt que par l’Esprit ! Le triste exemple des Galates nous avertit. Occupés à soigner leur degré de sainteté, ils se rendaient esclaves de préceptes sans force, et se comparaient sans cesse. Or, se comparer – pour se trouver nul ou super-spirituel – c’est risquer des affrontements qui n’honorent pas le maître. N’est-il pas extrêmement affligeant que des enfants du Dieu d’amour puissent en arriver à se déchirer et à se détruire de la sorte ?
À ceux qui recherchent une élévation spirituelle en obéissant à des préceptes moraux ou religieux, le doux Évangile de la grâce réplique que celui qui se cramponne à l’amour de Christ pour le répandre accomplit alors la loi tout entière (Gal 5.14 ; Rom 13.8-10). De la grâce seule découle la vraie paix (Gal 1.3 ; 5.22). La paix et non la discorde ! Voici ce qui caractérise les bienheureux enfants de Dieu (Mat 5.9). La désirez-vous plus que tout ? Dieu vous en rend responsable. Mais il ne vous laisse pas seul. Laissez-vous conduire par l’Esprit et vous accomplirez son ouvre de grâce et de paix.
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