PROMESSES
Dans la période où Jésus est sur la terre, il prononce des discours. L’un d’eux appelé « le sermon sur la montagne » est en quelque sorte la charte du royaume (Mat 5-7), introduite par les béatitudes1 qui vont nous occuper (Mat 5.3-12).
Deux difficultés se présentent à nous quand nous abordons cette section.
Première difficulté (qui s’étend à d’autres passages des évangiles) : Jésus parle-t-il pour les croyants de l’Église ou pour les croyants du « résidu2 pieux » des temps de la fin ?
Tout d’abord, il nous faut garder à l’esprit que Jésus voit dans ses disciples tantôt l’embryon de l’Église, tantôt les croyants pieux du « résidu juif » de la fin, car dans les Évangiles, nous sommes comme sur une frontière : nous ne sommes plus sous « l’ancienne alliance » — puisque Jésus est là — mais nous ne sommes pas encore dans la pleine bénédiction qui va être dévoilée dans les Épîtres — puisque Jésus n’est pas encore mort, ressuscité, glorifié, et que l’Esprit n’est pas encore venu.
Pourquoi ne pas envisager que ces enseignements sont pour les deux ? (Quand un père s’adresse à l’un de ses enfants, à table par exemple, les autres peuvent en tirer profit, même si cela n’est pas directement pour eux.)
Deuxième difficulté : comment traduire le mot « bienheureux » ?
Le terme grec correspondant, « makarios », est souvent traduit par « bienheureux » , mais aussi par « en marche » 3.
Comment concilier cela ? Le terme « en marche » a l’avantage de véhiculer une dynamique, une espérance, un but… Aussi nous proposons une synthèse : « en marche les bienheureux ! » (sous-entendu vers le royaume de Dieu) ou « sur la route du bonheur » (qui conduit au royaume de Dieu). Nous retrouvons d’ailleurs cette pensée de dynamique, cette marche en avant, dans plusieurs passages (És 35.5-10 ; 42.16 ; 43.16-21 ; 51.9-11 ; Apoc 7.4-17). Cela va nous éclairer les paroles parfois bien étranges de Jésus. Survolons donc les « béatitudes ».
« Bienheureux les pauvres en esprit, car c’est à eux qu’est le royaume des cieux. » (v. 3)
Peu de béatitudes ont donné lieu à autant de malentendus, voire même de sarcasmes. Jésus a-t-il voulu dire que ceux qui s’avancent vers le royaume de Dieu doivent nécessairement posséder un quotient intellectuel déficient et manquer d’instruction ou, pire encore, que ce soient des gens au psychisme altéré ?
Jésus a plutôt voulu dire qu’ils doivent être comme des petits enfants qui croient simplement, qui ne raisonnent pas, qui ne sont pas occupés de leur importance. D’ailleurs ils ne sont pas importants pour le monde et le monde n’est pas important pour eux. Ils peuvent même être méprisés. La seule chose qui compte pour eux c’est qu’ils se sentent aimés. N’est-il pas désirable que nous soyons tels (Mat 18.1-4) ?
« Bienheureux ceux qui mènent deuil, car ce sont eux qui seront consolés. » (v. 4)
Beaucoup de fidèles juifs des temps de la fin tomberont sous les coups terribles de l’Antichrist pendant la grande tribulation (cf. Dan 11.35 ; Apoc 10.7-8). Et dans le temps actuel, aucun d’entre nous ne peut traverser la vie sans connaître le deuil. Mais le croyant dans le deuil possède trois grandes ressources, trois piliers sur lesquels repose sa foi.
1. La sympathie de Jésus : Cela nous renvoie à la scène de Béthanie de Jean 11. Jésus pleure avec nous. Il sympathise avec nous. Il est capable de nous comprendre, maintenant dans notre souffrance (voir Héb 4.14-16).
2. La résurrection de Jésus : Quand tout semblait perdu, quand la mort avait même atteint le Fils de Dieu venu dans l’humanité, Dieu a manifesté sa puissance en le tirant de la mort, montrant ainsi qu’il était supérieur à cette terrible conséquence du péché de l’homme. La lumière du matin de Pâques éclaire maintenant nos plus sombres deuils et nous montre que ce qui paraît définitif ne l’est pas.
3. La venue de Jésus : « Le Seigneur lui-même descendra du ciel et les morts en Christ ressusciteront premièrement… » (1 Thes 4.16-17), c’est-à-dire ces bien-aimés appartenant à Christ que nous pleurons. Ainsi, nous sommes consolés à leur sujet. Leur corps que nous avons enseveli va être transformé !
« Bienheureux les débonnaires, car ce sont eux qui hériteront de la terre. » (v. 5)
Un débonnaire est quelqu’un qui est plein de bonté, doux. Il n’insiste pas sur ses droits (cf. Phil 4.5). Pourquoi revendiquerais-je agressivement un droit et une possession si je suis en route vers le royaume ?
Plus que pour nous, l’expression « hériter de la terre » sera une merveilleuse promesse, et un encouragement pour le résidu juif pieux accablé par toutes les spoliations du règne de l’Antichrist.
« Bienheureux ceux qui ont faim et soif de la justice car ce sont eux qui seront rassasiés. » (v. 6)
Notre monde est plein d’injustices. Elles engendrent frustrations et souffrances pour les plus faibles. Elles nous heurtent, nous révoltent ; mais nous ne pouvons faire que peu de choses en face d’elles. Il faudra qu’arrive le règne du Messie sur la terre pour que la justice soit enfin instaurée (voir Ps 9.7-9 ; 72.12-14). Toutefois, nous pouvons poursuivre personnellement et ardemment ce qui est juste devant Dieu, entre nous et dans l’Église.
Le résidu juif souffrira aussi de l’injustice, mais il sera lui aussi sur le chemin du bonheur, sur le chemin du règne.
« Bienheureux les miséricordieux, car c’est à eux que miséricorde sera faite. » (v. 7)
Notre monde est dur, c’est la loi de la jungle, du chacun pour soi, du « pousse-toi que je passe ».
Mais les miséricordieux font attention à la misère qui les entoure, ils ont un cœur qui cherche à prodiguer au moins un peu de soulagement. Le résidu juif en bénéficiera alors pour entrer dans le règne (És 49.13 ; Jér 12.15 ; Osée 2.23). Sommes-nous ces miséricordieux dans le temps présent ?
« Bienheureux ceux qui sont purs de cœur, car ce sont eux qui verront Dieu » (v. 8)
Si nous sommes de ceux-là, notre amour pour Dieu sera exclusif. Le propos de notre cœur sera clair, nos motivations simples. Nous rechercherons sa volonté et non la nôtre, sa gloire et non la nôtre. Pensons à un exemple pratique parmi beaucoup d’autres : nous ne « forcerons pas les portes », mais nous laisserons Dieu nous les ouvrir si c’est sa volonté. Si réellement nous maintenons dans la durée cette attitude de cœur et de foi, nous « verrons Dieu » agir. Il n’y aura pas de doute, ce sera lui.
« Ceux qui sont purs de cœur » — le résidu pieux sera de ceux-là, quand « ils retourneront vers Dieu de tout leur cœur » (Jér 24.7 ; 29.11-14).
« Bienheureux ceux qui procurent la paix car ce sont eux qui seront appelés fils de Dieu. » (v. 9)
Les conflits sont incessants et à tous les niveaux dans notre monde. Dans les couples, dans les familles, entre voisins, entre nations. Mais ces bienheureux qui s’avancent vers le royaume recherchent la paix, au prix même de certains de leurs intérêts. Ils savent que la paix sera une caractéristique du royaume terrestre du Messie, qu’il l’incarnera (Mich 5.4) ; que le règne sera fondé sur la justice (És 32.17-18). Mais dès à présent, ces bienheureux « la procurent » à ceux qui les entourent. Ils manifestent déjà les caractères du Dieu de paix ; ils en sont « les fils ». Que Dieu nous soit en aide pour la procurer autour de nous !
« Bienheureux ceux qui sont persécutés à cause de la justice car c’est à eux qu’est le royaume de Dieu. Vous serez bienheureux quand on vous injuriera et qu’on vous persécutera… » (v. 10-12)
Jésus ferait-il ici (comme aussi lors de la deuxième béatitude) l’apologie de la souffrance ? Assurément non. La souffrance est difficile, même terrible ; mais elle manifeste, chez la personne qui la traverse, la fidélité, la pureté — tel le métal dans le creuset.
Ceux qui sont (et seront, pour le résidu juif) soumis à la persécution violente, sont (et seront) plus que d’autres, aux portes du royaume. Ils y auront en tous cas une place de choix. Ils y recevront la couronne de vie (Apoc 2.10). Mais, dès maintenant, ils peuvent se réjouir d’être estimés dignes de souffrir pour le nom infiniment glorieux de leur Maître. « L’Esprit de gloire et de Dieu demeure sur eux. » (1 Pi 4.12-14)
Beaucoup de chrétiens souffrent actuellement souvent jusqu’à la mort, mais ils sont ces bienheureux.
Conclusion
Tous ces bienheureux sont en marche vers le royaume. Le résidu juif pieux portera en son temps tous les caractères mentionnés ci-dessus. Ils seront développés en eux par un grand travail de cœur et de conscience, au travers de la « grande tribulation » (Mat 24.21), pour les préparer à reconnaître le Messie qu’ils avaient rejeté4 (voir Zach 12. 10-11).
Pour nous, chrétiens, qui attendons et aimons l’apparition glorieuse de notre Seigneur Jésus-Christ (Tite 2.13 ; 2 Tim 4.8), nous sommes aussi ces bienheureux en qui le Saint-Esprit forme ces caractères, au travers des épreuves et des difficultés de la vie.
1 Le terme « béatitude » désigne le bonheur que Dieu donne à ses élus. « Les béatitudes » désignent plus spécifiquement les expressions de Matthieu 5 commençant par « bienheureux ».
2 Le terme « résidu » traduit aussi par « reste » (voir par ex. Rom 9.27 ; 11.5) ne véhicule pas la pensée de quelque chose de méprisable, de peu de valeur, mais au contraire de ce qui retrouve des caractères originels et, de ce fait, est précieux pour Dieu. Ces juifs pieux, qui se repentiront du rejet du Messie et entreront dans son règne avec lui, portent bien ces caractères.
3 Le terme grec « makarios » veut dire : bienheureux, heureux, chanceux ; ce terme signifie qu’une personne est bénie de Dieu et que cette bénédiction la remplit de joie, la rend heureuse. Il correspond au terme hébreu « ashréhy » (que l’on trouve 26 fois dans les Psaumes, 8 fois dans les Proverbes et 3 fois en Ésaïe) et qui est compris de différentes façons par les hébraïsants : il peut être une interjection, une exclamation « heureux ! » ou un nom pluriel, « les bonheurs », traduit par « ô les bonheurs de » . Ce mot là, au singulier : « èshèr » vient d’une racine verbale qui signifie à la forme intensive « mener, guider » et à la forme simple « marcher », d’où la traduction de Chouraqui : « en marche ! » Une théologienne suisse, Thérèse Glardon a écrit à propos de la traduction de Chouraqui pour ce terme : « Ce dernier rapprochement suggère non des bonheurs statiques ou des satisfactions béates, mais des bonheurs dynamiques, toujours à découvrir, toujours neufs et qui nous mettent en mouvement. » Dieu est deux fois qualifié de makarios : c’est une de ses qualités qu’il nous souhaite (1 Tim 1.11 ; 6.15).
4 Retrouvailles magnifiquement illustrées par l’histoire des frères de Joseph (Gen 45)
Il avait été si beau le règne de David, le roi selon le cœur de Dieu. Celui de Salomon, le bien-aimé de l’Éternel, avait été magnifique. Sa richesse, sa gloire, l’étendue de sa domination avaient été telles qu’il avait représenté celui du « Roi sur Sion » auquel Dieu donnera les nations pour héritage et pour sa possession, les bouts de la terre (cf. Ps 2)
Mais ce royaume avait perdu rapidement sa splendeur. Des forces idolâtres obscures l’avaient miné de l’intérieur. Salomon avait fini comme un bateau qui sombre, et son royaume avait été déchiré à l’image du manteau du prophète Akhija (1 Rois 11.30). Il y avait eu désormais deux royaumes : au nord, les dix tribus appelées Israël ; puis, au sud, Juda et Benjamin.
Le royaume du nord, privé de l’accès au temple de Jérusalem et gouverné par l’idolâtre Jéroboam, allait être entraîné en deux siècles et demi, sous le gouvernement de rois impies, par une suite de désordres, de guerres civiles, d’invasions étrangères vers une mort certaine. Elle est toute proche quand Ésaïe arrive ; il en sera l’annonciateur et le témoin douloureux.
Juda, petit royaume, tapi sur ses collines arides, autour de Jérusalem, avait connu un moins sombre parcours. Quelques rois pieux avaient été dignes de leur illustre ancêtre, le roi selon le cœur de Dieu. Leur piété avait momentanément endigué l’idolâtrie accrochée au cœur du peuple élu. Mais d’autres avaient compromis ce que leur prédécesseur avait fait. Aussi, quand le prophète Ésaïe arriva, Juda marchait vers son déclin.
Ésaïe était né durant le règne d’Ozias ; il prophétisa sous trois autres rois de Juda : Jotham, Achaz et Ézéchias.
Quels rapports eut donc Ésaïe avec ces quatre rois de Juda ?
Du long règne d’Ozias, Ésaïe n’a retenu que peu de choses. Sauf qu’il date comme un événement fondamental sa rencontre avec Dieu et son appel prophétique, en l’année de la mort de ce roi (6.1).
Il avait pu être impressionné par la sainteté de Dieu, châtiant de lèpre le vieux roi rebelle. Il l’est bien davantage devant le Seigneur sur son trône (ch. 6). Comme Moïse « au buisson », il apprend aussi la grâce qui purifie le pécheur. Dès lors, il est disponible pour Dieu : « Me voici, envoie-moi » et Dieu l’envoie vers ce peuple.
Ses contacts avec Jotham, Ésaïe ne les rapporte pas, si même il en eut.
Il note sommairement ceux qu’il eut avec Achaz (ch. 7). Ils reflètent la patience de Dieu envers ce roi impie.
Par contre, Ésaïe s’étend longuement sur ses rapports avec le pieux roi Ézéchias. Même si les scribes ont fait d’autres récits de sa vie dans le livre des Rois de Juda et celui des Chroniques, il la transcrit une troisième fois (ch. 36-39). Il aime relater la confiance en Dieu de ce roi (ch. 36). Il se souvient du jour où des envoyés du roi sont arrivés chez lui, « couverts de sacs » avec ce billet : « Ce jour est un jour d’angoisse » et son appel terminal : « Fais donc monter une prière pour le reste qui subsiste encore. » (37.4). C’est que l’Assyrie est déjà sous les murailles…
L’ombre du jugement qui descendait sur le cadran d’Achaz a reculé momentanément quand le prophète et le roi, unis dans la même détresse et la même foi, « crièrent au ciel » (2 Chr 32.20).
Si Ésaïe relate le récit de la grande délivrance de Dieu sur les Assyriens, comme aussi de la guérison du roi survenue la même année, il ne peut taire le récit peu glorieux de la visite de l’ambassade du roi de Babylone (ch. 39).
Quels rapports eut Ésaïe avec son peuple ?
Outre ses rapports avec ces quatre rois, Ésaïe pose d’emblée, tel un médecin, le diagnostic sévère sur l’état moral du peuple : « La tête entière est malade, et tout le cœur est souffrant. De la plante du pied jusqu’à la tête, rien n’est en bon état : ce ne sont que blessures, contusions et plaies vives, qui n’ont été ni pansées, ni bandées, ni adoucies par l’huile. » (1.5-6)
Il dénonce courageusement la rébellion, la violence, les iniquités, l’idolâtrie du peuple qui a abandonné Dieu : « Quoi donc ! la cité fidèle est devenue une prostituée ! Elle était remplie d’équité, la justice y habitait, et maintenant il y a des assassins ! » (1.21) ; « leur pays est rempli d’idoles… » (2.8) ; « comme Sodome, ils publient leur crime, sans dissimuler » (3.9) ; « toutes les bouches profèrent des infamies » (9.17)…
Par moment, les paroles du prophète deviennent terribles : « Malheur à leur âme car ils ont fait venir du mal sur eux-mêmes » (3.10, Darby) ; les « malheurs » se succèdent (ch. 5, 10, 17, 24, 28, 29…), et jusqu’au bout de sa prophétie.
Le prophète avertit que les jours du royaume du nord sont comptés (7.8) et que l’ennemi terrible est le roi d’Assyrie (8.5). Mais Juda doit savoir que cet ennemi sera « la verge » de la colère de Dieu contre lui (10.5,12).
Le prophète annonce finalement l’exil à Babylone (39.6-7) et le jugement des nations pécheresses : Babylone (ch. 13) ; l’Assyrie et la Philistie (ch. 14) ; Moab (ch. 15) ; Damas (ch. 17)…
Ces terribles jugements sont-ils donc inéluctables ? N’y a-t-il aucun espoir pour le peuple élu ?
Ésaïe, comme tous les prophètes, invite à la repentance, au retour à Dieu : « Lavez-vous, purifiez-vous, ôtez de devant mes yeux la méchanceté de vos actions ; cessez de faire le mal. Apprenez à faire le bien, recherchez la justice, protégez l’opprimé ; faites droit à l’orphelin, défendez la veuve. » (1.16-17).
Plus qu’aucun prophète, Ésaïe ne cesse d’assurer ceux qui se confient en Dieu de son salut, de son pardon, de son amour : « À part moi il n’y a point de sauveur » (43.11 ; 45.21) ; « C’est moi, moi qui efface tes transgressions pour l’amour de moi, et je ne me souviendrai plus de tes péchés » (43.25) ; « Ne crains rien car je te rachète,… tu es à moi… je t’aime… » (43.2-4)
Les accents du prophète peuvent être pathétiques pour parler de la fidélité de Dieu dans la rédemption de son peuple (54.1-10) et ses appels individuels anticipent l’évangile : « Vous tous qui avez soif, venez aux eaux, même celui qui n’a pas d’argent ! Venez, achetez et mangez, venez, achetez du vin et du lait, sans argent, sans rien payer ! » (55.1-3)
Pour le peuple de Juda, le prophète annonce le retour de l’exil (51.11 ; 56.8). Il nomme même celui que Dieu emploiera pour le favoriser : « Ainsi parle l’Éternel à son oint, à Cyrus… » (45.1).
L’attente du Messie
Est-ce tout ?… Ce serait trop peu. Le prophète n’aurait pas dit l’essentiel ! Car plus que tout autre, il annonce l’arrivée merveilleuse du Messie, ce Messie depuis si longtemps promis — et attendu !
« Ésaïe parla de lui » (Jean 12.41) :
– Il est « un fils » enfanté par « la vierge » et son nom est « Emmanuel » (Dieu avec les hommes) (7.14 cité en Mat 1.23-24).
– Il est une « grande lumière » qui surgit en Galilée (9.1-2 cité en Mat 4.13-16).
– Il est celui sur qui est l’Esprit du Seigneur « pour apporter de bonnes nouvelles » (61.1-2 cité en Luc 4.17-19).
– Il est le Serviteur du plaisir de Dieu, humble au service de l’homme (42.1-4 cité en Mat 12.18).
– Il est « le salut de Dieu jusqu’au bout de la terre » (49.6 cité en Actes 13.47).
– Il est le serviteur dépendant et souffrant (50.4-7), qui se charge de nos souffrances et de nos douleurs (53.4 cité en Mat 8.17), par les meurtrissures duquel nous sommes guéris (53.5 cité en 1 Pi 2.24).
– Il est l’agneau muet qui va à la mort (53.7 cité en Actes 8), qui n’a commis aucune violence dans la bouche duquel il n’y a aucune fraude (53.9 cité en 1 Pi 2.22).
– Il est victorieux et a « une part avec les grands » car il ressuscite (53.12 et 55.3 cité en Actes 13.34).
– Son règne est celui de la justice, de la fidélité et de la paix. Il est « une bannière pour les peuples ; les nations se tourneront vers lui, et la gloire sera sa demeure. » (11.1-10 cité en Rom 15.11).
Et l’on pourrait multiplier les citations. Qu’il est difficile de résumer tout ce qu’a dit le prophète Ésaïe, tant il a été abondant pour « parler de lui » !
Quelques années après ces merveilleuses prophéties, sur le « cadran d’Achaz » l’ombre va descendre inexorablement vers une nuit effrayante. Les Chaldéens détruiront tout… tout, sauf la petite flamme de l’espérance, que les prophéties d’Ésaïe ont allumée dans le cœur de quelques fidèles du peuple élu.
Ils iront en exil à Babylone, un petit nombre seulement reviendra ; l’état moral du peuple déclinera encore… mais jamais cette flamme ne s’éteindra. De génération en génération, les paroles du prophète la soutiendront (cf. Act 13.27). L’espérance sera encore là dans le cœur de ceux « qui attendent la délivrance », quand, dans le secret d’un petit village de Galilée, les paroles merveilleuses d’Ésaïe se réaliseront enfin : « La vierge concevra… » ! Le Messie sera là
Le temps d’Ésaïe et le nôtre
Le temps de la prophétie d’Ésaïe n’est pas sans ressemblance avec le nôtre. Comme alors, des forces obscures corrompent nos sociétés occidentales : « la débauche, l’impureté, le dérèglement, l’idolâtrie, la magie, les rivalités, les querelles, les jalousies, les animosités, les disputes, les divisions, les sectes, l’envie, l’ivrognerie, les excès de table » (Gal 5.19-21).
Aussi clairement et courageusement qu’Ésaïe, les prophètes du N.T. dénoncent ces dérives. Dans les églises même auxquelles ils écrivent, leurs avertissements sont aussi solennels que ceux d’Ésaïe : « Ne vous y trompez pas : ni les débauchés, ni les idolâtres, ni les adultères, ni les efféminés, ni les homosexuels, ni les voleurs, ni les cupides, ni les ivrognes, ni les outrageux, ni les ravisseurs, n’hériteront le royaume de Dieu. » (1 Cor 6.9) ; « Parce que tu es tiède, je vais te vomir de ma bouche » (Apoc 3.16 ; voir aussi 2 Pierre 2 et l’Épître de Jude). Mais comme Ésaïe, ils appellent le peuple de Dieu à la repentance, et l’invitation « repends-toi » résonne à l’adresse de cinq églises (Apoc 2 et 3). Ils appellent aussi à une vie de sainteté : « Ne convoitons pas, ne soyons pas idolâtres, ne commettons pas la fornication » (cf. 1 Cor 10.6-10).
Est-ce tout ? Eux non plus n’auraient pas dit l’essentiel.
Comme Ésaïe, les prophètes du N.T. annoncent l’espérance, la venue d’un Seigneur glorieux qui va établir son règne sur la terre, et qui aura pour cela préalablement pris son Église à lui. L’espérance jalonne toutes leurs lettres.
Y aura-t-il, même dans le peuple de Dieu d’aujourd’hui, des Achaz qui seront insensibles à cette merveilleuse promesse ?
Alors que tout va encore s’assombrir, soyons plutôt « ceux qui l’attendent », ceux dans le cœur desquels comme autrefois, la petite flamme de l’Espérance ne périt pas, mais que la voix des derniers prophètes ranime encore.
Les croyants qui ont la foi en Jésus forment ensemble l’Église. Elle est représentée par des images :
– une « maison faite de pierres vivantes », sous la plume de Pierre ;
– un temple, un corps, une épouse, sous celle de Paul ;
– comme une famille, des enfants, selon Jean.
L’Épître aux Hébreux présente plutôt les croyants comme un peuple en marche, comme des pèlerins qui avancent vers un but.
D’un bout à l’autre de la lettre, il leur est montré la grandeur de leur Seigneur, la place suprême qu’il occupe, et les offices qu’il remplit pour eux. Mais ce Souverain est aussi accessible, ses sujets peuvent s’approcher de lui librement pour le prier (ch. 4), pour l’adorer (ch. 10). Mieux encore, les pèlerins sont assurés d’être écoutés avec bienveillance. En effet, leur Seigneur les comprend, sympathise avec eux, ayant lui-même parcouru leur chemin avant eux et pour eux. L’auteur de la lettre s’efface derrière la gloire de Celui de qui il parle et qu’il nous invite à découvrir en sept étapes.
1. Jésus plus grand que les anges (ch. 1 et 2)
Le premier chapitre présente la grandeur du Fils et répond à trois questions :
a. Qui est-il ?
– « Le Fils », par lequel Dieu a parlé (1.2)
– « L’héritier de toutes choses » (1.2)
– Le Créateur « par lequel Dieu a fait les mondes » (1.2)
b. Qu’a-t-il fait, à part cette œuvre créatrice ?
– « La purification des péchés » (1.3)
c. Où est-il ? :
– « Assis à la droite de la majesté divine dans les lieux très hauts » (1.3).
Suivent sept citations de l’Ancien Testament qui témoignent de la grandeur de Celui qui est « plus excellent que les anges ».
Le chapitre 2 nous décrit :
– son humiliation, toute résumée dans l’expression : « [il] a été abaissé pour un peu de temps au-dessous des anges » (2.7,9) ;
– son exaltation, toute résumée par l’expression « couronné de gloire et d’honneur » (2.7,9).
« Le monde à venir » ne sera pas assujetti aux anges, mais « au Fils de l’homme » (2.5-8). Pour les croyants, il est « le Prince de leur salut » (2.10).
Les pèlerins de la foi doivent savoir pourquoi leur Seigneur a participé à leur humanité :
– « afin que, par la mort, il rende impuissant celui qui avait la puissance de la mort », et qu’il les délivre de la « crainte de la mort » (2.14) ;
– « afin qu’il soit un souverain sacrificateur miséricordieux et fidèle », et secourable (2.17-18).
2. Jésus plus grand que Moïse (ch. 3)
« Pour Moïse, il a été fidèle dans toute la maison de Dieu, comme serviteur » (litt. thérapeute : celui qui soigne). Il a pris soin d’Israël, a intercédé pour lui… mais il n’a pas bâti la maison d’Israël. Jésus « a été jugé digne d’une gloire […] supérieure à celle de Moïse » (3.3). Lui seul a dit : « Je bâtirai mon Église. » (Matt 16.18) C’est ce qu’il a inauguré par sa mort et sa résurrection, et ce qu’il accomplit chaque jour par son Esprit.
Aussi il importe que ce peuple de pèlerins en marche ne soit pas comme celui d’Israël dans le désert, peuple caractérisé par « le péché » (3.17) et « l’incrédulité » (3.19).
3. Jésus plus grand que Josué (ch. 4)
Après la mort de Moïse, Josué a conduit le peuple au travers du Jourdain jusque dans la terre promise. Mais il ne leur a pas donné le repos (le repos de Dieu) dont le sabbat était une image (4.8).
Par contre, Jésus nous ouvre le repos de Dieu, d’où cette certitude absolue : « Nous qui avons cru, nous entrons dans le repos » (v. 3).
Ce repos n’est pas une invitation à la passivité : les pèlerins de la foi de la nouvelle alliance, comme ceux de l’ancienne, sont appelés à mêler les promesses de Dieu à une foi vivante. A leur suite, nous sommes vivement exhortés : « Empressons-nous donc (litt. : mettons tout notre zèle, tout notre cœur) d’entrer dans ce repos. » (4.11)
Mais où trouver l’énergie d’un tel empressement ? Nous disposons de deux ressources :
– La Parole de Dieu : la « séduction du péché » et « l’incrédulité » guettent les pèlerins de la foi, mais la Parole vivante et puissante est là pour agir sur leur cœur et sur leur conscience (4.12-13).
– Jésus, le « grand souverain sacrificateur » : les pèlerins sont-ils sans force et souffrants ? Ils ont pour eux quelqu’un qui a été éprouvé en toutes choses comme eux et qui est capable de compatir maintenant à leurs infirmités (4.15). Ils peuvent donc librement s’approcher de son trône par la prière. Miséricorde, grâce et secours sont en lui, pour eux (4.16).
4. Jésus plus grand qu’Aaron et sa sacrificature (ch. 5 à 10)
Aaron, le souverain sacrificateur, était un personnage important en Israël. Il était « appelé de Dieu » à cette place et cette fonction « d’honneur » (5.4). Il en fut de même de Christ (5.5). Mais la faiblesse était la part d’Aaron : il devait offrir des sacrifices aussi « pour lui-même » (5.3). Le sacrifice de Christ en contraste sera uniquement pour les autres.
La sacrificature de Christ est plus grande, car elle est « selon l’ordre de Melchisédek » et cumule les fonctions de roi de justice, de roi de paix, de sacrificateur (7.1-3) et elle touche à l’éternité : « sans père, sans mère, sans généalogie, il n’a ni commencement de jours ni fin de vie » (7.3).
Sous l’ancienne alliance, les sacrificateurs se succédaient car la mort les arrêtait (7.23), mais Jésus est ressuscité « selon la puissance d’une vie impérissable » (7.16) et il « est toujours vivant pour intercéder » pour les siens (7.25b). Aussi ceux qui s’approchent de Dieu par lui peuvent-ils être secourus (7.25a).
Aaron était médiateur dans l’ancienne alliance, alliance établie sur des promesses conditionnées par l’obéissance. Mais Jésus est « médiateur d’une meilleure alliance qui a été établie sur de meilleures promesses » (7.22 ; 8.6 ; 9.15).
Les multiples sacrifices offerts chaque année par Aaron le grand jour des expiations ne pouvaient ôter durablement les péchés ni purifier la conscience des adorateurs (9.9 ; 10.2-4). « Mais Christ, avec son propre sang, a obtenu une rédemption éternelle. » (9.11-12) « Par une seule offrande, il a amené à la perfection pour toujours ceux qui sont sanctifiés. » (10.14)
Aussi l’adorateur peut-il maintenant, en toute liberté, s’approcher de Dieu lui-même par le sang de Jésus (10.19-22).
5. Jésus plus grand que tous les héros de la foi (ch. 11 et 12)
Qu’est-ce qui unit tous ces hommes, ces femmes et ces anonymes du ch. 11, qui ont vécu au fil des siècles et qui, pour la plupart, ne se sont jamais connus ? La foi !
Ces personnes se sont fiées à Dieu avec, il est vrai, une connaissance fragmentaire et progressive de Dieu et de ses pensées. Leur foi les a poussés à agir : « par la foi » ils firent ceci ou cela.
Cette foi est au départ (et probablement en chacun de nous) élémentaire : « C’est par la foi que nous reconnaissons que l’univers a été formé par la parole de Dieu. » (11.3) Avec Abel, la foi annonce, figurativement, le sacrifice de Jésus-Christ qui seul permet d’être agréé devant Dieu et de l’adorer en vérité. Alors on commence à marcher avec Dieu, comme Hénoc, en cherchant à lui plaire jusqu’à l’enlèvement. Comme Noé, le résidu futur d’Israël exercera cette même foi en traversant « la grande tribulation » et, gardé par Dieu, il entrera en possession d’une terre purifiée par le jugement.
La foi d’Abraham et de Sara a su écouter l’appel de Dieu, a su obéir à sa parole, a su compter sur ses promesses, sur sa fidélité, sa miséricorde, sa puissance pour les accomplir. Leur foi nous apprend aussi à attendre la cité céleste « meilleure » que celle des bâtisseurs de nos Babels contemporaines ! La foi d’Abraham éprouvé, celle de Jacob et de Joseph à la fin de leur vie, nous apprend à faire face à la mort dans la connaissance d’un Dieu plus puissant que la mort, d’un Dieu qui a le pouvoir de la résurrection.
La foi de Moïse, de Rahab, de Gédéon, de Barac, de Samson, de Jephté, de David, de Samuel et d’une foule d’anonymes inconnus (mais bien connus de Dieu) nous apprend qu’elle seule peut être victorieuse du monde. Quelle galerie de héros ! Ils ont vécu par la foi, ils sont morts dans la foi, ils ont triomphé dans la souffrance par la foi.
Quelle « grande nuée de témoins » ! Elle nous a précédés ? Non point, mais « elle nous environne » ! Cela implique certainement que nous connaissons leur histoire. Témoins tous unis par une même foi, la foi qui nous habite à notre tour. C’est comme si l’Esprit disait aux pèlerins fatigués : vous n’êtes pas seuls sur le chemin difficile de la foi ; en tous temps, il a été difficile, car jamais tous n’ont eu la foi (2 Thes 3.2).
Pourtant, si béni que soit l’exemple de ces héros de la foi, en aucun d’eux nous ne pouvons reconnaître le Chef. Jésus seul a vécu sans aucune défaillance dans son chemin de foi avec Dieu. Aussi, incontestablement, il marche en tête de tous, et amène cette foi à la perfection. Après avoir enduré l’« opposition des pécheurs » (12.3), il a traversé dans la foi en Dieu l’épreuve suprême de la croix pour parvenir jusqu’au trône de Dieu où il est assis (12.1-2). Aussi, incontestablement, il marche à la tête de tous, pour amener la foi de chacun à la perfection.
C’est vers lui que tous les pèlerins de la foi sont finalement invités à regarder. « Rejetant le péché et tout fardeau », c’est vers lui qu’ils sont appelés à courir (12.1-2).
6. Jésus plus grand que les conducteurs (ch. 13)
Nous n’avons pas connu personnellement les témoins de « la grande nuée » du ch. 11. Mais le chapitre 13 fait référence à « vos conducteurs » (13.7) : ce terme semble indiquer des serviteurs que nous avons connus et surtout écoutés. Ils nous ont annoncé la Parole de Dieu. Ils avaient une connaissance profonde des Écritures. Ils ont marché patiemment en comptant sur Dieu dans les jours faciles de leur vie comme dans les jours d’épreuve. Ils ont « gardé la foi », « jusqu’au bout » (3.6 ; 6.11). Nous nous souvenons d’eux, mais ils nous ont quittés ; leur départ laisse un grand vide. Alors l’Esprit dresse devant nous le portrait d’un plus grand qu’eux : « Jésus-Christ est le même hier, aujourd’hui et éternellement. » (13.8) Lui ne change pas, ne passe pas. Il faut que le pèlerin de la foi dans le deuil, découragé, lassé, le sache.
Mais la grâce et la puissance du Chef de l’Église donne encore des conducteurs (13.17) : « ils veillent sur nos âmes » et nous devons leur « obéir ». Mais là encore, il faut que chacun garde son rang : Jésus est plus grand qu’eux. Il est « le grand berger des brebis » (13.20) que Dieu « a ramené d’entre les morts ». Ainsi le Père peut produire en nous « ce qui lui est agréable par Jésus-Christ, à qui soit la gloire aux siècles des siècles ! Amen ! » (13.21)
* * *
Cher lecteur, pèlerin de la foi comme moi, aux prises avec la « séduction du péché » et avec les doutes de « l’incrédulité » (3.12,19), comme moi — sans force (4.5), souffrant (10.32), peut-être frustré matériellement (10.34), ployant sous des fardeaux (12.1), lassé, découragé (12.3) — toi et moi, nous avons un Seigneur vivant, glorieux et accessible. Il nous dit : « Je ne te délaisserai pas et je ne t’abandonnerai pas. » (13.5) Dans notre marche vers lui, « le précurseur » (6.20), que notre foi soit toute en lui !
Promesses 174 – Dossier
DE L’ÂME QUI A SOIF AU CŒUR QUI DÉBORDE PSAUMES 42 A 45
Plus que de toute autre partie du Saint Livre, l’on ne s’approche du livre des Psaumes qu’avec une crainte respectueuse. Pourquoi donc ? Nous le comprendrions aisément si nous découvrions, par exemple, dans le vieux grenier de nos arrière-grands-parents, un recueil de leurs prières, de leurs louanges à Dieu. Nous lirions avec émotion, non le récit des circonstances qu’ils ont vécues, mais les exercices de leur âme devant Dieu, ce qu’ils ont dit à Dieu, dans la souffrance comme dans la joie. Nous pourrions peut-être par une lecture plus approfondie, toujours émus et respectueux, reconstituer en partie les circonstances que nos arrière-grands-parents ont traversées.
Il en est ainsi du livre des Psaumes.
Des Psaumes des fils de Coré
Les Psaumes 42 à 45 commencent le deuxième livre des Psaumes. Ils font partie des onze écrits par les fils de Coré et des douze ou treize dits « Psaumes d’instruction »1. « Les fils de Coré » dont les pères tombèrent sous le jugement de Dieu (Nom 16) « ne moururent pas » (Nom 26.11). Ils gardèrent certainement de cet épisode tragique du désert, d’une part le sentiment de la sainteté de Dieu, d’autre part de son infinie miséricorde qui les avait épargnés. Ils furent par la suite de vrais lévites, attachés au sanctuaire — déjà au désert, puis après l’établissement dans le pays (1 Chr 9.17-34). Ils en gardaient l’entrée (v. 19), poste de confiance. Samuel lui-même en était un descendant (1 Chr 6.22-28). Lui aussi était portier (1 Sam 3.15). Au temps glorieux de David et Salomon, les fils de Coré étaient encore portiers (1 Chr 26). Venant de leurs villages, de sept jours en sept jours, ils veillaient fidèlement aux portes (1 Chr 24-26), « sur les trésors de la maison de Dieu et ils se tenaient la nuit autour de la maison de Dieu, car la garde leur en appartenait, et ils en avaient la clef pour ouvrir chaque matin » (1 Chr 9.26-27). Poste de responsabilité, fonction pleine de risques. Ils ne la considéraient pas comme purement administrative, mais tout leur amour était tourné vers Dieu et sa maison. Plus encore, ils étaient sur le « seuil de la maison de mon Dieu » (Ps 84.10).
Psaumes 42 et 43
Aussi quel désastre, quel désarroi, quelle douleur pour eux, quand ces trésors qu’ils avaient si fidèlement gardés furent arrachés du temple et emportés à Babylone, quand cette maison dont ils avaient si souvent gardé les seuils fut « brûlée » et livrée à la destruction (2 Chr 36.18-19). Plus de « voix de triomphe et de louange », plus de « multitude en fête ». Le souvenir même en était maintenant douloureux (Ps 42.4). Ce fils de Coré parlant personnellement, dit à Dieu dans ces Psaumes 42 et 43, toute sa souffrance, tout son abattement (42.5,6,7 ; 43.5), et lance vers lui de douloureux « pourquoi » (42.5,9 ; 43.2,5).
Dans sa situation déjà pénible, des adversaires ajoutent la provocation : « Ils disent tout le jour : où est ton Dieu ? » (42.3,10)
Mais au travers de tout ce désastre, de toute cette souffrance, ce fidèle s’attache à son Dieu. Il a même soif de lui (42.2). Sa foi affirme que, malgré tout, la bonne attitude est encore de « s’attendre à Dieu ». Il s’exhorte lui-même dans cette attitude (42.5,11 ; 43.5). De plus, il demande lumière et vérité pour être conduit (43.3) Il désire venir à « l’autel de Dieu » comme autrefois pour célébrer Celui qu’il appelle « mon Dieu » (43.4).
Arrêtons-nous un instant sur la merveilleuse parole de ce fidèle : « Mon âme a soif de Dieu, du Dieu vivant » et posons-nous la question : mon âme a-t-elle soif de Dieu ? Nous pouvons aussi avoir soif de beaucoup d’autres choses. Le champ de nos désirs est immense, mais avoir « soif de Dieu », c’est une chose étrange et merveilleuse. Toutefois, si « la soif de Dieu » est une chose mille fois préférable à l’indifférence, elle représente un manque, c’est une souffrance.
Notre Psalmiste n’en est pas au bouillonnement de son cœur quand il compose le Psaume 45 ; mais il a déjà soif de Dieu. Si, dans la souffrance, nous avons soif de Dieu, nous sommes aussi sur ce chemin-là.
Psaume 44
Au Psaume 44, le psalmiste s’identifie maintenant avec tout son peuple et remplace le « je » par le « nous ».
Il se souvient encore « des jours d’autrefois » (44.1). Il rappelle à Dieu les manifestations de sa puissance miséricordieuse envers son peuple (44.1-8). Alors le douloureux « mais » du v. 9 sonne comme un glas. Encore, il dit à Dieu toute sa souffrance en constatant cette chose étrange et terrible : Dieu est contre son peuple, à cause de l’infidélité de ce dernier (44.9-14). Ce qu’il dit alors est magnifique : « Tout cela nous est arrivé et nous ne t’avons pas oublié, et nous n’avons pas été infidèles à ton alliance. » (44.17-18)
Arrêtons-nous un instant pour retenir « l’instruction ». Il y a un fort parallèle entre Israël et les chrétiens. Ces derniers furent infidèles à leur Dieu à plusieurs occasions et, en conséquence, bien des manifestations extérieures de l’approbation divine telles qu’on les voyait aux premiers temps de l’Église, nous font aussi défaut. Mais pouvons-nous dire comme le Psalmiste : « Tout cela nous est arrivé, et nous ne t’avons pas oublié » ? Dans un contexte pénible de divisions, de fragmentations de l’Église, nous pouvons néanmoins « ne pas oublier », « persévérer dans la fraction du pain ».
Le Psalmiste lance encore deux douloureux et émouvants « pourquoi » : « Pourquoi dors-tu Seigneur ? », « Pourquoi caches-tu ta face, et oublies-tu notre affliction ? » (44.23-24) et un ultime appel : « Lève-toi, aide-nous et rachète-nous à cause de ta bonté. » (44.26)
Psaume 45
Le ton du Psaume 45 change complètement. Enfin, le cœur du Psalmiste bouillonne. Sortant de sa douloureuse histoire personnelle (Ps 42 et 43) et de l’histoire non moins douloureuse de son peuple (Ps 44), il en vient à contempler une Personne extérieure à lui, à son peuple, sans aucun doute, le Messie qui viendra en puissance et en majesté. Voilà le secret de ce cheminement, de ce revirement. Il compose « au sujet du roi » (45.1). Il décrit ce Messie, ce Roi à venir. Plus, il lui parle : « Tu es plus beau que les fils des hommes » (45.2) Il est plein de « grâce », de « débonnaireté » (45.2,4) mais aussi d’autorité majestueuse, de « vérité » de « justice ». Il est muni « d’un sceptre de droiture » (45.3,4,5,6).
Ce Roi, ce Messie à venir sera « béni » et « oint » par Dieu lui-même (45.2,7). Son peuple repenti et revenu à lui, lui sera comme « des compagnons » (ceux qui mangent le pain avec) (45.7), comme « une reine » dont le roi « désire la beauté » (45.9). Comme « la fille de Tyr » autrefois, les nations rechercheront sa faveur (45.12). Jérusalem sera amenée à ce roi, mais aussi, telles des vierges qui suivent le cortège nuptial, les villes de Juda participeront à « la joie » et à « l’allégresse » de ce règne (45.14,15).
Le Psalmiste parle encore à ce Roi à venir : « Au lieu de tes pères, tu auras des fils. » (45.16) C’est un peuple nouveau, celui de la nouvelle alliance.
Jusqu’au bout de sa composition, son « cœur bouillonne » pour son Roi, « sa langue est le style d’un écrivain habile » pour proclamer « son nom » et « le célébrer » (45.17).
Recevons encore « instruction »
Il ne faut point nous contenter d’avoir soif ; il nous faut parvenir comme le psalmiste au bouillonnement du cœur. Le pourrions-nous, nous aussi, en regardant notre douloureuse histoire passée ou celle de l’Église ?
Non point, mais en contemplant Celui que « Dieu a fait asseoir à sa droite dans les lieux célestes, au-dessus de toute principauté et autorité et puissance …» À qui « il a assujetti toute chose » (Éph 1.20-21). Celui qui revient chercher l’Église (1 Thes 4.16-17) ; qui revient établir son règne en puissance et en gloire en y associant les siens (Marc 13.26 ; 1 Cor 15.25 ; 2 Tim 2.12). Les siens encore sur la terre, mais qui le « considèrent » (Héb 3.1), fixent leurs yeux sur lui (Héb 12.2) et savent que rien — ni leur histoire, ni celle de l’Église ou du monde — ne peut ébranler son cœur ou son trône. Depuis la terre déjà, l’Église l’acclame et chante la gloire du Ressuscité.
Seigneur accorde-nous la grâce, au milieu des souffrances du temps présent, de faire et refaire comme ce fils de Coré, le chemin de l’âme qui a soif au cœur qui déborde d’amour pour toi. Amen !
1Le Psaume 43 semble bien, au vu de son contenu, être écrit par le même auteur que le Psaume 42.
Un chrétien était encore troublé dans sa conscience par des péchés qu’il avait commis. Ils lui semblaient trop importants pour être ôtés de devant Dieu. Un de ses amis, voyant sa souffrance, lui dit : « Connais-tu les quatre ‘tous’ de Lévitique 16 ? » : « Il confessera sur lui toutes les iniquités., toutes leurs transgressions. tous leurs péchés., le bouc portera toutes leurs iniquités. » (16.21-22)
Le dixième jour du septième mois était en Israël un jour absolument unique dans l’année juive. C’était le jour des expiations. Le sacrificateur prenait, entre autre, deux boucs, en égorgeait un, apportait de son sang dans le lieu très saint du tabernacle sur le couvercle d’or de l’arche appelé le propitiatoire. Par ce sang, Dieu était propice à Israël durant une année.
Le chapitre 9 de l’Épître aux Hébreux établit une liaison entre ce jour des propitiations et ce que notre Seigneur a accompli d’une façon parfaite et définitive : « Mais Christ est venu [.], est entré une fois pour toutes dans le lieu très saint, [.] avec son propre sang, ayant obtenu une rédemption éternelle. » (Héb 9.11-12) La figure de Lévitique 16 a reçu son plein accomplissement en Jésus Christ.
Le second bouc n’était pas immolé, il était conservé vivant. Aaron le sacrificateur posait ses deux mains sur sa tête, et confessait sur lui toutes les iniquités des fils d’Israël, toutes leurs transgressions, tous leurs péchés. Il est ajouté : « Le bouc portera sur lui toutes leurs iniquités dans une terre inhabitée ». Le bouc s’en allait mourir misérablement dans le désert.
Nos contemporains ne connaissent certainement pas grand chose du Lévitique, troisième livre de la Bible. Pourtant cette ordonnance a laissé une trace dans le langage populaire : on parle de « chercher un bouc émissaire ».
Elle est pour chaque chrétien à la fois solennelle et apaisante :
– Solennelle, car ce bouc typifie notre Seigneur qui « a porté nos péchés en son corps sur le bois » (1 Pierre 2.24) à l’heure de la croix. Il dut dire : « Mes iniquités m’ont atteint » (Ps 40.12). Mes iniquités ? c’étaient celles des croyants de tous les temps. Il s’en était chargé pour les emmener « dans une terre inhabitée » pour qu’en toute justice Dieu puisse nous les pardonner et ne plus s’en souvenir.
– Apaisante car, si l’Esprit se plaît à répéter dans ce texte « toutes », « toutes », « tous », « toutes », c’est pour assurer nos âmes de la perfection de l’ouvre de Jésus, afin qu’elles aient la paix.
Le livre des Proverbes ne traite pas la question du salut de l’homme. Un autre livre a magistralement posé cette base. Incontestablement c’est dans le livre de l’Exode traitant du salut du peuple juif qu’est préfiguré le salut que Jésus Christ devait nous apporter un jour.
Le livre des Proverbes nous apprend plutôt comment marcher sur la terre à la gloire de Dieu. Ne l’a-t-on d’ailleurs pas appelé « le code de la route » ? Il contient une multitude de préceptes de sagesse pour l’individu, qu’il soit adulte ou enfant, roi ou sujet, maître ou serviteur, … père ou mère. Dans cet article, nous arrêterons nos propos sur ces derniers nommés : le lecteur attentif aura tôt fait d’observer que le père et la mère sont mentionnés douze fois côte à côte dans ce livre (pour une seule fois la mère seule).
Cette insistance de l’Esprit de Dieu à les nommer ensemble nous interpelle et contient certainement un enseignement d’une grande importance et d’une saisissante actualité.
De mari et femme à père et mère
Nous ne sommes pas d’abord père et mère, mais mari et femme. Un jeune homme, une jeune fille sont remplis d’un sentiment amoureux l’un pour l’autre. Ils décident de partager leur vie. Ils s’engagent réciproquement par le mariage dans une union stable. Elle sera une base solide où l’enfant qui viendra trouvera tendresse et sécurité. L’union libre offre-t-elle à l’enfant cette base solide ?
L’expression « le père et la mère » appelle un second préalable : le jeune couple, tout en réfléchissant au sujet de la régulation des naissances avec sagesse et tendresse, ne refusera pas systématiquement l’enfant. Rien n’est plus beau que la vision de ce jeune homme et de cette jeune fille, devenus mari et femme, penchés sur le berceau où se trouve le fruit de leur union et de leur amour. Ils sont père et mère. La pensée de Dieu est qu’ils soient là, côte à côte, que l’enfant les découvre ainsi comme en témoignent les douze passages du livre des Proverbes.
Mais il arrive fréquemment aujourd’hui que l’enfant ne découvre qu’un visage. Ce sera généralement celui de la mère. Selon l’expression courante, qui n’en est pas moins dramatique, le père s’est volatilisé dans la nature. Plus triste encore, l’enfant ne découvrira ni le visage de son père, ni le visage de sa mère. Il est né sous X. Il découvrira d’autres visages, on s’occupera tout de même de lui. Dans d’autres cas, il arrivera dans une famille dite « recomposée ». Franchement plus grave (car dans les cas précédents, on pourrait imaginer qu’un accident ait pu emporter le père ou la mère), le cas qui pourrait bientôt voir le jour en France, où l’enfant découvrirait deux visages semblables d’hommes ou de femmes.
Il est urgent, dans le contexte actuel, de revenir à la normalité de la pensée divine de notre Créateur : le père et la mère côte à côte. Cela soulève immanquablement que ceux qui sont côte à côte physiquement, marchent dans l’entente cordiale et la fidélité. Car enfin comment faire face à cette tâche difficile de père ou de mère, si l’on cède à la tentation d’aventures extraconjugales ?
Oui, la tâche est difficile, parfois très difficile. Nous, parents, nous nous sentons faibles, fragiles, toujours imparfaits, quelquefois impuissants et dépassés.
Comment réagir devant le caprice d’un enfant, une désobéissance, voire une insolence… devant une chambre encore en désordre après tant de remarques ? Comment réagir quand on découvre qu’un enfant se drogue ou a des tendances homosexuelles, devant un adolescent révolté ou déprimé ? Comment réagir quand un enfant invite à la maison un ami ou une amie pour la nuit, afin de coucher ensemble ?…
Le père et la mère sont parfois mis à rude épreuve dans leur entente même. Ils n’auront pas toujours le même avis pour faire face à des situations qui demanderont beaucoup de patience, de sagesse, de fermeté ou de modération — et des nerfs solides.
Ils sentiront toute leur faiblesse, mais garderont la conviction qu’il leur faut, envers et contre tout, rester côte à côte, car telle est la pensée de Dieu. Ils auront par dessus tout besoin du secours divin, qu’ils solliciteront constamment ensemble. Ils devront d’abord pour eux-mêmes marcher ensemble, guidés par la pensée de Dieu, pour ensuite la transmettre. Ils pourront ensuite exhorter avec sagesse :
– « Ecoute mon fils, l’instruction de ton père, et ne rejette pas l’enseignement de ta mère. » (Prov 1.8)
– « Mon fils, garde les préceptes de ton père, et ne rejette pas l’enseignement de ta mère. » (Prov 6. 20)
– « Ecoute ton père, lui qui t’a engendré, et ne méprise pas ta mère, quand elle est devenue vieille. » (Prov 23.22)
Ils pourront même en appeler à leur propre expérience :
– « J’étais un fils pour mon père, un fils tendre et unique auprès de ma mère. » (Prov 4.3)
Tout parent exprime ce souhait :
– « Que ton père et ta mère se réjouissent, que celle qui t’a enfanté soit dans l’allégresse ! » (Prov 23.25)
Le constat heureux peut être doublé d’un constat malheureux :
– « Un fils sage fait la joie d’un père, et un fils insensé le chagrin de sa mère. » (Prov 10.1)
– « Un fils sage fait la joie de son père, et un homme insensé méprise sa mère. » (Prov 15.20)
Le constat peut être aussi franchement alarmant :
– « Celui qui ruine son père et qui met en fuite sa mère est un fils qui fait honte et qui fait rougir. » (Prov 19.26)
– « Celui qui vole son père et sa mère, et qui dit : Ce n’est pas un péché ! est le compagnon du destructeur. » (Prov 28. 24)
– « Il est une race qui maudit son père, et qui ne bénit point sa mère. » (Prov 30.11)
L’avertissement peut même se faire très solennel :
– « Si quelqu’un maudit son père et sa mère, sa lampe s’éteindra au milieu des ténèbres. » (Prov 20.20)
– « L’œil qui se moque d’un père et qui dédaigne l’obéissance envers une mère, les corbeaux du torrent le perceront, et les petits de l’aigle le mangeront. » (Prov 30.17)
Toujours le père et la mère sont là, côte à côte.
L’exception renforcera la règle : « Paroles du roi Lemuel. Sentences par lesquelles sa mère l’instruisit. » (Prov 31.1) La mort a pu intervenir dans ce foyer, mais cette mère a réussi à suppléer à l’absence du père. La mère du roi Lemuel est là pour encourager toutes les mères seules.
Des exemples bibliques
Deux exemples positifs du père et la mère côte à côte pourront encore nous encourager :
– Moïse est né en Égypte dans une période bien difficile. Si sa mère est au premier plan dans le livre de l’Exode (ch. 2), le Saint Esprit, rapportant dans l’épître aux Hébreux les actes de foi des croyants, dira : « C’est par la foi que Moïse, à sa naissance, fut caché pendant trois mois par ses parents, parce qu’ils virent que l’enfant était beau, et qu’ils ne craignirent pas l’ordre du roi. » (Héb 11.23). Amram et Jokébed ont pris ensemble ce risque, dans la foi et la crainte de Dieu.
– Dès avant la naissance de Samson, Manoach et sa femme sont constamment cités ensemble (lire Juges 13). Quand Samson est devenu grand, il descend à Thimna et voit là une fille des Philistins qu’il veut prendre pour femme. « Son père et sa mère lui dirent : N’y a-t-il point de femme parmi les filles de tes frères et dans tout notre peuple, que tu ailles prendre une femme chez les Philistins, qui sont incirconcis ? » (Jug 14.3) Ils sont unanimes pour poser à leur fils cette question pleine de sagesse.
Pour conclure, nous ne saurions mieux faire que citer cette parole d’un autre : « Le plus beau cadeau qu’un père puisse faire à ses enfants, c’est d’aimer leur mère » … et nous ajoutons : Le plus cadeau qu’une mère puisse faire à ses enfants est d’aimer leur père.
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