PROMESSES
Révélation de Jésus-Christ (Apocalypse 1.1-8)
1. Révélation
Commençons au commencement. Le Petit Larousse définit le terme « révélation » comme une « action de Dieu faisant connaître aux hommes les vérités que leur raison ne saurait découvrir ». Le mot grec apocalypsîs signifie littéralement : l’enlèvement du voile qui cache un objet. Dieu met en lumière des vérités cachées appelées « mystères » dans l’Écriture. Mais la révélation est-elle possible ? La vérité absolue peut-elle être exprimée dans les termes relatifs du langage humain ? Bien que l’homme ne puisse trouver Dieu en le cherchant, Dieu, dans son amour et sa sagesse infinis, peut trouver un moyen de parler à l’homme. Par la Parole incarnée et écrite, il a daigné communiquer sa pensée à l’humanité.
Dans la Bible, la révélation est un fait historiquement saisissable : ses intermédiaires sont connus, et leurs paroles ont été conservées. Croire, pour un chrétien, c’est accueillir cette révélation qui parvient aux hommes portée par l’histoire.
Le dernier livre de la Bible, l’Apocalypse de Jean est, par définition même, une révélation (v. 1). Non plus centrée sur la vie terrestre de Jésus, mais sur les conséquences de sa mort et de sa victoire, et orientée vers sa manifestation finale. Gardons en mémoire que ce mot révélation souligne l’origine divine, unique et sûre des textes que nous allons méditer : loin d’être le fruit de réflexions philosophiques humaines, de tâtonnements mystiques ou du développement naturel de la pensée religieuse selon un quelconque schéma évolutionniste, ces textes nous viennent de Dieu et sont, par conséquent, dignes de foi.
2. Dieu
Source de la Révélation, Dieu se laisse découvrir par le biais d’une liste de noms propres et de titres riches de signification.
• « Celui qui est, qui était, et qui vient » (1.4,8c) : L’expression est une anomalie grammaticale en grec : 1° la préposition apo (de la part de) est suivie d’un nominatif et non du génitif habituel ; 2° en l’absence d’un participe passé, l’imparfait én (était) est précédé d’un article. Fautes de l’auteur ? Il semble plutôt que celui-ci subordonne sciemment une « mauvaise » grammaire à une théologie majestueuse pour nous livrer une paraphrase du Nom ineffable (le tétragrammaton YHVH) par lequel Dieu s’était révélé à Moïse (Ex 3.14-15). L’expression se présente donc comme un titre qui exprime quelque chose au sujet du caractère de Dieu : celui qui existe éternellement en lui-même, sans début ni fin, et qui ne change pas. Ce titre fortifiera la foi de l’Église persécutée, en lui rappelant que Dieu, éternel et immuable, exerce un contrôle souverain sur le cours de l’histoire.
• « Je suis l’alpha et l’oméga » (1.8a) : Déjà les Hébreux avaient utilisé les lettres de l’alphabet comme chiffres, ou pour exprimer la totalité d’une idée ; d’où le commentaire rabbinique que « Adam avait transgressé la loi entière, d’aleph jusqu’à tau » (la première et la dernière lettres de l’alphabet hébreu). À leur tour, les Grecs et les Romains ont fait de même. Tout est en Dieu : primauté temporelle et causale du Dieu unique, suprême — vérités affirmées dans l’Ancien Testament et résumées par ce titre.
« Je suis le premier et je suis le dernier. Et hors de moi il n’y a point de Dieu. » (És 44.6) « C’est moi qui suis le premier, c’est aussi moi qui suis le dernier. Ma main a fondé la terre, et ma droite a étendu les cieux. » (És 48.12-13)
Il s’agit du Nom qui est au-dessus de tout autre nom où sont concentrées toute dignité, toute majesté et toute gloire en une Personne divine, unique et sublime, sans frontière géographique ni limitation historique. Détail remarquable : ce titre est attribué au début et à la fin du livre, d’abord à Dieu le Père (1.8 ; 21.6) mais aussi à Dieu le Fils (12.13 ; 21.13).
• « Le Seigneur Dieu » (1.8b) : Le titre grec kurios (maître ou seigneur), correspond à l’hébreu Adonaï : c’est le titre d’autorité suprême, attribué à Celui qui domine, qui règne sur la création, sur l’humanité et sur l’histoire. Source d’encouragement pour les Églises d’Asie exposées à la persécution. Notre réponse à nous ? Accepter sa seigneurie et nous y soumettre avec joie et sans réserve.
• « Le Tout-Puissant » (1.8d) : C’est la traduction donnée par la version des Septante de l’expression « l’Éternel des armées célestes » (en hébreu, YHVH Sebaot). Ce titre pourrait aussi correspondre à l’hébreu El Schaddaï : celui qui fortifie, enrichit, satisfait… et châtie son peuple. Ici l’allusion se rapporte moins à l’omnipotence divine qu’à la suprématie totale que Dieu exerce. Notons aussi que ce titre a une résonance messianique : le Fils qui nous est donné (És 9.5) est appelé, entre autres, « Dieu puissant ».
3. Jésus-Christ
Jean intitule son ouvrage « Révélation de Jésus-Christ ». Le petit mot « de » peut signifier :
– soit la possession : la Révélation appartient à Jésus-Christ, car « Dieu la lui a donnée » ;
– soit le thème central du livre : la Révélation est « au sujet de Jésus-Christ », elle le concerne en premier lieu ;
– soit que Jésus-Christ est l’agent de la Révélation, chargé de la transmettre, comme dit la suite du texte : « pour montrer à ses serviteurs […] et qu’il [Jésus-Christ] a fait connaître, par l’envoi de son ange, à son serviteur Jean. »
L’un de ces sens n’exclut pas les autres, car la proclamation est de Christ : il la possède et en assume l’entière responsabilité. De plus, elle le concerne, elle est centrée sur lui : la clé de la compréhension de l’Apocalypse est donc une lecture « christologique ». Mais le sens direct ici est peut-être le troisième : le Père confie au Fils la tâche de transmettre le message, comme le disent clairement les deux premiers versets, d’en être le « Révélateur », ce qu’il réalise en envoyant son ange à Jean. Jésus seul est digne de dicter les lettres aux sept Églises d’Asie (ch. 2-3), d’ouvrir le livre (ch. 5) et d’en dévoiler le contenu (ch. 6-8).
La désignation complète « Jésus-Christ » est utilisée trois fois dans les cinq premiers versets, et nulle part ailleurs dans la suite du livre ! Cet usage correspond au style solennel de l’entrée en matière :
• « Jésus » est tiré du grec Iésous, provenant de l’hébreu Yeshua : l’Éternel est salut. « Tu lui donneras le nom de Jésus, car c’est lui qui sauvera son peuple de ses péchés. » (Mat 1.21)
• Le titre « Christ », juxtaposé au nom personnel Jésus, vient du grec Christos (oint), traduit de l’hébreu Mâshîah (oint, messie).
Le Christ, l’Oint par excellence, réunit en sa seule personne les trois offices dans lesquels, au temps de l’ancienne alliance, on entrait par une onction d’huile : prophète, sacrificateur et roi. Ces trois offices sont évoqués au v. 5 :
• « Le témoin fidèle » rappelle son onction prophétique. Jésus est le prophète définitif, le dernier et le plus grand des prophètes qui nous transmet, dans l’Apocalypse, la Révélation dernière de Dieu.
• « Le premier-né d’entre les morts » : Jésus est le souverain sacrificateur qui, par le sacrifice de lui-même, nous a acquis le salut et ouvert la voie jusqu’au Père et qui, par sa résurrection, devient le garant de notre propre résurrection.
• « Le souverain des rois de la terre » fait clairement allusion à son onction royale. Fils de David, Jésus est le « Roi des rois et le Seigneur des seigneurs », qui reviendra bientôt établir son règne sur toute la terre. Quel autre descendant de David, depuis la destruction des archives généalogiques à Jérusalem en l’an 70, pourrait prétendre à ce trône ?
• « Celui qui vient » : Le verset 7 mériterait à lui seul un article entier ! Il cite deux prophéties messianiques de l’A.T. : « Et voici que sur les nuées du ciel arriva comme un fils d’homme » (Dan 7.13) ; « Ils tourneront les regards vers moi, celui qu’ils ont transpercé. Et ils porteront son deuil. » (Zach 12.10)
Ce verset fait du retour de Jésus Christ le thème central de l’Apocalypse, et affirme son universalité : ce retour sera glorieux, visible pour tous les hommes sans limitation du temps ou de l’espace. Celui qui est — et qui nous aime — qui était — et qui nous a rachetés — celui-là même vient !1
Ainsi, l’Apocalypse fait du cœur de l’enseignement prophétique de l’Ancien Testament le centre de ses visions. Le point culminant, le seul, grand événement universel qui réunit tous les endroits, époques, races et attentes, est le retour du Seigneur, avec ses conséquences pour les croyants et les incrédules.
4. Heureux (1.3)
Voici la première des sept béatitudes distribuées à travers le livre2. Jean déclare heureux — c’est-à-dire objet de la faveur et de la bénédiction de Dieu — celui qui lit les paroles de la prophétie ; heureux aussi sont ceux qui en écoutent la lecture et la mettent en pratique. Cette béatitude reproduit presque mot pour mot celle que Jésus avait prononcée : « Heureux plutôt ceux qui écoutent la parole de Dieu, et qui la gardent ! » (Luc 11.28) Remarquons que Jean place son ouvrage sur le même niveau que la littérature prophétique de l’Ancien Testament, et lui reconnaît une autorité morale qui appelle le lecteur croyant à une lecture et une écoute attentive, puis à un engagement dans une obéissance fidèle. Puissions-nous entendre d’emblée cette recommandation !
1 Un commentateur suggère que l’expression « avec les nuées » laisse entendre qu’il sera accompagné par les rachetés, cf. Apoc 19.14,19.
2 Pour les 6 autres, voir 14.13 ; 16.15 ; 19.9 ; 20.6 ; 22.7,14. Cf. l’article de Scott McCarty dans ce même numéro.
T. Ernest Wilson1 a écrit : « Le but de toute œuvre missionnaire des assemblées est de planter des églises néotestamentaires sur sol indigène, totalement autonomes, sans aucune domination étrangère, et dépendant du Saint-Esprit pour leur direction et progrès. Tandis qu’on poursuit des activités médicales, éducatives et sociales, l’objet principal n’en reste pas moins l’établissement de l’église indigène ».
Cette déclaration soulève un certain nombre de questions : Qu’entend-on par églises néo-testamentaires ? Quels principes le N.T. nous donne-t-il pour l’établissement de l’Église ? Ces principes fonctionnent-ils aujourd’hui ?
A. Principes directeurs
Qu’est-ce que l’Église ?
Trois mots grecs nous aideront à comprendre la signification de ce mot.
1. Ekklésia
Ce mot vient du verbe ekkaléô, qui signifie littéralement « appeler en dehors de ». Il désignait le gouvernement municipal d’Athènes, où des représentants de différents groupes dans la société étaient appelés pour, en quelque sorte, « sortir de leurs groupes » et se réunir, se trouver ensemble dans un but précis. Ainsi, l’Église n’est ni un bâtiment ni une institution mais un rassemblement de personnes qui ont quelque chose de très important en commun : elles ont répondu à l’Évangile, la Bonne Nouvelle du Seigneur Jésus-Christ, Fils de Dieu, qui est venu dans le monde, a souffert et est mort pour leurs péchés, puis est ressuscité. Elles se sont repenties de leurs péchés, ont mis leur confiance en Jésus, reconnaissant en lui leur Sauveur et leur Seigneur. Pardonnées et adoptées dans la famille de Dieu, elles sont rassemblées pour des raisons que nous évoquerons plus loin.
Le mot ekklésia est utilisé dans deux sens :
• Dans un sens universel, unissant tous les croyants partout et en tout temps en une seule grande famille spirituelle. Le Seigneur, par exemple, dit à Pierre « Je bâtirai mon Église » (Mat 16.18). Paul écrit que par l’Église « la sagesse de Dieu doit être connue » (Éph 3.10).
• Dans un sens local, faisant allusion aux croyants qui se réunissent à une époque et dans un lieu particuliers, où ils agissent comme une congrégation visible, tangible. Ainsi, notre Seigneur donne des instructions à l’église locale sur la manière d’exercer la discipline (Mat 18.15-20). De nombreuses fois, les apôtres adressent leurs lettres à des églises locales. Notre étude ici sera consacrée à cette utilisation du mot.
2. Koinônia
Koinônia vient de koinos : « commun ». Le mot parle de la communauté et de l’unité. Un exemple merveilleux nous est donné dans Actes 2.41-47, où les premiers chrétiens avaient tout en commun, tandis qu’ils se consacraient à l’enseignement des apôtres, à la communion fraternelle, à la fraction du pain et à la prière.
Cette communion dans l’unité s’exprime de plusieurs manières :
• la louange et l’adoration,
• la prière,
• l’évangélisation des non-convertis,
• l’édification des croyants,
• les conseils pastoraux,
• les services sociaux.
Notre Seigneur a donné à ses disciples un exemple de ce ministère « holistique » en enseignant, prêchant, nourrissant les affamés et guérissant les malades (Mat 9.35) ; puis il les a envoyés faire la même chose (Mat 10.1s).
3. Kuriakê
Kuriakê dérive de kurios : « Seigneur ». Il nous rappelle que l’Église appartient au Seigneur ! C’est lui qui l’a fondée, qui la bâtit et qui la dirige par l’intermédiaire de la Parole et du Saint-Esprit. Il n’a pas dit à Pierre : « Je bâtirai ton Église », pas plus que : « Tu bâtiras mon Église » ni même : « Vous bâtirez votre Église ». Non ! Il a dit : « Je bâtirai mon Église ! »
Autonomie de l’église locale
Alors que les apôtres missionnaires voyageaient et prêchaient l’Évangile, ils fondaient des églises locales, les laissaient sous la direction d’anciens, et les confiaient au Seigneur (Act 14.21-23). Les premiers chapitres de l’Apocalypse contiennent des lettres adressées par le Christ individuellement à sept églises différentes, chacune de celles-ci étant responsable directement envers lui.
Une église autonome, par définition, se gouverne elle-même. Elle n’est soumise à aucun synode, conseil ou hiérarchie, soit religieux soit politique. L’Histoire dénonce la tendance vers la centralisation d’autorité qui a marqué l’évolution malsaine, non-biblique, de l’Église au travers des siècles.
L’église locale doit-elle pour autant « se débrouiller seule », indépendamment de toute relation extérieure ? Pas du tout. Les églises locales ont besoin les unes des autres pour la communion fraternelle, la communication, la collaboration et la consultation. Le peuple de Dieu est appelé à former une famille spirituelle de frères et sœurs dans la foi qui donnent, reçoivent exhortation et encouragement spirituels. En conséquence, l’église, l’assemblée locale, apprend à être responsable directement envers le Seigneur, développe la force nécessaire pour repousser toute attaque hostile, et reste assez souple pour s’adapter à la culture locale. N’ayant pas d’autorité centralisée qui pouvait être directement visée, les assemblées en Allemagne pendant l’ère nazie ont été protégées de l’interférence par ce régime dictatorial. Il y a plus de 40 ans T. E. Wilson écrivit à ce propos : « À travers la brousse et dans pratiquement toutes les villes [de l’Angola], on peut trouver des rassemblements de chrétiens africains, complètement indigènes, qui se réunissent de la manière la plus simple, voire primitive, et cherchent à répandre l’Évangile parmi les leurs. Leur seule littérature est la Bible ou le Nouveau Testament traduit dans leur propre langue, un recueil de cantiques qu’ils aiment – car ils sont un peuple musical qui aime chanter – et peut-être un ou deux traités sur le baptême et l’ordre ecclésiastique […]. Il y a littéralement des centaines de tels groupes en Angola aujourd’hui, qui se multiplient constamment en nombre malgré les difficultés qui viennent de sources diverses 2 ».
En plus de son autonomie, l’église locale veille à son indépendance financière et à sa multiplication par l’évangélisation.
B. Gouvernement collégial
1. Anciens
Selon un texte déjà évoqué (Act 14.23), Paul et Barnabas « firent nommer » des anciens dans chaque église locale. Nous ne sommes pas renseignés sur la manière exacte dont il l’ont fait. Ils ont probablement respecté la coutume des synagogues juives. Paul écrit à « tous les saints en Christ-Jésus qui sont à Philippes, aux évêques et aux diacres » (Phil 1.1). Il exhorte les Thessaloniciens à « avoir de la considération pour ceux qui travaillent parmi vous, qui vous dirigent dans le Seigneur et qui vous avertissent » (1 Thes 5.12 ; Héb 13.17). Les anciens portent deux appellations :
• Presbuteros (litt. plus âgé) : indique la maturité de l’expérience spirituelle, et la sagesse ;
• Episkopos (du verbe episkopéô, veiller sur) : indique la nature de leur ministère de surveillants, capables de diriger l’assemblée.
Deux passages soulignent leurs qualités morales et spirituelles (1 Tim 3.1-7 ; Tite 1.5-9). La manière de les choisir est moins importante que la nécessité qu’ils soient reconnus par l’assemblée en vertu de leur caractère et de leur engagement actif dans la vie et le bien-être de l’église. Une pluralité d’anciens protège contre le danger de domination par un seul homme.
2. Diacres
Le mot diakonos est souvent utilisé à travers le Nouveau Testament, généralement dans le sens de « serviteur ». Paul reconnaît toutefois un groupe officiel d’hommes, à côté des anciens, qu’il appelle « diacres » (Phil 1.1). Leur origine remonte probablement au moment où les apôtres demandent à l’Église de choisir des hommes pleins de foi, du Saint-Esprit et de sagesse, qui les libéreraient de considérations pratiques, leur permettant de se consacrer à la prière et au ministère de la Parole (Act 6.1-7). L’expression « servir aux tables » semble indiquer qu’ils auraient le rôle d’être des aides, des serviteurs en choses pratiques3. Nous ignorons si la femme Phoebé était simplement une « servante » de l’église à Cenchrées, ou si elle avait le titre officiel de « diaconesse » (Rom 16.1-2).
C. Ministères multiples
Le ministère d’un seul homme ne peut jamais couvrir tous les besoins d’une église locale, car aucun homme ne possède toutes les qualifications indispensables. C’est la raison pour laquelle divers membres ont diverses « manifestations » du Saint-Esprit sous la forme d’un ou de plusieurs dons spirituels (charismes). Ce sujet mériterait une étude complète en soi, mais nous devons nous contenter ici d’un bref survol. Paul consacre plusieurs passages d’enseignement à ce propos 4 . Le but principal des ministères multiples est d’édifier les saints, de les conduire vers une unité plus grande, vers la maturité et la stabilité, de les exhorter, de les consoler, afin que, par la qualité de leur vie, ils confessent que « Jésus est le Seigneur ».
Le Saint-Esprit est souverain, et libre de distribuer les dons spirituels comme bon lui semble. Paul nous encourage à « aspirer aux dons les meilleurs » (1 Cor 12.31). Les dons d’importance primordiale, toujours valables, sont ceux qui équipent les évangélistes, les pasteurs-enseignants, les aides, les administrateurs, et qui permettent le discernement des esprits. Sans l’amour ces dons restent inutiles. Les croyants – anciens en particulier – devraient encourager les membres à s’engager activement dans la vie de l’église, montrant de cette manière qui possède l’aptitude pour quel ministère.
D. Sacerdoce universel des croyants
S. Ridout5 souligne que dans l’Ancien Testament le service religieux était centré sur l’adoration : le sanctuaire, la prêtrise, les sacrifices, les temps prescrits et les fêtes. Mais tout cela, dit-il, était provisoire et incomplet. Le Christ est venu, le voile a été déchiré, et nous avons maintenant la hardiesse d’entrer dans le lieu très saint par le sang de Jésus. « L’adoration chrétienne a sa source dans une œuvre de rédemption accomplie : son objet est Dieu le Père et le Fils ; sa place est la présence de Dieu ; sa puissance est le Saint-Esprit ; sa matière sont les vérités pleinement révélées dans la Parole de Dieu ; et sa durée est l’éternité ». Tous les croyants sont sacrificateurs (1 Pi 2.5,9) et seuls les croyants le sont ! Ridout de continuer : « La grande occasion pour adorer est quand les croyants sont réunis le premier jour de la semaine pour rompre le pain. La louange, sans être limitée à ce moment là, s’y exprime de la façon la plus complète […]. Le Seigneur est au milieu de nous pour conduire nos accents de louange (Héb 2.12). Le Saint-Esprit est présent pour guider, selon la Parole (1 Cor 14.25) ; et les symboles qui rappellent l’amour du Sauveur manifesté dans sa mort sont là pour être partagés. » Les sacrifices de l’Ancien Testament ont cédé la place à des « sacrifices spirituels » de louange dans le chant, la prière, la lecture et la méditation de la Parole, et la participation au pain et à la coupe.
E. Deux ordonnancs
Le Seigneur a institué le baptême d’eau (Mat 24.19) et le repas du Seigneur (Mat 26.17s). Le baptême du croyant par immersion, accordé à ceux qui le demandent comme une confession publique de leur foi en Christ et leur engagement envers lui, est un acte simple d’initiation, normalement administré par un ancien. Le repas du Seigneur est, dans les mots de S. Ridout, « une fête commémorative […] où le peuple du Seigneur, réuni auprès de lui, se souvient de son amour plus fort que la mort6 ».
F. Ces principes fonctionnent-ils aujord’hui ?
En 1975, une guerre civile qui devait durer 27 ans a éclaté en Angola. Parmi les missionnaires qui devaient quitter le pays figuraient mes parents, qui avaient consacré plus de 50 ans à une œuvre paisible centrée sur Kavungu, à l’extrême est du pays dans la région du haut Zambèze. Ils ont mis deux valises dans leur voiture et sont partis vers le sud jusqu’en Zambie, laissant derrière eux toutes leurs possessions personnelles. Ils ont aussi laissé deux assemblées, des anciens formés et préparés pour l’épreuve, un dispensaire médical, une école primaire, et la Bible traduite dans la langue Luvale.
Ils se sont retirés, âgés de 75 ans, aux États-Unis, où ma mère est décédée en 1979, et mon père l’a rejointe 17 ans plus tard, âgé de 95 ans. La dernière fois que je l’ai vu, quelques mois avant son départ, il se demandait tristement s’il restait quoi que se soit de leurs labeurs. Il se pouvait que tous les croyants soient morts… J’ai écrit à une missionnaire de ma connaissance à Chavuma, juste de l’autre côté de la frontière en Zambie, lui demandant si elle avait des nouvelles. J’ai pu transmettre sa réponse stupéfiante à mon père, pour le consoler, juste avant son départ pour la gloire.
Alors que le pays était encore fermé aux blancs, des croyants africains avaient fait le voyage vers le nord, et étaient revenus pour dire que les réfugiés rentraient au pays afin de reconstruire à partir de zéro, et que des anciens des assemblées organisaient des retraites pour enseigner l’Écriture, en utilisant la Bible traduite en Luvale par mon père. Au milieu de toute cette souffrance atroce et du dénuement absolu, des maisons détruites et des champs dévastés, les églises se sont multipliées pour atteindre près de 70 congrégations en 2007. Aujourd’hui, vous représentez 500 000 croyants réunis dans 2 000 communautés locales à travers 15 des 18 provinces de l’Angola !
« C’est de l’Eternel que cela est venu : c’est un miracle à nos yeux. C’est ici la journée que l’Eternel a faite : à cause d’elle, soyons dans l’allégresse et la joie ! » Ps 118.23-24
1 Angola Beloved, Loiseaux Brothers, 1967, p. 15. T. Ernest Wilson fut un des missionnaires pionniers des Assemblées de Frères qui ont commencé une œuvre en Angola dès 1884.
2 In Angola Beloved, Loiseaux Brothers, 1967, p. 16.
3 Voir les qualités nécessaires décrites en 1 Tim 3.8-13.
4 Voir 1 Cor 12 à 14 ; Rom 12.3-8 ; Éph 4.1-16.
5 VThe Church and its Order According to Scripture, Loiseaux Brothers, 1915, pp. 42ss.
6 Op. cit. p. 36.
Né en 1925, F. Horton passe sa première enfance avec ses parents missionnaires américains à Kavungu en Angola. Il fait ensuite ses études à l’Université du Cap et au Northwestern Technological Institute et obtient sa licence en génie civil. Il travaille comme ingénieur de recherche en hydrologie attaché à la Tennessee Valley Authority à Knoxville, États-Unis. En 1950 il se marie avec Anne-Marie Béguin. Il fait ensuite ses études théologiques au Biblical Seminary à New York. De 1952 à 1964, il s’établit à Paris avec son épouse pour exercer un ministère de secrétaire général des GBU en France. Deux fils naîtront à Paris ; ils sont maintenant mariés, médecins et établis en Suisse. Dès 1964, Frank Horton exerce son ministère comme professeur à l’Institut Biblique Emmaüs en Suisse. Il assume la responsabilité de directeur de l’Institut de 1971 à 1991. Sa retraite sera active. Jusqu’en 1999, il donne des cours occasionnels à l’Institut Emmaüs, et continue son ministère d’enseignement biblique dans diverses églises, en Suisse et dans les pays francophones proches et lointains, et dans des conventions bibliques. Il est l’auteur d’un ouvrage sur l’Épître aux Éphésiens et d’articles qui ont paru dans divers périodiques évangéliques. Son ministère l’a conduit dans plusieurs pays francophones, en Europe et en Afrique. Depuis de nombreuses années, il est membre du comité de soutien de Promesses et ses conseils et contributions écrites sont des plus appréciées. |
Chantez à l’Eternel [YHWH] un cantique nouveau !
Chantez à l’Éternel, toute la terre !
Chantez à l’Éternel, bénissez son nom,
Annoncez de jour en jour la bonne nouvelle de son salut !
Racontez parmi les nations sa gloire,
Parmi tous les peuples ses merveilles !
Psaume 96.1-3
Un seul Dieu suprême et véritable
« YHWH fait des Israélites ses évangélistes, pour annoncer son salut à toutes les nations. Ils ont à chanter jusqu’à ce que le monde entier chante également. Ce chant est nouveau parce que la miséricorde renouvelée fait appel à des mélodies nouvelles. Les termes principaux de cette strophe sont : chant nouveau, toute la terre, salut, gloire, merveilles. Les Israélites sont appelés à chanter [3x], à bénir, à annoncer, et à raconter. Le troisième de ces mots est, dans la version des Septante, l’équivalent du mot néo-testamentaire : prêcher l’Évangile. » 1
a. Imposer le monothéisme juif… mais de quel droit ?
D’où vient la croyance en un seul Dieu ?
Lors d’un voyage en Égypte, il y a quelques années, mon épouse et moi avons assisté à un spectacle « son et lumière », mis au point avec les voix d’acteurs de la Comédie Française, et présenté au Temple de Karnak, à Louxor. Notre étonnement fut grand d’entendre dire que Moïse avait reçu l’inspiration de la notion monothéiste de la part du Pharaon Aménophis IV, de la XVIIIe dynastie, aux environs du milieu du XIVe s. av. J-C. Souvenons-nous du fait que, pour briser le pouvoir politique considérable des prêtres de Thèbes, Aménophis IV avait déclaré qu’il n’y avait qu’un seul dieu, le disque solaire Aten. Il adopta le nom d’Akhenaten, et déménagea en aval le long du Nil pour établir une nouvelle ville capitale d’Égypte à laquelle il donna le nom d’Akhetaten — aujourd’hui Tell El Amarna. Après sa mort, tout redevint « normal », et l’Égypte retourna rapidement à son polythéisme traditionnel.
L’hypothèse avancée lors du spectacle de Louxor ne tient pas compte de la chronologie dite « longue », qui situerait Moïse dans la période précédant le règne d’Aménophis IV (vers 1450). Dans un tel cas de figure, c’est plutôt le Pharaon qui aurait pu être inspiré par le témoignage de Moïse… mais passons.
De tels rapprochements entre le Dieu biblique et d’autres divinités ont souvent tenté les chercheurs. Barbara Watterson, par exemple, laisse entendre que la résurrection de Jésus-Christ aurait eu son origine dans l’histoire du dieu égyptien Osiris, le mieux connu et le plus populaire du panthéon égyptien, dont l’attraction « résidait dans la croyance qu’il avait vécu sur la terre comme un homme qui n’apportait que du bien à l’humanité, mais qui fut trahi et mis à mort. Sa résurrection et l’espérance de la vie éternelle offerte à tous rehaussaient sa popularité. » 2
Dans quelle mesure les Hébreux ont-ils hérité leurs croyances religieuses des peuples contemporains d’Égypte et du Croissant fertile ? Deux écoles de pensée défendent des thèses contradictoires :
1) l’école « évolutionniste », non- ou anti-théiste, soutient l’idée que les Hébreux ont tout reçu, y compris leur religion et leur système éthique, de leurs contemporains, dans le contexte général d’idées religieuses qui évoluaient en se raffinant à partir de l’animisme, pour passer par le polythéisme et arriver enfin au monothéisme ;
2) l’école théiste de la « Révélation » insiste sur le fait que les Hébreux ressemblaient à leurs contemporains dans tous les domaines — culture, agriculture, architecture, langage, écriture, etc. — à une exception près : leurs croyances religieuses étaient radicalement différentes parce que reçues, par révélation, d’une source divine.
b. Arguments en faveur de la Révélation
Feu l’éminent spécialiste Samuel Zwemer, professeur émérite d’histoire de la religion et des missions chrétiennes à la Faculté de théologie de Princeton (USA), rejette fermement la première thèse en faveur de la seconde, en écrivant :
« L’évidence soutenant un monothéisme primitif est trouvée, non seulement dans tous les domaines de la culture primitive, mais aussi dans les formes antérieures des grandes religions ethniques. » Et d’étayer sa conviction en disant : « Cet argument est fondé, non pas principalement sur les Écritures, ni sur des préconceptions dogmatiques, mais sur la méthode historique d’investigation […]. Le recours à la méthode historique en anthropologie a obligé de nombreux savants à reformuler leur approche de l’origine de la religion et, ce faisant, à s’approcher des Écritures. Le point de vue évolutionniste a été lié à l’axiome douteux que le supérieur doit toujours procéder de l’inférieur. Cependant, force nous est de conclure que l’histoire de la religion a été marquée par le déclin et la dégénérescence, plutôt que par une montée évolutive ininterrompue. » 3
Le Dr J. A. Thompson, directeur de l’Institut australien d’archéologie à l’Université de Melbourne, a examiné « la religion païenne aux temps patriarcaux ». Voici ce qu’il écrit au sujet d’Abraham :
« Abraham, avant son séjour en Canaan, vivait parmi les Mésopotamiens, qui étaient polythéistes. Les pratiques religieuses de son peuple doivent avoir persisté pendant de longs siècles, car Josué dut exhorter Israël : « Ôtez les dieux qu’ont servi vos pères, de l’autre côté du fleuve et en Egypte, et servez l’Eternel. » (Josué 24.14) La religion sumérienne de Mésopotamie avait un panthéon […]. Tous les dieux rivalisaient de popularité. Abraham était probablement en contact avec le peuple sémite d’Our. Par les Amorites, il avait eu connaissance de dieux tels que El (et son épouse Achéra), Achtarot, Anat, Melkart, et d’autres que nous rencontrons parmi les Canaanéens qu’Israël eut à affronter par la suite au cours de son histoire, tels que Baal, Dagon et Chamach.
« Au sein de ces courants religieux divers, Abraham prit conscience de la réalité d’un Dieu unique, qu’il connut comme El Chaddaï (Dieu tout-puissant, Genèse 17.1-2) […]. Ses descendants eurent à découvrir les conséquences d’une telle vision dans l’ambiance religieuse très différente de l’Égypte, où ils étaient devenus esclaves […]. Certains spécialistes ont avancé l’idée qu’il y a eu un mouvement partiel, mais finalement sans effet, vers le monothéisme en Égypte à l’époque du roi hérétique Akhénaton (vers 1356-1340 av. J-C.) […]. Le dieu suprême et universel du soleil, Amon-Rê, fut débarrassé de tous ses aspects mythologiques et considéré comme le seul Dieu, connu sous le nom d’Aton (disque solaire) […]. Cependant, le culte d’Aton ne convenait pas à la religion nationale d’Égypte, et le monothéisme naissant disparut rapidement. » 4
Citons, parmi d’autres autorités compétentes qui confirment ces positions, l’exemple de G. H. Livingstone, professeur d’Ancien Testament à la Faculté de théologie Asbury (USA), extrait d’un chapitre de 20 pages consacré à la relation entre l’A.T. et les cultures anciennes :
« L’accumulation des renseignements provenant de l’ancien Proche-Orient fournit un arrière-plan essentiel à l’Ancien Testament. Si l’on compare la matière de l’A.T. avec la scène culturelle plus large, l’on constate que le peuple hébreu ressemblait à ses voisins en ce qui concerne l’hébergement, la nourriture, les vêtements, le commerce, l’agriculture, les métiers, les armes, le langage, l’écriture et bien d’autres aptitudes. Mais en ce qui touche à la théologie et à la morale, les Hébreux différaient totalement de leurs voisins, bien qu’il ne leur ait pas été facile de maintenir leur caractère distinctif, car l’idolâtrie exerçait une pression à la fois attirante et puissante. Beaucoup d’entre eux succombèrent au polythéisme, cependant qu’un reste fidèle persévérait ; c’est ce reste que Dieu a affermi pour être sa ‘tête de pont’ dans le monde.
« En lieu et place de la vision du monde et des mœurs polythéistes, Dieu instilla dans les structures [religieuses juives] la vérité le concernant : seul Dieu véritable, Souverain, Juge, Sauveur et Créateur […]. La totalité des adaptations et innovations inscrites dans l’A.T. avaient pour but d’exposer les folies et la banqueroute de l’idolâtrie, et de poser les fondements sur lesquels se développerait un peuple choisi et racheté, préparant ainsi un peuple saint pour l’avènement du Messie. » 5
c. Témoignage de l’Écriture
À partir de la révélation que donne Dieu de lui-même dès la création dans les premiers chapitres de la Genèse, ce monothéisme originel dégénère en polythéisme païen pendant les siècles suivants. De temps en temps, Dieu intervient pour se révéler tout à nouveau à ceux qu’il a choisis, opérant ainsi un « nouveau départ ». Nous avons déjà évoqué l’exemple d’Abraham qui, appelé d’Our en Chaldée aux alentours de 2000 av. J-C., laisse derrière lui le panthéon sumérien et s’attache au seul vrai Dieu, El Chaddaï.
Environ six siècles plus tard, après les quatre siècles pendant lesquels les descendants d’Abraham, esclaves en Égypte, ont adopté le panthéon égyptien, Dieu se révèle de nouveau à Moïse, au buisson ardent, sous le nom de YHWH (le « Je suis » éternel, Ex. 3-4). Au travers des dix plaies, il démontre son autorité absolue et sa suprématie sur le panthéon égyptien tout entier, dévoilant qu’il est le seul vrai Dieu, en Égypte comme partout ailleurs. Le but du rendez-vous avec Israël au Sinaï est de lier les Hébreux à lui-même en tant que possession précieuse (Exode ch. 19ss). Les deux premiers des dix commandements appellent Israël à une fidélité exclusive, et Dieu ajoute un avertissement contre tout glissement en arrière vers l’idolâtrie.
L’histoire subséquente d’Israël présente une série de descentes dans l’apostasie : il ne peut pas résister, semble-t-il, à l’attraction des dieux visibles et tangibles de ses voisins, avec leurs rites sensuels, et leurs promesses de satisfaction immédiate. L’incident du veau d’or (Ex. 32) met en relief l’influence séductrice exercée par les divinités bovines qu’étaient Hathor et Apis. À maintes reprises les prophètes sont envoyés pour dénoncer cette tendance et exhorter Israël à revenir à sa relation d’alliance avec YHWH. Plus tard, l’exil à Babylone servira de leçon magistrale pour prévenir Israël contre un retour à l’idolâtrie.
d. Et Jésus dans tout cela ?
Parmi les textes prophétiques de l’A.T. qui annoncent l’avènement du Messie, en précisant qu’il sera Dieu lui-même venu en chair, citons És 9.6 :
« Car un enfant nous est né, un fils nous est donné,
Et la souveraineté (reposera) sur son épaule ;
On l’appellera Admirable, Conseiller, Dieu puissant,
Père éternel, Prince de la paix. »
Le Nouveau Testament abonde en témoignages rendus à la déité de Jésus de Nazareth : l’Évangile selon Jean, les épîtres de Paul, l’Épître aux Hébreux, etc. Citons en particulier ce que dit Jésus à son propre sujet dans Jean 8.58 :
« En vérité, en vérité, je vous le dis, avant qu’Abraham fût, MOI, JE SUIS ».
Les dirigeants juifs ont bien compris le sens de sa déclaration car, le croyant coupable de blasphème, ils ont pris des pierres pour le lapider.
Par conséquent, tout ce que nous avons dit au sujet du seul Dieu véritable, suprême sur toute la terre, s’applique également à la personne de Jésus-Christ.
e. Considérations pratiques
Nos convictions « évangéliques » sont fondées sur des réalités solides, objectives, historiques. « La foi chrétienne tient debout ou s’écroule avec l’assertion impérieuse que le Créateur tout-puissant de tout ce qui existe, a agi dans l’espace et le temps pour se révéler dans la nature et l’histoire, afin de racheter le monde au travers de la mort et la résurrection de Jésus-Christ. Il s’agit là d’une affirmation concernant les choses telles qu’elles sont, et non pas seulement de ce qui est ‘vrai pour moi’. » 6
Notre société paganisée du XXIe siècle n’est pas moins idolâtre que celles des temps anciens. Quel « dieu » adorez-vous ? Mammon, dieu de l’argent ? Aphrodite, déesse du sexe ? Dionysos, dieu de la bonne chère ? Apollon, dieu de la littérature et des arts ? etc. L’appel que Moïse lance au peuple d’Israël dans son dernier discours, devenu le « Grand Sh’mà » cité deux fois chaque jour par le juif pieux, garde toute son actualité :
« Écoute, Israël ! L’Éternel, notre Dieu, l’Éternel est un. Tu aimeras l’Éternel, ton Dieu, de tout ton cœur, de toute ton âme, et de toute ta force. »
(Deut 6.4-5 ; cf. Mat 22.37 ; Marc 12.30 ; Luc 10.27)
Forts de cette conviction, nous aurons la joie de chanter à la gloire de l’Éternel, et de proclamer avec courage à tous les peuples la bonne nouvelle de son salut.
NOTES
1 W. Graham Scroggie, The Psalms: Psalms 1 to 150, éd. Pickering & Inglis, London, 1948, p. 280.
2 B. Wattessen, The Gods of Ancient Egypt, London, 1984, p. 88.
3 S. Zwemer, The Origin of Religion, Loizeaux Brothers, New York, 1945, p. 12s.
4 J.A. Thompson, Vie et coutumes aux pays bibliques, Ligue pour la Lecture de la Bible, Lausanne, 1989, p. 316s.
5 F.E. Gaebelein, The Expositor’s Bible Commentary, Zondervan, Grand Rapids, USA, 1978, vol. 1, p. 355s.
6 Carol Stream, Christianity Today, Illinois, USA, juin 2005, p. 49s.
LES CINQ «SOLI» DES RÉFORMATEURS
5e formule
Dans le dernier numéro de PROMESSES, nous avons consacré un article à la quatrième formule des cinq soli: «Sola Fide». Les 120 pasteurs, théologiens et éducateurs réunis à Cambridge en avril 19961 réaffirmèrent la conviction des Réformateurs en déclarant que «la justification est par la grâce seule au travers de la foi seule [c’est nous qui soulignons] grâce au Christ seul», et d’ajouter que «la justification ne repose sur aucun mérite qui nous soit propre, ni sur la base d’une infusion de la justice de Christ en nous par voie sacramentelle »2.
Dérapage
La Déclaration de Cambridge se consacre ensuite à la cinquième et dernière formule: «Soli Deo Gloria», et constate avec inquiétude la quasi-disparition, dans nos milieux évangéliques, d’une adoration centrée sur Dieu. Voici un extrait de ce qu’elle dit:
«Partout où, dans l’Eglise, l’autorité biblique a été perdue, le Christ a été déplacé, l’Evangile a été biaisé ou la foi pervertie, cela a toujours été pour une seule raison: nos intérêts ont remplacé ceux de Dieu et nous appliquons nos méthodes à l’accomplissement de son œuvre. Que Dieu ne soit plus au centre de la vie de l’Eglise aujourd’hui est un fait répandu et lamentable. C’est cette perte qui nous permet de transformer l’adoration en divertissement, la prédication de l’Evangile en marketing, la foi en une technique, l’éthique en appréciation agréable de nousmêmes, et la fidélité en une quête du succès. En conséquence Dieu, le Christ et la Bible ont perdu une grande partie de leur valeur à nos yeux et ne pèsent plus beaucoup pour nous»3.
A ce sujet, le théologien Alfred Tozer écrivait il y a plus de quarante ans: «L’Eglise a abandonné la notion élevée de Dieu qu’elle avait autrefois, pour lui substituer un concept ignoble, indigne d’hommes capables de réflexion et d’adoration. Et elle a fait cela, non pas de propos délibéré, mais peu à peu, sans s’en rendre compte; et son inconscience rend sa situation d’autant plus tragique. Cette façon de concevoir Dieu, presque universelle parmi les chrétiens, est la source d’une centaine de moindres maux partout au milieu de nous. Une philosophie nouvelle de la vie chrétienne est la conséquence de cette faille fondamentale dans notre pensée religieuse»4.
J. M. Boice pose la question: «La situation s’est-elle améliorée au cours de ces dernières décennies? Il semble bien que non. Au contraire, notre obsession grandissante pour les banalités insignifiantes de la télévision, notre addiction aux divertissements égocentriques et la mondanité de notre culture n’ont fait qu’aggraver la situation. Et le plus triste dans tout cela est le fait que la plupart des chrétiens ne se rendent même pas compte de ce qui se passe»5.
Question insidieuse
Que Dieu cherche sa propre gloire est une affirmation parfois mal comprise et qui mérite, par conséquent, une explication réfléchie. Car la question a été posée: «Cette recherche n’est-elle pas égoïste?» Les a priori derrière cette question frôlent le sacrilège, en ce qu’ils rabaissent Dieu au niveau de l’humanité pécheresse, égocentrique. Non! Dieu désire la louange car il est digne d’être loué; il demande à être exalté à cause de sa grandeur et de sa bonté; bref, il veut être reconnu, apprécié, pour ce qu’il est. Cela nous conduit à nous pencher sur la notion biblique de la Gloire de Dieu, pour mieux la cerner.
La Gloire de Dieu dans l’Ecriture
La gloire de Dieu, c’est le rayonnement qui se dégage de sa personne, l’éclat insoutenable de toutes ses perfections. La Bible compare cette gloire à un feu dévorant qui éblouit, aveugle, et inspire la crainte, le respect, l’adoration; l’homme ne peut la voir tout entière et vivre. Pourtant, ceux qui ont une rencontre avec le Seigneur en perçoivent quelque chose: Israël et Moïse devant le tabernacle, Salomon lors de la dédicace du temple, Esaïe au moment de sa vocation, Ezéchiel dans sa vision, etc. La gloire divine est révélée dans la création et particulièrement dans l’homme formé à l’image du Seigneur; elle se manifeste au moyen des jugements; elle éclate surtout dans la rédemption offerte au monde entier. Cette gloire inaccessible du Dieu d’Israël s’est approchée de nous: en Christ nous avons pu la contempler et l’aimer sans être consumés par elle. Jésus l’a montrée par ses miracles, par sa sainteté parfaite, lors de sa transfiguration, de sa résurrection et de son ascension. Bientôt le Seigneur de gloire reviendra dans tout l’éclat de sa majesté pour juger et pour régner.
Par conséquent, rendre gloire à Dieu, ou donner gloire à Dieu, c’est le louer, lui rendre honneur, exalter et célébrer ses perfections (de là vient le terme de doxologie, formule de prière rendant gloire à Dieu). Glorifier Dieu, c’est donc lui rendre hommage, le reconnaître comme le seul souverain, et la source de tout bien. Celui qui se glorifie lui-même commet la faute grave de voler à Dieu l’honneur qui lui est dû, à lui seul. Cependant, glorifier Dieu ne se limite pas au «sacrifice de louange, c’est-à-dire le fruit de lèvres qui confessent son nom» (Héb 13.15). Jésus n’est-il pas notre modèle quand il dit au Père: «Je t’ai glorifié sur la terre; j’ai achevé l’oeuvre que tu m’as donnée à faire» (Jean 17.4).
Chose merveilleuse: le but cherché par Dieu est que sa gloire soit manifestée dans une relation bipartite. D’une part, il révèle sa gloire dans d’innombrables actes de générosité gratuite; et d’autre part, ses enfants répondent en lui donnant gloire par leurs actions de grâce pour tout ce qu’ils ont vu et reçu. Et par leur vie consacrée à l’obéissance, au service et au témoignage. L’homme a été créé en vue de cette communion réciproque dans l’amour, et la rédemption en Christ la rend possible pour des êtres déchus. Si Dieu a du plaisir en révélant sa bonté à ceux qui la reçoivent, il n’en est pas moins vrai que l’homme trouve son épanouissement et son bonheur en contemplant la gloire de Dieu, en lui adressant la louange et en lui consacrant sa vie. A ce sujet le Petit Catéchisme de Westminster pose en première question: «Quel est le but principal de la vie de l’homme? » puis répond: «Le but principal de la vie de l’homme est de glorifier Dieu et de trouver en lui son bonheur éternel»6. Nous comprenons, alors, pourquoi la théologie de la Réforme a tellement insisté sur ce principe: Soli Deo Gloria, et pourquoi nous avons besoin aujourd’hui de le redécouvrir et de le réaffirmer.
Tout est de lui, par lui et pour lui!
Pour être capables de rendre à Dieu la gloire qui lui est due, essayons de saisir quelque chose de l’origine, de l’étendue et du but de ses œuvres. Paul nous rappelle qu’«il n’y a qu’un seul Dieu, le Père, de qui viennent toutes choses, et pour qui nous sommes, et un seul Seigneur, Jésus-Christ, par qui sont toutes choses et par qui nous sommes»7.
Tout dans la création a sa source en Dieu, est soutenu par son pouvoir renouvelant, et a pour but sa gloire8. La création de l’homme s’inscrit dans ce contexte: nous lui devons notre existence et notre bien-être de tous les jours, de même que notre raison d’être – le glorifier! Antidote efficace contre la recherche égoïste du gain et du bonheur.
Le salut est de Dieu. C’est lui qui l’a conçu et réalisé, c’est lui qui l’amènera à la perfection. Son accomplissement est par Dieu, au travers de l’œuvre du Christ à la Croix; sa réalisation quotidienne en nous est aussi par Dieu, grâce à l’action de son Esprit; et tout cela est pour sa gloire. Les quatre soli examinés dans les articles précédents: sola scriptura – l’Ecriture seule – solus Christus – l’œuvre du Christ seul – sola gratia – la grâce seule – et sola fide – la foi seule – tout, tout, tout, vient de Dieu, est réalisé par lui, et conduit à un seul aboutissement: soli Deo gloria – à Dieu seul la gloire!
Enfin, le jugement est de Dieu. Il sera exercé par Celui à qui il a délégué l’accomplissement de toutes ses œuvres – son Fils – et retentira à sa gloire9.
En conclusion
Laissons le mot de la fin à la Déclaration de Cambridge: «Dieu n’existe pas pour satisfaire nos ambitions humaines, nos convoitises, notre appétit de consommation, ni même nos intérêts spirituels personnels. Nous devrions de nouveau centrer notre adoration sur Dieu lui-même, plutôt que sur la satisfaction de nos besoins personnels. Dieu reste souverain dans l’adoration, et non pas nous. Nos soucis devraient concerner le royaume de Dieu et non pas notre propre sphère, notre popularité ou notre succès»10.
«Ô profondeur de la richesse, de la sagesse et de la connaissance de Dieu! Que ses jugements sont insondables et ses voies incompréhensibles! En effet, qui a connu la pensée du Seigneur, ou qui a été son conseiller? Qui lui a donné le premier, pour qu’il ait à recevoir en retour? Tout est de lui, par lui et pour lui! A lui la gloire dans tous les siècles. Amen!»11
Notes :
1 Voir dernier numéro (140 ; avril – juin 2001) de PROMESSES.
2 Ibid.
3 Cité dans PROMESSES n° 120, 1997/2, p. 14s.
4 Cité dans «Whatever Happened to the Gospel of Grace?», J. M. Boice, Crossway Books, Wheaton, IL, 2001, p. 151.
5 Ibid.
6 Les Textes de Westminster, Editions Kerygma, Aix-en-Provence, 1988, p. 65.
7 1 Co 8.6; cf. Eph 4.4,6; Col 1.16.
8 Ps 19.2-4.
9 Ap 14.6.
10 PROMESSES n°120, 1997/2, p. 15.
11 Rom 11.33-36.
LES CINQ «SOLI» DES RÉFORMATEURS
4e formule
Dans le dernier numéro de PROMESSES, nous avons consacré un article à la troisième formule des cinq soli: «Sola Gratia». Les Réformateurs exprimaient ainsi leur conviction que «par le salut nous sommes délivrés de la colère de Dieu, et cela par sa grâce seule. (…) Nous déclarons que le salut n’est en aucun sens une œuvre humaine.»
Les 120 pasteurs, théologiens et éducateurs mentionnés dans les articles précédents, réunis à Cambridge en avril 1996, constatèrent avec inquiétude les dérapages des milieux évangéliques inspirés par une fausse confiance dans les capacités humaines. L’estime de soi, l’évangile de la santé et de la richesse, la vente du message évangélique à des pécheurs devenus «consommateurs complaisants»… tout cela dénature la doctrine de la justification et la réduit au silence.
La Déclaration de Cambridge continue: «Nous réaffirmons que la justification est par la grâce seule au travers de la foi seule grâce au Christ seul. Par la justification, la justice de Christ nous est imputée comme unique satisfaction possible de la justice parfaite de Dieu.
«Nous déclarons que la justification ne repose sur aucun mérite qui nous soit propre, ni sur la base d’une infusion de la justice de Christ en nous par voie sacramentelle. Nous déclarons même qu’une institution qui prétend être une église mais qui refuse ou condamne la sola fide ne peut être reconnue comme une église légitime.»1
Cerner la foi
Mais sommes-nous sûrs d’avoir compris ce que veut dire la Bible quand elle parle de «foi»?
«Il y a plusieurs années, un responsable d’organisme chrétien international destiné à la jeunesse me demanda de regarder, avant sa distribution, un film de formation produit par ce groupe. Le sujet en était l’évangélisation, et le film enseignait aux jeunes à ne pas dire aux non-croyants qu’ils devaient obéir à Christ, lui donner leur cœur, lui consacrer leur vie, se repentir de leurs péchés, se soumettre à la souveraineté du Seigneur et le suivre. D’après le film, informer les non-croyants de telles choses ne ferait que compliquer le message de l’Evangile. Le film recommandait de ne donner que les faits objectifs relatifs à la mort de Jésus (sans mentionner la résurrection), puis d’indiquer aux noncroyants qu’il serait bon pour eux de croire. Pour conclure, il était indiqué que la foi qui sauve se réduisait simplement à la compréhension et à l’acceptation des faits de l’Evangile. (…)
«Des foules de gens viennent à Christ bardés de telles convictions. Croyant qu’il ne relèvera pas leur péché, ils s’approchent de lui avec empressement, mais sans comprendre la gravité de leur culpabilité devant Dieu, sans désir d’être libérés du joug du péché: ils ont été dupés par la présentation d’un Evangile corrompu. On leur a dit qu’ils pouvaient être sauvés par la foi seule, mais ils ne comprennent ni ne possèdent la foi réelle. La prétendue foi sur laquelle ils s’appuient n’est qu’un assentiment intellectuel à une série de faits. Cette foi ne peut les sauver.»2
Confusion
1. Substituts
La foi est souvent confondue avec une confession de foi «doctrinalement correcte ». Comme l’indique l’exemple cité cidessus, celle-ci peut être réduite à sa plus simple expression: «Je crois que Jésus est mort pour mes péchés». Il suffit de croire que… Et pourtant, ainsi que nous le verrons ci-après, l’assentiment intellectuel est une composante indispensable – mais insuffisante en soi – de la foi au moyen de laquelle nous sommes sauvés.
Nombreux sont ceux qui se contentent d’appartenir à une église et d’assister plus ou moins fidèlement à ses offices. Ce christianisme de nom, d’habitude ou de tradition se passe facilement d’une foi réelle.
D’autres mettent leur confiance dans les sacrements, et comptent sur la prétendue efficacité du baptême et de l’eucharistie – l’erreur romaine dite ex opere operatum que l’on trouve parfois sous une forme atténuée dans certaines églises protestantes.
D’autres encore comptent sur le feeling, sur une expérience subjective, mystique, divorcée de la vérité objective révélée par Dieu.
Un autre substitut à une foi réelle est la crédulité, l’attitude de ceux qui, en l’absence de toute évidence, acceptent pour vrai ce qu’ils désirent ardemment. Les rumeurs de guérison miraculeuse de certaines maladies incurables peuvent encourager ces faux espoirs.
Enfin, un autre substitut encore à la vraie foi est l’optimisme, l’idée qu’il suffit de cultiver une attitude mentale positive, de se persuader qu’une chose désirée est vraie pour que celle-ci se produise.
2. Objections
«La foi est naïve, sans fondement solide, un saut dans le vide. Elle commence là où s’arrête la raison!» Affirmer cela, c’est ignorer que la foi biblique est fondée sur un témoignage solide, digne de… foi – la Parole de Dieu.
«La foi est insuffisante: il faut y ajouter une contribution – de bonnes œuvres, un effort personnel – pour mériter le salut!» C’est ignorer la façon péremptoire dont l’Ecriture écarte les œuvres (Ep 2.8-9). Pourtant ce désir de faire quelque chose reste profondément ancré dans le cœur de l’homme.
«La foi est trop facile: il n’y a qu’à croire, sans rien changer, et tout ira bien!» Critique valable si la foi se réduit à une simple démarche intellectuelle, comme nous l’avons déjà vu.
Qu’est-ce donc que la foi au sens biblique?
Dans les évangiles synoptiques, la foi est avant tout la confiance dans la puissance et la bonté de Dieu, et l’exigence de la foi en Jésus n’y est souvent qu’implicite. Chez Jean, la foi est une notion-clé, fondée sur le triple témoignage solide et inébranlable de la personne, des paroles et des œuvres du Christ. Elle commence par l’acceptation de la véracité des témoins de Jésus, passe par la confiance dans les paroles, les œuvres et la mission messianique de Jésus, et conduit à la réponse de l’homme tout entier à la personne de Christ. Ce sont ces trois dimensions de la foi que nous voulons développer ci-après, en nous fondant sur le quatrième évangile.
Le verbe «croire» (gr. pisteuô ), utilisé une centaine de fois dans Jean, est suivi par différents compléments qui font ressortir diverses nuances de la foi. Voici les trois constructions les plus souvent utilisées:
1) «Croire que…» (pisteuô hoti…) suivi par une phrase à l’indicatif (9 fois dans Jean): il s’agit d’une démarche intellectuelle, d’un assentiment à la véracité d’une déclaration, d’une conviction que cette proposition est digne d’acceptation. L’exemple que nous avons choisi: «Si vous ne croyez pas que Moi je suis, vous mourrez dans vos péchés» (8.24b), met aussi en relief l’importance de ce pas que les théologiens désignent du mot latin notitia, connaissance. On a bien dit que «rien ne peut entrer dans le sanctuaire du cœur sans passer d’abord par le vestibule de la pensée». Les propositions dans Jean concernent la révélation que Dieu a donnée à propos de Son Fils Jésus – son identité, son origine, sa mission, son autorité et sa destinée. Ainsi que nous l’avons déjà dit: cette foi, insuffisante en soi mais indispensable, doit nous conduire plus loin!
2) «Croire en ou à…» (pisteuô) plus parfois la préposition en (= en), suivi par un complément au datif (20 fois): il s’agit d’une démarche essentiellement affective, d’un élan de confiance inspiré par les paroles et la personne de Jésus, appelé assensus par les théologiens. Dans sa conversation avec la femme Samaritaine, Jésus l’encourage («Croismoi », 4.21) à lui faire confiance. Accepter les paroles du Seigneur nous conduit logiquement à nous appuyer sur lui.
3) «Croire en…» (pisteuô eis: litt. «jusque dans» avec mouvement de pénétration), suivi par un complément à l’accusatif (38 fois!): il s’agit d’une démarche essentiellement volontaire, aboutissement des pas de foi intellectuel et affectif qui la préparent, d’un engagement vis-à-vis de Jésus-Christ appelé fiducia par les théologiens. Ayant compris et adhéré à la vérité de l’évangile, m’appuyant sur Celui qui a pris ma place à la Croix, je m’abandonne à Lui, pour me soumettre à Son autorité et Le suivre comme disciple dans une vie d’obéissance. Cet acte – ou plutôt cette marche dans la foi – a le plus grand poids dans l’enseignement de Jésus. Il ne suffit pas d’adhérer aux vérités du christianisme: «Tu crois qu’il y a un seul Dieu, tu fais bien; les démons le croient aussi et ils tremblent» (Jac 2.19). Ainsi dans le verset le mieux connu de la Bible: «Dieu a tant aimé le monde qu’il a donné son Fils unique, afin que quiconque croit en lui [litt. jusque dans… s’engage de tout cœur] ne périsse pas, mais qu’il ait la vie éternelle» (3.16).
Conclusion
La foi au moyen de laquelle nous sommes sauvés est la réponse de l’homme tout entier – pensée, émotions, volonté – par un engagement pour la vie, à Jésus-Christ, reconnu comme Sauveur et suivi comme Seigneur.
Notes :
1 V. PROMESSES 1997/2, p. 13s.
2 John F. MacArthur in «L’Evangile selon Jésus», Ed. Impact, Cap-de-la-Madeleine, QC, Canada, 1998, p. 223s.
LES CINQ «SOLI» DES RÉFORMATEURS
3e formule
Dans le dernier numéro de PROMESSES, nous avons consacré un article à la deuxième formule des cinq soli: «Solus Christus». Les Réformateurs exprimaient ainsi leur conviction que «notre salut est accompli par l’œuvre médiatrice du Christ historique seul. Sa vie sans péché et son œuvre expiatoire seules suffisent pour notre justification et notre réconciliation avec le Père»1.
Les 120 pasteurs, théologiens et éducateurs mentionnés dans l’article précédent, réunis à Cambridge en avril 1996, constatèrent avec inquiétude les dérapages des milieux évangéliques inspirés par une fausse confiance dans les capacités humaines. L’estime de soi, l’évangile de la santé et de la richesse, la vente du message évangélique à des pécheurs devenus «consommateurs complaisants»… tout cela dénature la doctrine de la justification et la réduit au silence. Au contraire, la grâce de Dieu en Christ est l’unique et indispensable cause efficace du salut, car l’être humain est né spirituellement mort et incapable de collaborer à la grâce régénératrice (Ep 2.8).
La Déclaration de Cambridge continue:
«Nous réaffirmons que par le salut nous sommes délivrés de la colère de Dieu, et cela par sa grâce seule. C’est l’œuvre surnaturelle du Saint-Esprit que de nous conduire au Christ en nous libérant de notre esclavage au péché, et en nous ressuscitant de la mort spirituelle à la vie spirituelle.
«Nous déclarons que le salut n’est en aucun sens une œuvre humaine. Les méthodes, techniques et stratégies humaines ne peuvent par elles-mêmes accomplir cette transformation. La foi ne peut être produite par notre nature humaine non-régénérée»2.
Essais de définition
Mais qu’est-ce que la grâce? Le Nouveau Dictionnaire Biblique lui consacre un article fourni, qui commence par dire:
«Dans l’A.T. déjà, se trouve exprimée la pure bonté de Dieu qui aime le pécheur et désire, non pas sa mort, mais sa conversion et sa vie (Ez 18.23)»3. Et le NDB d’ajouter que cette grâce est venue par Jésus-Christ, qu’elle éclate à la Croix, qu’elle ne peut être reçue que par la foi, et que ses effets en nous sont nombreux, merveilleux et complets.
Un prédicateur a tenté de définir la grâce en disant qu’elle est l’acte par lequel un être supérieur se penche sur un être inférieur pour lui accorder un bien non-mérité. Dans le contexte biblique, la grâce désigne alors la faveur imméritée de Dieu à l’égard de l’homme déchu, par laquelle il pourvoit en Jésus- Christ à sa rédemption, car depuis toute l’éternité il a déterminé d’accorder cette faveur à tous ceux qui croiraient en Christ, Sauveur et Seigneur. C’est aussi par grâce que le croyant est rendu capable de persévérer dans la vie chrétienne. Ajoutons la pensée que dans sa miséricorde Dieu retient ce que nous méritons – colère, jugement, condamnation – tandis que dans sa grâce il nous comble des innombrables biens que nous ne méritons pas!
Et pourtant, ces tentatives de définition nous laissent sur notre faim, car nous sentons instinctivement que la grâce échappe à nos catégories humaines connues, dépasse les limites du langage et reste, par conséquent, indéfinissable! C’est pourquoi l’Ecriture ne l’explique pas, mais la déclare (Ex 33.19; 34.6-7; Deut 7.7-8; Ps 32.1-5; 130.3-4, 7-8; Jean 1.17; Rom 3.24; 4.16; 11.6; 2 Cor 8.9; Eph 2.8-9; etc.), et en donne de nombreux exemples historiques, tant dans l’A.T que dans le N.T. Peut-être l’illustration la plus saisissante est-elle celle de l’accueil réservé par le père à son fils «prodigue» dans la parabole racontée par Jésus (Luc 15.11-32), que nous résumons ci-après.
Fils prodigue… ou Père prodigue?
Aux chefs religieux qui lui reprochent de fréquenter des gens de «mauvaise vie» (Luc 15.1-2), Jésus administre une série de chocs thérapeutiques en leur racontant les paraboles de la brebis perdue (3-7), de la drachme perdue (8-10), puis des deux fils perdus (11-32). Le père de cette dernière parabole fait plusieurs entorses pendables aux coutumes de son époque. Confronté à la demande outrageante de son fils cadet qui souhaitait sans l’avouer la mort de son père, celui-ci, au lieu de le désavouer, l’exclure de la famille et le bannir publiquement de la communauté, lui accorde ce qu’il réclame! Ayant dilapidé son héritage, étant tombé dans la misère, le fils se livre à un raisonnement qui nous paraît ressembler beaucoup plus à des calculs intéressés qu’à une amorce de repentance sincère, et s’engage sur le chemin de retour.
C’est ici que nous assistons à l’une des scènes les plus inattendues, bouleversantes, de l’Ecriture sainte. Le père attend, guette le long du chemin, prie sans doute, et un jour reconnaît enfin le garçon de loin. Voici venue l’occasion de rendre à ce jeune ce qu’il mérite et de le renier brutalement devant témoins… ou tout au moins de convoquer une consultation de la famille sceptique pour jauger la profondeur de sa repentance. Pas du tout! Le père se livre à un spectacle humiliant pour un patriarche oriental: aux yeux des badauds ébahis, il soulève ses robes et se met à courir à la rencontre du fils pour se jeter à son cou, le prendre dans ses bras et embrasser ce clochard en haillons, puant la porcherie!
«Vous me reprochez de manger avec des pécheurs et des péagers?» dit Jésus en substance aux scribes et aux Pharisiens. «Parfaitement! Mais non seulement je mange avec eux: je les attends, je les guette de loin, et quand ils s’engagent sur le chemin de retour, je cours à leur rencontre, je les couvre de baisers, et je les force à entrer chez moi pour festoyer ensemble.» Si le Seigneur attendait de nous les preuves d’une repentance parfaite, il ne courrait jamais à notre rencontre. Cela s’appelle la GRACE, une grâce stupéfiante, incompréhensible, insaisissable, qui prend l’initiative. Du moment que le garçon accepte d’être accueilli, embrassé, reçu de nouveau dans la famille, on peut déduire qu’il commence à passer par une repentance véritable.
Arraché à la perdition4
Avant la mort de ses parents, alors qu’il n’avait que six ans, John Newton bénéficia d’une forte influence chrétienne. Il fut envoyé alors vers un parent incrédule, qui se moqua du christianisme et abusa de lui. Enfin, pour échapper à ces conditions, Newton se porta volontaire dans la marine britannique, où il devint esclave des péchés les plus grossiers. Il déserta, et partit pour une région d’Afrique où il pouvait, comme il disait, «faire son plein» de péché et vivre dans une dégradation inqualifiable. De là, il se fit embaucher comme navigateur sur un navire d’esclavagiste, où il continua sa vie dévergondée. Un jour il réussit à forcer le cadenas du local où était stocké le rhum; il se soûla au point de perdre son équilibre et tomber à la mer, d’où un officier le repêcha en plantant un harpon dans sa cuisse. Il en porta l’énorme cicatrice jusqu’à la fin de ses jours!
Vers la fin du voyage le navire entra dans une tempête violente, perdit son cap et commença à sombrer. Newton fut envoyé dans les soutes, là où gisaient les esclaves, avec l’ordre d’actionner les pompes. Pendant des jours, terrifié et convaincu que la mort était proche, il travaillait à pomper l’eau, et commença à prier le Seigneur. Des versets bibliques, appris sur les genoux de sa mère, qu’il croyait oubliés depuis longtemps, lui vinrent en mémoire, et il fut miraculeusement transformé, engendré de nouveau.
Rentré en Angleterre, il devint un prédicateur puissant de la Parole de Dieu, et eut l’occasion de prêcher devant la reine. C’est en rappelant les circonstances de sa conversion qu’il composa les paroles du cantique célèbre, Amazing Grace5. Car il avait appris, comme tout chrétien, que la grâce de Dieu dépasse toutes nos catégories, et que cette grâce a trouvé son expression suprême dans la mort et la résurrection du Seigneur Jésus-Christ.
Notes :
1 Résumé par la «Déclaration de Cambridge» in Here We Stand, Baker Books, Grand Rapids, Mich., 1996, p.16; (v. PROMESSES 1997/2, p.13)
2 Ibid.
3 Nouveau Dictionnaire Biblique, Editions Emmaüs, 1992, p.525 s.
4 Raconté par James M. Boice in The Gospel of John, Vol. 1, Zondervan, Grand Rapids, Mich., 1975, p.110 s.
5 Certains musiciens voient dans la mélodie un air d’origine africaine, que Newton aurait pu entendre chanté par les esclaves.
LES CINQ «SOLI» DES RÉFORMATEURS
2e formule
Dans le dernier numéro de PRO MESSES, nous avons consacré un article à la première formule des cinq soli: «Sola Scriptura». Les Réformateurs exprimaient ainsi leur conviction que l’Ecriture sainte était l’unique et ultime autorité pour tout ce qui touchait à la foi et à la vie chrétienne. Nous avons ajouté qu’aujourd’hui cette même formule atteste la pleine suffisance de l’Ecriture dans les domaines de l’évangélisation, de la sanctification, de la direction divine et des réformes sociales.
Reculer pour mieux sauter
Pourquoi nos milieux évangéliques ontils un impérieux besoin de redécouvrir ces formules de la Réforme ? Nous pourrions évoquer deux raisons.
Premièrement, nous devenons de plus en plus mondains ! En abandonnant peu à peu les vérités de la Bible et l’expression de ces vérités dans la théologie historique de l’Eglise, nous essayons d’accomplir l’œuvre de Dieu en adoptant la théologie du monde, sa sagesse, ses valeurs, ses méthodes, ses priorités et son ordre du jour. En l’absence d’une saine et solide théologie biblique, bien comprise et appliquée, nous avons remplacé les catégories classiques de péché, de colère de Dieu, de culpabilité, de jugement et de repentance, par une approche thérapeutique où l’accent est mis sur la relation d’aide, la psychologie ou la sociologie. Feu le philosophe chrétien Francis Schaeffer disait en 1978 que «si nous n’arrêtons pas cet éloignement de l’autorité suprême de la Bible chez les évangéliques, nous n’aurons pas d’église évangélique à léguer à nos enfants.» Mais pire que cela à l’heure actuelle, si nous ne retournons pas à la vérité de la Parole de Dieu pour la confesser comme l’avaient fait les Réformateurs, nous n’aurons pas d’église du tout à confier à nos successeurs!
Deuxièmement, comme l’a si bien dit la «Déclaration de l’Alliance évangélique italienne » (1), les évangéliques ont besoin d’avoir une compréhension authentique de la foi évangélique avant d’acquérir, par exemple, une compréhension authentique du catholicisme. Et cette Déclaration de continuer :
«L’enseignement biblique, redécouvert à la Réforme et touchant au «sola, solus » comme au cœur de l’Evangile, est un point crucial qu’une conception évangélique considère comme non négociable (c’est nous qui mettons en italique). L’Ecriture seule, le Christ seul, la grâce seule, la foi seule et à Dieu seul la gloire… ensemble ces affirmations constituent les critères de l’étude du catholicisme et le principe d’interprétation à utiliser dans l’analyse des forces à l’œuvre dans l’Eglise catholique romaine. Sur la base du «sola, solus», la distance qui sépare le catholicisme contemporain de la foi évangélique n’est pas plus réduite qu’au moment de la Réforme du XVIe siècle. En fait, après le premier et le deuxième concile du Vatican, le catholicisme continue d’ajouter à l’Ecriture l’autorité de la tradition et l’autorité de l’enseignement du magistère. Au Christ, il a ajouté l’Eglise comme une extension de l’incarnation. A la grâce, il ajoute la nécessité de bénéfices qui proviennent de l’office sacramentel de l’Eglise. A la foi, il a ajouté la nécessité des bonnes actions pour le salut. A la célébration de Dieu, il a ajouté la vénération d’une foule d’autres figures qui détournent du culte au seul vrai Dieu. (…) Aucun changement de fond n’est intervenu (depuis le concile de Trente).»
Christ seul !
Alarmés par la dérive des milieux évangéliques, 120 pasteurs, théologiens et éducateurs se sont réunis en avril 1996, pour appeler les églises à se repentir de leur mondanité, et à recouvrer les doctrines bibliques, apostoliques, qui seules peuvent donner intégrité et puissance au témoignage chrétien. De leur consultation est sortie la «Déclaration de Cambridge», dont une version française a été publiée dans la Revue Réformée (Aix-en-Provence). Cette Déclaration, à laquelle nous aurons l’occasion de revenir dans la suite de nos articles, commente et soutient les cinq «soli» des Réformateurs, avant d’appeler les églises évangéliques à la repentance et à une nouvelle réforme. Voici ce qu’elle dit au sujet de la deuxième formule : «Solus Christus» :
«Nous réaffirmons que notre salut est accompli par l’œuvre médiatrice du Christ historique seul. Sa vie sans péché et son œuvre expiatoire seules suffisent pour notre justification et notre réconciliation avec le Père.»
«Là où l’œuvre du Christ comme substitut n’est pas déclarée, et où la foi en Christ et son œuvre n’est pas sollicitée, nous nions que l’Evangile ait été prêché »(2).
Commentant ces affirmations, l’un des participants à la consultation a dit :
« La formule «solus Christus» signifie que Jésus a tout accompli, de sorte qu’aucun mérite de la part de l’homme, aucun mérite des saints, aucune œuvre que nous aurions accomplie ici ou au purgatoire, ne peut ajouter quoi que ce soit à cette œuvre salvatrice achevée. En fait, toute tentative d’ajouter (à l’œuvre de Jésus) est une perversion de l’évangile… voire, n’est pas l’évangile du tout!»
« Proclamer Christ seul, c’est le proclamer comme Prophète, Sacrificateur et Roi qui seul suffit au chrétien. Nous n’avons pas besoin d’autres prophètes pour révéler la parole et la volonté de Dieu (3). Jésus a dit dans la Bible tout ce qu’il nous faut entendre. Nous n’avons pas besoin d’autres prêtres ou sacrificateurs comme médiateurs du salut et des bénédictions divines ; Jésus est notre seul et unique Médiateur. Nous n’avons pas besoin d’autres rois ou gourous pour contrôler la pensée et la vie des croyants; Jésus seul est le Roi du croyant individuel et de l’Eglise. Jésus est tout pour nous ! » (4).
Un autre participant a ajouté :
« Si nous représentons le Christ principalement comme Thérapeute Divin, Guide, Ami, Héros, Source de Puissance, Réformateur Politique, Guérisseur, ou quelque autre titre à la place de Médiateur entre Dieu et les méchants, nous lui enlevons le rôle central de sa personne, et nous sapons l’essentiel de sa mission et de son œuvre (1 Cor 1.22 ; 2.2) »(5).
Le Christ unique, incomparable
Le titre «Christ» (Christos en grec) correspond au Messie de l’AT (machiah en hébreu), et signifie «l’Oint». Il est intéressant de constater qu’on pratiquait l’onction avec une huile spéciale (Ex 30.22-33), parfois pour la consécration d’un prophète, toujours pour celle d’un prêtre ou d’un roi. Un homme n’était pas autorisé à cumuler ces offices.
1) Le prophète, agent de la révélation, porte- parole chargé de transmettre les messages de Dieu à l’homme, avait pour exemple Elie (1 Rois 19.16).
2) Le souverain sacrificateur (ou prêtre), médiateur qui représentait le peuple coupable devant Dieu, avait pour exemple Aaron (Ex 29.4-7 ; Lév 8.12).
3) Le roi, revêtu d’autorité, chargé de régner, avait pour premier exemple Saül (1 Sam 10.1 ; 24.7-11).
Au travers d’une cérémonie solennelle, Dieu, l’initiateur, indiquait son choix souverain, mettait l’oint à part pour lui en vue d’une tâche déterminée par lui, le plaçait sous sa protection et le chargeait d’accomplir fidèlement son service. Toutefois, ces offices ne pouvaient être que provisoires, car leur accomplissement laissait toujours à désirer. C’est pourquoi l’A.T. annonce l’avènement de Celui qui est promis par Dieu, Fils (Ps 2.7) et Serviteur (Es 42.1) et qui – fait absolument unique – cumulera les trois fonctions en une seule Personne : Prophète (Deut 18.15,18-19 ; Es 61.1-2), Souverain Sacrificateur (Es 53), et Roi (Ps 2 ; Jér 23.5-6 ; etc.). Certains textes réunissent les offices de Sacrificateur et Roi (Ps 110.1,4 ; Zach 6.12-13). Le dénouement vient en la personne de Jésus-Christ, «que les deux Testaments regardent : l’Ancien comme son attente, le Nouveau comme son accomplissement, tous deux comme leur centre» (Pascal). Oint par l’Esprit Saint, Jésus-Christ, Fils unique du Dieu unique, incarné, entre dans notre temps et notre espace pour remplir complètement et parfaitement les trois offices :
1) Prophète (Luc 4.18-19 ; Jean 4.25- 26 ; Héb 1.1-4.13). Avec Simon Pierre, nous croyons qu’il a les paroles de la vie éternelle (Jean 6.68-69), car «jamais homme n’a parlé comme parle cet homme» (7.46). Il dit ce qu’il a vu chez son Père (8.38a), et nous sommes responsables de la manière dont nous écoutons ses paroles (12.47-48). Le ciel et la terre passeront, mais ses paroles ne passeront point (Mat 24.35).
2) Souverain Sacrificateur (Héb 3.3 ; 4.14-10.25 ; etc.). Jésus seul s’est offert lui-même, volontairement, une fois pour toutes, en sacrifice parfait pour les péchés du peuple (7.27) ; il est toujours vivant pour intercéder en faveur de ceux qui s’approchent de Dieu par lui, et les sauver parfaitement (25) ; il est capable de compatir à nos faiblesses, ayant été tenté comme nous à tous égards, sans commettre de péché (4.15).
3) Roi (Mat 2.2 ; Marc 15.2 ; Luc 1.31- 33 ; etc. jusqu’à l’Apoc 11.15 et 19.16). Car «Dieu l’a souverainement élevé et lui a donné le nom qui est au-dessus de tout nom, afin qu’au nom de Jésus tout genou fléchisse dans les cieux, sur la terre et sous la terre, et que toute langue confesse que Jésus-Christ est Seigneur, à la gloire de Dieu le Père» (Phil 2.9-11).
Le mot de la fin
Accepter la formule Sola Scriptura, c’est découvrir que le salut en Jésus Christ est le message qui traverse l’Ecriture de la Genèse jusqu’à l’Apocalypse ; c’est donc nous laisser conduire au Christ seul, Christus solus, et faire nôtre la priorité de l’Apôtre Paul : «Je n’ai pas jugé bon de savoir autre chose parmi vous, sinon Jésus-Christ, et Jésus-Christ crucifié» (1 Cor 2.2).
Notes :
(1) Reproduite dans «Fac réflexion», no 51-52, 2000/2-3, Faculté Libre de Théologie Evangélique, pp. 44-49
(2) Here We Stand, Baker Books, Grand Rapids, Mich., 1996, p.16
(3) Sans doute dans le sens de transmettre les révélations constitutives de la «foi transmise une fois pour toutes» (Jude 3)
(4) Op. cit. p. 11s.
(5) Op. cit. p. 117
DÉFENSE DE LA FOI CHRÉTIENNE
Dans le dernier numéro de Promesses, sous le titre Les insensés pensent : «Dieu n’existe pas», nous avons tracé le développement d’une pensée athée à partir du rationalisme du 17e siècle, et cherché à montrer comment, dans un mouvement de cause à effet, elle a contribué à l’émergence des idéologies du 20e siècle avec leur lot de «goulags» et de génocides. Nous avons évoqué certains maîtres à penser représentatifs de ce mouvement, dont en particulier Charles Darwin (matérialisme biologique), Karl Marx (matérialisme politico/économique), Friedrich Nietzsche (athéisme militant), et Sigmund Freud (matérialisme psychologique).
Nous avons conclu en proposant de «formuler une réponse chrétienne qui soit notre témoignage, approprié à notre génération». C’est ce que nous tâcherons de réaliser ici, du moins en partie, car le sujet est tellement vaste que nous serons obligés de limiter le cadre de nos réflexions à quelques problèmes soulevés par le Darwinisme, et de poser des jalons qui pourraient stimuler des recherches plus poussées de la part de nos lecteurs dans les domaines qui les intéressent.
Une question d’a priori
Dieu existe-t-il ? La science, limitée par définition et par compétence à l’examen des faits observables, et conduisant à l’élaboration d’hypothèses puis de théories, ne peut fournir des «preuves» de son existence, ni, d’ailleurs, la «disprouver» ! On a bien dit que «Dieu ne se prouve pas» (ce à quoi les chrétiens pourraient répondre: «C’est vrai, mais il s’éprouve»). Car la question appartient au domaine extra-scientifique, métaphysique, et doit être classée dans la catégorie des a priori (ou présuppositions), c’est-à-dire de ce qui est axiomatique, à des notions premières admises sans démonstration ou antérieures à toute expérience. Qu’on le reconnaisse ou non, tout raisonnement, tout débat, toute recherche, partent nécessairement d’un choix, peut-être inconscient, d’a priori.
Nous verrons ci-après que l’existence de Dieu – du Dieu Créateur – est le point de départ sine qua non de la foi chrétienne. Cependant, nous maintenons que l’idée de la «non-existence de Dieu» est aussi un acte de foi (ou de non-foi si l’on préfère) qui n’a rien de scientifique… mais qui ne manque pas d’audace ! Il faudrait, en effet, être doté d’omniscience et d’omniprésence – attributs divins – pour fouiller dans les derniers recoins de l’univers où Dieu pourrait se cacher avant d’oser l’affirmer. A ce sujet il est intéressant d’évoquer une enquête entreprise avant la Deuxième Guerre Mondiale auprès des membres du «Fellowship of the Royal Society» en Grande-Bretagne, association à laquelle ne pouvaient accéder que des savants scientifiques dont les recherches avaient impressionné leurs pairs. Parmi les 200 réponses reçues à la question: «La science contredit-elle l’idée d’un Dieu personnel tel qu’enseigné par Jésus-Christ?»
– 26 répondirent par l’affirmative,
– 103 dirent que non,
– et 71 évitèrent de se prononcer par oui ou non.
Plusieurs ajoutèrent en substance: «Le fait que je suis professeur de chimie [ou d’une autre discipline] ne me qualifie pas pour exprimer une opinion déterminante dans un domaine religieux, politique ou autre… pas plus qu’une autre personne nonscientifique mais raisonnablement instruite» 1.
C’est, donc, au niveau des a priori que le dialogue entre chrétiens et leurs contemporains doit s’engager pour éviter les écueils cachés et rester valable.
Tester nos a priori
Puisque les a priori ne peuvent être prouvés, comment savoir si nous avons fait le bon choix? Dans la suite de notre article nous proposons de les soumettre à deux tests :
1.Qu’est-ce qui a motivé notre choix ?
2.Où, vers quels résultats, nous conduit notre choix?
1. Choix motivés
1.1. Parlant de l’attraction qu’exerce l’évolution sur l’homme naturel, Rick Lanser, que nous avons cité dans l’article précédent, dit que «celui-ci cherche constamment un chemin de détour autour de ce Dieu qui gène avec ses exigences morales (…)»; et de conclure: «L’évolutionnisme darwinien n’est, enfin, qu’une philosophie fondée sur [des a priori] religieux qui essaie, sans grand succès, d’interpréter les données à partir de prémisses purement naturalistes. Il est populaire, non pas en tant que bonne science, mais parce que, dans les mots de l’ultra-évolutionniste Richard Dawkins, il fournit les moyens d’être un «athée intellectuellement comblé»2.
Il s’agit là d’une accusation grave, que certains pourraient qualifier de procès d’intention. Mais est-elle fondée? Nous avons dit plus haut en substance que la science a longtemps été définie comme une investigation objective qui découvre et teste les faits. Cependant une autre définition, implicite dans l’establishment scientifique, englobe une philosophie matérialiste qui limite les tentatives d’explication de tout ce que nous observons à des causes naturelles, et s’oppose d’emblée à toute mise en question de l’évolution naturaliste. La présupposition en est que seules les forces naturelles rendent possible le développement de toute vie sur la terre, et que notre tâche se réduit à discerner les détails du mécanisme. (Tandis que la science véritable part du principe du libre examen, ne se limite pas arbitrairement à des théories naturalistes, mais reste ouverte à toute explication rationnelle et suit les indices où qu’ils conduisent.)
Ainsi, le biologiste Richard Lewontin de l’Université de Harvard accepte la théorie classique de l’évolution parce que, écrit-il, «nous avons un engagement préalable au matérialisme », engagement, admet-il, qui n’est pas fondé sur la science, bien au contraire ! Il ajoute: «Nous sommes forcés, par notre adhésion a priori [!] à des causes matérielles, de créer un appareil d’investigation et un ensemble de concepts qui produisent des explications matérialistes (…). Ce matérialisme est absolu, car nous ne pouvons permettre qu’un pied divin se glisse dans la porte» 3. Concession significative, en effet.
1.2. Qu’est-ce qui motive le choix du croyant en faveur de l’existence d’un Dieu Créateur, en l’absence de «preuves scientifiques» ? S’agit-il d’un élan irrationnel de ceux qui, selon Ludwig Feuerbach, projettent et objectifient la nature humaine pour en faire un être divin? 4 Nous répondrons que cette foi intuitive, profondément ancrée dans le cour de l’homme et quasi-universelle dans le temps et l’espace, fait appel à des témoignages éloquents, adéquats pour les uns mais jamais assez convaincants pour les autres… selon leurs a priori. Nous en développerons deux:
Témoignage de la création (appelée «révélation générale» par les théologiens). (1.2.1.)
Témoignage de l’Ecriture («révélation spéciale»). (1.2.2.)
1.2.1.Témoignage de la création
Nous utilisons délibérément le mot «création», dans son sens le plus large, plutôt qu’«univers» ou «nature». Depuis quelques années un grand débat se poursuit à l’intérieur des milieux scientifiques autour d’un concept présenté par l’auteur William Dembski, entre autres, dans son livre Intelligent Design (dessin intelligent). Un philosophe d’autrefois avait dit qu’une horloge ne pouvait exister sans horloger! Cet argument est repris à la lumière de découvertes récentes, surtout dans le domaine de la biologie moléculaire. Celle-ci reconnaît que la cellule vivante est une véritable usine en miniature, infiniment plus complexe que ce que Darwin pouvait imaginer. Les systèmes innombrables, variés mais synchronisés de la cellule agissent ensemble en harmonie comme autant de moteurs, pompes, ressorts, communicateurs et transporteurs, de telle manière qu’ils doivent tous être complets et en place avant de fonctionner. De plus, ils ne peuvent pas évoluer et fonctionner à travers d’innombrables stages intermédiaires, étape après étape, comme l’exige le Darwinisme. Cette structure incroyablement complexe, conforme à un modèle préconçu, est la marque du dessin intelligent.
De même, l’apparition de la théorie de l’information jette une lumière sur le code génétique, l’«ADN»: celle-ci a la même structure qu’un langage. L’origine de la vie doit, donc, être expliquée en termes d’information biologique, information qui ne saurait être créée par des forces matérielles, aveugles ! Darwin lui-même, à son époque, a reconnu l’évidence en faveur du dessin, mais l’a écartée [a priori !] en espérant montrer que les êtres vivants avaient seulement l’apparence du dessin, tout en étant le résultat du hasard et de la sélection naturelle 5; son but était d’exclure Dieu comme explication du dessin évident des organismes.
Ce témoignage de la création comporte d’autres aspects que nous devons nous contenter de mentionner brièvement:
Le dessein (avec un «e») intelligent, ou la notion de finalité. En d’autres termes: pourquoi la création? A quoi sert-elle? «Devant la vision de l’unité et de l’harmonie de la création qui s’impose à eux, de nombreux savants en viennent à remettre en honneur la notion de finalité longtemps abandonnée sous l’influence du rationalisme et du scientisme; la finalité leur apparaît non seulement comme une finalité interne immanente, une finalité de fait du domaine directe de la biologie, mais aussi comme une finalité externe à l’être vivant et à la création tout entière, une finalité transcendante qui, pour être essentiellement d’essence métaphysique, n’en correspond pas moins à une réalité. Or, la finalité, quels qu’en soient le niveau et la perspective, exclut l’idée de hasard et implique l’existence d’un Dieu qui a conçu et créé, et qui continue à diriger et à gouverner» 6
Le «principe anthropique» de la cosmologie nous dit que l’univers tout entier, avec les milliers d’éléments qui le composent, est très exactement ajusté dans tous ses détails pour rendre la vie possible et la soutenir. L’astronome Fred Hoyle, pourtant athée, y voit l’implication «qu’un surintendant a bricolé avec les [propriétés] physiques» 7.
Ceux qui lisent l’anglais et désirent approfondir ces questions, pourraient consulter la liste d’ouvrages des plus intéressants, notamment de la plume de Phillip E. Johnson, publiés par les Groupes Bibliques Universitaires de l’Amérique du nord 8.
1.2.2.Témoignage de l’Ecriture
Importance
Citons un extrait de l’ouvrage de J. M. Nicole: «Le schéma classique de la destinée humaine d’après la Bible se résume en trois mots: création, chute, rédemption. Avec raison, nous avons tendance à majorer le troisième, qui constitue le centre de l’Evangile. Mais nous avons tort de ne pas prêter attention autant que nous le devrions au premier.
«Si nous ouvrons l’Ecriture, dès le début nous sommes mis en présence, et cela majestueusement, du Dieu créateur. On aurait pu imaginer une autre entrée en matière. C’est cellelà que le Saint-Esprit a choisie pour notre édification. Tout au long de l’Ancien Testament, les prophètes et les psalmistes reviennent sur ce thème (…).
«Lorsque les apôtres évangélisaient les païens, ils ne se bornaient pas à parler du péché et du salut, ils prenaient soin aussi de poser à la base de leur enseignement le fait de la création (…). Dans les moments difficiles qu’ils traversaient, les premiers chrétiens trouvaient force et consolation à la pensée qu’ils s’adressaient au Créateur de l’univers, et c’est lui qu’exaltent les cantiques célestes de l’Apocalypse (…)» 9.
Bref survol biblique La doctrine biblique de la création ne doit pas être confondue avec une quelconque hypothèse scientifique des origines, car son but est éthique et religieux, tout en étant présentée comme une réalité historique. Loin d’être confinée aux premiers chapitres de la Genèse, cette doctrine est invoquée dans un nombre étonnant de textes, tant dans l’Ancien Testament que dans le Nouveau. En voici quelques exemples, à titre indicatif: Néh 9.6; Job 38.4ss; Ps 8; l9.1-7; 33.6-9; 90.2; 102.26-28; 104; Es 40.26,28; 42.5; 45.18; Jér 10.12-16; Amos 4.13; Mat 18.4; Jean 1.1ss; Act 17.24; Rom 1.20,25; 4.17; 2 Cor 4.6; Col 1.16-17; Héb 2; 11.3; 1 Pi 4,19; Apoc 4.11; 10.6; 14.6-7.
Héb 11.3 fournit un bon point de départ pour considérer la doctrine: «C’est par la foi que nous comprenons que le monde a été formé par la parole de Dieu, de sorte que ce qu’on voit ne provient pas de ce qui est visible.» Cela veut dire que, à l’instar de l’auteur de la Genèse – et de Jésus-Christ (Mat 18.4)! – nous partons de l’a priori, non seulement que Dieu existe, mais qu’il a créé toutes choses ex nihilo. En d’autres termes, la doctrine biblique de la création est fondée sur la révélation divine, tout comme le mystère de la rédemption, et ne peut être saisie et acceptée que par la foi.
De plus, l’ouvre de la création est attribuée tour à tour aux trois personnes de la Trinité: au Père (Gen 1.1; Ps 33.6; Es 44.24), au Fils (Jean 1.3; Col 1.16), et au Saint-Esprit (Gen 1.2; Job 26.13), en tant qu’ouvre une et indivisible du Dieu trinitaire. Loin d’être un acte nécessaire ou inévitable, la création doit être comprise comme le fruit d’une initiative libre de Dieu, déterminée par sa volonté souveraine. Ainsi Dieu peut être à la fois le Seigneur transcendant, distinct de sa création, et immanent, Dieu de la providence dont dépend la création pour son existence continue. Le rôle de cette création est de manifester la gloire de la puissance éternelle, de la sagesse et de la bonté du Créateur, bref d’être, comme le dit Calvin, «le théâtre de sa gloire» 10.
En parfait accord avec l’Ancien Testament, le Nouveau Testament tout entier assume ou affirme la création du monde par Dieu et sa dépendance absolue de lui. Cette création, ainsi que les corollaires de grâce et de liberté, sont les axiomes [a priori – ndlr] sur lesquels toute la vérité biblique est érigée 11.
Portée de la doctrine
Le grand théologien Alfred Edersheim, juif messianique, insiste sur la portée de la doctrine de la création: «Quatre grandes vérités, touchant à l’ensemble de la révélation, nous viennent du récit biblique le plus ancien, comme le fleuve, divisé en quatre bras qui sortaient du jardin d’Eden:
1. la création de toutes choses par la puissance de la parole de Dieu;
2. la descendance de toute l’humanité de nos parents communs, Adam et Eve;
3. notre solidarité avec Adam, tête de la race humaine, dans le péché et la chute;
4. la promesse d’un second Adam, sans péché, qui par ses souffrances nous délivrerait des conséquences de la chute, et deviendrait l’Auteur d’un salut éternel pour tous ceux qui croiraient en lui» 12
«De toutes les oeuvres créées par Dieu», ajoute Edersheim, «l’homme seul a été créé «à son image, selon sa ressemblance» (Gen 1.26). Cette expression met en relief, non seulement l’intelligence conférée par Dieu et l’immortalité qu’il lui a accordée, mais aussi la nature parfaite, morale et spirituelle, que l’homme possédait au commencement.»
J. M. Boice développe ce thème, en détaillant les attributs que possède l’homme créé à l’image de Dieu:
1. personnalité: connaissance, vie affective, volonté;
2. moralité: liberté, conscience, responsabilité;
3. spiritualité: potentiel de communion avec Dieu13.
2. Vers quel résultat nous conduit notre choix?
2.1. «Dieu n’existe pas!»
L’hédonisme inconscient: «Mangeons, buvons, amusons-nous, car demain nous mourrons!»
L’angoisse: «Jean Rostand (1894- 1977) tout au long de sa vie s’est interrogé sur son athéisme, reconnaissant qu’il n’était «ni satisfait ni apaisé, obsédé» qu’il était, «sinon par Dieu, du moins par le non-Dieu» 14.
Le désespoir : «Le monde est absurde, la vie n’a pas de sens : inutile de se poser des questions pour lesquelles il n’y a pas de réponse. Il ne nous reste qu’à reconnaître notre désespoir, à l’accepter et à apprendre à vivre avec lui.»
2.2. Dieu existe!
«Celui qui s’approche de Dieu doit croire qu’il existe et qu’il récompense ceux qui le cherchent» (Hébreux 11.6b).
A vous, cher lecteur, de faire votre choix, et de suivre jusqu’à sa destination inévitable, le chemin dans lequel vous vous engagez.
F.H.
Notes
1 A. Rendle Short, Modern Discovery and the Bible, Inter-Varsity Fellowship, Londres, 1947; p. 11.
2 Rick Lanser in Associates for Biblical Research Newsletter, jan/fév. 2000; p. 2.
3 Cité par Nancy Pearson in We’re not in Kansas Anymore, Christianity Today, 20 mai 2000; p. 45.
4 Voir art. précédent dans PROMESSES no 134
5 Nancy Pearson, art. cit. in Christianity Today; p. 46.
6 Art. sur la Création in Nouveau Dictionnaire Biblique, Editions Emmaüs, 1992; p. 296s.
7 Nancy Pearson, art. cit.: p. 47.
8 Inter-Varsity Press, P.O. Box 1400, Downers Grove, IL 60515, USA, www.ivpress.com.
9 J. M. Nicole, Précis de doctrine chrétienne, Editions Institut Biblique de Nogent-s/Marne, 1983; p. 63s.
10 Art. sur la création in The New Bible Dictionary, Inter-Varsity Fellowship, Londres, 1967; p. 269s.
11 The Expositor’s Bible Commentary, Zondervan, 1978, Vol. 1; p. 46.
12 Alfred Edersheim, Bible History, Old Testament, Hendricksen, 1998; p. 11.
13 J. M. Boice, Le Dieu Souverain, Editions Emmaüs, 1981; p. 179s.
14 Art. cit. in Nouveau Dictionnaire Biblique, p. 297.
DÉFENSE DE LA FOI CHRÉTIENNE
Ils sont corrompus, leurs actions sont dégradantes, aucun n’agit bien.
(Psaume 14.1; Bible du Semeur)
DANS ce tableau terrible de la nature humaine, écrit W. G. Scroggie 1, il est question, moins d’un athéisme formulé, philosophique, que d’un athéisme pratique, d’une perversité morale. Est athée, écrit-il, celui qui exclut Dieu de ses calculs et qui ordonne sa vie sans tenir compte des droits et des exigences divins. Toutefois, nous constatons que la pensée détermine le caractère et inspire le comportement, car l’homme «est tel que sont les arrière-pensées de son âme» (Proverbes 23.7a). La pensée et l’acte sont indissociables. Tout homme qui agit de la sorte est qualifié d’insensé par le Seigneur, et le chemin dans lequel il s’engage conduit à la catastrophe… et au jugement.
Un regard en arrière
Nous venons de quitter un siècle jalonné d’horreurs. Quel chiffre donner, en dizaines de millions, au nombre de victimes des guerres, des massacres et autres génocides pendant le 20e siècle? Comment expliquer cette inqualifiable inhumanité de l’homme envers son prochain? Qu’est-ce qui a inspiré les goulags, les camps de concentration, les pogroms, «l’holocauste », le terrorisme ? Pouvonsnous en tirer des conclusions qui seraient utiles pour notre propre cheminement? Nous allons essayer de poser des jalons de réponses à ces questions en retraçant dans quelques grandes lignes le développement de la philosophie athée au travers de ces derniers siècles. Au risque de trop simplifier, nous serons obligés de résumer, de survoler, de choisir des exemples représentatifs pour illustrer nos propos. Dans un article ultérieur nous tâcherons de formuler une réponse chrétienne aux problèmes évoqués.
Au 17e siècle: extension du rationalisme
Un mouvement de pensée émerge au 17e siècle, le Rationalisme, qui n’est pas, au départ, une approche explicitement athée. Les rationalistes des 17e et 18e siècles ont développé des systèmes marqués par une grande diversité, mais fondés sur une prémisse commune: la rationalité de l’univers et le pouvoir de la raison de le saisir. Déjà les Réformateurs du 16e siècle avaient pris comme point de départ – rationnel – l’action de Dieu en Christ de laquelle témoignait la Sainte Ecriture. Mais d’autres, sans être forcément irréligieux, appliquaient la logique à leur étude de la structure rationnelle de l’univers; puisque toutes choses pouvaient être jugées à la lumière de la raison, celle-ci finissait, pour certains, par évacuer le surnaturel pour ne laisser que la nature et ce qu’ils pouvaient déduire en l’examinant. Libre à chacun d’assigner à Dieu dans son schéma le rôle qu’on voulait bien lui accorder. On peut citer comme exemples Descartes (1596-1650), Spinoza (1632-1677), et Leibnitz (1646- 1716) 2.
Au 18e siècle: le «siècle des Lumières» met la Révélation biblique sous le boisseau
Dans le contexte d’un mouvement, devenu mondial, vers le rationalisme hérité du 17e siècle, la pensée du 18e siècle se raffine, et combine l’opposition à la religion surnaturelle avec la confiance en la toute-suffisance de la raison humaine, motivées par l’ardent désir de promouvoir le bonheur des hommes dans cette vie. La plupart de ses représentants rejettent le dogme chrétien; ils affichent leur hostilité au catholicisme ainsi qu’à l’orthodoxie protestante, qu’ils considèrent comme des barrières à l’utilisation des facultés rationnelles humaines. Leur confiance inébranlable en la bonté de l’homme les rend aveugles à la réalité du péché, et produit un optimisme facile: il suffit de reconnaître les principes de la raison éclairée pour annoncer le progrès et la perfectibilité de la société humaine 3. Nous citerons deux exemples parmi les représentants de ce courant de pensée.
Jean-Jacques Rousseau (1712- 1778). Sans abandonner la religion, il popularise la nature, et cède à un parti pris qui subsistera aux 19e et 20e siècle: une conception naïve, optimiste, du caractère de l’homme, combinée au refus de prendre au sérieux la Révélation chrétienne 4.
Emmanuel Kant (1724-1804). Sa pensée représente le point culminant du rationalisme du 18e siècle. Kant rejette les preuves traditionnelles de l’existence de Dieu. L’homme devenu adulte doit se débarrasser de toute pseudo-autorité externe, et faire ce que lui dicte sa raison, car il n’a plus besoin de Dieu comme conseiller céleste. Il faut libérer le christianisme de sa foi en un Dieu surnaturel qui intervient dans les affaires humaines, et mettre à sa place la notion d’un Créateur impersonnel qui ne s’intéresse plus au monde. Une religion d’auto-suffisance doit remplacer l’idée de la grâce de Dieu qui mène au salut 5.
Au 19e siècle: l’athéisme étend ses racines
Le 19e siècle, époque de foi et d’incrédulité, fut témoin, d’une part, de l’expansion missionnaire et de réveils, et, d’autre part, d’un nombre grandissant de voix clamant haut et fort que les fidèles sont captifs d’illusions. Nombre de philosophes partageaient le désir de réinterpréter le christianisme à la lumière des connaissances qu’ils estimaient vraiment modernes. Dans l’opinion publique, les savants scientifiques expliquaient de mieux en mieux le fonctionnement de l’univers, laissant de moins en moins de place à Dieu. Pour certains, le renversement définitif de Dieu allait ouvrir la voie à des philosophies athées 6 ou agnostiques 7 dignes de prendre sa place 8.
Ludwig Feuerbach (1804-1872). Ce philosophe allemand exerce une influence déterminante sur certains de ses contemporains et successeurs, par un matérialisme qui réduit à néant la dimension spirituelle. Selon lui, dans la religion l’homme purifie, projette et objectifie sa propre nature pour en faire et contempler un être divin distinct 9. «La théologie n’est rien d’autre que l’anthropologie; la connaissance de Dieu n’est rien d’autre que la connaissance de l’homme» 10.
Charles Darwin (1809-1882): le matérialisme biologique. Dans son livre célèbre, L’origine des espèces (1859), Darwin combine et développe deux idées maîtresses. La première, ancienne, postule le développement graduel de la vie au cours de millions d’années à partir d’un ancêtre commun. La seconde, nouvelle, parle de «sélection naturelle » par la concurrence et la survivance des plus forts 11. Ainsi est promulguée l’hypothèse d’une sélection fondée sur des variations aléatoires et la lutte pour la survivance. Toutes les caractéristiques humaines – physiques, mentales et morales – auraient leur explication dans une modification progressive de nos ancêtres anthropoïdes, et tomberaient, par conséquent, dans le domaine de la loi naturelle, du hasard. L’évolutionnisme déborde du cadre biologique et devient le tremplin pour des philosophies évolutionnistes sociologique, morale et éthique 12.
Notre but ici n’est pas d’entrer dans un débat d’ordre scientifique (pour lequel nous serions incompétents), car notre querelle avec Darwin se situe sur le plan théologique. L’agnosticisme de Darwin devient plus évident dans ses déclarations postérieures au livre mentionné plus haut. Pourquoi Darwin figure-t-il parmi les cinq hommes qui, selon un sondage fait en décembre 1999, ont exercé le plus d’influence sur l’humanité pendant les 1000 dernières années ? « Je crois, dit Rick Lanser, qu’il s’agit de l’attraction qu’exerce l’évolution sur l’homme naturel, car celui-ci cherche constamment à contourner ce Dieu qui gêne avec ses exigences morales (…). Je pense que nous verrons bientôt la macroévolution 13 darwinienne dirigée vers la décharge des idées abandonnées. De nouvelles découvertes en biochimie et d’autres sciences «dures», combinées avec des études statistiques, feront la démonstration définitive que les changements provoqués par des mutations sont impossibles (…). L’évolutionnisme darwinien n’est, enfin, qu’une philosophie fondée sur [des a priori] religieux qui essaie, sans grand succès, d’interpréter les données à partir de prémisses purement naturalistes. Il est populaire, non pas en tant que bonne science, mais parce que, dans les mots de l’ultra-évolutionniste Richard Dawkins, il fournit les moyens d’être un « athée intellectuellement comblé» 14. Nous reviendrons ci-après sur l’influence que le Darwinisme a exercé sur d’autres maîtres à penser.
Karl Marx (1818-1883): «matérialisme dialectique» politico-économique. En 1843 Marx avait déjà formulé le programme auquel il resterait désormais fidèle. «L’abolition de la religion, écrit-il, en tant que bonheur illusoire de l’homme, est indispensable pour son bonheur véritable ». Marx voit en Feuerbach le fondateur du matérialisme authentique et de la science positive, en ce qu’il avait fait de la relation d’homme à homme le principe fondamental de sa théorie. Et de dénoncer la religion comme ennemie de tout progrès; le vide laissé par sa disparition doit être rempli par un matérialisme dynamique modelé sur la dialectique de Hegel. Le mariage du matérialisme avec la tension dialectique s’appelle «matérialisme dialectique»: sa façon d’étudier les phénomènes de la nature est dialectique, alternant entre thèse et antithèse pour aboutir à une synthèse, tandis que son interprétation de ces phénomènes est matérialiste, dénuée de la dimension spirituelle. A ce sujet Bertrand Russell, lui-même athée, commente: «Marx se déclare athée, et pourtant il garde un optimisme que seul le théisme pourrait justifier. D’une manière générale, tous les éléments dérivés de Hegel sont non-scientifiques, dans ce sens qu’il n’y a aucune raison de les supposer vrais» 15.
Karl Marx, fervent admirateur de Charles Darwin, trouve utile la loi darwinienne de la compétition. Ayant lu L’origine des espèces en 1860, il commenta: «Le livre de Darwin est très important, et me sert de base comme science naturelle pour soutenir la lutte historique». Ainsi l’évolution apporte sa contribution à la doctrine communiste, selon le rôle que Marx choisit de lui assigner 16.
Friedrich Nietzsche (1844-1900): athéisme militant. Adversaire acharné de la religion, il est fêté comme le fondateur de l’école de la «Mort de Dieu». Son point de départ est la non-existence de Dieu. L’homme est, par conséquent, laissé à lui-même pour déterminer l’orientation de sa vie, puis se débrouiller seul. Nietzsche n’a que du mépris pour ceux qui rejettent l’idée chrétienne de Dieu, mais cherchent à récupérer la morale chrétienne. Il faut tout balayer, ditil, et recommencer à partir de zéro pour que chacun distingue par sa propre volonté entre le bien et le mal. Les torrents de diatribe amère émis par cet homme, malade toute sa vie et mort aliéné, ont eu une influence incalculable sur nombre d’écrivains, de poètes et de philosophes européens. Il est à noter surtout que Nietzsche fut adopté comme le philosophe attitré du National Socialisme, et reconnu pour être l’athée le plus conséquent du 19e siècle 17.
Sigmund Freud (1856-1939) : le matérialisme psychologique. Freud choisit la science naturelle comme point de départ, et enracine sa théorie dans les sciences biologiques et leurs méthodes de recherche. En d’autres termes, il opère dans un système fermé de cause à effet, dans lequel les lois biologiques et physiques de la nature déterminent tous les aspects de l’existence humaine. Il maintient, donc, que l’évolution de l’homme à partir d’animaux inférieurs, l’émergence des croyances religieuses et l’essor de la civilisation, ainsi que le développement de chaque personnalité individuelle, sont asujettis à des lois naturelles inexorables 18.
Au 20e siècle: qui sème le vent moissonne l’ouragan
Dans la mosaïque de textes tirés de l’Ancien Testament construite par Paul pour décrire les hommes sans Dieu, il dit, entre autres: «Leur bouche est pleine d’aigres malédictions. Leurs pieds sont agiles quand il s’agit de verser le sang. La destruction et le malheur jalonnent leur parcours. Ils ne connaissent pas le chemin de la paix. A leurs yeux, respecter Dieu n’a aucun sens» 19. Peut-on trouver un tableau plus percutant de ceux qui, au cours du 20e siècle, ont adopté et mis à exécution l’athéisme militant hérité des maîtres à penser, leurs prédécesseurs? Dieu est évacué de la scène; l’homme, accident de la nature ou résultat de lois naturelles aveugles, n’est plus créé à l’image de Dieu. Il perd, par conséquent, son identité unique, sa dignité et sa valeur, et peut être supprimé selon les caprices de quiconque exerce le pouvoir absolu et en abuse. Les Hitler et autres Staline pouvaient formuler leur propre système éthique et supprimer quelques millions de leurs contemporains sans craindre d’avoir des comptes à rendre à un quelconque Etre suprême. Il nous paraît donc évident que les événements tragiques du 20e siècle ont été inspirés par l’influence diabolique de Darwin, Marx, Freud et leurs compères. Ainsi que nous l’avons déjà dit, notre querelle avec eux ne se situe ni sur le plan biologique, ni sur les plans politique ou psychologique, mais bel et bien avec leurs a priori théologiques; notre point de départ à nous est la conviction que Dieu est – Créateur, Rédempteur et Juge – et qu’un jour tous les hommes se tiendront devant lui pour rendre compte de leurs actions sur la terre.
La lecture de cet article n’aura peutêtre pas été des plus faciles, mais n’avons-nous pas besoin de courage et de discernement pour voir en face les réalités du 20e siècle, et formuler une réponse chrétienne qui soit notre témoignage, approprié à notre génération? Nous espérons, Dieu voulant, consacrer un nouvel article à cette question.
F.H.
Notes
1 W. Graham Scroggie, The Psalms, Pickering & Inglis, Londres, 1946; vol. 1, p. 98.
2 Colin Brown, Philosophy and the Christian Faith, Tyndale Press, Londres, 1969; p. 48ss.
3 The Oxford Dictionary of the Christian Church, Oxford University Press, Londres, 1958; p. 105.
4 Colin Brown, op. cit., p. 81ss.
5 Ibid.; p. 90ss.
6 Athéisme: refus de croire en l’existence de Dieu.
7 Agnosticisme: le doute quant à la possibilité de savoir si Dieu existe ou non.
8 Colin Brown, op. cit.; p. 107ss.
9 Ibid.; p. 133ss.
10 L. Feuerbach, The Essence of Christianity, 1841; p. 14.
11 Colin Brown, op. cit.;. 147ss.
12 Charles Hummel, The Galileo Connection, IV Press, 1986; p.. 227ss.
13 Apparition de nouvelles expèces par voie de mutation.
14 Rick Lanser in Associates for Biblical Research Newsletter, jan/fév. 2000; p. 2.
15 Colin Brown, op. cit.; p. 135ss.
16 Ibid.; p. 147.
17 Ibid.; p. 137ss.
18 Roger Hurding, Roots and Shoots, Hodder & Stoughton, Londres, 1985; p. 73.
19 Romains 3.14-18; Bible du Semeur
(Troisième partie)
Vous les attendiez tous! Voici enfin 1es applications pratiques de l’étude sur l’inspiration et l’autorité de la Bible présentée dans les deux numéros précédents de PROMESSES!
IV Considérations pratiques
"C’est précisément parce que l’Ecriture Sainte est -directement -la Parole de Dieu, que la responsabilité de l’Eglise, des chrétiens et des hommes qui la lisent et l’écoutent est toujours, inévitablement, engagée. C’est précisément parce que l’Ecriture Sainte est la Parole de Dieu, à laquelle nous sommes sans cesse confrontés, et à laquelle il nous est impossible de nous soustraire, qu’aucune échappatoire, aucune évasion, aucun faux prétexte ne nous sont permis et que Dieu demande, réclame, souverainement, la réponse de la foi et de l’obéissance. Avec l’Ecriture nous avons à faire avec la Révélation même de Dieu qui exige notre conversion et notre soumission, nous avons à faire avec la proclamation du grand oeuvre salvateur (sic) de Dieu qui s’est accompli dans l’histoire depuis le commencement jusqu’à Jésus-Christ. Le Seigneur de l’Ecriture et l’Ecriture du Seigneur sont là, ensemble, devant nous, aussi long- temps qu’on peut dire aujourd’hui, dans ces derniers temps où nous sommes. Avec leur pleine et infaillible autorité." (P. Courthial, p.35)
Lecture
Si, au plus profond de nos convictions, nous nous laissons saisir par le fait que Dieu nous a parlé -et nous parle encore -par sa Parole, et que cette Parole est revêtue de toute son autorité, alors notre lecture en sera profondément marquée. ..Nous nous en approcherons avec respect, dans un esprit d’humilité, de dépendance, de soumission et d’obéissance, assurés de l’assistance du Saint-Esprit pour nous conduire dans une compréhension, dans une acceptation, dans une assimilation de la vérité d’En-Haut, et confiants que ce même Saint-Esprit appliquera la Parole à nos vies pour nous éclairer, nous instruire dans la justice, nous transformer, et nous conduire dans le chemin de l’ obéissance. Dans cet esprit de dépendance nous utiliserons les facultés que le Créateur nous a données, d’intelligence, de raisonnement, de recherche, de comparaison, d’analyse, de synthèse et de méditation, pour que cette Parole s’incarne en nous et devienne nôtre. Cette approche nous protégera de toutes les fausses lectures – mystique, illuministe, subjective, sentimentale, etc. – comme des tentations de faire de "l’exégèse", de construire des doctrines sur des bouts de versets, ou d’écarter ce qui n’est pas à notre goût.
"Ainsi donc, mes frères, cet Esprit Saint, que l’on veut exalter en excluant l’autorité de l’Ecriture, atteste lui- même, au contraire cette divine autorité des oracles de Dieu.
On a dit récemment que, en cessant de reconnaître la Bible pour une autorité, on sera amené à rechercher plus ardemment le Saint-Esprit; que l’Ecriture et l’Esprit s’excluent; que là où est l’Ecriture, l’Esprit disparaît.
Ces paroles sont étranges, mes frères; elle seraient énormes de danger, si elles n’étaient énormes d’erreur. Le Saint-Esprit est communiqué à l’homme, mais par le canal des Ecritures. La Parole nous déclare que les Saintes Ecritures sauvent par la foi en Jésus-Christ, que la foi vient de ce qu’on entend, et que l’on entend par le moyen de la Parole de Dieu. Voilà l’enseignement de Dieu. Ces paroles: "l’Esprit et l’Ecriture s’excluent," reviennent aux propositions suivantes: un champ de blé et le pain qui nourrit l’homme s’excluent; une source et l’eau qui désaltère l’homme s’excluent, le soleil et la lumière qui éclaire l’homme s’excluent, le sein d’une mère et lait qui fait vivre l’enfant s’excluent
Non, il n’est pas vrai que là où est l’Ecriture, l’Esprit disparaît. Tout au contraire, rien n’est uni aussi intimement que l’Esprit et l’Ecriture. L’Ecriture fait trouver le Saint-Esprit; le Sain Esprit donne la foi à l’Ecriture. Ce n’est pas l’autorité de l’Eglise qui nous donne la foi à la Parole, comme le prétendent les papes; ce ne sont pas certains principes de la raison, comme le prétendent quelques théologiens protestants; c’est Dieu qui crée lui-même cette foi en nous par sa Parole et par son Saint-Esprit. Nous avons de la divinité de l’Ecriture une démonstration immédiate, provenant de la vie qui a été manifestée et qui est la lumière des hommes. Notre foi à la Parole de Dieu n’est pas une foi simplement historique, comme quelques-uns se l’imaginent, ni une foi simplement philosophique, comme d’autres le pensent ; non, c’est une foi divine, une foi qui a ainsi une certitude, une fermeté intime élevée, inébranlable, comme Dieu qui en est l’auteur" Q.-H. Me d’Aubigné, p.62ss)
Prière
Dans la mesure où nous nous laissons saisir par l’autorité de la Parole de Dieu et, derrière elle, par l’autorité de Dieu lui-même, notre vie de prière en sera transformée… Un exemple saisissant de cela est la prière de Daniel au neuvième chapitre de son livre. Je vois au moins trois liens qui rattachent cette prière aux textes de l’Ancien Testament que Daniel avait (ou aurait) lus:
1. Tout d’abord, c’est la lecture de ces textes qui pousse Daniel à prier, et qui inspire sa prière. Il nomme lui-même les prophéties de Jérémie (ch.25; 29) au sujet des 70 ans d’exil qui touchent maintenant à leur fin. Il semble être au courant des promesses et des menaces de Dieu dans Deut 27 et 28. Peut-être connaît-il aussi la complainte de Dieu (Ezéchiel), qui cherche un homme pour se lever et se mettre à la brèche, et qui n’en trouve pas. Toujours est-il que, bouleversé par ses lectures, il prend le deuil et cherche la face de l’Eternel. Sa prière, déclenchée par la méditation de l’Ecriture, sera aussi instruite et orientée par elle, pour être conforme à la volonté du Seigneur. Cette précaution gardera Daniel de prier à la légère et de formuler des requêtes superficielles, égocentriques.
2. Deuxièmement, dans un élan magnifique de solidarité avec le peuple apostat de Dieu, dont il confesse les péchés comme s’ils étaient les siens propres, il reconnaît surtout, à plusieurs reprises, le point de départ de son dérapage, savoir qu’Israël n’avait pas écouté la Parole de Dieu, ne l’avait pas prise au sérieux, mais s’en était détourné (Dan 9.6,10,11,12,13). Ai-je besoin de faire le parallèle avec nos églises aujourd’hui?
3. Enfin, Daniel fonde ses supplications en faveur du peuple et pour la ville de Jérusalem sur Dieu lui- même et sur ses attributs: ce Dieu grand, redoutable, fidèle pour bénir comme pour châtier, miséricordieux pour pardonner, puissant pour délivrer, juste dans tous ses actes. Mais où a-t-il pu se forger une conception si majestueuse de Dieu, sinon dans une méditation approfondie de sa Parole ?
Bref, prier dans la soumission à l’autorité de Dieu, c’est apprendre à vouloir ce que Dieu veut – à la lumière de sa Parole -en invoquant les rai- sons qui l’honorent et le glorifient.
Foi
Vivre sous le signe de l’autorité de la Parole de Dieu et, derrière elle, de l’autorité de Dieu lui-même, c’est exercer une foi libératrice qui, tout en nous rappelant notre petitesse et nos limitations, nous préservera pourtant du pessimisme. Car cette foi aura pour objet le Dieu de l’Ecriture, tout-puissant et souverain, qui n’arrêtera pas d’accomplir son oeuvre de grâce jusqu’à son achèvement, qu’il s’agisse de nos vies individuelles, de nos églises, ou des nations et du monde. Car cette foi en Dieu, nourrie et fortifiée par sa Parole, cultivera en nous une .Welt- anschauung.~ (conception globale de la vie et du monde) authentique, réaliste, saine et vigoureuse parce que conforme à la pensée et aux desseins de Dieu.
"La foi. Prenez donc garde, mes frères: tremblez de perdre cette foi aux saintes Ecritures que Dieu vous a données. "La sainte Ecriture, c’est notre mère", disait Luther, "c’est le sein, ce sont les flancs dans lesquels nous avons été formés pour la vie éternelle…" Je vous dis donc à tous: Mon frère, la sainte Ecriture, c’est ta mère, car c’est elle qui t’a enfanté dans cette heure souveraine de cris de douleurs, d’angoisses, où un homme nouveau est né pour le monde éternel. C’est ta mère, car c’est elle qui t’a nourri, comme un enfant nouvellement né, du lait spirituel et pur qui fait croître. C’est ta mère, car c’est à ses pieds que tu t’es assis quand elle te racontait ces belles choses que Dieu a faites aux hommes. C’est ta mère, car c’est elle qui a apaisé les troubles de ton âme et qui a essuyé tes pleurs ! – Et tu pourrais douter de ta mère !" (J.-H. Merle d’Aubigné, p.70s)
Obéissance
On parle beaucoup de réveil à l’heure actuelle, à tel point que ce mot est devenu un piège, surtout s’il est détaché d’un retour à la Parole de Dieu et d’une redécouverte de ses exigences. D’ailleurs, où trouvez-vous la notion du réveil dans le Nouveau Testament? Ne devrions-nous pas revenir aux priorités véritables de la vie chrétienne telles que les apôtres les voyaient? Nous constaterons alors que Paul, par exemple, insiste toujours à nouveau sur la consécration, la soumission à l’autorité du Seigneur, l’ obéissance et la croissance vers la maturité. Car il sait que la crédibilité de l’Eglise, devant le monde, est à ce prix, qu’elle dépend moins des .signes et prodiges" que de vies qualitativement différentes, transformées par la puissance du Saint-Esprit.
"L’obéissance. Mes frères, gardez les saintes Ecritures et surtout obéissez aux saintes Ecritures. Que votre obéissance à la Parole de Dieu soit absolue et vivante. Ce n’est pas seulement en théorie que l’on peut renverser l’autorité de la Parole de Dieu; on le peut aussi bien en pratique; et nous tous, hélas! nous le faisons chaque jour. Oui, je m’accuse moi-même, et je vous accuse comme prenant quelque part à cette funeste erreur. ..Savez-vous ce qui vaincra cette erreur qui menace d’envahir les Eglises? Ce ne seront pas les réfutations des docteurs, mais ce sera la fidélité des disciples, par la vertu de Dieu" {ibid. p.71s).
Témoignage de l’Eglise
Le pasteur James Boice, connu aux Etats-Unis pour son ministère d’enseignement biblique systématique, dans son église à Philadelphie et à la radio, constate la quasi-disparition de cette forme de prédication:
"Quiconque examine sérieusement l’état de la prédication en notre vingtième siècle doit constater une contradiction étrange. D’une part, on reconnaît partout qu’il y a un grand besoin de bonne prédication, qui est généralement définie comme l’ exposition de la Bible. Et cependant, d’autre part, rarement a-t-on vu si peu de bonne exposition biblique …/… (Les fidèles) savent ce qu’ils veulent: un pasteur dont le but principal sera d’enseigner la Bible avec fidélité semaine après semaine, et aussi d’incorporer ce qu’il enseigne dans sa vie personnelle. Mais des pasteurs conformes à ce modèle sont apparemment de plus en plus rares et difficiles à trouver. Qu’est-ce qui ne va pas? …/… Une réponse proposée est que l’attention s’est déplacée de la prédication à d’autres formes nécessaires du ministère pastoral: la relation d’aide, la liturgie, la dynamique de groupe et d’autres préoccupations …/… Mais la faiblesse de ce point de vue est dans le fait qu’il n’est pas nécessaire de mettre ces choses en opposition avec la bonne prédication …/…
La réponse est que la dégénérescence à laquelle la prédication actuelle est assujettie est due, non pas à des causes externes, mais à un affaiblissement dans la confiance en la Bible comme Parole inerrante de Dieu revêtue de son autorité, chez les théologiens de l’Eglise, chez les professeurs des facultés de théologie, et enfin chez les pasteurs formés par eux. Il s’agit tout simplement d’une perte de confiance dans l’existence d’une Parole sûre venant de Dieu …/… N’ayant pas la conviction que la Bible est sans erreur en tout et dans ses parties, ces savants et ces prédicateurs font une approche de la Bible autre que celle des "inerrantistes". Dans leur recherche de la Bible (pour autant qu’ils y fassent des recherches), ils cherchent des lumières qu’elle serait capable de jetersur1emonde et la vie tels que le pasteur les conçoit, plutôt que de voir dans l’Ecriture cette révélation surpuissante qui nous dit ce que nous devons penser au sujet du monde et de la vie …/… Notre première thèse est donc que 1a baisse actuelle dans la prédication est due dans une grande mesure à une perte de conviction par rapport à l’autorité biblique, et que cette perte elle-même doit être attribuée à un éloignement de cette conception élevée de l’inspiration qui comprend aussi l’inerrance." (J.-M. Boice, p.125s)
Edification des croyants
Si, par la grâce de Dieu, nous nous laissons corriger, nous redécouvrirons le ministère de la Parole que le Seigneur a confié aux pasteurs/docteurs, pour assurer aux fidèles une nourriture solide par un enseignement systématique de tout le conseil de Dieu. Nous ne permettrons à rien de se substituer à cela. plutôt que de choisir nous-mêmes les thèmes qui nous paraissent importants ou intéressants, nous céderons à Dieu la constitution de l’ordre du jour, par l’étude et l’enseignement suivis de livres entiers de la Bible! Nous veillerons à ce que les les croyants lisent, méditent, étudient les Ecritures eux-mêmes, pour s’en imprégner et devenir véritablement le peuple du Livre qui le connaît, l’aime, le vit et le proclame avec… autorité!
Evangélisation des inconvertis
Nous refuserons toute édulcoration,toute dilution de l’Evangile, toute tentation de présenter un Evangile tronqué ou à l’eau de rose. Car nous n’avons pas une marchandise à vendre, marchandise au goût du jour, avec garantie de rendre nos auditeurs heureux. Certes, nous annoncerons la grâce, la miséricorde et l’amour de Dieu! Mais dans notre prédication de la Croix nous proclamerons que Dieu ordonne à tous les hommes partout qu’ils aient à se repentir car, de toute manière, ils ont tous rendez-vous avec son Fils, Sauveur pour les uns, Juge pour les autres. Et nous n’escamoterons pas le prix que celui qui s’engage dans la foi doit être prêt à payer pour devenir un disciple du Seigneur Jésus-Christ.
"Nous affirmons le rôle unique de la Bible comme le moyenindispensable pour l’évangélisation du monde (Héb 4.12; Luc 1.1-4; Jean 20.30,31; Héb 3.4a; 2 Tim 3.14). Nous ne pouvons pas connaître le Christ divin, véritable, indépendamment des Ecritures. Ainsi, l’Evangile de la Bible doit être le fondement de tout témoignage chrétien.
La tâche (qui nous incombe) d’évangéliser le monde requiertun message de Dieu pour tous les peuples du monde. Les expériences d’un individu ou d’un groupe ne peuvent pas être la base d’un Evangile universel; notre message doit être plutôt fondé sur la révélation de Dieu, sa Parole divine, la Bible qui s’applique à tous les hommes (Mat 24.14). C’est cette Parole, et non pas des opinions personnelles (2 Tim 4.2), que nous devons prêcher. Dieu a promis de bénir ce témoignage-là (Es 55.11), et il ne reviendra pas sur sa promesse (Nom 23.19)" (K.S. Kantzer et B. Fleming, p.993).
Dieu et le monde
Enfin nous proclamerons l’autorité de Dieu sur le monde.Nous rappellerons l’autorité d’Elohim, Dieu Créateur tout-puissant, sur sa création dont il régit le fonctionnement conformé- ment aux lois matérielles qu’il a lui- même établies, lois que nous respecterons nous-mêmes dans une saine gestion des biens qui nous ont été confiés, comme un signe du royaume messianique qui vient.
Nous insisterons sur l’autorité d’AdonaïDieu-Seigneur, Dieu des nations, devant qui les peuples sont responsables de se conformer aux lois morales qu’il a établies et révélées dans sa Parole, ce Dieu dont ils ont subi, subissent encore et subiront les justes jugements pour leur impiété et injustice, et avec qui ils ont rendez- vous pour rendre compte de leur comportement. Je vois là un thème biblique important, presque entièrement ignoré par nos communautés évangéliques…
Enfin nous déclarerons, bien entendu, les merveilles de YHVH; l’Eternel qui existe en et par lui-même d’éternité en éternité, Dieu qui se révèle, Dieu de la rédemption, qui vient au secours de l’homme déchu, coupable et perdu, pour le racheter, le régénérer, le justifier, l’adopter, le transformer, et pour entrer dans une Alliance de grâce avec lui. Et tout cela dans la conformité aux lois spirituelles qui émanent de lui.
Gloire soit rendue à Dieu, Père, Fils et Saint-Esprit, pour sa Parole inspirée, revêtue d’autorité. Le monde passera, et ses convoitises, mais la Parole de Dieu ne passera jamais, et celui qui s’y soumet pour faire la volonté de Dieu demeure éternellement. Amen.
Bibliographie
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