Plan de l’Evangile de Jean, Une Approche Statistique

Une approche statistique

1. Faire le plan d’un livre biblique: une nécessité et une difficulté

L’abord d’un livre biblique n’est pas toujours facile pour un individu du XXIe siècle. Le texte, parfois long de plusieurs dizaines de pages, généralement imprimé en petits caractères sur deux colonnes, peut en rebuter plus d’un, y compris parmi les chrétiens. La solution de facilité consiste alors à aller directement vers les portions connues, vers certains chapitres, au détriment d’une vue d’ensemble qui seule donne une compréhension correcte et générale (sinon complète, ce qui serait illusoire face à l’insondable Parole de notre Dieu).

Afin d’aider le lecteur à aborder un des 66 volumes qui constituent la Parole inspirée de Dieu pour l’homme, les éditeurs de nos bibles offrent généralement, en introduction de chaque livre, une notice permettant de saisir son idée d’ensemble et son plan. Souvent, des intertitres ajoutés par les traducteurs aident à structurer le texte1. Pour simplifier, le découpage d’un livre est :
– soit basé sur le sens du texte, selon la perception qu’en a le commentateur,
– soit fondé sur des indices textuels2.

Pour les livres où les indices textuels sont clairs, mieux vaut sans doute privilégier cette approche: l’Écriture ne s’explique jamais mieux que par elle-même; c’est un principe herméneutique de base. Pour les autres livres, le choix est parfois plus arbitraire et l’intention de l’Esprit de Dieu n’est pas aisée à saisir3.

L’évangile selon Jean ressort plutôt de la seconde catégorie. Cet article a pour objet de proposer une approche qui permette d’établir un plan le plus objectif possible, à l’aide de statistiques sur les mots.

2. Statistiques sur l’évangile selon Jean

2.1. Méthodologie

La première démarche consiste à répertorier l’ensemble des mots du texte original. L’évangile selon Jean comprend 13 578 mots4, soit 1 090 mots différents. 249 mots reviennent au moins 10 fois et 397 mots sont des hapax pour cet évangile (ils n’y sont présents qu’une fois).

Lors de la deuxième étape, il faut éliminer, parmi les mots les plus fréquents, ceux sans signification particulière (comme les «kai», souvent traduits par «et», qui équivalent la plupart du temps à notre point de fin de phrase), les articles, les pronoms, certains verbes comme «être» ou «avoir», qui n’ont pas d’intérêt direct pour cette étude. On réduit ainsi le champ à 61 mots, revenant chacun au moins 20 fois.

Le troisième stade vise à repérer parmi les mots non retenus ceux qui sont de la même famille qu’un des 61 mots retenus. Par exemple, le mot «vérité» (aletheia) se rencontre 25 fois mais l’adjectif correspondant (alethinos) 8 fois seulement. On constitue ainsi des «familles» de mots fréquents.

Lors de la quatrième étape, on calcule un indice de fréquence relative5 de chaque mot (ou de chaque famille de mots) dans chacun des 21 chapitres de l’évangile6. Il est alors possible de mettre en évidence les termes qui sont statistiquement plus fréquents dans telle partie que dans telle autre. Ainsi, le découpage de l’évangile apparaît.

2.2. Résultats

Parmi les mots ou les familles de mots sélectionnés, certains se retrouvent de façon homogène tout au long de l’évangile. C’est par exemple le cas des noms «Jésus», «Dieu» ou des verbes comme «parler», «savoir», «répondre»…

D’autres, en revanche, sont concentrés sur certaines portions. Pour un nom comme «Pilate», exclusivement présent dans les ch. 18 et 19, la constatation n’offre guère d’intérêt. Pour d’autres, cela permet de mettre en évidence trois groupes de 5 chapitres, au centre de l’évangile, comme l’indique le tableau suivant:

Mots / groupes de mots
Total
ch. 3 à 7
ch. 8 à 12
ch. 13 à 17
vie, vivre
56
40
8
5
lumière/ténèbres/aveugle
51
9
32
0
aimer, amour
57
5
7
34
vérité, vrai
56
20
14
12

Le groupe de mots de la famille de «vérité» est présent uniformément sur ces trois sections. Par contre, pour les trois autres groupes de mots, dont le nombre d’occurrences est comparable, la répartition est loin d’être homogène:
– La première section, qui couvre les chapitres 3 à 7, met l’accent sur la vie.
– La deuxième section, du chapitre 8 au chapitre 12, insiste sur la lumière.
– La troisième section, chapitres 13 à 17, est centrée sur l’amour.
A ces groupes de mots, se rattachent un certain nombre de verbes, eux aussi significativement plus présents dans une section que dans les autres.

Verbes fréquents
ch. 3 à 7
ch. 8 à 12
ch. 13 à 17
venir
marcher
prier
chercher
suivre
demeurer
montrer
voir
glorifier
naître
garder

 

2.3. Interprétation

Une approche purement statistique ne suffit pas ; elle doit être confrontée au sens du texte. Or la progression même de la pensée de l’évangéliste correspond aux résultats de l’étude statistique.

a) Les chapitres 3 à 7 insistent à l’évidence sur la notion primordiale de la «vie»:
– A Nicodème, Jésus annonce la nécessité d’une vie nouvelle et éternelle, don de Dieu par son Fils (3.3, 7, 16).
– A la femme samaritaine, le Messie présente l’eau de la vie, qui désaltère à jamais (4.10, 14).
– Aux Juifs qui le persécutent après la guérison de l’infirme de Bethesda, Jésus se présente comme celui qui a reçu du Père le pouvoir de vivifier (5.21, 26).
– Après la multiplication des pains, le Seigneur proclame : «Je suis le pain de vie» (6.35, 48).
– Enfin, lors de la fête des tabernacles, il promet à celui qui croit en lui que des fleuves d’eau vive couleront de son sein (7.38).

b) Les chapitres 8 à 12 font appel à l’opposition ténèbres/lumière:
– Jésus annonce : «Moi, je suis la lumière du monde» (8.12).
– Après la guérison de l’aveugle-né (incapable par nature de voir le jour), celui qui est la lumière du monde (9.5) dénonce la cécité morale de ceux qui croient avoir la lumière, mais qui, en fait, sont aveugles (9.39-41).
– Le Seigneur, avant d’aller ressusciter Lazare, parle à ses disciples de la marche de celui qui voit la lumière du monde (11.9-10).
– Le chapitre 12 conclut en reprenant plusieurs expressions du chapitre 8 et Jésus presse ses auditeurs aveuglés de croire en la lumière tant qu’elle est parmi eux (12.35-46).

c) Les chapitres 13 à 17 ont été appelés les chapitres de l’amour:
– Dès les premiers mots du ch.13, l’évangéliste annonce que Jésus allait mettre le comble à son amour pour les siens (13.1), par un geste pratique, avant de le faire par une œuvre éternelle, à la croix.
– Au début de ses entretiens avec ses disciples, le Seigneur leur donne son nouveau commandement : «Aimez-vous les uns les autres, comme je vous ai aimés» (13.34).
– Tout au long de ses «dernières paroles», il évoque cette sphère d’amour qui unit le Père, le Fils et ceux que le Fils appelle ses amis (14.23 ; 15.9-13 ; 16.27).
– Enfin, la prière qu’il adresse à son Père se termine par ce désir du Seigneur que l’amour dont il se sait aimé de lui, soit dans ses disciples (17.26).

L’ordre des trois parties est également riche d’instruction : il faut tout d’abord avoir la vie de Dieu (ch. 3-7), avant de connaître, par Jésus Christ, le Dieu qui est lumière (ch. 8-12) et amour (ch. 13-17).

Les verbes rattachés confirment cet ordre:
– Pour recevoir la vie, il faut «chercher», «venir» à Jésus qui «montrera» le chemin du salut et fera «naître» alors surnaturellement par l’opération de son Esprit.
– Pour «voir» la lumière, il faut «suivre» Jésus et «marcher» à sa suite. La lumière n’a donc rien d’une contemplation statique; elle se vit dans l’action. La 1ère épître de Jean développera cet aspect.
– Pour connaître l’amour, il faut «demeurer» près du Seigneur, «garder» ses commandements, entretenir une relation vivante en «priant», tout cela contribuant à «glorifier» Dieu, à l’exemple de son Fils.

3. Proposition de plan pour l’évangile selon Jean

3.1 Structure en chiasme de l’évangile

Une fois ces trois parties clairement mises en évidence, il est possible d’ébaucher une structure de plan pour l’évangile, en remarquant qu’à la symétrie : lumière (8- 12) // amour (13-17), peut s’ajouter une deuxième symétrie : vie (3-7) // mort (18- 19). Il va de soi qu’il n’est pas besoin que le mot «mort» apparaisse statistiquement dans cette partie pour qu’on comprenne qu’elle est centrée sur la mort. Jean est le seul évangéliste à décrire en détail la mort du Seigneur, à témoigner du sang et de l’eau qui ont coulé de son corps (source de vie pour nous) et à donner des précisions sur son ensevelissement (19.30-42).

On aboutit ainsi à une structure en «chiasme», caractéristique de la pensée hébraïque, que l’on retrouve souvent dans certains livres de l’A.T.7

Restent ensuite les parties introductives (ch. 1 et 2) et conclusives (ch. 20 et 21). Là aussi, plusieurs symétries sont frappantes:
– A l’annonce de la résurrection (2.19-22), répond la réalité de la résurrection (20.1-18).
– Aux trois jours retraçant les premières rencontres du Seigneur avec plusieurs de ceux qui deviendront ses disciples (1.29, 43; 2.1)8, correspondent les trois rencontres de Jésus ressuscité avec ses disciples (20.19, 26; 21.14). De plus, Pierre est particulièrement mis en avant lors de la première rencontre du début de l’évangile et lors de la dernière de la fin de l’évangile. Nathanaël doute (2ème rencontre au début), tout comme Thomas (2ème rencontre de la fin). La joie marque la 3ème rencontre du début, à Cana et les disciples se réjouirent de voir le Seigneur lors de la 1ère rencontre du ch. 20.
– Remontant vers le début de l’évangile, on trouve le témoignage de Jean Baptiste (1. 19-28), auquel répond l’affirmation de la véracité du témoignage de Jean l’évangéliste (21.24).
– Enfin, au prologue majestueux qui ouvre le quatrième évangile, dévoilant la gloire du Fils éternel, venu habiter parmi les hommes pour leur révéler le Père, correspond le court verset qui termine ce livre unique: «Jésus a fait encore beaucoup d’autres choses; si on les écrivait en détail, je ne pense pas que le monde même pourrait contenir les livres qu’on écrirait.» Sa gloire est résumée dans cette affirmation paradoxale: ce qu’il a fait en un peu plus de trente ans de vie terrestre remplirait l’univers entier9.

D’autres détails pourraient venir conforter cette vision symétrique de l’évangile:
– Nicodème vient à Jésus au ch. 3, au début de la partie sur la vie. C’est lui aussi qui vient, à la fin de la partie sur la mort (19.39), apporter les aromates pour l’ensevelissement du Seigneur.
– Jésus se retire au jardin des Oliviers à la fin de la section centrée sur la vie (8.1), comme il s’y rendra, accompagné des onze, au début de la section sur la mort (18.1).
– Jésus refuse de condamner la femme adultère au début de la partie sur la lumière (8.1-11), tout comme il prendra le parti de ses disciples dans sa prière d’intercession du ch. 17.
– etc.

3.2 Plan de l’évangile selon Jean

1.
Prologue
1.1-18
2.
Introduction
1.19-2. 25
2.1.
Le témoignage de Jean Baptiste: l’Agneau de Dieu
1.19-28
2.2.
Trois jours symboliques
1.29-2.11
2.2.1.
Le baptême: l’Agneau de Dieu
1.29-42
2.2.2.
L’appel de Nathanaël: l’incrédulité
1.43-51
2.2.3.
Les noces de Cana: la joie
2.1-11
2.3.
L’annonce de la résurrection
2.12-25
3.
La vie
3-8.1
4.
La lumière
8.2-12
4′.
L’amour
13-17
3′.
La mort
18-19
2′.
Conclusion
20.1-21.23
2.3′.
La résurrection
20.1-18
2.2′.
Trois jours symboliques
20.19-21.23
2.2.3′.
Le 1er dimanche: la joie
20.19-23
2.2.2′.
Le 2ème dimanche: l’incrédulité
20.24-31
2.2.1′.
La pêche miraculeuse: «pais mes agneaux»
21.1-23
2.1′.
Le témoignage de Jean l’évangéliste
21.24
1′.
Épilogue
21.25

 

4. Conclusion

D’autres correspondances pourront être trouvées avec profit, en particulier dans les parties centrales, et nous laissons le soin à chaque lecteur de les découvrir. Le risque existe, cependant, lorsqu’on découvre une structure qui semble être voulue par l’Esprit de Dieu, d’aller trop loin et de forcer l’intention de l’Esprit. La recherche en devient alors intellectuelle et peut occulter le but premier de la lecture de la Bible, et en particulier de cet évangile : communiquer la vie à celui qui ne l’a pas et la faire abonder en celui qui l’a déjà reçue (20.31; 10.10) par la connaissance du seul vrai Dieu et de son envoyé, son Fils unique (17.3).

L’approche de l’évangile selon Jean développée ci-dessus est une parmi bien d’autres: elle les complète bien plus qu’elle ne les infirme. L’insondable Parole de Dieu ne peut ni ne doit être vue à travers un seul prisme. N’est-elle pas pour chaque lecteur qui se laisse sonder par elle, «vivante et efficace.

Notes :
1 Il est très important de noter que les plans et les titres ajoutés ne sont pas inspirés et ne font pas partie stricto sensu du texte biblique. Ils reflètent plus ou moins les options théologiques du rédacteur. Il semble que, à l’époque du Seigneur Jésus, l’A.T. ait été divisé à l’aide de «titres» (cf.Marc 2.26 et 12.26, où le texte original a litt. au titre «Abiathar, souverain sacrificateur» et au titre «Du buisson», version Darby). Ces titres ont été perdus et, de toute façon, la question de leur inspiration reste ouverte.
2 Par exemple, l’évangile selon Matthieu se scinde assez naturellement en sept parties, chacune des parties centrales commençant par «Il arriva que, quand Jésus eut achevé son discours…» (7.28; 11.1; 13.5 ; 19.1; 26.1). D’autres commentateurs préfèrent la première approche et divisent le livre en deux parties, la césure se plaçant soit en 13.1, soit en 16.21.
3 Le meilleur exemple de perplexité est le livre des Proverbes. Il est clairement dit que son auteur les a mis en ordre (Ecc 12.9), mais l’ordre ne nous apparaît que rarement comme évident!
4 Tous les décomptes indiqués ici peuvent varier de quelques unités, selon les leçons retenues. Nous nous sommes basés sur le texte grec de la Bible On-line, par facilité. Les conclusions restent cependant inchangées.
5 Défini comme le rapport entre la fréquence d’un mot dans une partie de l’évangile par rapport à sa fréquence dans l’ensemble du livre. Un indice égal à 3 indique que le mot est trois fois plus fréquent dans la section que dans l’ensemble du livre. Un mot a été jugé surreprésenté lorsque son indice était supérieur à 2.
6 Le découpage en chapitres n’est pas inspiré; il ne sert ici que par facilité. Une approche plus rigoureuse, purement statistique, consisterait à calculer des «distances» entre termes et à appliquer des méthodes d’analyse des données.
7 Un des exemples les plus clairs est celui du livre d’Ézéchiel, où abondent ces structures chiasmatiques. Voir l’étude de Brian Tidiman, Ézéchiel, CEB; voir aussi l’étude de Daniel Arnold in Ces mystérieux héros de la foi (Approche globale du livre des Juges), pp. 36-37, et Esther, pp. 39-43, éd. Emmaüs.
8 Il semble que le «lendemain» du v. 35 soit le même jour que celui du baptême (v. 29-34), comme l’indiquent le «encore» qui suit et la mention explicite d’un «troisième jour» au début du ch. 2.
9 Le mot pour «monde» est kosmos, l’univers dont on ne connaît pas les limites.

 

 

les articles plus lus

En présentant le premier numero de PROMESSES

à nos frères en la foi, nous pensons bien faire d’exposer les principes qui seront à la base de ce «Cahier d’études bibliques».

Nous chercherons à être utiles à tous, à l’église de Dieu d’abord, c’est-à-dire au Chef de l’église, Christ, mais aussi à ceux pour qui la Parole est précieuse, à ceux qui désirent étudier et obéir.

Les bulletins, feuilles de renseignements, journaux mensuels ou trimestriels foisonnent. Tous, ou presque, apportent des nouvelles missionnaires ou d’évangélisation. Ce qu’on recherche ici est beaucoup plus un cahier comportant exclusivement des études bibliques ou se rapportant spécifiquement à la Parole.

La plupart des assemblées de «frères» issues du mouvement datant des années 20-30 du siècle écoulé semblent vivre au ralenti, l’esprit missionnaire mis à part. Comme dans tout mouvement, certaines vérités ont été poussées en «épingle», d’autres ont été négligées; des intérêts particuliers ont pris le pas sur les valeurs spirituelles. Nous assistons à un rétrécissement sérieux de l’influence, de l’action que devraient avoir des églises de foi, c’est-à-dire formées d’enfants de Dieu véritables, scellés par l’Esprit de Dieu.

En toute humilité, nous désirons demander au Seigneur sa lumière, afin de marcher selon sa grâce, en fidélité, devant sa face. Nous ne saurions prétendre connaître tout ce que Dieu veut pour les siens et son église, mais notre désir est d’apporter ce qui, aujourd’hui, est utile pour l’édification et la consolation de nombreux enfants de Dieu. Précisons que nous ne voudrions pas représenter un point de vue particulier, mais étudier la Parole, en respectant la sainteté de Dieu.

Chaque étude signée restera sous la responsabilité de son auteur. L’enseignement de ces pages semble devoir être d’une étendue qui surprendra peut-être. Notre désir est, à la fois, de présenter des études fouillées pour le chrétien avancé, mais aussi des explications de termes, de langage, pour ceux qui ne connaissent pas notre langue d’une manière approfondie.

A titre d’essai, nous ferons parvenir un certain nombre d’exemplaires au monde francophone d’outre-mer. Il faudra ainsi tenir compte de ce champ de diffusion.

De divers côtés, sinon dans nos vieux pays, on demande, en effet, une littérature chrétienne plus abondante, basée sur la Bible, la Parole de Dieu. Quelques-uns d’entre nous ont cru devoir répondre à ce désir. Nous plaçons ces cahiers sous le regard du «Chef», demandant à Dieu sa bénédiction pour rendre témoignage à la Vérité.

Les éditeurs

Où nous mène la formidable évolution qui soulève le monde chrétien tout entier? En cette période d’après le Concile du Vatican Il, il est utile de dresser un bilan des faits, même provisoire, et de procéder à un tour d’horizon général.

Eléments positifs de l’évolution catholique: Incontestablement, des mouvements intéressants se font sentir dans l’Eglise romaine: étude et diffusion de la Bible en voie de développement, dialogue engagé avec les autres confessions, reconnaissance du fait que les communautés des «frères séparés» protestants peuvent porter le titre d’églises, admission d’une part de responsabilité dans la rupture du XVIe siècle. Au cours du Concile du Vatican Il, l’opinion a été exprimée à maintes reprises que l’Eglise catholique avait besoin d’un renouveau si elle voulait réellement entreprendre le dialogue avec les églises non-romaines. Il y eut des discussions très libres, suivies de votes positifs impressionnants, par exemple sur la collégialité des évêques gouvernant l’Eglise avec le pape, l’usage de la langue vulgaire dans le culte, l’oecuménisme, la liberté religieuse, la limitation des naissances, le peuple juif, l’Ecriture Sainte et la Tradition, etc.

Fin décevante de Vatican Il: Rappelons quelques faits justifiant cette impression de l’ensemble des observateurs non catholiques.

La collégialité des évêques doit être entendue de telle manière que la primauté du pape demeure intacte. La structure monarchique de l’Eglise romaine n’en sera pas affectée, le pape reste le souverain absolu. Le collège épiscopal n’a aucune autorité sans ce dernier. Paul VI, dans son discours d’ouverture à la troisième session, ne s’en est pas référé moins de sept fois à sa primauté, et le mot-clé qu’il a constamment utilisé était celui de «hiérarchie sacrée». Le pasteur G. Richard-Molard estime qu’un tel discours «ne peut guère qu’hérisser la plupart des chrétiens non catholiques romains» («Messager Social», 10 déc.; S. CE- P. I., 1er oct.; 24 sept. 1964).

Il est clair, selon le même pasteur, «que l’Eglise catholique est toujours placée sous l’unique pouvoir de l’Eglise romaine. Or, il ne s’agit pas là d’une découverte de La Palice, mais d’une situation, chaque jour plus insupportable pour les catholiques eux-mêmes. Cette direction totalitaire italienne, ou pire encore, romanisée, possède encore tous les leviers de commande» («Christianisme au XXe siècle», 29 oct. 1964). Cela n’empêche pas qu’une seconde force «se manifeste par l’esprit nouveau qui anime une partie toujours plus large du catholicisme non italien. Il ne faut pas s’imaginer que cet esprit ait changé en quoi que ce soit la masse, mais il passe sur quelques centaines d’évêques, sur de nombreux prêtres et sur une élite de laïcs» (ibid.).

La Vierge Marie a été proclamée Mère de l’Eglise, sans l’avis des pères conciliaires, par Paul VI, qui lui a consacré la moitié de son discours de clôture {cf. «Chrétien Evangélique», déc. 1964, p. 5). Cette proclamation «a détruit tous les efforts des pères conciliaires qui. .. s’étaient ingéniés à éviter autant que possible les déclarations de nature à. ..donner de l’extension au dogme marial et à choquer les protestants» {«Christ U. Welt», cité par S. CE. P. I., 3 déc. 1964).

Le 11 octobre 1963, le pape a terminé une allocution aux pères du Concile et aux fidèles par cette prière à la Sainte Vierge: «O Marie, nous vous prions pour nos frères encore séparés de notre famille catholique. Voyez comment, parmi eux, une phalange glorieuse célèbre votre culte avec fidélité et amour. Voyez comment parmi d’autres, si résolus à se dire chrétiens, commence à renaître aujourd’hui votre souvenir et votre culte, ô Vierge très bonne. Appelez avec nous tous ces fils, qui sont vôtres, à la même unité sous votre protection maternelle et céleste» («Documentation Catholique», 3 novembre 1963).

Le cardinal Doepfner, de Munich, dont les interventions au Concile ont été souvent remarquées, vient de déclarer à son tour: «Amoindrir dans l’Eglise le culte de la Vierge Marie serait un malentendu et une mauvaise interprétation des enseignements du Concile. ..Nous voulons approfondir et enraciner encore plus fort dans ce mystère du Christ le riche héritage laissé à l’Eglise par la Vierge Marie. Elle a un grand rôle à jouer dans l’Eglise, qui voit en elle son image originelle» {«Figaro», 28 déc. 1964).

Le dogme romain: Dans son livre récent sur l’Unité, le cardinal Béa répète des dizaines de fois: 1°) que l’enseignement romain, étant infaillible, ne saurait subir dans son essence aucune modification; 2°) que l’Eglise catholique étant la seule vraie Eglise du Christ, l’unité finale ne peut être envisagée que par le retour de tous les baptisés orthodoxes et protestants au bercail du successeur de saint Pierre. Ce caractère intangible du dogme catholique n’a cessé d’être proclamé clairement par Jean XXIII, Paul VI et tous les porte-parole de Rome. Le professeur E. Schlink, observateur de l’Eglise Evangélique d’Allemagne à Vatican Il, après avoir noté que les délibérations conciliaires sont « révolutionnaires» pour l’Eglise romaine, ajoute: «Aucune des resolutions jusqu’ici adoptées n’a «rapporté, modifié ou même réinterprété de manière satisfaisante un seul des dogmes qui divisent la chrétienté » (S. CE. P. I., 17 déc.1964).

Cela n’a pas empêché le professeur de théologie protestant O. Cullmann de déclarer que Vatican Il «n’a fermé aucune porte ». Dans une interview accordée au journal «Le Monde », M. Cullmann reconnaît que les textes élaborés au Concile sont décevants, car la plupart sont des textes de compromis. Le Concile actuel est lié par celui du Vatican I (en 1870, où fut proclamée l’infallibilité pontificale), et par les dogmes mariaux antérieurs, inchangeables eux aussi. Mais il ajoute: «Je ne partage pas le pessimisme de certains qui s’exprime dans ce slogan: «II ne sortira rien de ce Concile! » Tous les textes sont formulés de telle sorte qu’aucune porte n’est fermée, et qu’ils ne seront pas un obstacle à la future discussion entre catholiques ni au dialogue avec les non-catholiques, comme le sont les décisions des Conciles antérieurs » (cité par «Vie Protestante », 23 oct. 1964). -Puisque les dogmes romains sont infaillibles (voir les anathèmes du Concile de Trente), on se demande sur quoi porte la discussion. ..Si la porte n’est pas fermée, elle ne l’est qu’à sens unique et ne nous paraît conduire qu’au bercail de saint Pierre.

(à suivre)
Extrait avec autorisation du périodique «Le Chrétien évangélique »

(2 Tim.1, 7-9)

«Dieu ne nous a pas donné un esprit de timidité, mais de force, d’amour e! de prudence.»

Timide = qui manque de hardiesse et d’assurance, dit le dictionnaire. Dieu, en vue du but qu’il s’est proposé, nous a adressé une «VOCATION SAINTE», et pour cette vocation, il nous revêt:

de force – par quoi nous devons comprendre force de caractère, maîtrise de soi, tranquillité d’esprit, toutes choses qui sont contraires à la timidité. Une stabilité nouvelle, créée par le Saint-Esprit de Dieu qui nous donne l’assurance du salut; un contrôle de soi-même qui peut ne pas être naturel, mais qui est le résultat du travail de cet Esprit.

d’amour – de compréhension, de compassion, de pardon, amour qui n’est pas mollesse, ni faiblesse, mais qui prend part aux malheurs du prochain, qui comprend le pécheur et repousse le péché.

de prudence – mieux encore discipline personnelle, d’intelligence avertie, de jugement balancé, nuancé, sans laisser-aller.

Etes-vous craintif de nature, manquez-vous d’assurance, avez-vous ce qu’on appelle un complexe d’infériorité, craignez-vous de vous affirmer? Lisez les lettres à Timothée. C’était un timide de nature, et l’apôtre l’encouragea. Notez ceci: Dieu DONNE UN AUTRE ESPRIT que celui que vous aviez précédemment. Il donne gratuitement. Alors, demandez, priez. Il vous DONNERA.

Le but de nos études est de faire connaître et comprendre (Ps. 82, 5) les pensées de Dieu révélées dans sa Parole, afin de vivre dans la lumière. Dans un monde où Satan règne pour obscurcir la vérité, voire même la cacher, il importe que le juste – sauvé par la foi en Jésus-Christ – connaisse «les fondements» de la vérité divine.

Les lignes suivantes ne veulent être qu’un canevas de «la saine doctrine», telle que la Parole de Dieu nous la montre. Cet enseignement est à la fois christologique (Matth. 7, 28; 1 Cor. 2, 1-2) et apostolique (Act. 2, 42) ; il comprend l’ensemble des vérités divines.

I L’INSPIRATION VERBALE DE LA BIBLE

La pierre de touche de tout ce qui suit est la doctrine de l’inspiration des Ecritures. «Toute Ecriture est inspirée de Dieu» (2 Tim. 3, 16). Nous possédons aujourd’hui suffisamment de preuves, devant lesquelles tout homme sincère doit s’incliner. La Bible est la révélation de Dieu à l’égard de l’homme. Ce n’est pas un livre ecclésiastique quelconque, ni un ouvrage symbolique ou philosophique. C’est simplement «la Parole de Dieu» qui ne se laisse pas discuter. Des hommes de Dieu, poussés par l’Esprit, rédigèrent les 66 livres de cette divine Bibliothèque (2 Pi. 1, 21 ). Tout en gardant leur caractère et leur personnalité, ils furent de simples véhicules utilisés pour transmettre intégralement les pensées divines. C’est un miracle et un miracle ne s’explique pas. On peut l’accepter ou le rejeter; mais le fait est là.

Il LA TRINITÉ DE DIEU

Il en est de ce terme comme d’autres: la doctrine de la trinité de Dieu se trouve clairement révélée dans la Bible, bien que cette expression n’y soit pas mentionnée. Lucien déjà, rhéteur et philosophe grec du 2me siècle, fait confesser le chrétien dans son «Philopatris»: «le Dieu exalté …Fils du Père, Esprit procédant du Père, l’Un d’entre les Trois et Trois d’entre Un.» Le terme même fut employé formellement pour la première fois lors du synode en 317 à Alexandrie.

Cela ne signifie rien d’autres que tri-unité. La déité est une trinité, une unité qui possède 3 personnes distinctes ayant la même vie et la même essence.

L’ANCIEN TESTAMENT

Nous y voyons une révélation progressive qui trouve sa complète manifestation dans le Nouveau Testament. Des allusions claires et sans équivoques devaient ouvrir les yeux des personnes pieuses du temps du Seigneur.

Gen. 1,1: «Au commencement Dieu.» Ce terme «ELOHIM» est au pluriel et Moïse l’emploie quelque 500 fois. A remarquer qu’à chaque reprise le verbe qui l’accompagne est au singulier, ce qui prouve bien l’unité dans la pluralité des Personnes de la Déité.
Gen. 1,26: «Et Dieu dit: Faisons l’homme selon notre ressemblance»
Gen. 3, 22: «Voici l’homme est devenu comme l’un de nous»
Es. 48, 16: «Le Seigneur l’Eternel» – Dieu le Père
«m’a envoyé» – Dieu le Fils
«et son Esprit» -Dieu le Saint-Esprit
Zach. 12, 10: «Et je répandrai» -Dieu le Père
«un esprit de grâce» – Dieu le Saint-Esprit
«ils se lamenteront sur lui» -Dieu le Fils

LE NOUVEAU TESTAMENT

Il dévoile clairement cette vérité et nous confirme que la déité se compose de 3 Personnes: Dieu le Père, Dieu le Fils et Dieu le Saint- Esprit (Matth. 28, 19; Jean 1:1; Jean 5:3-4; Jean 8:54).

La trinité de Dieu est déjà engagée lors du baptême du Seigneur (Matth. 3, 13-17). On ne peut, à ce sujet, s’exprimer plus clairement que le Seigneur le faisait dans Jean 14:16-26: «Mais le Consolateur, l’Esprit-Saint (3ème Personne) que le Père (1ère Personne) enverra en mon nom (2ème Personne).»

La grande bénédiction apostolique nous laisse «la grâce du Seigneur Jésus-Christ», «l’amour de Dieu» et «la communion du Saint-Esprit» (2 Cor. 13, 13).

D’ailleurs, l’homme lui-même est une trinité composée de l’esprit, de l’âme et du corps. Il est attaqué par une autre trinité: le monde autour de lui, la chair en lui, et le diable au-dessous de lui. La loi du péché en lui est également représentée par une trinité:la convoitise de la chair, la convoitise des yeux et l’orgueil de la vie. Et, enfin, il peut être sauvé par la trinité divine: Dieu le Père, Dieu le Fils et Dieu le Saint-Esprit.

III JÉSUS-CHRIST

1. Sa Divinité

Jean 1, 1-3 suffirait pour établir cette vérité bénie:
Au commencement était la Parole» (le Verbe dans son existence éternelle)
cet la Parole était auprès de Dieu» (le Verbe dans son existence personnelle)
et la Parole était Dieu» (le Verbe dans son essence divine)

2. Son incarnation

Il est «Dieu manifesté en chair» (1 Tim. 3, 16). Ce mystère, dans lequel même les anges désirent plonger leurs regards, nous a été révélé. Les 7 degrés de son abnégation nous sont donnés en Phil. 2, 7-9. Aucune difficulté n’est inconnue du Seigneur qui a été tenté comme nous; Il peut donc nous accorder miséricorde et secours au moment opportun (Hébr. 4, 15-16). Ami qui souffres, confie-toi en Lui, car son nom est «Merveilleux».

3. Son CEuvre rédemptrice

Rom. 4, 25 dit: «Jésus, notre Sauveur, lequel a été livré pour nos fautes et a été ressuscité pour notre justification».
L’Ancien Testament y fait continuellement allusion (Ex. 12, Ps.22, Es.53).
Les Evangiles en sont la réalisation
Les Actes le proclament
Les Epîtres l’expliquent
L’Apocalypse, enfin, décrit la destruction de ceux qui ont rejeté cette oeuvre.

(à suivre)