L’onction privée du premier roi

DU TEMPS de Samuel, le peuple désire avoir un roi comme en ont toutes les nations (1 Sam 8.5). Dieu fait comprendre au dernier juge que cette demande est l’expression d’une révolte contre l’Éternel: Ce n’est pas toi qu’ils rejettent, c’est moi qu’ils rejettent, afin que je ne règne plus sur eux (1 Sam 8.7). Dieu ordonne néanmoins à Samuel de se plier à la demande du peuple et d’établir un roi sur eux (1 Sam 8.22).1

Au début du chapitre 9 de 1 Samuel, l’auteur répond au lecteur qui s’interroge sur l’identité de cet homme. Deux chapitres sont consacrés à l’onction du premier roi. L’auteur commence par raconter les pérégrinations du fils d’un propriétaire parti, avec son serviteur, à la recherche de bétail égaré. Après avoir vainement cherché les bêtes dans plusieurs contrées, les deux hommes décident de consulter le prophète Samuel. Celuici les rassure et les informe que le bétail a été retrouvé. Samuel profite de cette rencontre pour annoncer, en privé, à Saül, le fils du propriétaire, que Dieu l’a choisi comme prochain chef d’Israël. Samuel prédit aussi différents événements qui s’accomplissent le jour même. L’auteur achève la narration par une description succincte de l’onction publique. Devant le peuple réuni, Samuel jette le sort qui désigne Saül (1 Sam 10.17-27).

Le récit de l’onction privée est riche et détaillé. Il est quatre fois plus long que celui de l’onction publique. L’auteur présente Saül, mais pourquoi donner autant de détails? Pour comprendre le sens du texte, il est important de saisir la trame de la narration. Sans ce fil rouge, le lecteur se perd dans les éléments secondaires.

Samuel le voyant

Le thème de la vue domine toute la narration. Les deux personnages importants du récit – Samuel et Saül – en sont marqués.

Samuel se distingue par une connaissance exceptionnelle. Dieu l’informe de l’arrivée imminente de l’homme qui sera le premier roi d’Israël. Le temps et le lieu de la rencontre sont indiqués, ainsi que le ministère du futur chef («Demain, à cette heure, je t’enverrai un homme du pays de Benjamin, et tu l’oindras pour chef de mon peuple d’Israël. Il sauvera mon peuple de la main des Philistins » (1 Sam 9.16). Le lendemain, quand Samuel aperçoit Saül, Dieu lui confirme le personnage («Lorsque Samuel aperçut Saül, l’Éternel lui dit : Voici l’homme dont je t’ai parlé; c’est lui qui régnera sur mon peuple» 1 Sam 9.17).

Samuel témoigne de sa connaissance hors du commun dès qu’il ouvre la bouche. Il sait que Saül cherche des ânesses avant que celui-ci ait pu l’informer de son besoin, et il sait où se trouvent les bêtes recherchées en vain depuis trois jours: «Ne t’inquiète pas des ânesses que tu as perdues il y a trois jours, car elles sont retrouvées» (1 Sam 9.20).

Le lendemain, Samuel annonce à Saül toute une série de signes précis qui se réalisent le jour même (1 Sam 10.2-13). Samuel décrit quatre rencontres dont Saül sera le témoin. Pour les deux premières, Samuel indique le lieu de la rencontre, le nombre de personnes et le contenu de leur message. La description du deuxième groupe d’hommes est détaillée à l’extrême («Tu arriveras au chêne de Thabor, où tu seras rencontré par trois hommes montant vers Dieu à Béthel, et portant l’un trois chevreaux, l’autre trois gâteaux de pain, et l’autre une outre de vin. Ils te demanderont comment tu te portes, et ils te donneront deux pains, que tu recevras de leur main» (1 Sam 10.3-4). Samuel révèle aussi le lieu de la troisième rencontre (à l’entrée de «Guibea-Élohim, où se trouve une garnison de Philistins»), ainsi que l’identité, l’activité et l’environnement du troisième groupe («Tu rencontreras une troupe de prophètes descendant du haut lieu, précédés du luth, du tambourin, de la flûte et de la harpe, et prophétisant eux-mêmes» (1 Sam 10.5). En dernier lieu, Samuel annonce la rencontre avec l’Esprit de l’Éternel qui suivra immédiatement et transformera Saül («L’Esprit de l’Éternel te saisira, tu prophétiseras avec eux, et tu seras changé en un autre homme» (1 Sam 10.6).

Tous ces signes se réalisent le jour même, exactement de la manière décrite (1 Sam 10.9). Mieux qu’à aucun autre moment de son ministère, Samuel témoigne dans ce récit d’une connaissance parfaite. Il est d’ail-leurs appelé quatre fois «le voyant» (1 Sam 9.9, 11, 18, 19), un terme rarement utilisé dans l’Écriture pour désigner un prophète. En dehors de 1-2 Chroniques, qui utilise l’expression neuf fois, seul le prophète Gad est désigné une fois de «voyant » (2 Sam 24.11).

Saül, un aveugle qui trouve la vue

Saül offre un contraste total avec Samuel, en particulier dans la première partie du récit. La différence entre Samuel et Saül est à l’image du jour et la nuit. Samuel voit tout et sait tout, alors que Saül ne voit rien et ne sait rien.

Saül cherche en vain les ânesses. Il se donne pourtant beaucoup de peine et parcourt plusieurs régions que le narrateur prend soin de nommer (« Saül passa par la montagne d’Ephraïm et traversa le pays de Schalischa, sans les trouver; ils passèrent par le pays de Schaalim, et elles n’y étaient pas; ils parcoururent le pays de Benjamin, et ils ne les trouvèrent pas» (1 Sam 9.4). Cette recherche stérile contient même une note d’ironie quand on sait que Saül est le plus grand des Israélites, «les dépassant tous de la tête » (1 Sam 9.2). Saül n’est pas Zachée et n’a pas besoin de grimper sur un arbre pour voir. Sa stature lui donne en permanence une vue panoramique, mais malgré cet atout, Saül ne voit rien.

Sur le plan spirituel, Saül témoigne aussi d’une cécité profonde. Avant de rencontrer Samuel, il ignore tout du prophète. C’est le serviteur qui doit informer Saül de l’existence et du ministère de Samuel (« Le serviteur lui dit : Voici, il y a dans cette ville un homme de Dieu, et c’est un homme considéré; tout ce qu’il dit ne manque pas d’arriver. Allons-y donc; peutêtre nous fera-t-il connaître le chemin que nous devons prendre» 1 Sam 9.6). Lorsque Saül est en face de Samuel, il ne le reconnaît pas puisqu’il lui demande de le guider auprès du prophète («Saül s’approcha de Samuel au milieu de la porte, et dit: Indique-moi, je te prie, où est la maison du voyant » 1 Sam 9.18). Saül n’a donc jamais vu Samuel et ne semble jamais avoir entendu parler de lui, ce qui étonne, car l’homme était célèbre. Il était juge, prophète et sacrificateur tout à la fois depuis de nombreuses années.2 On ne peut même pas invoquer l’éloignement géographique pour expliquer l’ignorance de Saül, car Guibéa, sa ville natale, n’est éloignée que de cinq kilomètres de Rama, la ville de Samuel. En effet, après s’être éloignés d’une vingtaine de kilomètres au nord-est, Saül et son serviteur étaient revenus partiellement sur leurs pas.

Saül témoigne aussi d’une ignorance de la grâce dans le domaine spirituel. Il pense que les services divins s’achètent puisqu’il estime ne pas pouvoir consulter le prophète sans avoir quelque bien à lui offrir : « Saül dit à son serviteur : Mais si nous y allons, que porterons-nous à l’homme de Dieu? Car il n’y a plus de provisions dans nos sacs, et nous n’avons aucun présent à offrir à l’homme de Dieu. Qu’est-ce que nous avons? » (1 Sam 9.7). Quand Samuel lui annonce que Dieu l’a choisi pour roi, Saül s’estime humainement trop pauvre pour pouvoir accéder à une telle position (« Ne suis-je pas Benjamite, de l’une des plus petites tribus d’Israël ? Et ma famille n’estelle pas la moindre de toutes les familles de la tribu de Benjamin? Pourquoi donc me parles-tu de la sorte ?» 1 Sam 9.21).

Saül ne voit rien, ne discerne rien et ne comprend rien. Sa rencontre avec Samuel va pourtant le transformer, en tout cas temporairement. En effet dès qu’il quitte le prophète, Saül est au bénéfice d’une avalanche de signes. Notons qu’il est le seul à voir ces révélations divines. En effet, le serviteur est écarté avant l’onction de Saül et l’annonce détaillée des prochains événements (1 Sam 9.27). Les rencontres particulières qui attendent Saül n’auront donc aucun sens pour celui qui ignore tout des prophéties. Saül est le seul à connaître les projets de Dieu et à voir son intervention. A son retour, il se garde d’ailleurs d’en parler à son oncle (1 Sam 10.16), ne dévoilant que les éléments connus du serviteur («Saül répondit à son oncle: Il nous a assuré que les ânesses étaient retrouvées. Et il ne lui dit rien de la royauté dont avait parlé Samuel » 1 Sam 10.16).

Par la suite, Dieu confirme son choix devant le peuple (1 Sam 10.17- 27), mais il le fait discrètement au travers du sort. Aucun miracle ou signe irréfutable n’est donné au peuple en confirmation du choix, ce qui explique le scepticisme de certains individus («Il y eut toutefois des vauriens, qui disaient: Quoi ! C’est celui-ci qui nous sauvera! Et ils le méprisèrent, et ne lui apportèrent aucun présent. Mais Saül n’y prit point garde » 1 Sam 10.27).

Le récit de l’onction privée se termine par l’affirmation étonnante que l’Esprit de Dieu s’empare de Saül et qu’il prophétise au milieu des prophètes (1 Sam 10.10). La chose est tellement étonnante qu’elle a donné naissance à un proverbe: « Saül est-il aussi parmi les prophètes?» (1 Sam 10.11-12; cf. 1 Sam 19.24). Le lecteur familier avec l’histoire de Saül partage cet étonnement, car le roi témoigne, par la suite, d’un cour non régénéré. Quelle a été la profondeur de l’expérience de Saül ? Comment comprendre l’affirmation «Dieu lui donna un autre cour» (1 Sam 10.9)? Manifestement, il ne s’agit pas d’une conversion radicale, mais d’une orientation passagère. Pour la première fois de sa vie, Saül dit de bonnes choses sur Dieu. L’accomplissement des prophéties le pousse à reconnaître la grandeur de Dieu et la fiabilité de sa Parole, à l’image d’un Nébucadnetsar qui devant le miracle de la fournaise ardente ne peut que rendre gloire à Dieu (Dan 3.28). Saül prophétise du fait qu’il déclare des choses correctes sur la personne de Dieu. Saül, l’aveugle, finit par voir, car Dieu s’est révélé à lui de manière irréfutable.

Les leçons spirituelles du texte

Trois enseignements se dégagent de ce récit centré sur la cécité et la vue. Pour commencer, Dieu appelle un homme représentatif du peuple. La cécité de Saül (au moment de son appel) fait penser à la cécité du peuple. Saül ne voit rien, tout comme le peuple est aveugle. La demande d’un roi est l’expression d’un égarement profond. Comment peut-on préférer la direction d’un homme à la direction divine? De même que Saül ne reconnaît pas Samuel, alors qu’il est en face de lui, de même le peuple ne reconnaît pas les bienfaits divins, alors qu’il a expérimenté pendant trois siècles la fidélité de l’Éternel.

Deuxièmement, Dieu donne à Saül tout ce dont il a besoin pour une vie sanctifiée, à savoir une claire révélation de sa personne et de ses desseins. Dieu démontre à Saül que sa Parole est digne de confiance et qu’elle s’accomplit à la lettre. Ainsi, Saül se retrouve dans une position identique à Israël dans le passé, puisque la nation a, elle aussi, bénéficié d’une révélation irréfutable.

Troisièmement, la vie ultérieure de Saül montre que la révélation divine ne suffit pas à transformer fondamentalement les cours. Saül est un homme religieux, tout comme Israël est un peuple religieux. Dans les deux cas, la révélation divine n’a pas opéré la régénération attendue.

En conclusion, Dieu donne au peuple le roi qu’il demande. Puisque le peuple aspire à être comme les autres nations, Dieu leur donne un roi qui leur ressemble. Ils reçoivent le roi qu’ils méritent : un roi ingrat qui oublie bien vite tous les bienfaits reçus. Ainsi, David se verra persécuté injustement par Saül, malgré les nombreux services rendus au roi. L’auteur de 1-2 Samuel ne relate qu’une action positive de Saül envers son peuple (la libération de Yabéch: 1 Sam 11.1-13), alors qu’il consacre 16 chapitres aux exploits d’autres hommes (Jonathan et David) et aux oppressions de Saül (1 Sam 16-31).

Dieu juge donc son peuple en leur donnant pour roi Saül. Pourtant, Dieu n’en reste pas là. Dans la suite de l’histoire d’Israël, le jugement fait place à la grâce. Le deuxième roi choisi par Dieu est d’un autre genre. David est un homme selon le cour de Dieu, un homme au cour droit. Ses actes de bravoures sont nombreux et David finira par libérer définitivement son peuple des Philistins, leurs plus tenaces ennemis. Certes David n’est pas parfait, mais derrière lui se profile le Messie, descendant de David, qui par le sacrifice de sa vie apportera la rédemption au monde entier. La grâce de Dieu non seulement finit par triompher, mais elle dépasse en grandeur et en profondeur tout ce que l’homme aurait pu imaginer.

D.A.

Notes :
1 Les conséquences pour Israël de la royauté ont été exposées dans le précédent numéro de Promesses: «L’instauration de la royauté en Israël».
2 Notons en passant que Samuel n’attire pas les regards par son apparence, ses habits ne le distinguant pas comme prophète, juge ou sacrificateur, alors que Saül attirait les regards tant par sa stature que sa beauté physique (1 Sam 9.2).

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En présentant le premier numero de PROMESSES

à nos frères en la foi, nous pensons bien faire d’exposer les principes qui seront à la base de ce «Cahier d’études bibliques».

Nous chercherons à être utiles à tous, à l’église de Dieu d’abord, c’est-à-dire au Chef de l’église, Christ, mais aussi à ceux pour qui la Parole est précieuse, à ceux qui désirent étudier et obéir.

Les bulletins, feuilles de renseignements, journaux mensuels ou trimestriels foisonnent. Tous, ou presque, apportent des nouvelles missionnaires ou d’évangélisation. Ce qu’on recherche ici est beaucoup plus un cahier comportant exclusivement des études bibliques ou se rapportant spécifiquement à la Parole.

La plupart des assemblées de «frères» issues du mouvement datant des années 20-30 du siècle écoulé semblent vivre au ralenti, l’esprit missionnaire mis à part. Comme dans tout mouvement, certaines vérités ont été poussées en «épingle», d’autres ont été négligées; des intérêts particuliers ont pris le pas sur les valeurs spirituelles. Nous assistons à un rétrécissement sérieux de l’influence, de l’action que devraient avoir des églises de foi, c’est-à-dire formées d’enfants de Dieu véritables, scellés par l’Esprit de Dieu.

En toute humilité, nous désirons demander au Seigneur sa lumière, afin de marcher selon sa grâce, en fidélité, devant sa face. Nous ne saurions prétendre connaître tout ce que Dieu veut pour les siens et son église, mais notre désir est d’apporter ce qui, aujourd’hui, est utile pour l’édification et la consolation de nombreux enfants de Dieu. Précisons que nous ne voudrions pas représenter un point de vue particulier, mais étudier la Parole, en respectant la sainteté de Dieu.

Chaque étude signée restera sous la responsabilité de son auteur. L’enseignement de ces pages semble devoir être d’une étendue qui surprendra peut-être. Notre désir est, à la fois, de présenter des études fouillées pour le chrétien avancé, mais aussi des explications de termes, de langage, pour ceux qui ne connaissent pas notre langue d’une manière approfondie.

A titre d’essai, nous ferons parvenir un certain nombre d’exemplaires au monde francophone d’outre-mer. Il faudra ainsi tenir compte de ce champ de diffusion.

De divers côtés, sinon dans nos vieux pays, on demande, en effet, une littérature chrétienne plus abondante, basée sur la Bible, la Parole de Dieu. Quelques-uns d’entre nous ont cru devoir répondre à ce désir. Nous plaçons ces cahiers sous le regard du «Chef», demandant à Dieu sa bénédiction pour rendre témoignage à la Vérité.

Les éditeurs

Où nous mène la formidable évolution qui soulève le monde chrétien tout entier? En cette période d’après le Concile du Vatican Il, il est utile de dresser un bilan des faits, même provisoire, et de procéder à un tour d’horizon général.

Eléments positifs de l’évolution catholique: Incontestablement, des mouvements intéressants se font sentir dans l’Eglise romaine: étude et diffusion de la Bible en voie de développement, dialogue engagé avec les autres confessions, reconnaissance du fait que les communautés des «frères séparés» protestants peuvent porter le titre d’églises, admission d’une part de responsabilité dans la rupture du XVIe siècle. Au cours du Concile du Vatican Il, l’opinion a été exprimée à maintes reprises que l’Eglise catholique avait besoin d’un renouveau si elle voulait réellement entreprendre le dialogue avec les églises non-romaines. Il y eut des discussions très libres, suivies de votes positifs impressionnants, par exemple sur la collégialité des évêques gouvernant l’Eglise avec le pape, l’usage de la langue vulgaire dans le culte, l’oecuménisme, la liberté religieuse, la limitation des naissances, le peuple juif, l’Ecriture Sainte et la Tradition, etc.

Fin décevante de Vatican Il: Rappelons quelques faits justifiant cette impression de l’ensemble des observateurs non catholiques.

La collégialité des évêques doit être entendue de telle manière que la primauté du pape demeure intacte. La structure monarchique de l’Eglise romaine n’en sera pas affectée, le pape reste le souverain absolu. Le collège épiscopal n’a aucune autorité sans ce dernier. Paul VI, dans son discours d’ouverture à la troisième session, ne s’en est pas référé moins de sept fois à sa primauté, et le mot-clé qu’il a constamment utilisé était celui de «hiérarchie sacrée». Le pasteur G. Richard-Molard estime qu’un tel discours «ne peut guère qu’hérisser la plupart des chrétiens non catholiques romains» («Messager Social», 10 déc.; S. CE- P. I., 1er oct.; 24 sept. 1964).

Il est clair, selon le même pasteur, «que l’Eglise catholique est toujours placée sous l’unique pouvoir de l’Eglise romaine. Or, il ne s’agit pas là d’une découverte de La Palice, mais d’une situation, chaque jour plus insupportable pour les catholiques eux-mêmes. Cette direction totalitaire italienne, ou pire encore, romanisée, possède encore tous les leviers de commande» («Christianisme au XXe siècle», 29 oct. 1964). Cela n’empêche pas qu’une seconde force «se manifeste par l’esprit nouveau qui anime une partie toujours plus large du catholicisme non italien. Il ne faut pas s’imaginer que cet esprit ait changé en quoi que ce soit la masse, mais il passe sur quelques centaines d’évêques, sur de nombreux prêtres et sur une élite de laïcs» (ibid.).

La Vierge Marie a été proclamée Mère de l’Eglise, sans l’avis des pères conciliaires, par Paul VI, qui lui a consacré la moitié de son discours de clôture {cf. «Chrétien Evangélique», déc. 1964, p. 5). Cette proclamation «a détruit tous les efforts des pères conciliaires qui. .. s’étaient ingéniés à éviter autant que possible les déclarations de nature à. ..donner de l’extension au dogme marial et à choquer les protestants» {«Christ U. Welt», cité par S. CE. P. I., 3 déc. 1964).

Le 11 octobre 1963, le pape a terminé une allocution aux pères du Concile et aux fidèles par cette prière à la Sainte Vierge: «O Marie, nous vous prions pour nos frères encore séparés de notre famille catholique. Voyez comment, parmi eux, une phalange glorieuse célèbre votre culte avec fidélité et amour. Voyez comment parmi d’autres, si résolus à se dire chrétiens, commence à renaître aujourd’hui votre souvenir et votre culte, ô Vierge très bonne. Appelez avec nous tous ces fils, qui sont vôtres, à la même unité sous votre protection maternelle et céleste» («Documentation Catholique», 3 novembre 1963).

Le cardinal Doepfner, de Munich, dont les interventions au Concile ont été souvent remarquées, vient de déclarer à son tour: «Amoindrir dans l’Eglise le culte de la Vierge Marie serait un malentendu et une mauvaise interprétation des enseignements du Concile. ..Nous voulons approfondir et enraciner encore plus fort dans ce mystère du Christ le riche héritage laissé à l’Eglise par la Vierge Marie. Elle a un grand rôle à jouer dans l’Eglise, qui voit en elle son image originelle» {«Figaro», 28 déc. 1964).

Le dogme romain: Dans son livre récent sur l’Unité, le cardinal Béa répète des dizaines de fois: 1°) que l’enseignement romain, étant infaillible, ne saurait subir dans son essence aucune modification; 2°) que l’Eglise catholique étant la seule vraie Eglise du Christ, l’unité finale ne peut être envisagée que par le retour de tous les baptisés orthodoxes et protestants au bercail du successeur de saint Pierre. Ce caractère intangible du dogme catholique n’a cessé d’être proclamé clairement par Jean XXIII, Paul VI et tous les porte-parole de Rome. Le professeur E. Schlink, observateur de l’Eglise Evangélique d’Allemagne à Vatican Il, après avoir noté que les délibérations conciliaires sont « révolutionnaires» pour l’Eglise romaine, ajoute: «Aucune des resolutions jusqu’ici adoptées n’a «rapporté, modifié ou même réinterprété de manière satisfaisante un seul des dogmes qui divisent la chrétienté » (S. CE. P. I., 17 déc.1964).

Cela n’a pas empêché le professeur de théologie protestant O. Cullmann de déclarer que Vatican Il «n’a fermé aucune porte ». Dans une interview accordée au journal «Le Monde », M. Cullmann reconnaît que les textes élaborés au Concile sont décevants, car la plupart sont des textes de compromis. Le Concile actuel est lié par celui du Vatican I (en 1870, où fut proclamée l’infallibilité pontificale), et par les dogmes mariaux antérieurs, inchangeables eux aussi. Mais il ajoute: «Je ne partage pas le pessimisme de certains qui s’exprime dans ce slogan: «II ne sortira rien de ce Concile! » Tous les textes sont formulés de telle sorte qu’aucune porte n’est fermée, et qu’ils ne seront pas un obstacle à la future discussion entre catholiques ni au dialogue avec les non-catholiques, comme le sont les décisions des Conciles antérieurs » (cité par «Vie Protestante », 23 oct. 1964). -Puisque les dogmes romains sont infaillibles (voir les anathèmes du Concile de Trente), on se demande sur quoi porte la discussion. ..Si la porte n’est pas fermée, elle ne l’est qu’à sens unique et ne nous paraît conduire qu’au bercail de saint Pierre.

(à suivre)
Extrait avec autorisation du périodique «Le Chrétien évangélique »

(2 Tim.1, 7-9)

«Dieu ne nous a pas donné un esprit de timidité, mais de force, d’amour e! de prudence.»

Timide = qui manque de hardiesse et d’assurance, dit le dictionnaire. Dieu, en vue du but qu’il s’est proposé, nous a adressé une «VOCATION SAINTE», et pour cette vocation, il nous revêt:

de force – par quoi nous devons comprendre force de caractère, maîtrise de soi, tranquillité d’esprit, toutes choses qui sont contraires à la timidité. Une stabilité nouvelle, créée par le Saint-Esprit de Dieu qui nous donne l’assurance du salut; un contrôle de soi-même qui peut ne pas être naturel, mais qui est le résultat du travail de cet Esprit.

d’amour – de compréhension, de compassion, de pardon, amour qui n’est pas mollesse, ni faiblesse, mais qui prend part aux malheurs du prochain, qui comprend le pécheur et repousse le péché.

de prudence – mieux encore discipline personnelle, d’intelligence avertie, de jugement balancé, nuancé, sans laisser-aller.

Etes-vous craintif de nature, manquez-vous d’assurance, avez-vous ce qu’on appelle un complexe d’infériorité, craignez-vous de vous affirmer? Lisez les lettres à Timothée. C’était un timide de nature, et l’apôtre l’encouragea. Notez ceci: Dieu DONNE UN AUTRE ESPRIT que celui que vous aviez précédemment. Il donne gratuitement. Alors, demandez, priez. Il vous DONNERA.

Le but de nos études est de faire connaître et comprendre (Ps. 82, 5) les pensées de Dieu révélées dans sa Parole, afin de vivre dans la lumière. Dans un monde où Satan règne pour obscurcir la vérité, voire même la cacher, il importe que le juste – sauvé par la foi en Jésus-Christ – connaisse «les fondements» de la vérité divine.

Les lignes suivantes ne veulent être qu’un canevas de «la saine doctrine», telle que la Parole de Dieu nous la montre. Cet enseignement est à la fois christologique (Matth. 7, 28; 1 Cor. 2, 1-2) et apostolique (Act. 2, 42) ; il comprend l’ensemble des vérités divines.

I L’INSPIRATION VERBALE DE LA BIBLE

La pierre de touche de tout ce qui suit est la doctrine de l’inspiration des Ecritures. «Toute Ecriture est inspirée de Dieu» (2 Tim. 3, 16). Nous possédons aujourd’hui suffisamment de preuves, devant lesquelles tout homme sincère doit s’incliner. La Bible est la révélation de Dieu à l’égard de l’homme. Ce n’est pas un livre ecclésiastique quelconque, ni un ouvrage symbolique ou philosophique. C’est simplement «la Parole de Dieu» qui ne se laisse pas discuter. Des hommes de Dieu, poussés par l’Esprit, rédigèrent les 66 livres de cette divine Bibliothèque (2 Pi. 1, 21 ). Tout en gardant leur caractère et leur personnalité, ils furent de simples véhicules utilisés pour transmettre intégralement les pensées divines. C’est un miracle et un miracle ne s’explique pas. On peut l’accepter ou le rejeter; mais le fait est là.

Il LA TRINITÉ DE DIEU

Il en est de ce terme comme d’autres: la doctrine de la trinité de Dieu se trouve clairement révélée dans la Bible, bien que cette expression n’y soit pas mentionnée. Lucien déjà, rhéteur et philosophe grec du 2me siècle, fait confesser le chrétien dans son «Philopatris»: «le Dieu exalté …Fils du Père, Esprit procédant du Père, l’Un d’entre les Trois et Trois d’entre Un.» Le terme même fut employé formellement pour la première fois lors du synode en 317 à Alexandrie.

Cela ne signifie rien d’autres que tri-unité. La déité est une trinité, une unité qui possède 3 personnes distinctes ayant la même vie et la même essence.

L’ANCIEN TESTAMENT

Nous y voyons une révélation progressive qui trouve sa complète manifestation dans le Nouveau Testament. Des allusions claires et sans équivoques devaient ouvrir les yeux des personnes pieuses du temps du Seigneur.

Gen. 1,1: «Au commencement Dieu.» Ce terme «ELOHIM» est au pluriel et Moïse l’emploie quelque 500 fois. A remarquer qu’à chaque reprise le verbe qui l’accompagne est au singulier, ce qui prouve bien l’unité dans la pluralité des Personnes de la Déité.
Gen. 1,26: «Et Dieu dit: Faisons l’homme selon notre ressemblance»
Gen. 3, 22: «Voici l’homme est devenu comme l’un de nous»
Es. 48, 16: «Le Seigneur l’Eternel» – Dieu le Père
«m’a envoyé» – Dieu le Fils
«et son Esprit» -Dieu le Saint-Esprit
Zach. 12, 10: «Et je répandrai» -Dieu le Père
«un esprit de grâce» – Dieu le Saint-Esprit
«ils se lamenteront sur lui» -Dieu le Fils

LE NOUVEAU TESTAMENT

Il dévoile clairement cette vérité et nous confirme que la déité se compose de 3 Personnes: Dieu le Père, Dieu le Fils et Dieu le Saint- Esprit (Matth. 28, 19; Jean 1:1; Jean 5:3-4; Jean 8:54).

La trinité de Dieu est déjà engagée lors du baptême du Seigneur (Matth. 3, 13-17). On ne peut, à ce sujet, s’exprimer plus clairement que le Seigneur le faisait dans Jean 14:16-26: «Mais le Consolateur, l’Esprit-Saint (3ème Personne) que le Père (1ère Personne) enverra en mon nom (2ème Personne).»

La grande bénédiction apostolique nous laisse «la grâce du Seigneur Jésus-Christ», «l’amour de Dieu» et «la communion du Saint-Esprit» (2 Cor. 13, 13).

D’ailleurs, l’homme lui-même est une trinité composée de l’esprit, de l’âme et du corps. Il est attaqué par une autre trinité: le monde autour de lui, la chair en lui, et le diable au-dessous de lui. La loi du péché en lui est également représentée par une trinité:la convoitise de la chair, la convoitise des yeux et l’orgueil de la vie. Et, enfin, il peut être sauvé par la trinité divine: Dieu le Père, Dieu le Fils et Dieu le Saint-Esprit.

III JÉSUS-CHRIST

1. Sa Divinité

Jean 1, 1-3 suffirait pour établir cette vérité bénie:
Au commencement était la Parole» (le Verbe dans son existence éternelle)
cet la Parole était auprès de Dieu» (le Verbe dans son existence personnelle)
et la Parole était Dieu» (le Verbe dans son essence divine)

2. Son incarnation

Il est «Dieu manifesté en chair» (1 Tim. 3, 16). Ce mystère, dans lequel même les anges désirent plonger leurs regards, nous a été révélé. Les 7 degrés de son abnégation nous sont donnés en Phil. 2, 7-9. Aucune difficulté n’est inconnue du Seigneur qui a été tenté comme nous; Il peut donc nous accorder miséricorde et secours au moment opportun (Hébr. 4, 15-16). Ami qui souffres, confie-toi en Lui, car son nom est «Merveilleux».

3. Son CEuvre rédemptrice

Rom. 4, 25 dit: «Jésus, notre Sauveur, lequel a été livré pour nos fautes et a été ressuscité pour notre justification».
L’Ancien Testament y fait continuellement allusion (Ex. 12, Ps.22, Es.53).
Les Evangiles en sont la réalisation
Les Actes le proclament
Les Epîtres l’expliquent
L’Apocalypse, enfin, décrit la destruction de ceux qui ont rejeté cette oeuvre.

(à suivre)