L’éthique du royaume

Le « royaume/règne de Dieu » annoncé par Jésus est une réalité nouvelle, inaugurée en sa personne, par sa venue, dans l’histoire des hommes. Elle est déjà à l’œuvre partout où se manifeste l’action de Dieu et où s’accomplit sa volonté. Elle débouchera sur le règne universel et pleinement visible de Dieu sur toute chose, dans une création renouvelée. Mais ce règne de Dieu doit se manifester, aussi, par des vies transformées, vécues selon la volonté de Dieu. Prier « Que ton règne vienne » implique aussi, pour chacun, de se soumettre à la volonté de Dieu dans sa manière de vivre.

L’éthique, c’est l’ensemble des règles et des principes moraux qui déterminent la conduite. C’est ce qui donne les orientations d’une vie. C’est aussi le critère qui les juge, qui les évalue. Nous sommes appelés à faire nôtres ces normes éthiques, mais nous n’en disposons pas à notre guise. D’une certaine façon, elles s’imposent à nous : imaginons ce que serait la vie si chacun déterminait lui-même, à son envie, ce qui est bien et ce qui est mal !

Dans la perspective biblique, le fondement de l’éthique, c’est que Dieu est le Créateur, le Seigneur et la source de tout bien. Nous sommes appelés à vivre selon sa volonté, à respecter ses commandements. L’éthique chrétienne est donc, d’abord, une éthique de la volonté de Dieu.

D’autres conceptions de l’éthique ont d’autres priorités : il existe des éthiques du Bien vers lequel on tend et auquel on veut s’assimiler ; du Bonheur à atteindre ; de la Vie à promouvoir ; de l’Utilité à rechercher. L’éthique chrétienne intègre ces éléments, mais de façon dérivée. Son premier souci, c’est de faire ce que Dieu veut, et de lui exprimer ainsi notre amour, notre respect, notre reconnaissance. Nous savons, aussi, que la volonté de Dieu est orientée vers notre bien, qu’elle est l’expression de son amour, de sa sagesse, qu’elle vise ce qui est le mieux pour nous, qu’elle veut nous conduire sur les chemins du bonheur véritable. On retrouve donc les thèmes évoqués. Mais le souci premier, la norme fondamentale, c’est le respect de la volonté de Dieu, et le désir de s’y conformer.

On voit, ici, un lien avec le thème du « royaume de Dieu » : l’éthique est une manière de manifester que nous voulons, concrètement, que le Seigneur « règne » sur notre vie. C’est une façon de nous insérer dans l’œuvre que Dieu fait, dans les plans qu’il met en œuvre pour l’humanité, dans ce qu’il a inauguré et qu’il achèvera.

1. Les formes et les lieux

Les Évangiles ne sont pas construits comme des manuels d’éthique. Ils nous rapportent la vie et l’enseignement de Jésus, au sens le plus large. Les textes sur l’éthique se trouvent donc en plusieurs endroits.

Le texte fondateur de l’enseignement éthique de Jésus est, incontestablement, le « Sermon sur la Montagne » qui, en trois chapitres (Mt 5-7), en condense les principes.

La nouvelle « loi » du royaume de Dieu est enseignée par Jésus à ceux qui sont ses « disciples » (5.2). Il ne s’agit pas d’une éthique universelle, pour tous les hommes, mais d’une éthique pour ceux qui veulent suivre Jésus, et vivre selon la charte du royaume inauguré par Jésus.

Si le Sermon sur la Montagne est le « cœur » de l’enseignement éthique de Jésus, plusieurs enseignements éthiques sont donnés en d’autres circonstances en réponse à des questions, ou à des situations : « Quel est le plus grand commandement de la loi ? » ; « Est-il permis à un homme de répudier sa femme pour un motif quelconque ? » Jésus développe alors un enseignement en réponse à la question précise qui lui est adressée.

Certains enseignements éthiques sont aussi donnés dans le cadre de controverses. Jésus y trouve occasion à fustiger la « tradition des anciens » ajoutée à l’Écriture (Mat 15) ou l’hypocrisie religieuse (Mat 23).

Quant à la forme, Jésus développe son enseignement éthique en des formules ramassées, souvent bien travaillées. Il ne se limite pas à enseigner des principes : il veille à donner des exemples, des illustrations, des cas-types, des applications. Il n’hésite pas à inventer des formules frappantes, qu’on retient. Il manie avec art l’hyperbole, cet art de l’exagération calculée pour produire un effet sur l’auditeur (comme « arracher son œil » s’il est occasion de chute, 5.30). Il emploie aussi parfois un langage symbolique, une façon de s’exprimer appréciée en Orient.

2. L’éthique de Jésus et le royaume de Dieu

Quel lien établir entre l’éthique de Jésus et le reste de son enseignement, en particulier de son enseignement sur le royaume de Dieu ?

Admirations sélectives

Plusieurs admirent sans borne l’éthique de Jésus, mais rejettent le reste de sa théologie comme un certain nombre d’auteurs juifs, ou des théologiens libéraux. Chanter la beauté de l’éthique de Jésus peut avoir un côté ambigu. Si l’on valorise un côté pour en dévaloriser un autre, on traite Jésus et son enseignement comme si l’on pouvait disposer d’eux à sa guise. On risque fort, en agissant ainsi, de faire de l’enseignement de Jésus autre chose que ce que lui-même entendait. Il faut considérer l’enseignement éthique de Jésus à l’intérieur du cadre qu’il a lui-même donné.

Éthique et royaume

Il est assez clair, quand on lit le Sermon sur la Montagne, que l’éthique de Jésus est bel et bien liée au royaume de Dieu, comme en témoignent les nombreuses références au royaume tout au cours du Sermon (Mat 5.3,19,20 ; 6.33 ; 7.21)

Ce lien a été compris de plusieurs façons différentes, qui chacune a une incidence sur la façon dont on s’approprie l’éthique de Jésus.

Une éthique de l’intérim

Certains ont pensé que, pour Jésus, le royaume de Dieu allait venir très vite. Il faut revenir à Dieu, et manifester une attitude de renouvellement moral radical. L’éthique de Jésus serait donc une éthique de l’urgence, qui expliquerait le regard assez négatif sur l’attachement à la famille, à la richesse ou le peu d’intérêt pour les questions sociales : on est dans l’intérim. C’est aussi ce qui expliquerait son caractère « impossible » à réaliser : son but est de faire revenir sur soi-même et d’inviter à une position radicale en face de l’imminence. Cette position a été défendue par Albert Schweitzer.

Mais, à aucun moment, dans le Sermon sur la montagne, il n’est question de l’imminence du royaume. Il est donc artificiel de lier les deux thèmes.

Si, par ailleurs, on examine la raison des exigences élevées de l’éthique de Jésus, c’est à Dieu et à ses perfections qu’il faut les rattacher, et non à l’imminence du royaume : « Soyez donc parfaits, comme votre Père céleste est parfait. » (Mat 5.48) De même, ce n’est pas parce que le temps est proche qu’il faut aimer même nos ennemis ; c’est « afin d’être fils de notre Père » qui est dans les cieux (Mat 5.43).

Une perspective future

D’autres adoptent une position inverse, et disent que l’enseignement éthique concerne le royaume futur. Nous n’y sommes pas encore : l’éthique de Jésus n’est donc pas pour nous. C’est la loi qui prévaudra dans le royaume à venir. Pour certains, le Sermon sur la Montagne est la règle de ce royaume, qui concerne Israël, et qui est reporté après le retour de Jésus. Mais une vision purement future du royaume peut conduire à nous priver aujourd’hui de cet enseignement éthique de Jésus.

Pour répondre à cette vision des choses, on rappellera que Jésus s’adressait prioritairement à ses disciples (Mat 5.1-2) : cela concerne donc la vie d’aujourd’hui. Et bien des situations évoquées dans le Sermon sur la montagne renvoient à une situation où le mal (adultère, vengeance, etc.) est encore bien présent, et non pas à un royaume solidement établi.

La conception dynamique du royaume

Cette conception dit que Jésus a inauguré le royaume de Dieu, mais qu’il n’est pas encore pleinement abouti. Nous sommes dans une situation d’entre-deux.

Avec la personne de Jésus, sa venue et son œuvre, une nouvelle réalité est inaugurée. Elle manifeste déjà sa nouveauté : c’est pourquoi Jésus pousse plus loin que la loi de Moïse. Il vient « accomplir » cette loi, en approfondissant ses exigences (Mat 5.17-48).

Mais nous ne sommes pas encore dans le royaume achevé : le royaume de Dieu se fraie un chemin dans le monde mauvais où nous vivons, et l’une des manières dont il doit se manifester, c’est par notre conduite éthique : nous sommes appelés à être, par notre conduite et nos paroles, « lumière du monde » (Mat 5.14-16).

Comment ? En appliquant le Sermon sur la montagne ! Il nous faut vivre, dans le monde présent, selon les normes de Dieu. Il y aura parfois des tensions, des choix, des priorités : mais nous avons à exprimer, par notre conduite, que nous attendons la pleine manifestation du royaume de Dieu, et que c’est cette perspective qui aimante et détermine notre vie. 1

3. L’exigence de justice

Par son annonce du royaume de Dieu, Jésus inaugure une nouvelle phase de l’histoire. Mais il implique aussi une exigence nouvelle en ce qui concerne l’éthique. Il le dit très clairement : « Car, je vous le dis, si votre justice ne surpasse celle des scribes et des pharisiens, vous n’entrerez point dans le royaume des cieux. » (Mat 5.20) Pour comprendre cette parole de Jésus, il faut l’écouter dans son contexte.

Jésus et le temps de l’accomplissement

Jésus se situe par rapport à tout ce qui l’a précédé, « la Loi et les Prophètes » (Mat 5.17). Une nouvelle ère intervient, qui est celle de l’« accomplissement ». En Jésus, par sa présence et dans sa mission, tout l’A.T. a atteint son but. Ce qui était annoncé s’accomplit. Ce que Dieu avait préparé, préfiguré, trouve son aboutissement et sa lumière. Tout (non seulement l’éthique, mais aussi le salut, la relation de Dieu avec l’homme, l’inauguration d’une nouvelle alliance) arrive à son accomplissement. Jésus, en disant cela, anticipe la suite de son œuvre, car c’est avec sa mort et sa résurrection que se manifestera l’accomplissement décisif.

• Du point de vue de la loi, ce qui était de l’ordre de la préfiguration (lois rituelles : cérémonies, sacrifices, etc.) s’efface devant l’accomplissement, tout comme l’ombre qui annonce quelqu’un n’a plus de raison d’être lorsque la personne réelle est là, en pleine lumière.

• Pour ce qui concerne la justice, ceux qui ont « faim et soif de justice » peuvent être déclarés « heureux », car ils seront « rassasiés »… Rassasiés de pardon, de grâce, comme ce pauvre péager de Luc 18.9-14. Cela, Jésus l’a illustré dans tout son ministère, en accueillant celles et ceux qui venaient à lui en reconnaissant leur besoin de Dieu.

• Pour ce qui concerne les moyens de vie, une nouvelle alliance est inaugurée, selon laquelle Dieu promet de nouvelles ressources pour accomplir sa volonté : la loi est « gravée dans le cœur », renouvelé pour pouvoir pratiquer ses lois (Jér 31 ; Éz 36.27).

Cet accomplissement de la loi et des prophètes en Jésus est un grand privilège. Sur la base de ce privilège, Jésus affirme une exigence éthique encore plus grande. Rien de ce que Dieu a demandé ne doit être supprimé, ni édulcoré : la volonté de Dieu exprimée dans ses commandements subsiste, et doit être respectée. Plus encore, il faut aller jusqu’au bout de la justice, avec une exigence encore plus pointue.

Quelle est-elle, cette justice qui « surpasse celle des scribes et des pharisiens » ?

• C’est une justice qui a des ressources que n’ont pas les scribes et les pharisiens, qui sont simplement face à la Loi de Moïse. Les disciples de Jésus, eux, peuvent être mis au bénéfice des ressources qu’apporte le royaume de Dieu, grâce à l’œuvre de Jésus qui « accomplit la loi et les prophètes ».

• Mais c’est aussi une justice qui donne toute sa radicalité au commandement et à la volonté de Dieu, sans essayer de le contourner.

Autrement dit : un privilège et une responsabilité. Il me semble que l’on a là une sorte de clé du Sermon sur la montagne. Jésus va très loin dans les exigences de justice parce qu’il sait que les temps de l’accomplissement sont inaugurés, avec toutes les ressources de grâce, de pardon et de vie nouvelle qu’ils impliquent. La « justice qui surpasse celle des scribes et des pharisiens » est à la fois une justice reçue par le pardon pleinement disponible, et une justice à accomplir grâce aux ressources de vie nouvelle.

Des dépassements demandés

Du coup, Jésus pousse très loin son appel à une vie selon Dieu. À six reprises, il donne une application plus radicale de certains commandements contenus dans la loi de Moïse, et (mal) interprétés par la tradition (Mat 5.21-47). Jésus invite à aller jusqu’au bout du commandement. Cela, on peut le faire, parce que de bonnes bases sont données dans la nouvelle alliance que Jésus est venu inaugurer.

1. Jésus invite à une éthique de la reconnaissance : pourquoi imiter Dieu ? Parce que l’on reconnaît qu’on lui doit tout, qu’il nous a tout donné. En lui nous recevons la vie, le salut. Nous l’aimons parce qu’il nous a aimés le premier (1 Jean 4.19).

2. Jésus nous invite à une éthique relationnelle et motivée : ce que nous faisons, dans les grandes ou dans les petites choses, est appelé à devenir une expression de l’amour pour Dieu (Mat 22.37-39). L’éthique est une forme de la relation entre Dieu et nous : on n’obéit pas à un code, on cherche à plaire à Dieu. Il y a là une source d’élan, de motivation, de joie, de sens. Bien des actes simples peuvent être « transfigurés » par cette motivation.

3. Parce que le vis-à-vis est le Seigneur, Jésus invite à une éthique de la transparence et de la transformation intérieure. Jésus est très sévère avec les pharisiens qui pratiquaient une éthique qui cherchait surtout à préserver les apparences (Mat 23.25-26). Jésus dit ici : il faut aller au fond des choses, ne pas se contenter de la superficialité. Et cela, c’est le fruit d’une éthique relationnelle, où l’on se place constamment devant Dieu et sous son regard. Cela demande aussi un travail sur nos motivations, une purification, une transformation. Mais le but est de conduire à une cohérence plus grande : c’est de l’intérieur que tout doit se construire, pour aller ensuite vers l’extérieur.

4. Parce qu’elle se situe dans la relation avec Dieu, l’éthique est soutenue par l’exemple même de Dieu (Mat 5.45). Jésus développe la même perspective dans d’autres domaines. « Combien de fois pardonnerai-je ? », demande Pierre. La réponse de Jésus est, en substance : « Autant de fois que Dieu te pardonne » (Mat 18.21-35). Jésus veut que la relation avec Dieu nous transforme et nous pousse à agir à son image. C’est ce qu’il dit, dans une formule indépassable : « Soyez donc parfaits, comme votre Père céleste est parfait. » (Mat 5.48)

Pour certains, c’est le commandement impossible, l’objectif irréalisable, la parole toujours culpabilisante. C’est se méprendre sur cette parole que d’en faire juste un commandement, juste une exigence. Jésus ne dit pas : « comme Dieu est parfait. » Il parle de « votre Père céleste », décrivant ainsi une relation. Dans cette relation, nous sommes invités à une transformation, constante. Nous recevons du Père force, soutien, encouragement, en même temps que les objectifs. C’est un travail constant, progressif. Jésus dit, en substance : il faut que la relation avec votre Père céleste vous change, vous pousse sans cesse plus loin, et voyez jusqu’où cela va.

L’éthique de Jésus va loin, parce qu’elle combine le modèle et la relation. Jésus nous propose ce qu’il a lui-même vécu (voir Jean 5.19).

4. À la suite du Christ

La grandeur et la particularité de l’éthique de Jésus ne proviennent pas simplement d’une éthique théorique, requise ; celle-ci est aussi pleinement vécue, pleinement incarnée. Quand on regarde la vie de Jésus, quand on médite sur ses attitudes, ses choix, ses priorités, ses réactions, on a un modèle vivant. On peut, constamment, mettre en relation l’enseignement de Jésus et la façon dont il l’a incarné.

Du coup, Jésus lui-même devient source d’inspiration. Il le déclare, lui-même, à la fin de son ministère, juste avant la Croix : « Comme je vous ai aimés, vous aussi, aimez-vous les uns les autres. » (Jean 13.34)

La nouveauté du commandement, c’est le « comme je vous ai aimés ». L’éthique chrétienne est une éthique « à la suite du Christ ». Il nous offre :

– un exemple concret,

– une motivation : on suit le Christ par amour, pour lui faire plaisir, en reconnaissance pour ce qu’il a fait pour nous ; c’est un bonheur de pouvoir le faire, y compris dans des situations exigeantes ;

– un encouragement : on voit, dans la vie de Jésus, le fruit et la fécondité de certaines attitudes, qui sont parfois difficiles à adopter (cf. la valeur du service, de l’amour qui se donne, la confiance accordée, le pardon renouvelé…)

On ne peut pas penser l’éthique de Jésus sans méditer, en même temps, sur la vie de Jésus. Ce sont les deux parties d’un même livre, à lire ensemble. Si le Sermon sur la montagne vous semble irréaliste, méditez, en face, la vie de Jésus (Jean 13.15 ; 1 Pi 2:21).

5. Priorités et récompenses

Une éthique des priorités

L’éthique de Jésus se présente souvent comme une éthique des priorités (Mat 6.33). Il y a des choix clairs à faire, en fonction du royaume de Dieu et de sa justice. Il faut savoir donner priorité au royaume de Dieu, de manière claire, nette. Et cela se manifeste par des choix, concrets. Choix du bien par rapport au mal. Choix de nos attitudes, à l’exemple de Jésus. Mais parfois, aussi, savoir donner priorité au royaume de Dieu par rapport à des choses légitimes.

Jésus en parle par rapport à la famille : Jésus valorise le souci et l’amour des siens (Mat 15.4), mais en même temps, il demande à ce que l’on sache donner priorité au royaume de Dieu, même par rapport aux siens, si cela est nécessaire (Mat 19.29 ; cf. 19.12 ; 16.24-25).

Une éthique de la récompense

Enfin il est frappant que jamais Jésus ne tienne ce langage à sens unique. À chaque fois qu’il parle de priorité à donner, de renoncement à effectuer, ou d’engagement à consentir, il a soin d’ajouter que cela ne sera jamais sans récompense, sans compensation (« toutes choses par dessus », 6.33 ; « le centuple », Mat 19.29).

Pourquoi cet accent ? Est-ce la « carotte » pour nous faire avancer ? Est-ce la négation de la gratuité, du don entier ? En aucune manière ! L’idée de « récompense », voire de « compensation », s’inscrit dans la perspective relationnelle de l’éthique de Jésus. Quelle est la récompense du serviteur qui a bien accompli sa tâche ? C’est d’avoir fait la joie de son maître (Mat 25.21). Dieu nous aime : nous pouvons avoir confiance en cet amour ; s’il nous demande, il nous donnera aussi en retour. Nous ne sommes pas dans un calcul d’intérêt. Nous sommes dans une relation réciproque d’attention et d’amour.

1Le témoignage de l’Église ne parviendra toutefois pas à lui seul à instaurer le Royaume de Dieu « sur la terre comme au ciel ». C’est malheureusement ce qu’enseignent les partisans de la théologie dite « dominationniste » comme C. Peter Wagner ou le « restaurationnisme » (postmillénariste). Ces théories ont un fort retentissement dans certains milieux charismatiques. Nous croyons que le monde actuel est en phase de désagrégation spirituelle et morale (apostasie) et que la pleine manifestation du Royaume de Dieu coïncidera avec le retour visible de Jésus-Christ. (NDLR)

les articles plus lus

En présentant le premier numero de PROMESSES

à nos frères en la foi, nous pensons bien faire d’exposer les principes qui seront à la base de ce «Cahier d’études bibliques».

Nous chercherons à être utiles à tous, à l’église de Dieu d’abord, c’est-à-dire au Chef de l’église, Christ, mais aussi à ceux pour qui la Parole est précieuse, à ceux qui désirent étudier et obéir.

Les bulletins, feuilles de renseignements, journaux mensuels ou trimestriels foisonnent. Tous, ou presque, apportent des nouvelles missionnaires ou d’évangélisation. Ce qu’on recherche ici est beaucoup plus un cahier comportant exclusivement des études bibliques ou se rapportant spécifiquement à la Parole.

La plupart des assemblées de «frères» issues du mouvement datant des années 20-30 du siècle écoulé semblent vivre au ralenti, l’esprit missionnaire mis à part. Comme dans tout mouvement, certaines vérités ont été poussées en «épingle», d’autres ont été négligées; des intérêts particuliers ont pris le pas sur les valeurs spirituelles. Nous assistons à un rétrécissement sérieux de l’influence, de l’action que devraient avoir des églises de foi, c’est-à-dire formées d’enfants de Dieu véritables, scellés par l’Esprit de Dieu.

En toute humilité, nous désirons demander au Seigneur sa lumière, afin de marcher selon sa grâce, en fidélité, devant sa face. Nous ne saurions prétendre connaître tout ce que Dieu veut pour les siens et son église, mais notre désir est d’apporter ce qui, aujourd’hui, est utile pour l’édification et la consolation de nombreux enfants de Dieu. Précisons que nous ne voudrions pas représenter un point de vue particulier, mais étudier la Parole, en respectant la sainteté de Dieu.

Chaque étude signée restera sous la responsabilité de son auteur. L’enseignement de ces pages semble devoir être d’une étendue qui surprendra peut-être. Notre désir est, à la fois, de présenter des études fouillées pour le chrétien avancé, mais aussi des explications de termes, de langage, pour ceux qui ne connaissent pas notre langue d’une manière approfondie.

A titre d’essai, nous ferons parvenir un certain nombre d’exemplaires au monde francophone d’outre-mer. Il faudra ainsi tenir compte de ce champ de diffusion.

De divers côtés, sinon dans nos vieux pays, on demande, en effet, une littérature chrétienne plus abondante, basée sur la Bible, la Parole de Dieu. Quelques-uns d’entre nous ont cru devoir répondre à ce désir. Nous plaçons ces cahiers sous le regard du «Chef», demandant à Dieu sa bénédiction pour rendre témoignage à la Vérité.

Les éditeurs

Écrit par

Où nous mène la formidable évolution qui soulève le monde chrétien tout entier? En cette période d’après le Concile du Vatican Il, il est utile de dresser un bilan des faits, même provisoire, et de procéder à un tour d’horizon général.

Eléments positifs de l’évolution catholique: Incontestablement, des mouvements intéressants se font sentir dans l’Eglise romaine: étude et diffusion de la Bible en voie de développement, dialogue engagé avec les autres confessions, reconnaissance du fait que les communautés des «frères séparés» protestants peuvent porter le titre d’églises, admission d’une part de responsabilité dans la rupture du XVIe siècle. Au cours du Concile du Vatican Il, l’opinion a été exprimée à maintes reprises que l’Eglise catholique avait besoin d’un renouveau si elle voulait réellement entreprendre le dialogue avec les églises non-romaines. Il y eut des discussions très libres, suivies de votes positifs impressionnants, par exemple sur la collégialité des évêques gouvernant l’Eglise avec le pape, l’usage de la langue vulgaire dans le culte, l’oecuménisme, la liberté religieuse, la limitation des naissances, le peuple juif, l’Ecriture Sainte et la Tradition, etc.

Fin décevante de Vatican Il: Rappelons quelques faits justifiant cette impression de l’ensemble des observateurs non catholiques.

La collégialité des évêques doit être entendue de telle manière que la primauté du pape demeure intacte. La structure monarchique de l’Eglise romaine n’en sera pas affectée, le pape reste le souverain absolu. Le collège épiscopal n’a aucune autorité sans ce dernier. Paul VI, dans son discours d’ouverture à la troisième session, ne s’en est pas référé moins de sept fois à sa primauté, et le mot-clé qu’il a constamment utilisé était celui de «hiérarchie sacrée». Le pasteur G. Richard-Molard estime qu’un tel discours «ne peut guère qu’hérisser la plupart des chrétiens non catholiques romains» («Messager Social», 10 déc.; S. CE- P. I., 1er oct.; 24 sept. 1964).

Il est clair, selon le même pasteur, «que l’Eglise catholique est toujours placée sous l’unique pouvoir de l’Eglise romaine. Or, il ne s’agit pas là d’une découverte de La Palice, mais d’une situation, chaque jour plus insupportable pour les catholiques eux-mêmes. Cette direction totalitaire italienne, ou pire encore, romanisée, possède encore tous les leviers de commande» («Christianisme au XXe siècle», 29 oct. 1964). Cela n’empêche pas qu’une seconde force «se manifeste par l’esprit nouveau qui anime une partie toujours plus large du catholicisme non italien. Il ne faut pas s’imaginer que cet esprit ait changé en quoi que ce soit la masse, mais il passe sur quelques centaines d’évêques, sur de nombreux prêtres et sur une élite de laïcs» (ibid.).

La Vierge Marie a été proclamée Mère de l’Eglise, sans l’avis des pères conciliaires, par Paul VI, qui lui a consacré la moitié de son discours de clôture {cf. «Chrétien Evangélique», déc. 1964, p. 5). Cette proclamation «a détruit tous les efforts des pères conciliaires qui. .. s’étaient ingéniés à éviter autant que possible les déclarations de nature à. ..donner de l’extension au dogme marial et à choquer les protestants» {«Christ U. Welt», cité par S. CE. P. I., 3 déc. 1964).

Le 11 octobre 1963, le pape a terminé une allocution aux pères du Concile et aux fidèles par cette prière à la Sainte Vierge: «O Marie, nous vous prions pour nos frères encore séparés de notre famille catholique. Voyez comment, parmi eux, une phalange glorieuse célèbre votre culte avec fidélité et amour. Voyez comment parmi d’autres, si résolus à se dire chrétiens, commence à renaître aujourd’hui votre souvenir et votre culte, ô Vierge très bonne. Appelez avec nous tous ces fils, qui sont vôtres, à la même unité sous votre protection maternelle et céleste» («Documentation Catholique», 3 novembre 1963).

Le cardinal Doepfner, de Munich, dont les interventions au Concile ont été souvent remarquées, vient de déclarer à son tour: «Amoindrir dans l’Eglise le culte de la Vierge Marie serait un malentendu et une mauvaise interprétation des enseignements du Concile. ..Nous voulons approfondir et enraciner encore plus fort dans ce mystère du Christ le riche héritage laissé à l’Eglise par la Vierge Marie. Elle a un grand rôle à jouer dans l’Eglise, qui voit en elle son image originelle» {«Figaro», 28 déc. 1964).

Le dogme romain: Dans son livre récent sur l’Unité, le cardinal Béa répète des dizaines de fois: 1°) que l’enseignement romain, étant infaillible, ne saurait subir dans son essence aucune modification; 2°) que l’Eglise catholique étant la seule vraie Eglise du Christ, l’unité finale ne peut être envisagée que par le retour de tous les baptisés orthodoxes et protestants au bercail du successeur de saint Pierre. Ce caractère intangible du dogme catholique n’a cessé d’être proclamé clairement par Jean XXIII, Paul VI et tous les porte-parole de Rome. Le professeur E. Schlink, observateur de l’Eglise Evangélique d’Allemagne à Vatican Il, après avoir noté que les délibérations conciliaires sont « révolutionnaires» pour l’Eglise romaine, ajoute: «Aucune des resolutions jusqu’ici adoptées n’a «rapporté, modifié ou même réinterprété de manière satisfaisante un seul des dogmes qui divisent la chrétienté » (S. CE. P. I., 17 déc.1964).

Cela n’a pas empêché le professeur de théologie protestant O. Cullmann de déclarer que Vatican Il «n’a fermé aucune porte ». Dans une interview accordée au journal «Le Monde », M. Cullmann reconnaît que les textes élaborés au Concile sont décevants, car la plupart sont des textes de compromis. Le Concile actuel est lié par celui du Vatican I (en 1870, où fut proclamée l’infallibilité pontificale), et par les dogmes mariaux antérieurs, inchangeables eux aussi. Mais il ajoute: «Je ne partage pas le pessimisme de certains qui s’exprime dans ce slogan: «II ne sortira rien de ce Concile! » Tous les textes sont formulés de telle sorte qu’aucune porte n’est fermée, et qu’ils ne seront pas un obstacle à la future discussion entre catholiques ni au dialogue avec les non-catholiques, comme le sont les décisions des Conciles antérieurs » (cité par «Vie Protestante », 23 oct. 1964). -Puisque les dogmes romains sont infaillibles (voir les anathèmes du Concile de Trente), on se demande sur quoi porte la discussion. ..Si la porte n’est pas fermée, elle ne l’est qu’à sens unique et ne nous paraît conduire qu’au bercail de saint Pierre.

(à suivre)
Extrait avec autorisation du périodique «Le Chrétien évangélique »

Écrit par

(2 Tim.1, 7-9)

«Dieu ne nous a pas donné un esprit de timidité, mais de force, d’amour e! de prudence.»

Timide = qui manque de hardiesse et d’assurance, dit le dictionnaire. Dieu, en vue du but qu’il s’est proposé, nous a adressé une «VOCATION SAINTE», et pour cette vocation, il nous revêt:

de force – par quoi nous devons comprendre force de caractère, maîtrise de soi, tranquillité d’esprit, toutes choses qui sont contraires à la timidité. Une stabilité nouvelle, créée par le Saint-Esprit de Dieu qui nous donne l’assurance du salut; un contrôle de soi-même qui peut ne pas être naturel, mais qui est le résultat du travail de cet Esprit.

d’amour – de compréhension, de compassion, de pardon, amour qui n’est pas mollesse, ni faiblesse, mais qui prend part aux malheurs du prochain, qui comprend le pécheur et repousse le péché.

de prudence – mieux encore discipline personnelle, d’intelligence avertie, de jugement balancé, nuancé, sans laisser-aller.

Etes-vous craintif de nature, manquez-vous d’assurance, avez-vous ce qu’on appelle un complexe d’infériorité, craignez-vous de vous affirmer? Lisez les lettres à Timothée. C’était un timide de nature, et l’apôtre l’encouragea. Notez ceci: Dieu DONNE UN AUTRE ESPRIT que celui que vous aviez précédemment. Il donne gratuitement. Alors, demandez, priez. Il vous DONNERA.

Écrit par

Le but de nos études est de faire connaître et comprendre (Ps. 82, 5) les pensées de Dieu révélées dans sa Parole, afin de vivre dans la lumière. Dans un monde où Satan règne pour obscurcir la vérité, voire même la cacher, il importe que le juste – sauvé par la foi en Jésus-Christ – connaisse «les fondements» de la vérité divine.

Les lignes suivantes ne veulent être qu’un canevas de «la saine doctrine», telle que la Parole de Dieu nous la montre. Cet enseignement est à la fois christologique (Matth. 7, 28; 1 Cor. 2, 1-2) et apostolique (Act. 2, 42) ; il comprend l’ensemble des vérités divines.

I L’INSPIRATION VERBALE DE LA BIBLE

La pierre de touche de tout ce qui suit est la doctrine de l’inspiration des Ecritures. «Toute Ecriture est inspirée de Dieu» (2 Tim. 3, 16). Nous possédons aujourd’hui suffisamment de preuves, devant lesquelles tout homme sincère doit s’incliner. La Bible est la révélation de Dieu à l’égard de l’homme. Ce n’est pas un livre ecclésiastique quelconque, ni un ouvrage symbolique ou philosophique. C’est simplement «la Parole de Dieu» qui ne se laisse pas discuter. Des hommes de Dieu, poussés par l’Esprit, rédigèrent les 66 livres de cette divine Bibliothèque (2 Pi. 1, 21 ). Tout en gardant leur caractère et leur personnalité, ils furent de simples véhicules utilisés pour transmettre intégralement les pensées divines. C’est un miracle et un miracle ne s’explique pas. On peut l’accepter ou le rejeter; mais le fait est là.

Il LA TRINITÉ DE DIEU

Il en est de ce terme comme d’autres: la doctrine de la trinité de Dieu se trouve clairement révélée dans la Bible, bien que cette expression n’y soit pas mentionnée. Lucien déjà, rhéteur et philosophe grec du 2me siècle, fait confesser le chrétien dans son «Philopatris»: «le Dieu exalté …Fils du Père, Esprit procédant du Père, l’Un d’entre les Trois et Trois d’entre Un.» Le terme même fut employé formellement pour la première fois lors du synode en 317 à Alexandrie.

Cela ne signifie rien d’autres que tri-unité. La déité est une trinité, une unité qui possède 3 personnes distinctes ayant la même vie et la même essence.

L’ANCIEN TESTAMENT

Nous y voyons une révélation progressive qui trouve sa complète manifestation dans le Nouveau Testament. Des allusions claires et sans équivoques devaient ouvrir les yeux des personnes pieuses du temps du Seigneur.

Gen. 1,1: «Au commencement Dieu.» Ce terme «ELOHIM» est au pluriel et Moïse l’emploie quelque 500 fois. A remarquer qu’à chaque reprise le verbe qui l’accompagne est au singulier, ce qui prouve bien l’unité dans la pluralité des Personnes de la Déité.
Gen. 1,26: «Et Dieu dit: Faisons l’homme selon notre ressemblance»
Gen. 3, 22: «Voici l’homme est devenu comme l’un de nous»
Es. 48, 16: «Le Seigneur l’Eternel» – Dieu le Père
«m’a envoyé» – Dieu le Fils
«et son Esprit» -Dieu le Saint-Esprit
Zach. 12, 10: «Et je répandrai» -Dieu le Père
«un esprit de grâce» – Dieu le Saint-Esprit
«ils se lamenteront sur lui» -Dieu le Fils

LE NOUVEAU TESTAMENT

Il dévoile clairement cette vérité et nous confirme que la déité se compose de 3 Personnes: Dieu le Père, Dieu le Fils et Dieu le Saint- Esprit (Matth. 28, 19; Jean 1:1; Jean 5:3-4; Jean 8:54).

La trinité de Dieu est déjà engagée lors du baptême du Seigneur (Matth. 3, 13-17). On ne peut, à ce sujet, s’exprimer plus clairement que le Seigneur le faisait dans Jean 14:16-26: «Mais le Consolateur, l’Esprit-Saint (3ème Personne) que le Père (1ère Personne) enverra en mon nom (2ème Personne).»

La grande bénédiction apostolique nous laisse «la grâce du Seigneur Jésus-Christ», «l’amour de Dieu» et «la communion du Saint-Esprit» (2 Cor. 13, 13).

D’ailleurs, l’homme lui-même est une trinité composée de l’esprit, de l’âme et du corps. Il est attaqué par une autre trinité: le monde autour de lui, la chair en lui, et le diable au-dessous de lui. La loi du péché en lui est également représentée par une trinité:la convoitise de la chair, la convoitise des yeux et l’orgueil de la vie. Et, enfin, il peut être sauvé par la trinité divine: Dieu le Père, Dieu le Fils et Dieu le Saint-Esprit.

III JÉSUS-CHRIST

1. Sa Divinité

Jean 1, 1-3 suffirait pour établir cette vérité bénie:
Au commencement était la Parole» (le Verbe dans son existence éternelle)
cet la Parole était auprès de Dieu» (le Verbe dans son existence personnelle)
et la Parole était Dieu» (le Verbe dans son essence divine)

2. Son incarnation

Il est «Dieu manifesté en chair» (1 Tim. 3, 16). Ce mystère, dans lequel même les anges désirent plonger leurs regards, nous a été révélé. Les 7 degrés de son abnégation nous sont donnés en Phil. 2, 7-9. Aucune difficulté n’est inconnue du Seigneur qui a été tenté comme nous; Il peut donc nous accorder miséricorde et secours au moment opportun (Hébr. 4, 15-16). Ami qui souffres, confie-toi en Lui, car son nom est «Merveilleux».

3. Son CEuvre rédemptrice

Rom. 4, 25 dit: «Jésus, notre Sauveur, lequel a été livré pour nos fautes et a été ressuscité pour notre justification».
L’Ancien Testament y fait continuellement allusion (Ex. 12, Ps.22, Es.53).
Les Evangiles en sont la réalisation
Les Actes le proclament
Les Epîtres l’expliquent
L’Apocalypse, enfin, décrit la destruction de ceux qui ont rejeté cette oeuvre.

(à suivre)

 

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