Le combat de Francis Schaeffer

Théologien, docteur, pasteur, penseur, conférencier, Schaeffer fut par-dessus tout un lutteur, un homme engagé dans le combat et à la pointe du combat.
Non pas un combat d’école, académique, futile, stérile. Schaeffer ne craignait pas de descendre sur le terrain et d’entrer dans la mêlée, d’être directement aux prises avec les courants de pensée de la société d’aujourd’hui.
Vivant avec son temps, Schaeffer « collait » à la modernité. Aussi n’était-il pas pris au dépourvu, ni dépassé, ni déphasé. Témoin attentif et analyste averti de la culture contemporaine, il en dépistait les formes de pensée, « le message ».
A ce message, il opposait celui de la Bible, dont il célébrait et démontrait la grandeur, l’unicité l’adéquation à la réalité telle qu’elle est.
C’est ce qui explique le côté apologétique de son oeuvre. Le christianisme, la révélation judéo-chrétienne, est, comme il se plaisait à le répéter, ‘titanique ». Elle seule apporte les réponses que l’homme cherche désespérément. Inutile de vouloir les trouver dans les systèmes humains, dans la pensée profane. Au fond, le combat incessant et « tous azimuts » livré par Schaeffer – non dans un esprit de polémique, mais de compassion et d’amour – tendait cette seule fin: par la glorification raisonnée de ‘Evangile, amener les gens, hors de l’Eglise et dans l’Eglise, à penser bibliquement, chrétiennement, pour leur ur salut et pour la gloire de Dieu.
Vu que le ministère de ce maître à penser s’est essentiellement déroulé dans l’Occident dit « chrétien », cela évoque bien sûr le drame qui s’est produit au sein de notre culture au cours des dernières décennies. L’apostasie – l’abandon de la vérité biblique – a pris pied dans les Eglises et de là, par contagion, dans la société, en y semant ses ravages.

C’est dans ce milieu ambiant -l’apostasie du monde occidental dont il mesurait et l’ampleur et l’horreur – que Francis Schaeffer a bataillé sans trêve pour magnifier l’Evangile, restaurer la vision et l’ordre bibliques et arracher des hommes à la perdition.
Son combat est donc empreint de souffrance. Les accents sont douloureux, pathétiques. L’homme qui plaide avec le monde moderne fait encore plus figure de prophète que de théologien. Il a le message de saison pour la culture dans laquelle il vit. Conscient du jugement qui vient, il l’appelle solennellement à un retour à Dieu et à sa Parole, aux absolus de l’Ecriture.
Oui, Schaeffer plaide. Il plaide contre l’apostasie et les aberrations qu’elle a amenées dans les domaines de la religion, de la pensée, de l’art, de la morale et de la vie sociale.
Il plaide pour un retour à une vision biblique intégrale, à des concepts fondés sur la révélation scripturaire et à une pratique en pleine harmonie avec ces concepts. Car il ne suffit pas de penser justement à tous les niveaux. Il faut encore vivre et agir justement à tous les niveaux.

Faisant front de tous les côtés, Schaeffer s’est battu, au nom du christianisme historique, dans les domaines de la logique, de la pensée philosophico-théologique, de l’anthropologie (doctrine de l’homme), de l’expérience religieuse, de la sotériologie (doctrine du salut), de l’ecclésiologie (doctrine de ‘Eglise) et de l’inspiration des Ecritures. Dans son combat, il a eu le mérite de ne jamais se présenter en ‘attardé ». Certes, il connaissait les hérésies d’hier. Mais, toujours dans le vif de l’actualité, il a combattu celles d’aujourd’hui. On peut même dire qu’il a su devancer le temps et prévoir ce qui allait arriver.
Son apologie d’avant-garde lui a permis de se faire écouter par ceux qui avaient passé dans le moule de la culture moderne, surtout la jeunesse étudiante.

Le combat dans le domaine logique

Dès ses premiers écrits, il s’oppose vigoureusement à la relativisation du concept de vérité. Si une thèse est juste, son contraire doit être tenu pour faux et répudié. Par exemple, on ne peut en même terrps prétendre que Jésus-Christ corporellement ressuscité et qu’il ne l’est pas. C’est l’un ou I autre. Il n’y a pas de conciliation, de synthèse possible.
Vouloir faire cohabiter des positions qui s’excluent, c’est aller contre la logiquE de l’esprit humain tel que Dieu l’a créé, briser l’unité de la vérité et attenter à son caractère absolu.
La vérité n’est pas ambigùe, trouble, double. Les oppositions logiques, thèse-antithèse (bien-mal, vérité-erreur. etc…) doivent être maintenues, sinon l’on tombe dans la déraison. La synthèse, comme outil servant àconcilier les contraires, est à rejeter.
La défense passionnée du caractère absolu de la vérité a naturellement amené Schaeffer à dénoncer le Néo-Modernisme, à cause de son relativisme en matiére de foi, et la fausse unité oecuménique avec son amalgame de groupes hétérogènes et de positions doctrinales divergentes.
La où la synthèse est reine, le pluralisme jouit de toutes les faveurs.

Le combat dans le domaine philosophico-théologique.

Pour répondre au désarroi des esprits, particulièrement de la jeune génération en pleine dérive intellectuelle et morale, Schaeffer s’est attaché à rétablir des points de repère précis par rapport à Dieu. Face àl’athéisme, il insiste sur l’existence objective de Dieu attestée dans la création et la réalité humaine dans ce qu’elle a de spécifique et d’unique par rapport au reste du monde créé: la personnalité. Dieu n’est pas la projection de notre pensée ou le produit de notre imagination. « Il est réellement là. »
En plus, il s’agit d’un Dieu personnel, et non d’un principe abstrait, vague et distant, jouant le rôle de cause première. Nous n’avons pas affaire au dieu impersonnel des déistes, mais au Dieu tri-personnel de ‘Ecriture, Père, Fils et Saint-Esprit.
Ce Dieu-Personne – source et explication de notre propre personnalité – aime et communique. Il y a amour et communication au sein de la Trinité. Ce Dieu personnel est donc proche de l’homme – la barrière créée par le péché mise à part – capable de communiquer, de parler, de se révéler à sa créature.
Puisqu’il n’est ni lointain, ni muet, on peut le connaître.

L’agnosticisme n’a pas de fondement. Dieu n’est pas une énigme indéchiffrable. On ne peut le saisir d’une façon exhaustive, mais en tout cas substantielle. Schaeffer ne s’est pas lassé d’affirmer la rationalité et l’intelligibilité de la révélation biblique.
Mais, attention! Ce Dieu personnel est infini. Créateur de toutes choses, il ne se confond pas avec la création. Il transcende l’ordre entier des choses créées et des créatures. Voilà un coup mortel porté au panthéisme, si àla mode aujourd’hui dans notre Occident paganisé.

Que Dieu ne se confonde pas avec l’univers ne signifie pas, toutefois, qu’il soit absent de sa création. Enfermer celle-ci dans un système clos de lois naturelles, c’est avoir une vision purement mécaniste de l’univers, en exclure Dieu. Schaeffer rejette le naturalisme. Dieu est présent et agissant dans la création. Il peut y intervenir directement quand il veut et comme il veut, sans être prisonnier de l’agencement habituel des rapports de cause à effet.
Ceux qui ne conçoivent pas que Dieu puisse « mettre sa main dans la machine », qui restent au niveau du visible et du naturel, n’ont que la moitié de la réalité, « la moitié de l’orange ».
Maître de la création, Dieu l’est aussi de l’histoire, dans laquelle il agit par sa providence, ses miracles, ses délivrances et ses jugements. L’histoire, qui obéit àson plan et qui marche vers une fin conçue par lui, ne peut donc être ramenée au jeu des facteurs horizontaux d’ordre social, économique, politique, militaire. Le sens de l’histoire, qui relève de Dieu, dépasse toutes ces causes secondes. Le matérialisme historique est faux.
Enfin, l’action de Dieu dans l’histoire manifeste son caractère, la sainteté. Celle-ci constitue la loi morale de l’univers, le fondement sur lequel les absolus moraux reposent.
En vertu de l’existence objective du Dieu personnel et infini – origine de toutes choses – et en vertu de son caractère – la sainteté – il est possible d’échapper à la dérive intellectuelle et morale à laquelle je me suis référé plus haut.
La vie humaine, en tant que telle et en elle-même, n’est pas dépourvue de signification. L’absurdité et le désespoir ne sont pas, comme l’existentialisme voudrait nous le faire croire, inhérents à notre condition d’hommes, mais le résultat de la chute originelle etdes multiples séparations qu’elle a provoquées, à commencer par la séparation de l’homme d’avec Dieu.

Que l’homme retrouve, par la foi en Jésus-Christ crucifié et ressuscité – l’auteur d’une parfaite rédemption – Celui qui est à la fois son Créateur et sa fin dernière, et la plénitude de sens attachée à son existence lui apparaîtra aussitôt et deviendra sa possession.
Du même coup, les absolus moraux qui doivent guider sa conduite et auxquels sa conscience rend témoignage (cf. Rom 2.14,15), s’offriront à lui avec toute la netteté désirable dans l’Ecriture. Il sera délivré de l’amoralisme et connaîtra la beauté d’une vie sainte.

Peut-être suffit-il maintenant de dégager les lignes de force du combat de Francis Schaeffer sur les autres plans. Je serai donc très succinct.

Le combat dans le domaine de l’anthropologie

Tout en maintenant avec beaucoup de soin l’historicité de la chute et ses conséquences immenses pour l’homme – dans sa quadruple relation avec Dieu avec lui-même, avec le prochain et avec la nature – Schaeffer a lutté contre une dévaluation de l’homme en tant qu’homme. Bien que pécheur, il reste grand, « car il retient quelque chose de l’image de Dieu ». La chute, si dramatique soit-elle, n’a pas fait de lui un zéro, ne l’a pasamené àêtre moins qu’un homme. Ainsi, il reste unique par rapport au reste de la création, un être responsable, capable de choix, capable d’influer sur le cours de l’histoire.
Cet accent sur la grandeur et la valeur de l’homme se justifie pleinement face à ce que le déterminisme (chimique, biologique, psychologique) tend à faire de l’homme: un être irresponsable, un simple rouage de la machine cosmique. C’est au nom de la grandeur de l’homme comme créature faite à l’image de Dieu, au nom du caractère sacré de la vie humaine, que Schaeffer a mené un combat acharné contre l’avortement, l’infanticide, l’euthanasie.
Son « humanisme », vraiment biblique, est absolument oppose à l’humanisme séculier qui glorifie l’homme autonome. I Pour Schaeffer, l’autonomie – la volonté d’être sa propre loi -constitue l’essence du péché.

Le combat dans le domaine de l’expérience religieuse

Le mysticisme diffus de notre époque, qui flotte dans le vide, sans le support objectif de faits rédempteurs inscrits dans l’histoire, d’une révélation en corrélation avec ces faits et les expliquant, d’une doctrine claire et substantielle proposée à l’homme avec toutes ses facultés – y compris son intelligence – ce mysticisme, ce subjectivisme Schaeffer le qualifiait « de bannière sans contenu », ou « de foi en la foi ».
La vraie foi n’est pas un saut dans le vide, le noir, l’irrationnel. La foi n’implique pas le sacrifice de l’intelligence, de la raison…
(Ce qui mène au sacrifice ou à la démission de la raison, c’est le rationalisme, le culte de la raison. Quand la raison s’affranchit de la soumission à la révélation de Dieu, elle marche nécessairement vers la perte de la rationalité. Le prix de l’autonomie orgueilleuse, c’est l’irrationalisme.)
La foi digne de ce nom fait appel à l’intelligence, car la révélation biblique n’exige pas que l’homme croie sans réfléchir. Elle provoque et nourrit sa réflexion. Même si cela peut sembler à certains paradoxal, elle demande à l’homme de réfléchir plus profondément.

Le combat dans le domaine de la sotériologie
(doctrine du salut)

Schaeffer a très bien montré que la notion de salut et la doctrine du salut ne prenaient tout leur sens que dans le cadre d’un enseignement bien étayé sur le Dieu créateur. Les premiers chapitres de la Genèse sont les prémisses nécessaires au dèveloppement de la doctrine du salut en Christ. Ils n’ont pas un caractère mythique ou symbolique. Ils rapportent des faits historiques.
Leur historicité est amplement confirmée par le Nouveau Testament.
La vision que Schaeffer a du salut, basé sur l’oeuvre parfaite de rédemption accomplie par Jésus-Christ dans l’histoire, n’est pas étriquée. Son combat vise à élargir nos conceptions. Le salut acquis par la mort expiatoire et substitutive et la résurrection corporelle de Jésus-Christ, pour tous ceux qui croient, n’apporte pas simplement la libération de sentiments de culpabilité (plan psychologique), mais d’une réelle culpabilité devant le Dieu saint (plan moral), que notre péché a offensé et sous la colère duquel nous sommes tous par nature. (La note du jugement est très forte et très présente dans l’oeuvre de Schaeffer.)
D’autre part, le salut a un caractère total: il embrasse la justification et la sanctification, l’âme et le corps, qui ressuscitera et sera glorifié (Schaeffer rejette toute tendance « platonicienne » de mépris du corps et de la matière), l’homme et le cosmos (entraîné dans l’anormalité par la faute de l’homme, mais devant aussi participer de sa restauration, cf. Rom 8.18-25), la vie privée et la vie sociale, nos relations humaines ayant aussi besoin de guérison.
Enfin, en rupture avec un certain piétisme, Schaeffer n’a pas ignoré une dimension du salut trop souvent négligée, à savoir le salut de notre culture. Il a bataillé jusqu’au bout, et avec une énergie croissante, pour que les chrétiens soient vraiment « le sel de la terre et la lumière du monde », qu’ils sortent de leur ghetto – une spiritualité exclusivement orientée vers les réalités éternelles – et S’opposent sur le terrain à la marée de l’humanisme séculier.

Engagé lui-même à fond dans ce combat, Schaeffer, toujours lucide et biblique, ne croyait pas à un salut massif de la société. Mais il estimait, avec raison, que les chrétiens ne doivent pas abandonner les affaires de la cité et de la nation aux humanistes athées, et que l’influence salvatrice du christianisme doit aussi se faire sentir sur la culture. Le baume de ‘Evangile peut aussi et doit aussi étendre ses effets à notre société malade.

Le combat dans le domaine de l’ecclésiologie
(doctrine de l’Eglise)

Sur ce plan, Schaeffer a été le champion d’une orthodoxie multidimensionnelle exigeante. Il a plaidé pour la pureté de l’Eglise en matière de doctrine et de vie. Ses pages sur l’adultère spirituel et l’apostasie sont émouvantes. Schaeffer rejetait tout compromis. Il était jaloux de la sainteté de Dieu et de l’intégrité de la foi. Il admettait pleinement la nécessité d’une discipline ecclésiastique. Il a plaidé pour la mise en place de structures vraiment bibliques (« The Church at the End 0f the 2Oth Century »), tout en reconnaissant sagement une marge de liberté. L’orthodoxie de la doctrine, de la vie, des structures, ne lui suffisait pas.
Il voulait encore « l’orthodoxie de la réalitécommunautaire », c’està-dire la pleine manifestation de l’amour chrétien au sein de ‘Eglise. Il nous rappelle, dans « La Marque du Chrétien », que « l’apologétique finale (du christianisme)… c’est l’amour visible entre les vrais chrétiens », p. 21. Cette réalité communautaire, il l’a pleinement vécue lui-même, et de longues années, depuis la fondation de la communauté de l’Abri. La Croix était au centre de sa vie comme au centre de son message.

Le combat dans le domaine de l’inspiration des Ecritures.

Adversaire irréductible de la relativisation du concept de vérité, Schaeffer a été, comme les réformateurs, un homme de la Parole. Il n’a jamais admis que l’on porte atteinte à l’intégralité de la vérité biblique. Il a maintenu fermement, face au NéoModernisme et même au sein du monde « évangélique », la pleine inspiration et l’inerrance des Ecritures. Il n’acceptait pas de dichotomie entre le message de la Bible et l’historicité des récits bibliques ou encore l’exactitude des faits d’ordre scientifique. Pour lui, la Bible était absolument crédible en tout et à tous les niveaux.
Au Congrès de Lausanne, en 1974, il a lancé un vibrant appel pour un retour à une conception sans faille de l’inspiration des Ecritures (cf. « Impact et Crédibilité du Christianisme », p. 49 à52).
En hommage personnel à cet homme de Dieu dont j’ai beaucoup reçu et beaucoup appris, j’aimerais dire, dans ses propres termes, qu’il a eu « une vision limpide de l’importance de la vérité, et une pratique limpide de cette vérité » (« La Mort dans la Cité », p. 60).

Paul-André DUBOIS

Directeur de l’Ecole
Biblique de Genève

Tire du « Témoin » n0 5, sept-oct. 84, organe bimestriel de l’Action Biblique, avec autorisation.

Communication

Les articles traitant le thème « Foi et Science » dans le n0 70, en particulier l’évolutionnisme, ont rencontré un vif intérêt. Les extraits du livre passionnant « INSOLITE », ainsi que son commentaire dans la chronique des livres, ont trouvé un écho trés favorable. Cet ouvrage dont l’auteur est le savant bien connu, M. Jean Taubenberg-Savoy, biologiste et ornithologue, peut être commandé exceptionnellement àl’adresse PROMESSES, soit en France, soit en Suisse, ou alors directement chez l’auteur: Case postale 24, CH-i 897 LE BOUVERET. (Prix de l’ouvrage: 80 FF ou 30 FS).

les articles plus lus

En présentant le premier numero de PROMESSES

à nos frères en la foi, nous pensons bien faire d’exposer les principes qui seront à la base de ce «Cahier d’études bibliques».

Nous chercherons à être utiles à tous, à l’église de Dieu d’abord, c’est-à-dire au Chef de l’église, Christ, mais aussi à ceux pour qui la Parole est précieuse, à ceux qui désirent étudier et obéir.

Les bulletins, feuilles de renseignements, journaux mensuels ou trimestriels foisonnent. Tous, ou presque, apportent des nouvelles missionnaires ou d’évangélisation. Ce qu’on recherche ici est beaucoup plus un cahier comportant exclusivement des études bibliques ou se rapportant spécifiquement à la Parole.

La plupart des assemblées de «frères» issues du mouvement datant des années 20-30 du siècle écoulé semblent vivre au ralenti, l’esprit missionnaire mis à part. Comme dans tout mouvement, certaines vérités ont été poussées en «épingle», d’autres ont été négligées; des intérêts particuliers ont pris le pas sur les valeurs spirituelles. Nous assistons à un rétrécissement sérieux de l’influence, de l’action que devraient avoir des églises de foi, c’est-à-dire formées d’enfants de Dieu véritables, scellés par l’Esprit de Dieu.

En toute humilité, nous désirons demander au Seigneur sa lumière, afin de marcher selon sa grâce, en fidélité, devant sa face. Nous ne saurions prétendre connaître tout ce que Dieu veut pour les siens et son église, mais notre désir est d’apporter ce qui, aujourd’hui, est utile pour l’édification et la consolation de nombreux enfants de Dieu. Précisons que nous ne voudrions pas représenter un point de vue particulier, mais étudier la Parole, en respectant la sainteté de Dieu.

Chaque étude signée restera sous la responsabilité de son auteur. L’enseignement de ces pages semble devoir être d’une étendue qui surprendra peut-être. Notre désir est, à la fois, de présenter des études fouillées pour le chrétien avancé, mais aussi des explications de termes, de langage, pour ceux qui ne connaissent pas notre langue d’une manière approfondie.

A titre d’essai, nous ferons parvenir un certain nombre d’exemplaires au monde francophone d’outre-mer. Il faudra ainsi tenir compte de ce champ de diffusion.

De divers côtés, sinon dans nos vieux pays, on demande, en effet, une littérature chrétienne plus abondante, basée sur la Bible, la Parole de Dieu. Quelques-uns d’entre nous ont cru devoir répondre à ce désir. Nous plaçons ces cahiers sous le regard du «Chef», demandant à Dieu sa bénédiction pour rendre témoignage à la Vérité.

Les éditeurs

Où nous mène la formidable évolution qui soulève le monde chrétien tout entier? En cette période d’après le Concile du Vatican Il, il est utile de dresser un bilan des faits, même provisoire, et de procéder à un tour d’horizon général.

Eléments positifs de l’évolution catholique: Incontestablement, des mouvements intéressants se font sentir dans l’Eglise romaine: étude et diffusion de la Bible en voie de développement, dialogue engagé avec les autres confessions, reconnaissance du fait que les communautés des «frères séparés» protestants peuvent porter le titre d’églises, admission d’une part de responsabilité dans la rupture du XVIe siècle. Au cours du Concile du Vatican Il, l’opinion a été exprimée à maintes reprises que l’Eglise catholique avait besoin d’un renouveau si elle voulait réellement entreprendre le dialogue avec les églises non-romaines. Il y eut des discussions très libres, suivies de votes positifs impressionnants, par exemple sur la collégialité des évêques gouvernant l’Eglise avec le pape, l’usage de la langue vulgaire dans le culte, l’oecuménisme, la liberté religieuse, la limitation des naissances, le peuple juif, l’Ecriture Sainte et la Tradition, etc.

Fin décevante de Vatican Il: Rappelons quelques faits justifiant cette impression de l’ensemble des observateurs non catholiques.

La collégialité des évêques doit être entendue de telle manière que la primauté du pape demeure intacte. La structure monarchique de l’Eglise romaine n’en sera pas affectée, le pape reste le souverain absolu. Le collège épiscopal n’a aucune autorité sans ce dernier. Paul VI, dans son discours d’ouverture à la troisième session, ne s’en est pas référé moins de sept fois à sa primauté, et le mot-clé qu’il a constamment utilisé était celui de «hiérarchie sacrée». Le pasteur G. Richard-Molard estime qu’un tel discours «ne peut guère qu’hérisser la plupart des chrétiens non catholiques romains» («Messager Social», 10 déc.; S. CE- P. I., 1er oct.; 24 sept. 1964).

Il est clair, selon le même pasteur, «que l’Eglise catholique est toujours placée sous l’unique pouvoir de l’Eglise romaine. Or, il ne s’agit pas là d’une découverte de La Palice, mais d’une situation, chaque jour plus insupportable pour les catholiques eux-mêmes. Cette direction totalitaire italienne, ou pire encore, romanisée, possède encore tous les leviers de commande» («Christianisme au XXe siècle», 29 oct. 1964). Cela n’empêche pas qu’une seconde force «se manifeste par l’esprit nouveau qui anime une partie toujours plus large du catholicisme non italien. Il ne faut pas s’imaginer que cet esprit ait changé en quoi que ce soit la masse, mais il passe sur quelques centaines d’évêques, sur de nombreux prêtres et sur une élite de laïcs» (ibid.).

La Vierge Marie a été proclamée Mère de l’Eglise, sans l’avis des pères conciliaires, par Paul VI, qui lui a consacré la moitié de son discours de clôture {cf. «Chrétien Evangélique», déc. 1964, p. 5). Cette proclamation «a détruit tous les efforts des pères conciliaires qui. .. s’étaient ingéniés à éviter autant que possible les déclarations de nature à. ..donner de l’extension au dogme marial et à choquer les protestants» {«Christ U. Welt», cité par S. CE. P. I., 3 déc. 1964).

Le 11 octobre 1963, le pape a terminé une allocution aux pères du Concile et aux fidèles par cette prière à la Sainte Vierge: «O Marie, nous vous prions pour nos frères encore séparés de notre famille catholique. Voyez comment, parmi eux, une phalange glorieuse célèbre votre culte avec fidélité et amour. Voyez comment parmi d’autres, si résolus à se dire chrétiens, commence à renaître aujourd’hui votre souvenir et votre culte, ô Vierge très bonne. Appelez avec nous tous ces fils, qui sont vôtres, à la même unité sous votre protection maternelle et céleste» («Documentation Catholique», 3 novembre 1963).

Le cardinal Doepfner, de Munich, dont les interventions au Concile ont été souvent remarquées, vient de déclarer à son tour: «Amoindrir dans l’Eglise le culte de la Vierge Marie serait un malentendu et une mauvaise interprétation des enseignements du Concile. ..Nous voulons approfondir et enraciner encore plus fort dans ce mystère du Christ le riche héritage laissé à l’Eglise par la Vierge Marie. Elle a un grand rôle à jouer dans l’Eglise, qui voit en elle son image originelle» {«Figaro», 28 déc. 1964).

Le dogme romain: Dans son livre récent sur l’Unité, le cardinal Béa répète des dizaines de fois: 1°) que l’enseignement romain, étant infaillible, ne saurait subir dans son essence aucune modification; 2°) que l’Eglise catholique étant la seule vraie Eglise du Christ, l’unité finale ne peut être envisagée que par le retour de tous les baptisés orthodoxes et protestants au bercail du successeur de saint Pierre. Ce caractère intangible du dogme catholique n’a cessé d’être proclamé clairement par Jean XXIII, Paul VI et tous les porte-parole de Rome. Le professeur E. Schlink, observateur de l’Eglise Evangélique d’Allemagne à Vatican Il, après avoir noté que les délibérations conciliaires sont « révolutionnaires» pour l’Eglise romaine, ajoute: «Aucune des resolutions jusqu’ici adoptées n’a «rapporté, modifié ou même réinterprété de manière satisfaisante un seul des dogmes qui divisent la chrétienté » (S. CE. P. I., 17 déc.1964).

Cela n’a pas empêché le professeur de théologie protestant O. Cullmann de déclarer que Vatican Il «n’a fermé aucune porte ». Dans une interview accordée au journal «Le Monde », M. Cullmann reconnaît que les textes élaborés au Concile sont décevants, car la plupart sont des textes de compromis. Le Concile actuel est lié par celui du Vatican I (en 1870, où fut proclamée l’infallibilité pontificale), et par les dogmes mariaux antérieurs, inchangeables eux aussi. Mais il ajoute: «Je ne partage pas le pessimisme de certains qui s’exprime dans ce slogan: «II ne sortira rien de ce Concile! » Tous les textes sont formulés de telle sorte qu’aucune porte n’est fermée, et qu’ils ne seront pas un obstacle à la future discussion entre catholiques ni au dialogue avec les non-catholiques, comme le sont les décisions des Conciles antérieurs » (cité par «Vie Protestante », 23 oct. 1964). -Puisque les dogmes romains sont infaillibles (voir les anathèmes du Concile de Trente), on se demande sur quoi porte la discussion. ..Si la porte n’est pas fermée, elle ne l’est qu’à sens unique et ne nous paraît conduire qu’au bercail de saint Pierre.

(à suivre)
Extrait avec autorisation du périodique «Le Chrétien évangélique »

(2 Tim.1, 7-9)

«Dieu ne nous a pas donné un esprit de timidité, mais de force, d’amour e! de prudence.»

Timide = qui manque de hardiesse et d’assurance, dit le dictionnaire. Dieu, en vue du but qu’il s’est proposé, nous a adressé une «VOCATION SAINTE», et pour cette vocation, il nous revêt:

de force – par quoi nous devons comprendre force de caractère, maîtrise de soi, tranquillité d’esprit, toutes choses qui sont contraires à la timidité. Une stabilité nouvelle, créée par le Saint-Esprit de Dieu qui nous donne l’assurance du salut; un contrôle de soi-même qui peut ne pas être naturel, mais qui est le résultat du travail de cet Esprit.

d’amour – de compréhension, de compassion, de pardon, amour qui n’est pas mollesse, ni faiblesse, mais qui prend part aux malheurs du prochain, qui comprend le pécheur et repousse le péché.

de prudence – mieux encore discipline personnelle, d’intelligence avertie, de jugement balancé, nuancé, sans laisser-aller.

Etes-vous craintif de nature, manquez-vous d’assurance, avez-vous ce qu’on appelle un complexe d’infériorité, craignez-vous de vous affirmer? Lisez les lettres à Timothée. C’était un timide de nature, et l’apôtre l’encouragea. Notez ceci: Dieu DONNE UN AUTRE ESPRIT que celui que vous aviez précédemment. Il donne gratuitement. Alors, demandez, priez. Il vous DONNERA.

Le but de nos études est de faire connaître et comprendre (Ps. 82, 5) les pensées de Dieu révélées dans sa Parole, afin de vivre dans la lumière. Dans un monde où Satan règne pour obscurcir la vérité, voire même la cacher, il importe que le juste – sauvé par la foi en Jésus-Christ – connaisse «les fondements» de la vérité divine.

Les lignes suivantes ne veulent être qu’un canevas de «la saine doctrine», telle que la Parole de Dieu nous la montre. Cet enseignement est à la fois christologique (Matth. 7, 28; 1 Cor. 2, 1-2) et apostolique (Act. 2, 42) ; il comprend l’ensemble des vérités divines.

I L’INSPIRATION VERBALE DE LA BIBLE

La pierre de touche de tout ce qui suit est la doctrine de l’inspiration des Ecritures. «Toute Ecriture est inspirée de Dieu» (2 Tim. 3, 16). Nous possédons aujourd’hui suffisamment de preuves, devant lesquelles tout homme sincère doit s’incliner. La Bible est la révélation de Dieu à l’égard de l’homme. Ce n’est pas un livre ecclésiastique quelconque, ni un ouvrage symbolique ou philosophique. C’est simplement «la Parole de Dieu» qui ne se laisse pas discuter. Des hommes de Dieu, poussés par l’Esprit, rédigèrent les 66 livres de cette divine Bibliothèque (2 Pi. 1, 21 ). Tout en gardant leur caractère et leur personnalité, ils furent de simples véhicules utilisés pour transmettre intégralement les pensées divines. C’est un miracle et un miracle ne s’explique pas. On peut l’accepter ou le rejeter; mais le fait est là.

Il LA TRINITÉ DE DIEU

Il en est de ce terme comme d’autres: la doctrine de la trinité de Dieu se trouve clairement révélée dans la Bible, bien que cette expression n’y soit pas mentionnée. Lucien déjà, rhéteur et philosophe grec du 2me siècle, fait confesser le chrétien dans son «Philopatris»: «le Dieu exalté …Fils du Père, Esprit procédant du Père, l’Un d’entre les Trois et Trois d’entre Un.» Le terme même fut employé formellement pour la première fois lors du synode en 317 à Alexandrie.

Cela ne signifie rien d’autres que tri-unité. La déité est une trinité, une unité qui possède 3 personnes distinctes ayant la même vie et la même essence.

L’ANCIEN TESTAMENT

Nous y voyons une révélation progressive qui trouve sa complète manifestation dans le Nouveau Testament. Des allusions claires et sans équivoques devaient ouvrir les yeux des personnes pieuses du temps du Seigneur.

Gen. 1,1: «Au commencement Dieu.» Ce terme «ELOHIM» est au pluriel et Moïse l’emploie quelque 500 fois. A remarquer qu’à chaque reprise le verbe qui l’accompagne est au singulier, ce qui prouve bien l’unité dans la pluralité des Personnes de la Déité.
Gen. 1,26: «Et Dieu dit: Faisons l’homme selon notre ressemblance»
Gen. 3, 22: «Voici l’homme est devenu comme l’un de nous»
Es. 48, 16: «Le Seigneur l’Eternel» – Dieu le Père
«m’a envoyé» – Dieu le Fils
«et son Esprit» -Dieu le Saint-Esprit
Zach. 12, 10: «Et je répandrai» -Dieu le Père
«un esprit de grâce» – Dieu le Saint-Esprit
«ils se lamenteront sur lui» -Dieu le Fils

LE NOUVEAU TESTAMENT

Il dévoile clairement cette vérité et nous confirme que la déité se compose de 3 Personnes: Dieu le Père, Dieu le Fils et Dieu le Saint- Esprit (Matth. 28, 19; Jean 1:1; Jean 5:3-4; Jean 8:54).

La trinité de Dieu est déjà engagée lors du baptême du Seigneur (Matth. 3, 13-17). On ne peut, à ce sujet, s’exprimer plus clairement que le Seigneur le faisait dans Jean 14:16-26: «Mais le Consolateur, l’Esprit-Saint (3ème Personne) que le Père (1ère Personne) enverra en mon nom (2ème Personne).»

La grande bénédiction apostolique nous laisse «la grâce du Seigneur Jésus-Christ», «l’amour de Dieu» et «la communion du Saint-Esprit» (2 Cor. 13, 13).

D’ailleurs, l’homme lui-même est une trinité composée de l’esprit, de l’âme et du corps. Il est attaqué par une autre trinité: le monde autour de lui, la chair en lui, et le diable au-dessous de lui. La loi du péché en lui est également représentée par une trinité:la convoitise de la chair, la convoitise des yeux et l’orgueil de la vie. Et, enfin, il peut être sauvé par la trinité divine: Dieu le Père, Dieu le Fils et Dieu le Saint-Esprit.

III JÉSUS-CHRIST

1. Sa Divinité

Jean 1, 1-3 suffirait pour établir cette vérité bénie:
Au commencement était la Parole» (le Verbe dans son existence éternelle)
cet la Parole était auprès de Dieu» (le Verbe dans son existence personnelle)
et la Parole était Dieu» (le Verbe dans son essence divine)

2. Son incarnation

Il est «Dieu manifesté en chair» (1 Tim. 3, 16). Ce mystère, dans lequel même les anges désirent plonger leurs regards, nous a été révélé. Les 7 degrés de son abnégation nous sont donnés en Phil. 2, 7-9. Aucune difficulté n’est inconnue du Seigneur qui a été tenté comme nous; Il peut donc nous accorder miséricorde et secours au moment opportun (Hébr. 4, 15-16). Ami qui souffres, confie-toi en Lui, car son nom est «Merveilleux».

3. Son CEuvre rédemptrice

Rom. 4, 25 dit: «Jésus, notre Sauveur, lequel a été livré pour nos fautes et a été ressuscité pour notre justification».
L’Ancien Testament y fait continuellement allusion (Ex. 12, Ps.22, Es.53).
Les Evangiles en sont la réalisation
Les Actes le proclament
Les Epîtres l’expliquent
L’Apocalypse, enfin, décrit la destruction de ceux qui ont rejeté cette oeuvre.

(à suivre)