La quête mystique

[note]Ce texte a été initialement publié par La Bonne Nouvelle (n° 3/2015). Il est reproduit avec l’aimable autorisation de son auteur. Un autre article du même auteur sur ce sujet est diffusé par les éditions CLKV.ch (http://www.clkv.ch/fremdsprachige-texte/cat_view/25-fremdsprachen/27-franzoesisch).[/note]

Nous autres chrétiens sommes encouragés par l’Écriture à marcher de progrès en progrès, à viser le meilleur selon Dieu : « Que tout ce qui est vrai, tout ce qui est honorable, tout ce qui est juste, tout ce qui est pur, tout ce qui est aimable, tout ce qui mérite l’approbation, ce qui est vertueux et digne de louange, soit l’objet de vos pensées » (Phil 4.8).  Il s’agit donc de tendre à une vie spirituelle de qualité. À fuir le minimalisme, la médiocrité, la passivité, la paresse d’esprit. À combattre le bon combat de la foi (cf. Phil 3.14 ; 1 Cor 9.24 ; Héb 12.1,2). Qui peut ne pas se sentir concerné par de telles exhortations ?
Dans l’espoir de favoriser leur épanouissement spirituel, beaucoup d’esprits fervents se tournent aujourd’hui vers une piété d’inspiration mystique. Ce choix n’est pas anodin. Au sein du monde évangélique, des tendances affirmées dès les années 1970, mais déjà perceptibles antérieurement, prennent aujourd’hui des tournures aberrantes — à rebours du but recherché. Alors pourquoi tant de fourvoiements sur la route d’une spiritualité en harmonie avec la volonté de Dieu ? Et comment les éviter ?

1. D’une mauvaise théologie biblique à une fausse évaluation de nos vrais besoins

Un vœu profond de changement intérieur, d’épanouissement spirituel est louable. Toutefois, il arrive que la source de ce désir soit trouble, et le but visé moins chrétien qu’il n’y paraisse.
Premier indice d’une mauvaise assise : se croire automatiquement guidé par l’Esprit et approuvé de Dieu. La Bible, pleine de réalisme, nous incite à la prudence. Elle nous exhorte à veiller sur nous-mêmes (1 Tim 4.16). Elle nous enseigne que l’âme humaine (c.à.d. le siège de nos sentiments, de notre intelligence et de notre volonté) mérite d’être surveillée de près. En effet, la conversion à Christ — la nouvelle naissance spirituelle par l’Esprit — ne libère pas instantanément notre âme de sa nature pécheresse. Notre cœur, par ses raisonnements, ses dispositions, ses penchants reste potentiellement capable d’engendrer « mauvaises pensées, meurtres, adultères, prostitutions, vols, faux témoignages, blasphèmes » (Mat 15.19 ; cf. Rom 7.18 ; Jac 4.1-7). Il y a donc des élans du cœur qu’il s’agit d’apprendre à identifier, à réprimer et à dominer (Rom 8.5-9).
Dans notre combat pour le discernement des choses les meilleures selon Dieu, nous avons également à traverser le labyrinthe des idées reçues. La culture antichrétienne, hédoniste, émotionnelle et permissive qui est la nôtre nous conditionne, parfois à notre insu. Ainsi, notre âme peut facilement se gonfler d’envies, d’aspirations, d’ambitions que nous estimons légitimes, mais qui égarent. Nous avons besoin d’un fil à plomb, d’un éclairage, extérieurs à nous-mêmes, pour juger du caractère de nos impulsions (ou de nos pulsions), et pour orienter nos âmes vers les seuls objets véritablement nécessaires à notre salut.
Notre responsabilité de chrétiens est donc premièrement de rester constamment dépendants de Dieu et remplis de l’esprit « de force, d’amour et de sagesse » qu’il nous a donné à notre conversion (2 Tim 1.7b). Notre esprit — cette partie de nous-mêmes qui est destinée à une réconciliation et à une communion éternelle avec Dieu — ne peut prospérer de manière autonome. Pour être agissant et capable de piloter notre âme, notre esprit reçoit énergie et clairvoyance par la Parole de Dieu : « Car la parole de Dieu est vivante et efficace, plus acérée qu’aucune épée à double tranchant ; elle pénètre jusqu’à la division de l’âme et de l’esprit […] ; elle juge des sentiments et des pensées du cœur » (Héb 4.12).  De plus, notre esprit doit s’appliquer à obéir à cette parole en vue d’une meilleure connaissance de notre Seigneur Jésus-Christ, à cause de notre entrée prochaine dans son royaume éternel (2 Pi 1.3-11). « C’est pourquoi, rejetant tout excès de méchanceté, recevez avec douceur la parole qui a été plantée en vous et qui peut sauver vos âmes » (Jac 1.21).
Ne confondons donc pas croissance spirituelle (la « sanctification » selon Jean 17.17 ou 1 Thes 4.3,7) et culture de nos envies instinctives de dépaysement psychologique.

2. D’une fausse évaluation de nos vrais besoins à l’égarement spirituel

Comme le rappellent les passages de l’Écriture mentionnés ci-dessus, vivre en laissant notre âme naturelle (notre « vieil homme », notre « chair ») gouverner équivaut à retourner à la vaine manière de vivre que nous avions condamnée et quittée. S’ensuivent alors de mauvais fruits dans notre marche chrétienne. C’est en partie pour éviter une telle inconséquence que le Seigneur a enseigné ses disciples et que les apôtres ont rédigé leurs Épîtres, parfois dans les larmes.
Parmi les destinataires de ces textes, des églises qui souffraient de carences morales plutôt triviales (animosités, immoralité, mondanité). Mais d’autres qui présentaient des symptômes plus subtils. Leur désordre était comme camouflé sous la respectabilité religieuse, sous une apparence de spiritualité « chrétienne » prétendument supérieure. Certains membres influents se distinguaient par leur illuminisme, se disant porteurs de révélations spéciales (et supérieures) ; ou par leur autodiscipline ascétique (une forme de légalisme) ; ou encore par un christianisme « augmenté » de concepts de la philosophie ou de la psychologie humaine (cf. Col 2.4,8,16-23).
Les Épîtres bibliques sont claires : ces meneurs se déroutent du chemin de Dieu. S’écartant progressivement de l’essentiel, ils ne s’attachent plus au « chef », Jésus-Christ, mais cèdent à leurs pensées charnelles et orgueilleuses. Il est donc primordial qu’ils se repentent et retrouvent la simplicité à l’égard de Christ (cf. 2 Cor 11.1-5).
Pourtant, que de croyants en quête de mieux courent aujourd’hui sans prudence derrière de tels « serviteurs (ou servantes) de Dieu » (évangéliques, catholiques ou orthodoxes) à cause des révélations exceptionnelles dont on les croit détenteurs. Cette spiritualité nourrie de notions et de préceptes humains ne contribue réellement qu’à « la satisfaction de la chair » (cf. Col 2.23).

3. De l’égarement spirituel à l’hérésie mystique

On l’a dit, la pratique religieuse actuelle est souvent dominée par une subjectivité envahissante. Plus que cela, la spiritualité chrétienne, minée par les égarements dont nous avons parlé, ne fait plus barrage aux thèses les plus antichrétiennes. Ainsi, les années passées ont vu l’entrée en force, même au sein d’églises réputées conservatrices, d’un des concepts phares du mysticisme oriental : à savoir que Dieu habite naturellement au centre de tout être humain (une variante du panthéisme antique), et que l’enjeu consiste à redécouvrir ce noyau divin de notre personne. Bien que les mystiques « chrétiens » aient souvent considéré cette présence divine immanente comme une conséquence de la conversion ou du baptême, la conception orientale tend à l’emporter. Elle consiste à penser que la divinité est innée et universelle, mais demande à être affranchie de sa prison corporelle. Cette « vision du monde » s’invite facilement en Occident, parce que c’est ici l’expérience (le ressenti) qui fait foi. Moments d’extase (de transes ?), de dissolution du moi personnel en Dieu (?) ou dans le grand Tout (?) ; impression d’échapper au carcan du temps, de l’espace et de son propre corps ; rencontres avec des êtres surnaturels ; diverses sensations très fortes, tout cela suffit à légitimer — faussement — la démarche mystique.
Pour ces « croyants », pas besoin d’exposer leur « vécu » à la lumière de toute l’Écriture. Pourquoi le faudrait-il si des techniques de méditation, de respiration ou de descente en soi-même peuvent conduire n’importe qui à l’expérience directe de la présence divine ? Et pourquoi insister sur le caractère exclusif du message chrétien si les mystiques de toutes les religions (en particulier leurs représentants chamaniques, hindouistes, bouddhistes, kabbalistes ou soufis) parviennent sans l’Écriture à l’« union sacrée » avec le cosmos, avec « l’âme universelle » de Dieu ?
Un honnête examen de cette dernière voie montre qu’elle ne peut conduire à Dieu pour bien des raisons. Elle annule, entre autres choses :
– la possibilité du Dieu personnel, éternel, créateur, transcendant (c.à.d. absolument distinct de sa création), trois fois saint et juge de tous les vivants — tel qu’il est révélé par l’Écriture ;
– la réalité du péché originel, qui nous barre l’accès à Dieu ;
– la réalité de la perdition éternelle et de l’enfer ;
– la révélation écrite, complète, parfaite et suffisante de l’Écriture sainte ;
– l’œuvre expiatoire unique et parfaite de Jésus-Christ, Parole incarnée et Fils de Dieu, seul Médiateur entre Dieu et les hommes ;
– la réelle portée de l’activité de Satan dans le monde ; le sens de la défaite que Christ lui a infligée à la Croix ;
– l’œuvre du Saint-Esprit, seul moyen d’être convaincu de péché, de justice et de jugement ; seule voix capable de nous ouvrir à l’Évangile ; seul instrument assez puissant pour engendrer la vie de Dieu en nous et nous rendre capables de vivre en communion avec Christ ;
– le sens biblique de la conversion, de la sanctification, de la justification et de la glorification finale ;
– le sens biblique de l’Église, corps universel de Christ.
Mais, objectera-t-on, ne peut-on vivre en mystique chrétiennement, sans rejeter tous ces éléments de doctrine ? N’y a-t-il pas un mysticisme acceptable ?

4. Pourquoi le mysticisme ne doit pas nous faire lâcher la proie pour l’ombre

Le mysticisme porte en lui-même une ambition trompeuse et toxique, pour l’une ou pour plusieurs des raisons qui suivent.
En effet, le croyant habité de la foi véritable, celle qui sauve…

  • se nourrit de la Parole écrite (2 Tim 3.14-17) où rien ne lui manque. Mais le mystique cherche des révélations particulières, des messages obtenus par d’autres canaux (cf. Gal 1.6-9).
  • se réjouit de son adoption définitive par le Père céleste (1 Jean 3.1), l’Esprit témoignant à son esprit qu’il est devenu enfant de Dieu par la conversion (Rom 8.15,16 ; 1 Jean 5.10). Mais le mystique ne peut espérer une relation avec Dieu s’il n’a pas reçu le Christ de la Bible comme sauveur et seigneur personnel (1 Jean 4.2,3 ; 5.12) ; et s’il est déjà chrétien, ce mystique n’a pas besoin d’autre témoignage que celui des promesses de l’Écriture pour le rassurer à ce sujet.
  • recherche les « choses d’en haut, où Christ est assis à la droite de Dieu » et se réjouit à l’avance de ce qui lui est réservé dans les cieux (Col 1.5 ; 3.1-4), tout en accomplissant sa tâche journalière dans le respect des principes de la Parole. Mais le mystique est en réalité tourné vers l’intérieur de lui-même et préoccupé de trouver un chemin jusque vers « sa » réalité divine personnelle. C’est un égocentrique en habits spirituels.
  • fait confiance à Christ sans le voir (1 Pi 1.8), sachant qu’un jour, il le verra tel qu’il est (1 Jean 3.2-3) . Il salue ces choses de loin et à cause d’elles, il est prêt à ne pas voir s’accomplir tous ses désirs légitimes ici-bas (Héb 11.1,6,9,10,13,35). Mais le mystique aspire, hic et nunc, à déjà voir, sentir, toucher les réalités glorieuses ou le monde invisible. Il confond eros (l’amour des sens) et agapè (l’amour de Christ).
    s’efforce de demeurer dans l’amour de Dieu en confessant Jésus-Christ, en aimant les frères et sœurs dans la foi, en obéissant à la Parole (1 Jean 4.7,8 ; 5.2-4). Mais le mystique conçoit son épanouissement personnel comme non lié à ces exigences.
  • exclut d’adopter d’autre médiateur entre Dieu et lui que Christ (1 Tim 2.5,6). Mais le mystique a recours à quantité de médiations (techniques de conditionnement psychologique ou physique ; maîtres de sagesse en tous genres ; êtres surnaturels « angéliques », saints, démons ; prêtres et sacrements, etc.).

C’est pourquoi, loin de céder à la tentation mystique, prenons plutôt exemple sur l’apôtre Paul. Il aurait pu se prévaloir de ses expériences mystiques, lui qui avait rencontré Jésus sur le chemin de Damas et avait été « ravi jusqu’au troisième ciel », « enlevé dans le paradis » pour y entendre « des paroles ineffables qu’il n’est pas permis à un homme d’exprimer » (2 Cor 12.2,4). Or, il n’avait pas délibérément provoqué ces expériences. Il n’en a pas recherché d’autres semblables à tout prix. Le Seigneur l’a au contraire amené à cette confession : « [Le Seigneur m’a dit] Ma grâce te suffit, car ma puissance s’accomplit dans la faiblesse. Je me glorifierai donc bien plus volontiers de mes faiblesses, afin que la puissance de Christ repose sur moi » (2 Cor 12.9).

* * *

Retenons, en conclusion, les paroles de l’apôtre Paul, en Col 2.6 à 12 :
« Ainsi donc, comme vous avez reçu le Seigneur Jésus-Christ, marchez en lui, étant enracinés et fondés en lui, et affermis par la foi, d’après les instructions qui vous ont été données, et abondez en actions de grâces.
Prenez garde que personne ne fasse de vous sa proie par la philosophie et par une vaine tromperie, s’appuyant sur la tradition des hommes, sur les rudiments du monde, et non sur Christ. Car en lui habite corporellement toute la plénitude de la divinité. Vous avez tout pleinement en lui, qui est le chef de toute domination et de toute autorité. Et c’est en lui que vous avez été circoncis d’une circoncision que la main n’a pas faite, mais de la circoncision de Christ, qui consiste dans le dépouillement du corps de la chair : ayant été ensevelis avec lui par le baptême, vous êtes aussi ressuscités en lui et avec lui, par la foi en la puissance de Dieu, qui l’a ressuscité des morts. »

 

les articles plus lus

En présentant le premier numero de PROMESSES

à nos frères en la foi, nous pensons bien faire d’exposer les principes qui seront à la base de ce «Cahier d’études bibliques».

Nous chercherons à être utiles à tous, à l’église de Dieu d’abord, c’est-à-dire au Chef de l’église, Christ, mais aussi à ceux pour qui la Parole est précieuse, à ceux qui désirent étudier et obéir.

Les bulletins, feuilles de renseignements, journaux mensuels ou trimestriels foisonnent. Tous, ou presque, apportent des nouvelles missionnaires ou d’évangélisation. Ce qu’on recherche ici est beaucoup plus un cahier comportant exclusivement des études bibliques ou se rapportant spécifiquement à la Parole.

La plupart des assemblées de «frères» issues du mouvement datant des années 20-30 du siècle écoulé semblent vivre au ralenti, l’esprit missionnaire mis à part. Comme dans tout mouvement, certaines vérités ont été poussées en «épingle», d’autres ont été négligées; des intérêts particuliers ont pris le pas sur les valeurs spirituelles. Nous assistons à un rétrécissement sérieux de l’influence, de l’action que devraient avoir des églises de foi, c’est-à-dire formées d’enfants de Dieu véritables, scellés par l’Esprit de Dieu.

En toute humilité, nous désirons demander au Seigneur sa lumière, afin de marcher selon sa grâce, en fidélité, devant sa face. Nous ne saurions prétendre connaître tout ce que Dieu veut pour les siens et son église, mais notre désir est d’apporter ce qui, aujourd’hui, est utile pour l’édification et la consolation de nombreux enfants de Dieu. Précisons que nous ne voudrions pas représenter un point de vue particulier, mais étudier la Parole, en respectant la sainteté de Dieu.

Chaque étude signée restera sous la responsabilité de son auteur. L’enseignement de ces pages semble devoir être d’une étendue qui surprendra peut-être. Notre désir est, à la fois, de présenter des études fouillées pour le chrétien avancé, mais aussi des explications de termes, de langage, pour ceux qui ne connaissent pas notre langue d’une manière approfondie.

A titre d’essai, nous ferons parvenir un certain nombre d’exemplaires au monde francophone d’outre-mer. Il faudra ainsi tenir compte de ce champ de diffusion.

De divers côtés, sinon dans nos vieux pays, on demande, en effet, une littérature chrétienne plus abondante, basée sur la Bible, la Parole de Dieu. Quelques-uns d’entre nous ont cru devoir répondre à ce désir. Nous plaçons ces cahiers sous le regard du «Chef», demandant à Dieu sa bénédiction pour rendre témoignage à la Vérité.

Les éditeurs

Où nous mène la formidable évolution qui soulève le monde chrétien tout entier? En cette période d’après le Concile du Vatican Il, il est utile de dresser un bilan des faits, même provisoire, et de procéder à un tour d’horizon général.

Eléments positifs de l’évolution catholique: Incontestablement, des mouvements intéressants se font sentir dans l’Eglise romaine: étude et diffusion de la Bible en voie de développement, dialogue engagé avec les autres confessions, reconnaissance du fait que les communautés des «frères séparés» protestants peuvent porter le titre d’églises, admission d’une part de responsabilité dans la rupture du XVIe siècle. Au cours du Concile du Vatican Il, l’opinion a été exprimée à maintes reprises que l’Eglise catholique avait besoin d’un renouveau si elle voulait réellement entreprendre le dialogue avec les églises non-romaines. Il y eut des discussions très libres, suivies de votes positifs impressionnants, par exemple sur la collégialité des évêques gouvernant l’Eglise avec le pape, l’usage de la langue vulgaire dans le culte, l’oecuménisme, la liberté religieuse, la limitation des naissances, le peuple juif, l’Ecriture Sainte et la Tradition, etc.

Fin décevante de Vatican Il: Rappelons quelques faits justifiant cette impression de l’ensemble des observateurs non catholiques.

La collégialité des évêques doit être entendue de telle manière que la primauté du pape demeure intacte. La structure monarchique de l’Eglise romaine n’en sera pas affectée, le pape reste le souverain absolu. Le collège épiscopal n’a aucune autorité sans ce dernier. Paul VI, dans son discours d’ouverture à la troisième session, ne s’en est pas référé moins de sept fois à sa primauté, et le mot-clé qu’il a constamment utilisé était celui de «hiérarchie sacrée». Le pasteur G. Richard-Molard estime qu’un tel discours «ne peut guère qu’hérisser la plupart des chrétiens non catholiques romains» («Messager Social», 10 déc.; S. CE- P. I., 1er oct.; 24 sept. 1964).

Il est clair, selon le même pasteur, «que l’Eglise catholique est toujours placée sous l’unique pouvoir de l’Eglise romaine. Or, il ne s’agit pas là d’une découverte de La Palice, mais d’une situation, chaque jour plus insupportable pour les catholiques eux-mêmes. Cette direction totalitaire italienne, ou pire encore, romanisée, possède encore tous les leviers de commande» («Christianisme au XXe siècle», 29 oct. 1964). Cela n’empêche pas qu’une seconde force «se manifeste par l’esprit nouveau qui anime une partie toujours plus large du catholicisme non italien. Il ne faut pas s’imaginer que cet esprit ait changé en quoi que ce soit la masse, mais il passe sur quelques centaines d’évêques, sur de nombreux prêtres et sur une élite de laïcs» (ibid.).

La Vierge Marie a été proclamée Mère de l’Eglise, sans l’avis des pères conciliaires, par Paul VI, qui lui a consacré la moitié de son discours de clôture {cf. «Chrétien Evangélique», déc. 1964, p. 5). Cette proclamation «a détruit tous les efforts des pères conciliaires qui. .. s’étaient ingéniés à éviter autant que possible les déclarations de nature à. ..donner de l’extension au dogme marial et à choquer les protestants» {«Christ U. Welt», cité par S. CE. P. I., 3 déc. 1964).

Le 11 octobre 1963, le pape a terminé une allocution aux pères du Concile et aux fidèles par cette prière à la Sainte Vierge: «O Marie, nous vous prions pour nos frères encore séparés de notre famille catholique. Voyez comment, parmi eux, une phalange glorieuse célèbre votre culte avec fidélité et amour. Voyez comment parmi d’autres, si résolus à se dire chrétiens, commence à renaître aujourd’hui votre souvenir et votre culte, ô Vierge très bonne. Appelez avec nous tous ces fils, qui sont vôtres, à la même unité sous votre protection maternelle et céleste» («Documentation Catholique», 3 novembre 1963).

Le cardinal Doepfner, de Munich, dont les interventions au Concile ont été souvent remarquées, vient de déclarer à son tour: «Amoindrir dans l’Eglise le culte de la Vierge Marie serait un malentendu et une mauvaise interprétation des enseignements du Concile. ..Nous voulons approfondir et enraciner encore plus fort dans ce mystère du Christ le riche héritage laissé à l’Eglise par la Vierge Marie. Elle a un grand rôle à jouer dans l’Eglise, qui voit en elle son image originelle» {«Figaro», 28 déc. 1964).

Le dogme romain: Dans son livre récent sur l’Unité, le cardinal Béa répète des dizaines de fois: 1°) que l’enseignement romain, étant infaillible, ne saurait subir dans son essence aucune modification; 2°) que l’Eglise catholique étant la seule vraie Eglise du Christ, l’unité finale ne peut être envisagée que par le retour de tous les baptisés orthodoxes et protestants au bercail du successeur de saint Pierre. Ce caractère intangible du dogme catholique n’a cessé d’être proclamé clairement par Jean XXIII, Paul VI et tous les porte-parole de Rome. Le professeur E. Schlink, observateur de l’Eglise Evangélique d’Allemagne à Vatican Il, après avoir noté que les délibérations conciliaires sont « révolutionnaires» pour l’Eglise romaine, ajoute: «Aucune des resolutions jusqu’ici adoptées n’a «rapporté, modifié ou même réinterprété de manière satisfaisante un seul des dogmes qui divisent la chrétienté » (S. CE. P. I., 17 déc.1964).

Cela n’a pas empêché le professeur de théologie protestant O. Cullmann de déclarer que Vatican Il «n’a fermé aucune porte ». Dans une interview accordée au journal «Le Monde », M. Cullmann reconnaît que les textes élaborés au Concile sont décevants, car la plupart sont des textes de compromis. Le Concile actuel est lié par celui du Vatican I (en 1870, où fut proclamée l’infallibilité pontificale), et par les dogmes mariaux antérieurs, inchangeables eux aussi. Mais il ajoute: «Je ne partage pas le pessimisme de certains qui s’exprime dans ce slogan: «II ne sortira rien de ce Concile! » Tous les textes sont formulés de telle sorte qu’aucune porte n’est fermée, et qu’ils ne seront pas un obstacle à la future discussion entre catholiques ni au dialogue avec les non-catholiques, comme le sont les décisions des Conciles antérieurs » (cité par «Vie Protestante », 23 oct. 1964). -Puisque les dogmes romains sont infaillibles (voir les anathèmes du Concile de Trente), on se demande sur quoi porte la discussion. ..Si la porte n’est pas fermée, elle ne l’est qu’à sens unique et ne nous paraît conduire qu’au bercail de saint Pierre.

(à suivre)
Extrait avec autorisation du périodique «Le Chrétien évangélique »

(2 Tim.1, 7-9)

«Dieu ne nous a pas donné un esprit de timidité, mais de force, d’amour e! de prudence.»

Timide = qui manque de hardiesse et d’assurance, dit le dictionnaire. Dieu, en vue du but qu’il s’est proposé, nous a adressé une «VOCATION SAINTE», et pour cette vocation, il nous revêt:

de force – par quoi nous devons comprendre force de caractère, maîtrise de soi, tranquillité d’esprit, toutes choses qui sont contraires à la timidité. Une stabilité nouvelle, créée par le Saint-Esprit de Dieu qui nous donne l’assurance du salut; un contrôle de soi-même qui peut ne pas être naturel, mais qui est le résultat du travail de cet Esprit.

d’amour – de compréhension, de compassion, de pardon, amour qui n’est pas mollesse, ni faiblesse, mais qui prend part aux malheurs du prochain, qui comprend le pécheur et repousse le péché.

de prudence – mieux encore discipline personnelle, d’intelligence avertie, de jugement balancé, nuancé, sans laisser-aller.

Etes-vous craintif de nature, manquez-vous d’assurance, avez-vous ce qu’on appelle un complexe d’infériorité, craignez-vous de vous affirmer? Lisez les lettres à Timothée. C’était un timide de nature, et l’apôtre l’encouragea. Notez ceci: Dieu DONNE UN AUTRE ESPRIT que celui que vous aviez précédemment. Il donne gratuitement. Alors, demandez, priez. Il vous DONNERA.

Le but de nos études est de faire connaître et comprendre (Ps. 82, 5) les pensées de Dieu révélées dans sa Parole, afin de vivre dans la lumière. Dans un monde où Satan règne pour obscurcir la vérité, voire même la cacher, il importe que le juste – sauvé par la foi en Jésus-Christ – connaisse «les fondements» de la vérité divine.

Les lignes suivantes ne veulent être qu’un canevas de «la saine doctrine», telle que la Parole de Dieu nous la montre. Cet enseignement est à la fois christologique (Matth. 7, 28; 1 Cor. 2, 1-2) et apostolique (Act. 2, 42) ; il comprend l’ensemble des vérités divines.

I L’INSPIRATION VERBALE DE LA BIBLE

La pierre de touche de tout ce qui suit est la doctrine de l’inspiration des Ecritures. «Toute Ecriture est inspirée de Dieu» (2 Tim. 3, 16). Nous possédons aujourd’hui suffisamment de preuves, devant lesquelles tout homme sincère doit s’incliner. La Bible est la révélation de Dieu à l’égard de l’homme. Ce n’est pas un livre ecclésiastique quelconque, ni un ouvrage symbolique ou philosophique. C’est simplement «la Parole de Dieu» qui ne se laisse pas discuter. Des hommes de Dieu, poussés par l’Esprit, rédigèrent les 66 livres de cette divine Bibliothèque (2 Pi. 1, 21 ). Tout en gardant leur caractère et leur personnalité, ils furent de simples véhicules utilisés pour transmettre intégralement les pensées divines. C’est un miracle et un miracle ne s’explique pas. On peut l’accepter ou le rejeter; mais le fait est là.

Il LA TRINITÉ DE DIEU

Il en est de ce terme comme d’autres: la doctrine de la trinité de Dieu se trouve clairement révélée dans la Bible, bien que cette expression n’y soit pas mentionnée. Lucien déjà, rhéteur et philosophe grec du 2me siècle, fait confesser le chrétien dans son «Philopatris»: «le Dieu exalté …Fils du Père, Esprit procédant du Père, l’Un d’entre les Trois et Trois d’entre Un.» Le terme même fut employé formellement pour la première fois lors du synode en 317 à Alexandrie.

Cela ne signifie rien d’autres que tri-unité. La déité est une trinité, une unité qui possède 3 personnes distinctes ayant la même vie et la même essence.

L’ANCIEN TESTAMENT

Nous y voyons une révélation progressive qui trouve sa complète manifestation dans le Nouveau Testament. Des allusions claires et sans équivoques devaient ouvrir les yeux des personnes pieuses du temps du Seigneur.

Gen. 1,1: «Au commencement Dieu.» Ce terme «ELOHIM» est au pluriel et Moïse l’emploie quelque 500 fois. A remarquer qu’à chaque reprise le verbe qui l’accompagne est au singulier, ce qui prouve bien l’unité dans la pluralité des Personnes de la Déité.
Gen. 1,26: «Et Dieu dit: Faisons l’homme selon notre ressemblance»
Gen. 3, 22: «Voici l’homme est devenu comme l’un de nous»
Es. 48, 16: «Le Seigneur l’Eternel» – Dieu le Père
«m’a envoyé» – Dieu le Fils
«et son Esprit» -Dieu le Saint-Esprit
Zach. 12, 10: «Et je répandrai» -Dieu le Père
«un esprit de grâce» – Dieu le Saint-Esprit
«ils se lamenteront sur lui» -Dieu le Fils

LE NOUVEAU TESTAMENT

Il dévoile clairement cette vérité et nous confirme que la déité se compose de 3 Personnes: Dieu le Père, Dieu le Fils et Dieu le Saint- Esprit (Matth. 28, 19; Jean 1:1; Jean 5:3-4; Jean 8:54).

La trinité de Dieu est déjà engagée lors du baptême du Seigneur (Matth. 3, 13-17). On ne peut, à ce sujet, s’exprimer plus clairement que le Seigneur le faisait dans Jean 14:16-26: «Mais le Consolateur, l’Esprit-Saint (3ème Personne) que le Père (1ère Personne) enverra en mon nom (2ème Personne).»

La grande bénédiction apostolique nous laisse «la grâce du Seigneur Jésus-Christ», «l’amour de Dieu» et «la communion du Saint-Esprit» (2 Cor. 13, 13).

D’ailleurs, l’homme lui-même est une trinité composée de l’esprit, de l’âme et du corps. Il est attaqué par une autre trinité: le monde autour de lui, la chair en lui, et le diable au-dessous de lui. La loi du péché en lui est également représentée par une trinité:la convoitise de la chair, la convoitise des yeux et l’orgueil de la vie. Et, enfin, il peut être sauvé par la trinité divine: Dieu le Père, Dieu le Fils et Dieu le Saint-Esprit.

III JÉSUS-CHRIST

1. Sa Divinité

Jean 1, 1-3 suffirait pour établir cette vérité bénie:
Au commencement était la Parole» (le Verbe dans son existence éternelle)
cet la Parole était auprès de Dieu» (le Verbe dans son existence personnelle)
et la Parole était Dieu» (le Verbe dans son essence divine)

2. Son incarnation

Il est «Dieu manifesté en chair» (1 Tim. 3, 16). Ce mystère, dans lequel même les anges désirent plonger leurs regards, nous a été révélé. Les 7 degrés de son abnégation nous sont donnés en Phil. 2, 7-9. Aucune difficulté n’est inconnue du Seigneur qui a été tenté comme nous; Il peut donc nous accorder miséricorde et secours au moment opportun (Hébr. 4, 15-16). Ami qui souffres, confie-toi en Lui, car son nom est «Merveilleux».

3. Son CEuvre rédemptrice

Rom. 4, 25 dit: «Jésus, notre Sauveur, lequel a été livré pour nos fautes et a été ressuscité pour notre justification».
L’Ancien Testament y fait continuellement allusion (Ex. 12, Ps.22, Es.53).
Les Evangiles en sont la réalisation
Les Actes le proclament
Les Epîtres l’expliquent
L’Apocalypse, enfin, décrit la destruction de ceux qui ont rejeté cette oeuvre.

(à suivre)