Elisée et Naaman: le monde à l’envers

(2 Rois 5)

L’histoire de Naaman est connue. Un lépreux est guéri de sa maladie après s’être plongé dans le Jourdain. L’histoire est connue, mais est-elle bien connue? L’auteur de 1-2 Rois ne se contente pas de résumer l’événement en une phrase, mais y consacre tout un chapitre. De nombreux détails sont donnés. Une dizaine de personnages interviennent. Des portraits poignants s’en dégagent.

La narration est alerte, passionnante, souvent étonnante. Pourquoi guérir le général de l’armée ennemie? Pourquoi lui demander de se plonger sept fois dans le Jourdain? Pourquoi accepter le compromis de Naaman quand ce dernier demande au prophète la permission de se prosterner dans le temple d’une divinité païenne, après avoir révélé son intention d’adorer l’Eternel (v. 18-19)? Pourquoi punir si sévèrement Guéhazi d’une offense, semble- t-il, mineure (v.27)? Naaman, le général qui a ravagé la terre promise, est délivré de sa lèpre, alors que le plus proche collaborateur d’Elisée (et toute sa descendance avec lui) est puni pour toujours. C’est le monde à l’envers. Naaman, non seulement n’est pas puni pour ses méfaits passés (guerre contre Israël), mais il reçoit la guérison de sa lèpre, gratuitement de surcroît, et obtient d’avance l’acquittement de compromis futurs. De son côté, Guéhazi, peu récompensé pour ses services passés (son salaire lui semble modeste), est châtié, avec une sévérité extrême, pour avoir convoité un profit légitime (à ses yeux), un gain qui de surcroît ne privait personne puisqu’Elisée avait refusé le don et que Naaman était tout heureux d’offrir argent et vêtements.

La guérison de Naaman est un texte complexe dans lequel interviennent différents personnages. Pour en saisir toute la richesse, nous allons nous arrêter successivement sur Elisée, sur Naaman, sur Guéhazi, sur la jeune esclave juive et sur le roi d’Israël.

Elisée, le prophète

Elisée est le personnage principal. Son comportement peut être analysé par rapport au contexte immédiat, mais aussi par rapport à son ministère de prophète annonçant Jésus-Christ (Voir Promesses 122 « Elisée, le prophète des signes »).

Par rapport au contexte immédiat, la guérison de Naaman a pu produire les réactions les plus diverses. Secourir un étranger, un ennemi redouté de toute la nation, suscite non seulement l’interrogation, mais aussi le soupçon. Pourquoi Elisée a-t-il aidé ce général fortuné? N’y avait-t-il point de lépreux à guérir en Israël? Elisée serait-il un traître à la solde de l’ennemi? La surprise et la déception suscitées par la guérison du général syrien ont pu engendrer les accusations les plus osées dans le camp israélite.

Notons, cependant, que le roi d’Israël était au courant de la visite de Naaman à Elisée (v.8) et devait même souhaiter (sans trop y croire) une guérison du général pour éviter une nouvelle confrontation armée avec son belliqueux voisin du nord.

Ensuite, Elisée n’est pas homme à se laisser acheter. Dès la première visite, Elisée tient le Syrien à distance. Malgré le long voyage du dignitaire, le prophète lui répond par un simple domestique. Pourtant, les précautions sanitaires les plus sévères n’interdisaient pas de parler à un lépreux. Apparemment sans égard pour son notable voyageur ni pour les lois sacrées de l’hospitalité, Elisée le renvoie loin de lui. L’étranger doit aller jusqu’au Jourdain, situé à plus d’une journée de marche de la capitale. Si Elisée n’avait jamais voulu revoir Naaman, il n’aurait pas agi autrement.

Voilà le point crucial. Elisée décourage Naaman de revenir vers lui une fois la guérison obtenue, car il ne veut rien recevoir pour l’intervention miraculeuse. Le Jourdain est choisi comme lieu du miracle, parce que le fleuve se trouve sur le chemin de retour de Naaman, à plus de 50 kilomètres de Samarie. Une fois guéri, le Syrien n’aura qu’à poursuivre la route pour rentrer chez lui. La manière expéditive de traiter le malade provoque une aigreur qui devrait le décourager de revenir vers Elisée. Elisée veut offrir la guérison comme un don total. Quand malgré tout Naaman revient reconnaissant vers lui, le prophète refuse tout cadeau: « L’Eternel, dont je suis le serviteur, est vivant! je n’accepterai pas. Naaman le pressa d’accepter, mais il refusa» (v. 16). La formule est solennelle pour ne laisser aucun doute sur ses intentions réelles. Malgré toute l’insistance du général, Elisée ne se laisse pas fléchir. Il n’y a pas l’ombre d’un esprit mercantile chez le prophète.

Elisée n’exploite même pas la guérison du général pour améliorer la relation avec la Syrie ou pour marchander la libération de quelques prisonniers de guerre. Quand Naaman exprime son désir d’adorer l’Eternel en Syrie, aucun témoignage public ne lui est imposé (v.17-19). Au contraire, Elisée accepte que ce témoignage se fasse discrètement. La terre demandée, sur laquelle Naaman s’agenouillera lorsqu’il s’inclinera dans le temple de Rimmon, sera le signe d’une adoration réelle, mais privée.

La guérison offerte par Elisée est gratuite du début à la fin. Elle annonce le salut gratuit accordé par Jésus-Christ: « Car c’est par la grâce que vous êtes sauvés, par le moyen de la foi. Et cela ne vient pas de vous, c’est le don de Dieu. Ce n’est point par les ouvres, afin que personne ne se glorifie » (Eph 2.8-9).

La guérison de Naaman annonce aussi l’ouverture des païens au ministère de la grâce, comme le souligne Jésus: « II y avait aussi plusieurs lépreux en Israël du temps d’Elisée, le prophète; et cependant aucun d’eux ne fut purifié, si ce n’est Naaman le Syrien » (Lc 4.27).

La manière dont la guérison s’effectue annonce un salut unique. Naaman devait se plonger sept fois dans le Jourdain. La condition était simple et précise. Aucun autre moyen ne convenait: ni la main du prophète, ni d’autres fleuves, ni un nombre différent de lavements. Pour Naaman, les fleuves de Damas semblaient mieux qualifiés pour la purification, car leurs eaux sont claires et viennent des montagnes enneigées, alors que le Jourdain, limpide à la sortie du lac de Galilée, ne tarde pas à se troubler et à prendre une couleur brun-sale qui provient de la nature de son lit. La logique du général risque de le perdre, car il oublie ou ignore que les voies de Dieu sont souvent folies pour les hommes. Le Jourdain était la seule voie pour la purification de Naaman, tout comme Jésus est le seul chemin pour mener à Dieu (« Je suis le chemin, la vérité, et la vie. Nul ne vient au Père que par moi », Jn 14.6). Comme le Jourdain, Christ n’a pas non plus attiré les regards (cf. Es 53: il a plu à Dieu de briser son oint pour que, par lui, nous ayons la rédemption de nos fautes). Le salut est simple, mais il n’est pas sans contenu. Ce n’est pas la foi qui sauve, mais la foi en Christ. Jésus est mort sur la croix pour nos péchés. Comme le dit Paul, « la prédication de la croix est une folie pour ceux qui périssent, mais pour nous qui sommes sauvés, elle est une puissance de Dieu » (1 Cor 1.18).

La bénédiction accordée à Naaman de vivre sa foi d’une manière particulière (s’agenouiller dans le temple de Rimmon, mais sur la terre d’Israël) n’est pas un encouragement au compromis (comme certains le comprennent, mais une annonce que la foi des païens sauvés par l’Eternel se vivra différemment qu’en Israël. Les lois alimentaires, les fêtes solennelles, les rituels de purification, les innombrables sacrifices d’animaux ne seront pas imposés aux non-Juifs. Le croyant d’origine juive pourrait comprendre cette liberté du croyant d’origine païenne comme un compromis aux lois divines. Il n’en est rien. « Va en paix » dit Elisée à Naaman (v.19). « Mangez de tout ce qui se vend sur le marché » dit Paul aux croyants de la nouvelle alliance (1 Cor 10.25). Le chrétien est dans le monde sans être du monde.

Le jugement de Guéhazi annonce les conséquences terribles qui attendent celui qui rejette le salut par la grâce. Le salut n’est pas fondamentalement une question de nationalité ou d’éducation, mais de foi. Guéhazi est Juif et a pu bénéficier de l’enseignement d’Elisée, alors que Naaman est païen et n’a qu’une vague connaissance de Dieu. Pourtant, c’est Naaman qui accepte le don divin, alors que Guéhazi le refuse à autrui. Si la descendance de Guéhazi est punie (« La lèpre de Naaman s’attachera à toi et à ta postérité pour toujours » v.27), c’est pour annoncer un jugement analogue sur tous ceux qui font spirituellement partie de la famille de Guéhazi.

Par ce jugement, notre texte complète le récit de la Sunamite, car en 2 Rois 4, la foi de la femme avait conduit à la guérison d’une maladie génétique de son fils (voir Promesses 123 « Elisée et la Sunamite »), alors qu’en 2 Rois 5, l’endurcissement de Guéhazi donne naissance à un lien héréditaire qui conduit à la misère. En termes théologiques, nous sommes héritiers soit d’Adam, soit de Christ.

Naaman, le Syrien

Naaman est un homme d’honneur prêt à payer son dû. La quantité de cadeaux emportés montre clairement que le général ne se rend pas en Israël en conquérant, mais en homme nécessiteux prêt à récompenser généreusement son bienfaiteur. L’argent seul représente cinq fois le montant qu’Achab a payé pour l’emplacement de Samarie (2 Rois 16.24). Lorsqu’Elisée l’envoie au Jourdain pour se purifier, Naaman ne profite pas de son éloignement du prophète pour rentrer directement chez lui sans remercier son sauveur (cf. Lc 17.11-18: parmi les dix lépreux guéris par Jésus, seul un Samaritain – un étranger – était revenu témoigner sa reconnaissance). Plus tard, quand Guéhazi lui demande de l’aide, Naaman offre immédiatement le double de ce qui est demandé (v.23).

Naaman veut aussi honorer l’Eternel, car il a compris que le prophète n’est qu’un intermédiaire. Il a compris aussi l’utilisation du symbolisme. Si le Jourdain représente l’Eternel, la terre d’Israël peut aussi le représenter. Aucune pensée magique dans tout cela, mais une foi dans le Dieu qui s’est révélé à Israël. Sa demande de prier l’Eternel dans le temple de Rimmon ne reflète aucun compromis spirituel. Elisée ne lui avait rien demandé et ne lui avait transmis aucun enseignement sur la manière de vivre sa foi en terre païenne, loin de toute communauté de fidèles. Toute la réflexion est initiée par Naaman qui veut sincèrement servir l’Eternel, mais sans savoir jusqu’où il doit aller: Il réalise que sa nouvelle foi peut lui coûter la vie. Il est prêt à tout. En posant la question à Elisée, il prend le risque d’un refus. Si l’Eternel lui demande de couper tous les ponts avec sa culture, il le fera. Elisée lui répond de manière surprenante: « Va en paix ». La foi en territoire païen sera vécue différemment qu’en territoire juif. Alors même que le moyen de venir au salut est unique (Naaman devait se plonger dans le Jourdain sept fois), l’adoration au quotidien trouve des expressions diverses dont le dénominateur commun est un engagement total. La manière de vivre cette foi dans les situations les plus diverses ne nous est pas donnée. Ce texte ouvre une porte que certains aimeraient voir fermée, mais dans le domaine de la foi tout n’est pas légiféré. Certaines choses le sont et doivent être respectées à la lettre. D’autres sont laissées à notre appréciation individuelle. Comme Jésus l’a dit à la Samaritaine, ce n’est pas le lieu géographique qui compte en premier pour l’adoration, mais l’esprit dans lequel se fait cette adoration (Jn 4.19-24).

Naaman est aussi un homme qui sait écouter les plus petits que soi. Le témoignage de la jeune esclave est écouté, tout comme l’exhortation de ses serviteurs. Naaman, certes, a été refroidi par l’accueil glacial du prophète (et c’est bien ce qu’Elisée avait cherché à faire), mais Naaman ne campe pas sur ses désillusions. Ses a priori sur la manière dont la guérison devait se dérouler (v.l1) ne sont pas inébranlables. L’homme a un esprit ouvert. Quand il quitte Elisée, déçu et fâché, il est assez humble pour écouter ses serviteurs et se remettre en question. Plus tard, quand il découvre la grandeur de l’Eternel, il cherche sincèrement à la suivre et ne demande qu’à être instruit.

Guéhazi, le serviteur

Guéhazi se situe à l’opposé de Naaman. Face à face, nous avons un Juif et un Syrien, un subalterne et un général, un homme instruit dans les choses divines et un païen dépourvu de révélation spéciale, un pauvre cupide et un riche généreux. Naaman marche de progrès en progrès (il est guéri d’abord, puis découvre la foi et s’y engage), alors que Guéhazi dérape davantage à chaque pas (il critique silencieusement son maître [v.20], trompe Naaman et ternit l’image du prophète [22], puis ment directement à Elisée [26] qui entrevoit déjà les prochains délits et en souligne la progression: « Est-ce le temps de prendre de l’argent et de prendre des vêtements, puis des oliviers, des vignes, des brebis, des boufs, des serviteurs et des servantes? » v.26). Quand Guéhazi apparaît sur scène au verset 20, les lecteurs sont encore sous le choc de la réponse d’Elisée à Naaman (« Va en paix » v.19). Alors qu’ils questionnent la sagesse d’une telle réponse, Guéhazi critique son maître d’avoir « ménagé Naaman » (v.20), non par rapport à la liberté accordée à Naaman, mais pour ne pas avoir accepté d’argent du Syrien. Alors que les lecteurs s’interrogent sur l’engagement spirituel de Naaman et le respect de l’honneur divin, Guéhazi est préoccupé de lui-même et de son bien-être matériel.

Humainement, le raisonnement de Guéhazi se tient. Pourquoi ménager ce riche étranger ennemi de la nation? Tout pousse à dépouiller Naaman: la cupidité, la xénophobie, la rancune. Mais une fois encore, la voie de Dieu n’est pas celle des hommes.

Guéhazi, aveuglé par les pensées humaines, croit pouvoir échapper au regard du prophète. Il pense pouvoir rejoindre Naaman incognito. Se rappelle-t-il la confession d’Elisée lorsque la Sunamite leur avait rendu visite suite au décès de son fils? Elisée avait alors affirmé ignorer la raison de sa venue (2 Rois 4.27). Mais Guéhazi se trompe, car il confond l’ exception avec la règle. Elisée est doué d’un discernement exceptionnel. Non seulement perce-t-il immédiatement le mensonge, mais il annonce déjà les égarements futurs (v.26). Ayant placé Mammon à la première place, Guéhazi dépouillera toujours plus son prochain.

Guéhazi est jugé sévèrement, car sous une apparence de piété, le serviteur d’Elisée bafoue la foi véritable. Ayant convoité les biens de Naaman, Guéhazi devient comme le païen et hérite sa lèpre.

La jeune esclave juive et le roi d’Israël

Il nous reste à porter un regard sur deux personnages secondaires: l’esclave juive et le roi d’Israël. Le comportement de la jeune captive est particulièrement intéressant. Malgré une situation dramatique, elle témoigne d’une foi remarquable. Là où d’autres douteraient de la toute puissance de l’Eternel, elle manifeste une assurance étonnante. L’Eternel, par son prophète Elisée, peut sauver ceux qui se confient en lui. Mais plus que sa foi, c’est son discernement spirituel et son amour pour son prochain qui étonnent. La jeune fille croit que Dieu peut faire du bien aux étrangers, même à ceux qui oppriment Israël. « Elle dit à sa maîtresse: Oh! si mon seigneur était auprès du prophète qui est à Samarie, le prophète le guérirait de sa lèpre! » (v.3). La jeune fille partage son espérance avec sa maîtresse pour donner à Naaman la possibilité de guérir. L’esclave cherche le bien de son prochain, même de celui qui la retient prisonnière.

La foi et le comportement de la fille sont remarquables et sont en avance sur son temps. Elle est animée d’un amour désintéressé qui tranche avec l’égoïsme de Guéhazi. Même si Naaman a certainement récompensé la jeune fille à son retour – peut-être lui a-t-il même rendu la liberté, car l’homme est généreux -, le narrateur n’en dit rien, car son intérêt est ailleurs, et peut-être aussi peut-il ainsi mieux souligner l’amour gratuit de la jeune femme.

Quant au roi d’Israël, il manque totalement de discernement. Il oublie Elisée qui réside pourtant dans la même ville que lui et interprète mal l’action des Syriens au point de risquer un conflit militaire (v.7). Le contraste entre le roi et la jeune fille est frappant. D’un côté, une adolescente captive pleine de discernement et animée d’une foi vivante (elle n’a pas oublié Elisée), de l’autre, un monarque oublieux et dépourvu du bon sens élémentaire.

Les contrastes entre Naaman et Guéhazi ou entre la jeune fille et le roi d’Israël accentuent les leçons spirituelles de ce récit. Quand les païens deviennent croyants et les Hébreux instruits s’éloignent du Seigneur, quand les petits discernent correctement et donnent la leçon aux grands, le monde bascule. Le récit de Naaman reflète un monde à l’envers. Fondamentalement, il annonce les chamboulements caractéristiques de la période néo-testamentaire.

les articles plus lus

En présentant le premier numero de PROMESSES

à nos frères en la foi, nous pensons bien faire d’exposer les principes qui seront à la base de ce «Cahier d’études bibliques».

Nous chercherons à être utiles à tous, à l’église de Dieu d’abord, c’est-à-dire au Chef de l’église, Christ, mais aussi à ceux pour qui la Parole est précieuse, à ceux qui désirent étudier et obéir.

Les bulletins, feuilles de renseignements, journaux mensuels ou trimestriels foisonnent. Tous, ou presque, apportent des nouvelles missionnaires ou d’évangélisation. Ce qu’on recherche ici est beaucoup plus un cahier comportant exclusivement des études bibliques ou se rapportant spécifiquement à la Parole.

La plupart des assemblées de «frères» issues du mouvement datant des années 20-30 du siècle écoulé semblent vivre au ralenti, l’esprit missionnaire mis à part. Comme dans tout mouvement, certaines vérités ont été poussées en «épingle», d’autres ont été négligées; des intérêts particuliers ont pris le pas sur les valeurs spirituelles. Nous assistons à un rétrécissement sérieux de l’influence, de l’action que devraient avoir des églises de foi, c’est-à-dire formées d’enfants de Dieu véritables, scellés par l’Esprit de Dieu.

En toute humilité, nous désirons demander au Seigneur sa lumière, afin de marcher selon sa grâce, en fidélité, devant sa face. Nous ne saurions prétendre connaître tout ce que Dieu veut pour les siens et son église, mais notre désir est d’apporter ce qui, aujourd’hui, est utile pour l’édification et la consolation de nombreux enfants de Dieu. Précisons que nous ne voudrions pas représenter un point de vue particulier, mais étudier la Parole, en respectant la sainteté de Dieu.

Chaque étude signée restera sous la responsabilité de son auteur. L’enseignement de ces pages semble devoir être d’une étendue qui surprendra peut-être. Notre désir est, à la fois, de présenter des études fouillées pour le chrétien avancé, mais aussi des explications de termes, de langage, pour ceux qui ne connaissent pas notre langue d’une manière approfondie.

A titre d’essai, nous ferons parvenir un certain nombre d’exemplaires au monde francophone d’outre-mer. Il faudra ainsi tenir compte de ce champ de diffusion.

De divers côtés, sinon dans nos vieux pays, on demande, en effet, une littérature chrétienne plus abondante, basée sur la Bible, la Parole de Dieu. Quelques-uns d’entre nous ont cru devoir répondre à ce désir. Nous plaçons ces cahiers sous le regard du «Chef», demandant à Dieu sa bénédiction pour rendre témoignage à la Vérité.

Les éditeurs

Où nous mène la formidable évolution qui soulève le monde chrétien tout entier? En cette période d’après le Concile du Vatican Il, il est utile de dresser un bilan des faits, même provisoire, et de procéder à un tour d’horizon général.

Eléments positifs de l’évolution catholique: Incontestablement, des mouvements intéressants se font sentir dans l’Eglise romaine: étude et diffusion de la Bible en voie de développement, dialogue engagé avec les autres confessions, reconnaissance du fait que les communautés des «frères séparés» protestants peuvent porter le titre d’églises, admission d’une part de responsabilité dans la rupture du XVIe siècle. Au cours du Concile du Vatican Il, l’opinion a été exprimée à maintes reprises que l’Eglise catholique avait besoin d’un renouveau si elle voulait réellement entreprendre le dialogue avec les églises non-romaines. Il y eut des discussions très libres, suivies de votes positifs impressionnants, par exemple sur la collégialité des évêques gouvernant l’Eglise avec le pape, l’usage de la langue vulgaire dans le culte, l’oecuménisme, la liberté religieuse, la limitation des naissances, le peuple juif, l’Ecriture Sainte et la Tradition, etc.

Fin décevante de Vatican Il: Rappelons quelques faits justifiant cette impression de l’ensemble des observateurs non catholiques.

La collégialité des évêques doit être entendue de telle manière que la primauté du pape demeure intacte. La structure monarchique de l’Eglise romaine n’en sera pas affectée, le pape reste le souverain absolu. Le collège épiscopal n’a aucune autorité sans ce dernier. Paul VI, dans son discours d’ouverture à la troisième session, ne s’en est pas référé moins de sept fois à sa primauté, et le mot-clé qu’il a constamment utilisé était celui de «hiérarchie sacrée». Le pasteur G. Richard-Molard estime qu’un tel discours «ne peut guère qu’hérisser la plupart des chrétiens non catholiques romains» («Messager Social», 10 déc.; S. CE- P. I., 1er oct.; 24 sept. 1964).

Il est clair, selon le même pasteur, «que l’Eglise catholique est toujours placée sous l’unique pouvoir de l’Eglise romaine. Or, il ne s’agit pas là d’une découverte de La Palice, mais d’une situation, chaque jour plus insupportable pour les catholiques eux-mêmes. Cette direction totalitaire italienne, ou pire encore, romanisée, possède encore tous les leviers de commande» («Christianisme au XXe siècle», 29 oct. 1964). Cela n’empêche pas qu’une seconde force «se manifeste par l’esprit nouveau qui anime une partie toujours plus large du catholicisme non italien. Il ne faut pas s’imaginer que cet esprit ait changé en quoi que ce soit la masse, mais il passe sur quelques centaines d’évêques, sur de nombreux prêtres et sur une élite de laïcs» (ibid.).

La Vierge Marie a été proclamée Mère de l’Eglise, sans l’avis des pères conciliaires, par Paul VI, qui lui a consacré la moitié de son discours de clôture {cf. «Chrétien Evangélique», déc. 1964, p. 5). Cette proclamation «a détruit tous les efforts des pères conciliaires qui. .. s’étaient ingéniés à éviter autant que possible les déclarations de nature à. ..donner de l’extension au dogme marial et à choquer les protestants» {«Christ U. Welt», cité par S. CE. P. I., 3 déc. 1964).

Le 11 octobre 1963, le pape a terminé une allocution aux pères du Concile et aux fidèles par cette prière à la Sainte Vierge: «O Marie, nous vous prions pour nos frères encore séparés de notre famille catholique. Voyez comment, parmi eux, une phalange glorieuse célèbre votre culte avec fidélité et amour. Voyez comment parmi d’autres, si résolus à se dire chrétiens, commence à renaître aujourd’hui votre souvenir et votre culte, ô Vierge très bonne. Appelez avec nous tous ces fils, qui sont vôtres, à la même unité sous votre protection maternelle et céleste» («Documentation Catholique», 3 novembre 1963).

Le cardinal Doepfner, de Munich, dont les interventions au Concile ont été souvent remarquées, vient de déclarer à son tour: «Amoindrir dans l’Eglise le culte de la Vierge Marie serait un malentendu et une mauvaise interprétation des enseignements du Concile. ..Nous voulons approfondir et enraciner encore plus fort dans ce mystère du Christ le riche héritage laissé à l’Eglise par la Vierge Marie. Elle a un grand rôle à jouer dans l’Eglise, qui voit en elle son image originelle» {«Figaro», 28 déc. 1964).

Le dogme romain: Dans son livre récent sur l’Unité, le cardinal Béa répète des dizaines de fois: 1°) que l’enseignement romain, étant infaillible, ne saurait subir dans son essence aucune modification; 2°) que l’Eglise catholique étant la seule vraie Eglise du Christ, l’unité finale ne peut être envisagée que par le retour de tous les baptisés orthodoxes et protestants au bercail du successeur de saint Pierre. Ce caractère intangible du dogme catholique n’a cessé d’être proclamé clairement par Jean XXIII, Paul VI et tous les porte-parole de Rome. Le professeur E. Schlink, observateur de l’Eglise Evangélique d’Allemagne à Vatican Il, après avoir noté que les délibérations conciliaires sont « révolutionnaires» pour l’Eglise romaine, ajoute: «Aucune des resolutions jusqu’ici adoptées n’a «rapporté, modifié ou même réinterprété de manière satisfaisante un seul des dogmes qui divisent la chrétienté » (S. CE. P. I., 17 déc.1964).

Cela n’a pas empêché le professeur de théologie protestant O. Cullmann de déclarer que Vatican Il «n’a fermé aucune porte ». Dans une interview accordée au journal «Le Monde », M. Cullmann reconnaît que les textes élaborés au Concile sont décevants, car la plupart sont des textes de compromis. Le Concile actuel est lié par celui du Vatican I (en 1870, où fut proclamée l’infallibilité pontificale), et par les dogmes mariaux antérieurs, inchangeables eux aussi. Mais il ajoute: «Je ne partage pas le pessimisme de certains qui s’exprime dans ce slogan: «II ne sortira rien de ce Concile! » Tous les textes sont formulés de telle sorte qu’aucune porte n’est fermée, et qu’ils ne seront pas un obstacle à la future discussion entre catholiques ni au dialogue avec les non-catholiques, comme le sont les décisions des Conciles antérieurs » (cité par «Vie Protestante », 23 oct. 1964). -Puisque les dogmes romains sont infaillibles (voir les anathèmes du Concile de Trente), on se demande sur quoi porte la discussion. ..Si la porte n’est pas fermée, elle ne l’est qu’à sens unique et ne nous paraît conduire qu’au bercail de saint Pierre.

(à suivre)
Extrait avec autorisation du périodique «Le Chrétien évangélique »

(2 Tim.1, 7-9)

«Dieu ne nous a pas donné un esprit de timidité, mais de force, d’amour e! de prudence.»

Timide = qui manque de hardiesse et d’assurance, dit le dictionnaire. Dieu, en vue du but qu’il s’est proposé, nous a adressé une «VOCATION SAINTE», et pour cette vocation, il nous revêt:

de force – par quoi nous devons comprendre force de caractère, maîtrise de soi, tranquillité d’esprit, toutes choses qui sont contraires à la timidité. Une stabilité nouvelle, créée par le Saint-Esprit de Dieu qui nous donne l’assurance du salut; un contrôle de soi-même qui peut ne pas être naturel, mais qui est le résultat du travail de cet Esprit.

d’amour – de compréhension, de compassion, de pardon, amour qui n’est pas mollesse, ni faiblesse, mais qui prend part aux malheurs du prochain, qui comprend le pécheur et repousse le péché.

de prudence – mieux encore discipline personnelle, d’intelligence avertie, de jugement balancé, nuancé, sans laisser-aller.

Etes-vous craintif de nature, manquez-vous d’assurance, avez-vous ce qu’on appelle un complexe d’infériorité, craignez-vous de vous affirmer? Lisez les lettres à Timothée. C’était un timide de nature, et l’apôtre l’encouragea. Notez ceci: Dieu DONNE UN AUTRE ESPRIT que celui que vous aviez précédemment. Il donne gratuitement. Alors, demandez, priez. Il vous DONNERA.

Le but de nos études est de faire connaître et comprendre (Ps. 82, 5) les pensées de Dieu révélées dans sa Parole, afin de vivre dans la lumière. Dans un monde où Satan règne pour obscurcir la vérité, voire même la cacher, il importe que le juste – sauvé par la foi en Jésus-Christ – connaisse «les fondements» de la vérité divine.

Les lignes suivantes ne veulent être qu’un canevas de «la saine doctrine», telle que la Parole de Dieu nous la montre. Cet enseignement est à la fois christologique (Matth. 7, 28; 1 Cor. 2, 1-2) et apostolique (Act. 2, 42) ; il comprend l’ensemble des vérités divines.

I L’INSPIRATION VERBALE DE LA BIBLE

La pierre de touche de tout ce qui suit est la doctrine de l’inspiration des Ecritures. «Toute Ecriture est inspirée de Dieu» (2 Tim. 3, 16). Nous possédons aujourd’hui suffisamment de preuves, devant lesquelles tout homme sincère doit s’incliner. La Bible est la révélation de Dieu à l’égard de l’homme. Ce n’est pas un livre ecclésiastique quelconque, ni un ouvrage symbolique ou philosophique. C’est simplement «la Parole de Dieu» qui ne se laisse pas discuter. Des hommes de Dieu, poussés par l’Esprit, rédigèrent les 66 livres de cette divine Bibliothèque (2 Pi. 1, 21 ). Tout en gardant leur caractère et leur personnalité, ils furent de simples véhicules utilisés pour transmettre intégralement les pensées divines. C’est un miracle et un miracle ne s’explique pas. On peut l’accepter ou le rejeter; mais le fait est là.

Il LA TRINITÉ DE DIEU

Il en est de ce terme comme d’autres: la doctrine de la trinité de Dieu se trouve clairement révélée dans la Bible, bien que cette expression n’y soit pas mentionnée. Lucien déjà, rhéteur et philosophe grec du 2me siècle, fait confesser le chrétien dans son «Philopatris»: «le Dieu exalté …Fils du Père, Esprit procédant du Père, l’Un d’entre les Trois et Trois d’entre Un.» Le terme même fut employé formellement pour la première fois lors du synode en 317 à Alexandrie.

Cela ne signifie rien d’autres que tri-unité. La déité est une trinité, une unité qui possède 3 personnes distinctes ayant la même vie et la même essence.

L’ANCIEN TESTAMENT

Nous y voyons une révélation progressive qui trouve sa complète manifestation dans le Nouveau Testament. Des allusions claires et sans équivoques devaient ouvrir les yeux des personnes pieuses du temps du Seigneur.

Gen. 1,1: «Au commencement Dieu.» Ce terme «ELOHIM» est au pluriel et Moïse l’emploie quelque 500 fois. A remarquer qu’à chaque reprise le verbe qui l’accompagne est au singulier, ce qui prouve bien l’unité dans la pluralité des Personnes de la Déité.
Gen. 1,26: «Et Dieu dit: Faisons l’homme selon notre ressemblance»
Gen. 3, 22: «Voici l’homme est devenu comme l’un de nous»
Es. 48, 16: «Le Seigneur l’Eternel» – Dieu le Père
«m’a envoyé» – Dieu le Fils
«et son Esprit» -Dieu le Saint-Esprit
Zach. 12, 10: «Et je répandrai» -Dieu le Père
«un esprit de grâce» – Dieu le Saint-Esprit
«ils se lamenteront sur lui» -Dieu le Fils

LE NOUVEAU TESTAMENT

Il dévoile clairement cette vérité et nous confirme que la déité se compose de 3 Personnes: Dieu le Père, Dieu le Fils et Dieu le Saint- Esprit (Matth. 28, 19; Jean 1:1; Jean 5:3-4; Jean 8:54).

La trinité de Dieu est déjà engagée lors du baptême du Seigneur (Matth. 3, 13-17). On ne peut, à ce sujet, s’exprimer plus clairement que le Seigneur le faisait dans Jean 14:16-26: «Mais le Consolateur, l’Esprit-Saint (3ème Personne) que le Père (1ère Personne) enverra en mon nom (2ème Personne).»

La grande bénédiction apostolique nous laisse «la grâce du Seigneur Jésus-Christ», «l’amour de Dieu» et «la communion du Saint-Esprit» (2 Cor. 13, 13).

D’ailleurs, l’homme lui-même est une trinité composée de l’esprit, de l’âme et du corps. Il est attaqué par une autre trinité: le monde autour de lui, la chair en lui, et le diable au-dessous de lui. La loi du péché en lui est également représentée par une trinité:la convoitise de la chair, la convoitise des yeux et l’orgueil de la vie. Et, enfin, il peut être sauvé par la trinité divine: Dieu le Père, Dieu le Fils et Dieu le Saint-Esprit.

III JÉSUS-CHRIST

1. Sa Divinité

Jean 1, 1-3 suffirait pour établir cette vérité bénie:
Au commencement était la Parole» (le Verbe dans son existence éternelle)
cet la Parole était auprès de Dieu» (le Verbe dans son existence personnelle)
et la Parole était Dieu» (le Verbe dans son essence divine)

2. Son incarnation

Il est «Dieu manifesté en chair» (1 Tim. 3, 16). Ce mystère, dans lequel même les anges désirent plonger leurs regards, nous a été révélé. Les 7 degrés de son abnégation nous sont donnés en Phil. 2, 7-9. Aucune difficulté n’est inconnue du Seigneur qui a été tenté comme nous; Il peut donc nous accorder miséricorde et secours au moment opportun (Hébr. 4, 15-16). Ami qui souffres, confie-toi en Lui, car son nom est «Merveilleux».

3. Son CEuvre rédemptrice

Rom. 4, 25 dit: «Jésus, notre Sauveur, lequel a été livré pour nos fautes et a été ressuscité pour notre justification».
L’Ancien Testament y fait continuellement allusion (Ex. 12, Ps.22, Es.53).
Les Evangiles en sont la réalisation
Les Actes le proclament
Les Epîtres l’expliquent
L’Apocalypse, enfin, décrit la destruction de ceux qui ont rejeté cette oeuvre.

(à suivre)