Débora: Le salut par les femmes

ETUDE DANS L’ANCIEN TESTAMENT

Rôle central de deux femmes, action discrète du juge, répétition du récit sous forme poétique, telles sont les particularités du troisième cycle des juges.

Rappelons que l’auteur des Juges expose trois siècles d’histoire au travers de différents cycles d’oppression/libération. Fixées à sept (le nombre de la plénitude), chaque scène complète le tableau par quelques touches. L’apport constant d’éléments nouveaux maintient l’intérêt du lecteur et enrichit la compréhension globale de cette période. Le rythme de la narration, de tumultueux (5 versets pour le cycle d’Othniel: Jug 3.7-11) et soutenu (19 versets pour le cycle d’Ehud :Jug3.l2- 30), devient calme avec Débora (55 versets: Jug 4-5). Le torrent initial se transforme en rivière de plaine, avec un méandre même, puisque l’auteur s’arrêtera pour reprendre une deuxième fois, mais sous forme poétique (chapitre 5), le récit de Débora.

Débora à la tête de l’Etat

Une femme juge. Voilà de quoi surprendre. Si on exclut l’abominable reine Athalie salie à jamais par son acharnement à détruire la lignée messianique pour usurper le trône royal (2 Rois 11.1-16), la situation de Débora est unique. Elle est la seule femme, dans les Ecritures a avoir été un leader politique. Lorsqu’on est sensible aux innombrables enseignements bibliques sur les rôles respectifs de 1’homme et de la femme, la position de Débora à la tête de la nation, ne peut que refléter un malaise profond. La situation est anormale, les équilibres brisés, l’harmonie rompue. Péché il y a, mais à qui la faute: usurpation féminine ou irresponsabilité masculine ?

Aucun doute n’est permis : Débora est exempte de tout blâme. A l’opposé d’une militante d’un mouvement féministe, aucune contestation des rôles ne se manifeste chez la femme de Lappidoth. Chef de la nation, elle ne cherche aucune gloire personnelle. Devant une victoire décisive et assurée (Dieu est de nouveau avec Israël), elle préfère s’effacer et appeler un homme (Barak) pour prendre le commandement des forces armées, consciente que la gloire rejaillira sur le vainqueur.

Mais voilà: Barak l’appelé, hésite. Indigne de la gloire du héros (Barak n’est pas une «baraque» ), il devra laisser les honneurs du champion à quelqu’un d’autre, à une personne animée d’une foi exemplaire: en l’occurence une autre femme (Jaël). Bien qu’étant le meilleur des hommes de sa génération (Débora ne l’a-t-elle pas choisi ? N’est-il pas le seul homme cité en exemple au chapitre 5 ?), Barak est frappé du mal rongeant la gent masculine de son époque hésitation, tergiversation, vacillation, flottement, tâtonnement, renoncement. La lâcheté masculine pousse Débora «à porter les pantalons». Aucune usurpation, simplement un vide à remplir, temporairement, puisque à tous moments elle est prête à s’effacer.

En plus de l’effort pour passer le flambeau à Barak, l’auteur relève l’attitude humble du juge de deux manières. La femme de Lappidoth siège sous un palmier (Jug 4.5). En indiquant que Débora ne juge pas à découvert, l’auteur veut-il symboliser la soumission de cette femme à Dieu ? D’autre part, l’auteur consacre peu de place à Débora, comme pour marquer l’ effacement volontaire de cette femme. Contrairement à Ehud, vers qui tous les regards convergeaient, Débora agit dans les coulisses, et si elle est contrainte à faire une apparition publique, ce n’est que l’instant d’un éclair, à l’image d’ailleurs de cet orage imprévu (Jug 5.4, 21) qui s’est abattu sur le champ de bataille.

Un rapprochement entre les deux moyens de libération envoyés par l’Eternel (une femme juge et l’orage estival) mérite un bref arrêt. Dans les deux cas le libérateur est inhabituel: une femme juge; un orage hors saison. Dans les deux cas le libérateur agit avec rapidité: Débora n’apparaît sur scène que l’espace de deux paroles; l’orage surprend les troupes ennemies par sa soudaineté. Enfin, les deux libérateurs symbolisent la bénédiction par la fertilité: une épouse probablement mère de famille; l’eau en abonqance à un moment où l’on en manque le plus.

Une deuxième héroïne

Comme pour confirmer l’attitude exemplaire de Débora, une deuxième femme s’élève au-dessus de la mêlée. La notion de dualité dans la pensée hébraïque est fondamentale. La répétition indique l’emphase, la solennité, l’assurance, la certitude. Les en vérité, en vérité ou saint, saint, saint nous sont familiers. Dans le domaine juridique, un double témoignage était nécessaire avant toute condamnation. Le courage d’une deuxième femme dans un contexte de faiblesse masculine, confirme les propos sur Débora et Barak. Ces personnes représentent plus que des individus particuliers; ils reflètent deux tendances: les forts par nature (les hommes) sont lâches, alors que les faibles (les femmes) sont fermes. C’est sur deux héroïnes que Dieu peut s’appuyer pour sauver le peuple. Gloire aux femmes, honte aux hommes!

Quelques traits de plume suffiront à notre écrivain pour situer l’arrière-plan de la deuxième femme: Jaël est l’épouse de Héber le Kénien. L’information doit être d’importance, puisque l’auteur nous la donne deux fois (4.17; 5.24). Descendants du beau-père de Moïse, les Kéniens s’étaient intégrés au peuple élu. Maheureusement, le mari deJaël – détaché de son clan (Jug 4.11 ), mais lié avec un roi païen (Jug 4.17) – semble avoir fait marche arrière. Les relations entre Héber et Israël se sont refroidies. Dans un temps de tiédeur spirituelle pour Israël, Jaël est l’une des dernières à rester bouillante pour l’Eternel. Comme Débora, elle «portera les pantalons» l’espace d’un instant, le temps d’un coup de marteau. Pour remplir le vide créé par l’effacement masculin, démunie de toute arme, elle saisit pieu et marteau pour clouer au sol Sisera, le général cananéen.

Par son engagement, Jaël rappelle aussi Ehud, le deuxième juge (Jug 3.12-30). Les différences sont minimes. Qu’il s’agisse d’un homme haut placé (Ehud) ou d’une femme insignifiante (Jaël), d’une épée enfoncée à l’horizontale dans le corps du roi Eglon ou d’un pieu martelé à la verticale dans la tête du général Sisera, d’une visite dans la ville fortifiée de l’ennemi ou d’une invitation dans la tente vulnérable d’une fidèle, les paramètres majeurs sont les mêmes: un combat solitaire, des paroles séductrices pour endormir la méfiance de l’oppresseur, un coup décisif et mortel porté au chef ennemi. Si l’auteur s’était limité à suggérer la fidélité d’Ehud (voir étude sur «Ehud : la fidélité au zénith» ), il proclame haut et fort le comportement irréprochable de Jaël : Bénie soit entre les femmes Jaël, femme de Héber, le Kénien ! Bénie soit-elle entre les femmes qui habitent sous les tentes! (Jug 5.24). En dehors de Marie, mère de Jésus (Luc 1.42), aucune autre femme n’a reçu un tel témoignage !

Entre la crainte et le courage

L’évaluation de Barak n’est pas aussi flatteuse. Alors que deux femmes sont fidèles, le meilleur des hommes hésite. Il a peur de l’ennemi et n’accepte d’engager le combat que si Débora: la mère (Jug 5.7) lui tient la main. Faut-il s’étonner que la gloire du héros lui ait échappé !

Mais si Barak est faible, il n’est pas sans mérite. Si hésitation, tergiversation, efforts pour échapper à l’appel, animent notre homme au début, le courage l’emporte à la fin: la mission est acceptée, les troupes sont menées au front. Barak a fini par donner le bon exemple. Lorsque l’auteur reprend le récit au chapitre 5, Barak partage le podium du vainqueur avec Débora (Jug 5.1,12). Le livre des Hébreux présente aussi Barak comme un champion de la foi (Héb 11.32). Avec le temps, les hésitations sont oubliées; seuls restent les exploits: un encouragement pour les multitudes de fidèles «pas toujours fidèles».

Les hésitations de Barak sont les nôtres, mais aussi celles de son époque. Dans le cantique de la victoire, notre écrivain relève l’engagement (après hésitations) des chefs et de plusieurs tribus. Les chefs étaient sans force en Israël (Jug 5.7), mais des chefs se sont mis à la tête du peuple en Israël (Jug 5.2) et le coeur de Débora est aux chefs d’Israël, à ceux du peuple qui se sont montrés prêts à combattre (Jug 5.9). Sur les dix tribus concernées (Juda et Siméon étaient trop au sud), six se sont engagées (Ephraïm, Benjamin, Manassé [Makir], Zabulon, Issacar et Nephthali :Jug 5.13-15a,18) et quatre sont lamentablement restées en retrait (Ruben, Gad [Galaad], Dan et Aser: Jug 5.15b-17).

Répétition du récit

Avant de conclure, deux remarques d’ordre littéraire doivent encore être faites. La première concerne le parallélisme entre les chapitres 4 et 5. Pourquoi rapporter deux fois les mêmes événements ? A l’inverse d’un libéralisme stérile et entêté qui se borne à «discerner», dans toute répétition, une pluralité de sources contradictoires (ne répétera-t-on jamais assez comment cette voie est fausse et sans issue ?), la reprise d’un événement fait partie intégrante d’une pensée hébraïque friande d’images et de comparaisons. Reprise n’est pas redite: deux témoignages valent mieux qu’un; une image en complète une autre. L’essence de la poésie hébraïque repose sur les comparaisons d’idées: parallélismes synonymique, antithétique, climatique; et ceci au niveau des mots, des phrases, des paragraphes, des chapitres, voir de livres entiers. Ils foisonnent dans le texte sacré.

Pour le cycle de Débora, le parallélisme convient à merveille. L’auteur ne veut-il pas exprimer des contrastes entre hommes et femmes, juge et peuple, force et faiblesse, crainte et courage, doute et foi, asservissement et libération ? Pourquoi ne pas renforcer les dualités des attitudes, par des dualités sur le plan littéraire ? Les chapitres 4 et 5 reflètent deux genres littéraires (prose et poésie), deux points de vue (pendant et après le combat), deux évaluations de Barak (blâme et louange). Il ne s’agit pas de sources contradictoires, mais d’une plume chevronnée qui sait adapter son style au message proclamé, tout en intégrant à son oeuvre le poème de notre juge-compositeur .

Les sentiments des fidèles

Si le poème du chapitre 5 permet de contraster la prose du chapitre précédent, il favorise aussi la communication de sentiments. La poésie, par ses combinaisons judicieuses de mots et d’images, crée une dynamique propice à l’expression de sentiments parfois explosifs. Souvent ignorés dans nos cultures occidentales, les sentiments font partie intégrante de la vie. La tristesse devant l’oppression ou la joie de la libération doivent pouvoir se manifester.

Deux autres techniques littéraires permettent d’exprimer des sentiments de soulagement lorsque la justice divine se réalise: le sarcasme et le ridicule. Le sarcasme marque le renversement des choses: grotesque est la chute du méchant dont la force n’a pu tenir un instant devant le courroux divin.

Ainsi, l’opprimé et le persécuté jubilent à la lecture du sort de Siséra : le pillard assoiffé de richesses (Jug 5.30) perd son bien le plus précieux (la vie); celui qui commande aux autres de mentir (Jug 4.20), se voit trompé; 1’homme qui voulait dominer le corps des femmes (allusion au viol en Jug 5.30), finit aux pieds d’une femme (Jug 5.27); celui qui voulait pénétrer dans le corps des femmes par la violence, se fait transpercer la tête par un objet qui soutient les habitations des femmes (un pieu).

Le ton sarcastique qui décrit le sort du méchant est une constante dans le livre des Juges. Pour rappeler le destin de deux des trois oppresseurs qui précèdent le cycle de Débora, on peut relever qu’Adoni-Bézek est frappé du châtiment infligé à ses victimes: amputation des pouces des mains et des pieds (jugement qu’il approuve sans la moindre critique: Jug 1.7).

Quant à la mort d’Eglon, elle est des plus grotesques. Affronté par un égal (contrairement à Siséra qui est tué par une femme insignifiante), le roi de Moab est pourfendu horizontalement. La fin de la scène est imprécise: il sortit par derrière (Jug 3.22). De qui ou de quoi s’agit-il ? (1) D’Ehud qui en combattant rusé se serait échappé par une issue secondaire. (2) De l’épée qui, après avoir pénétré dans l’adversaire, sort dans son dos. (3) Des excréments d’Eglon. Le gros qui s’empiffrait au détriment des pauvres (son tour de taille approchait les 1,50 mètres), éclate sous l’épée. Sujet à des problèmes de constipation (comme le suggère la longue attente des serviteurs: Jug 3.24), le voilà délivré de son mal puisque ses excréments se répandent au dehors!1 De son côté, Ehud profite du quiproquo créé par l’odeur pour s’échapper et organiser ses troupes. Quelle que soit l’ explication (l’auteur a peut-être pensé à toutes ces possibilités), le lecteur sourit devant le sort réservé au méchant.

Le sarcasme est un genre littéraire particulièrement bien adapté pour relever le sort de l’homme impitoyable. Que la ruine atteigne (les méchants) à l’improviste, qu’ils soient pris dans le filet qu’ils ont tendu, qu’ils y tombent et périssent! Et mon âme aura de la joie en l’Eternel, de l’allégresse en son salut (Ps 35.8-9).


D.A.

les articles plus lus

En présentant le premier numero de PROMESSES

à nos frères en la foi, nous pensons bien faire d’exposer les principes qui seront à la base de ce «Cahier d’études bibliques».

Nous chercherons à être utiles à tous, à l’église de Dieu d’abord, c’est-à-dire au Chef de l’église, Christ, mais aussi à ceux pour qui la Parole est précieuse, à ceux qui désirent étudier et obéir.

Les bulletins, feuilles de renseignements, journaux mensuels ou trimestriels foisonnent. Tous, ou presque, apportent des nouvelles missionnaires ou d’évangélisation. Ce qu’on recherche ici est beaucoup plus un cahier comportant exclusivement des études bibliques ou se rapportant spécifiquement à la Parole.

La plupart des assemblées de «frères» issues du mouvement datant des années 20-30 du siècle écoulé semblent vivre au ralenti, l’esprit missionnaire mis à part. Comme dans tout mouvement, certaines vérités ont été poussées en «épingle», d’autres ont été négligées; des intérêts particuliers ont pris le pas sur les valeurs spirituelles. Nous assistons à un rétrécissement sérieux de l’influence, de l’action que devraient avoir des églises de foi, c’est-à-dire formées d’enfants de Dieu véritables, scellés par l’Esprit de Dieu.

En toute humilité, nous désirons demander au Seigneur sa lumière, afin de marcher selon sa grâce, en fidélité, devant sa face. Nous ne saurions prétendre connaître tout ce que Dieu veut pour les siens et son église, mais notre désir est d’apporter ce qui, aujourd’hui, est utile pour l’édification et la consolation de nombreux enfants de Dieu. Précisons que nous ne voudrions pas représenter un point de vue particulier, mais étudier la Parole, en respectant la sainteté de Dieu.

Chaque étude signée restera sous la responsabilité de son auteur. L’enseignement de ces pages semble devoir être d’une étendue qui surprendra peut-être. Notre désir est, à la fois, de présenter des études fouillées pour le chrétien avancé, mais aussi des explications de termes, de langage, pour ceux qui ne connaissent pas notre langue d’une manière approfondie.

A titre d’essai, nous ferons parvenir un certain nombre d’exemplaires au monde francophone d’outre-mer. Il faudra ainsi tenir compte de ce champ de diffusion.

De divers côtés, sinon dans nos vieux pays, on demande, en effet, une littérature chrétienne plus abondante, basée sur la Bible, la Parole de Dieu. Quelques-uns d’entre nous ont cru devoir répondre à ce désir. Nous plaçons ces cahiers sous le regard du «Chef», demandant à Dieu sa bénédiction pour rendre témoignage à la Vérité.

Les éditeurs

Où nous mène la formidable évolution qui soulève le monde chrétien tout entier? En cette période d’après le Concile du Vatican Il, il est utile de dresser un bilan des faits, même provisoire, et de procéder à un tour d’horizon général.

Eléments positifs de l’évolution catholique: Incontestablement, des mouvements intéressants se font sentir dans l’Eglise romaine: étude et diffusion de la Bible en voie de développement, dialogue engagé avec les autres confessions, reconnaissance du fait que les communautés des «frères séparés» protestants peuvent porter le titre d’églises, admission d’une part de responsabilité dans la rupture du XVIe siècle. Au cours du Concile du Vatican Il, l’opinion a été exprimée à maintes reprises que l’Eglise catholique avait besoin d’un renouveau si elle voulait réellement entreprendre le dialogue avec les églises non-romaines. Il y eut des discussions très libres, suivies de votes positifs impressionnants, par exemple sur la collégialité des évêques gouvernant l’Eglise avec le pape, l’usage de la langue vulgaire dans le culte, l’oecuménisme, la liberté religieuse, la limitation des naissances, le peuple juif, l’Ecriture Sainte et la Tradition, etc.

Fin décevante de Vatican Il: Rappelons quelques faits justifiant cette impression de l’ensemble des observateurs non catholiques.

La collégialité des évêques doit être entendue de telle manière que la primauté du pape demeure intacte. La structure monarchique de l’Eglise romaine n’en sera pas affectée, le pape reste le souverain absolu. Le collège épiscopal n’a aucune autorité sans ce dernier. Paul VI, dans son discours d’ouverture à la troisième session, ne s’en est pas référé moins de sept fois à sa primauté, et le mot-clé qu’il a constamment utilisé était celui de «hiérarchie sacrée». Le pasteur G. Richard-Molard estime qu’un tel discours «ne peut guère qu’hérisser la plupart des chrétiens non catholiques romains» («Messager Social», 10 déc.; S. CE- P. I., 1er oct.; 24 sept. 1964).

Il est clair, selon le même pasteur, «que l’Eglise catholique est toujours placée sous l’unique pouvoir de l’Eglise romaine. Or, il ne s’agit pas là d’une découverte de La Palice, mais d’une situation, chaque jour plus insupportable pour les catholiques eux-mêmes. Cette direction totalitaire italienne, ou pire encore, romanisée, possède encore tous les leviers de commande» («Christianisme au XXe siècle», 29 oct. 1964). Cela n’empêche pas qu’une seconde force «se manifeste par l’esprit nouveau qui anime une partie toujours plus large du catholicisme non italien. Il ne faut pas s’imaginer que cet esprit ait changé en quoi que ce soit la masse, mais il passe sur quelques centaines d’évêques, sur de nombreux prêtres et sur une élite de laïcs» (ibid.).

La Vierge Marie a été proclamée Mère de l’Eglise, sans l’avis des pères conciliaires, par Paul VI, qui lui a consacré la moitié de son discours de clôture {cf. «Chrétien Evangélique», déc. 1964, p. 5). Cette proclamation «a détruit tous les efforts des pères conciliaires qui. .. s’étaient ingéniés à éviter autant que possible les déclarations de nature à. ..donner de l’extension au dogme marial et à choquer les protestants» {«Christ U. Welt», cité par S. CE. P. I., 3 déc. 1964).

Le 11 octobre 1963, le pape a terminé une allocution aux pères du Concile et aux fidèles par cette prière à la Sainte Vierge: «O Marie, nous vous prions pour nos frères encore séparés de notre famille catholique. Voyez comment, parmi eux, une phalange glorieuse célèbre votre culte avec fidélité et amour. Voyez comment parmi d’autres, si résolus à se dire chrétiens, commence à renaître aujourd’hui votre souvenir et votre culte, ô Vierge très bonne. Appelez avec nous tous ces fils, qui sont vôtres, à la même unité sous votre protection maternelle et céleste» («Documentation Catholique», 3 novembre 1963).

Le cardinal Doepfner, de Munich, dont les interventions au Concile ont été souvent remarquées, vient de déclarer à son tour: «Amoindrir dans l’Eglise le culte de la Vierge Marie serait un malentendu et une mauvaise interprétation des enseignements du Concile. ..Nous voulons approfondir et enraciner encore plus fort dans ce mystère du Christ le riche héritage laissé à l’Eglise par la Vierge Marie. Elle a un grand rôle à jouer dans l’Eglise, qui voit en elle son image originelle» {«Figaro», 28 déc. 1964).

Le dogme romain: Dans son livre récent sur l’Unité, le cardinal Béa répète des dizaines de fois: 1°) que l’enseignement romain, étant infaillible, ne saurait subir dans son essence aucune modification; 2°) que l’Eglise catholique étant la seule vraie Eglise du Christ, l’unité finale ne peut être envisagée que par le retour de tous les baptisés orthodoxes et protestants au bercail du successeur de saint Pierre. Ce caractère intangible du dogme catholique n’a cessé d’être proclamé clairement par Jean XXIII, Paul VI et tous les porte-parole de Rome. Le professeur E. Schlink, observateur de l’Eglise Evangélique d’Allemagne à Vatican Il, après avoir noté que les délibérations conciliaires sont « révolutionnaires» pour l’Eglise romaine, ajoute: «Aucune des resolutions jusqu’ici adoptées n’a «rapporté, modifié ou même réinterprété de manière satisfaisante un seul des dogmes qui divisent la chrétienté » (S. CE. P. I., 17 déc.1964).

Cela n’a pas empêché le professeur de théologie protestant O. Cullmann de déclarer que Vatican Il «n’a fermé aucune porte ». Dans une interview accordée au journal «Le Monde », M. Cullmann reconnaît que les textes élaborés au Concile sont décevants, car la plupart sont des textes de compromis. Le Concile actuel est lié par celui du Vatican I (en 1870, où fut proclamée l’infallibilité pontificale), et par les dogmes mariaux antérieurs, inchangeables eux aussi. Mais il ajoute: «Je ne partage pas le pessimisme de certains qui s’exprime dans ce slogan: «II ne sortira rien de ce Concile! » Tous les textes sont formulés de telle sorte qu’aucune porte n’est fermée, et qu’ils ne seront pas un obstacle à la future discussion entre catholiques ni au dialogue avec les non-catholiques, comme le sont les décisions des Conciles antérieurs » (cité par «Vie Protestante », 23 oct. 1964). -Puisque les dogmes romains sont infaillibles (voir les anathèmes du Concile de Trente), on se demande sur quoi porte la discussion. ..Si la porte n’est pas fermée, elle ne l’est qu’à sens unique et ne nous paraît conduire qu’au bercail de saint Pierre.

(à suivre)
Extrait avec autorisation du périodique «Le Chrétien évangélique »

(2 Tim.1, 7-9)

«Dieu ne nous a pas donné un esprit de timidité, mais de force, d’amour e! de prudence.»

Timide = qui manque de hardiesse et d’assurance, dit le dictionnaire. Dieu, en vue du but qu’il s’est proposé, nous a adressé une «VOCATION SAINTE», et pour cette vocation, il nous revêt:

de force – par quoi nous devons comprendre force de caractère, maîtrise de soi, tranquillité d’esprit, toutes choses qui sont contraires à la timidité. Une stabilité nouvelle, créée par le Saint-Esprit de Dieu qui nous donne l’assurance du salut; un contrôle de soi-même qui peut ne pas être naturel, mais qui est le résultat du travail de cet Esprit.

d’amour – de compréhension, de compassion, de pardon, amour qui n’est pas mollesse, ni faiblesse, mais qui prend part aux malheurs du prochain, qui comprend le pécheur et repousse le péché.

de prudence – mieux encore discipline personnelle, d’intelligence avertie, de jugement balancé, nuancé, sans laisser-aller.

Etes-vous craintif de nature, manquez-vous d’assurance, avez-vous ce qu’on appelle un complexe d’infériorité, craignez-vous de vous affirmer? Lisez les lettres à Timothée. C’était un timide de nature, et l’apôtre l’encouragea. Notez ceci: Dieu DONNE UN AUTRE ESPRIT que celui que vous aviez précédemment. Il donne gratuitement. Alors, demandez, priez. Il vous DONNERA.

Le but de nos études est de faire connaître et comprendre (Ps. 82, 5) les pensées de Dieu révélées dans sa Parole, afin de vivre dans la lumière. Dans un monde où Satan règne pour obscurcir la vérité, voire même la cacher, il importe que le juste – sauvé par la foi en Jésus-Christ – connaisse «les fondements» de la vérité divine.

Les lignes suivantes ne veulent être qu’un canevas de «la saine doctrine», telle que la Parole de Dieu nous la montre. Cet enseignement est à la fois christologique (Matth. 7, 28; 1 Cor. 2, 1-2) et apostolique (Act. 2, 42) ; il comprend l’ensemble des vérités divines.

I L’INSPIRATION VERBALE DE LA BIBLE

La pierre de touche de tout ce qui suit est la doctrine de l’inspiration des Ecritures. «Toute Ecriture est inspirée de Dieu» (2 Tim. 3, 16). Nous possédons aujourd’hui suffisamment de preuves, devant lesquelles tout homme sincère doit s’incliner. La Bible est la révélation de Dieu à l’égard de l’homme. Ce n’est pas un livre ecclésiastique quelconque, ni un ouvrage symbolique ou philosophique. C’est simplement «la Parole de Dieu» qui ne se laisse pas discuter. Des hommes de Dieu, poussés par l’Esprit, rédigèrent les 66 livres de cette divine Bibliothèque (2 Pi. 1, 21 ). Tout en gardant leur caractère et leur personnalité, ils furent de simples véhicules utilisés pour transmettre intégralement les pensées divines. C’est un miracle et un miracle ne s’explique pas. On peut l’accepter ou le rejeter; mais le fait est là.

Il LA TRINITÉ DE DIEU

Il en est de ce terme comme d’autres: la doctrine de la trinité de Dieu se trouve clairement révélée dans la Bible, bien que cette expression n’y soit pas mentionnée. Lucien déjà, rhéteur et philosophe grec du 2me siècle, fait confesser le chrétien dans son «Philopatris»: «le Dieu exalté …Fils du Père, Esprit procédant du Père, l’Un d’entre les Trois et Trois d’entre Un.» Le terme même fut employé formellement pour la première fois lors du synode en 317 à Alexandrie.

Cela ne signifie rien d’autres que tri-unité. La déité est une trinité, une unité qui possède 3 personnes distinctes ayant la même vie et la même essence.

L’ANCIEN TESTAMENT

Nous y voyons une révélation progressive qui trouve sa complète manifestation dans le Nouveau Testament. Des allusions claires et sans équivoques devaient ouvrir les yeux des personnes pieuses du temps du Seigneur.

Gen. 1,1: «Au commencement Dieu.» Ce terme «ELOHIM» est au pluriel et Moïse l’emploie quelque 500 fois. A remarquer qu’à chaque reprise le verbe qui l’accompagne est au singulier, ce qui prouve bien l’unité dans la pluralité des Personnes de la Déité.
Gen. 1,26: «Et Dieu dit: Faisons l’homme selon notre ressemblance»
Gen. 3, 22: «Voici l’homme est devenu comme l’un de nous»
Es. 48, 16: «Le Seigneur l’Eternel» – Dieu le Père
«m’a envoyé» – Dieu le Fils
«et son Esprit» -Dieu le Saint-Esprit
Zach. 12, 10: «Et je répandrai» -Dieu le Père
«un esprit de grâce» – Dieu le Saint-Esprit
«ils se lamenteront sur lui» -Dieu le Fils

LE NOUVEAU TESTAMENT

Il dévoile clairement cette vérité et nous confirme que la déité se compose de 3 Personnes: Dieu le Père, Dieu le Fils et Dieu le Saint- Esprit (Matth. 28, 19; Jean 1:1; Jean 5:3-4; Jean 8:54).

La trinité de Dieu est déjà engagée lors du baptême du Seigneur (Matth. 3, 13-17). On ne peut, à ce sujet, s’exprimer plus clairement que le Seigneur le faisait dans Jean 14:16-26: «Mais le Consolateur, l’Esprit-Saint (3ème Personne) que le Père (1ère Personne) enverra en mon nom (2ème Personne).»

La grande bénédiction apostolique nous laisse «la grâce du Seigneur Jésus-Christ», «l’amour de Dieu» et «la communion du Saint-Esprit» (2 Cor. 13, 13).

D’ailleurs, l’homme lui-même est une trinité composée de l’esprit, de l’âme et du corps. Il est attaqué par une autre trinité: le monde autour de lui, la chair en lui, et le diable au-dessous de lui. La loi du péché en lui est également représentée par une trinité:la convoitise de la chair, la convoitise des yeux et l’orgueil de la vie. Et, enfin, il peut être sauvé par la trinité divine: Dieu le Père, Dieu le Fils et Dieu le Saint-Esprit.

III JÉSUS-CHRIST

1. Sa Divinité

Jean 1, 1-3 suffirait pour établir cette vérité bénie:
Au commencement était la Parole» (le Verbe dans son existence éternelle)
cet la Parole était auprès de Dieu» (le Verbe dans son existence personnelle)
et la Parole était Dieu» (le Verbe dans son essence divine)

2. Son incarnation

Il est «Dieu manifesté en chair» (1 Tim. 3, 16). Ce mystère, dans lequel même les anges désirent plonger leurs regards, nous a été révélé. Les 7 degrés de son abnégation nous sont donnés en Phil. 2, 7-9. Aucune difficulté n’est inconnue du Seigneur qui a été tenté comme nous; Il peut donc nous accorder miséricorde et secours au moment opportun (Hébr. 4, 15-16). Ami qui souffres, confie-toi en Lui, car son nom est «Merveilleux».

3. Son CEuvre rédemptrice

Rom. 4, 25 dit: «Jésus, notre Sauveur, lequel a été livré pour nos fautes et a été ressuscité pour notre justification».
L’Ancien Testament y fait continuellement allusion (Ex. 12, Ps.22, Es.53).
Les Evangiles en sont la réalisation
Les Actes le proclament
Les Epîtres l’expliquent
L’Apocalypse, enfin, décrit la destruction de ceux qui ont rejeté cette oeuvre.

(à suivre)