Nous avons tous été — ou nous serons tous — confrontés à la situation suivante : un ami athée vient de perdre un de ses proches dont tout laisse à penser qu’il n’était pas croyant lui-même. Comment témoigner à cet ami ? Il est difficile de donner une réponse universelle à cette question délicate car beaucoup d’éléments dépendent de la situation particulière.
Quelle attitude avoir ?
Ne pas se mettre un fardeau excessif
La nouvelle naissance est toujours un miracle, indépendante du mérite et de la circonstance. Les humains sont spirituellement morts, et à moins que le Saint-Esprit ne vienne les réveiller pour les convaincre de péché, de justice et de jugement (Jean 16.8-11), ils ne croiront pas, en sorte que l’on peut et doit prêcher l’Évangile sans imaginer que nos seuls arguments gagneront les cœurs. Ou pire, que nous serions responsables de leur perdition si nous ne nous exprimons pas correctement. Dieu a prévu de sauver par la prédication mais ni la justesse ni la pertinence de nos paroles ne sont à ce point décisives. Le salut reste toujours une œuvre de Dieu et il n’existe pas de recette magique pour convaincre quelqu’un de notre foi et lui donner le désir de se convertir. En tant que serviteurs de Dieu, faisons de notre mieux, mais laissons le résultat entre les mains de Dieu.
Montrer un amour concret
Face à une personne accablée par un deuil, le plus important est d’être présent et de lui montrer de l’amour. Pour témoigner de l’Évangile, mieux vaut souvent commencer par un silence actif, par une présence pleine d’attention et d’affection. Un coup de fil régulier, des encouragements, des services rendus, c’est certainement le témoignage d’un amour vrai qui reflète en cela l’amour bienveillant et généreux du Sauveur.
Prier et être disponible
Dans ces circonstances, je ne forcerais pas une discussion sur l’Évangile, mais je prierais dans le secret de ma chambre avec insistance pour qu’elle soit possible. Si je devais sentir que le moment est opportun pour parler de l’Évangile, je le ferais en posant des questions pour tester à la fois de l’intérêt de la personne et pour voir quelles sont ses propres questions afin de répondre à ses préoccupations premières. Il est toujours tentant de dérouler un schéma préétabli, mais les conversations recensées dans les Évangiles sont beaucoup plus ciblées.
Comment répondre sur le fond ?
Voici quelques objections ou questions qui peuvent surgir dans ce contexte, avec quelques éléments de réponse.
« Comment pouvez-vous dire qu’il est perdu ? »
Personne ne peut savoir avec une totale certitude qui est sauvé ou qui est perdu, Dieu seul le sait. Dieu est capable de se révéler au dernier soupir. Nous ne savons pas ce qui se passe lors des derniers moments de vie. Certains peuvent confesser une confiance en Jésus-Christ dans leur dernier souffle, comme le brigand sur la croix qui a été le premier converti.
« Que penserait-il si je me tournais vers un Dieu qu’il rejetait ? »
Un collègue pasteur avait été sollicité pour les obsèques d’une personne qui avait ouvertement rejeté la foi. Tous les assistants le savaient et se demandaient ce que le pasteur allait bien pouvoir dire à son sujet. Il a commencé humblement, comme je viens de l’évoquer : « Très sincèrement je ne peux pas vous dire s’il est en enfer ou s’il est au paradis, cela appartient à Dieu, et on ne sait pas ce qui se passe dans les cœurs au dernier moment. »
Puis il a ajouté : « Quoi qu’il en soit, quel que soit l’endroit où il se trouve maintenant, il aimerait que je vous dise ceci… » Cette approche était pertinente et courageuse. En effet, Jésus, au travers du récit du riche et de Lazare, montre une personne séparée de Dieu, aujourd’hui dans le séjour des morts, qui souhaite que ses proches vivants et incrédules ne le rejoignent pas dans sa souffrance (cf. Luc 16.27-28).
« Puisqu’il est en enfer, je voudrais l’y retrouver. »
Hélas, l’enfer n’est pas un lieu de fraternité ni de communion. Les liens qui unissent aujourd’hui les personnes seront très différents après la mort. Il ne faut pas anticiper une sorte d’amitié pendant le séjour éternel dans l’enfer. L’égoïsme des cœurs humains sera amplifié en l’absence de toute grâce commune de Dieu qui permet aujourd’hui aux humains de vivre de belles relations, même sans la foi. Le regret de n’avoir pas saisi l’Évangile demeurera probablement source de la plus grande tristesse, de la plus grande souffrance.
Aucun compagnon d’infortune ne pourra apporter le moindre réconfort de cette tragédie d’opportunités perdues.
« Je ne veux pas faire partie de ceux que Dieu inclurait si d’autres en étaient exclus. »
La personne qui tient ces propos se présente faussement en humaniste, revendique de vivre avec ceux qui seront rejetés comme si c’était une sorte de lettre de noblesse. Mais cette prétention est au fond orgueilleuse et arrogante : elle cherche à mettre en avant une bonté naturelle qui n’est pas réelle (cf. Jean 3.17-19). Elle se voit ainsi que les autres comme dignes du Seigneur, lui attribuant une terrible injustice. De fait, cette personne révèle sa vraie conception de Dieu, un Dieu dur et méchant qu’il vaut mieux fuir et loin duquel on se trouve mieux (cf. Mat 25.24-25).
Dieu dit en substance : « Qu’il te soit fait selon la compréhension que tu as de moi. »
« C’était un bon gars, il a fait beaucoup de bien. »
Les mérites du défunt qui va en enfer sont dérisoires aux yeux du jugement du Dieu pur, sage et parfait. Pour ceux qui restent, le réaliser permet d’être apaisé par rapport au jugement à venir. Au paradis, nous n’aurons ni tristesse ni amertume face au sort de nos bien-aimés qui seront en enfer. Parce qu’à ce moment-là, nous aurons une juste vue du péché dans toute son horreur, une juste vue du jugement de Dieu dans sa parfaite justice, et une juste vue de l’amour de Dieu qui a tant fait pour sauver. Nous serons pleinement en accord avec Dieu. Le Saint-Esprit peut donner à une personne la sagesse de comprendre que la destinée de tout homme est entre les mains du Dieu créateur, totalement juste, totalement bon.
« Il n’a pas eu l’occasion d’entendre l’Évangile. »
Qui peut savoir comment telle personne aurait réagi à la présentation de l’Évangile ? Quand l’Évangile est prêché, nombreux sont ceux qui répondent : « Je n’en veux pas. Je ne souhaite pas cette grâce imméritée de Dieu. » On ignore aussi les occasions que cette personne a pu avoir dans son passé de lire un Évangile qu’elle aurait consciemment rejeté. Il y a une invitation permanente à chercher Dieu dans le spectacle de la nature et dans les méandres de notre conscience. Dieu sera juste pour révéler ce que les uns et les autres ont vu sans vouloir croire…
« S’il avait connu l’Évangile, je suis sûr qu’il l’aurait accepté. »
Malheureusement, j’ai eu le triste honneur de parcourir l’Évangile avec plusieurs non croyants qui n’ont jamais répondu par la foi. Ils n’ont pas placé leur confiance en Jésus malgré leur compréhension des données de l’Évangile. Tenir de tels propos est téméraire et sans fondement. Je remarque que mes pronostics sur qui répondrait positivement et qui rejetterait Christ ont reflété des perspectives que Dieu a souvent démenties !
Conclusion
Le sujet est terriblement triste. Ce qui me console, parfois, c’est de réaliser qu’une personne qui rejette Dieu serait triste au paradis, parce qu’en réalité, Christ en est le personnage central. Les gens qui ont rejeté Dieu, alors que la gloire de Dieu est manifeste, ne serait-ce que dans la création (cf. Rom 1.18-20) seraient en colère d’être forcés à admirer celui qu’ils ont rejeté toute leur vie. Le salut de Dieu est un sauvetage extraordinaire, donné par une grâce imméritée, selon une foi qui se démontre dans une adoration et un amour de Dieu.
Ceux qui ne l’ont pas exprimée sont totalement et légitimement éloignés de Dieu. Cela reflète en fait le profond désir intérieur du cœur humain depuis la chute : l’indépendance. Adam a voulu choisir pour lui-même ce qui est bien et ce qui est mal.
Imposer à ses fils et à ses filles de venir dans un lieu où tout, au contraire, reflète une profonde confiance, dépendance et obéissance à Dieu, serait la pire des tortures.
L’Esprit saint est capable de conduire celui ou celle qui a perdu dans la mort un être cher. L’excuse de ne pas croire à cause de son sort lui paraîtra, à un moment ou à un autre, comme une forme d’usurpation de l’autorité de Dieu qui seul est juge — et sauveur.