Les Croisades : un obstacle à la défense de la foi chrétienne

Comme le fait Christopher Hitchens dans son livre Dieu n’est pas grand, les Croisades sont souvent utilisées comme argument par les détracteurs du christianisme pour contredire le message d’amour et de paix de l’Évangile. Quelle attitude les chrétiens du XXI e siècle devraient-ils adopter par rapport aux Croisades ?

Revenir sur des événements vieux de près d’un millénaire nécessite un certain nombre de précautions pour éviter trop de raccourcis et d’anachronismes. Il faut bien avouer que malgré la quantité importante de livres écrits ces dernières années sur les Croisades, nous ne sommes généralement pas en mesure d’aligner plus de quelques phrases sur le sujet en dehors de l’évocation de quelques noms comme Godefroy de Bouillon ou Richard Cœur de Lion ou encore l’image de chevaliers à croix rouge sur fond blanc chargeant sur leur destrier. Quelques éléments de contexte sont donc nécessaires avant de revenir à notre époque.

Les Croisades dans leur contexte

Les Croisades sont une série d’expéditions militaires au Moyen-Orient principalement dirigées vers la Palestine appelée « Terre sainte » qui ont eu lieu entre 1096 et 1291 dans le but de reconquérir la ville de Jérusalem alors aux mains des musulmans. Le terme « croisade », qui est postérieur à l’époque médiévale, vient de l’habitude qu’avaient ceux qui partirent de se faire coudre une croix sur leurs vêtements — d’où le nom de croisés qui leur fut donné. Le terme de croisades au sens large désigne également des expéditions de même type menée au nom de l’Église contre des personnes considérées comme hérétiques autres que les musulmans, par exemple, les Cathares, les Vaudois ou les Hussites.
Les Croisades ont commencé à la suite d’un appel prononcé par le Pape Urbain II au concile de Clermont en novembre 1095 relayé un peu partout dans tout l’Occident chrétien. Celui-ci fut suivi par une onde d’adhésion impressionnante mobilisant des dizaines de milliers d’hommes, femmes et enfants (voire centaines de milliers sur l’ensemble des Croisades) autant dans les milieux nobles (chevaliers, mais aussi des rois et des empereurs) que populaires. Les grands intellectuels chrétiens comme Bernard de Clairvaux (1090-1153) adhèrent et supportent les Croisades.
Comment comprendre un tel enthousiasme ?
La diversité des profils engagés et l’ampleur du phénomène excluent des réponses trop caricaturales qui souligneraient uniquement l’appât du gain, la recherche de gloire ou un fanatisme guerrier et religieux. Il faut sans doute rechercher des éléments de réponse dans le contexte d’une époque pleine de changements dans le cœur de l’Europe médiévale. Voici six éléments à considérer :
1. L’Islam apparu au VII e siècle avait conquis comme un éclair plus de la moitié du monde chrétien, dont Jérusalem en 636. Les musulmans avaient respecté la ville qui était pour eux également une ville sainte et avaient laissé se poursuivre les pèlerinages chrétiens dont l’origine remontait à l’époque de Constantin le Grand. Cependant au XI e siècle font leur apparition les Turcs Seldjoukides nouvellement convertis à l’Islam. Ceux-ci battent les Byzantins à Manzikert en 1071 ouvrant la voie à la conquête de toute l’Asie mineure jusqu’alors chrétienne et enlèvent Jérusalem et la Palestine aux musulmans fatimides en 1078 avec un impact important sur les pèlerinages chrétiens. Alexis I er Comnène, empereur byzantin, lance un appel à Urbain II pour venir en aide aux chrétiens d’Orient. Dans ce contexte, la première croisade peut être comprise comme une réponse défensive à l’expansion de l’Islam et à la protection des chrétiens d’Orient. Les souffrances endurées par les pèlerins chrétiens ont d’ailleurs été longuement évoquées par le pape pour justifier son appel dans les différents témoignages de son discours qui nous sont parvenus.
2. Après des siècles de désintégration politique et économique qui avaient vu s’effondrer l’empire carolingien, l’Occident rentre dans une nouvelle ère de prospérité et d’unité. Les terribles Normands et les Hongrois se sont convertis au christianisme. Les bateaux vénitiens et génois dominent progressivement la mer Méditerranée. L’Occident se sent désormais assez fort pour passer à l’offensive. En Espagne et dans les îles méditerranéennes, la reconquête sur l’Islam a déjà commencé dès le début du XI e siècle. Ce n’est d’ailleurs pas un hasard si le pape souhaite confier le leadership de la Croisade aux barons expérimentés d’Occitanie comme Raymond de Saint-Gilles. Ainsi les Croisades peuvent être perçues comme des guerres de reconquête.
3. Le XI e siècle est par ailleurs celui de la réforme grégorienne de l’Église qui voit s’agrandir considérablement la puissance des papes. Les papes vont prétendre non seulement à un pouvoir spirituel sur toute l’Église, ce qui précipitera la séparation avec l’Église orthodoxe d’Orient en 1054, mais également à un pouvoir politique. On aurait dû s’attendre à ce que les Croisades soient lancées par des chefs politiques et non par le pape. Or, au moment de la première croisade, le roi de France et l’empereur du Saint Empire romain germanique sont excommuniés. Les Croisades peuvent être ainsi vues comme un programme ambitieux de papes puissants comme Urbain II ou Innocent III visant à assurer leur domination politique en fédérant autour d’eux les puissances séculières et peut-être, au moins pendant la première période des Croisades, de tenter une réconciliation avec l’Église d’Orient.
4. On peut s’étonner que l’Église prenne l’initiative d’une guerre même défensive. Mais la position théologique sur le sujet avait depuis longtemps déjà glissé d’une position pacifique des chrétiens à une formulation par Augustin d’une guerre juste à laquelle les chrétiens pourraient participer.
Cette évolution s’est produite dans un contexte de rapprochement aux IV e et V e siècles entre le pouvoir politique et religieux au moment où les frontières de l’Empire Romain commençaient à céder. En intégrant dans la chrétienté des peuples de culture où la gloire masculine est quasi exclusivement liée à la force physique, l’Église a eu fort à faire pour essayer de canaliser cette violence en faisant naître des compromis que l’homme de notre siècle a du mal à appréhender. Il est intéressant de noter la forte proportion de contingents d’origine « viking » dans la croisade des chevaliers. Même avant les Croisades, l’Église se militarise avec la création des chevaliers de Saint-Pierre dès 1053. Puis viendra la reconnaissance des ordres de moines-chevaliers comme les Hospitaliers (1113), les Templiers (1118), ou les chevaliers teutoniques (1190) dédiés à la défense de la Terre sainte. Il faut noter cependant que le même concile de Clermont qui voit prêcher la première croisade encouragera dans le même temps le mouvement dit de la « Paix de Dieu » en invitant tous les chrétiens à observer entre eux une paix perpétuelle. En réorientant l’énergie belliqueuse vers l’hérétique, les Croisades peuvent être perçues comme un mal nécessaire pour établir la paix dans le monde.
5. Dans les esprits du Moyen-Âge, le Royaume de Dieu est assimilé théologiquement à l’emprise territoriale des États chrétiens. On comprend ainsi que l’appel à la libération des lieux où le Christ a marché, où il est mort et ressuscité et où il reviendra bientôt, trouve un écho dans le cœur de très nombreux croyants. Plus qu’une simple possibilité d’accès, la libération puis la défense de Jérusalem et du tombeau du Christ sont accueillies comme une grande œuvre de piété. L’image des croisés faisant procession pieds nus devant les murailles de Jérusalem tels Josué devant Jéricho montre l’assimilation de la reconquête de la Terre sainte à la conquête de la Terre promise. Ici, le musulman, souvent caricaturé et très mal connu, est rarement perçu comme une âme à gagner, mais plutôt comme un agent de l’Antichrist. On notera quelques exceptions notables comme François d’Assise qui s’est joint à la cinquième croisade sans combattre, mais avec le projet de présenter l’Évangile au sultan Malik-al-Kamil. Le sultan ne se convertit pas, mais il offre à François des richesses (qu’il refuse) et le fait escorter jusqu’au camp chrétien. De manière plus générale, c’est l’urgence eschatologique de la libération des lieux saints qui prédomine. Les Croisades peuvent être vues dans cette perspective comme le résultat de l’attente prophétique de l’accomplissement à Jérusalem du monde nouveau.
6. Enfin, les croisés étaient animés par l’espoir du salut dans un contexte où le message promulgué par l’Église était source d’incertitude. L’appel aux Croisades s’est assorti d’une promesse d’une indulgence plénière, une des premières de l’histoire, à ceux qui entreprenaient de libérer la terre où le Sauveur était né. Celle-ci garantissait que tous ceux qui mourraient en chemin, que ce soit par terre ou par mer, ou en combattant les païens, auraient la rémission immédiate de leurs péchés. Ainsi des foules se sont mises en marche en dépit de ce que la raison aurait pu juger comme inconscient ou suicidaire, mais dans l’espérance salutaire du « quoi qu’il arrive ». Des hommes et des femmes ont tout quitté par la foi, des seigneurs se sont ruinés par la foi aux dépens bien souvent de leur liberté et de leur vie. Les Croisades peuvent ainsi être comprises comme un acte de pèlerinage pénitentiel répondant à l’angoisse des peines éternelles des croyants du cœur du Moyen Âge.

Le bilan des Croisades

Si se replonger dans ces éléments de contexte permet de mieux comprendre ce qui a poussé tant d’hommes et de femmes à partir aux Croisades en évitant quelques anachronismes, il n’en demeure pas moins que le recul sur ces événements dresse un bilan catastrophique.
Un échec militaire tout d’abord. Mis à part les succès de la première croisade avec la prise d’Antioche et de Jérusalem qui permettra la naissance des fragiles États latins d’Orient, les divisions incessantes des chefs croisés et l’épuisement rapide du flux du renouvellement des forces humaines rendront les sacrifices des Croisades totalement futiles avec la prise de Saint-Jean-d’Acre par les Mamelouks en 1291. On pourrait dire « tout ça pour ça ? ». Et ce « tout ça » est un terrible gâchis humain. Les imposants convois de croisés, souvent composés également de femmes et d’enfants, s’aventurent dans d’immenses contrées sans eau et sous un soleil de plomb. Fatigués par les longs trajets à pied et mal équipés, ils deviennent des proies faciles qui se font régulièrement tailler en pièces. Les principes de la soi-disant guerre juste sont piétinés par les pires élans du cœur humain quand les populaces indisciplinées massacrent les Juifs sur le chemin de la croisade, quand les guerriers sanguinaires usent des pires tortures ou quand la prise de Jérusalem se transforme en bain de sang. Cette violence mêlée d’un honteux intérêt financier se retourne même contre les chrétiens entre eux comme dans le cas hallucinant de la quatrième croisade qui se termine par le pillage de Constantinople, ville la plus riche de l’époque, fragilisant de manière durable ce tampon historique avec l’Islam. Le fossé entre chrétiens occidentaux et d’orient s’en est trouvé plus profondément creusé.
Les Croisades n’ont répondu ainsi à aucun de leurs objectifs.

Quelles ont été les conséquences durables des Croisades sur les relations des chrétiens avec le monde musulman ?

Si nous devons sans doute résister à la tentation d’attribuer l’extrémisme islamique actuel aux Croisades, cela ne veut pas dire que les Croisades n’occupent pas une place importante dans la conscience de notre entourage musulman. Comme le commente Kevin De Young en 2015, il n’en a pas toujours été ainsi : « Le terme désignant les Croisades, harb-al-salib, n’a été introduit dans la langue arabe qu’au milieu du XIX e siècle, et la première histoire arabe des Croisades n’a été écrite qu’en 1899. Les Croisades ayant échoué, elles n’avaient tout simplement pas beaucoup d’importance pour les musulmans. Mais la mémoire de ces événements a commencé à changer lorsque les nations européennes ont colonisé les nations musulmanes et y ont apporté leurs écoles et leurs manuels scolaires qui saluaient les vaillants croisés et les chevaliers héroïques qui avaient tenté d’apporter le christianisme et la civilisation au Moyen-Orient. Comme le sport, comme la guerre, comme la vie — quand vous gagnez, vous ne vous souciez pas de qui perd ; mais quand vous perdez, il importe beaucoup de savoir qui vous bat. » C’est bien souvent la réappropriation de la mémoire des événements anciens stimulés par un ressenti contemporain qui fait obstacle à la défense de la foi chrétienne. Ainsi, le positionnement des chrétiens du XXI e siècle par rapport aux Croisades a son importance puisqu’il traduit l’attitude actuelle des chrétiens envers leurs contemporains musulmans, juifs ou athées.

Quelle attitude adopter face aux Croisades ?

Dans le contexte tellement différent de notre monde moderne qui exalte l’individualisme démocratique, la liberté religieuse et la séparation du séculier et du spirituel, quelle attitude adopter ?
Aujourd’hui, nous ne partageons pas bon nombre des hypothèses des chrétiens du Moyen Âge. Nous pouvons comprendre le contexte socio-religieux, la logique des enchaînements, la part de bonnes intentions, mais même conscients de se retrouver de l’autre côté de la chronologie de l’histoire, comment approuver de telles dérives si étrangères à l’Évangile ? Les erreurs doctrinales sont évidentes : nous ne pouvons pas accomplir des actes de pénitence salvateurs ; le Christ n’avance pas son œuvre par la force. Le contexte géopolitique contemporain relance souvent les tentations de débats et réflexion sur la question de la guerre juste, mais nous n’oublions pas que notre principal combat est d’ordre spirituel. Notre Seigneur a triomphé de l’ennemi non pas en prenant la vie, mais en donnant la sienne. Condamner les Croisades me paraît ainsi justifié. Peut-être est-ce insuffisamment respectueux des intentions défensives légitimes et du cœur sincère des chrétiens médiévaux ; peut-être faut-il condamner uniquement les exactions commises aux détours des Croisades pour respecter l’histoire sans anachronisme, mais nos contemporains ne voient souvent pas les nuances.
Une attitude protestante aurait aussi tendance à se défausser en s’associant plutôt aux victimes qu’aux agresseurs « catholiques », mais là aussi gare aux anachronismes — même s’il est vrai que les éléments qui se mettent en place dans l’Église au moment des Croisades sont en germe ce qui provoquera les mouvements de la Réforme.
Le problème apologétique demeure néanmoins présent pour nos contemporains qui ne font pas facilement de distinction.
Au final, comme dans tout conflit, dans tout malentendu, il me semble que l’attitude la meilleure reste sans doute la demande de pardon même si entre humains les torts sont souvent partagés.
Le pardon coûte parce qu’il ne fonctionne pas en comptant les points de justice entre chaque partie, mais accepte volontairement de couvrir ce qui n’est pas juste. Mais quel beau moyen pour faire tomber le mur des Croisades construit dans le cœur des humains comme obstacle à la foi chrétienne !


Bibliographie

• Thomas F Madden, Les Croisades, Evergreen, 2008.
• René Grousset, L’épopée des Croisades, Tempus Perrin, 2017.
• Amin Maalouf, Les croisades vues par les Arabes, J’ai lu, 1999.
• Neal Blough, Guerre et Paix ; La foi chrétienne et les défis du monde contemporain.
• Christian History Magazine, “The Crusades”, n° 40.

 

les articles plus lus

En présentant le premier numero de PROMESSES

à nos frères en la foi, nous pensons bien faire d’exposer les principes qui seront à la base de ce «Cahier d’études bibliques».

Nous chercherons à être utiles à tous, à l’église de Dieu d’abord, c’est-à-dire au Chef de l’église, Christ, mais aussi à ceux pour qui la Parole est précieuse, à ceux qui désirent étudier et obéir.

Les bulletins, feuilles de renseignements, journaux mensuels ou trimestriels foisonnent. Tous, ou presque, apportent des nouvelles missionnaires ou d’évangélisation. Ce qu’on recherche ici est beaucoup plus un cahier comportant exclusivement des études bibliques ou se rapportant spécifiquement à la Parole.

La plupart des assemblées de «frères» issues du mouvement datant des années 20-30 du siècle écoulé semblent vivre au ralenti, l’esprit missionnaire mis à part. Comme dans tout mouvement, certaines vérités ont été poussées en «épingle», d’autres ont été négligées; des intérêts particuliers ont pris le pas sur les valeurs spirituelles. Nous assistons à un rétrécissement sérieux de l’influence, de l’action que devraient avoir des églises de foi, c’est-à-dire formées d’enfants de Dieu véritables, scellés par l’Esprit de Dieu.

En toute humilité, nous désirons demander au Seigneur sa lumière, afin de marcher selon sa grâce, en fidélité, devant sa face. Nous ne saurions prétendre connaître tout ce que Dieu veut pour les siens et son église, mais notre désir est d’apporter ce qui, aujourd’hui, est utile pour l’édification et la consolation de nombreux enfants de Dieu. Précisons que nous ne voudrions pas représenter un point de vue particulier, mais étudier la Parole, en respectant la sainteté de Dieu.

Chaque étude signée restera sous la responsabilité de son auteur. L’enseignement de ces pages semble devoir être d’une étendue qui surprendra peut-être. Notre désir est, à la fois, de présenter des études fouillées pour le chrétien avancé, mais aussi des explications de termes, de langage, pour ceux qui ne connaissent pas notre langue d’une manière approfondie.

A titre d’essai, nous ferons parvenir un certain nombre d’exemplaires au monde francophone d’outre-mer. Il faudra ainsi tenir compte de ce champ de diffusion.

De divers côtés, sinon dans nos vieux pays, on demande, en effet, une littérature chrétienne plus abondante, basée sur la Bible, la Parole de Dieu. Quelques-uns d’entre nous ont cru devoir répondre à ce désir. Nous plaçons ces cahiers sous le regard du «Chef», demandant à Dieu sa bénédiction pour rendre témoignage à la Vérité.

Les éditeurs

Où nous mène la formidable évolution qui soulève le monde chrétien tout entier? En cette période d’après le Concile du Vatican Il, il est utile de dresser un bilan des faits, même provisoire, et de procéder à un tour d’horizon général.

Eléments positifs de l’évolution catholique: Incontestablement, des mouvements intéressants se font sentir dans l’Eglise romaine: étude et diffusion de la Bible en voie de développement, dialogue engagé avec les autres confessions, reconnaissance du fait que les communautés des «frères séparés» protestants peuvent porter le titre d’églises, admission d’une part de responsabilité dans la rupture du XVIe siècle. Au cours du Concile du Vatican Il, l’opinion a été exprimée à maintes reprises que l’Eglise catholique avait besoin d’un renouveau si elle voulait réellement entreprendre le dialogue avec les églises non-romaines. Il y eut des discussions très libres, suivies de votes positifs impressionnants, par exemple sur la collégialité des évêques gouvernant l’Eglise avec le pape, l’usage de la langue vulgaire dans le culte, l’oecuménisme, la liberté religieuse, la limitation des naissances, le peuple juif, l’Ecriture Sainte et la Tradition, etc.

Fin décevante de Vatican Il: Rappelons quelques faits justifiant cette impression de l’ensemble des observateurs non catholiques.

La collégialité des évêques doit être entendue de telle manière que la primauté du pape demeure intacte. La structure monarchique de l’Eglise romaine n’en sera pas affectée, le pape reste le souverain absolu. Le collège épiscopal n’a aucune autorité sans ce dernier. Paul VI, dans son discours d’ouverture à la troisième session, ne s’en est pas référé moins de sept fois à sa primauté, et le mot-clé qu’il a constamment utilisé était celui de «hiérarchie sacrée». Le pasteur G. Richard-Molard estime qu’un tel discours «ne peut guère qu’hérisser la plupart des chrétiens non catholiques romains» («Messager Social», 10 déc.; S. CE- P. I., 1er oct.; 24 sept. 1964).

Il est clair, selon le même pasteur, «que l’Eglise catholique est toujours placée sous l’unique pouvoir de l’Eglise romaine. Or, il ne s’agit pas là d’une découverte de La Palice, mais d’une situation, chaque jour plus insupportable pour les catholiques eux-mêmes. Cette direction totalitaire italienne, ou pire encore, romanisée, possède encore tous les leviers de commande» («Christianisme au XXe siècle», 29 oct. 1964). Cela n’empêche pas qu’une seconde force «se manifeste par l’esprit nouveau qui anime une partie toujours plus large du catholicisme non italien. Il ne faut pas s’imaginer que cet esprit ait changé en quoi que ce soit la masse, mais il passe sur quelques centaines d’évêques, sur de nombreux prêtres et sur une élite de laïcs» (ibid.).

La Vierge Marie a été proclamée Mère de l’Eglise, sans l’avis des pères conciliaires, par Paul VI, qui lui a consacré la moitié de son discours de clôture {cf. «Chrétien Evangélique», déc. 1964, p. 5). Cette proclamation «a détruit tous les efforts des pères conciliaires qui. .. s’étaient ingéniés à éviter autant que possible les déclarations de nature à. ..donner de l’extension au dogme marial et à choquer les protestants» {«Christ U. Welt», cité par S. CE. P. I., 3 déc. 1964).

Le 11 octobre 1963, le pape a terminé une allocution aux pères du Concile et aux fidèles par cette prière à la Sainte Vierge: «O Marie, nous vous prions pour nos frères encore séparés de notre famille catholique. Voyez comment, parmi eux, une phalange glorieuse célèbre votre culte avec fidélité et amour. Voyez comment parmi d’autres, si résolus à se dire chrétiens, commence à renaître aujourd’hui votre souvenir et votre culte, ô Vierge très bonne. Appelez avec nous tous ces fils, qui sont vôtres, à la même unité sous votre protection maternelle et céleste» («Documentation Catholique», 3 novembre 1963).

Le cardinal Doepfner, de Munich, dont les interventions au Concile ont été souvent remarquées, vient de déclarer à son tour: «Amoindrir dans l’Eglise le culte de la Vierge Marie serait un malentendu et une mauvaise interprétation des enseignements du Concile. ..Nous voulons approfondir et enraciner encore plus fort dans ce mystère du Christ le riche héritage laissé à l’Eglise par la Vierge Marie. Elle a un grand rôle à jouer dans l’Eglise, qui voit en elle son image originelle» {«Figaro», 28 déc. 1964).

Le dogme romain: Dans son livre récent sur l’Unité, le cardinal Béa répète des dizaines de fois: 1°) que l’enseignement romain, étant infaillible, ne saurait subir dans son essence aucune modification; 2°) que l’Eglise catholique étant la seule vraie Eglise du Christ, l’unité finale ne peut être envisagée que par le retour de tous les baptisés orthodoxes et protestants au bercail du successeur de saint Pierre. Ce caractère intangible du dogme catholique n’a cessé d’être proclamé clairement par Jean XXIII, Paul VI et tous les porte-parole de Rome. Le professeur E. Schlink, observateur de l’Eglise Evangélique d’Allemagne à Vatican Il, après avoir noté que les délibérations conciliaires sont « révolutionnaires» pour l’Eglise romaine, ajoute: «Aucune des resolutions jusqu’ici adoptées n’a «rapporté, modifié ou même réinterprété de manière satisfaisante un seul des dogmes qui divisent la chrétienté » (S. CE. P. I., 17 déc.1964).

Cela n’a pas empêché le professeur de théologie protestant O. Cullmann de déclarer que Vatican Il «n’a fermé aucune porte ». Dans une interview accordée au journal «Le Monde », M. Cullmann reconnaît que les textes élaborés au Concile sont décevants, car la plupart sont des textes de compromis. Le Concile actuel est lié par celui du Vatican I (en 1870, où fut proclamée l’infallibilité pontificale), et par les dogmes mariaux antérieurs, inchangeables eux aussi. Mais il ajoute: «Je ne partage pas le pessimisme de certains qui s’exprime dans ce slogan: «II ne sortira rien de ce Concile! » Tous les textes sont formulés de telle sorte qu’aucune porte n’est fermée, et qu’ils ne seront pas un obstacle à la future discussion entre catholiques ni au dialogue avec les non-catholiques, comme le sont les décisions des Conciles antérieurs » (cité par «Vie Protestante », 23 oct. 1964). -Puisque les dogmes romains sont infaillibles (voir les anathèmes du Concile de Trente), on se demande sur quoi porte la discussion. ..Si la porte n’est pas fermée, elle ne l’est qu’à sens unique et ne nous paraît conduire qu’au bercail de saint Pierre.

(à suivre)
Extrait avec autorisation du périodique «Le Chrétien évangélique »

(2 Tim.1, 7-9)

«Dieu ne nous a pas donné un esprit de timidité, mais de force, d’amour e! de prudence.»

Timide = qui manque de hardiesse et d’assurance, dit le dictionnaire. Dieu, en vue du but qu’il s’est proposé, nous a adressé une «VOCATION SAINTE», et pour cette vocation, il nous revêt:

de force – par quoi nous devons comprendre force de caractère, maîtrise de soi, tranquillité d’esprit, toutes choses qui sont contraires à la timidité. Une stabilité nouvelle, créée par le Saint-Esprit de Dieu qui nous donne l’assurance du salut; un contrôle de soi-même qui peut ne pas être naturel, mais qui est le résultat du travail de cet Esprit.

d’amour – de compréhension, de compassion, de pardon, amour qui n’est pas mollesse, ni faiblesse, mais qui prend part aux malheurs du prochain, qui comprend le pécheur et repousse le péché.

de prudence – mieux encore discipline personnelle, d’intelligence avertie, de jugement balancé, nuancé, sans laisser-aller.

Etes-vous craintif de nature, manquez-vous d’assurance, avez-vous ce qu’on appelle un complexe d’infériorité, craignez-vous de vous affirmer? Lisez les lettres à Timothée. C’était un timide de nature, et l’apôtre l’encouragea. Notez ceci: Dieu DONNE UN AUTRE ESPRIT que celui que vous aviez précédemment. Il donne gratuitement. Alors, demandez, priez. Il vous DONNERA.

Le but de nos études est de faire connaître et comprendre (Ps. 82, 5) les pensées de Dieu révélées dans sa Parole, afin de vivre dans la lumière. Dans un monde où Satan règne pour obscurcir la vérité, voire même la cacher, il importe que le juste – sauvé par la foi en Jésus-Christ – connaisse «les fondements» de la vérité divine.

Les lignes suivantes ne veulent être qu’un canevas de «la saine doctrine», telle que la Parole de Dieu nous la montre. Cet enseignement est à la fois christologique (Matth. 7, 28; 1 Cor. 2, 1-2) et apostolique (Act. 2, 42) ; il comprend l’ensemble des vérités divines.

I L’INSPIRATION VERBALE DE LA BIBLE

La pierre de touche de tout ce qui suit est la doctrine de l’inspiration des Ecritures. «Toute Ecriture est inspirée de Dieu» (2 Tim. 3, 16). Nous possédons aujourd’hui suffisamment de preuves, devant lesquelles tout homme sincère doit s’incliner. La Bible est la révélation de Dieu à l’égard de l’homme. Ce n’est pas un livre ecclésiastique quelconque, ni un ouvrage symbolique ou philosophique. C’est simplement «la Parole de Dieu» qui ne se laisse pas discuter. Des hommes de Dieu, poussés par l’Esprit, rédigèrent les 66 livres de cette divine Bibliothèque (2 Pi. 1, 21 ). Tout en gardant leur caractère et leur personnalité, ils furent de simples véhicules utilisés pour transmettre intégralement les pensées divines. C’est un miracle et un miracle ne s’explique pas. On peut l’accepter ou le rejeter; mais le fait est là.

Il LA TRINITÉ DE DIEU

Il en est de ce terme comme d’autres: la doctrine de la trinité de Dieu se trouve clairement révélée dans la Bible, bien que cette expression n’y soit pas mentionnée. Lucien déjà, rhéteur et philosophe grec du 2me siècle, fait confesser le chrétien dans son «Philopatris»: «le Dieu exalté …Fils du Père, Esprit procédant du Père, l’Un d’entre les Trois et Trois d’entre Un.» Le terme même fut employé formellement pour la première fois lors du synode en 317 à Alexandrie.

Cela ne signifie rien d’autres que tri-unité. La déité est une trinité, une unité qui possède 3 personnes distinctes ayant la même vie et la même essence.

L’ANCIEN TESTAMENT

Nous y voyons une révélation progressive qui trouve sa complète manifestation dans le Nouveau Testament. Des allusions claires et sans équivoques devaient ouvrir les yeux des personnes pieuses du temps du Seigneur.

Gen. 1,1: «Au commencement Dieu.» Ce terme «ELOHIM» est au pluriel et Moïse l’emploie quelque 500 fois. A remarquer qu’à chaque reprise le verbe qui l’accompagne est au singulier, ce qui prouve bien l’unité dans la pluralité des Personnes de la Déité.
Gen. 1,26: «Et Dieu dit: Faisons l’homme selon notre ressemblance»
Gen. 3, 22: «Voici l’homme est devenu comme l’un de nous»
Es. 48, 16: «Le Seigneur l’Eternel» – Dieu le Père
«m’a envoyé» – Dieu le Fils
«et son Esprit» -Dieu le Saint-Esprit
Zach. 12, 10: «Et je répandrai» -Dieu le Père
«un esprit de grâce» – Dieu le Saint-Esprit
«ils se lamenteront sur lui» -Dieu le Fils

LE NOUVEAU TESTAMENT

Il dévoile clairement cette vérité et nous confirme que la déité se compose de 3 Personnes: Dieu le Père, Dieu le Fils et Dieu le Saint- Esprit (Matth. 28, 19; Jean 1:1; Jean 5:3-4; Jean 8:54).

La trinité de Dieu est déjà engagée lors du baptême du Seigneur (Matth. 3, 13-17). On ne peut, à ce sujet, s’exprimer plus clairement que le Seigneur le faisait dans Jean 14:16-26: «Mais le Consolateur, l’Esprit-Saint (3ème Personne) que le Père (1ère Personne) enverra en mon nom (2ème Personne).»

La grande bénédiction apostolique nous laisse «la grâce du Seigneur Jésus-Christ», «l’amour de Dieu» et «la communion du Saint-Esprit» (2 Cor. 13, 13).

D’ailleurs, l’homme lui-même est une trinité composée de l’esprit, de l’âme et du corps. Il est attaqué par une autre trinité: le monde autour de lui, la chair en lui, et le diable au-dessous de lui. La loi du péché en lui est également représentée par une trinité:la convoitise de la chair, la convoitise des yeux et l’orgueil de la vie. Et, enfin, il peut être sauvé par la trinité divine: Dieu le Père, Dieu le Fils et Dieu le Saint-Esprit.

III JÉSUS-CHRIST

1. Sa Divinité

Jean 1, 1-3 suffirait pour établir cette vérité bénie:
Au commencement était la Parole» (le Verbe dans son existence éternelle)
cet la Parole était auprès de Dieu» (le Verbe dans son existence personnelle)
et la Parole était Dieu» (le Verbe dans son essence divine)

2. Son incarnation

Il est «Dieu manifesté en chair» (1 Tim. 3, 16). Ce mystère, dans lequel même les anges désirent plonger leurs regards, nous a été révélé. Les 7 degrés de son abnégation nous sont donnés en Phil. 2, 7-9. Aucune difficulté n’est inconnue du Seigneur qui a été tenté comme nous; Il peut donc nous accorder miséricorde et secours au moment opportun (Hébr. 4, 15-16). Ami qui souffres, confie-toi en Lui, car son nom est «Merveilleux».

3. Son CEuvre rédemptrice

Rom. 4, 25 dit: «Jésus, notre Sauveur, lequel a été livré pour nos fautes et a été ressuscité pour notre justification».
L’Ancien Testament y fait continuellement allusion (Ex. 12, Ps.22, Es.53).
Les Evangiles en sont la réalisation
Les Actes le proclament
Les Epîtres l’expliquent
L’Apocalypse, enfin, décrit la destruction de ceux qui ont rejeté cette oeuvre.

(à suivre)