L’influence des missionnaires sur la musique non occidentale

Tandis qu’on écoutait un enregistrement, je regardais la réaction d’un pasteur d’Asie centrale. Son pied tapait en rythme, ses doigts dansaient sur ​​le recueil de cantiques comme s’il était un instrument de musique, et il souriait, béat de joie. Pour mes oreilles occidentales, le chant semblait très bizarre, mais il a résonné profondément en cet homme. C’était « sa » musique ; autrement dit, il était réalisé dans le style de son pays. La musique de son église est très éclectique, avec des hymnes russes, ouzbeks, ukrainiens et anglais. Cette église a seulement quelques hymnes vraiment autochtones. Quelques amis missionnaires et moi avons le privilège de les aider à préserver et à élargir leur répertoire actuel.

Comment ont fait les missionnaires dans le passé quand ils ont été confrontés à des systèmes de musique inconnus ? Pour quelles raisons ont-ils interdit certains styles musicaux ? De quelle manière ont-ils enrichi ou appauvri la musique indigène ? Voici quelques questions auxquelles nous allons tenter de répondre.

Tout d’abord, posons deux points importants :

  • Les ethnomusicologues ont observé que la musique de toutes les cultures, y compris les plus éloignées, est constamment en mouvement, même en dehors de l’influence des missionnaires.
  • Alors que, parmi les premiers missionnaires, certains tenaient la musique de l’église occidentale comme supérieure, d’autres avaient une approche plus ouverte de la musique autochtone. Sarah Boardman Judson, la deuxième épouse du célèbre missionnaire américain Adoniram Judson, ne se contenta pas de traduire simplement des hymnes anglais, mais écrivit de nombreux cantiques originaux en birman, dont certains sont encore chantés aujourd’hui, plus de 175 ans plus tard.

Deux exemples d’influence occidentale sur la musique autochtone

Missionnaires et musique en Océanie

Selon l’ethnomusicologue Mervyn McLean, les catholiques arrivèrent en Océanie au xvie siècle, suivis par des missionnaires protestants de la London Missionary Society. Tant les missionnaires que les indigènes convertis interdirent la musique traditionnelle et la danse, principalement pour des raisons morales, car elles étaient vues comme associées à la religion païenne, aux relations sexuelles illicites et à la guerre. Les missionnaires furent également troublés par la façon dont les fêtes interminables empêchaient les gens de vaquer à leur travail quotidien, ce qui induisait des dettes, des conflits et des pénuries alimentaires. Cependant, dans certains cas, la musique traditionnelle et la danse furent interdites simplement parce qu’elles étaient jugées frivoles.

Bien que ces prohibitions aient conduit à la disparition complète de genres et de styles de musique, ces changements se produisirent dans toutes les cultures, même en dehors de toute influence extérieure. Les missionnaires ont en fait « accéléré » cette évolution et ont introduit le chant d’hymnes pour combler le vide qu’ils avaient créé. Leurs chants ont grandement influencé la culture océanique, parce qu’ils ont été enseignés de façon délibérée, appuyés par toute la puissance émotionnelle liée à la religion.

Mais les missionnaires eurent beaucoup de difficultés à faire apprendre leurs hymnes aux Océaniens. Par exemple, sur l’île de Pukapuka, les missionnaires travaillèrent pendant 90 longues années avant que les gens chantent les airs occidentaux de façon « satisfaisante ». Un missionnaire perspicace a constaté en 1925 :«[Ils] ne peuvent tout simplement pas entendre ni reproduire certains des tons et des demi-tons ou des phrases qui viennent facilement à un Anglais. [Ils] ne font que suivre la ligne de moindre résistance en adaptant nos chants et nos hymnes aux équivalents musicaux naturels à leurs oreilles les plus proches. »[note]Mervyn McLean, « Towards a Typology of Musical Change: Missionaries and Adjustive Response in Oceania », The World of Music, vol. 28-1, Mechanisms of Change, 1986, p. 29-43.[/note]

Missionnaires et musique en Afrique : les Pygmées Baaka

Les Baakas vivent dans une région du centre de l’Afrique[note]Dans une région à cheval sur le Centrafrique, la République du Congo et le Cameroun.[/note]. Contrairement à la culture occidentale, la culture baaka ne fait pas une distinction claire entre musique et danse. Lorsque des missionnaires sont arrivés en territoire baaka, avec une connaissance très superficielle de la culture baaka, leur activité a eu des implications importantes, qui touchaient au-delà de leurs cérémonies traditionnelles: elle a eu des répercussions sur leur économie, les pratiques médicinales, et bien plus encore.

Tout d’abord, sur l’insistance d’une missionnaire évangélique, les Baakas convertis ont cessé de danser de nombreuses danses traditionnelles et encouragé les autres à faire de même. Cependant ils sont restés fidèles à ces pratiques en secret, ce qui a généré de l’hypocrisie. Ensuite, les Baakas ont créé de nouveaux genres, comme la « danse de Dieu » (un mélange synchrétiste néfaste d’éléments traditionnels liés à leurs croyances païennes et d’une apparence chrétienne) et ils ont adapté des hymnes chrétiens occidentaux à leur manière de chanter avec des voix superposées et une grande complexité rythmique. Puis les Baakas convertis ont utilisé leur appartenance à l’église pour exploiter les autres, alors que leur abandon des pratiques traditionnelles les rendait plus vulnérables que jamais à de mauvais traitements par les villageois. Enfin, sous l’influence d’une ethnomusicologue agnostique, ils sont venus à la conclusion erronée que leur culture et le christianisme étaient mutuellement incompatibles.[note]Michelle Kisliuk, Seize the Dance: BaAka Musical Life and the Ethnography of Performance, New York, Oxford University Press, 1998.[/note]

Trois points de vue d’ethnomusicologues chrétiens

  1. Depuis la naissance de leur discipline dans les années 1950-1960, des ethnomusicologues s’efforcent de devenir « bi-musicaux », c’est-à-dire d’apprendre la musique d’une autre culture. Selon Brian Schrag[note]Brian E. Schrag, «Becoming Bi-Musical: The Importance and Possibility of Missionary Involvement in Music»,Missiology, vol. 17, n° 3, 1989, ATLA Serials, Religion Collection, EBSCOhost.[/note], cette « bi-musicalité » est la principale façon dont les missionnaires peuvent éviter d’appauvrir la musique traditionnelle. Les missionnaires consacrent un temps et des efforts considérables pour maîtriser la langue du peuple qu’ils approchent, mais bien souvent ils ne maîtrisent pas sa musique. Bien que la priorité doive certainement être accordée à la langue, il estime qu’il existe des raisons musicologiques, anthropologiques et bibliques pour lesquelles ils devraient chercher à devenir « bi-musicaux » aussi.

Musicologiquement, la musique occidentale n’est pas la norme à laquelle toutes les cultures doivent être mesurées. Chaque système de musique crée des réactions émotionnelles chez ceux qui le connaissent, qu’aucune autre musique ne peut faire. Une riche variété existe dans la musique de différentes cultures. En outre, le missionnaire bi-musical peut aider à préserver la musique traditionnelle qui est en danger d’extinction, en particulier dans les sociétés orales.

Anthropologiquement, plus vous en apprenez sur leur musique, mieux vous comprendrez les gens eux-mêmes. Étudier la musique est une clé pour découvrir les mystères de la culture. Et mieux un missionnaire comprend la culture, mieux, il (ou elle) peut communiquer l’Évangile clairement.

Bibliquement, l’homme est créé à l’image de Dieu (Gen 1.27), et toute la création de Dieu témoigne de son génie (Ps 19.1). Toutes les nations sont appelées à le chanter (Ps 98). Aider les populations autochtones à créer de nouveaux chants à la gloire de Dieu, tel est le privilège du missionnaire bi-musical.

  1. Vida Chenoweth[note]Vida Chenoweth, «Spare Them Western Music!» (1984), Worship and Mission for the Global Church: An Ethnodoxology Handbook, éd. James R. Krabill, 2013.[/note], ethnomusicologue et linguiste missionnaire pionnière, met en garde contre des changements musicaux apportés par les missionnaires : interdire la musique indigène avant de l’étudier a conduit à la faire perdurer dans la clandestinité. Le syncrétisme, ou le mélange d’éléments religieux chrétiens et païens, est un réel danger lorsque les pratiques de musique restent cachées.

De plus, rejeter immédiatement la musique traditionnelle peut arrêter sa transmission naturelle d’une génération à l’autre, étouffant la créativité et appauvrissant les genres musicaux. En outre, cela peut prédisposer des musiciens locaux contre le christianisme. « Après leur conversion, les compositeurs vont spontanément chanter l’événement le plus important de leur vie », affirme V. Chenoweth.

Elle met également en garde contre l’introduction des instruments et notations occidentaux, dans d’autres contextes, car ils ont tendance à couler l’imagination musicale dans un moule occidental. Le musicien indigène court le risque de perdre la capacité de penser dans les termes musicaux de son propre peuple, particulièrement s’il est de tradition orale. Elle conclut : « Pourquoi quelqu’un voudrait-il capturer tous les oiseaux de la forêt, les peindre en gris, et leur donner tous le même chant ? Dieu a fait chacun d’eux et chacun a son chant à chanter pour lui. »

  1. La dernière optique est celle de T. W. Hunt (1929-2014), musicologue, professeur d’université, ancien missionnaire et ardent disciple du Christ. Il a influencé nombre de missionnaires à travers le monde par ses écrits et ses enseignements[note]T.W. Hunt, «Church Music in Southern Baptist Foreign Missions»,Baptist History and Heritage, vol. 21, n° 3.[/note].

Hunt décrit comment les missionnaires ont enrichi la musique de différentes cultures. Lorsque des personnes sont venues à Christ et qu’on leur a donné la liberté d’adorer de façon naturelle à leur culture, Dieu a mis un cantique nouveau de louange dans leur cœur (Ps 40.3), l’hymnologie indigène a prospéré et de nouveaux genres sont nés.

Il rappelle également les hésitations de certains missionnaires en Afrique à écrire la musique locale avec la notation occidentale, craignant de « geler » son style spontané et de décourager l’improvisation. Mais ce sont les Africains qui ont réclamé d’apprendre la notation occidentale ; ainsi leur musique serait mieux préservée et plus facilement diffusée.

Les peuples autochtones ne sont cependant pas toujours désireux d’avoir une musique d’église qui reflète leur culture. Certains hésitent à utiliser des styles de musique qui leur rappellent leur vie avant leur conversion. Une missionnaire écrit : « Nous devons laisser les chrétiens nationaux décider quel genre de musique ils veulent utiliser dans leurs églises, puis nous insérer dans la situation aussi délicatement que possible. »

L’homme a été créé par Dieu dans le but de jouir de la communion avec lui, et il est tombé parce qu’il a rejeté cette communion. Par conséquent, certaines expressions culturelles sont « désastreuses », selon Hunt. Quand quelqu’un choisit de croire en Jésus pour rétablir sa communion avec Dieu il devient un disciple et cela entraîne certains changements dans sa façon de vivre, bien que son identité ethnique demeure intacte. Qu’est-ce que cela implique dans une culture donnée ? C’est assurément une question complexe à laquelle les missionnaires sont confrontés.

Si l’on revient à l’exemple des Baakas, leur problème majeur était probablement le manque de maturité. Les missionnaires semblaient être plus intéressés par le nombre de convertis que par leur croissance spirituelle. Lorsque les Baakas ne furent plus en mesure d’exploiter les autres à travers le christianisme, ils retournèrent à leurs vieilles habitudes. Ils ont « joué à l’église »pendant une courte période, puis abandonné. En outre, bien que les missionnaires aient qualifié certaines danses de sataniques, les chrétiens baakas ont continué à les pratiquer en secret. Enfin, comme ils avaient une compréhension très superficielle du christianisme, ils ont été facilement influencés par une personne qui les a convaincus qu’il était impossible d’être un adorateur du Dieu chrétien et de préserver la culture baaka. Les missionnaires auraient dû leur apprendre qu’en Christ, ils devenaient des créatures nouvelles, pleinement baakas, mais nettoyées de ce que la Bible appelle « souillure de la chair et de l’esprit ».

Quelques suggestions pratiques pour les missionnaires

En conclusion, plusieurs propositions peuvent être faites aux missionnaires actuels et futurs. Tout d’abord, nous devons être respectueux de l’œuvre des missionnaires précédents. Plusieurs avaient bien raison de décourager parfois certaines pratiques culturelles, y compris certains styles de musique, à cause de la corruption du péché qui y était lié. Certains missionnaires étaient remarquablement clairvoyants sur la musique non occidentale et ont fait beaucoup pour encourager l’écriture de cantiques autochtones, même sans les connaissances ethnomusicologiques et la technologie que nous avons aujourd’hui.

Deuxièmement, nous devrions être plus patients avec les groupes de populations autochtones que nous cherchons à servir. Bien que nous ne devions plus attendre d’eux qu’ils chantent des hymnes occidentaux en harmonie parfaite (pas plus que nous ne pouvons chanter un de leurs chants traditionnels correctement), nous devrions également être prêts à leur proposer ces mêmes hymnes si c’est eux qui les demandent. Des années peuvent être nécessaires avant qu’ils aient la maturité spirituelle et musicale pour voir le besoin d’une musique indigène et pour discerner quels éléments doivent être conservés ou rejetés.

Troisièmement, grâce à notre engagement à long terme dans une autre culture, nous devrions nous efforcer d’être aussi bi-musicaux que possible, afin de communiquer l’Évangile avec clarté et cohérence. De toute évidence, nous devons encourager, autant que possible, l’utilisation des instruments indigènes, de leur gamme musicale, de leur style, de leur système de notation, en laissant les jugements esthétiques aux musiciens autochtones.

Par-dessus tout, notre objectif ultime devrait être, non la préservation de la culture, mais la connaissance du Christ : « C’est lui que nous annonçons, exhortant tout homme, et instruisant tout homme en toute sagesse, afin de présenter à Dieu tout homme, devenu parfait en Christ. » (Col 1.28) Si nous manquons à cet objectif, nous manquons à la mission confiée par Jésus (Mat 28.18-20) et nous risquons d’appauvrir les gens que nous désirons atteindre. L’évangile est la glorieuse raison pour laquelle nous devons faire de la musique. En dépit de nos erreurs et de celles de nos prédécesseurs dans la contextualisation culturelle, nous pouvons être sûrs que, par la grâce et la miséricorde de Dieu, l’Église rassemblée chantera dans le ciel avec des fidèles de toute tribu, langue, parenté, et nation (Apoc 5.9).

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En présentant le premier numero de PROMESSES

à nos frères en la foi, nous pensons bien faire d’exposer les principes qui seront à la base de ce «Cahier d’études bibliques».

Nous chercherons à être utiles à tous, à l’église de Dieu d’abord, c’est-à-dire au Chef de l’église, Christ, mais aussi à ceux pour qui la Parole est précieuse, à ceux qui désirent étudier et obéir.

Les bulletins, feuilles de renseignements, journaux mensuels ou trimestriels foisonnent. Tous, ou presque, apportent des nouvelles missionnaires ou d’évangélisation. Ce qu’on recherche ici est beaucoup plus un cahier comportant exclusivement des études bibliques ou se rapportant spécifiquement à la Parole.

La plupart des assemblées de «frères» issues du mouvement datant des années 20-30 du siècle écoulé semblent vivre au ralenti, l’esprit missionnaire mis à part. Comme dans tout mouvement, certaines vérités ont été poussées en «épingle», d’autres ont été négligées; des intérêts particuliers ont pris le pas sur les valeurs spirituelles. Nous assistons à un rétrécissement sérieux de l’influence, de l’action que devraient avoir des églises de foi, c’est-à-dire formées d’enfants de Dieu véritables, scellés par l’Esprit de Dieu.

En toute humilité, nous désirons demander au Seigneur sa lumière, afin de marcher selon sa grâce, en fidélité, devant sa face. Nous ne saurions prétendre connaître tout ce que Dieu veut pour les siens et son église, mais notre désir est d’apporter ce qui, aujourd’hui, est utile pour l’édification et la consolation de nombreux enfants de Dieu. Précisons que nous ne voudrions pas représenter un point de vue particulier, mais étudier la Parole, en respectant la sainteté de Dieu.

Chaque étude signée restera sous la responsabilité de son auteur. L’enseignement de ces pages semble devoir être d’une étendue qui surprendra peut-être. Notre désir est, à la fois, de présenter des études fouillées pour le chrétien avancé, mais aussi des explications de termes, de langage, pour ceux qui ne connaissent pas notre langue d’une manière approfondie.

A titre d’essai, nous ferons parvenir un certain nombre d’exemplaires au monde francophone d’outre-mer. Il faudra ainsi tenir compte de ce champ de diffusion.

De divers côtés, sinon dans nos vieux pays, on demande, en effet, une littérature chrétienne plus abondante, basée sur la Bible, la Parole de Dieu. Quelques-uns d’entre nous ont cru devoir répondre à ce désir. Nous plaçons ces cahiers sous le regard du «Chef», demandant à Dieu sa bénédiction pour rendre témoignage à la Vérité.

Les éditeurs

Où nous mène la formidable évolution qui soulève le monde chrétien tout entier? En cette période d’après le Concile du Vatican Il, il est utile de dresser un bilan des faits, même provisoire, et de procéder à un tour d’horizon général.

Eléments positifs de l’évolution catholique: Incontestablement, des mouvements intéressants se font sentir dans l’Eglise romaine: étude et diffusion de la Bible en voie de développement, dialogue engagé avec les autres confessions, reconnaissance du fait que les communautés des «frères séparés» protestants peuvent porter le titre d’églises, admission d’une part de responsabilité dans la rupture du XVIe siècle. Au cours du Concile du Vatican Il, l’opinion a été exprimée à maintes reprises que l’Eglise catholique avait besoin d’un renouveau si elle voulait réellement entreprendre le dialogue avec les églises non-romaines. Il y eut des discussions très libres, suivies de votes positifs impressionnants, par exemple sur la collégialité des évêques gouvernant l’Eglise avec le pape, l’usage de la langue vulgaire dans le culte, l’oecuménisme, la liberté religieuse, la limitation des naissances, le peuple juif, l’Ecriture Sainte et la Tradition, etc.

Fin décevante de Vatican Il: Rappelons quelques faits justifiant cette impression de l’ensemble des observateurs non catholiques.

La collégialité des évêques doit être entendue de telle manière que la primauté du pape demeure intacte. La structure monarchique de l’Eglise romaine n’en sera pas affectée, le pape reste le souverain absolu. Le collège épiscopal n’a aucune autorité sans ce dernier. Paul VI, dans son discours d’ouverture à la troisième session, ne s’en est pas référé moins de sept fois à sa primauté, et le mot-clé qu’il a constamment utilisé était celui de «hiérarchie sacrée». Le pasteur G. Richard-Molard estime qu’un tel discours «ne peut guère qu’hérisser la plupart des chrétiens non catholiques romains» («Messager Social», 10 déc.; S. CE- P. I., 1er oct.; 24 sept. 1964).

Il est clair, selon le même pasteur, «que l’Eglise catholique est toujours placée sous l’unique pouvoir de l’Eglise romaine. Or, il ne s’agit pas là d’une découverte de La Palice, mais d’une situation, chaque jour plus insupportable pour les catholiques eux-mêmes. Cette direction totalitaire italienne, ou pire encore, romanisée, possède encore tous les leviers de commande» («Christianisme au XXe siècle», 29 oct. 1964). Cela n’empêche pas qu’une seconde force «se manifeste par l’esprit nouveau qui anime une partie toujours plus large du catholicisme non italien. Il ne faut pas s’imaginer que cet esprit ait changé en quoi que ce soit la masse, mais il passe sur quelques centaines d’évêques, sur de nombreux prêtres et sur une élite de laïcs» (ibid.).

La Vierge Marie a été proclamée Mère de l’Eglise, sans l’avis des pères conciliaires, par Paul VI, qui lui a consacré la moitié de son discours de clôture {cf. «Chrétien Evangélique», déc. 1964, p. 5). Cette proclamation «a détruit tous les efforts des pères conciliaires qui. .. s’étaient ingéniés à éviter autant que possible les déclarations de nature à. ..donner de l’extension au dogme marial et à choquer les protestants» {«Christ U. Welt», cité par S. CE. P. I., 3 déc. 1964).

Le 11 octobre 1963, le pape a terminé une allocution aux pères du Concile et aux fidèles par cette prière à la Sainte Vierge: «O Marie, nous vous prions pour nos frères encore séparés de notre famille catholique. Voyez comment, parmi eux, une phalange glorieuse célèbre votre culte avec fidélité et amour. Voyez comment parmi d’autres, si résolus à se dire chrétiens, commence à renaître aujourd’hui votre souvenir et votre culte, ô Vierge très bonne. Appelez avec nous tous ces fils, qui sont vôtres, à la même unité sous votre protection maternelle et céleste» («Documentation Catholique», 3 novembre 1963).

Le cardinal Doepfner, de Munich, dont les interventions au Concile ont été souvent remarquées, vient de déclarer à son tour: «Amoindrir dans l’Eglise le culte de la Vierge Marie serait un malentendu et une mauvaise interprétation des enseignements du Concile. ..Nous voulons approfondir et enraciner encore plus fort dans ce mystère du Christ le riche héritage laissé à l’Eglise par la Vierge Marie. Elle a un grand rôle à jouer dans l’Eglise, qui voit en elle son image originelle» {«Figaro», 28 déc. 1964).

Le dogme romain: Dans son livre récent sur l’Unité, le cardinal Béa répète des dizaines de fois: 1°) que l’enseignement romain, étant infaillible, ne saurait subir dans son essence aucune modification; 2°) que l’Eglise catholique étant la seule vraie Eglise du Christ, l’unité finale ne peut être envisagée que par le retour de tous les baptisés orthodoxes et protestants au bercail du successeur de saint Pierre. Ce caractère intangible du dogme catholique n’a cessé d’être proclamé clairement par Jean XXIII, Paul VI et tous les porte-parole de Rome. Le professeur E. Schlink, observateur de l’Eglise Evangélique d’Allemagne à Vatican Il, après avoir noté que les délibérations conciliaires sont « révolutionnaires» pour l’Eglise romaine, ajoute: «Aucune des resolutions jusqu’ici adoptées n’a «rapporté, modifié ou même réinterprété de manière satisfaisante un seul des dogmes qui divisent la chrétienté » (S. CE. P. I., 17 déc.1964).

Cela n’a pas empêché le professeur de théologie protestant O. Cullmann de déclarer que Vatican Il «n’a fermé aucune porte ». Dans une interview accordée au journal «Le Monde », M. Cullmann reconnaît que les textes élaborés au Concile sont décevants, car la plupart sont des textes de compromis. Le Concile actuel est lié par celui du Vatican I (en 1870, où fut proclamée l’infallibilité pontificale), et par les dogmes mariaux antérieurs, inchangeables eux aussi. Mais il ajoute: «Je ne partage pas le pessimisme de certains qui s’exprime dans ce slogan: «II ne sortira rien de ce Concile! » Tous les textes sont formulés de telle sorte qu’aucune porte n’est fermée, et qu’ils ne seront pas un obstacle à la future discussion entre catholiques ni au dialogue avec les non-catholiques, comme le sont les décisions des Conciles antérieurs » (cité par «Vie Protestante », 23 oct. 1964). -Puisque les dogmes romains sont infaillibles (voir les anathèmes du Concile de Trente), on se demande sur quoi porte la discussion. ..Si la porte n’est pas fermée, elle ne l’est qu’à sens unique et ne nous paraît conduire qu’au bercail de saint Pierre.

(à suivre)
Extrait avec autorisation du périodique «Le Chrétien évangélique »

(2 Tim.1, 7-9)

«Dieu ne nous a pas donné un esprit de timidité, mais de force, d’amour e! de prudence.»

Timide = qui manque de hardiesse et d’assurance, dit le dictionnaire. Dieu, en vue du but qu’il s’est proposé, nous a adressé une «VOCATION SAINTE», et pour cette vocation, il nous revêt:

de force – par quoi nous devons comprendre force de caractère, maîtrise de soi, tranquillité d’esprit, toutes choses qui sont contraires à la timidité. Une stabilité nouvelle, créée par le Saint-Esprit de Dieu qui nous donne l’assurance du salut; un contrôle de soi-même qui peut ne pas être naturel, mais qui est le résultat du travail de cet Esprit.

d’amour – de compréhension, de compassion, de pardon, amour qui n’est pas mollesse, ni faiblesse, mais qui prend part aux malheurs du prochain, qui comprend le pécheur et repousse le péché.

de prudence – mieux encore discipline personnelle, d’intelligence avertie, de jugement balancé, nuancé, sans laisser-aller.

Etes-vous craintif de nature, manquez-vous d’assurance, avez-vous ce qu’on appelle un complexe d’infériorité, craignez-vous de vous affirmer? Lisez les lettres à Timothée. C’était un timide de nature, et l’apôtre l’encouragea. Notez ceci: Dieu DONNE UN AUTRE ESPRIT que celui que vous aviez précédemment. Il donne gratuitement. Alors, demandez, priez. Il vous DONNERA.

Le but de nos études est de faire connaître et comprendre (Ps. 82, 5) les pensées de Dieu révélées dans sa Parole, afin de vivre dans la lumière. Dans un monde où Satan règne pour obscurcir la vérité, voire même la cacher, il importe que le juste – sauvé par la foi en Jésus-Christ – connaisse «les fondements» de la vérité divine.

Les lignes suivantes ne veulent être qu’un canevas de «la saine doctrine», telle que la Parole de Dieu nous la montre. Cet enseignement est à la fois christologique (Matth. 7, 28; 1 Cor. 2, 1-2) et apostolique (Act. 2, 42) ; il comprend l’ensemble des vérités divines.

I L’INSPIRATION VERBALE DE LA BIBLE

La pierre de touche de tout ce qui suit est la doctrine de l’inspiration des Ecritures. «Toute Ecriture est inspirée de Dieu» (2 Tim. 3, 16). Nous possédons aujourd’hui suffisamment de preuves, devant lesquelles tout homme sincère doit s’incliner. La Bible est la révélation de Dieu à l’égard de l’homme. Ce n’est pas un livre ecclésiastique quelconque, ni un ouvrage symbolique ou philosophique. C’est simplement «la Parole de Dieu» qui ne se laisse pas discuter. Des hommes de Dieu, poussés par l’Esprit, rédigèrent les 66 livres de cette divine Bibliothèque (2 Pi. 1, 21 ). Tout en gardant leur caractère et leur personnalité, ils furent de simples véhicules utilisés pour transmettre intégralement les pensées divines. C’est un miracle et un miracle ne s’explique pas. On peut l’accepter ou le rejeter; mais le fait est là.

Il LA TRINITÉ DE DIEU

Il en est de ce terme comme d’autres: la doctrine de la trinité de Dieu se trouve clairement révélée dans la Bible, bien que cette expression n’y soit pas mentionnée. Lucien déjà, rhéteur et philosophe grec du 2me siècle, fait confesser le chrétien dans son «Philopatris»: «le Dieu exalté …Fils du Père, Esprit procédant du Père, l’Un d’entre les Trois et Trois d’entre Un.» Le terme même fut employé formellement pour la première fois lors du synode en 317 à Alexandrie.

Cela ne signifie rien d’autres que tri-unité. La déité est une trinité, une unité qui possède 3 personnes distinctes ayant la même vie et la même essence.

L’ANCIEN TESTAMENT

Nous y voyons une révélation progressive qui trouve sa complète manifestation dans le Nouveau Testament. Des allusions claires et sans équivoques devaient ouvrir les yeux des personnes pieuses du temps du Seigneur.

Gen. 1,1: «Au commencement Dieu.» Ce terme «ELOHIM» est au pluriel et Moïse l’emploie quelque 500 fois. A remarquer qu’à chaque reprise le verbe qui l’accompagne est au singulier, ce qui prouve bien l’unité dans la pluralité des Personnes de la Déité.
Gen. 1,26: «Et Dieu dit: Faisons l’homme selon notre ressemblance»
Gen. 3, 22: «Voici l’homme est devenu comme l’un de nous»
Es. 48, 16: «Le Seigneur l’Eternel» – Dieu le Père
«m’a envoyé» – Dieu le Fils
«et son Esprit» -Dieu le Saint-Esprit
Zach. 12, 10: «Et je répandrai» -Dieu le Père
«un esprit de grâce» – Dieu le Saint-Esprit
«ils se lamenteront sur lui» -Dieu le Fils

LE NOUVEAU TESTAMENT

Il dévoile clairement cette vérité et nous confirme que la déité se compose de 3 Personnes: Dieu le Père, Dieu le Fils et Dieu le Saint- Esprit (Matth. 28, 19; Jean 1:1; Jean 5:3-4; Jean 8:54).

La trinité de Dieu est déjà engagée lors du baptême du Seigneur (Matth. 3, 13-17). On ne peut, à ce sujet, s’exprimer plus clairement que le Seigneur le faisait dans Jean 14:16-26: «Mais le Consolateur, l’Esprit-Saint (3ème Personne) que le Père (1ère Personne) enverra en mon nom (2ème Personne).»

La grande bénédiction apostolique nous laisse «la grâce du Seigneur Jésus-Christ», «l’amour de Dieu» et «la communion du Saint-Esprit» (2 Cor. 13, 13).

D’ailleurs, l’homme lui-même est une trinité composée de l’esprit, de l’âme et du corps. Il est attaqué par une autre trinité: le monde autour de lui, la chair en lui, et le diable au-dessous de lui. La loi du péché en lui est également représentée par une trinité:la convoitise de la chair, la convoitise des yeux et l’orgueil de la vie. Et, enfin, il peut être sauvé par la trinité divine: Dieu le Père, Dieu le Fils et Dieu le Saint-Esprit.

III JÉSUS-CHRIST

1. Sa Divinité

Jean 1, 1-3 suffirait pour établir cette vérité bénie:
Au commencement était la Parole» (le Verbe dans son existence éternelle)
cet la Parole était auprès de Dieu» (le Verbe dans son existence personnelle)
et la Parole était Dieu» (le Verbe dans son essence divine)

2. Son incarnation

Il est «Dieu manifesté en chair» (1 Tim. 3, 16). Ce mystère, dans lequel même les anges désirent plonger leurs regards, nous a été révélé. Les 7 degrés de son abnégation nous sont donnés en Phil. 2, 7-9. Aucune difficulté n’est inconnue du Seigneur qui a été tenté comme nous; Il peut donc nous accorder miséricorde et secours au moment opportun (Hébr. 4, 15-16). Ami qui souffres, confie-toi en Lui, car son nom est «Merveilleux».

3. Son CEuvre rédemptrice

Rom. 4, 25 dit: «Jésus, notre Sauveur, lequel a été livré pour nos fautes et a été ressuscité pour notre justification».
L’Ancien Testament y fait continuellement allusion (Ex. 12, Ps.22, Es.53).
Les Evangiles en sont la réalisation
Les Actes le proclament
Les Epîtres l’expliquent
L’Apocalypse, enfin, décrit la destruction de ceux qui ont rejeté cette oeuvre.

(à suivre)