Chronique de livre de l’église émergente

Sur le thème controversé des églises dites « émergentes », l’ouvrage que nous présentons a été publié en 2005 dans sa forme originale1. Étant donné l’évolution actuelle de la mouvance émergente, et la radicalisation des points de vue de ses partisans les plus en vue (voir par exemple l’ouvrage de Brian McLaren A New Kind of Christianity: Ten Questions That Are Transforming the Faith, HarperOne, 2010), la pertinence des analyses et des avertissements de D.A. Carson se trouve confirmée. Les propos qui suivent ne sont qu’une brève incursion dans l’œuvre abondante et toujours bien documentée d’un auteur qui reste l’un des théologiens évangéliques éminents de notre temps.

D.A. Carson ne prétend pas décrire de manière exhaustive tout le mouvement émergent, dont les frontières sont changeantes et imprécises (p.7). Ce courant, né au début des années 1990 aux États-Unis, continue d’influencer de nombreux leaders chrétiens désemparés par notre civilisation « postmoderne » et soucieux de voir leurs églises rester en phase avec notre époque. Carson juge donc nécessaire d’aborder la question honnêtement. Parcourons quelques points importants de son ouvrage.

Portrait de l’Église émergente (p.9 et ss.)

Le terme « émergent » s’applique généralement à des églises qui ont en commun la préoccupation d’offrir un témoignage adapté à la mentalité postmoderne. Elles ont pour initiateurs des hommes qui très souvent avaient déjà pris leurs distances par rapport aux églises traditionnelles (évangéliques, fondamentalistes, conservatrices) jugées rétrogrades. Ces transformateurs de l’Église en sont venus à la conviction qu’il leur incombait d’ « émerger » de ce qu’ils ressentaient comme un ghetto doctrinal, ecclésial, social et économique. En conséquence, ils ont aussi voulu se démarquer des modèles de croissance de l’Église inspirés du marketing et du matérialisme (dans le style de la Communauté de Willow Creek ou des méga-églises des États-Unis où priment les idées de rendement et d’efficacité). Ils s’efforcent d’aborder les non-croyants en toute simplicité, sans masque. Au lieu d’apporter un Évangile bétonné dans les doctrines ou aligné sur les techniques du monde du spectacle, ils cherchent à communiquer leur foi de manière informelle, en partageant leurs expériences dans une relation d’amitié et de transparence. Ils justifient ainsi ce changement de perspective : le monde est devenu postmoderne, il ne comprend plus les catégories de la modernité héritées des Lumières. Une nouvelle approche s’impose, moins rationaliste, plus ouverte à la diversité, à la convivialité, à l’expérience subjective. Il faut renoncer à penser en termes de vérité unique et absolue, s’ouvrir aux échanges entre les multiples réalités individuelles.

Le culte « émergent » reflète cette nouvelle orientation : prédominance du relationnel et du sensoriel (cierges, encens, symboles visuels), porte ouverte au « mystère », reprise (surprenante) d’anciens rituels, témoignages et histoires partagées, prédications non didactiques, le tout dans un cadre aussi neutre et convivial que possible.

Les tenants du mouvement émergent font valoir que la Réforme a elle aussi dû rompre avec l’Église officielle de son époque pour revenir à la foi authentique. Carson fait remarquer que ce parallèle est fallacieux : les Réformés ont tout fait pour remettre à l’honneur le message biblique original parce que l’Église de leur temps le bafouait ; les partisans du mouvement émergent sont surtout motivés par le désir de rendre l’Évangile compatible avec les modes de fonctionnement de la culture ambiante.

Les Églises émergentes à l’écoute des signes des temps (p.55 et ss.)

La civilisation occidentale moderne, depuis la deuxième moitié du XXe siècle, doute de son identité, de ses propres valeurs, quand elle ne les renie pas. Diverses crises l’ont amenée à chercher de nouveaux paradigmes, une nouvelle moralité ; ses attentes l’entraînent vers des formes de spiritualité plus « exotiques », vers une sensibilité affranchie de la rigueur intellectuelle, sans parler d’autres mutations.

Selon les chrétiens émergents, à moins d’une adaptation rapide à la nouvelle donne, l’Église va perdre toute influence. L’Église serait bien avisée de prendre en compte la dimension multiculturelle de notre monde globalisé ; l’exemple de l’apôtre Paul se faisant tout à tous, et adaptant sa manière de prêcher à la culture de ses interlocuteurs doit nous inspirer dans ce sens. Prenons conscience des limites que notre culture « cartésienne » a introduites dans notre compréhension de la Parole, et cherchons à les dépasser.

Certains penseurs émergents (M. Yaconelli, G. Tomlin par ex.) estiment que des églises qui se contentent d’une vie communautaire formelle, sans joie ni piété véritables, sans relation vivante avec Dieu, sans communion profonde entre « frères » chrétiens, n’ont aucun avenir. Carson les approuve jusque là. Mais il ajoute qu’il n’est pas nécessaire de se faire « émergent » pour connaître une vie d’église dynamique, saine, biblique et convaincante (p. 68, 69).

La culture moderne vue par les églises émergentes (p.71 et ss.)

En faisant remonter les tares de la société moderne2 à l’influence des Lumières et du rationalisme, beaucoup de penseurs émergents rendent suspect ce qui, dans notre mode de vie actuel, est tributaire de la science, de la technique, de l’économie etc., c’est-à-dire de tous les domaines fondés sur un recours prioritaire à la raison. Or, selon eux, la théologie et le témoignage des chrétiens ont aussi été compromis par cet hyper-intellectualisme. D’où une dénonciation de la tendance des églises évangéliques classiques à l’absolutisme, à la rigidité doctrinale, au formalisme. Le salut de l’Église actuelle passerait donc par une déconstruction3, par une redéfinition des termes et des doctrines bibliques.

De manière perspicace, Carson démontre que le diagnostic émergent est réducteur : le monde occidental, depuis le XVIIIe siècle, n’a de loin pas toujours privilégié le rationalisme pur et dur. Les mouvements empirique, romantique, symboliste, ou existentialiste sont là pour le rappeler, tout comme les noms de D. Hume, E. Kant, F. Schleiermacher, S. Kierkergaard, F. Nietzsche, J-P. Sartre, J. Derrida, R. Rorty. Par ailleurs, la postmodernité a hérité de traits essentiels de la pensée moderne (dont le culte de l’homme autonome et libre4). De plus, les émergents sont dans l’erreur lorsqu’ils suggèrent que le mouvement évangélique des siècles précédents n’a fait que se conformer au courant absolutiste et rationaliste : les exemples de C. H. Spurgeon, de J. Wesley, de G. Whitefield, de F. Schaeffer suffiraient déjà à démontrer que des croyants évangéliques, tout en se réclamant d’une doctrine solidement appuyée sur la Parole, ont su vivre leur foi de manière fervente et authentique. Les évangéliques ont même constitué l’une des principales forces de résistance à la théologie rationaliste libérale, ennemie de tout surnaturel. Enfin, la « post-modernisation » de l’Évangile risque évidemment de le vider de sa substance, car les tendances lourdes de notre société pluraliste proscrivent tout credo clairement formulé, de portée universelle, et proclamant Jésus comme seul Sauveur, Seigneur et Médiateur entre Dieu et les hommes.

En bref, l’analyse des leaders émergents pèche par un usage excessif d’antithèses qui ne correspondent pas aux faits historiques. On ne peut opposer l’époque moderne (qui du reste commence avant les Lumières) aux temps postmodernes comme si l’on passait de la nuit au jour. Il y a eu des ombres et des lumières à toute époque, et le combat pour l’authenticité de la foi est un enjeu permanent. En recourant à des antithèses aussi radicales, les partisans de l’émergence démontrent un absolutisme et une intolérance au moins aussi virulents que les travers qu’ils dénoncent. Carson rappelle que les Lumières, qui ont emprunté certains de leurs idéaux au christianisme, ont laissé des traces positives (idéal démocratique, exigences de justice et d’équité sociale, conquêtes utiles de la science, etc.), mais il reconnaît volontiers que de mauvais fruits ont aussi germé de leur message, tant il est vrai que tout système de pensée qui s’affranchit de l’autorité de la Parole divine joue avec le feu.

La postmodernité vue par Carson et par les Églises émergentes (p.115 et ss.)

Carson reconnaît une part de vérité dans la critique adressée par la postmodernité aux excès du rationalisme. Le rêve de la Raison triomphante est une hérésie. Il faut voir en l’homme un être fini, incapable d’omniscience, souvent porté au mauvais usage de ses connaissances. L’Occidental fier de ses accomplissements se trompe en méprisant des cultures où la logique a moins de place (voir p.136-138). Cependant, notre finitude et nos égarements ne prouvent pas qu’il soit impossible de rien connaître de la réalité. Pour Carson, le relativisme moral, religieux et intellectuel du postmodernisme doit être considéré comme absurde, intenable. Ce ne sont ni la finitude de l’homme ni son péché qui doivent constituer notre horizon ultime, mais bien la souveraine sagesse et volonté de Dieu, qui veut sauver l’homme (cf. p. 138-167).

Certains auteurs émergents se fendent parfois d’une critique virulente des thèses postmodernes radicales (voir p. 169-212), comme s’ils s’évertuaient à conserver un minimum d’acquis de deux mille ans de christianisme. Ainsi se réfèrent-ils à la Tradition (sans que l’on sache exactement ce qu’ils souhaitent en garder). Ils se disent conscients des excès de l’antirationalisme. Ils prisent particulièrement certaines tranches de l’Écriture (les récits, les paraboles, les Évangiles par exemple). En pratique, ils trahissent pourtant le message de celle-ci, et gomment le témoignage de la plupart des vrais croyants des siècles passés. En voici quelques raisons :

–  les penseurs émergents accordent une place excessive à l’expérientiel, aux images subjectives, au « mystère », au détriment d’un enseignement biblique objectivement et clairement dispensé ;

en cherchant à reformuler l’Évangile en des termes qui ne fassent aucune concession au rationalisme moderne, ils se privent souvent d’une lecture simple, naturelle et constructive de la vérité révélée ;

en évitant les références à la Vérité absolue, en refusant tout prosélytisme, en se cachant que les religions non bibliques mènent à l’idolâtrie, ils noient l’enseignement biblique dans le relativisme ;

en opposant la doctrine biblique à la vie, à l’authenticité, à la liberté, aux relations humaines franches et chaleureuses, ils se coupent de la véritable source de la foi et de la meilleure motivation à entrer dans des rapports humains selon le projet de Dieu ;

en s’insurgeant contre l’exclusivisme du christianisme traditionnel, il font preuve à leur tour d’un exclusivisme farouche et intolérant à l’égard de ceux qui ne les suivent pas.

Carson termine par deux exemples qui illustrent ses critiques du mouvement émergent : le livre de Brian McLaren : A Generous Orthodoxy, et celui de Steve Chalke et Alan Mann : The Lost Message of Jesus (p.213-254). L’auteur montre à l’évidence que ces ouvrages adulés au sein de la mouvance émergente passent à côté de doctrines capitales de l’Écriture, les détournent de leur sens évident, ou même en parlent d’une manière blasphématoire. L’éthique biblique est aussi mise à mal, la pratique homosexuelle étant quasiment légitimée.

Last but not least

Fort à propos, le livre se termine par deux chapitres (p.255-318) qui apportent un riche enseignement biblique sur la question des fondements de la foi, sur la vérité et l’expérience, sur les sources de la vraie connaissance, et sur le problème du pluralisme. Au lecteur d’y puiser pour se convaincre que l’évaluation de Carson est honnêtement soutenue par la Révélation.

Recension : Claude-Alain Pfenniger

1 Becoming conversant with the Emerging Church, Zondervan, Grand Rapids, Michigan 49530, 2005. La traduction française est basée sur l’œuvre originale anglaise (Éditions Impact, Publications Chrétiennes Inc., 230, rue Lupien, Trois-Rivières (Québec) G8T 6W4, Canada, 2008).
2Au nombre de celles-ci, selon Brian McLaren : l’esclavage, le colonialisme, l’impérialisme, le communisme, le nazisme (cf. p.91).
3La déconstruction (le terme est du philosophe allemand M. Heidegger, 1889-1976) est généralement associée à certains philosophes français en vogue dans les années 1960 : M. Foucault, P. Bourdieu, J. Derrida, J. Lacan. Ceux-ci sont connus pour leurs grandes remises en question de la métaphysique, du rationalisme et de l’humanisme classiques, et leur horreur de toute vérité absolue, donc de Dieu. Il est curieux de constater que les penseurs émergents reprennent plusieurs concepts de cette école (voir p. 133 et les pages plus techniques que Carson consacre à l’épistémologie émergente et au perspectivisme), tout en se défendant d’adopter leurs conclusions athées.
4Ce qu’avançait G. Lipovetsky il y a presque 30 ans reste d’actualité : la seule valeur qui demeure est « l’individu et son droit toujours plus proclamé de s’accomplir à part ». (in L’Ère du vide, Gallimard, 1983)

les articles plus lus

En présentant le premier numero de PROMESSES

à nos frères en la foi, nous pensons bien faire d’exposer les principes qui seront à la base de ce «Cahier d’études bibliques».

Nous chercherons à être utiles à tous, à l’église de Dieu d’abord, c’est-à-dire au Chef de l’église, Christ, mais aussi à ceux pour qui la Parole est précieuse, à ceux qui désirent étudier et obéir.

Les bulletins, feuilles de renseignements, journaux mensuels ou trimestriels foisonnent. Tous, ou presque, apportent des nouvelles missionnaires ou d’évangélisation. Ce qu’on recherche ici est beaucoup plus un cahier comportant exclusivement des études bibliques ou se rapportant spécifiquement à la Parole.

La plupart des assemblées de «frères» issues du mouvement datant des années 20-30 du siècle écoulé semblent vivre au ralenti, l’esprit missionnaire mis à part. Comme dans tout mouvement, certaines vérités ont été poussées en «épingle», d’autres ont été négligées; des intérêts particuliers ont pris le pas sur les valeurs spirituelles. Nous assistons à un rétrécissement sérieux de l’influence, de l’action que devraient avoir des églises de foi, c’est-à-dire formées d’enfants de Dieu véritables, scellés par l’Esprit de Dieu.

En toute humilité, nous désirons demander au Seigneur sa lumière, afin de marcher selon sa grâce, en fidélité, devant sa face. Nous ne saurions prétendre connaître tout ce que Dieu veut pour les siens et son église, mais notre désir est d’apporter ce qui, aujourd’hui, est utile pour l’édification et la consolation de nombreux enfants de Dieu. Précisons que nous ne voudrions pas représenter un point de vue particulier, mais étudier la Parole, en respectant la sainteté de Dieu.

Chaque étude signée restera sous la responsabilité de son auteur. L’enseignement de ces pages semble devoir être d’une étendue qui surprendra peut-être. Notre désir est, à la fois, de présenter des études fouillées pour le chrétien avancé, mais aussi des explications de termes, de langage, pour ceux qui ne connaissent pas notre langue d’une manière approfondie.

A titre d’essai, nous ferons parvenir un certain nombre d’exemplaires au monde francophone d’outre-mer. Il faudra ainsi tenir compte de ce champ de diffusion.

De divers côtés, sinon dans nos vieux pays, on demande, en effet, une littérature chrétienne plus abondante, basée sur la Bible, la Parole de Dieu. Quelques-uns d’entre nous ont cru devoir répondre à ce désir. Nous plaçons ces cahiers sous le regard du «Chef», demandant à Dieu sa bénédiction pour rendre témoignage à la Vérité.

Les éditeurs

Où nous mène la formidable évolution qui soulève le monde chrétien tout entier? En cette période d’après le Concile du Vatican Il, il est utile de dresser un bilan des faits, même provisoire, et de procéder à un tour d’horizon général.

Eléments positifs de l’évolution catholique: Incontestablement, des mouvements intéressants se font sentir dans l’Eglise romaine: étude et diffusion de la Bible en voie de développement, dialogue engagé avec les autres confessions, reconnaissance du fait que les communautés des «frères séparés» protestants peuvent porter le titre d’églises, admission d’une part de responsabilité dans la rupture du XVIe siècle. Au cours du Concile du Vatican Il, l’opinion a été exprimée à maintes reprises que l’Eglise catholique avait besoin d’un renouveau si elle voulait réellement entreprendre le dialogue avec les églises non-romaines. Il y eut des discussions très libres, suivies de votes positifs impressionnants, par exemple sur la collégialité des évêques gouvernant l’Eglise avec le pape, l’usage de la langue vulgaire dans le culte, l’oecuménisme, la liberté religieuse, la limitation des naissances, le peuple juif, l’Ecriture Sainte et la Tradition, etc.

Fin décevante de Vatican Il: Rappelons quelques faits justifiant cette impression de l’ensemble des observateurs non catholiques.

La collégialité des évêques doit être entendue de telle manière que la primauté du pape demeure intacte. La structure monarchique de l’Eglise romaine n’en sera pas affectée, le pape reste le souverain absolu. Le collège épiscopal n’a aucune autorité sans ce dernier. Paul VI, dans son discours d’ouverture à la troisième session, ne s’en est pas référé moins de sept fois à sa primauté, et le mot-clé qu’il a constamment utilisé était celui de «hiérarchie sacrée». Le pasteur G. Richard-Molard estime qu’un tel discours «ne peut guère qu’hérisser la plupart des chrétiens non catholiques romains» («Messager Social», 10 déc.; S. CE- P. I., 1er oct.; 24 sept. 1964).

Il est clair, selon le même pasteur, «que l’Eglise catholique est toujours placée sous l’unique pouvoir de l’Eglise romaine. Or, il ne s’agit pas là d’une découverte de La Palice, mais d’une situation, chaque jour plus insupportable pour les catholiques eux-mêmes. Cette direction totalitaire italienne, ou pire encore, romanisée, possède encore tous les leviers de commande» («Christianisme au XXe siècle», 29 oct. 1964). Cela n’empêche pas qu’une seconde force «se manifeste par l’esprit nouveau qui anime une partie toujours plus large du catholicisme non italien. Il ne faut pas s’imaginer que cet esprit ait changé en quoi que ce soit la masse, mais il passe sur quelques centaines d’évêques, sur de nombreux prêtres et sur une élite de laïcs» (ibid.).

La Vierge Marie a été proclamée Mère de l’Eglise, sans l’avis des pères conciliaires, par Paul VI, qui lui a consacré la moitié de son discours de clôture {cf. «Chrétien Evangélique», déc. 1964, p. 5). Cette proclamation «a détruit tous les efforts des pères conciliaires qui. .. s’étaient ingéniés à éviter autant que possible les déclarations de nature à. ..donner de l’extension au dogme marial et à choquer les protestants» {«Christ U. Welt», cité par S. CE. P. I., 3 déc. 1964).

Le 11 octobre 1963, le pape a terminé une allocution aux pères du Concile et aux fidèles par cette prière à la Sainte Vierge: «O Marie, nous vous prions pour nos frères encore séparés de notre famille catholique. Voyez comment, parmi eux, une phalange glorieuse célèbre votre culte avec fidélité et amour. Voyez comment parmi d’autres, si résolus à se dire chrétiens, commence à renaître aujourd’hui votre souvenir et votre culte, ô Vierge très bonne. Appelez avec nous tous ces fils, qui sont vôtres, à la même unité sous votre protection maternelle et céleste» («Documentation Catholique», 3 novembre 1963).

Le cardinal Doepfner, de Munich, dont les interventions au Concile ont été souvent remarquées, vient de déclarer à son tour: «Amoindrir dans l’Eglise le culte de la Vierge Marie serait un malentendu et une mauvaise interprétation des enseignements du Concile. ..Nous voulons approfondir et enraciner encore plus fort dans ce mystère du Christ le riche héritage laissé à l’Eglise par la Vierge Marie. Elle a un grand rôle à jouer dans l’Eglise, qui voit en elle son image originelle» {«Figaro», 28 déc. 1964).

Le dogme romain: Dans son livre récent sur l’Unité, le cardinal Béa répète des dizaines de fois: 1°) que l’enseignement romain, étant infaillible, ne saurait subir dans son essence aucune modification; 2°) que l’Eglise catholique étant la seule vraie Eglise du Christ, l’unité finale ne peut être envisagée que par le retour de tous les baptisés orthodoxes et protestants au bercail du successeur de saint Pierre. Ce caractère intangible du dogme catholique n’a cessé d’être proclamé clairement par Jean XXIII, Paul VI et tous les porte-parole de Rome. Le professeur E. Schlink, observateur de l’Eglise Evangélique d’Allemagne à Vatican Il, après avoir noté que les délibérations conciliaires sont « révolutionnaires» pour l’Eglise romaine, ajoute: «Aucune des resolutions jusqu’ici adoptées n’a «rapporté, modifié ou même réinterprété de manière satisfaisante un seul des dogmes qui divisent la chrétienté » (S. CE. P. I., 17 déc.1964).

Cela n’a pas empêché le professeur de théologie protestant O. Cullmann de déclarer que Vatican Il «n’a fermé aucune porte ». Dans une interview accordée au journal «Le Monde », M. Cullmann reconnaît que les textes élaborés au Concile sont décevants, car la plupart sont des textes de compromis. Le Concile actuel est lié par celui du Vatican I (en 1870, où fut proclamée l’infallibilité pontificale), et par les dogmes mariaux antérieurs, inchangeables eux aussi. Mais il ajoute: «Je ne partage pas le pessimisme de certains qui s’exprime dans ce slogan: «II ne sortira rien de ce Concile! » Tous les textes sont formulés de telle sorte qu’aucune porte n’est fermée, et qu’ils ne seront pas un obstacle à la future discussion entre catholiques ni au dialogue avec les non-catholiques, comme le sont les décisions des Conciles antérieurs » (cité par «Vie Protestante », 23 oct. 1964). -Puisque les dogmes romains sont infaillibles (voir les anathèmes du Concile de Trente), on se demande sur quoi porte la discussion. ..Si la porte n’est pas fermée, elle ne l’est qu’à sens unique et ne nous paraît conduire qu’au bercail de saint Pierre.

(à suivre)
Extrait avec autorisation du périodique «Le Chrétien évangélique »

(2 Tim.1, 7-9)

«Dieu ne nous a pas donné un esprit de timidité, mais de force, d’amour e! de prudence.»

Timide = qui manque de hardiesse et d’assurance, dit le dictionnaire. Dieu, en vue du but qu’il s’est proposé, nous a adressé une «VOCATION SAINTE», et pour cette vocation, il nous revêt:

de force – par quoi nous devons comprendre force de caractère, maîtrise de soi, tranquillité d’esprit, toutes choses qui sont contraires à la timidité. Une stabilité nouvelle, créée par le Saint-Esprit de Dieu qui nous donne l’assurance du salut; un contrôle de soi-même qui peut ne pas être naturel, mais qui est le résultat du travail de cet Esprit.

d’amour – de compréhension, de compassion, de pardon, amour qui n’est pas mollesse, ni faiblesse, mais qui prend part aux malheurs du prochain, qui comprend le pécheur et repousse le péché.

de prudence – mieux encore discipline personnelle, d’intelligence avertie, de jugement balancé, nuancé, sans laisser-aller.

Etes-vous craintif de nature, manquez-vous d’assurance, avez-vous ce qu’on appelle un complexe d’infériorité, craignez-vous de vous affirmer? Lisez les lettres à Timothée. C’était un timide de nature, et l’apôtre l’encouragea. Notez ceci: Dieu DONNE UN AUTRE ESPRIT que celui que vous aviez précédemment. Il donne gratuitement. Alors, demandez, priez. Il vous DONNERA.

Le but de nos études est de faire connaître et comprendre (Ps. 82, 5) les pensées de Dieu révélées dans sa Parole, afin de vivre dans la lumière. Dans un monde où Satan règne pour obscurcir la vérité, voire même la cacher, il importe que le juste – sauvé par la foi en Jésus-Christ – connaisse «les fondements» de la vérité divine.

Les lignes suivantes ne veulent être qu’un canevas de «la saine doctrine», telle que la Parole de Dieu nous la montre. Cet enseignement est à la fois christologique (Matth. 7, 28; 1 Cor. 2, 1-2) et apostolique (Act. 2, 42) ; il comprend l’ensemble des vérités divines.

I L’INSPIRATION VERBALE DE LA BIBLE

La pierre de touche de tout ce qui suit est la doctrine de l’inspiration des Ecritures. «Toute Ecriture est inspirée de Dieu» (2 Tim. 3, 16). Nous possédons aujourd’hui suffisamment de preuves, devant lesquelles tout homme sincère doit s’incliner. La Bible est la révélation de Dieu à l’égard de l’homme. Ce n’est pas un livre ecclésiastique quelconque, ni un ouvrage symbolique ou philosophique. C’est simplement «la Parole de Dieu» qui ne se laisse pas discuter. Des hommes de Dieu, poussés par l’Esprit, rédigèrent les 66 livres de cette divine Bibliothèque (2 Pi. 1, 21 ). Tout en gardant leur caractère et leur personnalité, ils furent de simples véhicules utilisés pour transmettre intégralement les pensées divines. C’est un miracle et un miracle ne s’explique pas. On peut l’accepter ou le rejeter; mais le fait est là.

Il LA TRINITÉ DE DIEU

Il en est de ce terme comme d’autres: la doctrine de la trinité de Dieu se trouve clairement révélée dans la Bible, bien que cette expression n’y soit pas mentionnée. Lucien déjà, rhéteur et philosophe grec du 2me siècle, fait confesser le chrétien dans son «Philopatris»: «le Dieu exalté …Fils du Père, Esprit procédant du Père, l’Un d’entre les Trois et Trois d’entre Un.» Le terme même fut employé formellement pour la première fois lors du synode en 317 à Alexandrie.

Cela ne signifie rien d’autres que tri-unité. La déité est une trinité, une unité qui possède 3 personnes distinctes ayant la même vie et la même essence.

L’ANCIEN TESTAMENT

Nous y voyons une révélation progressive qui trouve sa complète manifestation dans le Nouveau Testament. Des allusions claires et sans équivoques devaient ouvrir les yeux des personnes pieuses du temps du Seigneur.

Gen. 1,1: «Au commencement Dieu.» Ce terme «ELOHIM» est au pluriel et Moïse l’emploie quelque 500 fois. A remarquer qu’à chaque reprise le verbe qui l’accompagne est au singulier, ce qui prouve bien l’unité dans la pluralité des Personnes de la Déité.
Gen. 1,26: «Et Dieu dit: Faisons l’homme selon notre ressemblance»
Gen. 3, 22: «Voici l’homme est devenu comme l’un de nous»
Es. 48, 16: «Le Seigneur l’Eternel» – Dieu le Père
«m’a envoyé» – Dieu le Fils
«et son Esprit» -Dieu le Saint-Esprit
Zach. 12, 10: «Et je répandrai» -Dieu le Père
«un esprit de grâce» – Dieu le Saint-Esprit
«ils se lamenteront sur lui» -Dieu le Fils

LE NOUVEAU TESTAMENT

Il dévoile clairement cette vérité et nous confirme que la déité se compose de 3 Personnes: Dieu le Père, Dieu le Fils et Dieu le Saint- Esprit (Matth. 28, 19; Jean 1:1; Jean 5:3-4; Jean 8:54).

La trinité de Dieu est déjà engagée lors du baptême du Seigneur (Matth. 3, 13-17). On ne peut, à ce sujet, s’exprimer plus clairement que le Seigneur le faisait dans Jean 14:16-26: «Mais le Consolateur, l’Esprit-Saint (3ème Personne) que le Père (1ère Personne) enverra en mon nom (2ème Personne).»

La grande bénédiction apostolique nous laisse «la grâce du Seigneur Jésus-Christ», «l’amour de Dieu» et «la communion du Saint-Esprit» (2 Cor. 13, 13).

D’ailleurs, l’homme lui-même est une trinité composée de l’esprit, de l’âme et du corps. Il est attaqué par une autre trinité: le monde autour de lui, la chair en lui, et le diable au-dessous de lui. La loi du péché en lui est également représentée par une trinité:la convoitise de la chair, la convoitise des yeux et l’orgueil de la vie. Et, enfin, il peut être sauvé par la trinité divine: Dieu le Père, Dieu le Fils et Dieu le Saint-Esprit.

III JÉSUS-CHRIST

1. Sa Divinité

Jean 1, 1-3 suffirait pour établir cette vérité bénie:
Au commencement était la Parole» (le Verbe dans son existence éternelle)
cet la Parole était auprès de Dieu» (le Verbe dans son existence personnelle)
et la Parole était Dieu» (le Verbe dans son essence divine)

2. Son incarnation

Il est «Dieu manifesté en chair» (1 Tim. 3, 16). Ce mystère, dans lequel même les anges désirent plonger leurs regards, nous a été révélé. Les 7 degrés de son abnégation nous sont donnés en Phil. 2, 7-9. Aucune difficulté n’est inconnue du Seigneur qui a été tenté comme nous; Il peut donc nous accorder miséricorde et secours au moment opportun (Hébr. 4, 15-16). Ami qui souffres, confie-toi en Lui, car son nom est «Merveilleux».

3. Son CEuvre rédemptrice

Rom. 4, 25 dit: «Jésus, notre Sauveur, lequel a été livré pour nos fautes et a été ressuscité pour notre justification».
L’Ancien Testament y fait continuellement allusion (Ex. 12, Ps.22, Es.53).
Les Evangiles en sont la réalisation
Les Actes le proclament
Les Epîtres l’expliquent
L’Apocalypse, enfin, décrit la destruction de ceux qui ont rejeté cette oeuvre.

(à suivre)