Misère et Grandeur du Postmodernisme

APOLOGÉTIQUE

Première partie

L’auteur a fait ses études en théologie à Lausanne et exercé un ministère dans le cadres des Groupes Bibliques Universitaires (GBU). Il a eu l’occasion d’observer de très près les tendances de notre société et de ses futurs leaders. Olivier Bangerter est titulaire d’un doctorat en théologie de l’université de Genève et sa spécialisation porte sur l’histoire de la Réforme en Suisse. Cet article est présenté en deux parties. Dans sa première partie, l’auteur décrit l’évolution de notre monde durant les 50 dernières années. Dans sa deuxième partie il continuera à décrire les caractéristiques de cette nouvelle vision du monde et tentera de définir le rôle du chrétien dans ce nouveau contexte.

1. Introduction

Il y a une douzaine d’années, je terminais mon gymnase (lycée). Actuellement, je travaille avec des étudiants qui fréquentent de telles institutions. Le moins que l’on puisse dire est que le climat a beaucoup changé: «Il y a vingt ans, pour intéresser ses élèves, on leur parlait de marxisme. Et pour les faire rigoler, on leur parlait de Dieu. Aujourd’hui, c’est l’inverse1. » Dans les sociétés occidentales, on découvre une ouverture au spirituel, même si ce spirituel n’est pas toujours chrétien, loin de là.

Lorsque j’en discute avec des personnes plus âgées, j’entends souvent dire que «tout fout le camp» et que la jeune génération est pire que la précédente. Ce discours m’étonne et je n’arrive pas à y croire. Il n’est pas sage de croire que le passé a été meilleur que le présent (Ecclésiaste 7,10). Il y a quelques années, certains s’insurgeaient contre leur société où l’athéisme, au moins pratique, régnait en maître; de nos jours les mêmes s’insurgent contre l’ouverture spirituelle très large de leurs contemporains. Est-ce tout à fait honnête?

1.1. Une question de vision du monde

La vision du monde postmoderne est une vision du monde parmi d’autres (moderniste, médiévale, animiste, confucianiste, pour n’en citer que quatre). Comme toutes les autres, elle contient des éléments positifs et des éléments négatifs. A nous de discerner les chances et d’évaluer les dangers plutôt que de rejeter en bloc ce que dit le monde et nous enfermer. Refuser ce travail de discernement aurait pour nous deux conséquences graves: passer à côté de possibilités apologétiques que Dieu nous donne (relisez Actes 17 pour voir comment la culture païenne a fourni à Paul des éléments pour annoncer Jésus-Christ) et nous laisser subrepticement influencer par cette vision du monde, un processus déjà bien entamé.

Depuis environ deux siècles, l’Eglise en Occident a été confrontée à une vision du monde très forte et souvent agressive, le modernisme, qui trouvait ses origines dans les Lumières et la Révolution. L’Eglise a réagi tant mal que bien à cette vision du monde dont les caractéristiques sont assez simples: notion de progrès, confiance dans des concepts définis, matérialisme, rationalisme, l’homme comme sujet pensant, centre du monde, bon. Emile Zola nous en a laissé une belle définition dans Le Docteur Pascal:

«Je crois que l’avenir de l’humanité est dans le progrès de la raison par la science. Je crois que la poursuite de la vérité par la science est l’idéal divin que l’homme doit se proposer. Je crois que tout est illusion et vanité, en dehors du trésor des vérités lentement acquises et qui ne se perdront jamais plus. Je crois que la somme de ces vérités, augmentées toujours, finira par donner à l’homme un pouvoir incalculable, et la sérénité, sinon le bonheur… Oui, je crois au triomphe final de la vie.»

Le modernisme a eu plusieurs incarnations, dont le marxisme et le libéralisme. C’est à travers cette philosophie que la colonisation a été justifiée; on a estimé que les nations les plus avancées avaient le droit et même le devoir d’en annexer d’autres pour leur apporter les bienfaits de la civilisation.

La question de la colonisation est un bon exemple pour montrer le rôle ambigu de l’Eglise face au modernisme. D’une part, elle a participé d’assez bon gré à ce processus paternaliste, en exportant des modèles occidentaux et en ne visant souvent pas à former des églises locales indépendantes; d’un autre côté, les chrétiens (évangéliques) ont été à l’avant-garde de la préservation des langues locales et de la lutte contre l’esclavage (Wilberforce en Angleterre). L’Eglise est toujours tentée de réfléchir et d’agir comme le monde: cela se passait au 19e siècle et se passe encore au 21e siècle. A nous de ne pas être dupes de notre époque, même si nous y sommes immergés.

1.2 Du modernisme au postmodernisme

Le premier coup porté au modernisme a été la Première Guerre Mondiale; il est en effet difficile d’imaginer que l’homme est bon après en avoir vu quelques millions s’étriper dans des tranchées pendant quatre ans, par tous les moyens, de la pelle de tranchée jusqu’aux gaz de combat. Un autre élément a été la théorie de la relativité qui a remis en case un des piliers de la pensée traditionnelle, la physique newtonienne. Plus près dans le temps, on trouve Hiroshima, qui a à nouveau mis en cause la bonté de l’homme, puis Mai 68, qui a secoué le carcan social aux niveaux de la morale et de la pensée, le choc pétrolier de 1973, qui a mis en cause l’idée de progrès sans fin. La notion de progrès a d’ailleurs pris un autre coup en 1975 lorsque le Club de Rome a annoncé que la croissance économique avait des limites.

En 1979, Jean-François Lyotard, en publiant un livre intitulé La condition postmoderne: rapport sur le savoir2, a inauguré le postmodernisme philosophique. On a commencé à parler de déconstruction. La linguistique a mis en doute l’importance du signifié en faveur de celle du signifiant. En simplifiant, on dira que la vérité est éjectée du champ de la recherche, au profit des histoires3. Pour finir notre voyage dans le temps, il y a eu 1989, la chute du Mur de Berlin qui a accéléré celle du communisme, dernière grande idéologie moderniste.

1.3. Le postmodernisme

Le postmodernisme, «galaxie mal définie d’idées – allant de l’art et de l’architecture aux sciences humaines et à la philosophie » (Alan Sokal) – est la vision du monde dans laquelle nous baignons en Occident. C’est le résultat de plusieurs éléments: d’abord et surtout la faillite du modernisme, esquissée ci-dessus; il faut chercher autre chose4! Il est dommage que les chrétiens n’aient pas été les premiers à mettre les clous philosophiques dans son cercueil, car ils en avaient l’appel et les moyens. La confiance illimitée en la science et en ses découvertes, qui se heurte à des limites méthodologiques (principe d’incertitude d’Eisenberg par exemple), se heurtait aussi à des limites théologiques: un cœur sur lequel on ne peut pas compter et une intelligence obscurcie.

Un autre élément a contribué à créer une nouvelle vision du monde: le boom des communications. Les informations vraies ou fausses circulent à une vitesse et dans une quantité inimaginables il y a 50 ans. Liaisons satellites, internet, migrations massives, possibilités de voyages, tout se conjugue pour amener à la portée du monde occidental des informations nombreuses et variées. De plus en plus, nous nous trouvons confrontés à d’autres cultures, que ce soit lors de nos vacances, par les étrangers qui viennent chez nous ou par les médias. Le brassage des personnes est complété par celui des idées: dans les années 60, seules quelques élites intellectuelles avaient accès aux religions orientales; aujourd’hui vous trouvez des centaines de livres sur le sujet dans votre librairie. Plus on a d’informations, plus on doit choisir entre ouverture (mondialisation ou réactions citoyennes) et fermeture (micro-identités, retour au tribalisme). Plus on a d’informations à disposition, moins on creuse. C’est dommage, mais c’est ainsi: la superficialité dans l’appréhension du monde et des autres est devenue la règle. Elle s’accompagne de ce qu’on appelle l’ouverture et de la compréhension de l’autre. Il est plus facile de comprendre ce dont on ne fait qu’effleurer la surface: «Toutes les religions disent la même chose» entend-on de gens qui ont peut-être lu un peu de Bible, mais ni Coran ni écrit bouddhiste. La connaissance des religions dont ils font preuve est insignifiante!

Avec la masse d’informations vient la complexité: qu’est-ce qui est vrai? que choisir? L’abondance de possibilités de choix rend tout choix difficile. Savoir quel programme une famille regardera à la télévision pour une soirée donnée s’apparente à un casse-tête. Autant acheter deux ou trois télévisions de plus, ce que beaucoup font! Tout choix devient une affaire de consommation, aussi pour la religion: il y a deux cent ans en Europe, vous pouviez choisir entre le christianisme et l’athéisme, point final. Aujourd’hui, vous pouvez vous tourner vers le christianisme, l’islam, le bouddhisme, l’hindouisme, le panthéisme façon New Age, des petites sectes en pagaille, sans parler d’un ensemble de philosophies plus ou moins religieuses, comme le taoïsme. Cette avalanche de possibilités cause une crainte de mal choisir, qui peut se transformer en refus de choisir. On préfère voler de fleur en fleur comme un papillon, plutôt que de se poser une fois. Le phénomène des chrétiens qui ne fréquentent que les conventions en est un résultat direct.

A force d’accumuler des connaissances superficielles et de ne jamais se donner les moyens de choisir, la personne perd son unité. Il devient dès lors possible, et même recommandé, d’être deux personnages différents au travail et dans les loisirs. La liberté est immense, mais il n’y a aucun cadre pour la structurer. Cela induit tout autant la tolérance à l’encontre de tout, ou presque, que le stress et la recherche d’endroits où l’on se sente bien. Que ces endroits soient la face nord du Cervin, un petit groupe d’amis, un engagement humanitaire ou une Love Parade, le but est le même: se sentir bien, s’évader dans l’expérience.

2. Cinq caractéristiques du monde postmoderne

Quittons le monde des grandes idées philosophiques pour descendre au ras des pâquerettes, là où les gens vivent. Je n’ai pas la prétention de définir ici tout habitant de l’Occident du début du 21e siècle; mais les tendances sont réelles et dessinent la société de demain; elles sont observées en particulier chez des jeunes…

2.1. Illusions perdues

On appelle souvent la génération actuelle la génération X, d’après le titre d’un ouvrage de Douglas Copland. Pour ma part, je l’appelle la génération des illusions perdues. Autant les jeunes que des gens d’âge mûr y sont sujets. C’est toujours un moment très douloureux, où tout ce en quoi on a cru se révèle n’être qu’un décor de carton-pâte.

Quel est le secret d’une vie réussie? Bien souvent, on le définit ainsi: «un bon diplôme, un bon travail, gagner bien de l’argent, trouver l’Amour, avoir une belle famille et pouvoir se payer des vacances.» «Mensonge éhonté» devraient dire les chrétiens; «mensonge éhonté» pensent bien des gens dans leur cœur, mais comme il n’y a rien d’autre, on essaie quand même. Reprenons ces éléments un à un:
1) Un bon diplôme? Il y a de plus en plus intérêt à ce que votre diplôme soit très bon si vous voulez une place de travail.
2) Un bon travail, bien travailler? Bien des gens de 50 ans ont beaucoup travaillé mais se retrouvent au chômage et bien des étudiants bardés de diplômes sont au chômage malgré tout.
3) Un bon salaire? Quand on voit de grandes entreprises annoncer en même temps des bénéfices records et des suppressions d’emplois, il est préférable d’avoir des actions!
4) L’Amour, avec un grand a? Ce point mérite un traitement à part.
5) La famille? Les relations parents-enfants ne sont pas toujours au beau fixe, c’est le moins qu’on puisse dire: «Cher père, Je t’en veux de m’avoir laissée, abandonnée et bien souvent oubliée. Je ne suis pas un objet à qui on donne des sous chaque mois. Je ne suis pas à vendre » écrivait une jeune fille à son … géniteur dans une lettre ouverte.
6) Les vacances? Cela marche encore, mais ne remplit pas une vie.

Revenons à l’Amour. Les médias idéalisent le Grand Amour, celui où tout va bien. Dans les beaux films romantiques, tout se termine dans le bonheur. Pourquoi «se termine » d’ailleurs, n’est-ce pas un aveu? Prenons quelques exemples: La Boum 1, La Boum 2, L’étudiante, Crocodile Dundee. Dans chaque cas, c’est le bonheur le plus épanouissant, mais remarquons qu’en trois films, Sophie Marceau aura trois grands amours et que Crocodile Dundee commencera le deuxième film au bord de la séparation d’avec celle qu’il aimait tant dans le numéro un. Amour toujours? Si vous êtes friands des titres des journaux populaires où l’on découvre les amours des stars, vous savez que l’amour, le vrai, le grand, dure rarement. L’amour est un sentiment délicieux, mais il ne rime plus avec toujours. Alors comme on n’y croit plus trop, on fait ce qu’on peut pour s’en donner l’illusion ou pour jouir de relations dont on craint qu’elles finissent vite. Et les statistiques parlent de 50% de mariages qui se terminent par un divorce. D’ailleurs la fidélité n’est pas une chose dont on puisse être sûr: si un beau milliardaire propose un million de dollars pour une nuit avec une femme mariée, que se passe-t-il? Le film Proposition indécente donne une réponse pessimiste. Dans un tel contexte, on peut comprendre ceux qui ne regardent pas plus loin que l’instant présent et veulent surtout profiter de ce qu’ils ont.

La société et l’autorité sont aussi remises en cause. «Que peut-on attendre de toi (la société)? Une vie bien rangée? Une femme, deux gosses et huit heures de travail par jour? N’y a-t-il pas d’alternative?»: la question de ce jeune mérite d’être posée et la réponse probable n’incite pas à la joie débordante.

L’autorité des professeurs et des parents est sapée lentement. Certes, la contestation en Mai 68 a passé par là, mais l’essentiel est ailleurs: comment voulez-vous avoir du respect pour l’autorité quand elle n’en est pas digne et qu’elle n’a pas cessé de déconstruire sa propre crédibilité? L’école en est un exemple, mais pas le plus frappant: si les «autorités» tendent à saper l’autorité des professeurs, ces derniers font souvent de leur mieux avec peu de moyens. Le monde politique est plus éclairant: le nombre de promesses électorales non tenues, d’affaires de corruption et de détournements de fonds, de compromissions avec l’injustice n’incite pas au respect («tous pourris»). Tout cela permet de comprendre bien des méfiances!

Les autorités des églises subissent le même mouvement, et il faut bien dire qu’elles y prêtent le flanc: on affirme que la Bible régit tout et que tout va bien dans nos cercles, mais… Il y a aussi des luttes de pouvoir, il y a des abus sexuels non sanctionnés (y compris dans des églises évangéliques), il y a des coutumes que l’on met avant la Parole de Dieu, il y a des faux-semblants et de l’hypocrisie. Il n’y a rien là d’anormal: l’Eglise est composée de pécheurs repentants, elle est imparfaite et l’a été de tout temps (relisez les épîtres en cas de doute). Le problème n’est pas là! Aussi étonnant qu’il y paraisse, les jeunes répondent bien à l’autorité quand elle est exercée pour le bien de celui sur qui elle a des effets, par l’exemple, dans le respect, avec intégrité. Le problème est dans le fait que toute autorité est sapée dans notre culture et que les chrétiens la vivent comme le monde: pour certains d’entre eux, la Bible est même devenue une autorité parmi d’autres (on lit «un texte» à haute voix, on étudie le dernier livre de l’auteur chrétien à succès, au même niveau que la Bible). L’autorité de Dieu dans nos vies est le premier pas pour convaincre ceux à qui nous parlons de lui.

La génération qui a perdu ou détruit ses illusions est encore incapable de les remplacer par quoi que ce soit de solide. «Il y a peu d’espoir dans la société actuelle; on aurait besoin d’un élan nouveau (…) pour changer et aller plus loin; j’ai l’impression qu’on stagne.» Lors d’une grève à l’université de Lausanne, j’ai demandé à un étudiant quel était son espoir pour l’avenir: «c’est là le problème; il y a encore de l’argent, mais plus d’espoir.» Cela peut se comprendre quand toutes les promesses se sont révélées fausses.

2.2. L’homme (je) est la mesure de toute chose

«L’homme est la mesure de toutes choses, pour celles qui sont de leur être, pour celles qui ne sont pas de leur non-être.» Cette phrase a été écrite bien avant le postmodernisme, mais elle pourrait être signée par nombre de nos contemporains. L’être humain est au centre. On en fait la mesure de toutes choses, l’élément ultime, la seule valeur qui semble encore ferme. Il est vrai que personne n’a encore été assez fou pour douter radicalement de l’homme. Le postmodernisme, au contraire, exalte l’homme: à force de tout déconstruire, seul reste le sujet et ses propres valeurs ou sa propre histoire. Par sa raison en partie, mais surtout par ses sens, il se fait ainsi le centre du monde ou, pour être précis, le centre de son propre monde. «Je, en tant que sujet, suis ma justification et ma raison d’être. Je peux donc choisir ce qui est vrai ou pas car je suis la mesure de toutes choses.» On peut le voir dans la définition pratique du vrai (nous verrons plus loin que sa définition théorique n’existe plus): «Est vrai ce qui marche pour moi maintenant». Il n’est pas obligatoire que cela marche encore demain. Toute notion de cohérence est bannie au profit d’un pragmatisme centré sur le sujet; ce qui me plaît est plus important que ce qui va ensemble. On vous dira «bien aimer» Jésus, mais aussi la réincarnation. C’est la conséquence logique de cette vision de l’homme. Les notions de vrai et de faux sont battues en brèche. Ce qui est important est la réalisation de soi, ou la recherche de plaisir!

En corollaire avec la montée de l’individualisme, des valeurs comme le sens du devoir et l’effort à long terme tendent à disparaître. Les entreprises qui le même jour annoncent des résultats records et des licenciements en sont l’exemple parfait: leurs actionnaires ne veulent pas entendre parler d’autre chose que de rentabilité à court terme, et surtout pas de responsabilité sociale. Si l’individualisme est la valeur dominante, cela n’a rien d’étonnant.

Une petite remarque: la notion même de valeur est un produit de la vision du monde postmoderne: il y a un siècle, on aurait parlé d’absolus moraux, on parle aujourd’hui de valeurs. Ces dernières sont par définition relatives les unes aux autres et surtout aux individus qui les tiennent pour bonnes. Cela posera de graves problèmes lorsqu’il faudra établir des normes sociales. Le chrétien ne doit pas s’étonner de cette situation: lorsqu’on éjecte Dieu du centre de la pensée pour y mettre l’être humain (en 6’000’000’000 d’exemplaires), l’unité de morale est impossible. Lorsque la société demande aux églises des valeurs, il y a un piège pour nous: proposer des valeurs qui soient acceptables pour le plus grand nombre plutôt que la volonté de Dieu. Cette dernière ne peut pas, par définition, être acceptable à ceux qui demandent des valeurs. Pour eux, même si l’être humain n’est pas fondamentalement bon, il n’est pas complètement mauvais. «C’est vrai, il n’est pas parfait, il commet quelques erreurs.» La notion de péché est évacuée!

Notes :

1 Jérôme Cottin, Construire, 51-52, 17 décembre 1997, p 16.
2 Paris, éditions de Minuit. D’autres noms d’auteurs qui vont dans le même sens ou sont revendiqués: Friedrich Nietzsche, Martin Heidegger, C.S. Peirce, Jacques Derrida, Hans-Georg Gadamer, Michel Foucault, Richard Rorty.
Le présent article sera centré sur l’aspect populaire du postmodernisme, pas sur ses représentants académiques.
3 Henri-Irénée Marrou, grand historien catholique, attaque dans un article de 1975 le relativisme de M. de Certeau et des lecteurs de Lévi-Strauss, Roland Barthes, Michel Foucault, mettant en doute la notion de vérité. Selon lui, la recherche de la vérité est la finalité de la recherche scientifique. En sciences humaines, cette affirmation est sérieusement remise en doute.
4 Dans son livre Les Enfants du Verseau, Marylin Ferguson l’affirme dans une belle formule: «Il nous faut pénétrer dans l’inconnu; le connu n’a déjà que trop failli aux espoirs que nous y avions fondés.»

les articles plus lus

En présentant le premier numero de PROMESSES

à nos frères en la foi, nous pensons bien faire d’exposer les principes qui seront à la base de ce «Cahier d’études bibliques».

Nous chercherons à être utiles à tous, à l’église de Dieu d’abord, c’est-à-dire au Chef de l’église, Christ, mais aussi à ceux pour qui la Parole est précieuse, à ceux qui désirent étudier et obéir.

Les bulletins, feuilles de renseignements, journaux mensuels ou trimestriels foisonnent. Tous, ou presque, apportent des nouvelles missionnaires ou d’évangélisation. Ce qu’on recherche ici est beaucoup plus un cahier comportant exclusivement des études bibliques ou se rapportant spécifiquement à la Parole.

La plupart des assemblées de «frères» issues du mouvement datant des années 20-30 du siècle écoulé semblent vivre au ralenti, l’esprit missionnaire mis à part. Comme dans tout mouvement, certaines vérités ont été poussées en «épingle», d’autres ont été négligées; des intérêts particuliers ont pris le pas sur les valeurs spirituelles. Nous assistons à un rétrécissement sérieux de l’influence, de l’action que devraient avoir des églises de foi, c’est-à-dire formées d’enfants de Dieu véritables, scellés par l’Esprit de Dieu.

En toute humilité, nous désirons demander au Seigneur sa lumière, afin de marcher selon sa grâce, en fidélité, devant sa face. Nous ne saurions prétendre connaître tout ce que Dieu veut pour les siens et son église, mais notre désir est d’apporter ce qui, aujourd’hui, est utile pour l’édification et la consolation de nombreux enfants de Dieu. Précisons que nous ne voudrions pas représenter un point de vue particulier, mais étudier la Parole, en respectant la sainteté de Dieu.

Chaque étude signée restera sous la responsabilité de son auteur. L’enseignement de ces pages semble devoir être d’une étendue qui surprendra peut-être. Notre désir est, à la fois, de présenter des études fouillées pour le chrétien avancé, mais aussi des explications de termes, de langage, pour ceux qui ne connaissent pas notre langue d’une manière approfondie.

A titre d’essai, nous ferons parvenir un certain nombre d’exemplaires au monde francophone d’outre-mer. Il faudra ainsi tenir compte de ce champ de diffusion.

De divers côtés, sinon dans nos vieux pays, on demande, en effet, une littérature chrétienne plus abondante, basée sur la Bible, la Parole de Dieu. Quelques-uns d’entre nous ont cru devoir répondre à ce désir. Nous plaçons ces cahiers sous le regard du «Chef», demandant à Dieu sa bénédiction pour rendre témoignage à la Vérité.

Les éditeurs

Où nous mène la formidable évolution qui soulève le monde chrétien tout entier? En cette période d’après le Concile du Vatican Il, il est utile de dresser un bilan des faits, même provisoire, et de procéder à un tour d’horizon général.

Eléments positifs de l’évolution catholique: Incontestablement, des mouvements intéressants se font sentir dans l’Eglise romaine: étude et diffusion de la Bible en voie de développement, dialogue engagé avec les autres confessions, reconnaissance du fait que les communautés des «frères séparés» protestants peuvent porter le titre d’églises, admission d’une part de responsabilité dans la rupture du XVIe siècle. Au cours du Concile du Vatican Il, l’opinion a été exprimée à maintes reprises que l’Eglise catholique avait besoin d’un renouveau si elle voulait réellement entreprendre le dialogue avec les églises non-romaines. Il y eut des discussions très libres, suivies de votes positifs impressionnants, par exemple sur la collégialité des évêques gouvernant l’Eglise avec le pape, l’usage de la langue vulgaire dans le culte, l’oecuménisme, la liberté religieuse, la limitation des naissances, le peuple juif, l’Ecriture Sainte et la Tradition, etc.

Fin décevante de Vatican Il: Rappelons quelques faits justifiant cette impression de l’ensemble des observateurs non catholiques.

La collégialité des évêques doit être entendue de telle manière que la primauté du pape demeure intacte. La structure monarchique de l’Eglise romaine n’en sera pas affectée, le pape reste le souverain absolu. Le collège épiscopal n’a aucune autorité sans ce dernier. Paul VI, dans son discours d’ouverture à la troisième session, ne s’en est pas référé moins de sept fois à sa primauté, et le mot-clé qu’il a constamment utilisé était celui de «hiérarchie sacrée». Le pasteur G. Richard-Molard estime qu’un tel discours «ne peut guère qu’hérisser la plupart des chrétiens non catholiques romains» («Messager Social», 10 déc.; S. CE- P. I., 1er oct.; 24 sept. 1964).

Il est clair, selon le même pasteur, «que l’Eglise catholique est toujours placée sous l’unique pouvoir de l’Eglise romaine. Or, il ne s’agit pas là d’une découverte de La Palice, mais d’une situation, chaque jour plus insupportable pour les catholiques eux-mêmes. Cette direction totalitaire italienne, ou pire encore, romanisée, possède encore tous les leviers de commande» («Christianisme au XXe siècle», 29 oct. 1964). Cela n’empêche pas qu’une seconde force «se manifeste par l’esprit nouveau qui anime une partie toujours plus large du catholicisme non italien. Il ne faut pas s’imaginer que cet esprit ait changé en quoi que ce soit la masse, mais il passe sur quelques centaines d’évêques, sur de nombreux prêtres et sur une élite de laïcs» (ibid.).

La Vierge Marie a été proclamée Mère de l’Eglise, sans l’avis des pères conciliaires, par Paul VI, qui lui a consacré la moitié de son discours de clôture {cf. «Chrétien Evangélique», déc. 1964, p. 5). Cette proclamation «a détruit tous les efforts des pères conciliaires qui. .. s’étaient ingéniés à éviter autant que possible les déclarations de nature à. ..donner de l’extension au dogme marial et à choquer les protestants» {«Christ U. Welt», cité par S. CE. P. I., 3 déc. 1964).

Le 11 octobre 1963, le pape a terminé une allocution aux pères du Concile et aux fidèles par cette prière à la Sainte Vierge: «O Marie, nous vous prions pour nos frères encore séparés de notre famille catholique. Voyez comment, parmi eux, une phalange glorieuse célèbre votre culte avec fidélité et amour. Voyez comment parmi d’autres, si résolus à se dire chrétiens, commence à renaître aujourd’hui votre souvenir et votre culte, ô Vierge très bonne. Appelez avec nous tous ces fils, qui sont vôtres, à la même unité sous votre protection maternelle et céleste» («Documentation Catholique», 3 novembre 1963).

Le cardinal Doepfner, de Munich, dont les interventions au Concile ont été souvent remarquées, vient de déclarer à son tour: «Amoindrir dans l’Eglise le culte de la Vierge Marie serait un malentendu et une mauvaise interprétation des enseignements du Concile. ..Nous voulons approfondir et enraciner encore plus fort dans ce mystère du Christ le riche héritage laissé à l’Eglise par la Vierge Marie. Elle a un grand rôle à jouer dans l’Eglise, qui voit en elle son image originelle» {«Figaro», 28 déc. 1964).

Le dogme romain: Dans son livre récent sur l’Unité, le cardinal Béa répète des dizaines de fois: 1°) que l’enseignement romain, étant infaillible, ne saurait subir dans son essence aucune modification; 2°) que l’Eglise catholique étant la seule vraie Eglise du Christ, l’unité finale ne peut être envisagée que par le retour de tous les baptisés orthodoxes et protestants au bercail du successeur de saint Pierre. Ce caractère intangible du dogme catholique n’a cessé d’être proclamé clairement par Jean XXIII, Paul VI et tous les porte-parole de Rome. Le professeur E. Schlink, observateur de l’Eglise Evangélique d’Allemagne à Vatican Il, après avoir noté que les délibérations conciliaires sont « révolutionnaires» pour l’Eglise romaine, ajoute: «Aucune des resolutions jusqu’ici adoptées n’a «rapporté, modifié ou même réinterprété de manière satisfaisante un seul des dogmes qui divisent la chrétienté » (S. CE. P. I., 17 déc.1964).

Cela n’a pas empêché le professeur de théologie protestant O. Cullmann de déclarer que Vatican Il «n’a fermé aucune porte ». Dans une interview accordée au journal «Le Monde », M. Cullmann reconnaît que les textes élaborés au Concile sont décevants, car la plupart sont des textes de compromis. Le Concile actuel est lié par celui du Vatican I (en 1870, où fut proclamée l’infallibilité pontificale), et par les dogmes mariaux antérieurs, inchangeables eux aussi. Mais il ajoute: «Je ne partage pas le pessimisme de certains qui s’exprime dans ce slogan: «II ne sortira rien de ce Concile! » Tous les textes sont formulés de telle sorte qu’aucune porte n’est fermée, et qu’ils ne seront pas un obstacle à la future discussion entre catholiques ni au dialogue avec les non-catholiques, comme le sont les décisions des Conciles antérieurs » (cité par «Vie Protestante », 23 oct. 1964). -Puisque les dogmes romains sont infaillibles (voir les anathèmes du Concile de Trente), on se demande sur quoi porte la discussion. ..Si la porte n’est pas fermée, elle ne l’est qu’à sens unique et ne nous paraît conduire qu’au bercail de saint Pierre.

(à suivre)
Extrait avec autorisation du périodique «Le Chrétien évangélique »

(2 Tim.1, 7-9)

«Dieu ne nous a pas donné un esprit de timidité, mais de force, d’amour e! de prudence.»

Timide = qui manque de hardiesse et d’assurance, dit le dictionnaire. Dieu, en vue du but qu’il s’est proposé, nous a adressé une «VOCATION SAINTE», et pour cette vocation, il nous revêt:

de force – par quoi nous devons comprendre force de caractère, maîtrise de soi, tranquillité d’esprit, toutes choses qui sont contraires à la timidité. Une stabilité nouvelle, créée par le Saint-Esprit de Dieu qui nous donne l’assurance du salut; un contrôle de soi-même qui peut ne pas être naturel, mais qui est le résultat du travail de cet Esprit.

d’amour – de compréhension, de compassion, de pardon, amour qui n’est pas mollesse, ni faiblesse, mais qui prend part aux malheurs du prochain, qui comprend le pécheur et repousse le péché.

de prudence – mieux encore discipline personnelle, d’intelligence avertie, de jugement balancé, nuancé, sans laisser-aller.

Etes-vous craintif de nature, manquez-vous d’assurance, avez-vous ce qu’on appelle un complexe d’infériorité, craignez-vous de vous affirmer? Lisez les lettres à Timothée. C’était un timide de nature, et l’apôtre l’encouragea. Notez ceci: Dieu DONNE UN AUTRE ESPRIT que celui que vous aviez précédemment. Il donne gratuitement. Alors, demandez, priez. Il vous DONNERA.

Le but de nos études est de faire connaître et comprendre (Ps. 82, 5) les pensées de Dieu révélées dans sa Parole, afin de vivre dans la lumière. Dans un monde où Satan règne pour obscurcir la vérité, voire même la cacher, il importe que le juste – sauvé par la foi en Jésus-Christ – connaisse «les fondements» de la vérité divine.

Les lignes suivantes ne veulent être qu’un canevas de «la saine doctrine», telle que la Parole de Dieu nous la montre. Cet enseignement est à la fois christologique (Matth. 7, 28; 1 Cor. 2, 1-2) et apostolique (Act. 2, 42) ; il comprend l’ensemble des vérités divines.

I L’INSPIRATION VERBALE DE LA BIBLE

La pierre de touche de tout ce qui suit est la doctrine de l’inspiration des Ecritures. «Toute Ecriture est inspirée de Dieu» (2 Tim. 3, 16). Nous possédons aujourd’hui suffisamment de preuves, devant lesquelles tout homme sincère doit s’incliner. La Bible est la révélation de Dieu à l’égard de l’homme. Ce n’est pas un livre ecclésiastique quelconque, ni un ouvrage symbolique ou philosophique. C’est simplement «la Parole de Dieu» qui ne se laisse pas discuter. Des hommes de Dieu, poussés par l’Esprit, rédigèrent les 66 livres de cette divine Bibliothèque (2 Pi. 1, 21 ). Tout en gardant leur caractère et leur personnalité, ils furent de simples véhicules utilisés pour transmettre intégralement les pensées divines. C’est un miracle et un miracle ne s’explique pas. On peut l’accepter ou le rejeter; mais le fait est là.

Il LA TRINITÉ DE DIEU

Il en est de ce terme comme d’autres: la doctrine de la trinité de Dieu se trouve clairement révélée dans la Bible, bien que cette expression n’y soit pas mentionnée. Lucien déjà, rhéteur et philosophe grec du 2me siècle, fait confesser le chrétien dans son «Philopatris»: «le Dieu exalté …Fils du Père, Esprit procédant du Père, l’Un d’entre les Trois et Trois d’entre Un.» Le terme même fut employé formellement pour la première fois lors du synode en 317 à Alexandrie.

Cela ne signifie rien d’autres que tri-unité. La déité est une trinité, une unité qui possède 3 personnes distinctes ayant la même vie et la même essence.

L’ANCIEN TESTAMENT

Nous y voyons une révélation progressive qui trouve sa complète manifestation dans le Nouveau Testament. Des allusions claires et sans équivoques devaient ouvrir les yeux des personnes pieuses du temps du Seigneur.

Gen. 1,1: «Au commencement Dieu.» Ce terme «ELOHIM» est au pluriel et Moïse l’emploie quelque 500 fois. A remarquer qu’à chaque reprise le verbe qui l’accompagne est au singulier, ce qui prouve bien l’unité dans la pluralité des Personnes de la Déité.
Gen. 1,26: «Et Dieu dit: Faisons l’homme selon notre ressemblance»
Gen. 3, 22: «Voici l’homme est devenu comme l’un de nous»
Es. 48, 16: «Le Seigneur l’Eternel» – Dieu le Père
«m’a envoyé» – Dieu le Fils
«et son Esprit» -Dieu le Saint-Esprit
Zach. 12, 10: «Et je répandrai» -Dieu le Père
«un esprit de grâce» – Dieu le Saint-Esprit
«ils se lamenteront sur lui» -Dieu le Fils

LE NOUVEAU TESTAMENT

Il dévoile clairement cette vérité et nous confirme que la déité se compose de 3 Personnes: Dieu le Père, Dieu le Fils et Dieu le Saint- Esprit (Matth. 28, 19; Jean 1:1; Jean 5:3-4; Jean 8:54).

La trinité de Dieu est déjà engagée lors du baptême du Seigneur (Matth. 3, 13-17). On ne peut, à ce sujet, s’exprimer plus clairement que le Seigneur le faisait dans Jean 14:16-26: «Mais le Consolateur, l’Esprit-Saint (3ème Personne) que le Père (1ère Personne) enverra en mon nom (2ème Personne).»

La grande bénédiction apostolique nous laisse «la grâce du Seigneur Jésus-Christ», «l’amour de Dieu» et «la communion du Saint-Esprit» (2 Cor. 13, 13).

D’ailleurs, l’homme lui-même est une trinité composée de l’esprit, de l’âme et du corps. Il est attaqué par une autre trinité: le monde autour de lui, la chair en lui, et le diable au-dessous de lui. La loi du péché en lui est également représentée par une trinité:la convoitise de la chair, la convoitise des yeux et l’orgueil de la vie. Et, enfin, il peut être sauvé par la trinité divine: Dieu le Père, Dieu le Fils et Dieu le Saint-Esprit.

III JÉSUS-CHRIST

1. Sa Divinité

Jean 1, 1-3 suffirait pour établir cette vérité bénie:
Au commencement était la Parole» (le Verbe dans son existence éternelle)
cet la Parole était auprès de Dieu» (le Verbe dans son existence personnelle)
et la Parole était Dieu» (le Verbe dans son essence divine)

2. Son incarnation

Il est «Dieu manifesté en chair» (1 Tim. 3, 16). Ce mystère, dans lequel même les anges désirent plonger leurs regards, nous a été révélé. Les 7 degrés de son abnégation nous sont donnés en Phil. 2, 7-9. Aucune difficulté n’est inconnue du Seigneur qui a été tenté comme nous; Il peut donc nous accorder miséricorde et secours au moment opportun (Hébr. 4, 15-16). Ami qui souffres, confie-toi en Lui, car son nom est «Merveilleux».

3. Son CEuvre rédemptrice

Rom. 4, 25 dit: «Jésus, notre Sauveur, lequel a été livré pour nos fautes et a été ressuscité pour notre justification».
L’Ancien Testament y fait continuellement allusion (Ex. 12, Ps.22, Es.53).
Les Evangiles en sont la réalisation
Les Actes le proclament
Les Epîtres l’expliquent
L’Apocalypse, enfin, décrit la destruction de ceux qui ont rejeté cette oeuvre.

(à suivre)